Avis n° 113 (2010-2011) de M. Alain MILON , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 18 novembre 2010

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N° 113

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2010

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2011 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME V

SANTÉ

Par M. Alain MILON,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Muguette Dini , présidente ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mme Annie David, M. Gérard Dériot, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Jean-Marie Vanlerenberghe , vice-présidents ; MM. Nicolas About, François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger , secrétaires ; M. Alain Vasselle, rapporteur général ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Yves Daudigny, Mmes Christiane Demontès, Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Adrien Giraud, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Jean-Louis Lorrain, Alain Milon, Mmes Isabelle Pasquet, Anne-Marie Payet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, François Vendasi, André Villiers.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 2824, 2857, 2859 à 2865 et T.A. 555

Sénat : 110 et 111 (annexe n° 26 ) (2010-2011)

Les crédits de la mission « Santé » pour 2011

Programmes et actions

Demande de crédits
de paiement pour 2011
(en euros)

Variation par rapport aux crédits ouverts en 2010 à périmètre reconstitué

204

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

583 391 919

- 4,7 %

11

Pilotage de la politique de santé publique

86 084 595

- 1,95 %

12

Accès à la santé et éducation à la santé

31 570 000

- 11,8 %

13

Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins

9 440 000

- 21,4 %

14

Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades

69 360 000

+ 23,4 %

15

Prévention des risques liés à l'environnement, au travail et à l'alimentation

19 450 000

-19,6 %

16

Réponse aux alertes et gestion
des urgences, des situations exceptionnelles et des crises sanitaires

21 300 000

- 66,2 %

17

Qualité, sécurité et gestion des produits de santé et du corps humain

13 380 000

- 44,4 %

18

Projets régionaux de santé

189 359 000

+ 0,9 %

19

Modernisation de l'offre de soins

143 448 324

+ 18 %

183

Protection maladie

638 000 000

+ 9 %

01

Accès à la protection maladie complémentaire

0

0 %

02

Aide médicale de l'Etat

588 000 000

+ 9,9 %

03

Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante

50 000 000

0 %

Total mission Santé

1 221 391 919

+ 2 %

Evolution prévisionnelle des crédits de la mission

(en millions d'euros)

Mission/
Programme

2010

2011

2012

2013

Santé

1 197,2

1 221,4

1 225,8

1 223,6

Les crédits pour 2010 sont les crédits ouverts, les crédits pour 2011 sont les crédits demandés
et les crédits pour 2012 et 2013 sont ceux prévus par le programme annuel de performance annexé au PLF 2009.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La structure de la mission santé évolue en conséquence de la loi HPST du 21 juillet 2009 1 ( * ) . Le recentrage de l'action territoriale en matière sanitaire autour des agences régionales de santé (ARS) a ainsi conduit à la fusion de deux des trois programmes qui constituaient jusqu'à présent la mission. Le programme n° 171 « Offre de soins et qualité du système de soins » et le programme n° 204 « Prévention et sécurité sanitaire » sont regroupés pour former un nouveau programme 204 intitulé « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ». Comme le soulignait Roselyne Bachelot-Narquin, alors ministre de la santé, lors de la présentation des crédits de la mission : « Cette fusion permet de regrouper sur un même programme l'ensemble des crédits (...) destinés au financement des politiques de santé mises en oeuvre par les ARS. » . Elle autorise également une plus grande souplesse dans la gestion des crédits, ce qui est susceptible de permettre une meilleure adaptation aux besoins identifiés par le Parlement.

A l'inverse, les crédits relatifs au fonctionnement des ARS figurant au sein du programme n° 171 ont été transférés vers la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » (programme n° 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales »), qui regroupe ainsi l'ensemble des concours de l'Etat au fonctionnement des ARS.

Dans l'ensemble, les crédits de paiement demandés pour 2011 sont en progression de 2%. Mais ceux du programme Santé baissent de 4,7 % , ce qui constitue une première étape dans la réduction, décidée par le Premier ministre, de 10 % des dépenses à l'horizon 2013.

L'objectif ainsi fixé est conforme à la volonté de maîtriser les dépenses de l'Etat et d'inciter l'administration et les opérateurs à la recherche permanente des meilleurs modes de gestion. Il faut en effet rompre avec l'idée que l'augmentation des dépenses en matière de santé est un fait inéluctable. C'est l'efficacité de la dépense qui importe, plus que son montant. Le devoir des représentants de la Nation est de veiller à ce que l'augmentation des dépenses, et donc à terme des prélèvements fiscaux, soit pleinement justifiée. Elle ne peut être qu'un ultime recours.

Il convient dès lors de s'interroger sur les critères d'efficacité des politiques publiques. Les indicateurs figurant dans le projet annuel de performance permettent le suivi sur une longue période d'objectifs quantifiables. Ils sont néanmoins trop rigides pour prendre en compte l'évolution des attentes de nos concitoyens, spécialement en ce qui concerne la sécurité des produits de santé. Si la réduction progressive des crédits est une mesure saine, elle doit être conduite de manière à permettre aux autorités sanitaires de répondre à ces attentes, sous peine de susciter incompréhension et opposition globale à l'action de limitation des déficits. Pour votre rapporteur, le projet de budget pour 2011 est ainsi l'occasion de réaffirmer trois priorités :

- garantir les moyens d'action des agences sanitaires face à l'élargissement de leurs missions ;

- renforcer la légitimité des agences en garantissant leur indépendance ;

- réaffirmer la vocation sanitaire de l'aide médicale d'Etat (AME).

I. PRÉSERVER LES MOYENS D'ACTION DES AGENCES SANITAIRES

La commission des affaires sociales a, à maintes reprises, souligné le besoin de mise en cohérence, voire de rationalisation, du système des agences sanitaires. Le comité d'animation du système d'agence (Casa), qui réunit les agences sanitaires autour du directeur général de la santé et auquel est associée la Haute Autorité de santé, a fait la preuve de son efficacité depuis sa mise en place en mai 2008, notamment en permettant un dialogue plus facile entre l'ensemble des opérateurs et l'administration centrale du ministère. Surtout, l'intérêt du rapprochement entre agences est désormais prouvé et il est important de continuer à clarifier la répartition des compétences entre elles. Mais ces efforts ne doivent pas conduire à remettre en cause l'exercice des missions confiées aux différents opérateurs.

A. UN IMPORTANT TRAVAIL DE RATIONALISATION DU SYSTÈME D'AGENCES

Le concept d'agence a été expérimenté dès 1988-1989 avec la création des premières agences de lutte et de recherche sur le Sida et s'est imposé avec l'invention des premières agences de sécurité sanitaire en 1993. Une série de textes législatifs, entre 1998 et 2004, a ensuite donné naissance à un foisonnement d'agences. Ainsi, l'institut de veille sanitaire (InVS) et l'établissement français du sang (EFS) ont été créés en 1998, l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) en 1999, l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) en 2001, l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) en 2002, l'agence de la biomédecine (ABM), l'institut national du cancer (INCa) et la Haute Autorité de santé (HAS) en 2004. Le Haut Conseil de la santé publique a également été créé à cette date.

Après cette période de multiplication rapide d'organismes assumant des compétences auparavant dévolues à la direction générale de la santé, trois critiques principales ont été adressés à ces organismes. La première, formulée dès 1997 par le Sénat, est celle du « syndrome du lampadaire » qui pousse à se désintéresser des risques qui n'entrent pas dans le champ de compétences d'une agence spécialisée. La difficulté d'obtenir un véritable engagement de l'Etat sur les sujets de santé publique comme la santé mentale, pour lesquels une instance spécifique semblable à l'INCa n'a pas été créée, a pu conforter cette impression. La deuxième critique est celle du gaspillage d'effectifs et de moyens. La troisième, qui dans les fait s'est avérée la plus fondée, est celle du chevauchement des compétences.

Ces constatations ont suscité un mouvement de regroupement des agences qui doit être poursuivi.

1. La mise en place réussie de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail

L'agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), résultat de la fusion de l'Afssa et de l'Afsset, a été créée par ordonnance 2 ( * ) en application de l'article 115 de la loi HPST. Elle est devenue juridiquement opérationnelle au 1 er juillet 2010, à la suite de la parution du décret d'application 3 ( * ) s'y rapportant.

La réussite de cette fusion dépendait de la capacité à répondre à plusieurs questions. Tout d'abord, comment concilier les cultures des agences préexistantes ? L'Afssa et l'Afsset, bien qu'étant des structures d'expertise intervenant dans des domaines très proches, correspondaient à deux modèles très différents : l'Afssa, appuyée sur ses laboratoires qui regroupaient quelque huit cents chercheurs, était d'abord tournée vers ses compétences internes qui devaient fournir l'expertise et l'imposer comme référence ; l'Afsset, à l'inverse, tirait sa légitimité de son ouverture tant vers les acteurs de la société civile, représentés au sein de son conseil d'administration, que vers des experts extérieurs à l'agence puisque pour cent cinquante salariés, elle employait quatre cents experts correspondants.

La deuxième question était celle de la gouvernance de la nouvelle agence. Avec quatre ministères de tutelle (agriculture, environnement, santé et travail), la nouvelle entité risquait d'être tiraillée entre des objectifs différents. Cette difficulté était aggravée par la crainte de la perte de la spécificité et donc de l'intérêt de la mission confiée à l'Afsset en matière de santé au travail. Le risque était celui d'un regroupement de la santé au travail avec d'autres thématiques sanitaires, sous la forme d'un pôle de compétences au sein de l'établissement issu de la fusion. Dès lors, les crédits alloués à la recherche en matière de santé au travail étaient susceptibles d'être captés par les laboratoires de l'Afssa, principalement consacrés à la sécurité alimentaire ou environnementale.

Enfin la dernière question était celle de la confusion entre les compétences d'expertise et celles de gestion. La crédibilité de l'Anses, comme de toutes les agences, repose sur l'indépendance de l'expertise fournie, ce qui suppose qu'il n'y ait aucune interférence avec la gestion d'un domaine sanitaire. Or, parmi les compétences héritées de l'Afssa figurait la régulation du médicament vétérinaire. Dès lors, l'Anses se trouvait en position de prendre des mesures de maintien ou de retrait du marché de produits sur lesquelles ses laboratoire pouvaient par ailleurs être conduits à mener des études. Le risque de remise en cause de l'impartialité de l'agence étaitt donc réel, que les recherches menées soient reflétées par les décisions prises en matière de régulation ou non.

Cette dernière question n'est à ce jour pas réglée de manière satisfaisante, et votre rapporteur maintient que le transfert de la régulation du médicament vétérinaire à l'Afssaps serait une solution à la fois plus cohérente et plus transparente.

Les autres sujets d'inquiétude, en revanche, ont été dissipés par l'action du directeur de l'Anses, Marc Mortureux, et de son équipe. En ce qui concerne la création d'une culture commune à partir de celle des deux agences antérieures, l'Anses semble engagée dans un renforcement de son rôle d'expertise susceptible de rallier l'ensemble des personnels. La réduction du nombre de postes d'encadrement du fait de la fusion permet ainsi le recrutement de nouveaux chercheurs et les négociations sur l'harmonisation des différents statuts des personnels, bien que complexes, sont conduites dans un climat constructif avec les partenaires sociaux de l'agence. Il serait cependant préférable, afin de faciliter la gestion des différents cadres de fonctionnaires au sein de l'agence, que celle-ci soit à même de gérer leur carrière. Sans aller jusqu'à un détachement de leur corps d'origine, votre rapporteur suggère que les modalités d'avancement pour les personnels affectés à l'Anses puissent reposer sur les recommandations des instances paritaires de l'agence.

Les autorités de tutelle ont, pour leur part, accompagné la mise en place de l'Anses en ne réduisant pas leur dotation, ce qui est un effort remarquable dans le contexte actuel de restriction budgétaire. Les actions de restructuration liées à la mise en oeuvre de l'Anses, notamment la réorganisation du système d'information et son projet immobilier tendant à réunir ses trois implantations sur un site unique à Maisons-Alfort, ainsi que le dialogue social, peuvent ainsi être conduits dans de bonnes conditions. Votre rapporteur regrette toutefois que l'Anses se soit vu refuser la possibilité de financer la construction de son nouveau siège par la voie de l'emprunt, alors que cette décision avait été prise en 2010, avant l'interdiction par le Premier ministre de nouveaux emprunts pour les opérateurs de l'Etat. Ce refus oblige l'Anses à s'engager dans un bail emphytéotique dont le coût pourrait s'avérer supérieur à celui d'un emprunt.

Les nouvelles compétences de l'Anses résultant de l'intégration en son sein de la fondation Santé et Radiofréquences ont également été renforcées par l'adoption, à l'Assemblée nationale, d'une taxe supplémentaire sur les industries de réseau radioélectrique, dont le produit est partiellement affecté à l'agence. Votre rapporteur espère que la pratique de transférer des ressources à hauteur de la charge découlant des missions sera poursuivie pour l'ensemble des agences.

Enfin, un équilibre a pu être trouvé entre l'existence de laboratoires liés à l'Afssa et la pratique d'appel d'offres de l'Afsset. Les laboratoires de l'agence peuvent désormais répondre aux appels à projets de recherche mais, en cas de succès, ces derniers sont financés par des crédit transversaux dégagés par l'Anses et non par ceux prévus pour l'appel à projet. Il n'y a donc pas de risque de captation des crédits liés à la santé au travail par les laboratoires spécialisés dans d'autres domaines.

2. Continuer à clarifier la répartition des compétences

L'exemple de l'Anses montre l'intérêt que peuvent avoir des regroupements d'agences fondés sur les domaines de compétences quand ils sont pleinement élaborés et accompagnés par les pouvoirs publics. La distinction claire entre les compétences de recherche et les compétences de gestion est un enjeu pour l'avenir de l'ensemble des agences et le législateur devra, à l'occasion de la révision des lois de bioéthique, se pencher sur cette question pour l'Afssaps et l'ABM.

