Avis n° 150 (2012-2013) de MM. Gilbert ROGER et André DULAIT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 22 novembre 2012

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N° 150

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2013 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VI

DÉFENSE : PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

Par MM. Gilbert ROGER et André DULAIT,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Jean-Claude Peyronnet, Xavier Pintat , Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner, vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger , André Trillard, secrétaires ; M. Pierre André, Mme Kalliopi Ango Ela, MM. Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 235 , 251 à 258 et T.A. 38

Sénat : 147 et 148 (annexe n° 8 ) (2012-2013)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le programme « Préparation et emploi des forces » constitue le coeur des activités du ministère de la défense. Il regroupe près de la moitié des crédits et plus des deux tiers des ressources humaines du ministère.

Avec 22,4 milliards d'euros, il comprend la majeure partie des dépenses de personnel, de fonctionnement courant des armées et de maintien en condition opérationnelle (MCO) des matériels.

Il contribue à la performance des autres programmes et à la politique des ressources humaines du ministère de la défense sous la responsabilité du chef d'état-major des armées (CEMA) et du secrétariat général pour l'administration (SGA).

Ce programme concentre donc toutes les problématiques de la gestion des ressources humaines des armées. Il constitue le coeur de la difficile manoeuvre des ressources humaines en cours.

Dans le projet de loi de finances pour 2013, les autorisations d'engagement du programme 178 « Préparation et emploi des forces » s'élèveront à 23 059 millions d'euros (+ 0,7 %) et les crédits de paiement à 22 432 millions d'euros (+ 1 %).

Dans l'attente des nouveaux équilibres qui se dégageront du futur Livre blanc en préparation et de sa traduction dans une loi de programmation militaire, courant 2013, ce budget est, conformément au souhait de votre commission, un budget « d'attente », qui, se situant dans la lignée de la transformation du ministère de la défense initiée par le précédent Livre blanc, préserve l'essentiel et n'hypothèque pas l'avenir.

Ce projet de loi de finances illustre cette année encore l'effort considérable qui est demandé aux armées pour contribuer au redressement des finances publiques. En effet, au-delà des déflations des effectifs en cours qui s'étalent jusqu'en 2015, il témoigne d'une réorganisation des méthodes de travail avec la mutualisation et la rationalisation du soutien commun, les restructurations territoriales, le déploiement des bases de défense, la poursuite des expérimentations d'externalisation.

Plus que jamais, la capacité de notre outil de défense à modifier son organisation sera en jeu. Les opportunités que présente cette réforme, tout à fait nécessaire, sont réelles. Mais les risques liés à cette réorganisation des armées sont importants, notamment en termes de préservation des compétences et de recrutement.

Une organisation rationalisée et mutualisée devrait être mise au service de la modernisation de notre outil opérationnel. Car malgré les difficultés de nos finances publiques, il nous faut, dans un monde plus que jamais instable, ne pas baisser la garde, pour pouvoir faire face à l'imprévu.

Or ne pas baisser la garde nécessite de maintenir une capacité d'intervention qui se construit sur la durée et s'entretient au jour le jour.

SECTION 1 - UN BUDGET D'ATTENTE ENTRE CONTINUITÉ ET TRANSITION

Le programme 178 pour 2013 s'intègre dans la stratégie globale fixée par la loi de programmation 2009-2014 qui prévoit un profond redéploiement des crédits des dépenses de personnel et de fonctionnement vers les dépenses d'équipement.

Budget de transition, le budget 2013 poursuit la trajectoire fixée par la LPM (2009-2014) en attendant les nouvelles orientations qui seront fixées par la prochaine LPM.

Dans le même temps, il prend en compte le décrochage considérable du budget de la défense par rapport au modèle fixé par le précédent Livre blanc.

En effet, comme l'a souligné l'Amiral Edouard Guillaud, chef d'état-major des armées, devant votre commission : « le modèle défini par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (LBDSN) de 2008 n'est plus soutenable, malgré les efforts consentis par l'Etat pour sa défense, malgré les efforts entrepris par les armées pour s'optimiser ».

Sans revenir sur l'ensemble de la loi de programmation, votre rapporteur souhaiterait rappeler ici le cadre budgétaire qu'elle avait fixé.

La loi de programmation (2009-2012) prévoyait une majoration des ressources de la défense, répartie pour plus de la moitié sur des crédits budgétaires, pour le restant sur des ressources exceptionnelles.

La majoration des crédits d'équipement prévue était supérieure à la majoration des ressources.

Un abattement de 1,8 milliard d'euros sur six ans, par rapport au niveau de 2008, était donc opéré sur les dépenses autres que l'équipement.

La diminution de cette enveloppe traduit un profond redéploiement de crédits, lié à la réduction des effectifs.

La déflation des effectifs, qui représentait 54 000 suppressions d'emplois équivalents temps plein, de 2008 à 2016, devait résulter de la réorganisation du ministère de la défense et de ses structures d'administration générale et de soutien, mais aussi de l'ajustement du format des forces aux nouveaux contrats opérationnels, qui entraînera des dissolutions d'unité, des fermetures de bases aériennes ou le non-remplacement de certains bâtiments de la marine.

Au terme de la programmation 2009-2014, les dépenses d'équipement devaient représenter 57 % des dépenses de défense hors pensions, au lieu de 50 % en 2008.

Un rééquilibrage devait également être opéré au sein des dépenses de personnel et de fonctionnement, au profit des capacités opérationnelles.

Or l'exécution de la loi de programmation n'a été globalement conforme à la trajectoire fixée que jusqu'en 2011, du moins en ce qui concerne les paiements et donc les livraisons des matériels. Pour ce qui est des commandes, les contraintes de la programmation budgétaire triennale 2011-2013 avaient déjà obligé à reporter la plupart des lancements de programmes nouveaux.

Jusqu'en 2011, la manoeuvre des ressources humaines s'est déroulée conformément au rythme prévu. Cependant la masse salariale s'est maintenue pendant la période limitant les économies attendues de la baisse des effectifs.

Le décrochage des ressources amorcé dès 2011, avec l'impossibilité de consommer les ressources exceptionnelles des cessions de fréquences, s'amplifie en raison de la crise financière qui a contraint le budget bien au-delà des économies prévues.

La trajectoire de la LPM en cours était bâtie sur une prévision d'augmentation en volume des ressources de 1 % par an à partir de 2012.

Or la loi de finances triennale prévoit une diminution du budget de la défense de 4 % en valeur sur la période 2012-2015.

Au résultat, la divergence entre les ressources aujourd'hui prévues et la programmation initiale atteint 10 milliards d'euros sur la période 2013-2015, soit quasiment une année de masse salariale du ministère hors pensions.

C'est donc dans ce contexte particulièrement contraint qu'il faut comprendre l'évolution du programme 178 pour 2013.

La demande de crédits budgétaires de la mission défense inscrits dans le projet de loi de finances pour 2013 diminue de 0,7 % en valeur pour s'établir à 30,15 milliards d'euros.

Si l'on intègre les recettes exceptionnelles attendues, qui augmentent de près de 20 % par rapport à l'an dernier, la mission défense bénéficiera d'un total de 31,42 milliards d'euros de crédits, soit une stabilité parfaite (0 % valeur) par rapport à l'an dernier.

En incluant les pensions, on obtient un total de 39,43 milliards.

Exécution annuelle/
prévision pour 2013

2009

2010

2011

2012

2013

Crédits budgétaires (hors pensions)

31,43

30,27

30,01

30,00

30,15

Ressources exceptionnelles

0,56

0,20

0,22

1,31

1,27

Plan de relance de l'économie

0,99

0,77

0,00

0,00

0,00

TOTAL (hors pensions)

32,98

31,24

30,23

31,31

31,42

Comme l'illustre le tableau ci-dessus, l'exécution budgétaire s'est écartée peu à peu de la loi de programmation 2009-2014 de sorte que fin 2012, ce sont près de 3 milliards d'euros qui manqueront pour financer les besoins des armées et du ministère.

La comparaison entre l'annuité de la LPM et le budget 2013 n'a plus qu'une pertinence réduite, en raison du cumul d'inflexions à la programmation intervenues depuis 2009, et plus particulièrement du précédent budget triennal 2011-2013, et des actualisations des planifications d'encaissement des recettes exceptionnelles.

Passage de la LPM au PLF 2013

Cet écart a nécessité principalement un aménagement du calendrier des commandes et des livraisons de matériels ainsi que des opérations d'infrastructures à hauteur de 5,5 milliards d'euros.

Compte tenu de la divergence entre ambition et moyens alloués, des difficultés ont été rencontrées pour tenir le contrat opérationnel tel qu'il avait été défini par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008.

Une telle situation impose lors de la rédaction, dès l'année prochaine, d'une nouvelle loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2014-2019 des conclusions du futur Livre blanc, une réflexion de fond sur le calibrage de notre outil de défense et notamment le format des armées.

C'est la conclusion du chef d'état-major des armées, l'Amiral Edouard Guillaud, lors de son audition le 24 octobre dernier :

« La situation à laquelle nous sommes confrontés est bien celle-ci : le modèle défini par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 n'est plus soutenable, malgré les efforts consentis par l'Etat pour sa défense, malgré les efforts entrepris par les armées pour s'optimiser. Pour fixer les idées, depuis quinze ans et la fin de la conscription, l'outil de défense est dimensionné, en moyenne, à trente deux milliards d'euros constants de 2012. Le nouveau projet de loi de programmation des finances publiques prévoit vingt neuf milliards d'euros pour 2015. C'est clairement un changement de portage !

