B. LA DIMINUTION DES SUBVENTIONS SE TRADUIT PAR UNE AIDE AU DÉVELOPPEMENT COMPOSÉE ESSENTIELLEMENT DE PRÊTS ET ACCESSOIREMENT DE DONS

1. L'évolution de l'aide française se caractérise par l'augmentation importante des prêts et une diminution des capacités d'intervention sous forme de dons

Le total des prêts comptabilisés dans la déclaration d'APD de la France à l'OCDE a été multiplié par près de trois, entre 2005 et 2009. Cette augmentation est principalement due à la hausse de 830 millions d'euros des prêts permettant de financer des projets, dont le montant s'établit en 2009 à plus d'1,8 milliard d'euros.

Prêts bilatéraux , en M€

2005

2006

2007

2008

2009

TOTAL Prêts

658

764

733

1329

1873

La multiplication par trois de prêts consentis par la France au titre de l'aide au développement a été rendue possible par un effet de levier croissant entre le volume total de prêts concessionnels octroyés et l'effort budgétaire correspondant (principalement sous forme de bonifications de taux d'intérêt). Autrement dit, on a prêté plus pour un montant de bonification stable ou en légère augmentation.

L'augmentation de cet effet de levier constitue d'ailleurs un objectif de performance de l'AFD dans la loi de finances.

Indicateur 3.1 : Montant d'aide au développement apportée par l'AFD sous forme de prêt par euro de subvention de l'Etat

(du point de vue du contribuable)

Unité

2009

Réalisation

2010

Réalisation

2011

Prévision PAP 2011

2011

Prévision actualisée

2012

Prévision

2013

Cible

Montant d'aide au développement apportée par l'AFD sous forme de prêt par euro de subvention de l'Etat

5,2

6,7

6

9,2

9,3

9,4

Source PLF 2012

Le projet annuel de performance pour 2012 indiqué ainsi que le contrat d'objectifs de l'AFD doivent être un effet de levier de 9,3 en 2012 contre 5,2 en 2009 37 ( * ) et 3,1 en 2006, comme le retrace le tableau suivant.

Evolution de l'effet de levier des prêts de l'AFD depuis 2006 38 ( * ) .

L'augmentation du montant des prêts pour un coût relativement stable constituait ainsi un objectif tel qu'il figure parmi le peu d'indicateurs de performance de la mission aide au développement.

Si l'objectif d'augmentation des prêts a été atteint, vos rapporteurs s'interrogent néanmoins sur la pertinence de cet objectif par rapport à la mission première de la coopération au développement. On comprend bien la logique d'optimisation de la dépense publique qui est de maximiser le montant des financements obtenus par euro de subvention. La question est cependant de savoir à quel taux sont ces prêts. S'il s'agit de maximiser l'effet de levier, force est de constater que moins les prêts sont bonifiés, plus l'effet de levier est élevé.

A la limite, l'effet de levier est maximal quand les crédits de bonification sont presque nuls. Autrement dit, moins le prêt est « généreux », plus il est proche des conditions du marché, plus l'effet de levier est élevé. Moins c'est de l'aide, plus l'effet de levier est fort. De ce point de vue, il est paradoxal de considérer cet objectif comme un objectif de performance de l'aide au développement.

L'accroissement des prêts dans l'APD française déclarée est enfin lié à la possibilité offerte par les règles de l'OCDE de déclarer, au titre de l'aide au développement, des prêts non bonifiés à des taux proches du marché. Cette possibilité permet d'augmenter les décaissements éligibles à l'APD à bonifications constantes.

2. Cette situation contraste avec celle de la moyenne des pays du CAD.

La situation de la coopération française au regard de l'équilibre entre les dons et les prêts doit s'apprécier au regard des autres coopérations. La comparaison avec la Grande-Bretagne, qui a choisi un modèle inverse en concentrant son action sur les dons, permet d'éclairer cette singularité française.

La France a, en effet, nettement plus recours aux prêts que le Royaume-Uni. Sur la période 2005-2009, les montants déclarés en prêts ont été plus de 3 fois supérieurs en France qu'outre-Manche.

Prêts bruts, hors prêts de refinancement de la dette

en M$ courants

2006

2007

2008

2009

2010

France

1 149

1 124

2 146

3 536

2 463

Royaume Uni

468

802

780

554

687

Depuis 2005, la France a multiplié son volume de prêts par 3,3 contre 2 au Royaume-Uni.

La préférence française pour les prêts s'observe également lorsque l'on compare avec la moyenne des pays du CAD. La proportion de prêts bruts dans l'APD nette totale est deux fois supérieure en France à la moyenne des pays du CAD, la proportion de prêts nets y est six fois supérieure en France à la moyenne des pays du CAD.

Evolution de la proportion prêts/dons dans l'APD nette totale 2003-2009

Comparatif entre la France et les pays du CAD

Année

Proportion Dons

Proportion Prêts nets*

Proportion Prêts bruts

dans l'APD nette totale

dans l'APD nette totale

dans l'APD nette totale

France

Pays du CAD

France

Pays du CAD

France

Pays du CAD

2003

67%

82%

-14%

-2%

8%

11%

2004

73%

84%

-4%

-1%

9%

11%

2005

67%

71%

-4%

0%

8%

8%

2006

75%

77%

-9%

-2%

9%

8%

2007

88%

86%

-3%

-2%

11%

10%

2008

85%

84%

5%

1%

19%

11%

2009

77%

88%

12%

2%

21%

12%

*les prêts nets représentent des montants négatifs car les prêts remboursés sont retranchés aux prêts accordés

Le total ne représente pas 100% car les réaménagements de dette et les souscriptions en capital ne sont pas représentés.


* 37 L'effet de levier correspond au rapport entre le montant total des engagements en prêts concessionnels (souverains et non souverains) de l'AFD et le coût budgétaire correspondant. Un prêt d'un montant de 100 M€ avec un coût budgétaire de 20 M€ correspond ainsi à un effet de levier de 5. L'objectif fixé pour l'effet de levier correspond à un équilibre entre la maximisation de l'efficacité de la dépense publique - qui se traduit en particulier par le développement des activités de prêt souverain faiblement ou non bonifié à des pays émergents (Chine, Indonésie et Brésil notamment) - et la priorité réaffirmée aux pays d'Afrique - auxquels un niveau élevé de bonification doit être consenti.

* 38 L'évolution de 2006 à 2010 doit intégrer une modification de la méthode de calcul du coût-État des prêts de l'AFD en 2010. Cette modification a entraîné une augmentation comptable de l'effet de levier des prêts de l'AFD. Ainsi, avec la nouvelle méthode, l'effet de levier était de 7,2 en 2009 (contre 5,2 selon l'ancien calcul) et de 9,1 en 2010 (contre 6,7).

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