Une clarification des compétences est également nécessaire en ce qui concerne le Haut Conseil de la santé publique. Comme l'a souligné le rapport de la commission d'enquête sénatoriale sur la gestion de la grippe A 4 ( * ) , la création de cette institution répond à la préoccupation de donner une assise scientifique incontestable à la politique de santé publique de notre pays. Cette mission de proposition et d'évaluation n'a cependant pas été entièrement satisfaite, comme le montre le rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le bilan du Haut Conseil 5 ( * ) .

Le rapport de l'Igas pointe notamment le problème de positionnement du HCSP par rapport aux directions du ministère de la santé pour le suivi et l'évaluation de la loi de santé publique, le manque de méthodologie dans ses évaluations et le rôle inégal de ses commissions spécialisées, que ce soit en matière d'avis ou de propositions. A l'inverse, sa fonction de conseil des autorités sanitaires apparaît nécessaire et, en période ordinaire, bien assumée, même si l'Igas relève la difficulté objective à en mesurer la qualité et critique la faiblesse des règles appliquées en matière de recrutement des experts. Le Haut Conseil souffre par ailleurs d'un manque dommageable d'infrastructure administrative avec un secrétariat général faiblement doté en moyens.

Une possibilité pour résoudre ces difficultés serait donc de confier à la HAS la détermination des priorités de santé publique ainsi que l'évaluation des politiques menées ; la fonction de conseil permanent des autorités publiques du HCSP serait en revanche confortée par sa réintégration à la direction générale de la santé, le directeur général assumant la présidence du Haut Conseil. Votre rapporteur tient à rappeler l'importance de cette proposition déjà formulée par la commission d'enquête sénatoriale.

B. DES INQUIÉTUDES SUR LA POSSIBILITÉ POUR CERTAINS OPÉRATEURS DE CONDUIRE LEURS MISSIONS

La norme fixée par le Premier ministre de réduction de 10 % des dépenses de fonctionnement et d'intervention à l'horizon 2013 se traduit pour 2011 par une réduction de 5 % en moyenne des crédits alloués aux opérateurs. Ceux-ci sont tous engagés dans la voie d'une optimisation de leur gestion et adhèrent aux impératifs de la rigueur budgétaire. Ainsi la nouvelle réduction des crédits intervient-elle après plusieurs années d'efforts déjà engagés par les opérateurs. Si elle s'inscrit naturellement dans le cadre de l'évolution de certains d'entre eux, elle pose à d'autres des difficultés qu'il ne faut pas sous-estimer. En effet, si des marges de progression peuvent être trouvées, dans certaines limites, en matière de gestion, il leur est particulièrement difficile de limiter leurs dépenses d'intervention. La succession des alertes sanitaires, voire de véritables crises, a montré l'ampleur des inquiétudes de nos concitoyens et la demande d'une expertise publique incontestable en la matière. Les attentes qui reposent sur les opérateurs des politiques de santé n'ont cessé de croître, au point que l'on ne peut raisonnablement espérer parvenir à réduire leurs coûts d'intervention, serait-ce même par la définition de priorités d'action ou la mise en place de processus d'intervention plus efficace.

1. L'institut de veille sanitaire

L'InVS est le coeur de l'épidémiologie française. Il est le seul à pouvoir informer en temps réel les pouvoirs publics de l'apparition de nouveaux risques sanitaires et retracer la propagation d'un virus dans le monde et sur le territoire national. Son bon fonctionnement est donc essentiel en matière d'alerte et de suivi des événements sanitaires et pour la rapidité de réponse des autorités sanitaires aux crises. La commission d'enquête sénatoriale sur la gestion de la grippe A (H1N1), notamment, a souligné le caractère crucial de l'action de l'InVS et des experts qui le composent. Elle a proposé de renforcer ses compétences en améliorant la capacité française en matière de modélisation mathématique des problématiques sanitaires. Par ailleurs, l'InVS a un rôle particulièrement important à jouer dans l'estimation plus précise de la mortalité liée à la grippe saisonnière, qui constitue l'une des demandes les plus importantes de la commission d'enquête.

La situation budgétaire de l'InVS pour 2011 inquiète donc particulièrement votre rapporteur. L'institut ne dispose en effet d'aucune autre ressource que la subvention qu'il reçoit de l'Etat. Réduite l'an prochain de 5 % par rapport à 2010, celle-ci devrait s'élever à 55,5 millions d'euros. En outre, l'InVS sera pénalisé par l'interdiction d'emprunter, qui l'empêchera de financer le projet immobilier de 12 millions d'euros tendant à regrouper ses différentes directions au sein d'un seul établissement à Saint-Maurice. Consciente des difficultés particulières de l'InVS, la DGS a prévu d'abonder ses crédits par des subventions d'investissement accordées par tranches et provenant des disponibilités financières du programme n° 204 issues de gels précédents. Cet expédient ne peut être que temporaire et pourrait s'avérer insuffisant. Il conviendra donc de veiller à ce que l'InVS ne soit pas durablement fragilisé par les réductions cumulées des exercices budgétaires 2011 à 2013.

2. L'établissement français du sang

L'EFS, créé en 2000 afin d'éviter que ne se répète le drame du sang contaminé, « a pour mission d'assurer l'autosuffisance de la France en produits sanguins dans des conditions de sécurité et de qualité optimales » . De mai à octobre 2009, l'établissement a fait l'objet d'un audit dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP). C'est sur la base de ses conclusions qu'un contrat d'objectifs et de performance (Cop) a été signé entre l'EFS et l'Etat pour la période 2010-2013 le 2 septembre 2010. Ses objectifs sont l'autosuffisance nationale en matière de produits sanguins, un haut niveau de sécurité sanitaire et la préservation du caractère éthique du don. L'établissement s'est engagé à réduire son budget de 1,5 % à 2 % par an. Un ambitieux programme de restructuration des plateformes de préparation des produits sanguins a été engagé et devrait permettre de réduire leur nombre de dix-sept à quatre. Par ailleurs, la possibilité de création d'emplois au sein de l'EFS a été encadrée. Parallèlement à la négociation de ce contrat, l'EFS et le ministère avaient jugé nécessaire de décharger l'établissement de la gestion du contentieux lié à l'infection par l'hépatite C survenue à l'époque des établissements de transfusion antérieurs à 2000.

Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2011, il était donc prévu que la gestion du contentieux ainsi que l'indemnisation des victimes seraient confiées à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux (Oniam). Cette solution permettait d'alléger les charges pesant sur l'EFS et d'améliorer l'indemnisation des victimes.

Cependant, l'article 38 du PLFSS, qui vient d'être définitivement adopté par le Parlement, a malheureusement maintenu la situation actuelle. Votre rapporteur partage sur ce point l'analyse du rapporteur général Alain Vasselle. La version initiale du texte visait à améliorer la procédure en déchargeant l'EFS des recours qu'il exerce encore contre les assureurs des anciens centres de transfusion sanguine. Cette rédaction soulevait de graves problèmes car elle limitait les recours de l'Oniam aux cas de faute, alors même que ces recours peuvent aujourd'hui être exercés par l'EFS en l'absence de faute. En l'état actuel du droit, les recours ne nécessitent aucune faute. En outre, par l'article 38 initial, l'Oniam devenait co-responsable du dommage, ce qui est contraire au principe de solidarité nationale en vertu duquel il intervient.

C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité apporter plusieurs modifications au texte lors de son examen par l'Assemblée nationale, en rendant explicite la possibilité d'un recours sans faute et en supprimant la mention de la co-responsabilité du dommage. Cette rédaction, plus claire et plus conforme aux principes du droit actuel, a soulevé l'inquiétude des assureurs qui craignaient d'avoir à prévoir de nouvelles provisions.

Le Gouvernement a donc proposé au Sénat une nouvelle rédaction de cet article, de manière à ne conserver que les améliorations apportées à la procédure d'indemnisation, en renonçant à transférer à l'Oniam les missions de l'EFS. On revient donc bien à la « case départ » pour ce qui est des flux financiers.

Comme le rapporteur général, votre rapporteur estime souhaitable qu'à l'avenir, des articles de cette importance fassent l'objet, avant leur dépôt, d'une préparation plus approfondie. En effet, sur le fond, la disposition adoptée dans le cadre du PLFSS aura pour effet de maintenir la situation actuelle : l'Oniam indemnisera les victimes et sera remboursé par l'EFS, qui exercera les recours à l'encontre des assureurs des anciens centres de transfusion sanguine de la même façon qu'aujourd'hui, avec ou sans faute. Le maintien de cette charge à l'EFS entrave sa politique ambitieuse de réforme et il faut espérer que cette question pourra être définitivement réglée au cours de l'année 2011.

II. GARANTIR L'INDÉPENDANCE DES AGENCES

L'actualité des dernières années en matière sanitaire est malheureusement marquée par une succession de crises liées à l'apparition de virus - chikungunya, grippe aviaire, grippe A (H1N1) - ou aux effets indésirables de produits de santé. Le dispositif de vigilance et de contrôle français est donc particulièrement sollicité. Sa qualité dépend de celle des experts auquel il fait appel, scientifiques et praticiens, qui acceptent de consacrer leur temps à la définition des politiques et des actions publiques. L'expertise publique s'exerce principalement au travers des agences et autorités sanitaires, plus particulièrement de deux d'entre elles : la HAS et l'Afssaps. Elles mènent toutes deux un travail important en manière de gestion des conflits d'intérêt ; celui de la HAS est particulièrement abouti, tandis que des compléments semblent devoir être apportés pour garantir l'Afssaps contre la critique.

A. RENFORCER LA LÉGITIMITÉ ET LA RECONNAISSANCE DE L'EXPERTISE FRANÇAISE

La commission d'enquête sénatoriale sur la gestion de la grippe A (H1N1) a mis en avant la qualité de l'expertise française, mais insisté sur la nécessité de la valoriser et de la préserver de tout soupçon de partialité.

Certains experts sont en effet rémunérés par l'industrie dans le cadre normal du développement des médicaments et des dispositifs médicaux et de leur mise sur le marché. Cette pratique ne pose pas de problème en elle-même, mais suppose un parfait respect des règles de transparence, qui pourraient être renforcées en se fondant sur les normes existant aux Etats-Unis. La question la plus importante est néanmoins celle de l'expertise publique, qui est au coeur de l'action sanitaire de l'Etat et de sa capacité à mener une politique conforme à l'intérêt général. Afin de maintenir son indépendance et son niveau, il est nécessaire de s'attacher à valoriser la fonction d'expert au sein des carrières professionnelles des chercheurs et praticiens, ce qui passe notamment par la mise en place d'une rémunération adéquate.

La commission a formulé plusieurs recommandations à cet effet, et votre rapporteur note avec satisfaction l'engagement à assurer leur suivi que lui a réaffirmé le directeur général de la santé, Didier Houssin. Votre rapporteur souhaite qu'un an après la parution du rapport de la commission sénatoriale d'enquête, un bilan puisse être établi en séance publique sur la mise en oeuvre de ses préconisations.

Recommandations de la commission d'enquête sénatoriale sur la grippe A (H1N1) concernant l'expertise sanitaire française

Renforcement de la qualité de l'expertise sanitaire française

4. Améliorer la capacité française en matière de modélisation mathématique des problématiques sanitaires.

5. Fondre le comité de lutte contre la grippe au sein d'une instance d'expertise compétente pour l'ensemble des maladies infectieuses.

6. Réformer le Haut Conseil de la santé publique :

- en confiant la recommandation des priorités de santé publique et l'évaluation des politiques menées à la Haute Autorité de santé ;

- en confiant, pour renforcer sa fonction de conseil auprès des autorités sanitaires, sa présidence au directeur général de la santé.

7. Assurer la publication de l'ensemble des avis formulés par les experts avec indication du détail des votes.

8. Intégrer des spécialistes de médecine générale aux instances d'expertise pour renforcer la prise en compte des réalités de terrain.

9. Elargir la composition des comités d'expertise aux disciplines non médicales et spécialement aux sciences humaines.

10. Organiser la prise en compte par les pouvoirs publics de l'opinion des scientifiques reconnus qui peuvent comprendre les questions techniques qui se posent, mais dont les carrières se sont déroulées à quelque distance du problème central.

11. Intégrer le plus possible les professionnels de santé de proximité à la mise en oeuvre de la lutte contre la pandémie.

Gestion des conflits d'intérêts

12. Organiser un fichier national des contrats passés entre l'industrie et les médecins tenu par le Conseil national de l'Ordre.

13. Confier l'ensemble du contrôle ainsi que l'application des sanctions à un organisme indépendant et extérieur à la profession médicale. Cet organisme assurerait également la formation des experts sur les liens d'intérêt et sur leurs responsabilités.

14. Renforcer la collaboration entre le comité d'animation du système d'agences et la Haute Autorité de santé pour la définition de normes communes en matière de transparence que ce soit pour les déclarations d'intérêt, le recrutement des experts ou le fonctionnement des instances d'expertise.

15. Confier la présidence de la commission d'autorisation de mise sur le marché de l'Afssaps et de la commission de la transparence de la Haute Autorité de santé, ainsi que des commissions et conseils visés à l'article L. 1451-1 du code de la santé publique, à des personnalités indépendantes sans liens d'intérêt avec l'industrie pharmaceutique.

Valorisation de l'expertise

16. Organiser la place de l'expertise dans une carrière, qu'elle soit publique ou privée.

17. Compenser le temps passé en tant qu'expert, ce qui implique, spécialement pour les experts ayant une activité libérale à plein temps, une augmentation du montant des vacations, voire la mise en place d'une véritable rémunération dans le cas de la participation permanente à un organe.

