IV. LA POLITIQUE D'ATTRACTIVITÉ : UN SECTEUR SAUVEGARDÉ

A. LA MISE EN oeUVRE D'UNE POLITIQUE D'ATTRACTIVITÉ

1. Les étudiants étrangers en France

Selon les statistiques du ministère des affaires étrangères, 229 570 étudiants étrangers sont inscrits dans les universités en France. Ils étaient 228 294 en 2010-2011 (+0,56 %) et 159 762 il y a dix ans. Ils représentent aujourd'hui 15,3 % des 1 499 651 étudiants inscrits dans les universités françaises. Si l'on ajoute les étudiants inscrits dans les autres établissements de l'enseignement supérieur, on atteint le chiffre de 288 544 contre 284 659 en 2010-2011 (+1,3 %) et une augmentation plus de 65 % en dix ans. La population étudiante étrangère représente 12,3 % des étudiants inscrits dans l'enseignement supérieur français.

La répartition par région d'origine fait apparaître que l'Afrique reste la première région d'origine des étudiants étrangers avec 45,6 %. L'Europe occupe la seconde place avec 25,5 % mais le flux des étudiants Erasmus restant inscrits dans leurs établissements d'origine contribue à minorer ces statistiques. On assiste à un certain rééquilibrage de la part de l'Afrique ayant été supérieur à 50 % il y a 5ans.

Répartition des étudiants de nationalité étrangère inscrits dans les universités françaises

2011-2012

Zones géographiques

2011-2012

Inscrits

en %

Europe

58 552

25,51%

Asie/Océanie

36 413

15,86%

Amérique

19 227

8,38%

Moyen-Orient

10 675

4,65%

Afrique

104 607

45,57%

Divers

96

0,04%

Total

229 570

100,00%

La répartition des étudiants étrangers par cycle d'études fait apparaître une proportion plus importante en doctorat qu'en master ou en licence.

2011-2012

Français

Étrangers

% étrangers / total

L

789 197

99 899

11,2%

M

442 057

102 041

18,7%

D

38 827

27 630

41,5%

TOTAL

1 270 081

229 570

15,3%

Source : MESR

La répartition par discipline montre que les sciences sont choisies par 28 % d'entre eux, suivies par les lettres (19 %), l'administration-économie gestion (19 %), les sciences humaines et sociales (13 %) et le droit (12 %).

2. La concurrence internationale

Selon les données de l'UNESCO, la mobilité étudiante internationale s'est accrue depuis 2005 de plus de 30 % avec 3 324 871 étudiants en 2009. Les projections pour 2025 tablent sur un nombre d'étudiants en mobilité à l'étranger de 7 millions. Le marché de la formation universitaire à l'étranger est donc en plein développement et il est devenu très concurrentiel.

Aujourd'hui 8 pays concentrent près de 70 % des étudiants en mobilité internationale. Les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie, la France et l'Allemagne restent les premiers pays d'accueil mais leur part relative est en régression avec l'arrivée de nouveaux entrants (Japon, Nouvelle-Zélande, Corée du Sud, Malaisie, Chine). La France était en 2009 la 4 ème destination choisie par les étudiants en mobilité derrière les États-Unis (660 581 étudiants), le Royaume-Uni (368 968) et l'Australie (257 637). Sa progression récente laisse croire qu'elle serait aujourd'hui à la 3 ème place. Elle est la deuxième destination des étudiants en échange Erasmus derrière l'Espagne.

3. Objectifs

Dans ce contexte, la politique d'attractivité de qualité à l'attention des élites étrangères mise en oeuvre par le ministère des affaires étrangères, en collaboration avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche, tend à promouvoir la mobilité des étudiants dans des disciplines prioritaires (sciences, économie, droit) à des niveaux master et doctorat et de rééquilibrer les flux en faveur de la France.

Cette politique repose sur une politique de promotion des études en France à travers le réseau culturel, mais aussi sur l'allocation de bourses. Elle suppose également que l'accueil des étudiants étrangers soit favorisé, et non découragé par des restrictions en matière de délivrance de titre de séjour. Vos rapporteurs ne peuvent se réjouir de ce point de vue de l'abrogation de la circulaire Guéant du 31 mai 2011 relative à la maîtrise de l'immigration professionnelle.

4. Le système des bourses

Comme il a été rappelé, la politique de bourses donne la priorité à l'excellence académique des étudiants (master-doctorat) et à certaines filières : sciences et sciences de l'ingénieur, économie-gestion-management, droit et sciences politiques.

Le renforcement de la sélectivité des procédures de recrutement est recherché, de même que des logiques de partenariat débouchant sur des cofinancements. L'attribution doit se faire sur des critères lisibles par des jurys constitués majoritairement d'universitaires des deux pays. Le développement de la communication en direction des futurs boursiers et des partenaires locaux, comme la systématisation du suivi des réseaux d'anciens étudiants et boursiers, sont recherchés. La politique vise aussi à accueillir plus d'étudiants issus des pays émergents.

