SIXIÈME PARTIE - LA POLITIQUE DE COOPÉRATION DOIT PRENDRE LA MESURE DE LA CONVERGENCE ENTRE LES QUESTIONS DE DÉVELOPPEMENT ET LES QUESTIONS DE PRÉSERVATION DES ÉQUILIBRES SOCIAUX ET ENVIRONNEMENTAUX DE LA PLANÈTE

I. LES OBJECTIFS DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET LE CADRE POST OMD DÉFINIRONT LE VISAGE DE LA COOPÉRATION DE DEMAIN

Les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ont été adoptés en 2000 avec un horizon de 15 ans. Ils ont représenté un engagement sans précédent : pour la première fois de son histoire, notre planète, de manière unanime, se fixait des buts communs destinés à améliorer la condition de ses habitants et à lutter contre la misère.

Pour la première fois se dégageait ainsi une vision d'un « intérêt général planétaire » et de biens communs dirigeant l'action collective comme les initiatives privées vers des objectifs concrets assortis d'un calendrier et d'indicateurs de suivi.

Le bilan de ces objectifs est fatalement contrasté, et les points de vue obligatoirement divers sur ce qu'ils ont apporté, ainsi que sur leurs limites. Mais il est clair que 2015 ne verra pas un monde où la pauvreté sera abolie, la nature préservée, et la paix garantie.

Il reste d'immenses progrès à faire pour réconcilier le monde réel et la vision d'un monde meilleur portée par la Charte des Nations unies de 1945, et les Objectifs du Millénaire pour le Développement tels qu'ils ont été imaginés en 2000. Le réchauffement climatique et la crise financière, économique et sociale qui depuis 2007 frappe les économies les plus développées nous rappellent l'impérieuse nécessité de réinventer des modèles de développement qui répondent aux besoins sociaux de tous les habitants de notre planète.

Le contexte mondial politique et économique a considérablement changé au cours des dernières années. La croissance des économies émergentes est devenue le moteur essentiel de la croissance mondiale. Les disparités au sein des pays en développement et entre eux ont augmenté et le RNB par habitant de quelques pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure a dépassé celui de certains États membres européens.

De même, de nouveaux acteurs sont apparus dans le domaine du développement, notamment des acteurs privés. Certains d'entre eux ont, par ailleurs, été pris en compte dans le Partenariat mondial pour l'efficacité de la coopération au développement, conclu lors du forum à haut niveau sur l'efficacité de l'aide qui s'est tenu à Busan en 2011.

C'est dans ce contexte que les discussions sur la formulation d'Objectifs de développement durable (ODD) dans le cadre de la conférence Rio+20 prennent toute leur importance. Les résultats des discussions sur les ODD auront en effet une influence déterminante sur l'élaboration d'un éventuel cadre de développement post-2015.

La Déclaration du Millénaire, affirmant que « nous sommes collectivement tenus de défendre, au niveau mondial, les principes de la dignité humaine, de l'égalité et de l'équité » reste pertinente à bien des égards.

Mais les ODD devront prendre en compte les nouvelles réalités et tendances mondiales -entre autres l'économie politique, les évolutions macroéconomiques majeures, le changement climatique et l'épuisement des ressources naturelles, les crises et la volatilité, les dynamiques démographiques, les questions de gouvernance et les défis du développement humain, les migrations, la mobilité.

Le débat sur les ODD et donc sur le cadre post-OMD invite à considérer différents scénarios et options pour l'après 2015. Ces options peuvent être envisagées soit suivant la logique du cadre actuel des OMD avec un nouvel échéancier, avec ou sans nouveaux objectifs, cibles et indicateurs, soit en proposant une approche du développement plus profondément remaniée.

Le cadre post-OMD fait l'objet de nombreux débats. Les gouvernements, les institutions internationales, les laboratoires d'idées et les organisations non gouvernementales commencent à échanger autour du cadre post-2015. Le nombre d'ateliers et de publications récentes confirme un intérêt croissant pour cette question.