18. Mettre en place une échelle tarifaire de la participation à l'expertise fondée sur les comparaisons internationales pour assurer l'équité des sommes proposées.

19. Mettre en oeuvre l'obligation d'information systématique des directeurs des établissements publics sur les activités rémunérées effectuées par un médecin hospitalier à temps plein pour l'industrie ou les organismes publics de recherche et d'expertise.

20. Mettre en place, dans chaque CHU, une fondation hospitalo-universitaire de recherche cogérée par l'hôpital et les médecins, afin d'améliorer la transparence des flux financiers entre l'industrie, les établissements et les praticiens.

21. Créer dans chaque service hospitalier un plan d'activité permettant de répartir, pour six mois ou un an, les activités des médecins entre les soins, l'enseignement et la recherche. Ainsi, chaque médecin contribuera de manière équilibrée aux missions de son service.

B. RENFORCER L'AGENCE FRANÇAISE DE SÉCURITÉ SANITAIRE DES PRODUITS DE SANTÉ

La pérennité et la transparence de l'action de l'Afssaps sont essentielles pour le maintien d'un haut niveau de sécurité des médicaments, des dispositifs médicaux et des cosmétiques. Les compétences de l'agence ne cessent de croître, tant du fait du droit national que du droit communautaire, et elle y fait face, depuis sa création en 1998, avec une efficacité toujours accrue. Votre rapporteur n'a aucun doute sur la qualité des décisions prises par l'Afssaps.

Ceci étant, l'épisode dramatique du Mediator rend nécessaire de clarifier le rôle de l'agence dans le cadre de l'interdiction récente de ce médicament, qui a suscité l'attention particulière et légitime de l'opinion publique. Cet événement amène à se pencher de manière plus globale sur les éléments susceptibles de nuire à l'image de l'agence, et plus particulièrement sur son mode de financement.

1. Le cas du Mediator
a) Les éléments ayant fondé la décision de retrait du produit

Dans l'attente du rapport demandé à l'Igas par le ministre en charge de la santé, Xavier Bertrand, votre commission considère n'avoir pas les compétences pour apprécier si le Mediator aurait dû être retiré de la vente plus tôt qu'il ne l'a été. A ce stade, votre rapporteur souhaite simplement présenter les éléments de fait qui lui ont été fournis par Jean Marimbert, directeur général de l'Afssaps.

Le Mediator était le nom commercial d'une molécule, le benfluorex, médicament autorisé en 1974 et commercialisé depuis 1976 pour deux indications : adjuvant du régime adapté dans les hyper-triglycéridémies et traitement des patients diabétiques en surcharge pondérale, en complément d'un régime adapté.

L'Afssaps a suspendu, à compter du 30 novembre 2009, l'AMM de ce médicament, en considérant que la balance bénéfice/risque était désormais négative en raison d'un risque de valvulopathies établi en 2009 par la convergence de données nouvelles venant des signalements de pharmacovigilance, des résultats d'une étude d'efficacité et de sécurité que l'Afssaps avait demandée au laboratoire producteur Servier, ainsi que des résultats d'une étude réalisée dans la région brestoise. Ce faisceau d'éléments qui fonde la position de l'agence était conforté par les résultats d'une étude réalisée par la Cnam à la fin de l'été 2009 et communiquée à l'Afssaps, et qui faisait apparaître, chez les patients diabétiques exposés au benfluorex en 2006, un risque nettement plus élevé d'hospitalisations et d'interventions chirurgicales pour valvulopathies.

Après confirmation de la position de l'Afssaps sur le rapport bénéfice/risque dans le cadre d'une procédure européenne d'harmonisation déclenchée par l'agence, la suspension a été transformée le 20 juillet 2010 en un retrait définitif.

Grâce aux études demandées par l'agence, il est désormais scientifiquement établi que le benfluorex peut susciter ou favoriser l'émergence de ces atteintes valvulaires. Mais l'Afssaps a voulu aller plus loin et essayer de cerner, au moins approximativement, cet impact en demandant à la Cnam une étude à partir des bases de données de remboursements et d'hospitalisations qu'elle gère. Les possibilités d'utilisation de ces bases étaient fortement limitées jusqu'à récemment par des contraintes juridiques et surtout techniques. Leur utilisation pour une étude conjointe entre la Cnam et l'Afssaps ouvre des perspectives importantes pour une articulation renforcée entre la pharmacovigilance fondée sur la notification spontanée des effets indésirables et la pharmaco-épidémiologie.

b) L'analyse scientifique

Contrairement à ce qu'affirment certains commentateurs, il n'était nullement évident avant 2009 qu'il existait un risque de valvulopathie, ni a fortiori de déterminer l'étendue de ce risque. Or l'Afssaps ne peut et ne doit se fonder pour prendre ses décisions que sur des preuves scientifiques solides.

Tout d'abord, votre rapporteur estime, comme l'Afssaps, que la problématique du benfluorex n'était pas identique à celle des médicaments anorexigènes fenfluraminiques de type Isoméride et Ponderal qui ont été retirés du marché par l'agence en 1996 et 1997. Ces produits n'appartiennent pas à la même classe thérapeutique et ils ont des propriétés pharmacologiques et des modes d'action principaux distincts, même s'il existe, entre ces médicaments et le benfluorex, une parenté et des points de recoupement qui devaient retenir et qui ont effectivement retenu l'attention de l'agence, et justifié un suivi attentif du profil de sécurité de ce produit.

A la fin des années 90, ces anorexigènes ont en effet été associés à des effets indésirables graves, principalement des cas d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), et beaucoup plus rarement des cas d'atteintes valvulaires. Les mécanismes de développement de ces effets indésirables n'ont été élucidés qu'après le retrait des anorexigènes, par des études publiées successivement dans les années 2000. Celles-ci ont permis d'expliquer comment ces types d'effets indésirables pouvaient être déclenchés, mais elles ont aussi montré que ces mécanismes n'étaient vraisemblablement pas les mêmes dans les deux cas, HTAP et atteintes valvulaires.

La parenté partielle du benfluorex avec les anorexigènes fenfluraminiques a conduit l'agence à prendre des mesures de minimisation et de suivi du risque. D'une part, dès 1996, les préparations magistrales à base de benfluorex ont été interdites, en vue de limiter le mésusage de ce médicament comme produit amaigrissant. D'autre part, l'agence s'est attachée dès 1998 à suivre attentivement le risque potentiel d'HTAP, et elle a renforcé ce suivi à partir du signalement, en mars 2005, d'un cas en pharmacovigilance.

c) Le suivi du Mediator par l'agence

Pour partie en raison de la parenté entre les deux types de molécules, l'agence a donc, dès sa création, demandé plusieurs études qui ont conduit à limiter l'usage du Médiator.

C'est ainsi qu'elle a refusé en 2000 une demande du laboratoire Servier d'étendre les indications à un traitement de première ligne pour le diabète de type II lorsque le régime n'était pas suffisant pour rétablir à lui seul l'équilibre glycémique, en considérant que la démonstration d'efficacité était insuffisante pour une telle indication. A la suite de cette évaluation, l'agence a commandé au laboratoire la réalisation d'une nouvelle étude évaluant l'efficacité du benfluorex utilisé seul ou en association avec d'autres médicaments pour traiter le diabète.

En 2007, sur la base notamment de cette étude, l'agence a retiré l'indication concernant les hyper-triglycéridémies pour insuffisance de preuve de l'efficacité du médicament. Seule l'indication du benfluorex comme « adjuvant du régime adapté chez les diabétiques avec surcharge pondérale » a été maintenue. Néanmoins, l'agence a demandé au laboratoire une nouvelle étude, selon les standards contemporains de démonstration, pour réévaluer l'efficacité du benfluorex dans la seule indication qui subsistait. Elle consistait à tester sa non-infériorité par rapport à un autre traitement du diabète, la pioglitazone, chez des patients diabétiques par ailleurs insuffisamment équilibrés pour leur diabète par un sulfamide hypoglycémiant (autre médicament antidiabétique). Cette nouvelle étude comportait aussi un volet de sécurité d'emploi (ou de tolérance) dont les résultats connus, en 2009, ont contribué à établir ce risque de valvulopathies.

Mais pour qu'un effet indésirable entraîne la réévaluation d'un médicament, les principes de la pharmacovigilance imposent que le lien entre celui-ci et l'événement signalé soit suffisamment établi. L'autorité judiciaire exerce donc sur les décisions de retrait prononcées par l'agence un contrôle strict qui repose partiellement sur le niveau de preuve dont elle dispose pour étayer sa décision. Tout retrait fondé sur des données épidémiologiques qui ne seraient pas « robustes », au sens scientifique du terme, serait vraisemblablement annulé, et le laboratoire pourrait dès lors prétendre à une indemnisation de la part de l'Etat.

Or, en ce qui concerne les valvulopathies provoquées par le benfluorex, si l'on met à part le cas espagnol publié en 2003, il y a eu en France, avant 2008, un seul cas bien documenté et confirmé par examen anatomopathologique, signalé à Toulouse en 2006 et qui a donné lieu à une publication. Les autres cas signalés en pharmacovigilance n'ont pas été jugés probants par l'Afssaps car lorsqu'ils mentionnaient la présence d'atteinte valvulaire, les cas les plus documentés comportaient d'autres causes possibles que l'effet du benfluorex, par exemple un traitement antérieur par Isoméride.

C'est en 2008 et 2009 que sont apparues plusieurs données nouvelles. Tout d'abord, à la suite du signalement d'un deuxième cas bien documenté observé à Brest, l'Afssaps a déclenché une nouvelle réévaluation du risque, qui a donné lieu à trois passages en commission nationale de pharmacovigilance en quelques mois à partir du printemps 2009. Des cas d'atteintes valvulaires parfois antérieures ont alors été déclarés, notamment en provenance d'Amiens et de Brest, à partir d'une exploitation des données sur les hospitalisations et d'un registre d'échographies. Au total, pas moins de quarante-deux cas ont été signalés entre janvier et novembre 2009, et depuis l'arrêt de commercialisation de novembre 2009, dix-huit cas s'y sont ajoutés, le plus souvent rétrospectifs.

Dans le même temps, les résultats de la deuxième étude demandée par l'agence au laboratoire ont fait notamment ressortir un nombre préoccupant d'anomalies valvulaires après cinquante-deux semaines de traitement. Les résultats de l'étude conduite à Brest, disponibles durant l'été 2009, allaient d'ailleurs dans le même sens. Enfin, et à un moment où la procédure de réévaluation et de suspension était déjà bien avancée, les résultats de la première étude de la Cnam sont venus apporter une confirmation nette du signal émis par toutes les données nouvelles de 2009.

d) Les effets du Mediator sur la santé du malade

Après cette première étude de la Cnam, une seconde a évalué les effets du benfluorex sur la santé des malades auxquels il a été prescrit pendant toute la durée de sa commercialisation. On peut tenir pour certain que des décès ont pu être provoqués ou favorisés par l'utilisation de benfluorex sur la période d'un peu plus de trente ans pendant laquelle le produit a été disponible (1976-2009). L'ordre de grandeur, de l'ordre d'au moins cinq cents décès, dépend des méthodes et hypothèses de calcul retenues.

Face à cette situation dramatique où un médicament a causé la mort de plusieurs centaines de personnes, il importe de souligner, avec Jean Marimbert, qu'« il est des situations dans lesquelles un système de pharmacovigilance, même organisé de façon structurée comme il l'est chez nous, peut ne produire qu'un signal faible voire très faible pour un risque qui s'avère ensuite plus net. C'est le cas en particulier lorsque l'effet indésirable est relativement répandu dans la population générale, et que les patients concernés ont d'autres pathologies proches ou similaires qui peuvent conduire le professionnel de santé à ne pas penser faire le lien entre l'effet indésirable et la prise du médicament » .

Le cas de benfluorex illustre bien la répercussion de ces «effets confondants», puisque l'examen des données de la Cnam montre que la plupart des patients sous benfluorex hospitalisés et le cas échéant opérés pour des atteintes valvulaires étaient en affection de longue durée (ALD), au titre d'autres affections cardiovasculaires ou bien d'un diabète chronique susceptible d'engendrer des troubles cardiovasculaires. Dans un tel contexte, la possibilité de recourir rapidement et facilement à des études utilisant de grandes bases de données pour confirmer ou non le signal faible est absolument cruciale. C'est pourquoi l'Afssaps s'est dotée depuis trois ans d'une structure interne tournée vers la pharmaco-épidémiologie, apte non seulement à identifier des besoins d'études dans le cadre des plans de gestion des risques mais aussi à dialoguer avec des équipes extérieures et notamment avec la Cnam pour faire réaliser des études confirmatives. L'agence a également constitué, en 2008, un groupe de travail spécialisé associant des scientifiques de ses propres équipes et des experts pharmacovigilants et pharmaco-épidémiologistes issus d'horizons et d'organismes divers. Les freins juridiques et techniques qui entravaient l'utilisation des bases de données de l'assurance maladie étant progressivement levés, la coopération opérationnelle entre l'Afssaps et la Cnam, engagée récemment sur des sujets comme benfluorex ou Gardasil, va pouvoir se développer plus largement, dans le cadre d'une convention que nous sommes en train de mettre au point et qui sera signée dans les prochaines semaines. » 6 ( * )

2. Les ressources financières de l'agence

Les ressources financières de l'Afssaps ont fait l'objet de critiques renouvelées à l'occasion du retrait du Mediator. L'essentiel des recettes de l'agence proviennent en effet du produit de taxes et redevances perçues sur l'industrie pharmaceutiques et les dispositifs médicaux : elles représentaient 85,3 % de ses recettes en 2010 ; du fait de l'absence de subvention de l'Etat dans le PLF pour 2011, elles devraient même constituer cette année 91,6 % de son budget.