Plusieurs dispositifs s'articulent dans le cadre de cette politique :

- un dispositif d'allocation par les postes diplomatiques ;

- un dispositif de bourses d'excellence mis en oeuvre par l'administration centrale dans le cadre des programmes « Eiffel » et « Quai d'Orsay-entreprises » cofinancé par le secteur privé français. Ces programmes visent l'élite des étudiants étrangers afin de former dans l'enseignement supérieur français les futurs décideurs ;

- des programmes de bourses cofinancées localement ;

- les bourses « Major » gérées par l'AEFE qui permettent aux anciens élèves des lycées français à l'étranger de poursuivre leurs études supérieures en France au-delà du 1 er cycle universitaire ;

- le programme de l'Université franco-allemande (UFA) cofinancé à parts égales par la France et l'Allemagne.

En 2011, le nombre total de bourses du Gouvernement français s'élève à 14 687. Ce nombre est en baisse sensible depuis une dizaine d'années (22 437 en 2002). Le nombre de mensualités versées s'établit à 76 465 alors qu'il était de 93 000 en 2005. La durée moyenne de mois par bousier a progressé et dépasse désormais 5 mois. Les crédits affectés n'ont cessé de diminuer 105 millions d'euros en 2005, 95 millions d'euros de 2007 à 2009, 75 millions d'euros en 2011. La France peine donc à maintenir sa politique en la matière.

La répartition par région d'origine :

Bourses du Gouvernement français en 2011

Régions/Effectifs

2011

Effectif

%

Union Européenne (26 pays hors France)

1 271

8,7%

Autres pays d'Europe

1 484

10,1%

Maghreb

2 897

19,7%

Afrique sub-saharienne

2 906

19,8%

Proche et Moyen-Orient (dont Égypte)

1 697

11,6%

Asie du Sud et du sud-est

1 317

9,0%

Extrême orient et Pacifique

1 345

9,2%

Amérique du nord

97

0,7%

Amérique centrale et sud

1 673

11,4%

TOTAL

14 687

100

Les étudiants originaires du continent africain ne représentent plus que 39,5 % des boursiers (46,3 % en 2000) ; la part des Européens reste stable (18,8 %) mais cette part modeste s'explique par la montée en puissance des systèmes de bourses sur fonds communautaires au premier rang desquels Erasmus. Le continent asiatique (18,2 % contre 13,8 % en 2000) progresse, ce qui est conforme à l'action menée en direction des émergents, comme le Proche-Moyen Orient et le continent américain.

Les orientations suivies en matière de disciplines sont respectées : les étudiants en sciences et sciences de l'ingénieur représentent 36 % des boursiers, ceux en administration-économie-gestion 20 %, les étudiants en droit et sciences politiques 6 %.

Un réforme est en cours de préparation pour simplifier le système des bourses : consolidation de leur assise juridique, définition de nouvelles règles relatives aux prestations accordées, rationalisation des prestations actuelles aux procédures complexes et aux coûts de gestion importants, afin de revaloriser le montant de l'allocation perçue par le boursier. Le nouveau dispositif devra permettre une importante simplification des procédures de traitement des dossiers par l'opérateur et une plus grande visibilité pour les postes diplomatiques prescripteurs. La réforme devrait être effectuée à coût constant et préserver le volume des bourses. La mise en oeuvre de la réforme pour la rentrée universitaire 2013 est visée.

5. Un opérateur réorganisé : Campus France
a) Une organisation nouvelle

Comme prévu par la loi du 27 juillet 2010, Campus France a été créé sous forme d'établissement public industriel et commercial. Son modèle économique et son organisation ont fait l'objet d'études approfondies qui ont retardé sa mise en place. Celle-ci est effective depuis le 1 er mai 2012 avec la dissolution du GIP Campus France et de l'association Egide. Le transfert des bourses gérées par le Centre national des oeuvres universitaires et scolaires a eu lieu le 1 er septembre afin d'éviter un double guichet pour la gestion des bourses destinées aux étudiants étrangers en France. L'établissement est placé sous la tutelle conjointe des ministères des affaires étrangères d'une part, de l'enseignement supérieur et de la recherche d'autre part. Un contrat d'objectifs et de moyens est en préparation.

Il permet la mise en place d'une chaîne d'accueil des étudiants étrangers allant de la promotion de l'enseignement supérieur français à la gestion par un guichet unique de la mobilité et de l'accueil des étudiants étrangers. Il permet à la France de disposer, comme ses concurrents allemands et britanniques avec le DAAD et le British Council, d'un véritable opérateur.