« La conclusion est simple et sans appel : nos ambitions doivent être repensées. C'est ce à quoi travaille la commission du Livre blanc. A l'issue, nous devrons concevoir un modèle d'armées adapté à ces ambitions revisitées. Notez bien que je ne dis pas réduites, car on peut s'efforcer d'atteindre les mêmes effets par des moyens différents. C'est bien ce que fera le ministère de la défense, sous la direction de Jean-Yves Le Drian, lorsque le Président de la République, chef des armées, aura fixé le cap. » 1 ( * ) .

SECTION 2 - LES CRÉDITS DU TITRE 2

Dans le PLF 2013, les crédits de masse salariale sont stabilisés à un niveau pratiquement inchangé par rapport à celui des trois dernières années grâce à la poursuite de la déflation des effectifs.

I. UN BUDGET QUI PRÉVOIT LA POURSUITE DE LA DÉFLATION ET UNE STABILISATION DES CRÉDITS DE MASSE SALARIALE

A. UNE MISSION DONT LES CRÉDITS SONT PRÉSERVÉS

Dans le projet de loi de finances pour 2013, les autorisations d'engagement du programme 178 « Préparation et emploi des forces » s'élèveront à 23 059 millions d'euros (+ 0,7 %) et les crédits de paiement à 22 432 millions d'euros (+ 1 %).

Les principales mesures au titre du PLF 2013 sont les suivantes :

La prise en compte de l'objectif gouvernemental de réduction en 2013 de 7 % des dépenses de fonctionnement par rapport à la LFI 2012.

Le ministère s'est attaché à respecter cet objectif sur une assiette de crédits aussi large que possible, compte tenu de l'existence de dépenses incompressibles.

Sur cette base, les dépenses salariales sont maintenues au même niveau qu'en 2012, les efforts du programme 178 étant principalement axés sur l'alimentation, les frais de mutation, la formation, le fonctionnement courant et la communication.

Au bilan, le programme contribue à l'atteinte de l'objectif de 7 % de gains sur l'assiette hors dépenses de fonctionnement incompressibles identifiée par le ministère, ce qui permet, à l'échelle de la « mission Défense », de stabiliser les dotations de fonctionnement par rapport à la LFI 2012.

La consolidation du budget des bases de défense (BdD) bénéficie, en période de montée en puissance de la nouvelle organisation interarmées des soutiens, d'un budget porté à 700 millions d'euros hors fonds de concours par redéploiement des crédits de fonctionnement entre les différentes actions du programme.

B. UNE DÉFLATION QUI SE POURSUIT DANS LE CADRE FIXÉ PAR LA LPM AU PRIX D'UN EFFORT DE RÉORGANISATION CONSIDÉRABLE

Conformément à la loi de programmation, la déflation des effectifs avait déjà débuté en 2008, avec la suppression nette de 4 852 équivalents temps plein, et doit se poursuivre au-delà de 2014, portant le total des suppressions nettes à 53 310 emplois sur la période 2008-2016, et les suppressions brutes à 54 000 emplois, 690 emplois étant créés au profit des services de renseignement.

Prévisions du plafond d'emplois de la mission « Défense »

En ETPT

2009

2010

Déflation

2011

Déflation

2012

Déflation

2013

Déflation

PEA

314 259

305 237

-9 022

296 154

-9 083

288 076

-8 078

280 190

-7 886

EMR (1)

309 390

301 147

-8243

291 470

-9677

283 610

-7 860

Ecart

-4 869

-4 090

779

-4 684

-594

-4 466

218

(1) : Effectif moyen réalisé (exprimé en ETPT). Prévisions 2012 au 30 juin.

La prise en compte des nouveaux contrats opérationnels assignés aux armées, d'une part, de l'effort de réduction des soutiens et de l'administration, d'autre part, conduit à ramener l'effectif global des armées de 271 000, civils et militaires, en 2008, à 225 000 en 2014-2015.

L'ensemble de cette déflation de 20 % des effectifs devrait être réalisé sur une période de six à sept années.

La loi de programmation prévoit que les formats généraux évolueront ainsi :

- l'armée de terre reposera, à terme, sur un effectif de 131 000 hommes ;

- la marine de 44 000 hommes ;

- l'armée de l'air, de 50 000 hommes.

Sur l'ensemble des programmes budgétaires de la mission Défense, le programme 178, qui comprend à la fois 85 % des personnels et l'essentiel des effectifs dévolus au soutien, devra supporter la plus grande part des réductions d'effectifs :

Prévision des effectifs par programme

En ETPT

2008

2009

2010

2011

2012

2013

P 144

8 800

8 633

8 661

8672,5

8 760,5

8 820

P 146

14 812

14 304

13 193

12 539

12 043

11 529,5

P 178

282 468

276 837

268 733

260 065,8

252 590,5

245 174

P 212

10 127

10 700

11 652

12541,2

13095,2

13 148,5

Total

316 207

310 474

302 239

293 818,5

286489,2

278 672

En équivalents temps plein travaillés. Source : ministère de la défense

Cette déflation doit aux termes de la loi de programmation obéir à un double critère :

- elle doit globalement préserver la répartition entre emplois civils et emplois militaires au sein du ministère de la défense, et pour cela, elle doit concerner à hauteur de 75 % des effectifs civils et à hauteur de 25 % des effectifs militaires ; 2 ( * )

- elle doit porter à 75 % sur des emplois liés à l'administration et au soutien des forces et sur 25 % à des emplois touchant directement aux capacités opérationnelles.

Les suppressions d'emplois (ETPE) sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces » sont cependant réparties à 80 % sur des emplois militaires et 20 % sur des emplois civils.

La répartition des suppressions d'emplois à 75 % sur les emplois militaires et 25 % sur les emplois civils est respectée au niveau global de la mission « Défense ».

Par ailleurs, 75 % des suppressions portent sur les fonctions de soutien et 25 % sur les fonctions opérationnelles.

Afin de mettre en oeuvre la déflation des effectifs dans le respect de ces objectifs, le ministère de la défense a prévu d'agir sur les différents leviers suivants :

- la mutualisation et l'interarmisation des fonctions d'administration et de soutien jusqu'alors dupliquées entre armées ou services du ministère ;

- la densification d'un dispositif encore très dispersé , source d'une multiplication et d'un éparpillement des personnels de soutien ;

- une réorganisation et une clarification de la gouvernance du ministère, accompagnées d'une réduction des échelons intermédiaires au strict nécessaire ;

- l'externalisation des fonctions périphériques vers des opérateurs offrant des coûts inférieurs à ceux pratiqués en régie.

La réorganisation territoriale se traduit par la signature de douze contrats de redynamisation des sites de défense (CSRD), huit plans locaux de restructuration (PLR) et la création de soixante bases de défense (BDD) regroupant l'ensemble des formations du ministère de la défense présentes dans un même périmètre, en vue de mutualiser les moyens d'administration générale et de soutien commun. Ces bases sont appuyées par cinq états-majors de soutien de la défense (EMSD), à Paris, Rennes, Bordeaux, Metz, Bordeaux et Lyon.

Par ailleurs, de nombreux projets de modernisation doivent permettre de mener à bien les réorganisations de l'administration générale, du soutien et de la gouvernance du ministère, sur lesquelles repose une bonne part des économies attendues en personnels. Parmi ces projets, on peut citer :

- le regroupement des états-majors et services centraux du ministère sur un site unique à Balard, qui pourrait s'accompagner d'une forte diminution de la taille de ces états-majors et services (de 17 000 à 10 000 personnes selon certaines estimations) ;

- la réorganisation du maintien en condition opérationnelle aéronautique et terrestre ;

- le resserrement du dispositif de formation ;

- le resserrement des dispositifs de soutien « santé » et « produits pétroliers » ;

- la poursuite de la réorganisation de la DGA, dont les effectifs passeraient de 13 000 à 9 500 personnes ;

- la modernisation de la fonction « achats » ;

- le resserrement du dispositif de gestion des ressources humaines.

Votre rapporteur souligne que la grande manoeuvre des ressources humaines programmée est beaucoup plus qu'une réduction des effectifs. Il s'agit, en effet, d'une réforme, sans précédent, des méthodes de gestion des armées.

Le plus difficile reste à faire, c'est-à-dire identifier les quelque 4 000 derniers postes qui doivent être supprimés, car toutes les armées considèrent aujourd'hui avoir atteint un seuil qui met à mal la cohérence de leur fonctionnement.

Ainsi le « coeur projetable » de l'armée de terre devrait se situer en 2015 à 70 000 hommes, c'est-à-dire moins que le nombre de places dans le Stade de France, pour une population de plus de 63 millions d'habitants.

De même les effectifs de la marine avec 35 000 marins, soit une diminution de 45 % en 18 ans, sont, de fait, très inférieurs à ceux de la RATP.

Dans les mois qui viennent, la commission chargée de préparer le Livre blanc devra apporter une réponse à ces deux questions fondamentales concernant le format de nos forces : quelle défense voulons-nous pour notre pays ? Quel rang la France souhaite-t-elle tenir dans le concert des nations ?