Evolution du rendement des différentes taxes entre 2009 et 2010
et leurs prévisions pour 2011

Recettes de fonctionnement

Comptes financiers
(CF)

Budget prévisionnel
(BF)

CF 2008

CF 2009

BP 2010

CF anticipé
2010

BP 2011

Taxe annuelle médicaments

20 311

22 363

23 000

23 753

23 991

Taxe annuelle médicaments bénéficiant
d'une autorisation d'importation parallèle

2

7

Taxe annuelle sur les dispositifs médicaux
et sur les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro

15 730

16 297

16 300

17 158

17 330

Contrôle qualité des analyses biomédicales

2 381

2 377

2 407

2 375

2 041

Droit progressif sur demandes d'autorisation de mise sur le marché

39 135

41 463

38 992

40 335

41 165

Enregistrement produits homéopathiques

68

49

100

104

105

Enregistrement médicaments à base de plantes

583

101

102

Redevance visas de publicité

5 309

4 916

5 600

4 831

5 000

Demandes de certificats matières premières

24

70

144

106

100

Taxe sur les demandes d'autorisation d'importation parallèle

70

182

56

260

100

Redevance dispositifs médicaux

Redevance inscription médicaments remboursables

Certificats et déclarations d'exportation

Taxe sur les recherches biomédicales

2 424

6

Total taxes

85 454

87 730

87 182

89 024

89 993

Substances références de la pharmacopée

10

7

9

10

10

Contrôle en vue de la libération de lots

4 437

4 688

4 634

4 500

4 500

Libération de lots immunologiques

449

473

395

400

400

Total redevances

4 896

5 863

5 038

4 910

4 910

Recettes de l'agence européenne des médicaments
et de l'organisation mondiale de la santé

7 171

6 481

6 500

6 601

7 100

Autres recettes

1 093

849

924

1 269

882

Total ventes

8 265

6 634

7 424

7 870

7 982

Subvention de l'Etat

8 372

9 154

9 860

9 788

Autres subventions

489

96

72

90

150

Total subventions

8 861

9 250

9 932

9 878

150

Recettes financières

1 114

215

400

300

250

Recettes exceptionnelles et report de provisions

596

1 514

212

489

280

Total produits financiers, exceptionnels et report de provisions

1 710

1 729

612

789

530

Total recettes

109 185

111 206

110 188

112 470

103 505

Source : Afssaps

Ce système de financement a été critiqué parce qu'il crée un lien financier entre l'agence et l'industrie dont elle doit contrôler les produits. Plusieurs aspects doivent cependant être pris en compte pour mesurer la pertinence de cette critique.

Il convient tout d'abord de souligner que les recettes de l'agence sont principalement constituées de taxes, qui sont assises sur l'activité des industriels, et dont l'assiette et le taux sont définis par la loi et le règlement. Il n'y a donc aucune négociation possible entre les producteurs et l'Afssaps sur les montants qui lui sont dus. De plus, s'il est vrai que l'agence collecte directement les sommes qui lui sont dues, toutes sont versées entre les mains d'un comptable public responsable de ces sommes de la même manière que l'est un trésorier au sein de l'administration fiscale. Les soupçons de collusion financière entre l'Afssaps et l'industrie en raison des taxes perçues sont donc infondés.

L'affectation de taxes à l'Afssaps a également permis le développement de son activité. Leur produit croissant a mis l'agence en position d'assurer les missions de plus en plus nombreuses qui lui étaient confiées. Il permet surtout à l'agence de continuer à exercer ses missions indépendamment des contraintes du budget de l'Etat et de la variation de la subvention qui lui est accordée : le montant de celle-ci a varié de 15 % au cours des trois dernières années et elle devrait disparaître en 2011. Supprimer l'affectation des taxes à l'agence et lui attribuer une subvention pour couvrir l'essentiel de ses besoins serait donc prendre le risque de l'affaiblir financièrement au point de la fragiliser dans l'exercice de ses missions. Une telle attitude serait irresponsable car dangereuse pour la mise en oeuvre de l'ensemble des dispositions qui doivent garantir la sécurité des médicaments et dispositifs médicaux.

Sans revenir sur l'affectation des taxes et redevances à l'Afssaps, une solution tendant à isoler l'agence des flux financiers en provenance des entreprises pourrait être mise en place. Il s'agirait de confier le recouvrement des taxes et redevances concernées à l'administration fiscale qui serait chargée de les reverser ensuite à l'agence. Ceci aurait un coût pour l'Afssaps, correspondant à l'amputation de ses recettes des frais de recouvrement par l'administration fiscale. Votre rapporteur estime néanmoins que le contexte actuel de remise en cause de l'agence peut justifier cette mesure et la commission des affaires sociales a adopté un amendement en ce sens .

Cette mesure doit cependant avoir une double contrepartie financière. La première est la mise en place d'une recette tendant à compenser la charge que représente pour l'Afssaps le suivi de la cosméto-vigilance. Cette mission sera bientôt être encore renforcée par l'application du règlement européen du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques et instaurant une déclaration obligatoire par l'industrie des effets indésirables et graves et une coopération européenne en la matière 7 ( * ) . Depuis l'origine, cette activité de contrôle n'est pas financée par une taxe spécifique sur l'industrie cosmétique, ce qui aboutit à faire assurer les frais de la cosmétovigilance par les laboratoires pharmaceutiques. Cette situation n'a aucune justification, spécialement dans un contexte de restrictions budgétaires. La commission propose donc une nouvelle fois, à l'initiative de son rapporteur, un amendement tendant à créer la recette permettant le financement  de la cosmétovigilance .

Le second complément nécessaire aux recettes de l'Afssaps est le rétablissement, au moins partiel, de la subvention de l'Etat. Celle-ci revêt une dimension symbolique autant que pratique :

- pratiquement, elle permettra à l'Afssaps de compléter son budget d'études de pharmacovigilance afin de compléter les alertes résultant du signalement des effets indésirables. La nécessité de conduire de telles études est la première leçon qui découle de l'expérience du Mediator ;

- symboliquement, il est particulièrement important de montrer que les missions confiées à l'Afssaps sont bien du ressort de la puissance publique, même si elles sont exercées par une agence et non par une administration.

Votre commission souhaite donc, par voie d'amendement, le rétablissement partiel ou total de la dotation budgétaire à l'Afssaps .

III. RÉAFFIRMER LA VOCATION SANITAIRE DE L'AIDE MÉDICALE D'ETAT

Le principe de l'aide médicale d'Etat (AME) découle de la loi du 24 vendémiaire An II qui disposait dans son article 18 que « tout malade, domicilié de droit ou non, qui sera sans ressources, sera secouru ou à son domicile de fait, ou à l'hospice le plus voisin » . Elle a été organisée par la loi du 15 juillet 1893 relative à l'aide médicale gratuite, qui précise qu'elle concerne les indigents français et étrangers, puis réformée par la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle (CMU) 8 ( * ) qui a permis l'accès de tous les citoyens français et étrangers ayant un titre de résidence à la couverture maladie offerte par la sécurité sociale.

Depuis cette date, en conséquence, l'AME est ouverte aux étrangers dépourvus de titre de résidence sur le territoire français. Ceux-ci peuvent bénéficier de cette forme de couverture de santé qui permet la prise en charge des dépenses de soins, de consultations médicales à l'hôpital ou en médecine de ville, de prescriptions médicales et de forfait hospitalier dès lors qu'ils sont pratiqués au tarif opposable. Le bénéficiaire de l'AME est dispensé de faire l'avance des frais, à l'hôpital ou en médecine de ville.

Les dispositions relatives à l'AME figurent aux articles L. 251-1 à L. 251-3 du code de l'action sociale et des familles. Son financement est assuré par une dotation du budget général inscrite au programme n° 183 « Protection maladie » de la mission Santé.

A. UN SYSTÈME ENCADRÉ ET CONTRÔLÉ

Après plus de cent ans d'existence, sous une forme ou sous une autre, l'aide médicale d'Etat fait aujourd'hui l'objet d'un contrôle étroit, tant sur le plan financier que sur les conditions d'accès.

1. L'absence de dérive financière du dispositif

L'AME fait l'objet du contrôle traditionnel de la part du Parlement lors du vote annuel de la dotation budgétaire qui lui est dédiée. Celle-ci est assortie de précisions en termes de montant et de volume des bénéficiaires, ce qui a d'ailleurs conduit les commissions des finances et des affaires sociales du Sénat à dénoncer, à plusieurs reprises au cours des dernières années, la sous-dotation de cette ligne budgétaire. Le projet de loi de finances pour 2011 semble y avoir mis un terme : le budget prévisionnel de l'AME s'établit en effet à 588 millions d'euros pour 215 763 bénéficiaires au 31 décembre 2009.

Ces données chiffrées permettent de constater que l'augmentation des dépenses liées à l'AME au cours des huit dernières années, soit 43 %, n'a pas disproportionnée par rapport à celle de l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam), de 35 %, d'autant que l'état de santé moyen des titulaires de l'AME est vraisemblablement moindre que celui de la population générale. Le coût moyen par bénéficiaire est également resté stable sur les huit dernières années (+ 2% en huit ans). Il recouvre toutefois de très fortes disparités entre la prise en charge moyenne en ville, qui s'élève à 625 euros par an en moyenne, et à l'hôpital, 9 000 euros.

L'augmentation des dépenses hospitalières expliquerait, d'après les services du ministère de la santé, la moitié de la hausse du coût de l'AME depuis 2008. Or cette croissance est moins due à une recrudescence du nombre des soins ou à leur plus grande complexité qu'à la tarification adoptée par les hôpitaux. Le rapporteur général Alain Vasselle a, à juste titre, soulevé ce problème lors de l'examen du PLFSS pour 2011 : « Les hôpitaux facturent les assurés qui ne sont pas couverts par un régime d'assurance maladie au tarif journalier de prestation, ou TJP, qui est plus élevé que celui des GHS, c'est-à-dire les groupes homogènes de séjour, habituellement appliqué. Or, depuis quelques années, les établissements ont beaucoup augmenté le TJP, et cela sans justification particulière. Qui plus est, l'accueil des publics précaires est couvert depuis deux ans par une dotation spécifique au sein des Migac, les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation. » . Il apparaît donc que la facturation des soins hospitaliers dans le cadre de l'AME a augmenté au cours des dernières années pour répondre aux besoins financiers des hôpitaux, sans lien avec les malades. La ministre de la santé a estimé le montant des recettes hospitalière liés aux soins donnés aux titulaires de l'AME a « 180 millions d'euros, et 60 millions d'euros pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ».

Dans l'ensemble, le coût moyen des soins pour un titulaire de l'AME s'élève à 2 055 euros contre 2 188 pour les assurés sociaux. De plus, les premiers ont recours aux médicaments génériques dans la même proportion que les seconds. Surtout, les bénéficiaires de l'AME n'ont pas plus de droits que les titulaires de la CMU-c qui sont, au contraire, mieux protégés car ils ont accès au remboursement des soins dentaires et optiques supérieurs aux tarifs de la sécurité sociale et qui, contrairement aux bénéficiaires de l'AME, ne peuvent se voir appliquer de dépassements d'honoraires. Il n'est donc pas légitime d'affirmer, comme on l'entend parfois, que l'AME représente une charge financière disproportionnée par rapport à l'assurance maladie dont bénéficie le reste de la population.

2. Un accès régulé

L'accès à l'AME est par ailleurs encadré par des dispositions législatives et réglementaires dont le respect est contrôlé. Trois conditions cumulatives sont exigées pour y prétendre :

- vivre en France de façon permanente et habituelle ;

- prouver une ancienneté de présence de trois mois ;

- disposer de revenus inférieurs à 634 euros par mois.

De 1945 à 1993, les étrangers en situation irrégulière mais ayant un travail avaient accès aux prestations de sécurité sociale dans les mêmes conditions que les autres travailleurs. La loi du 24 août 1993 9 ( * ) a mis fin à cette situation en imposant un plafond de ressources pour y avoir accès. Depuis lors, les étrangers en situation irrégulière dont les revenus sont supérieurs au plafond fixé doivent assumer la totalité des frais liés à leurs soins. Seuls les plus pauvres bénéficient d'une prise en charge par l'Etat dans les conditions précédemment indiquées.

Le bénéfice de l'AME est temporaire et la demande doit en être renouvelée chaque année. Chaque renouvellement nécessite le dépôt d'un nouveau dossier, dont la durée d'instruction est en moyenne de vingt-trois jours, mais d'environ deux mois en Seine-Saint-Denis où résident 20 % des titulaires de l'AME. Le contrôle de leur identité a également été renforcé. Comme l'indique le projet annuel de performance de la mission Santé, un arrêté du 10 juillet 2009 fixe désormais « le modèle du titre sécurisé d'admission à l'AME ainsi que les mentions obligatoires qu'il comporte. Ce nouveau titre est en papier sécurisé et filigrané sur lequel sont imprimées les données concernant le bénéficiaire et figure une photographie scannée du bénéficiaire âgé de plus de seize ans. La liste des bénéficiaires de moins de seize ans à la charge du titulaire du titre d'admission figure au dos de ce dernier avec, pour chacun d'eux, la mention des nom et prénom ainsi que de leur qualité au regard du titulaire et de la période de droit à l'AME. Le nouveau titre d'admission sécurisé est en cours de diffusion par les caisses depuis le deuxième trimestre 2010 » .

Les risques de fraude sont donc minimes. Les contrôles effectués portent sur les dossiers pour lesquels aucune ressource n'a été déclarée, ce qui ne représente que 5 % des demandes. Sur ce faible nombre de cas, une part importante, près de 50 % constatés en 2009, fait l'objet d'une analyse divergente entre la caisse et l'intéressé, qui repose essentiellement sur la compréhension de ce qui peut constituer une ressource. Ainsi, le fait de bénéficier d'un hébergement constitue une ressource au sens de la loi mais est rarement perçu comme tel par les demandeurs.