L'Union, qui continue de soutenir activement les OMD, s'est engagée dans ce débat. Parallèlement, le Rapport Européen sur le Développement (RED) de 2013 examinera certains des principaux défis pour les 15 années à venir, ainsi que le rôle que la communauté internationale pourrait tenir, y compris à travers un nouveau cadre de développement.

Le Sommet des Nations unies sur les OMD de 2010 a d'ores et déjà souligné, à juste titre, l'importance d'une intégration des enjeux de la croissance et d'une bonne gouvernance aux côtés des OMD dans une approche globale du développement. Au premier rang des défis alors négligés par les OMD figure aussi la durabilité que l'OMD n'a que peu contribué à promouvoir.

La prise de conscience progressive de l'impact du changement climatique, de la diminution de notre biodiversité, de la dégradation des écosystèmes et de la raréfaction des ressources a placé la préservation des Biens Publics Mondiaux (BPM) au coeur de l'agenda international.

La prise en compte de ces défis est essentielle pour permettre de réaliser les OMD. Le débat international tend donc, à juste titre, à appeler à une nouvelle structure intégrant à la fois les OMD et les BPM au sein d'Objectifs de développement durable, dont le principe a été agréé à Rio+20.

Le caractère inclusif du développement, qui suppose une réduction des inégalités et l'octroi d'un accès aux services essentiels et un environnement sain pour tous, fait également défaut aux OMD.

La promotion de la croissance économique et de la bonne gouvernance, des caractères durable et inclusif du développement figure également au coeur de l'agenda pour le changement adopté pour la politique européenne de développement. Cette actualisation des orientations de l'aide européenne doit constituer une base utile pour préparer la position de l'UE sur les futurs objectifs du cadre post 2015.

La réflexion sur l'agenda post 2015 doit s'inscrire dans la continuité de celle initiée au Sommet de Rio en faveur d'un nouveau cadre universel de développement durable et inclusif, reposant sur les trois piliers mis en avant dans la Déclaration de Rio+20, l'économique, le social et l'environnemental, intégrant ainsi OMD et ODD.

Il s'agira d'éviter de créer un agenda parallèle aux OMD mais de souligner les interactions inhérentes aux objectifs de la lutte contre la pauvreté, de la préservation des BPM, d'une croissance durable et partagée.

Le futur cadre post 2015 doit donc conserver l'ambition de définir un cadre de portée universelle à la forte puissance mobilisatrice et le principe d'un agenda centré sur un nombre restreint d'objectifs assortis d'indicateurs et de cibles permettant de répondre au mieux aux différentes situations de développement entre et au sein des pays partenaires.

Ce cadre global est d'autant plus important que le bilan de la Conférence Rio+20 a confirmé un risque de reflux du multilatéralisme et d'une remise en cause de l'universalité de certains droits dans un contexte où les pays émergents et en développement redoutent une limitation de leur souveraineté par des engagements internationaux.

Un cadre universel, assorti d'indicateurs de suivi, justifie également la mise en place de systèmes d'évaluation, au niveau des Nations unies, des organisations régionales comme des Etats.

Ces processus de suivi contribuent à améliorer la redevabilité à l'égard des politiques de réduction de la pauvreté. Il serait opportun de prendre précisément en compte la question de la qualité des services délivrés, au coeur de la problématique de la redevabilité, en introduisant des nouveaux types d'indicateurs visant à mesurer l'impact des politiques de réduction de la pauvreté.

Le cadre de suivi et de redevabilité qui se mettra en place après 2015 devra, enfin, être cohérent avec le processus post Busan, visant à améliorer l'efficacité et la transparence de l'aide internationale.

L'un des écueils du cadre des OMD est probablement d'être uniquement perçu comme un agenda des bailleurs pour intervenir en faveur du développement de pays moins avancés. Alors qu'il appelle à un partenariat global pour le développement, il entretient par là-même le clivage entre bailleurs et récipiendaires, pays dits du « Nord » et ceux du « Sud ».