C. APRÈS DES ANNÉES DE PROGRESSION, UNE MASSE SALARIALE QUI DEVRAIT SE STABILISER

Dans le PLF 2013, les crédits de masse salariale sont stabilisés à 11,3 milliards d'euros, soit un niveau pratiquement inchangé par rapport à celui des trois dernières années.

La masse salariale est maîtrisée et diminue grâce notamment aux efforts de déflation des effectifs. Les réformes et les restructurations permettront ainsi une réduction nette de 7 234 ETP sur le périmètre de l'ensemble du ministère de la défense, respectant scrupuleusement la trajectoire prévue par la précédente.

Vos rapporteurs soulignent cependant que ces dernières années les économies générées par la déflation des effectifs ont été compensées par des dépenses non prévues, des mesures de revalorisation indiciaire et indemnitaire et des mesures d'accompagnement social des restructurations.

Comme l'illustre le tableau suivant, les dépenses du titre 2 ne diminuent pas de 2008 à 2012.

Un constat souligné par la Cour des comptes qui, selon ses propres calculs, constate une progression de la masse salariale : « Pour la masse salariale, une économie nette cumulée de 1,1 milliard d'euros était attendue entre 2008 et 2011. Or, il apparaît que, si le ministère tient jusqu'à présent les objectifs en termes de réduction des effectifs, avec plus de 29 000 emplois supprimés à la fin de l'exercice 2011, la masse salariale continue sa progression, avec une augmentation de 1 milliard d'euros entre 2008 et 2011, ce qui conduit à douter de la réalisation effective d'économies et de leur affectation au profit de l'équipement des forces. »

Votre rapporteur ne peut que souligner cette situation paradoxale.

Il était prévisible que dans une première phase de la réforme, le coût de l'accompagnement social de la réforme et les mesures de revalorisation de la condition militaire limite la réduction de la masse salariale. Mais après une réduction de plus de 29 000 ETP, on pourrait s'attendre à une réduction plus rapide du titre 2 du budget de la défense.

Jusqu'à présent le décalage a été imputé à des dépenses non programmées comme l'intégration dans l'OTAN.

Votre rapporteur a souhaité approfondir les raisons de ce décalage.

II. LES ÉVOLUTIONS DES EFFECTIFS DU PROGAMME 178 POUR 2013

A. UNE DÉFLATION DES EFFECTIFS SE POURSUIT À UN RYTHME CONSTANT MALGRÉ LES DIFFICULTÉES CROISSANTES

Le programme 178 « Préparation et emploi des forces » représente 88 % du plafond ministériel des emplois autorisés du ministère de la défense et des anciens combattants. Il se décompose en 83 % de personnel militaire et 17 % de personnel civil.

Le plafond des emplois autorisés du programme 178 en 2013 s'élève à 250 223 ETPT, soit une évolution par rapport au PEA de la LFI 2012 de
-7 475,5 ETPT.

Prévisions du plafond d'emplois du programme 178

En ETPT

2009

2010

Déflation

2011

Déflation

2012

Déflation

2013

Déflation

PEA

276 837

268 733

-8 104

260 066

-8 667

252 590,5

-7 475,5

245 174

-7 416,5

EMR (1)

272 726

265 386

-7 340

255881

-9505

248 545,5

-7 335

Ecart

-4 111

-3 347

764

-4185

-838

-4045

139,5

(1) : Effectif moyen réalisé (exprimé en ETPT). Prévisions 2012 au 30 juin.

Calendrier des suppressions d'emplois programmées dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM)

En ETP

2010

2011

2012

2013

2014

POST 2014

Total

2010-2016

Programme 178

- 7 303

- 7 168

- 7 000

- 7 000

- 7 000

- 2 286

- 37 757

Le tableau ci-après présente l'évolution du plafond des emplois autorisé (PEA) du programme sur le seul titre 2 (excluant de fait les effectifs affectés à la présidence de la République ou au service industriel de l'aéronautique) et les suppressions d'effectifs, exprimés en équivalents temps plein travaillés (ETPT).

Ainsi, la colonne « déflation » présente les suppressions d'emplois programmées et la déflation exécutée en ETPT.

En ETPT

2009

2010

Déflation

2011

Déflation

2012

Déflation

2013

Déflation

PEA

276 837

268 733

-8 104

260 066

-8 667

252 590,5

-7 475,5

245 174

-7 416,5

EMR (1)

272 726

265 386

-7 340

255881

-9505

248 545,5

-7 335

écart

-4 111

-3 347

764

-4185

-838

-4045

139,5

(2) : Effectif moyen réalisé (exprimé en ETPT). Prévisions 2012 au 30 juin.

Le tableau ci-après présente l'évolution du PMEA du ministère de la défense sur le seul titre 2 (donc hors présidence de la République et service industriel de l'aéronautique) et les économies en ETPT générées par la déflation des effectifs, en programmation et en exécution.

En ETPT

2009

2010

Déflation

2011

Déflation

2012

Déflation

2013

Déflation

PEA

314 259

305 237

-9 022

296 154

-9 083

288 076

-8 078

280 190

-7 886

EMR (1)

309 390

301 147

-8243

291 470

-9677

283 610

-7 860

écart

-4 869

-4 090

779

-4 684

-594

-4 466

218

(2) : Effectif moyen réalisé (exprimé en ETPT). Prévisions 2012 au 30 juin.

Au global, les suppressions sur le programme 178 s'élèveront à 37 757 emplois sur la période 2010-2016.

Comme l'ont souligné les différents chefs d'état-major, la fin de la déflation reste le plus difficile à faire tant l'identification des quelque 4 000 derniers postes qui doivent être supprimés est difficile.

B. LES MODALITÉS DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS PRENNENT LE RISQUE DE TROP RESSERRER LES RECRUTEMENTS

Dans la loi de programmation, pour mener à bien la diminution du plafond d'emplois de la mission Défense, le ministère de la défense avait prévu d'utiliser trois leviers principaux :

- la régulation des recrutements et des renouvellements de contrats (4 000 militaires et 1 250 civils par an) ;

- la mobilité au sein de la fonction publique (1 100 militaires et 350 civils par an) ;

- les incitations financières au départ (1 200 militaires et 500 civils, dont 350 ouvriers d'Etat, par an).

En 2012, sur le périmètre du ministère, la déflation a été mise en oeuvre par ces trois types de leviers dans les proportions suivantes :

- 58,4 % la régulation par les flux ;

- 19,3 % le reclassement et mobilité au sein de la fonction publique ;

- 22,3 % les départs incités financièrement.

Il était initialement prévu un ratio de 60/20/20. Si les départs aidés sont conformes aux objectifs, les reclassements dans la fonction publique, pour le personnel militaire, n'ont pas été à la hauteur des objectifs, ce qui a contraint les armées à utiliser le premier levier au-delà de ce qui était prévu.

Le tableau ci-après fait état des déflations réalisées au titre des années 2008 à 2011, ainsi que des prévisions pour 2012, telles qu'elles ont été transmises au comité pour la modernisation du ministère (C2M), dans le cadre de sa réunion du 13 juillet dernier.

2008

2009

2010

2011

2012- PRÉVISION INITIALE

2012 - PRÉVISION ACTUALISÉE

ETPE 1

%

ETPE 1

%

ETPE 1

%

ETPE 1

%

ETPE 1

%

ETPE 1

%

Régulation des flux

6 939

85,8%

5 566

66,3%

4 861

58,1%

4 663

58,9%

4 498

57,7%

4 530

58,4%

Reclassement - Mobilité

1 150

14,2%

1 229

14,6%

1 446

17,3%

1 471

18,6%

1 500

19,2%

1 500

19,3%

Départs incités financièrement 2

1 599

19,0%

2 061

24,6%

1 777

22,5%

1 797

23,1%

1 768

22,3%

Total

8 089

8 394

8 368

7 911

7 795

7 798

1 Equivalent temps plein emploi

2 Les mesures d'aide aux départs incités financièrement ont été mises en place à partir du 1 er janvier 2009.

D'une manière générale, la « manoeuvre RH » du ministère de la défense se déroule dans des conditions proches de la prévision initiale.

On observe toutefois un ralentissement préoccupant des recrutements en 2012.

Par ailleurs, les difficultés rencontrées pour reclasser le personnel militaire au sein de la fonction publique de l'Etat, qui expliquent le résultat mitigé des « reclassements-mobilités », devraient être contrebalancées par l'attractivité des mesures d'incitation financière au départ, en particulier pour les ouvriers de l'Etat.

1. Un flux de recrutement qui a été ralenti en 2012

Le principal levier de la déflation des effectifs est la régulation des flux : non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux pour les civils et gel des recrutements des ouvriers d'État, non-recrutement et non-renouvellement de contrat pour les militaires.

Pour ces derniers, la régulation des flux porte principalement sur les personnels sous contrat qui forment l'essentiel de la composante opérationnelle. Il s'agit donc d'un exercice délicat, qui risque d'affecter la moyenne d'âge des militaires si l'équilibre entrées/sorties n'est pas correctement assuré.

Les armées continuent, pendant la conduite de la réduction du format, à recruter chaque année plus de 12 000 militaires du rang et plusieurs milliers d'officiers, de sous-officiers et de civils.