Comme l'indiquent les deux rapports publiés par l'Igas en février 2003 et mai 2007, l'AME est un dispositif efficace et géré de manière rigoureuse. En restreindre l'accès n'est donc pas nécessaire. On peut d'ailleurs penser que l'ampleur de la renonciation aux soins pour la population d'immigrés sans titre de séjour reste très importante : les estimations du bureau international du travail (BIT) portant sur la présence de 350 000 à 400 000 personnes en situation irrégulière en France, il faut en conclure que plus de cent mille personnes ne font pas de demande d'AME, peut-être faute de besoin, mais plus vraisemblablement par ignorance ou par peur.

Une dernière crainte doit être levée, celle liée au risque d'augmentation de l'AME du fait du nombre des ayants droits des titulaires. Les données recueillies par le ministère permettent de savoir que 80 % des titulaires de l'AME sont des personnes isolées. On compte 57 674 personnes à charge en 2010, dont 74 % de mineurs, dont la France doit assumer les soins médicaux du fait de ses obligations internationales.

B. UNE NÉCESSITÉ SANITAIRE ET SOCIALE

Historiquement, sinon en droit, l'existence de l'AME repose sur les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. La maladie peut même, dans certains cas, amener à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » en application de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Celui-ci dispose que le titre de séjour est accordé « à l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ». La délivrance de la carte donne accès à la CMU-c. L'AME n'a donc bien qu'un caractère résiduel. Elle tend à permettre à ceux dont l'état de santé ne met pas immédiatement en cause l'espérance vitale d'être soignés. L'existence de ce dispositif se justifie tant par des considérations sanitaires que par des considérations sociales.

1. Soigner les malades qui sont en France

La question de l'AME est indépendante de celle de la politique française d'immigration. S'il est possible de regretter la présence d'immigrés clandestins en France et de préconiser des mesures tendant à réguler les flux migratoires vers notre pays, l'Etat ne peut se désintéresser de la situation sanitaire des personnes présentes, avec ou sans titre, sur le territoire national.

Les obligations internationales de la France consacrent tout d'abord l'obligation de l'AME. Le Conseil d'Etat a ainsi jugé 10 ( * ) que l'article 97 de la loi de finances rectificative pour 2003 qui subordonnait le bénéfice de l'AME à une résidence d'au moins trois mois sur le territoire national ne pouvait être appliqué aux mineurs. L'article 3-1 de la Convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant interdit en effet que les enfants connaissent des restrictions dans l'accès aux soins nécessaires à leur santé.

Surtout, au-delà même du devoir d'humanité et du respect des règles internationales, le risque de contagion impose le traitement des malades. L'analyse des soins dispensés par le centre médical du comité médical pour les exilés (Comede) fait ainsi apparaître que 25 % des personnes soignées le sont pour des maladies infectieuses ou parasitaires, et 46 % pour des affections chroniques comme l'hépatite B (les 29 % restant étant soignés pour névrose traumatique ou dépression) 11 ( * ) . Une étude conduite par Médecins du monde 12 ( * ) tend également à indiquer que les difficultés d'entrée dans le dispositif d'AME jouent un rôle important dans la renonciation aux soins et contribuent à l'aggravation des pathologies avant traitement, ce qui n'est de l'intérêt ni du patient, ni de la collectivité.

Au cours de ces auditions, votre rapporteur a pu constater l'inquiétude des soignants face à la perspective d'une limitation de l'accès aux soins. Un point en particulier a été soulevé par l'agence de la biomédecine qui rappelle que dans le cadre d'un don d'organe, le donneur vivant ne doit, dans le respect des lois de bioéthique, se voir imposer aucun frais. Or certains donneurs sont des étrangers qui viennent en France pour faire don d'un organe à un membre de leur famille. Ils disposent de la possibilité de bénéficier de l'AME à titre dérogatoire mais il est essentielle que celle-ci puisse continuer à couvrir l'ensemble de leurs frais sous peine de remettre en cause le caractère éthique du don en lui imposant des contraintes financières.

2. Préserver l'équilibre de notre système d'accès aux soins pour les plus démunis

Le système actuel, bien que sans doute imparfait, paraît donc équilibré à votre rapporteur. Restreindre l'accès à l'AME serait rompre avec cet équilibre.

En effet, l'idée selon laquelle l'AME serait plus avantageuse que les autres systèmes de protection sociale ne peut qu'amener à envisager de rendre les étrangers indigents titulaires de la CMU et de la CMU-c. C'est là un choix qui ne pourrait être fait qu'après un débat approfondi et non pas au fil de l'eau.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission propose la suppression des articles rattachés à la mission « Santé » et restreignant l'accès à l'AME .

*

* *

Tout en rappelant qu'elle portera attention aux missions confiées aux agences sanitaires, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » et des articles qui lui sont rattachés sous réserve des amendements qu'elle propose.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 86 bis (art. L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles) - Exclusion de certains soins du panier pris en charge par l'AME

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, vise à exclure du panier de soins pris en charge à par l'AME, les actes, produits et prestations pour lesquels le service médical rendu associeì est faible ou qui ne sont pas destineìs directement au traitement d'une maladie.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'article L. 251-2 actuel du code de l'action sociale et des familles prévoit la prise en charge, au niveau du tarif opposable de la sécurité sociale, des frais liés aux soins, aux transports sanitaires, à l'interruption volontaire de grossesse et à la participation aux programmes de santé publique déterminés par le ministre en charge de la santé. Ces différents frais sont définis aux points 1°, 2°, 4° et 6° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale.

Sont également couverts :

- les frais liés au suivi médical de la grossesse (article L. 331-2 du code de la sécurité sociale) ;

- le forfait journalier pour les mineurs et une part de ce forfait déterminée par décret pour les majeurs.

L'article 86 bis introduit une distinction au sein de ces frais. En effet, il ouvre la possibilité d'exclure de la prise en charge des soins et transports sanitaires (1° et 2° de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale) « les actes, les produits et les prestations dont le service médical rendu n'a pas été qualifié de moyen ou d'important ou lorsqu'ils ne sont pas destineìs directement au traitement ou aÌ la prévention d'une maladie » . Cette exclusion sera déterminée dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat.

Cet article poursuit, d'après les auteurs de l'amendement adopté, un double objectif : « un objectif d'économie par la limitation des dépenses engagées au titre de soins qui ne seront plus pris en charge ; un objectif de réduction de l'attractivité du dispositif par l'exclusion de soins auxquels les étrangers en situation irrégulière n'auraient pas accès dans leurs pays d'origine » .

II - La position de la commission

Votre commission comprend les objectifs de cet article. Elle s'interroge cependant sur le moyen choisi pour y parvenir. En effet, la demande de soins des titulaires de l'AME correspond, d'après les données fournies par le ministère et les associations d'aide aux migrants, à des soins de première nécessité. Lors du débat à l'Assemblée nationale, la fécondation in vitro et les cures thermales ont été citées comme exemples de soins susceptibles d'être exclus du panier accessible par l'AME. Ils n'emportent pas la conviction. Les cures thermales reposent sur le paiement par le curiste de son hébergement, sans prise en charge : il n'est donc pas étonnant qu'il n'y a eu, à ce jour, aucun titulaire de l'AME qui ait bénéficié de tels soins. L'ABM ne recense pas non plus de titulaire de l'AME qui ait bénéficié d'une fécondation in vitro . Les équipes médicales sont de toutes façons opposées à s'engager dans un tel processus avec des personnes dont la situation est économiquement et socialement précaire, au nom du bien-être de l'enfant.

La responsabilité des soignants, et particulièrement des médecins, dans les soins qu'ils prescrivent est la meilleure garantie de l'absence de dérives de l'aide médicale d'Etat. Il est particulièrement difficile de faire intervenir le pouvoir réglementaire dans la relation entre le médecin et son malade.

Par ailleurs, l'article entend limiter l'attractivité de l'aide médicale d'Etat pour répondre au risque d'une immigration fondée sur le besoin de soins non essentiels. Il n'est pas impossible que la perspective d'obtenir des soins joue une part dans la décision d'immigration pour les personnes qui se savent malades. Mais tel n'est pas le cas de la majorité des titulaires de l'AME, qui n'ont fait l'objet d'aucune prise en charge ni d'aucun dépistage dans leur pays d'origine, et qui sont principalement des personnes jeunes (72 % ont moins de quarante ans d'après les chiffres fournis par la direction de la sécurité sociale), physiquement capables d'entreprendre le voyage qui les conduira en France. L'attractivité du système de soins français peut être plus importante pour les étrangers souffrant de maladies graves, mais ceux-ci ne sont pas des titulaires de l'AME. En application de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ils ont en effet la possibilité de disposer de la CMU et de la CMU-c.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous propose un amendement de suppression de cet article .

Article 86 ter (art. L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles) - Obligation d'un agrément préalable avant l'autorisation de soins hospitaliers coûteux

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, prévoit l'obligation d'un agrément préalable des caisses avant l'autorisation de soins hospitaliers dépassant un cout fixé par décret.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Cet article complète l'article L. 251-2 du code de l'action sociale et des familles en prévoyant un agrément préalable de la caisse dont dépend le bénéficiaire de l'AME pour les soins hospitaliers dont le coût dépassera un montant fixé par décret en Conseil d'Etat. L'agrément sera accordé après vérification du fait que les conditions de résidence continue et de revenus sont toujours remplies.

L'article L. 252-3 sur les conditions d'accès à l'AME est en outre modifié pour préciser que les prestations servies dans ce cadre sont soumises au respect de la stabilité de résidence en France dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.

II - La position de la commission

Votre commission reconnaît l'intérêt de la condition de résidence stable en France pour éviter un éventuel tourisme médical des immigrés clandestins indigents.

Elle ne peut cependant se rallier à la mise en place d'un agrément préalable des caisses pour les soins hospitaliers coûteux. En effet, cette disposition ne paraît pas pouvoir être réellement efficace dès lors que, comme le reconnaissent les auteurs de l'amendement, « les soins inopinés ne peuvent être soumis à cette procédure d'agrément préalable » . La procédure d'agrément s'apparente à un réexamen systématique des conditions d'accès à l'AME dont la durée moyenne actuelle est de vingt-trois jours. Soumettre la conduite d'examens à un tel délai ne peut que conduire à aggraver la situation sanitaire du malade ; une telle procédure est également susceptible de pousser les bénéficiaires de l'AME à retarder leur demande de soins, aggravant leur situation sanitaire. Elle risque enfin de transformer les examens planifiés en soins inopinés, perdant ainsi toute efficacité.

De plus, comme le précisent les auteurs de l'amendement, l'agrément « devra » en outre « porter sur le caractère fondé et indispensable des soins envisagés » . Cela aura pour effet de faire peser un soupçon sur toute décision des médecins hospitaliers, ce qui n'est pas acceptable.

Votre commission vous propose donc de supprimer l'obligation d'agrément préalable, tout en maintenant l'obligation de résidence pour l'accès aux soins et prestations, et d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 86 quater (art. L. 252-3 du code de l'action sociale et des familles) - Possibilité pour les caisses d'obtenir le remboursement des sommes indûment versées

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, ouvre la possibilité aux caisses d'obtenir directement le remboursement des sommes indûment versées

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Cet article complète l'article L. 252-3 du code de l'action sociale et des familles pour permettre le remboursement aux caisses des sommes indûment perçues. La dette pourra être réduite ou remise en cas de « précarité » du demandeur.

II - La position de la commission

Votre commission est favorable à la lutte contre la fraude à laquelle participe cette mesure. Elle s'interroge toutefois sur les modalités pratiques de recouvrement des sommes indûment payées par les caisses. De plus, le nombre de cas ou le titulaire de l'AME ne sera pas en situation de « précarité » sera sans doute particulièrement faible.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 86 quinquies (art. 968 E (nouveau) du code général des impôts, art. L. 251-1 et art. L.253-3-1(nouveau) du code de l'action sociale et des familles) - Droit de timbre annuel de 30 euros et limitation des ayants-droit

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, vise à créer un droit de timbre annuel de trente euros pour les bénéficiaires de l'AME et à limiter le nombre d'ayants-droit.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Cet article introduit un intitulé XII « Aide publique à une couverture de santé » au sein de la section 2 « Droits de délivrance de documents et perceptions diverses » du chapitre II « Droits de timbre » du titre IV « Enregistrement, publicité foncière, impôt de solidarité sur la fortune, timbre » de la première partie « Impôts d'Etat » du Livre premier « Assiette et liquidation de l'impôt » du code général des impôts (CGI).

Le nouvel article 968 E, ainsi introduit dans le CGI, prévoit le conditionnement de la prise en charge des soins des bénéficiaires de l'AME à l'acquittement d'un droit de timbre annuel de trente euros par bénéficiaire majeur.

Selon les informations fournies par le ministère de la santé à la commission des finances, ce versement prendrait la forme d'un timbre fiscal acquitté lors de la remise de l'attestation d'admission au dispositif.

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement complétant le présent article additionnel et prévoyant la création d'un fonds destiné à collecter cette nouvelle recette et à prendre en charge les dépenses d'AME.

Il est ainsi proposé d'insérer un nouvel article L. 253-3-1 dans le code de l'action sociale et des familles instituant un fonds national de l'aide médicale de l'Etat.

Ce fonds prendra en charge les dépenses de l'aide médicale de l'Etat et ses propres frais de fonctionnement. Il sera administré par un conseil de gestion dont la composition, les modalités de désignation des membres et les modalités de fonctionnement seront fixées par décret. Sa gestion sera assurée par la Caisse des dépôts et consignations.

En recettes, le fonds sera alimenté par le produit issu du droit de timbre créé, par ailleurs, par le présent article. Un arrêté des ministres chargés de la santé et du budget constatera, chaque année, le montant du produit collecté et versé au fonds. L'Etat assurera l'équilibre du fonds en dépenses et en recettes.