Or la transition vers de nouveaux modèles de développement durable et partagé concerne tous les pays au monde. La préservation des BPM, la réduction de la pauvreté et des inégalités, l'instauration d'une gouvernance à même de réguler la mondialisation sont des défis globaux dont la négligence a de graves conséquences, directes ou indirectes, pour tous, y compris dans les pays développés.

Dans la lignée des principes reconnus à Rio+20 pour les ODD, le cadre post-2015 doit bel et bien définir des objectifs universels pour un développement durable et partagé pour tous les pays au monde et devraient réaffirmer qu'ils ont devant ces défis globaux des responsabilités communes. Ce sont leurs efforts politiques et financiers qui doivent en revanche être différenciés selon leurs capacités. Les cibles et les indicateurs pourront être déclinés, dans certains cas, de manière distincte selon le niveau de développement des pays, mais les objectifs ultimes doivent être identiques pour tous.

L'universalité du cadre post 2015 devrait permettre d'en faire un outil de renforcement de la gouvernance mondiale et d'élaboration de politiques publiques globales. Le bilan du Sommet de Rio+20 pose certes des jalons en la matière, mais les besoins en instances de régulation globales plus efficaces, dans les domaines sociaux et environnementaux restent on ne peut plus d'actualité.

2015 est d'ailleurs non seulement l'échéance à laquelle devraient être réalisés les OMD mais également celle à laquelle l'objectif de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l'APD devrait être atteint et une date importante pour les négociations climatiques. Dans une telle équation, le G77 pourrait utiliser ces différents enjeux comme leviers pour obtenir de nouveaux engagements financiers des pays développés, exclus à ce stade.

La position européenne sur le financement devra donc être très soigneusement préparée. Elle devrait être centrée sur la nécessité de diversifier les sources de financement du développement durable dans son ensemble.

L'UE devrait appeler à une plus grande mobilisation des ressources domestiques, par un appui notamment aux réformes fiscales, au développement des financements privés, et des financements innovants, ainsi qu'à un plus large recours aux partenariats financiers (trust funds, fonds fiduciaires, garantie des Banques de développement, mixage prêt-dons, facilités d'investissement...). L'UE doit insister sur le rôle central que doit conserver l'APD, mais sur sa nécessaire concentration sur les pays et les groupes les plus pauvres et les plus vulnérables.

II. LA MONTÉE EN PUISSANCE DES PROBLÉMATIQUES LIÉES AU DÉVELOPPEMENT DURABLE PEUT-ELLE ÊTRE FINANCÉE PAR LE SEUL BUDGET DE L'AIDE AU DÉVELOPPEMENT ?

Alors même que les responsables administratifs de la coopération française cherchent, à l'instar de vos rapporteurs, comment redéployer les crédits pour accroître son impact sur les pays prioritaires, le Gouvernement français comme l'ensemble des membres du G20 sont engagés dans des négociations sur le financement de la lutte contre le réchauffement climatique sur des sommes considérables.

Vos rapporteurs ont souhaité approfondir cette question pour comprendre dans quelle mesure ce nouveau défi qui s'impose à nous est de nature à modifier l'échelle des besoins de financement de notre politique de coopération.

Le développement durable comporte une double dimension :

- une dimension « verticale », qui correspond à de nouveaux objets de financement tels que des incitations financières pour réduire le rythme de la déforestation -aujourd'hui responsable de 20 % des émissions mondiales de CO 2 .

- une dimension plus transversale qui modifie l'approche de la coopération dans chaque secteur d'intervention. Ainsi, l'aide au développement en matière d'infrastructures peut, par des actions ciblées et peu onéreuses, encourager les pays à faire les choix technologiques adaptés. Choix qui permettront, demain, de réduire la facture écologique mondiale, tout en assurant leur propre développement.