Dans un contexte de déflation significative, la tentation pourrait être grande de réduire le recrutement pour diminuer les effectifs, sans provoquer trop de départs parmi les anciens et sans mettre à mal trop de plans de carrière. Ce serait évidemment une erreur qu'il faut bien se garder de commettre : les armées doivent continuer à recruter pour conserver leur jeunesse et leur nécessaire dynamisme.

Or en 2012, on constate une inflexion significative des recrutements.

Recrutement : armée de terre

Catégories

2011

2012*

2013**

Officiers

433

375

409

Sous-officiers

749

613

651

Militaires du rang engagés 1

9 863

7 789

8 200

VDAT

1 349

1 335

1 300

1 Engagés volontaires de l'armée de terre (EVAT) + engagés volontaires de la légion étrangère (EVLE) tous BOP

* Données arrêtées au 31 juillet 2012 ** Chiffres prévisionnels.

Recrutement : marine

Catégories

2011

2012*

2013**

Officiers

133

139

131

Sous-officiers

757

675

687

Militaires du rang engagés

1292

1 171

1 425

Volontaires

588

342

570

* Données arrêtées au 31 juillet 2012 ** Chiffres prévisionnels.

Recrutement : armée de l'air

Catégories

2011

2012*

2013**

Officiers

162

173

165

Sous-officiers

1 064

1 071

1 267

Militaires du rang engagés

550

798

800

Volontaires

77

123

150

* Données arrêtées au 30 juin 2012) ** Chiffres prévisionnels.

Pour 2012, les effectifs des recrutements externes de militaires sont en diminution par rapport à 2011.

Les recrutements ont été affectés par la mesure de gel de 10 % en 2012, soit 2 000 emplois afin de maintenir la masse salariale.

Votre rapporteur ne peut que souligner le fait que si la déflation d'effectifs se fait en resserrant trop les recrutements, cela se traduira par :

- le vieillissement des armées,

- un déséquilibre de la pyramide des grades,

- un embouteillage des carrières,

- et vraisemblablement un gonflement des soutiens.

2. Des difficultés de recrutement des militaires du rang

Cette diminution des postes s'accompagne d'une difficulté de recrutement de militaires du rang, dans certains domaines de spécialité bien identifiés au sein des armées.

Malgré la réalisation des objectifs de recrutement des officiers, l'armée de terre enregistre depuis 2011 une baisse des niveaux quantitatif et qualitatif des candidats au recrutement officiers sous contrat « OSC », en particulier les « OSC/E ».

Malgré le contexte national du marché de l'emploi, la ressource de la filière « encadrement des formations » reste difficile à capter, avec un ratio de sélection en baisse constante. Il est à noter que des tensions persistent dans certains métiers tant pour les sous-officiers que pour les militaires du rang (informaticiens, métiers de bouche et du bâtiment, maintenanciers).

Les récentes analyses démontrent cependant une baisse sensible du nombre de candidats qui s'est accélérée depuis 2008 (-13,5 % entre 2007 et 2008). Cette baisse concerne principalement les sous-officiers et les militaires du rang. Cette situation est préoccupante pour l'armée de terre puisque le nombre de candidats par poste n'excède pas 1,3 là ou dans d'autres fonctions publiques les ratios sont proches de 10 candidats pour un poste.

L'organisation mise en place doit être capable de recruter 14 000 jeunes annuellement. Il doit être répondu aux besoins des forces tout au long de l'année. Dans l'armée de terre seule, près de 300 types d'emplois différents sont proposés dans l'ensemble des régions métropolitaines. C'est donc une organisation complexe faite pour traiter un grand nombre de postulants mais qui doit néanmoins être capable de se mettre à l'écoute de chacun des engagés potentiels.

Par rapport aux emplois de la catégorie C de la fonction publique civile, la très faible sélectivité du recrutement des militaires du rang est soulignée par le Haut Comité de la condition militaire. En effet, là où il y a deux candidats pour un poste dans l'armée de terre, on trouve dans le civil des proportions plus proches de dix candidats pour un poste.

Pour la marine, la baisse du nombre de dossiers de candidatures amorcée en 2011 se confirme en 2012. Par ailleurs, les difficultés de recrutement en 2012 portent principalement sur les spécialités des opérations navales et de l'aéronautique navale, mais également sur les métiers du domaine de la restauration chez les militaires du rang.

Pour l'armée de l'air, la qualité du recrutement des militaires sous contrat demeure globalement satisfaisante. Malgré la diminution du recrutement dans un contexte de déflation, des difficultés persistent à honorer les recrutements "militaire du rang". Compte tenu de tensions sur certains segments du marché du travail, l'armée de l'air a du mal à recruter certains profils (spécialités opérationnelles aéronautiques) dont les besoins sont croissants.

Dans ce contexte de déflation des effectifs, recrutement et fidélisation restent plus que jamais les priorités.

3. Une fidélisation de personnels formés à considérer avec attention

Depuis la professionnalisation, la fidélisation des emplois d'exécution revêt ainsi un caractère important au regard des savoir-faire nécessaires à la mise en oeuvre des nouveaux matériels.

Le turn-over aujourd'hui accru nuit à la qualité de notre outil de défense. Il est synonyme d'un coût plus élevé pour le recrutement et la formation.

Les solutions à cette situation concernent tous les aspects de la gestion des ressources humaines du recrutement à la reconversion en passant par la gestion des hommes.

Les taux de dénonciation au cours de la période probatoire

Taux de dénonciation de contrat

Officiers (OSC)

Sous-officiers (EVSO 3 ( * ) )

Militaires du rang (EVI 4 ( * ) )

2009

5 %

15,35 %

30 %

Recrutement 2010

9 %

16,12 %

28,7 %

Recrutement 2011

5 %

16,78 %

24,4 %

Parmi la population des officiers sous contrat, une augmentation des départs dans les 6 premiers mois du contrat est enregistrée. Elle concerne surtout la population des officiers sous-contrat de la filière « encadrement des formations ». Les résultats seront consolidés en fin d'année 2012.

La légère augmentation du taux de dénonciation pour les sous-officiers pourrait s'expliquer par l'impact des pertes de l'armée de terre en OPEX.

Selon l'ENSOA 5 ( * ) , la crainte de ne pas détenir la compétence suffisante serait à l'origine de quelques départs venant compléter ceux des élèves qui prétendent ne pas être faits pour le métier des armes.

Taux de départs subis qui s'améliore 6 ( * ) :

Taux de départs subis 7 ( * )

Officiers

Sous-officiers

EVAT

2008

1,7 %

4,5 %

11,5 %

2009

2,4 %

5,5 %

11,5 %

2010

1,2 %

2,6 %

13,25 %

2011

1,3 %

2,4 %

9,21 %

Prévisions 2012

1,2 %

2,3 %

9,72 %

En 2011, le taux de départs subis consolidé au 31 décembre est globalement en retrait par rapport à 2010 avec une amélioration en particulier pour la population sensible des EVAT tandis qu'il se stabilise pour les officiers et sous-officiers. Le niveau contenu des départs subis pour ces catégories résulte d'une politique d'aide au départ ciblée ainsi que du rallongement de la durée de service dans le cadre de la réforme des retraites, dont les premiers effets ont été constatés à partir du dernier trimestre.

Concernant les sous-officiers de l'armée de terre, la baisse du taux de départs subis s'explique également par l'entrée dans sa phase de consolidation du nouveau parcours professionnel qui produit des effets encourageants sur la fidélisation.

L'amélioration de la situation pour les militaires du rang est visible en particulier dans la tranche [0 - 5 ans]. Elle trouve son origine au sein de plusieurs facteurs qui concourent à fidéliser cette ressource :

ü la rénovation du parcours professionnel avec des perspectives plus importantes en termes de durée de contrat ;

ü la promotion interne et l'évolution d'emploi ;

ü une formation initiale homogénéisée au sein des centres de formation initiale militaire (CFIM).

Enfin, le contexte économique constitue vraisemblablement un facteur de diminution des départs inopinés de manière générale. La situation demeure néanmoins fragile pour la catégorie des militaires du rang avec un niveau de dénonciation encore supérieur au seuil cible. En effet, les départs subis constatés sont inférieurs aux prévisions dans toutes les tranches d'ancienneté de service. Malgré cela, l'armée de terre n'a pas encore atteint la durée moyenne de services de 8 ans qu'elle s'est fixée pour ses EVAT. En 2011, elle se stabilise à 6 ans et 5 mois (légère progression). Des signes tangibles de fidélisation (ralentissement des départs) semblent montrer la pertinence des réformes engagées, dont les effets sont à consolider et seront pleinement mesurés à partir de 2014.

En 2012, le taux de départs subis est établi sur une hypothèse intégrant l'amélioration de la fidélisation constatée en 2011 pour la population des EVAT. Le taux de départs subis est en retrait par rapport à 2011 pour la catégorie des officiers et en-deçà du seuil de 3 % pour la catégorie des sous-officiers. Cela traduit ainsi les premiers effets du ralentissement attendu des départs dans le cadre de la réforme des retraites en 2012. Pour la catégorie des EVAT, le taux de départs subis est à ce stade légèrement supérieur à 2011 et correspond à une prévision prudente compte tenu du comportement « volatile » de cette catégorie, malgré la réduction de l'attrition durant le 1 er contrat escomptée à nouveau en 2012.