Le présent article propose, par ailleurs, de limiter la notion d'ayant droit aux conjoints et enfants, en excluant les ascendants et les autres descendants ou les collatéraux jusqu'au troisième degré.

Pour bénéficier de l'AME, les ayants droit devront effectuer une demande individuelle auprès de la caisse primaire d'assurance maladie dont ils dépendent et remplir les conditions de résidence et de ressources pour être admis dans le dispositif.

II - La position de la commission

Votre commission souligne que l'AME est une prestation qui relève de la solidarité nationale. Elle ne participe donc pas de la logique assurantielle des prestations de sécurité sociale qui reposent sur les cotisations et les participations des bénéficiaires. Par ailleurs, le dispositif proposé ne supprime pas la possibilité pour le pouvoir réglementaire de déterminer une participation financière aux soins des titulaires de l'AME. Ainsi, en l'état du texte, les bénéficiaires de l'AME devront acquitter un droit à l'entrée du dispositif et pourront cependant se voir imposer une participation lors de chaque soin, ce qui serait leur imposer une charge disproportionnée.

De plus, un droit de timbre de 30 euros représente déjà 4,9 % du revenu maximal des titulaires de l'AME. Il risque donc de représenter une entrave importante aux soins, ce qui ferait perdre son sens au dispositif actuel et ne peut qu'augmenter les pressions pour faire entrer les titulaires de l'AME dans le dispositif CMU, CMU-c.

Votre commission regrette également la grande complexité du dispositif mis en place pour assurer la collecte du droit de timbre qui suppose la création d'un nouveau fonds et suscitera donc de nouveaux coûts. Ceux-ci paraissent devoir être disproportionnés par rapport aux gains attendus. Le rendement espéré du droit de timbre devrait s'élever à moins de 7 millions d'euros, si l'on se fonde sur le nombre actuel de bénéficiaires et d'ayants-droit majeurs.

La limitation du nombre d'ayants droit aurait pour sa part des effets limités puisque 80 % des bénéficiaires de l'AME sont des personnes isolées.

Elle se justifie en fait par l'idée que l'AME est de droit pour les enfants en vertu des conventions internationales, mais que cela ne doit pas ouvrir immédiatement de droits pour leurs parents et famille. Il convient effectivement de lutter contre le risque d'instrumentalisation dont certains enfants pourraient faire l'objet. Il paraît cependant difficile en pratique de limiter l'accès aux soins des parents qui s'occupent d'un enfant malade. Le contrôle de la fraude paraît le meilleur moyen de lutter contre les abus.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous propose de supprimer cet article .

Article 86 sexies (art. L. 1142-23 et L. 3131-5 du code de la santé publique) - Indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention,
de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures sanitaires graves

Objet : cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, vise à aligner le financement de l'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures sanitaires graves sur le régime de l'indemnisation des vaccinations obligatoires.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

La réparation des accidents médicaux, affections iatrogènes et infections nosocomiales est confiée à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam).

En vertu de l'article L. 1142-23 du code de la santé publique, celui-ci est financé, pour ce volet de son activité, par le biais du fonds prévu par l'article L. 3131-5 du même code, qui finance plus largement l'ensemble des actions nécessaires à la préservation de la santé de la population en cas de menace sanitaire grave ou d'alerte épidémique.

Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, propose de substituer, à la dotation versée par le fonds, un financement direct de l'Etat.

Le I du présent article remplace ainsi la dotation versée par le fonds précité à l'Oniam par une dotation versée par l'Etat en application de l'article L. 3131-4 du code de la santé publique (mesures sanitaires d'urgence).

Le II supprime l'article L. 3131-5 du code de la santé publique qui instituait le fonds précité et qui était destiné à financer l'ensemble des actions nécessaires à la préservation de la santé de la population en cas de menace sanitaire grave ou d'alerte épidémique.

Cette mesure a été justifiée par la ministre de la santé et des sports, alors Madame Roselyne Bachelot-Narquin, devant l'Assemblée nationale par trois motifs :

- préciser le rôle de l'Etat pour l'indemnisation des préjudices résultant des mesures de santé publique qu'il met en place en cas de menace sanitaire grave ;

- homogénéiser les modes de financement de l'ONIAM, qui est par ailleurs financé directement par l'Etat pour l'indemnisation des préjudices résultant de vaccinations obligatoires ;

- raccourcir les circuits de financement et permettre de limiter le nombre d'acteurs sollicités.

II - La position de la commission

Votre commission est favorable à cette mesure de simplification et vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 86 septies (nouveau) - Transformation de la contribution CMU en taxe

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, vise à transformer la contribution CMU acquittée par les organismes d'assurance complémentaire en une taxe assise sur les cotisations payées dans le cadre de la souscription d'un contrat d'assurance santé complémentaire.

I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

Adopté à l'initiative des députés, rapporteurs au fond et pour avis de la loi de financement de la sécurité sociale, Yves Bur, Jean-Pierre Door et Marie-Anne Montchamp, et avec l'avis favorable du Gouvernement, cet article modifie les articles L. 862-2 à L. 862-8 du code de la sécurité sociale relatifs au fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie, habituellement dénommé fonds Cmu.

Les modifications tendent à permettre la transformation de la contribution aujourd'hui acquittée par les mutuelles, institutions de prévoyance et sociétés d'assurance au titre des cotisations émises dans le cadre d'une protection complémentaire en matière de santé, en une taxe additionnelle aux cotisations ainsi définies.

A cet effet, le 3° du I de l'article réécrit l' article L. 862-4 qui définissait la contribution. Il prévoit de le remplacer par :

- la création d'une taxe de solidarité additionnelle aux cotisations d'assurance afférentes aux garanties de protection complémentaire en matière de santé souscrites au bénéfice de personnes physiques résidents en France, à l'exclusion des réassurances ;

- l'assiette de la taxe est constituée par les cotisations ainsi définies et acquittées au profit de mutuelles, d'institutions de prévoyance ou de sociétés d'assurance, y compris d'un organisme d'assurance maladie complémentaire étranger non établi en France mais admis à y opérer en libre prestation de service ;

- la taxe est perçue par ces organismes pour le compte des Urssaf ; elle est liquidée sur le montant des cotisations émises au cours de chaque trimestre et versée au plus tard le dernier jour du premier mois qui suit le trimestre considéré ;

- le taux de la taxe est fixé à 6,27 %, ce qui représentera, pour le fonds CMU, le même produit que le taux actuel de la contribution, soit 5,9 % ;

- les organismes pourront, comme actuellement par déduction du montant de la contribution, imputer sur le montant de la taxe collectée une somme forfaitaire résultant de la prise en charge, directement par l'organisme complémentaire, de personnes bénéficiant de la CMU-c  ou imputer l'équivalent du quart du crédit d'impôt afférent aux contrats bénéficiant d'une aide à la complémentaire santé.

Les 1°, 2°, 4°, 5°, 6°, 7° et 8° du même I effectuent de simples coordinations du fait de ce nouveau dispositif aux articles L. 862-2, L. L. 862-3, L. 862-5 à L. 862-8 et L. 863-1 du code de la sécurité sociale.

Le II précise que l'article entre en vigueur à compter du 1 er janvier 2011.

II - La position de la commission

Votre commission approuve cette mesure, neutre aussi bien pour les assurés qui ne verront pas la cotisation à leur complémentaire santé augmenter, du moins à ce titre, que pour le fonds CMU qui percevra le même niveau de recettes.

En revanche, pour les organismes complémentaires, ce dispositif présente l'avantage de neutraliser l'impact de la taxe sur leur chiffre d'affaires et donc de ne pas augmenter, de façon indue, les exigences de capitaux propres qu'ils doivent posséder, ce qui parait bienvenu à la veille du renforcement attendu des normes en la matière.

Le produit actuel de la contribution représentant l'intégralité des ressources du fonds CMU, soit 1,8 milliard d'euros, il importe que celles-ci soient préservées et que la nouvelle taxe instituée par cet article en maintienne le montant, afin de permettre au fonds d'assurer le financement, tant de la CMU complémentaire que de l'aide à la complémentaire santé.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel avant l'article 86 octies (article L. 5121-16 et L. 5121-18 du code de la santé publique) - Adaptation au droit communautaire et implification du système de taxes affectées à l'Afssaps

Objet : Cet article additionnel a pour objet de renforcer la conformité du système de taxes affectées à l'Afssaps au droit communautaire et de simplifier leur recouvrement.

Cet article additionnel, auparavant intégré à la proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit en cours d'examen et adopté par l'Assemblée nationale, est relatif aux taxes perçues par l'Afssaps.

Le du présent article propose de modifier la rédaction du premier alinéa de l'article L. 5121-16 du code de la santé publique pour :

- insérer les demandes de reconnaissance, par au moins un autre Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par le directeur général de l'Afssaps mentionnée à l'article L. 5121-8 du même code. Cette insertion permettra de soumettre au droit progressif ces demandes qui ne font pas actuellement l'objet d'une taxation, alors qu'elles exigent un travail d'évaluation et de coordination important qui justifie, en outre, l'application de taux spécifiques ;

- porter le plafond des droits progressifs de 25 400 euros à 45 000 euros, sachant que, selon l'Afssaps, le montant applicable pour l'autorisation de mise sur le marché décentralisée - lorsque la France est désignée par le demandeur comme Etat membre de référence - sera d'environ 40 000 euros ;

- supprimer le mot « demande » en ce qui concerne les modifications d'autorisation de mise sur le marché afin de permettre la perception du droit progressif, que la modification soit déclarée ou demandée. Le règlement (CE) n° 1234/2008 du 24 novembre 2008 concernant l'examen des modifications des termes d'une autorisation de mise sur le marché de médicaments à usage humain et de médicaments vétérinaires, applicable au 1 er janvier 2010, prévoit que certaines modifications, principalement des modifications administratives, auront un caractère déclaratoire. Les modifications « déclarées » engendrant un travail de mise à jour des autorisations de mise sur le marché proches des modifications demandées par l'Afssaps, il apparaît nécessaire de pouvoir continuer à percevoir la taxe sur ces modifications.

Le propose de simplifier le recouvrement des taxes de l'agence.

Actuellement, l'article L. 5121-18 du code de la santé publique prévoit que les redevables des taxes sont tenus d'adresser à l'Afssaps, au plus tard le 31 mars de chaque année, une déclaration indiquant les médicaments et produits donnant lieu au paiement de la taxe. Cette déclaration est établie conformément au modèle fixé par arrêté du ministre chargé de la santé. En l'absence de déclaration dans le délai fixé ou en cas de déclaration inexacte, l'agence peut procéder à une taxation d'office qui entraîne l'application d'une pénalité de 10 % pour retard de déclaration et de 50 % pour défaut ou insuffisance de déclaration.

A défaut de versement dans les deux mois à compter de la date de la notification du montant à payer, la fraction non acquittée de la taxe, éventuellement assortie des pénalités applicables, est majorée de 10 %.

Le présent article propose que le paiement de la taxe soit concomitant de la déclaration. En conséquence, à défaut de versement, la fraction non acquittée de la taxe, éventuellement assortie des pénalités applicables, serait majorée de 10 %.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article additionnel avant l'article 86 octies (article L. 5121-16 du code de la santé publique) - Recouvrement par l'administration fiscale du droit progressif sur demandes d'autorisation de mise sur le marché affecté à l'Afssaps

Objet : Cet article additionnel tend à confier à l'administration fiscale le recouvrement du droit progressif sur demandes d'autorisation de mise sur le marché affecté à l'Afssaps.

Cet article additionnel tend à confier à l'administration fiscale le recouvrement de la principale taxe affectée à l'Afssaps et qui représente 40 % de son budget : le droit progressif sur demandes d'autorisation de mise sur le marché. La collecte de cette taxe ne serait ainsi plus assurée par l'agence elle-même, ce qui fait l'objet de critiques depuis plusieurs années.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article additionnel avant l'article 86 octies (article L.5121-17 du code de la santé publique) - Médicaments orphelins

Objet : Cet article additionnel tend à assurer la cohérence des dispositions de la loi de finances avec celles de la loi de financement de la sécurité sociale concernant les médicaments orphelins.

Pour faciliter le développement des médicaments orphelins, l'article 48 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 avait exclu le chiffre d'affaires réalisées au titre de ces médicaments de l'assiette de toutes les contributions spécifiques dues par l'industrie pharmaceutique et avait également exonéré les médicaments orphelins de la taxe annuelle sur les médicaments titulaires d'une autorisation de mise sur le marché, alors perçue au profit de l'agence française de sécurité sanitaire et qui bénéficie aujourd'hui à l'Afssaps.

Les efforts consentis depuis une quinzaine d'années ont fortement soutenu le développement en France des médicaments orphelins, dont certains ont connu un remarquable succès, y compris commercial : pour ces derniers, le maintien de telles incitations ne se justifie plus.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 en tire les conséquences en prévoyant d'assujettir, dans les conditions du droit commun, aux contributions perçues au profit de l'assurance maladie les médicaments orphelins dont le chiffre d'affaires excède 30 millions d'euros.

Par cohérence, cet article additionnel a pour objet d'assujettir à la taxe annuelle sur les médicaments titulaires d'une AMM les médicaments orphelins dont le montant annuel des ventes excède 30 millions.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article additionnel avant l'article 86 octies (article L. 5131-7-4 (nouveau) du code de la santé publique) - Financement de la cosmétovigilance

Objet : Cet article additionnel tend à prévoir le financement de la mission de cosmétovigilance confiée à l'Afssaps.