C'est pourquoi il est difficile d'isoler, notamment dans les actions de l'AFD, toutes les dépenses qui contribuent à la lutte contre le réchauffement climatique, cette dimension étant aujourd'hui intégrée dans tous les projets.

Si on s'en tient à celles qui sont officiellement consacrées à la lutte contre le réchauffement climatique, on assiste, dans la programmation de l'AFD comme dans le budget de la mission Aide au développement, à une augmentation très significative.

Ainsi l'agence a-t-elle un objectif d'engagement financier pérenne et ambitieux en faveur du climat représentant 50 % en moyenne des octrois annuels de l'AFD dans les Etats étrangers et 30 % des octrois annuels de PROPARCO.

Cette augmentation répond aux engagements pris par la France lors des négociations internationales sur le climat. Lors de ces négociations, en 2009, à Cancun en 2010 et bientôt à Durban, le besoin de financements évoqué concerne des sommes considérables dont il convient de mesurer si elles sont de nature à modifier la structure du budget de la coopération.

A. LA MONTÉE EN PUISSANCE DES FINANCEMENTS DESTINÉS À LA LUTTE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE EST DÉJÀ SIGNIFICATIVE

Les administrations interrogées estiment que, de 2001 à 2009, la coopération bilatérale consacrée à l'environnement et à la protection des ressources naturelles est passée de 60 millions de dollars à 1,1 milliard de dollars, soit de 1,9 % à 12,3 % de l'APD bilatérale.

Ceci inclut les financements de l'Agence française de développement, du Fonds français pour l'environnement mondial (FFEM) crée en 1994, mais également des instituts de recherche (l'Institut de recherche pour le développement (IRD), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), etc.) et des financements RPE et FASEP, gérés directement par la direction générale du Trésor.

Pour cette aide bilatérale, le montant des engagements sous forme de dons s'élève à 77 millions de dollars, soit environ 7 % du montant bilatéral total consacré à l'environnement, le reste (93 %) étant financé sous forme de prêts.

A cela s'ajoutent les contributions de la France à la protection de l'environnement, qui transitent par les organisations et fonds multilatéraux.

Cela inclut :

- les contributions aux différentes organisations internationales intervenant dans le domaine de l'environnement : l'ensemble des conventions des Nations unies relatives à l'environnement (dont les trois principales sont : la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la convention sur la diversité biologique et la convention des Nations unies de lutte contre la désertification), le financement du Programme des Nations unies pour l'environnement, ainsi que le financement de plusieurs accords et programmes régionaux en faveur de l'environnement,

- les contributions aux institutions financières internationales et aux fonds multilatéraux. La France participe financièrement aux instruments de coopération de l'Union européenne (FED, ICD, IEVP), ainsi qu'à la Banque mondiale et à l'ensemble des Banques régionales de développement (Banque asiatique de développement, la Banque interaméricaine de développement, la Banque africaine de développement, la Banque européenne de reconstruction et de développement et la Banque européenne d'investissement). Ces fonds consacrent une part de leurs ressources à la protection de l'environnement et des ressources naturelles, mais, à l'heure actuelle, seuls les financements des institutions européennes (incluant les prêts de la BEI) et ceux de l'AID sont comptabilisés. Ces derniers s'élèvent, en 2009, respectivement à 630 millions de dollars et 520 millions de dollars. Il est, par ailleurs, difficile d'estimer la part française dans la mesure où il n'existe pas encore de système d'imputation pour ces données financières sur l'environnement ;

- les contributions aux fonds environnementaux.

La France participe, en effet, au Fonds pour l'environnement mondial (FEM), créé en 1991 grâce à une initiative franco-allemande. Ce Fonds finance des actions de lutte contre le changement climatique, de protection de la biodiversité, de lutte contre la désertification, de protection de la couche d'ozone et de lutte contre les polluants organiques persistants. La contribution de la France est passée de 164 millions d'euros sur la période 2002-2006 à 154 millions d'euros sur la période 2007-2010 puis 215,5 millions d'euros pour 2011-2014, ce qui correspond à une augmentation de 57 % par rapport à la dernière reconstitution.