Au-delà de la période probatoire, la fidélisation des militaires du rang contractuels connaît une évolution préoccupante.

Le taux de renouvellement des contrats s'accroît.

Taux de renouvellement des « primo-contrat »

Officiers

Sous-officiers

EVAT

2010

69 %

70 %

68 %

2011

57 %

70 %

75 %

2012*

68 %

75 %

75 %

*Prévision arrêtée au 31/07/2012.

Le taux de renouvellement de contrat des officiers reste relativement stable ces dernières années, à l'exception de l'année 2011 pour laquelle un ajustement financier a été nécessaire en fin de cycle budgétaire.

Pour les sous-officiers de l'armée de terre, le renouvellement du 1 er contrat est crucial car il leur permet d'intégrer le cursus de formation de 2 e partie de carrière (BSTAT 8 ( * ) ) afin d'honorer à terme des postes de responsabilité plus élevée (NF3 9 ( * ) et NFS 10 ( * ) ). C'est une période délicate pour la fidélisation puisqu'elle se situe entre la fin de l'acquisition d'une première expérience de 5 ans comme sous-officier et l'entrée éventuelle dans une période de service d'au moins 10 ans supplémentaires.

L'encouragement au renouvellement du 1 er contrat demeure une priorité car il permet à la fois de disposer d'une ressource expérimentée sur le plan opérationnel, de contenir et rentabiliser les coûts de la formation initiale.

Actuellement, 88 % de la ressource de recrutement direct est encore présente après 5 ans de service, pour 74 % en 2011.

L'âge moyen de départ des militaires du rang n'a cependant cessé de baisser ces dernières années pour se stabiliser en dessous de 7 ans. Les carrières sont de plus en plus courtes car il devient difficile de fidéliser ce type de personnel.

Comme il constitue le coeur des unités de l'Armée de Terre, ce « turnover » devient une contrainte qui impose un effort accru et continu de formation.

Les Armées, et plus particulièrement l'Armée de Terre, ont besoin d'un équilibre entre le recrutement permanent d'un personnel jeune et le coût que représentent ce recrutement et la formation du personnel.

Aujourd'hui, l'Armée de Terre recrute 13 000 personnes chaque année et on constate un essoufflement de la formation permanente d'un personnel qui est de moins en moins fidélisé.

Pour tenter d'enrayer ce phénomène, l'Etat-major de l'armée de terre a décidé de mettre en place des centres de formation initiale des militaires (CFIM) à destination des recrues pour optimiser les moyens et pour veiller à la stricte orthodoxie en matière de délivrance de la formation.

La montée en puissance des 12 Centres de Formation initiale militaire (CFIM) créés depuis l'été 2010 a permis d'obtenir des résultats encourageants dans le domaine de l'attrition, tout en garantissant l'orthodoxie de l'instruction et de l'éducation dispensées à nos jeunes soldats par des cadres mieux sélectionnés et mieux formés. Le taux d'attrition pendant les quatre premiers mois d'incorporation est descendu à un niveau situé entre 6 % et 14 % suivant les centres.

L'augmentation du taux de renouvellement des contrats arrivant à échéance des militaires du rang en 2011 est la conséquence directe de la baisse du taux de départs subis. Sans minimiser le contexte économique, l'augmentation du taux de renouvellement de contrat est directement liée aux nouvelles perspectives professionnelles offertes par le nouveau parcours professionnel, parmi lesquelles le recrutement interne tient une place prépondérante.

Pour la marine, contenue par un processus d'orientation et de suivi personnalisés des candidats et la généralisation d'une évaluation psychologique à tous les recrutements, l'attrition des jeunes recrues non officiers est modérée et est limitée à 8 % pour les officiers mariniers et 10,8 % pour les matelots. Le taux de renouvellement des contrats initiaux des marins non officiers en 2012 s'élève à 81 % (82 % pour les officiers-mariniers et 80 % pour les quartiers-maîtres et matelots). Le taux de renouvellement des contrats des officiers en 2012 diminue légèrement pour atteindre 71 %.

Pour l'armée de l'air, le taux d'attrition des jeunes engagés au cours de la première année de contrat reste orienté à la hausse pour les sous-officiers. Ce taux dépasse 12 % alors qu'il n'était que de 7 % en 2007. Pour les militaires du rang (MDR), ces départs concernent 20 % des recrutés (17 % en 2007). Pour les officiers, le taux de renouvellement du premier contrat reste à un niveau satisfaisant (93 %). Depuis 2008, le taux d'attrition des jeunes sous-officiers est en hausse : ceux-ci sont de plus en plus nombreux (7 % en 2007, 12 % en 2011) à renoncer à leur engagement au cours de la période probatoire, et le taux de renouvellement du premier contrat diminue (81 % soit -6 points par rapport à 2011), même s'il demeure satisfaisant.

Pour les militaires du rang engagés (MDRE), le taux de renouvellement du premier contrat est de 59 % et diminue de 6 points par rapport à 2011 dans un volume de contrats à renouveler en 2012 en hausse de 16 %. Dans certaines spécialités du soutien, les réorganisations ont nettement réduit le besoin en MDRE ; pour ces spécialités, ceci se traduit par une plus forte sélectivité dès le renouvellement du premier contrat.

Plus que jamais la fidélisation devient un enjeu de la qualité de notre outil de défense. Sans doute les restructurations en cours ont un impact négatif sur le renouvellement des contrats. Mais il y a également des causes plus structurelles qu'il convient d'analyser si l'on veut fidéliser les jeunes recrues.

Selon un calcul du haut comité d'évaluation de la condition militaire, le passage de 6 ans à 8 ans de la durée moyenne d'engagement dans l'armée de terre conduirait à un gain de 2 546 candidats au recrutement, augmenterait le taux de sélection de 0,58, permettrait un gain en effectif d'encadrement de 637 personnels et donc un gain d'effectif non opérationnel de 3 183 personnels.

Ce calcul théorique permet d'estimer que si la durée moyenne d'engagement était de huit ans au lieu de six ans, des gains substantiels seraient possibles aussi bien en matière de coût de formation qu'au plan du taux de sélectivité. Maintenir un engagé un an de plus, c'est disposer d'une personne expérimentée, connue de l'institution, une année supplémentaire. Par ailleurs, le besoin en recrutement devient plus faible. Pour un nombre de candidats équivalent, le taux de sélection est plus fort, ce qui devrait entraîner une baisse des départs avant un an d'engagement. A fortiori, dans le cadre d'une réappréciation globale des conditions de carrière des militaires du rang de l'armée de terre, un objectif de 10 ans de durée moyenne d'engagement n'aurait absolument rien d'absurde et serait sans doute plus conforme à la réalité d'une armée professionnelle que celui de 8 ans établi en 1997.

4. La préservation du moral des troupes, une donnée essentielle de la réforme

La fidélisation des troupes dépend d'un grand nombre de facteurs dont la perception qu'ont les militaires de leurs conditions et de leurs perspectives.

De ce point de vue, votre rapporteur a été frappé, lors de ces déplacements sur les bases militaires, par la fragilité de l'état moral des troupes.

Force est de constater que le rythme des réformes, les déménagements et les restructurations, la diminution des effectifs, la perspective d'une fin des OPEX, les craintes suscitées par la perspective d'une loi de programmation qui pourrait demander à la défense de nouveaux efforts ne favorisent pas la quiétude !

Les chefs d'Etat-major auditionnés par la commission en sont bien conscients.

L'Amiral Edouard Guillaud, chef d'état-major des armées s'en est fait l'écho : « Je vois aussi des risques dans le domaine des ressources humaines. Les économies décidées imposent un gel des recrutements d'environ 2 000 personnes sur 2012-2013 et, une nouvelle fois en 2013, une diminution des mesures catégorielles. En termes de taux de retour des économies dégagées par les déflations, celui du ministère s'est établi à 33 % en 2011 et 20 % en 2012. Il atteindra 30 % en 2013, ce qui est nettement inférieur à la norme en vigueur de 50 %. Le moral est déjà fragile, ce ne sont pas ces mesures qui vont l'améliorer ! ».

Dans ce contexte fragile, les difficultés rencontrées pour liquider les soldes cette année avec les dysfonctionnements du logiciel Louvois n'ont fait qu'accroître l'insatisfaction. Votre rapporteur y reviendra plus avant dans le rapport.

Dans chacune des armées, les efforts demandés depuis de nombreuses années ont beaucoup sollicité les militaires de tous rangs.

Au niveau des officiers, la diminution des postes d'officiers généraux a diminué les perspectives de carrières. L'annonce au cours de l'année d'un effort supplémentaire avec une réduction des avancements dans les grades d'officier supérieur et la mise en place d'un dispositif de contingentement des effectifs militaires par grade n'a pas amélioré le moral des troupes.

Comme l'a souligné le général Denis Mercier, chef d'État-major de l'armée de l'Air, il s'agit d'« une réduction significative des tableaux d'avancement qui risque de fragiliser le moral des aviateurs, notamment dans les catégories de personnel qui portent la réforme ».