Depuis 2007 et en application des directives communautaires l'Afssaps encadre l'évaluation de la qualité et de la sécurité d'emploi des produits cosmétiques. Ces missions seront bientôt encore renforcées par l'application du règlement européen du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques et instaurant une déclaration obligatoire par l'industrie des effets indésirables et graves et une coopération européenne en la matière Pour leur exercice, l'Afssaps dispose d'experts internes et externes, d'équipes d'inspecteurs, de laboratoires d'analyse, et peut prendre des mesures de police sanitaire en cas de risque pour la santé publique. Par ailleurs, l'agence organise un système de vigilance afin de surveiller les effets indésirables résultant de l'utilisation de produits cosmétiques. Or, elle ne reçoit à ce titre aucun revenu alors que les médicaments et dispositifs sont imposés à son profit. Cet amendement vise à remédier à ce qui paraît comme une iniquité.

Il est donc proposé d'instituer une taxe sur le chiffre d'affaires des produits cosmétiques qui devrait compenser les 4 millions d'euros que coûte à l'Afssaps la cosmétovigilance.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article 86 octies (article 23 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005) - Prorogation de quatre ans de la taxe assurant le financement du centre national de gestion des essais de produits de santé

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, prolonge jusqu'en 2013 la taxe assurant le financement du centre national de gestion des essais de produits de santé.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Cet article prolonge de quatre ans la taxe additionnelle à la taxe sur les médicaments et les produits bénéficiant d'une autorisation de mise sur le marché perçue par le centre national de gestion des essais de produits de santé (CeNGEPS), mis en place au mois de mars 2007 par décision du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la recherche, approuvant la convention constitutive de ce groupement d'intérêt public (Gip). Il regroupe des représentants de l'Inserm), du syndicat des entreprises du médicament (Leem), de l'Afssaps et des établissements de santé et est chargé d'améliorer les aspects logistiques et administratifs des essais cliniques et de maintenir l'attractivité du territoire français pour leur réalisation.

Le produit de la taxe est d'environ 10 millions d'euros par an.

II - La position de la commission

Votre commission partage l'analyse de la commission des finances selon laquelle un bilan du Gip CeNGEPS doit être conduit afin de mesurer l'intérêt de cet organisme.

Dans cette attente, elle vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 86 nonies - Indemnisation des personnes exerçant ou ayant exercé une activité professionnelle ou volontaire au sein de services d'incendie et de secours vaccinées contre l'hépatite B

Objet : Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale, tend à permettre l'indemnisation des personnes, exerçant ou ayant exercé une activité professionnelle ou volontaire au sein de services d'incendie et de secours, vaccinées contre l'hépatite B.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'article L. 3111-9 du code de la santé publique prévoit que, sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire est assurée par l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), au titre de la solidarité nationale.

Le présent article vise à étendre ce dispositif d'indemnisation aux personnes exerçant ou ayant exercé une activité professionnelle ou volontaire au sein de services d'incendie et de secours (Sdis) et qui ont été vaccinées contre l'hépatite B depuis la date d'entrée en vigueur de l'arrêté du 6 mai 2000 fixant les conditions d'aptitude médicale des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires et les conditions d'exercice de la médecine professionnelle et préventive au sein des Sdis.

Par un arrêté du 6 mai 2000, le ministre de l'intérieur a étendu l'obligation de vaccination aux sapeurs-pompiers professionnels et volontaires des Sdis ; cette obligation incluait la vaccination contre l'hépatite B.

Malgré l'annulation de l'arrêté par le Conseil d'Etat, les personnels des Sdis ont pu légitimement croire que l'obligation de vaccination s'appliquait pleinement. C'est pourquoi, dans un souci d'équité, le présent article propose d'assurer l'indemnisation des personnels vaccinés depuis cette date.

Selon les données du ministère de la santé, cette mesure concernerait vingt sapeurs-pompiers. A ce stade, le coût moyen des indemnisations par sapeur-pompier a été estimé à environ 100 000 euros.

II - La position de la commission

Votre commission est favorable à cette mesure d'équité. Elle a donc adopté cet article sans modification.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mardi 30 novembre 2010 , sous la présidence de Muguette Dini, présidente, la commission procède à l' examen du rapport pour avis d' Alain Milon sur le projet de loi de finances pour 2011 (mission « Santé » et les articles 85 bis à 86 nonies rattaché ).

Alain Milon, rapporteur pour avis. - La structure de la mission « Santé » évolue, encore cette année, en conséquence de la loi HPST du 21 juillet 2009. Le recentrage de l'action territoriale en matière sanitaire autour des agences régionales de santé (ARS) a ainsi conduit à la fusion de deux des trois programmes qui constituaient jusqu'à présent la mission. Le programme n° 171 « Offre de soins et qualité du système de soins » et le programme n° 204 « Prévention et sécurité sanitaire » sont regroupés pour former un nouveau programme 204 intitulé « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ». Cette fusion permet de présenter dans un même programme l'ensemble des crédits destinés au financement des politiques de santé mises en oeuvre par les ARS. Elle autorise également une plus grande souplesse dans la gestion des crédits, ce qui est susceptible de permettre une meilleure adaptation aux besoins identifiés par le Parlement.

A l'inverse, les crédits relatifs au fonctionnement des ARS figurant au sein du programme n° 171 ont été transférés vers la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », dans le programme n° 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales ». Le programme 204 regroupe ainsi l'ensemble des concours de l'Etat au fonctionnement des ARS.

A périmètre reconstitué, le budget de la mission Santé progresse cette année de 2 %, essentiellement du fait de l'augmentation des crédits de trois de ses actions :

- au sein du programme 204, l'action 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » bénéficie d'une augmentation de son budget de 23 %, du fait de la subvention plus élevée de l'Etat à l'institut national du cancer en application du Plan cancer II, de l'attribution de fonds pour la recherche, ainsi que de subventions aux associations de professionnels et de patients qui interviennent dans la lutte contre différentes maladies chroniques. Je note que les crédits alloués à la santé mentale ont augmentés « en cohérence avec le rapport de l'Opeps » même si les sommes en cause, à peine plus d'1 million d'euros, restent symboliques. Il convient cependant de rappeler que la lutte contre les maladies chroniques relève essentiellement de l'assurance maladie ;

- l'action 19 « Modernisation de l'offre de soins » voit ses crédits croître de 18 % en raison de la progression de la dotation de la formation médicale initiale, du fait de l'augmentation du numerus clausus décidée depuis le début des années 2000 ;

- au sein du programme 183, l'action 2 « aide médicale d'Etat (AME) » voit ses crédits augmenter de 9,9 %. Ce chiffre, qui peut paraître important, reflète en réalité la fin de sa sous-dotation.

Les autres actions de la mission voient en revanche leurs crédits réduits. La plus importante, - 66,2 % pour l'action 16 « réponse aux alertes et gestion des urgences », résulte de la baisse des crédits accordés à l'Eprus après l'augmentation de sa dotation en 2010 pour faire face aux dépenses liées à la préparation de la lutte contre la grippe A (H1N1).

Le budget de l'action 17 baisse de 44,4 % en raison de la suppression de la subvention accordée à l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Ceci pose une question de principe que j'aborderai ultérieurement.

Comme l'année dernière, je souhaite, à l'occasion de l'examen de ces crédits, aborder trois questions qui me paraissent particulièrement importantes :

- l'adéquation des moyens des agences sanitaires à leurs missions ;

- les mesures nécessaires pour garantir l'indépendance des agences ;

- l'aide médicale d'Etat.

Face à la multiplication des agences sanitaires jusqu'en 2004, notre commission avait insisté sur la nécessité de regrouper les agences dont les champs de compétence étaient proches. Dans le cadre de la loi HPST, nous avons donc autorisé le Gouvernement à procéder par ordonnance à la fusion de l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset). La nouvelle entité, l'agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), est opérationnelle depuis juillet 2010. Même s'il est trop tôt pour se prononcer sur la viabilité du rapprochement opéré, les premiers mois de la nouvelle agence ont montré l'intérêt que peuvent avoir les démarches de rapprochement et de rationalisation. L'Anses semble engagée dans un renforcement de son rôle d'expertise susceptible de rallier l'ensemble des personnels issus de l'Afssa et de l'Afsset dans un projet commun.

Il reste à ce stade une seule ombre au tableau : le maintien dans le périmètre de l'Anses de la régulation du médicament vétérinaire. Cette compétence me paraît devoir plutôt être confiée à l'Afssaps afin d'éviter que l'Anses ne soit à la fois expert et régulateur.

Le souci de rationalisation et d'efficacité ne doit cependant pas conduire à entraver l'action des agences. Ainsi, la réduction de la dotation de l'institut de veille sanitaire risque de poser, pour 2011, des difficultés car l'InVS est engagé dans un programme de restructuration immobilière en même temps qu'il doit intensifier l'effort demandé par ses missions. L'épisode de la grippe A (H1N1) a mis en relief la nécessité de renforcer la qualité de l'épidémiologie et de la prévision dans notre pays, ce qui ne peut se faire qu'à partir d'investissements. Nous devrons donc être particulièrement vigilants sur l'évolution des crédits des agences et nous assurer que l'obligation d'une réduction de 10 % de leurs crédits sur les trois prochaines années soit compatible avec l'exercice de leurs missions.

J'en viens au deuxième point : celui de l'indépendance des agences. L'affaire du Mediator, dont je ne souhaite pas ici aborder le fond, montre de manière exemplaire l'importance des études en matière de pharmacovigilance. En l'occurrence, la notification des événements indésirables survenus lors de son usage par les praticiens s'est avérée insuffisante pour alerter suffisamment tôt des dangers présentés ; c'est seulement lorsqu'une étude a été menée à partir des fichiers de la Cnam que l'on a pu établir le lien entre ce médicament et les accidents cardiaques. Il faut encourager, et donc financer, ces études. Par ailleurs, le fait que le financement de l'Afssaps dépende de taxes affectées reposant sur les bénéfices des entreprises pharmaceutiques a suscité de nombreuses critiques. Je vous proposerai des amendements tendant à permettre de garantir l'indépendance de l'agence.

Je souhaite enfin aborder la question de l'aide médicale d'Etat.

Le principe de l'AME découle de la loi du 24 vendémiaire, An II, qui disposait dans son article 18 que « tout malade, domicilié de droit ou non, qui sera sans ressources, sera secouru ou à son domicile de fait, ou à l'hospice le plus voisin ». Elle a été organisée par la loi du 15 juillet 1893 relative à l'aide médicale gratuite pour les indigents français et étrangers, puis réformée par la loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle (CMU) qui a permis l'accès de tous les citoyens français et étrangers ayant un titre de résidence à la couverture maladie offerte par la sécurité sociale.

Depuis cette date, en conséquence, l'AME est ouverte aux étrangers dépourvus de titre de résidence sur le territoire français, et dont les ressources sont très faibles. Trois conditions cumulatives sont en effet exigées pour y prétendre : vivre en France de façon permanente et habituelle ; prouver une ancienneté de présence de trois mois ; disposer de revenus inférieurs à 634 euros par mois.

De 1945 à 1993, les étrangers en situation irrégulière, mais ayant un travail, avaient accès aux prestations de sécurité sociale dans les mêmes conditions que les autres travailleurs. La loi du 24 août 1993 a mis fin à cette situation en le conditionnant à un plafond de ressources. Depuis lors, les étrangers en situation irrégulière dont les revenus sont supérieurs à ce plafond doivent assumer la totalité des frais liés à leurs soins. Seuls les plus pauvres bénéficient d'une prise en charge par l'Etat des dépenses de soins, des consultations médicales à l'hôpital ou en médecine de ville, des prescriptions médicales et du forfait hospitalier, dès lors qu'ils sont pratiqués au tarif opposable. Le bénéficiaire de l'AME est dispensé de l'avance des frais, à l'hôpital ou en médecine de ville.

L'AME fait l'objet du contrôle traditionnel du Parlement lors du vote annuel de la dotation budgétaire qui lui est dédiée. Celle-ci est assortie de précisions en termes de montant et de volume des bénéficiaires, ce qui avait d'ailleurs conduit les commissions des finances et des affaires sociales du Sénat à dénoncer, à plusieurs reprises au cours des dernières années, la sous-dotation de cette ligne budgétaire. Le projet de loi de finances pour 2011 semble y avoir mis un terme : le budget prévisionnel de l'AME s'établit en effet à 588 millions d'euros pour 215 763 bénéficiaires au 31 décembre 2009.

Le coût moyen par bénéficiaire est resté quasi-stable sur les huit dernières années (+ 2 %). Il recouvre toutefois de très fortes disparités entre la prise en charge moyenne en ville, qui s'élève à 625 euros par an, et à l'hôpital, 9 000 euros.

L'augmentation des dépenses hospitalières expliquerait, d'après les services du ministère de la santé, la moitié de la hausse du coût de l'AME depuis 2008. Le rapporteur général Alain Vasselle a, à juste titre, soulevé ce problème lors de l'examen du PLFSS pour 2011. Il apparaît en fait que la facturation des soins hospitaliers dans le cadre de l'AME a augmenté au cours des dernières années pour répondre aux besoins financiers des hôpitaux, sans lien avec les malades. La ministre de la santé d'alors avait estimé le montant des recettes hospitalières liées aux soins donnés aux titulaires de l'AME à 180 millions d'euros et 60 millions pour l'AP-HP.

Dans l'ensemble, le coût moyen des soins pour un titulaire de l'AME s'élève à 2 055 euros contre 2 188 pour les assurés sociaux. Surtout, les bénéficiaires de l'AME n'ont pas plus de droits que les titulaires de la CMU-c qui sont, au contraire, mieux protégés car ils ont accès à un remboursement des soins dentaires et optiques supérieur aux tarifs de la sécurité sociale et qui, contrairement aux bénéficiaires de l'AME, ne peuvent se voir appliquer de dépassements d'honoraires.