La reprise des conventions de gestion des bourses des gouvernements étrangers gérées par le CNOUS s'est dans l'ensemble bien déroulée. A ce jour, seules 8 conventions normalement actives en 2012 n'ont pas pu être reprises. Elles concernent 785 boursiers. 3 de ces conventions couvrant 763 boursiers étaient conclues avec les gouvernements de la Libye et de la Syrie pour lesquels des difficultés subsistent en raison de la situation politique. Compte tenu de la situation particulière de la Syrie, le ministère prend en charge la couverture sociale pour les boursiers actuellement en France.

b) Promoteur en relation avec le réseau culturel français à l'étranger dans toutes ses composantes et le réseau en France des universités et des grandes écoles

Pour mener à bien son action, l'établissement s'appuie sur le réseau des Espaces Campus France, placés dans chaque pays, sous l'autorité de l'ambassadeur. Ces Espaces, intégrés au réseau diplomatique et culturel, sont constitués de plus de 300 personnes dans 182 Espaces et 110 pays. Ils organisent, avec le soutien de l'établissement, des actions de promotion. En outre, la création de CEF « Centres pour les études en France » intégrés aux Espaces dans 31 pays a accru la capacité de la France à attirer les meilleurs étudiants par la dématérialisation des procédures d'inscription.

Le passage du statut du GIP, dans les instances duquel tous les partenaires sont représentés, au statut d'EPIC doté d'un conseil d'administration restreint qui était source d'inquiétude au sein du réseau des universités et des grandes écoles, a été pallié par la constitution d'un « forum Campus France » qui, outre la diffusion de l'information, ouvre, par des travaux en atelier, des perspectives en matière de formation des agents des services de relations internationales des universités ou d'amélioration des procédures. Cette culture du réseau est particulièrement importante à un moment où les prestations attendues de Campus France, notamment par les gouvernements ou institutions étrangères, vont au-delà de la simple gestion administrative et financière des bourses, et s'élargissent au placement des étudiants dans les établissements en fonction de leur profil et au compte-rendu de suivi de leurs activités.

c) Gestionnaire des bourses pour le compte du Gouvernement français

L'attribution des bourses reste de la compétence du réseau ou de l'administration centrale. La mission de Campus France consiste à prendre en charge l'étudiant à son arrivée et à lui verser en temps utile la bourse qui lui a été allouée. En fait, il s'agit d'un ensemble de prestations qui vont du logement, à le restauration, aux droits d'inscriptions, au prestations sociales, à certains frais de séjour, d'équipement et de déplacement...ce qui rend la gestion assez complexe. En contrepartie, Campus France reçoit une rémunération pour frais de gestion.

d) Prestataire pour les bourses dites des Gouvernements étrangers

Outre, la gestion des bourses du Gouvernement français ou le l'AEFE, une grande part de l'activité de Campus France consiste à gérer les bourses dites « des Gouvernements étrangers » qui sont en réalité mises en place par des institutions de nature diverse : Etat, collectivités locales, universités, fondations françaises ou étrangères... chacune représentant un cas particulier. Ces bourses représentent aujourd'hui entre un quart et un tiers des fonds gérés par l'établissement (40 millions d'euros sur 150 millions d'euros).

La présence d'un opérateur identifié et performant, travaillant sur toute la chaîne, du poste diplomatique à l'étranger aux universités d'accueil, est un atout pour l'attractivité de l'enseignement supérieur français, puisqu'il permet de proposer à des bailleurs étrangers une prestation de qualité, adaptée à leur besoin et enrichie de prestations de conseil, de placement des étudiants auprès des établissements, de suivi. Elle évite aux bailleurs un travail de mise en relation complexe dans un pays et dans un système dont ils connaissent mal les arcanes. Comme le déclarait M. Antoine Grassin, directeur général, entendu par vos rapporteurs, « Campus France apparaît comme un opérateur crédible, comme un point d'entrée vers notre système universitaire ».

Le développement de ces prestations répond à un besoin reconnu comme en témoignent les récentes conventions conclues par la France avec le Brésil qui, dans le cadre de son programme « Science sans frontière » a prévu de former d'ici 4 ans 10 000 étudiants brésiliens en France au niveau Licence générale et professionnelle, Master 1 et Doctorat, dans les domaines des sciences exactes, sciences de l'ingénieur, environnement et industries culturelles, mais aussi avec la Libye pour la formation de 300 assistants de français langue étrangère, la région irakienne du Kurdistan pour la formation de cadre de sa fonction publique, du Pérou...