De l'autre côté de la hiérarchie militaire, le haut comité de l'évaluation de la condition militaire observe que « l'état du moral des militaires du rang en 2012 demeure fragile » . Les conséquences concrètes en sont, dans l'armée de terre, la difficulté à fidéliser les engagés au-delà de six ans. Pour les militaires engagés, il ressort des enquêtes internes aux armées un sentiment général d'incertitude concernant d'une part leur avenir professionnel, la reconnaissance de leur service et d'autre part, les conséquences des restructurations, en particulier dans l'armée de terre avec le renforcement de la mobilité. Celle-ci s'oppose en effet à un fort ancrage territorial surtout chez les plus jeunes qui bénéficient de la proximité du réseau familial.

Le haut comité souligne que l'insatisfaction se concentre sur les domaines ayant des incidences directes sur la vie sociale et privée : conditions matérielles de vie, solde, indemnités, alimentation, logement. En 2009 comme en 2008, la solde et les indemnités étaient jugées insuffisantes et inadaptées au regard des obligations du métier militaire. « La certitude d'un manque de considération est toujours très présente, tout comme le jugement négatif porté sur la qualité du processus de recrutement ». Ces militaires du rang perçoivent et ressentent les changements de la société qui les entoure (notamment ce qui concerne la qualité de la vie, le temps de travail, l'utilisation des moyens de communication, etc.). La qualité du lien que le militaire entretient avec l'institution est, à l'instar des autres catégories de militaires, conditionnée par celui entretenu avec la famille, qu'il soit direct ou non.

Cette perception d'un déséquilibre entre les sujétions et les contreparties de l'état de militaire est renforcée avec l'ancienneté de service, qui s'accompagne généralement d'une transition de l'état de célibataire vers celui de membre ou chef de famille. L'étude menée par le haut comité et l'INSEE sur les rémunérations des ménages dont la personne de référence est un militaire montre que le niveau de vie moyen du ménage est inférieur à celui d'un ménage dont les membres sont tous deux civils. Cette différence en défaveur des militaires et de leur conjoint s'explique par un revenu moins élevé en moyenne du conjoint.

Le niveau de vie moyen annuel du ménage du militaire était inférieur de 19,8 % à celui du ménage du fonctionnaire civil de l'État sur la période 1996-2001. Neuf années après, l'écart est toujours orienté dans le même sens et diminue légèrement pour atteindre 17,8 %.

Les mesures de revalorisation de la condition militaire doivent prendre en compte cet écart, si on ne veut pas prendre le risque de voir les candidats renoncer à la carrière militaire devant le déséquilibre entre les sujétions et les contreparties offertes aux militaires.

C. DES FILIÈRES DE RECONVERSION À DYNAMISER

C'est un flux de l'ordre de 17 000 militaires du rang et de 4 000 volontaires de la gendarmerie qui quittent les armées chaque année. Si ce flux de départ reste à ce niveau, il est nécessaire de développer de nouvelles synergies entre formation militaire et équivalence civile.

Ces départs se font d'abord vers le secteur privé. En quatre années, les militaires de plus de quatre ans reclassés sont passés de 1 758 à 3 390 et les militaires de moins de quatre ans de service de 704 à 908.

La population la plus en difficulté est celle des militaires du rang de moins de quatre ans de service dont le taux de reclassement atteint seulement 35 % en 2010, contre 55 % des plus de quatre ans de service. Au sein de la gendarmerie, le taux de reclassement atteint respectivement 66 % pour les moins de quatre ans et 85 % pour les plus de quatre ans. Ce taux atteint par la gendarmerie nationale mérite d'être souligné.

Les départs se font également vers la fonction publique civile. Plusieurs dispositifs existent depuis 2005. Le nombre global de reclassement s'est élevé de 849 militaires en 2005 à 2 335 en 2010. Mais seulement 344 militaires du rang ont pu bénéficier de ces procédures. Comme l'indique le bilan 2010 de Défense mobilité, certains ministères n'effectuent pas les recrutements auxquels ils sont soumis, étant eux-mêmes confrontés à des réductions d'effectifs. (Emplois réservés par la voie de l'article L. 4139-3 du code de la défense).

Ce phénomène se conjugue avec le ralentissement du recrutement dans la fonction publique territoriale et hospitalière (article L. 4139-2 du code de la défense).

Pour atteindre les objectifs de la réforme, outre les mesures d'aide au départ de droit commun, le ministère a, à titre exceptionnel et pour la durée de la période concernée, mis en place des dispositifs particuliers d'incitation aux départs et d'aide à la mobilité.

Il a en outre mis en place un nouveau dispositif de reconversion avec l'agence de reconversion de la défense (ARD, appelée « Défense mobilité »), service à compétence nationale, placé sous la responsabilité du directeur des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD).

1. Les aides au départ et à la mobilité au profit du personnel militaire

Les crédits destinés à inciter à une seconde carrière professionnelle s'élèvent pour 2013 à 107,7 millions d'euros contre 108,65 millions d'euros en LFI 2012.

Ces mesures concernent :

- les pécules modulés d'incitation des militaires à une seconde carrière professionnelle. Les officiers et sous-officiers de carrière et les militaires engagés, sur demande agréée, pourront bénéficier de ce dispositif qui vise à encourager la reprise d'une activité professionnelle. Une partie du pécule est en effet conditionnée à une reprise effective d'activité professionnelle.

Il fait l'objet d'un contingentement annuel fixé par arrêté du ministre. Son montant, calculé en fonction de l'ancienneté de service et de la limite d'âge du bénéficiaire, varie entre 16 et 48 mois de solde brute et est versé en deux fractions : la première fraction (soit les 2/3 du montant) est versée lors du départ de l'intéressé, la seconde (le 1/3 restant) étant subordonnée à l'exercice durable d'une activité professionnelle.

Le personnel militaire peut bénéficier du pécule d'incitation à une seconde carrière qui est payé en deux fractions. Le versement de la 2 e fraction intervient sur justification de 12 mois d'activité professionnelle. Le tableau ci-dessous détaille le nombre de pécules attribués et la dépense afférente sur la période 2009-2011.

2009

2010

2011

Nbre

Dépense 1

Nbre

Dépense 1

Nbre

Dépense 1

Officiers

327

70 M€

389

90 M€

333

109 M€

Sous-officiers

719

931

828

TOTAL

1 046

1 320

1 161

1 La dépense affichée intègre le paiement de la 1 ère fraction des pécules accordés au titre de l'année ainsi qu'une partie des 2 es fractions des pécules accordés antérieurement .

En loi de finances initiale (LFI) pour 2012, il est prévu d'attribuer 1 116 pécules pour une dépense globale de près de 109 millions d'euros. Cette prévision a été réévaluée en gestion (1 159 pécules).

2. Les aides au départ et à la mobilité au bénéfice du personnel civil

Le ministère de la défense a mis en place deux types d'indemnités à l'intention du personnel civil dont l'organisme d'emploi est restructuré sur la période considérée.

a) Des indemnités de départ volontaires (IDV)

Les IDV, versées aux agents souhaitant quitter l'administration, revêtent des caractéristiques distinctes selon le statut des agents : fonctionnaires et agents non titulaires de droit public de l'Etat recrutés pour une durée indéterminée, ouvriers de l'Etat.

Les fonctionnaires et les agents non titulaires de droit public recrutés pour une durée indéterminée, se situant à plus de cinq ans de l'âge de la retraite, peuvent bénéficier d'une IDV s'ils sont concernés par une opération de restructuration ou s'ils souhaitent mener à bien un projet personnel, créer ou reprendre une entreprise. Le montant maximal de cette indemnité correspond à 24 mois de rémunération.

Les ouvriers de l'Etat du ministère de la défense, se situant à plus de deux ans de l'âge de la retraite, peuvent bénéficier d'une IDV spécifique, à partir de six ans de services. Non soumis à l'impôt sur le revenu, le montant de cette indemnité varie en fonction de l'ancienneté de services, pour atteindre un maximum de 91 470 euros entre 20 et 25 ans de services. L'obtention de cette indemnité n'est pas exclusive des allocations de chômage. Une indemnité d'aide à la création d'entreprise complète ce dispositif.

Les personnels civils peuvent demander l'attribution d'une indemnité de départ volontaire (IDV) dès lors qu'ils se trouvent affectés dans une unité concernée par les restructurations.

2009

2010

2011

Nbre

Dépense

Nbre

Dépense

Nbre

Dépense

Fonctionnaires

47

40,48 M€

92

52,03 M€

66

44,56 M€

Ouvrier de l'État

506

649

550

TOTAL

553

741

616

En LFI pour 2012, il était prévu d'accorder 660 IDV correspondant à 600 attributions à des ouvriers de l'Etat et 60 à des fonctionnaires pour une dépense globale de 47,8 millions d'euros.

La reprévision en cours de gestion table désormais sur 469 IDV (393 attributions à des ouvriers de l'État et 76 à des fonctionnaires) pour une dépense globale de 32,8 millions d'euros.

b) Des mesures d'aide à la mobilité

Différentes aides sont offertes aux agents que la restructuration de leur organisme d'emploi oblige à un changement d'affectation : prime de restructuration de service (PRS) et complément spécifique de restructuration (CSR) pour les fonctionnaires et agents non titulaires, indemnité de conversion (IDC) et complément exceptionnel de restructuration pour les ouvriers de l'Etat. Elles varient de 8 300 euros minimum à 32 830 euros maximum selon que l'agent est soumis ou non à un changement de résidence administrative et/ou familiale et selon sa situation familiale (célibataire, marié ou pacsé, avec ou sans enfants).

