B. LES EFFORTS INTERNATIONAUX DE TRANSPARENCE SUR LES FLUX FINANCIERS SUD/NORD DOIVENT ÊTRE SOUTENUS.

Selon la Banque mondiale, les sommes qui, chaque année, sortent frauduleusement des pays en développement représentent près de 10 fois le montant de l'aide publique internationale. Tous les progrès qui sont enregistrés pour améliorer la transparence sont donc directement utiles pour la cause du développement.

Les printemps arabes ont montré que le ressentiment des populations s'est nourri, année après année, de l'impression que les richesses de leur pays ne leur profitaient pas, que la croissance ne valait que pour un petit nombre de privilégiés et que les revenus provenant des ressources naturelles, au lieu d'améliorer le sort de tous, finissaient thésaurisés dans des coffres à l'étranger.

Ces révolutions nous rappellent la nécessité de faire progresser la transparence et lutter contre la corruption.

Il s'agit non seulement de s'assurer du bon usage de l'aide au développement, mais également d'aider les pays en développement à lutter contre certains paradis fiscaux où s'amoncelaient les richesses soustraites aux populations des pays en développement, à lutter contre le pillage des revenus des industries extractives.

La France, avec ses partenaires, s'est mobilisée de longue date sur ces questions et mène une action déterminée dans les enceintes multilatérales compétentes. La France a soutenu la mise en oeuvre par le plus grand nombre possible de pays, de la convention des Nations unies contre la corruption, ainsi que la convention de l'OCDE. Elle a souhaité l'inscription à l'agenda du G20 de la question des paradis fiscaux.

Dans cette perspective, l'industrie extractive (pétrole, gaz et minerais) est un point central car elle génère des revenus considérables. En 2006, les seuls revenus du pétrole étaient estimés à 860 milliards de dollars. Cela représente environ 1,8 % du Produit intérieur brut (PIB) mondial pour cette année-là et plus de la moitié des PIB additionnés des 53 pays les plus pauvres de la planète pour la même période.

Les revenus colossaux des industries extractives ont souvent alimenté la corruption, les inégalités, la stagnation économique et les conflits. Ce paradoxe a été désigné sous le nom de "malédiction des ressources". Pour inverser ce phénomène, l'un des leviers consiste à mettre en place une gestion plus responsable et transparente des revenus générés par les industries extractives.

C'est pour lutter dans ce sens que l'Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), lancée par Tony Blair, en 2002, lors du Sommet mondial pour le Développement durable à Johannesburg, regroupe, sur une base volontaire, États, compagnies extractives et organismes de la société civile qui souhaitent promouvoir, dans les pays riches en ressources naturelles, une meilleure gouvernance des revenus extractifs. Elle est aujourd'hui la seule initiative volontaire et multilatérale qui contribue à la valorisation des ressources extractives à des fins de développement.

Vos rapporteurs se félicitent que la France, dans le cadre de ses engagements en faveur de la gouvernance démocratique et financière, compte parmi les contributeurs les plus importants de l'Initiative, avec près d'1,2 million d'euros versés au fonds fiduciaire de l'ITIE depuis 2006.

Le ministère des affaires étrangères et européennes s'est particulièrement engagé au Niger en 2009 et soutient plusieurs projets locaux au Burkina Faso, au Congo, en Côte d'Ivoire, en République de Centrafrique, en Guinée, en Mauritanie, au Niger et au Tchad depuis 2010. Ces projets sont portés essentiellement par des organisations de la société civile locale et destinés à sensibiliser les citoyens sur l'importance d'une bonne utilisation des revenus issus de l'extraction.

La France y joue un rôle particulier puisque 14 pays sont francophones et 17 sont membres de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF). L'ITIE compte aujourd'hui 33 pays membres, dont 21 pays africains.

Vos rapporteurs souhaitent que la France poursuive dans cette voie en favorisant l'adoption par l'Union européenne d'une législation imposant aux entreprises du secteur extractif de publier ce qu'elles paient aux pays où elles sont installées.

L'année dernière, les Etats-Unis ont adopté la loi dite Dodd-Frank, qui inclut un amendement, déposé par les Sénateurs Cardin et Lugar, introduisant l'obligation pour les entreprises extractives cotées à la bourse de New York de publier leurs paiements aux gouvernements. La loi Dodd-Frank représente un pas très important vers une plus grande transparence et, par la suite, une meilleure distribution des ressources pour le développement en Afrique.

La Commission européenne a décidé de saisir le renouvellement des directives comptables (78/660/CEE et 83/349/CEE) pour introduire une législation comparable à celle adoptée aux Etats-Unis et a présenté sa proposition le mardi 28 octobre 2011.

La proposition de la Commission inclut toute entreprise pétrolière, gazière et minière cotée à une bourse de l'Union européenne. Allant au-delà de la loi Dodd-Frank, la Commission inclut également les entreprises forestières, ce qui est très important pour nombre de pays africains. Les forêts représentent en moyenne 6 % du PIB de l'Afrique subsaharienne, soit trois fois plus que la moyenne mondiale. L'économie de dix-huit pays africains dépend à 10 % ou plus de la ressource forestière. De plus, la proposition inclut également les grandes entreprises non cotées.

Votre commission soutient l'initiative de la Commission européenne et notamment le fait d'inclure le secteur forestier et les grandes entreprises non cotées.

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