La France contribue également au Fonds pour les technologies propres de la Banque mondiale, qui a pour but d'aider les pays en développement à catalyser les investissements publics et privés nécessaires pour déployer des technologies économes en carbone à large échelle dans les pays émergents. Créé en 2008, la France y contribue à hauteur de 500 millions de dollars pour la période 2008-2012.

Vos rapporteurs observent que l'introduction de la préservation des biens publics mondiaux parmi les objectifs prioritaires de notre politique d'aide au développement commence à avoir d'importantes conséquences budgétaires.

Ils observent que ce nouvel objectif, par son ambition, est de nature à capter, à terme, une partie très significative des financements aujourd'hui consacrés à l'aide au développement.

Ils constatent que, dans les arbitrages budgétaires, cette extension des objectifs de l'APD, qui correspondent en partie à de nouvelles missions et à de nouvelles dépenses, n'est pas prise en compte.

Or, par ailleurs, les besoins exprimés au niveau international ne font que croître. La France, très en pointe sur ce sujet, va nécessairement participer aux nouveaux engagements qui ne manqueront pas d'être pris sur ce sujet.

B. COMPTE TENU DES ENGAGEMENTS DE LA FRANCE, ILS NE POURRONT QUE CROÎTRE

L'évaluation des besoins mondiaux de financement en matière de lutte contre le changement climatique a fait l'objet de nombreuses études, aux conclusions variées. Bien qu'elles insistent toutes sur la difficulté d'une évaluation juste de tels besoins, elles nous offrent des ordres de grandeur qui reflètent l'ampleur du défi.

Le rapport Stern sur l'économie du changement climatique est une référence : il évaluait en 2006 le coût global net de la lutte contre le changement climatique à environ 1 % du PIB mondial par an, soit un coût minimum de 5 500 milliards d'euros sur 10 ans. Il opposait néanmoins cette somme au coût du manque d'action ou de l'inaction, qui pourrait représenter de 5 % à 20 % du PIB mondial par an si l'augmentation dépasse de 2°C la température pré-industrielle.

La Banque mondiale évalue, quant à elle, le coût de la « révolution » nécessaire pour limiter la hausse de la température moyenne à 2°C par rapport aux niveaux pré-industriels à 400 milliards de dollars par an, en moyenne, d'ici 2030.

L'étude publiée en 2007 par le secrétariat de la Convention climat évaluait l'investissement et les flux financiers additionnels nécessaires à 200-210 milliards de dollars pour réduire les gaz à effet de serre de 25 % en dessous du niveau de 2000, d'ici 2030, dont environ 64 milliards pour les seuls pays en développement. L'investissement pour l'adaptation représente, quant à lui, plusieurs dizaines, voire centaines, de milliards de dollars en 2030. Au sein de la Convention, une étude plus précise dédiée aux besoins des pays en développement, à laquelle 10 pays en développement participent, est en cours (projet NEEDS).

Dans son rapport « Pathways to a Low Carbon Economy », le cabinet McKinsey avance des chiffres de l'ordre de 200 à 350 milliards d'euros par an à l'horizon 2030 pour le coût net de l'action - prenant en compte le coût de la mise en oeuvre des politiques publiques - soit 0,4 % du PIB mondial.

Pour la Commission européenne, les besoins en financement pour l'atténuation et l'adaptation au changement climatique, dans les pays en développement uniquement, s'élèveraient à 100 milliards d'euros par an environ d'ici 2020.

Sur la base de ces estimations et des négociations dans le cadre de la Convention climat, les Etats développés se sont déjà engagés sur des sommes considérables.