D'autres mesures d'aides à la mobilité existent telles que l'aide à la mobilité du conjoint (AAMC, versée à l'agent dont le changement d'affectation oblige le conjoint à démissionner), le complément indemnitaire et l'indemnité temporaire de mobilité (CI et ITM), versés aux agents dont la mobilité entraîne une perte de revenus conséquente ou qui acceptent une mutation sur un poste préalablement défini comme particulièrement difficile à pourvoir).

Les crédits destinés au financement des mesures d'accompagnement du personnel civil sont regroupés sur le programme 212 « Soutien de la politique de la défense », action 10, sous-action 01. Ils comprennent notamment les mesures d'incitation au départ et les aides à la mobilité. En fonction des besoins, une partie de ces crédits sera mobilisée en faveur du personnel civil du programme 178 « Préparation et emploi des forces ».

Votre rapporteur souhaite souligner que cette réforme impose non seulement une réduction des postes de civils, environ 12 000 sur la période, mais surtout une mobilité géographique sans précédent.

Il y a là une vraie difficulté qui explique qu'on puisse avoir à la fois 1 800 postes vacants et 1 000 personnels civils sans emplois.

La réforme du soutien pose par ailleurs la question délicate de la répartition des tâches entre militaires et civils dans les fonctions de soutien.

3. Une mobilité au sein de la fonction publique encore trop réduite

En 2011, 2 435 militaires ont été recrutés dans les 3 fonctions publiques toutes procédures d'accès aux fonctions publiques confondues. Par rapport à la manoeuvre RH du ministère, le nombre de reclassements nets pour la défense s'élève à 2 075, déduction faite des gendarmes (360).

Globalement, on constate une légère progression des reclassements par rapport à l'an dernier, plus 87 si l'on prend en compte les gendarmes, 55 uniquement sur le périmètre du ministère de la défense. Cette évolution est marquée par une amélioration des résultats des procédures dérogatoires (près de 58 % contre 48,5 % en 2010) et, a contrario, par une régression des recrutements par contrats de droit public qui ne représentent plus que 32,3 % du recrutement total au lieu de 38 % en 2010.

Cinq dispositifs permettent aujourd'hui aux militaires d'accéder à des emplois civils dans les trois fonctions publiques : deux procédures dérogatoires (articles L4139-2 et L4139-3) et trois procédures de droit commun (L4139-1, L418-8 et recrutement sur contrat).

1) L'accès par la voie de l'article L4139-2 du code de la défense

Ce dispositif, dérogatoire au droit commun, permet d'accéder aux trois fonctions publiques, dans les catégories A, B et C, après une sélection sur dossier et entretien par l'administration d'accueil. Il est ouvert après obtention d'un agrément ministériel aux militaires de plus de 10 ans de service.

2) L'accès par la procédure des « emplois réservés » (article L4139-3 du code de la défense)

Ce dispositif est accessible aux militaires, à l'exception des officiers de carrière et des militaires commissionnés, de plus de quatre ans de service ayant obtenu l'agrément de leur gestionnaire d'armée.

Ces deux dispositifs sont mis en oeuvre au sein de la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) en collaboration avec les directions de ressources humaines de chacune des armées et les services et les administrations publiques de l'État, des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière.

3) Les voies d'accès communes à toute la fonction publique sont le concours (article L4139-1 du code de la défense), le détachement/intégration (article L4138-8 du code de la défense) et le recrutement sur contrat.

Le personnel militaire peut, au même titre que le personnel civil et dans les mêmes conditions, se présenter aux concours internes et externes dans les trois fonctions publiques.

Pour la population militaire, la mobilité vers la fonction publique n'est pas satisfaisante; seule un peu plus de la moitié des objectifs a été atteinte. Les transferts vers la fonction publique d'Etat sont inférieurs aux objectifs tant au sein du ministère de la défense que vers les autres ministères car la mise en oeuvre des RGPP conduit les autres administrations à réduire leur recrutement et la population est parfois en inadéquation avec leurs besoins.

Les transferts vers les fonctions hospitalières et territoriales sont également décevants (1/3 des objectifs réalisés).

Enfin, pour ce qui concerne les emplois réservés, seul ¼ de l'objectif est atteint.

Votre rapporteur ne peut que constater que, dans un contexte où toutes les administrations sont soumises à des objectifs de réduction des effectifs, les gains espérés de la mobilité au sein de la fonction publique doivent être revus à la baisse.

4. Une augmentation du coût du chômage qui tend à se stabiliser

Malgré les mesures de reconversion, la diminution des effectifs se traduit mécaniquement par une augmentation des dépenses d'allocation chômage que le ministère de la défense assume directement.

a) Un contexte d'augmentation continue depuis quelques années

Au cours des cinq dernières années, du fait essentiellement de la crise économique, le nombre de chômeurs a en effet fortement augmenté, passant de 8 970 en 2004 à 9 031 en 2010.

On note que la majorité d'entre eux ont quitté les armées entre 4 et 7 ans de service et que 25 % des militaires du rang connaissent une situation de chômage dans l'année suivant leur départ des armées.

Evolution du coût du chômage (gendarmerie comprise, sauf en 2009)

Année

2004

2005

2006

2007

2008

2009

Nombre

8 970

9 061

8 825

8 170

8 214

9 689

Coût en euros

75 517 705

84 669 329

81 416 528

82 069 816

85 760 795

110 244 411

Source : ministère de la défense.

La hausse du coût des allocations chômage s'explique par l'augmentation des départs chez les militaires, du fait des restructurations et des mesures d'incitation au départ et d'accompagnement social, dans un contexte socio-économique moins dynamique, qui entraîne mécaniquement l'augmentation du nombre d'anciens militaires en recherche d'emploi indemnisés par le ministère de la défense.

Ces flux étaient en grande partie liés à la révision du format des armées et à la suppression de 54 000 postes prévue par la loi de programmation militaire.

Il s'agissait ensuite des conséquences de l'application de la nouvelle convention d'assurance-chômage du 19 février 2009. L'élargissement des droits à l'assurance-chômage pour les anciens militaires qui en découle génère des coûts imputés au ministère de la défense.

b) Vers un début de stabilisation ?

Comparé aux données enregistrées fin 2010, le nombre de chômeurs indemnisés fin 2011 est contenu (- 0,3 %) alors qu'il augmente de 3 % au niveau national (statistiques de Pôle emploi).

Nombre moyen mensuel (2010-2012) d'anciens militaires indemnisés
(hors gendarmerie nationale)

Janv.

Fév.

Mars

Avril

Mai

Juin

2010

8 783

8 984

9 497

9 276

9 010

9 849

2011

8 884

9 131

9 561

8 921

8 899

8 845

2012

9 243

9 872

9 836

9 498

-

-

Variation 2012/2011

4,04 %

8,12 %

2,88 %

6,47 %

-

-

Juil.

Août

Sept.

Oct.

Nov.

Déc.

2010

9 296

8 891

9 442

8 987

8 547

9 031

2011

8 487

8 266

8 332

8 378

8 885

9 007

2012

Variation 2012/2011

-

-

-

-

-

-

A fin avril 2012 (derniers chiffres disponibles de Pôle emploi), le volume d'anciens militaires indemnisés est estimé à 9 498, en hausse de 5,5 % par rapport au 31 décembre 2011.

Au plan financier, le montant des indemnités de chômage payées en 2011 s'élève à 103,2 millions d'euros, soit une baisse de l'ordre de 6 millions d'euros par rapport à 2010 (109,5 millions d'euros).

Coût cumulé des indemnités de chômage (anciens militaires hors gendarmerie)

En €

Janv.

Fév.

Mars

Avril

Mai

Juin

2010

8 795 474

17 935 646

27 504 378

37 026 450

45 974 545

56 333 687

2011

8 946 274

18 276 855

27 540 292

36 219 912

44 830 173

53 635 843

2012

7 595 067

18 320 495

25 007 683

33 102 747

Variation 2012/2011

-15,10 %

0,24 %

-9,20 %

-8,61 %

-

-

En €

Juil.

Août

Sept.

Oct.

Nov.

Déc.

2010

65 281 458

74 061 288

83 617 624

92 082 711

100 400 672

109 542 996

2011

61 802 781

69 996 211

78 302 713

86 265 368

94 570 422

103 206 064

2012

Variation 2012/2011

-

-

-

-

-

-

L'enveloppe prévue pour 2013 est de 93,18 millions d'euros. Elle est en baisse par rapport à 2012 étant donné que la prévision d'exécution s'établit à 98,62 millions d'euros.

En raison du contexte économique, il est difficile de dégager des tendances pour 2013. Néanmoins, l'hypothèse de construction pour l'année prochaine repose sur une diminution compte tenu du dispositif mis en place et des efforts engagés.

En effet, l'agence de reconversion de la défense, Défense mobilité, continue d'effectuer des suivis personnalisés des anciens militaires en situation de chômage indemnisés et développe ses actions en coopération avec Pôle emploi.