L'accès à l'AME est par ailleurs encadré par des dispositions législatives et réglementaires dont le respect est contrôlé. En effet, non seulement les conditions de résidence et de ressources sont vérifiées lors de la première instruction du dossier, mais de plus le bénéfice de l'AME est temporaire et la demande doit en être renouvelée chaque année. Chaque renouvellement nécessite le dépôt d'un nouveau dossier, dont la durée d'instruction est en moyenne de vingt-trois jours, mais d'environ deux mois en Seine-Saint-Denis où résident 20 % des titulaires de l'AME. Le contrôle de leur identité a également été renforcé. Un arrêté du 10 juillet 2009 fixe désormais le modèle du titre sécurisé d'admission à l'AME ainsi que les mentions obligatoires qu'il comporte.

Comme l'indiquent les deux rapports publiés par l'Igas en février 2003 et mai 2007, l'AME est un dispositif efficace et géré de manière rigoureuse. En restreindre l'accès n'est donc pas nécessaire.

Une dernière crainte doit être levée, celle liée au risque d'augmentation de l'AME du fait du nombre des ayants droit des titulaires. Les données recueillies par le ministère permettent de savoir que 80 % des titulaires de l'AME sont des personnes isolées. On compte 57 674 personnes à charge en 2010, mineurs dans 74 % des cas, dont la France doit assumer les soins médicaux du fait de ses obligations internationales.

Face à ces données objectives, je ne pense pas que tous les amendements adoptés par l'Assemblée nationale soient adaptés à leur objet. Nous pouvons avoir les uns et les autres des opinions différentes sur la politique d'immigration dans notre pays. Je suis pour ma part pour une immigration régulée et choisie. Mais cette question n'est pas celle de l'AME. Quel que soit le statut des personnes qui se trouvent en France, elles doivent pouvoir accéder aux soins.

Isabelle Debré. - Les conditions permettant d'accéder à l'AME, en particulier la présence sur le territoire depuis au moins trois mois et la résidence permanente et habituelle en France, sont-elles réellement applicables et vérifiables ? Le rapporteur dispose-t-il d'informations sur la situation particulière des mineurs isolés étrangers au regard de l'AME ?

Guy Fischer. - Ce rapport doit être salué pour l'humanisme dont il est empreint à propos de l'AME. Les informations qu'il contient et la précision des chiffres fournis démontrent qu'il est possible de parler d'un tel sujet sans tomber dans les lieux communs ou instrumentaliser la politique d'immigration. Toutes les personnes résidant en France doivent pouvoir accéder à des soins de qualité, quelle que soit leur situation juridique. La France est l'un des pays les plus riches de l'Union européenne, qui doit être un exemple en la matière, surtout en ces périodes de crise économique et de grand froid.

André Lardeux.- A-t-on une idée du rythme de rotation des bénéficiaires de l'AME ? Pendant combien de temps en moyenne est-on sous ce régime d'assurance et auxquels accède-t-on ensuite ? Combien y-a-t-il de nouveaux entrants chaque année ?

Marie-Thérèse Hermange. - Pourquoi les laboratoires de l'Anses répondant aux appels à projet de l'agence sont-ils financés par des crédits transversaux et non par ceux prévus pour l'appel à projet ?

Les conditions cumulatives permettant de bénéficier de l'AME paraissent effectivement très difficiles à vérifier. Qu'en est-il des citoyens de l'Union européenne vivant sur le territoire français, qui font venir leurs parents âgés pour leur permettre de bénéficier de soins ? Comment s'explique la croissance des dépenses hospitalières liée à la tarification des soins délivrés aux bénéficiaires de l'AME ?

François Autain. - Les critiques formulées excellemment par le rapporteur nous conduiront à ne pas adopter ce budget. Le foisonnement des agences est une évolution déplorable et les tentatives de rapprochement devraient être poursuivies. En particulier, la Haute Autorité de santé (HAS) et l'Afssaps disposent toutes deux de compétences en matière de médicament, ce qui peut poser des difficultés. Il est regrettable que l'Etat confie désormais l'intégralité du financement de l'Afssaps aux laboratoires pharmaceutiques. Cette évolution ne peut que conduire cette agence à autoriser la mise sur le marché d'un nombre de plus en plus important de médicaments. Or, 90 % des nouveaux médicaments mis sur le marché sont inutiles et plus coûteux que ceux qui existent. Ce désengagement général de l'Etat et la privatisation progressive de pans entiers de la politique de santé publique sont déplorables.

Yves Daudigny. - L'analyse du rapporteur à propos de l'AME est à la fois humaniste, rigoureuse et réaliste. Le budget de la mission « Santé » est structuré de manière complexe, en particulier en ce qui concerne les dotations aux agences régionales de santé (ARS). Ne faut-il pas déplorer la diminution des crédits destinés aux actions de prévention alors même qu'il est démontré depuis longtemps que celles-ci permettent efficacement d'économiser des dépenses par la suite ? La question des territoires sous-dotés en présence médicale n'est pas mentionnée dans le cadre du budget mais devrait être prise en compte à travers les budgets de fonctionnement des ARS.

Alain Milon, rapporteur pour avis. - Le nombre de bénéficiaires de l'AME atteignait 215 763 le 31 décembre 2009, parmi lesquels 42 710 mineurs. 68 % des bénéficiaires vivent en région parisienne, 10 % en Guyane et 6 % en Provence-Alpes-Côte d'Azur. 72 % ont moins de quarante ans et 20 % sont des mineurs. 53 % sont des hommes et 47 % des femmes. Les conditions permettant de bénéficier de l'AME sont effectivement difficiles à vérifier mais les services compétents conduisent des enquêtes qui expliquent que le délai d'instruction des dossiers soit de vingt-trois jours en moyenne et de deux mois en Seine-Saint-Denis. Il n'existe pas d'information sur la rotation des bénéficiaires mais une enquête de l'Igas est en cours qui pourrait permettre de fournir des informations sur cette question. Les ressortissants européens ne peuvent pas être en situation irrégulière et bénéficient de la CMU et non de l'AME.

Les laboratoires de l'Anses sont plutôt spécialisés sur la sécurité des aliments : ce n'est donc qu'exceptionnellement qu'ils peuvent remporter des appels d'offres sur la santé au travail. Dans de tels cas, l'Anses les finance sur fonds propres.

Les hôpitaux facturent les soins dispensés aux bénéficiaires de l'AME selon le tarif journalier de prestation (TJP) et non selon le tarif du groupe homogène de séjour (GHS). Or, le TJP a fortement augmenté au cours des dernières années, ce qui explique la croissance des dépenses hospitalières. L'AME fait, par ailleurs, l'objet d'une dotation spécifique au sein des Migac.

Les crédits du programme « prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » connaissent effectivement une diminution globale de 4,7 %. La prise en compte des territoires médicaux sous-dotés relève des ARS. Celles-ci ayant été mises en place en avril dernier, il est encore trop tôt pour dresser un bilan sur ce sujet. Mais les agences bénéficient de crédits pour effectuer ce travail et l'augmentation du numerus clausus devrait finir par avoir des résultats sur la présence médicale dans les territoires sous-dotés.

Marie-Thérèse Hermange. - Pourquoi les crédits consacrés à la qualité, la sécurité et la gestion des produits de santé et du corps humain connaissent-ils une si forte diminution ?

Alain Milon, rapporteur pour avis. - Cette diminution résulte pour l'essentiel de la suppression de la subvention de l'Etat à l'Afssaps.

Marie-Thérèse Hermange. - Il conviendrait de s'intéresser de plus près aux crédits consacrés à la gestion des produits de santé. Quel est le coût, par exemple, de la conservation des embryons surnuméraires ? La politique de prélèvement du sang de cordon ombilical ne bénéficie pas de crédits suffisants alors même qu'elle peut contribuer à sauver des vies.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

La commission adopte huit amendements présentés par le rapporteur et tendant à :

- supprimer l'article 86 bis, qui prévoit la possibilité de moduler par décret la composition du panier de soins accessible aux bénéficiaires de l'AME ;

- supprimer les dispositions de l'article 86 ter tendant à soumettre à accord préalable des caisses les soins hospitaliers délivrés aux bénéficiaires de l'AME, dont le coût dépasse un montant déterminé par décret ;

- supprimer l'article 86 quinquies tendant à instaurer un droit de timbre de 30 euros pour entrer dans le régime de l'AME ;

- supprimer, au sein de l'article 48, les crédits de l'action « Pilotage de la politique de santé publique », afin d'obtenir le rétablissement de la dotation de l'Etat à l'Afssaps ;

- insérer un article additionnel avant l'article 86 octies pour confier à l'administration fiscale le recouvrement du droit progressif sur demandes d'autorisation de mise sur le marché affecté à l'Afssaps ;

- insérer un article additionnel avant l'article 86 octies visant à simplifier le régime des taxes perçues par l'Afssaps ;

- insérer un article additionnel avant l'article 86 octies pour assujettir à la taxe annuelle sur les médicaments titulaires d'une mise sur le marché, les médicaments orphelins dont le montant annuel des ventes excède 30 millions d'euros ;

- insérer un article additionnel avant l'article 86 octies pour instituer une taxe sur le chiffre d'affaires des produits cosmétiques.

Sous réserve de ces amendements, la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé », ainsi qu'aux articles 86 bis à 86 nonies qui lui sont rattachés.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

ARTICLE 48

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

86 084 595

Protection maladie

TOTAL

86 084 595

SOLDE

- 86 084 595

ARTICLE 86 BIS

Supprimer cet article.

ARTICLE 86 TER

Alinéas 1 et 2

Supprimer ces alinéas.

ARTICLE 86 QUINQUIES

Supprimer cet article.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 86 SEPTIES

Après l'article 86 septies , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au dernier alinéa de l'article L. 5121-16 du code de la santé publique, les mots : « modalités prévues pour le recouvrement des créances des établissements publics administratifs de l'État » sont remplacés par les mots : « procédures et sous le bénéfice des sûretés prévues par le code général des impôts en matière de contributions directes ».

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 86 SEPTIES

Après l'article 86 septies , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l'article L. 5121-16 est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :

« Donnent lieu au versement d'un droit progressif dont le montant est fixé par décret dans la limite de 45 000 € :

« a) Toute demande d'autorisation de mise sur le marché mentionnée à l'article L. 5121-8 ;

« b) Toute demande de reconnaissance par au moins un autre État membre de la communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par le directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé mentionnée à l'article L. 5121-8 ;

« c) Toute modification d'autorisation de mise sur le marché mentionnée à l'article L. 5121-8 ;

« d) Toute demande de renouvellement d'autorisation de mise sur le marché mentionnée à l'article L. 5121-8 ;

« e) Toute demande d'autorisation d'importation parallèle délivrée dans les conditions fixées par le décret prévu par le 12° de l'article L. 5124-18 ;

« f) Toute demande de renouvellement d'autorisation d'importation parallèle délivrée dans les conditions fixées par le décret prévu par le 12° de l'article L. 5124-18. » ;

2° L'article L. 5121-18 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La déclaration est accompagnée du versement du montant de la taxe. » ;

b) À l'avant-dernier alinéa, les mots : « dans les deux mois à compter de la date de la notification du montant à payer » sont supprimés ;

3° Les dispositions du 2° du présent article s'appliquent à compter du 1 er janvier 2012.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 86 SEPTIES

Après l'article 86 septies , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le dernier alinéa de l'article L. 5121-17 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« La taxe n'est pas exigible pour les médicaments orphelins au sens du règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1999, concernant les médicaments orphelins, dont le montant des ventes, tel que défini au troisième alinéa, n'excède pas 30 millions d'euros. »

II. - Les dispositions du I s'appliquent à compter de la taxe due au titre de l'année 2011.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 86 SEPTIES

Après l'article 86 septies , insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 5131-7-3 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. L. .... - Les produits cosmétiques définis à l'article L. 5131-1, mis sur le marché français, sont assujettis à une taxe annuelle perçue par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé à son profit. Elle est exigible des fabricants ou, pour les produits importés hors de la Communauté européenne, de leurs mandataires.

« Le taux de cette taxe est fixé à 0,1 % du chiffre d'affaires annuel hors taxes réalisé. La taxe n'est pas exigible lorsque les ventes n'ont pas atteint, au cours de l'année civile précédente, un montant hors taxes de 763 000 euros.

« Une obligation de déclaration est instituée selon les mêmes conditions et les mêmes pénalités que celles fixées aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 5121-18 pour les médicaments et produits bénéficiaires d'une autorisation de mise sur le marché.

« La déclaration est accompagnée du versement du montant de la taxe.

« À défaut de versement, la fraction non acquittée de la taxe, éventuellement assortie des pénalités applicables, est majorée de 10 %.

« La taxe est recouvrée selon les modalités prévues pour le recouvrement des créances des établissements publics administratifs de l'État.

« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret. »


* 1 Loi 2009-879 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

* 2 Ordonnance n o 2010-18 du 7 janvier 2010 portant création d'une agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

* 3 Décret n o 2010-719 du 28 juin 2010 relatif à l'agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

* 4 Rapport n° 685 (2009-2010) d'Alain Milon, fait au nom de la commission d'enquête sur la grippe A (H1N1), déposé le 29 juillet 2010.

* 5 Rapport de Pierre Delomenie et Vincent Maymil, Mission d'évaluation du Haut Conseil de la santé publique, Igas, janvier 2010.

* 6 Intervention de Jean Marimbert devant la presse le 16 novembre 2011.

* 7 règlement (CE) n°1223/2009.

* 8 Loi n° 99-641.

* 9 Loi n° 93-1027 du 24 août 1993 relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France.

* 10 Décision n° 225576 CE sous-sections réunies du 7 juin 2006, association Aides et autres.

* 11 « La Santé des exilés », Rapport d'activité et d'observation 2009 du Comité médical pour les exilés (COmede).

* 12 Référence

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