III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION POUR AVIS

Votre commission pour avis estime que les conditions d'examen de la présente proposition de loi ne sont pas au niveau des enjeux soulevés par ce texte.

A. UN CALENDRIER D'EXAMEN PEU COHÉRENT

Votre commission pour avis déplore que le calendrier prévu pour l'examen de ce texte impose, une fois encore, un travail législatif précipité. Pourtant, comme le rapport de notre collègue Eric Doligé l'a rappelé, la précipitation est l'un des principaux facteurs de l'inflation et de l'instabilité normatives dont se plaignent les collectivités locales et nos concitoyens. Le Parlement légifère en effet trop, en partie parce qu'il légifère trop vite. Des lois incomplètes et imprécises sont donc publiées, qui rendent nécessaire l'élaboration de nouvelles lois pour corriger les défauts des précédentes, avec pour conséquence un manque d'intelligibilité et de sécurité des règles.

Le temps de discussion prévu pour l'examen en séance de ce texte est d'à peine 3 heures 30. Compte tenu de sa taille, de sa complexité et de ses défauts de fond et de forme actuels, le Sénat se trouve de ce fait placé devant deux hypothèses. Soit le texte est discuté en séance de manière détaillée et constructive, auquel cas il est impossible que la discussion aille au bout des 33 articles dans le délai imparti. Soit la discussion est menée « tambour battant », auquel cas le Sénat adopte un texte mal ficelé sur le sujet pourtant essentiel pour lui, représentant des collectivités territoriales. Le Sénat se trouve devant une alternative inacceptable : une discussion inachevée ou une discussion bâclée .

Votre rapporteur pour avis souligne qu'on constate ici de manière claire, une fois encore, une limite forte de la réforme constitutionnelle de juillet 2008. Celle-ci a souhaité revaloriser l'initiative des parlementaires, mais le temps d'examen en séance, encadré de manière extrêmement stricte, ne permet pas toujours de discuter dans des conditions satisfaisantes les propositions de loi les plus importantes.

Les délais pour instruire la présente proposition de loi sont également peu propices à un travail législatif de qualité. En effet, si ce texte a été déposé sur le Bureau du Sénat en août dernier, son inscription à l'ordre du jour a été décidée le 17 janvier 2012 en vue d'une discussion en séance publique dès le 15 février, ce qui a conduit à un examen du texte en commission dans la semaine qui précède. Un tel calendrier implique des auditions préliminaires réduites à la portion congrue, sans rapport avec l'importance et la difficulté du sujet à traiter. Dans ces conditions, il est difficile d'expertiser le texte de manière approfondie, ce que regrette vivement votre rapporteur pour avis .

Cette précipitation a d'autant moins de sens que la procédure accélérée n'a pas été demandée par le Gouvernement avant l'inscription à l'ordre du jour et que le texte suivra donc la navette législative classique, avec deux lectures dans chaque chambre avant la convocation d'une éventuelle commission mixte paritaire. Dans ces conditions, il est impossible qu'il soit adopté avant la suspension des travaux parlementaires de mars prochain. Notre Haute Assemblée devrait ainsi examiner dans la précipitation un texte qui, à supposer même qu'il soit adopté, n'aurait de toute manière aucune chance de franchir les étapes ultérieures de la procédure législative dans un avenir prévisible.

Le calendrier d'examen de ce texte ne permet donc pas de réaliser un travail législatif de qualité. Si le texte qui est soumis au Sénat est un texte qui mérite l'intérêt, comme le pense votre commission pour avis, si par ailleurs aucun motif de fond ou de forme ne justifie qu'on l'examine en urgence, alors le Sénat doit prendre le temps de le travailler en profondeur pour élaborer une loi claire et pertinente, qui simplifie les normes plutôt que d'ajouter de la complexité à la complexité déjà existante.

Votre rapporteur pour avis souligne par ailleurs que, depuis les annonces faites le 30 janvier 2012 par le président de la République concernant la majoration de 30 % des droits à construire, discuter des dispositions d'urbanisme contenues dans la présente proposition de loi peut paraître surprenant. À quoi bon en effet discuter des règles d'élaboration des PLU, de l'urbanisme de projet et des procédures d'aménagement quand, dans le même temps, le Gouvernement dépose un projet de loi qui, de manière uniforme et systématique, propose de majorer de 30 % les droits à construire au risque de faire table rase du travail de précision réalisé par les collectivités locales pour élaborer leur PLU ? On ne peut pas parler, d'un côté, d'urbanisme de projet et d'adaptation des règles aux circonstances locales et, de l'autre, proposer des outils relevant d'une conception directive de l'urbanisme.

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