Il constitue un marché prometteur : « à côté des pays de traditions établies dans le domaine universitaire qui agissent par souci de diversification, comme certains pays du Golfe qui envoyaient la totalité de leurs étudiants dans les systèmes anglo-saxons, la plupart aux États-Unis, apparaissent des pays émergents qui utilisent une partie de la rente procurée par les cours élevés des matières premières de leur sous-sol comme un investissement dans la formation de leurs futures élites. La France est attractive, elle figure dans le top 5 des pays qui accueillent des étudiants étrangers. Ces pays cherchent un opérateur pour les aider à placer les étudiants dans les établissements, c'est la mission de Campus France et c'est un atout car peu de pays ont un seul opérateur ».

Ces activités nouvelles, outre qu'elles répondent à l'objectif d'attractivité, sont en mesure de pallier les insuffisances de notre politique en lui permettant de se concentrer sur des cibles plus précises et d'être plus sélective. Elle permet en outre à l'établissement de se procurer des ressources propres pour financer ses activités grâce aux frais de gestion qu'il facture. Campus France développe son offre et prospecte de façon active ces institutions susceptibles de mettre en place des partenariats.

e) Le fonctionnement de l'opérateur

Si la subvention de fonctionnement de Campus France est stabilisée en euros courants en 2013 à hauteur de 1,82 million d'euros afin d'assurer le bon déroulement de sa mise en place, l'opérateur bénéficie d'un transfert 9 ( * ) de 2,40 millions d'euros destinés à financer la reprise des activités internationales du CNOUS ; Cette subvention couvrira la rémunération de 25 ETP (1,47 million d'euros) ainsi qu'une part du fonctionnement de l'établissement pour les activités transférés (0,92 million d'euros). Le montant global de la subvention de Campus France en 2013 sera donc de 4,22 millions d'euros et le plafond d'emplois de l'opérateur s'établira à 243 ETP sous plafond et de 43 ETP hors plafond (financés par les ressources propres de l'EPIC).

Cette subvention pour charges de service public est complétée par l'allocation de 1,9 million d'euros du programme 15 «  formations supérieures et recherche universitaire ».

6. Les moyens affectées à cette politique en 2013

Outre la subvention de fonctionnement à Campus France et une partie non identifiable de la dotation aux EAF et aux alliances françaises, les moyens de la politique d'attractivité sont essentiellement des crédits d'intervention destinés aux financements des bourses.

Bourses du gouvernement français (en euros)

P 185 « diplomatie culturelle et d'influence »

Action 02 « Coopération culturelle et promotion du français »

Bourses

et échanges d'expertise

4 123 988

Action 03 « Enjeux globaux »

Action 04 « Attractivité et recherche »

Bourses

66 394 444

P 209 « solidarité à l'égard des pays en développement »

Action 02 « coopération bilatérale »

Bourses

et échanges d'expertise

9 966 727

(pour partie)

Les crédits consacrés aux bourses du programme 185, mis en oeuvre dans le secteur de l'attractivité et de la recherche, des enjeux globaux, de la coopération culturelle et de la promotion du français, sont maintenus sur la période 2013-2015.

Les crédits dédiés aux bourses mises en oeuvre dans le secteur gouvernance sur le programme 209 diminuent de 7 % en 2013.

Les autres rubriques budgétaires permettant de mettre en oeuvre des programmes spécifiques de bourses sont en diminution : les autres moyens bilatéraux d'influence (programme de bourses cofinancées : -5 %) et la subvention pour charges de service public à l'Institut Français (bourses mises en oeuvre par les postes expérimentateurs (- 7 % en 2013).

La sous-action « attractivité et enseignement supérieur » stricto sensu, et mis à part la subvention de fonctionnement à Campus France, est dotée de 67,6 millions d'euros en dépenses d'intervention. Il s'agit essentiellement des bourses (55,88 millions d'euros) en légère hausse de 1 % par rapport à 2012. Les crédits pour les échanges d'expertise progressent de 2 % (2,09 millions d'euros). Les autres dotations aux EAF et aux établissements de recherche (2,37 millions d'euros) et destinés aux autres moyens bilatéraux (7,26 millions d'euros) diminuent respectivement de 6 % et 4 %.

Vos rapporteurs se réjouissent du maintien de l'essentiel des crédits destinés aux bourses du Gouvernement français, élément important de notre politique d'attractivité et de la subvention de fonctionnement à Campus France en phase de montée en puissance. Ils comptent beaucoup sur le dynamisme de cet établissement et sur la cohérence de ses actions pour développer un pan important de notre politique d'attractivité par la gestion intelligente et enrichie des bourses des gouvernements étrangers et autres organismes. De ce point de vue, Campus France constitue pour ces acteurs un portail d'accès à une offre de qualité mais souvent complexe et pour les établissements de l'enseignement supérieur un partenaire de premier ordre de leur ouverture sur l'international.


* 9 En provenance du programme 231 « vie étudiante » de la mission « recherche et enseignement supérieur »

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