Les Accords de Cancun, en décembre 2010, ont permis d'ancrer les avancées de Copenhague dans le processus onusien, notamment en matière d'objectifs financiers de court et long termes. Les pays développés se sont ainsi engagés à mobiliser près de 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 pour répondre aux besoins d'atténuation et d'adaptation des pays en développement, grâce à une combinaison de sources multiples, à la fois publiques -dont les financements innovants- et privées (notamment marchés carbone).

Pour répondre aux besoins urgents et permettre la mise en place de stratégies à moyen et long termes, les pays développés se sont également engagés à mobiliser 30 milliards de dollars de ressources nouvelles et additionnelles, sur la période 2010-2012, en faveur des pays en développement, répartis de manière équilibrée entre les actions d'atténuation et d'adaptation.

Afin d'avancer dans la mise en oeuvre de l'engagement de long terme, l'Accord de Copenhague avait préconisé la mise en place d'un panel de haut niveau sur les sources potentielles de revenus. Ce Groupe de conseil de haut niveau sur les financements pour les changements climatiques a conclu que l'objectif de mobiliser 100 milliards par an d'ici 2020 par le biais de sources multiples et variées était ambitieux mais atteignable, avec un prix du carbone compris entre 20 et 25 dollars la tonne.

Quel que soit le mode de calcul, les sommes évoquées sont considérables par rapport à celles envisagées pour l'atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement.

A Gleneagles, en 2005, les pays du G8 et les autres donateurs se sont engagés à augmenter l'APD de 50 milliards entre 2004 et 2010, dont la moitié à destination de l'Afrique. L'APD totale a progressé de 48,9 milliards de dollars courants entre 2004 et 2010 (augmentation de 79,8 milliards à 128,7 milliards pour l'APD totale, et augmentation de 29,5 milliards à 46 milliards pour l'APD à l'Afrique).

Par rapport aux engagements de Gleneagles, il y a un déficit de financement de l'ordre de 1,27 milliard de dollars courants (19 milliards de dollars constants 2004) sur les 50 milliards, et de 8,5 milliards sur les 25 milliards à destination de l'Afrique (14,5 milliards en dollars constants).

Les Etats, parties prenantes aux accords sur le climat, ont déjà pris, dans le cadre de l'aide au développement, des engagements pour le rendez-vous de 2015 . Or, l'engagement des membres de l'OCDE d'allouer, d'ici 2015, 0,7 % de leur PIB au titre de l'APD concerne des sommes de l'ordre de 80 milliards supplémentaires par an.

En effet, en 2010, ce ratio était de l'ordre de 0,32 %. En partant d'un postulat de PIB constant d'ici 2015 (hypothèse volontairement simplificatrice), cet engagement correspondrait, en 2015, à une aide publique au développement de 293,5 milliards de dollars, soit 1 674,7 milliards supplémentaires par rapport au montant de 2010, soit environ 80 milliards par an.

C'est notamment une des conclusions du rapport de Bill Gates aux membres du G20 : « Si ces pays tiennent leur promesse, l'aide au développement bénéficiera chaque année d'une manne de 80 milliards de dollars supplémentaires à l'horizon 2015. » 59 ( * )

En résumé, alors que les pays développés se sont engagés à dégager plus de 80 milliards d'euros supplémentaires pour atteindre les OMD, ils devraient s'engager sur une centaine de milliards supplémentaires pour la lutte contre le réchauffement climatique.

On ne peut être que frappé par l'énormité des sommes dans un contexte marqué par la lutte contre les déficits publics.

Ramenés à la contribution française, ces efforts sont comparables aux crédits que la France consacre déjà à l'aide au développement.

Si la lutte contre le réchauffement climatique au niveau international doit être financée par le seul budget de la coopération, il faut prendre acte du changement de périmètre de la mission aide au développement et augmenter son montant en proportion.


* 59 Source « Mettre à profit l'impact de l'innovation pour financer le développement du 21em Siècle »: A report by Bill Gates to G20 leaders, Cannes Summit, November 2011

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