EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE POIDS DES NORMES, UNE PROBLÉMATIQUE QUOTIDIENNE POUR LES COLLECTIVITÉS LOCALES

Les normes constituent une problématique majeure pour les collectivités territoriales et les élus locaux , comme l'a notamment rappelé M. Vanik Berberian, président de l'Association des maires ruraux de France, lors de son audition par votre rapporteur pour avis.

Ce constat a été dressé à plusieurs reprises par notre Haute Assemblée, soucieuse de remplir sa mission constitutionnelle de représentation des collectivités territoriales. En février 2011, notre collègue Claude Belot a ainsi présenté, au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, un rapport d'information intitulé « La maladie de la norme », dans lequel il soulignait que « de la gestion de l'eau à la sécurité des bâtiments, des transports aux équipements sportifs, de la voirie à la restauration scolaire, la quasi-totalité des domaines d'intervention des collectivités territoriales sont aujourd'hui impactés par l'inflation normative » 1 ( * ) .

A l'initiative du Président Gérard Larcher, votre commission avait été consultée avant la rédaction de ce rapport. Le Président Jean-Paul Emorine avait ainsi effectué une communication devant votre commission le 19 janvier 2011, relevant plusieurs domaines dans lesquels une simplification des normes pesant sur les collectivités territoriales devrait être engagée. Cette contribution avait été reprise au sein du rapport de notre collègue Claude Belot.

Extrait du rapport « La maladie de la norme »
(p. 16-17)

(...)

« d) La contribution de la commission de l'Économie

Pour la commission de l'Économie, ce sont plus particulièrement trois secteurs qui comportent des normes « lourdes et exigeantes financièrement » pour les collectivités :

(1 ) La construction

La commission se réfère sur ce point à la note de l'AMF dans ses observations sur l'accessibilité des bâtiments par les personnes en situation de handicap (...). Elle rappelle que le coût de travaux de mise en accessibilité se chiffrerait, selon Dexia, à 15 milliards d'euros.

Elle cite également les contraintes résultant des normes liées à l'environnement (haute qualité environnementale, bâtiments basse consommation) ou à la sécurité (électricité, gaz...).

(2) L'urbanisme

Comme la commission des Lois, la commission de l'Économie appelle de ses voeux une simplification des documents d'urbanisme et de l'instruction des permis de construire. Elle cite en outre la mise en oeuvre de la loi Montagne et de la loi Littoral.

La commission indique cependant que, sur ces points, des améliorations peuvent être attendues après que, d'une part, le Grenelle II a habilité le Gouvernement à apporter des simplifications en matière d'urbanisme et, d'autre part, le secrétaire d'Etat au logement a mis en place des groupes de travail dont les conclusions sont attendues pour mars prochain.

(3) L'environnement

Se référant à une enquête de l'Association des maires de France (AMF), la commission considère que devraient prioritairement être examinés les domaines suivants :

- l'assainissement non collectif (élaboration du zonage, incidences financières et techniques des normes en matière d'équipement, visites diagnostic des installations) et collectif (conséquences de la loi sur l'eau sur les réseaux existants) ;

- les normes de qualité de l'eau potable ;

- la création de réserves d'eau (lutte contre les incendies et alimentation du bétail) ;

- les inventaires des zones humides et la gestion des pistes et sentiers forestiers.

La commission appelle également de ses voeux une « réduction des contraintes qui freinent, voire qui bloquent, la réalisation des projets », en allégeant le « parcours du combattant » des porteurs de projets : la multiplicité des études, des consultations et enquêtes publiques. »

Le 17 janvier 2011, le Président de la République a confié à notre collègue Éric Doligé une mission portant sur la simplification des normes applicables aux collectivités locales . Notre collègue a remis en juin 2011 un rapport conséquent 2 ( * ) : au terme de ses travaux, il a en effet identifié 268 points de droit qu'il serait souhaitable de faire évoluer vers plus de simplicité -tout en remarquant qu'une part importante des dispositions en cause ne relèvent pas du domaine législatif mais règlementaire.

Après avoir dressé l'inventaire des coûts et des difficultés que subissent les collectivités locales du fait de l'empilement de normes complexes, ce rapport procède à une analyse des causes des dérèglements normatifs constatés et décrit les axes d'une réforme de la culture normative de l'État passant notamment par la mise en place d'une obligation de résultat plutôt que de moyen, la substitution de référentiels de bonnes pratiques aux textes réglementaires à portée contraignante, la création d'un outil de planification de l'ensemble de l'activité réglementaire validée en début d'année en Conseil des ministres ou encore la détermination de règles de stabilité minimale dans le temps des textes associées à une clause de révision périodique, selon l'exemple des « sunset law » 3 ( * ) . Le rapport présente ensuite pas moins de 268 propositions détaillées dans quinze domaines, classés par ordre d'importance, en fonction des questionnaires et courriers reçus par la mission, à savoir : l'accessibilité, la culture, l'urbanisme, l'eau et l'assainissement, l'environnement, le sport, le fonctionnement des collectivités locales, les services départementaux de secours et d'incendie, la restauration collective, les marchés publics, la fonction publique territoriale, l'éducation et la formation, les politiques sociales et médico-sociales, l'outre-mer et les finances locales.

Ce rapport a abouti au dépôt de la présente proposition de loi sur le bureau du Sénat le 4 août 2011.

Votre rapporteur pour avis souligne la qualité du rapport de notre collègue Éric Doligé, qui constitue une base de travail et de réflexion importante. L'ensemble des élus locaux sont confrontés quotidiennement aux coûts, aux délais et aux risques juridiques générés par la complexité normative. Votre commission pour avis, à l'unanimité, partage donc, dans sa finalité, la démarche de simplification des normes qui a conduit au dépôt de la présente proposition de loi.


* 1 « La maladie de la norme », Rapport d'information n° 317 (2010-2011) fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation sur les normes applicables aux collectivités territoriales, M. Claude Belot, p. 5.

* 2 « La simplification des normes applicables aux collectivités locales », Mission parlementaire du Sénateur Éric Doligé.

* 3 Aux Etats-Unis comme au Canada, les lois appelées « sunset law » comportent des clauses de réexamen de leur dispositif assorti d'un bilan coût avantage. Si celui-ci est positif, la loi est maintenue, sinon elle est abrogée ou modifiée.

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