Ainsi, la convention de juin 2010 a été reconduite et complétée par une convention-cadre nationale de collaboration 2012-2014 signée le 19 décembre 2011 et consistant à confier à Défense mobilité par délégation de PE le suivi des ressortissants défense (au choix des individus).

Outre le maintien de conseillers référents dans chaque pôle régional, cette nouvelle convention permet la mise en oeuvre de l'offre de service « coaching placement » de Défense mobilité au profit des anciens militaires proches de l'emploi (c'est-à-dire ceux qui ont un projet professionnel réaliste et réalisable), ainsi qu'un accompagnement spécifique pour les conjoints et les militaires blessés en opérations.

Le déploiement national de ce dispositif est en cours d'achèvement. Permettant de réduire la durée d'indemnisation, il constitue un levier essentiel par lequel le ministère de la défense peut être à même de contenir le coût du chômage. A ce titre, Défense mobilité développe une capacité d'accueil de 2 000 demandeurs d'emploi au titre du coaching placement et de 4 000 au titre de l'accompagnement spécifique.

En outre, le plan d'actions « lutte contre le chômage des anciens militaires », mis en oeuvre début juillet 2010, fait l'objet d'une actualisation pilotée par la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD en liaison avec l'état-major des armées). Il prend en considération l'ensemble du cursus des militaires, depuis leur recrutement jusqu'à leur reclassement dans l'emploi civil.

Indépendamment des actions menées, deux éléments seront essentiels pour l'année 2013 : la reprise espérée du marché de l'emploi, notamment au profit des populations de jeunes militaires du rang et le départ des militaires résultant des réformes en cours au sein du ministère de la défense.

Le montant de l'indemnisation chômage montre l'impérieuse nécessité de réussir la reconversion des militaires.

5. Un dispositif de reconversion des personnels du ministère de la défense rénové

L'augmentation des performances de l'outil de reconversion des armées apparaît nécessaire à plus d'un titre. D'abord en raison de l'élévation du coût des allocations chômage. Ensuite en raison de son impact sur la qualité du recrutement et la fidélisation des militaires engagés dans nos armées dans des carrières de courte durée.

Les armées ont depuis toujours la réputation d'être une institution qui forme et structure la jeunesse. Le passage par les armées est réputé donner une discipline et une rigueur propres à favoriser la reconversion de ses membres. Grâce à cette image collective largement fondée, les armées ont été longtemps considérées non seulement comme une carrière possible, voire une vocation, mais également comme un sas ou un tremplin vers l'entrée dans la vie active, en particulier, pour des jeunes qui n'auraient pas encore trouvé un métier qui correspondrait à leurs aspirations et aptitudes.

Cette image d'un tremplin vers la vie active constitue un des attraits des armées qui favorise le recrutement.

Même pour ceux qui souhaiteraient s'engager dans l'armée en souhaitant y rester, dans la mesure où les carrières sont de plus en plus courtes et sélectives, les performances des armées en matière de reconversion sont devenues, de fait, un critère important dans le choix d'embrasser ou non la carrière militaire.

Enfin, dans cette période de restructuration de notre outil de défense qui sollicite très fortement les hommes, savoir qu'à l'issue de leur contrat les militaires, et en particulier les contractuels, trouveront un métier et pourront sans difficulté entamer une nouvelle carrière est un élément important de la fidélisation des hommes et de la durée de leur engagement.

La montée en puissance d'un dispositif de reconversion performant doit pouvoir apporter sa contribution. Il sera aidé en cela par la qualité de la formation prodiguée par les armées.

C'est pourquoi le Gouvernement a mis en place un nouveau dispositif de reconversion avec l'agence de reconversion de la défense (ARD, appelée « Défense mobilité »), service à compétence nationale, placé sous la responsabilité du directeur des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD).

Outre sa mission centrale de reclassement dans l'emploi civil des militaires aux carrières nécessairement courtes, « Défense mobilité » s'attache également à accompagner les réorganisations du ministère et les réductions d'effectifs qui y sont associées, en s'affirmant désormais comme l'interlocuteur unique pour les employeurs du secteur public comme du secteur privé.

Créée le 10 juin 2009, « Défense mobilité » poursuit sa montée en puissance pour généraliser l'accompagnement de proximité avec la mise en place d'une cinquantaine d'antennes locales qui seront implantées dans chaque base de défense.

« Défense mobilité »  accompagne :

- le personnel des armées, des services communs et de la direction générale de l'armement ;

- le personnel civil de la défense des organismes restructurés en situation de reclassement vers le secteur privé ;

- les conjoints des personnels militaires et civils de la défense et de la gendarmerie.

2010, 2011, 2012 ont constitué les trois premières années de plein exercice de l'agence de reconversion de la défense.

Les résultats obtenus en 2011 s'inscrivent dans la continuité du bilan établi en 2010. Le taux de reclassement dans les secteurs public et privé atteint 75 % pour les militaires de plus de quatre ans de service ayant bénéficié des aides de l'agence.

Ce taux correspond à l'objectif fixé à Défense mobilité par son conseil de gestion.

Le taux de reconversion, indicateur du retour à l'emploi des militaires, atteint 85 %. Il correspond au nombre de militaires à l'emploi rapporté au vivier des partants utiles de l'année, qu'ils aient ou non bénéficié d'une aide.

Le nombre de reclassés dans le secteur privé en 2011 (9 015) a augmenté de 438 par rapport à 2010 (8 577), soit une progression de 5 %. La population ayant le plus de difficulté au retour à l'emploi reste celle des militaires de moins de 4 ans de service.

1 800 militaires de la défense ont été reclassés dans le cadre des partenariats avec des grandes entreprises ou des fédérations professionnelles. En 2010, 1 752 militaires de la défense avaient été reclassés au sein des entreprises et fédérations partenaires de la défense, soit une progression de 3 %.

III. LES MARGES DE MANoeUVRE BUDGÉTAIRES ISSUES DE LA DÉFLATION DES EFFECTIFS SONT LIMITÉES

La déflation des effectifs devrait à terme permettre une diminution des dépenses de personnel du programme 178. Ces dépenses évoluent cependant en fonction de nombreux paramètres qui ne sont pas uniquement liés aux formats des armées.

A. DES GAINS ISSUS DE LA DÉFLATION DES EFFECTIFS RÉDUITS

Les dépenses de personnel directement liées aux effectifs ont légèrement diminué sur la période 2009-2011 (- 0,57 %), à un rythme effectivement moins élevé que la déflation des effectifs constatée sur cette période (de l'ordre de 8 %).

La déflation des effectifs entraîne mécaniquement une diminution de la masse salariale et du titre 2 du programme 178.

Une partie des gains issus de la réduction des effectifs est cependant utilisée pour financer des mesures catégorielles comme la rénovation des grilles indiciaires des militaires qui avaient été actées avant le lancement des réformes, conformément aux recommandations du haut conseil d'évaluation de la condition militaire, mais également des mesures d'accompagnement social des restructurations.

Il est apparu intéressant à votre commission de demander au ministère de mesurer les marges nettes issues des déflations d'effectifs au regard des dépenses liées aux restructurations et des mesures catégorielles en cumulé sur la mission « Défense ».

Au total, ces principales mesures financières en faveur du personnel militaire, ajoutées à quelques autres de portée plus réduite, correspondent, pour le programme 178, à une enveloppe d'environ 88,8 millions d'euros pour 2012 que l'on retrouve sous l'intitulé « Mesures catégorielles y compris grilles indiciaires » dans le tableau suivant.

Evolution des dépenses de personnel du programme 178 (titre 2)

P 178 (en M€)

LFI 2009

LFI 2010

LFI 2011

LFI 2012

PLF 2013

Déflation

- 124,88

- 159,82

- 189,66

-199,88

-193,44

Mesures catégorielles hors grilles indiciaires

15,26

23,52

46,42

22,61

15,88

Mesures catégorielles - grilles indiciaires

57,75

69,72

25,75

48,62

32,69

GVT

- 96,98

- 88,03

- 57,01

-42,88

0,00

D'après les informations données à votre rapporteur, pour l'année 2012, les économies brutes générées par la réduction des effectifs sont estimées à 193,44 millions d'euros.

Si on retranche de ces économies les dépenses liées à l'accompagnement social des restructurations et aux mesures catégorielles, on peut retracer l'incidence budgétaire nette sur le titre 2 de la réduction des effectifs au regard des dépenses liées aux restructurations et des mesures catégorielles sur la mission défense.

D'après les informations données à votre rapporteur, le cumul par rapport à 2008 permet de se rendre compte qu'à partir de 2011, la déflation des effectifs permet de dégager un surplus limité à 405 millions d'euros par rapport à une situation à effectif constant.

Marges nettes issues des déflations d'effectifs

variation n/2008

LFI 2009

LFI 2010

LFI 2011

LFI 2012

PLF 2013

Déflation des effectifs (ETPT)

- 13 009

- 21 117

- 29 027

-36 487

-44 095

Valorisation moyenne/effectif (€)

22 155

22 863

26 987

29 790

28 485

Valorisation du schéma d'emploi (en M€)

- 298,16

- 480,65

- 694,08

-916,32

- 1 133,03

Accompagnement social des restructurations

122,514

199,42

202,97

197,29

181,47

Marges nettes issues des déflations d'effectifs hors mesures catégorielles (en M€ en cumul)

- 175,65

- 281,23

- 491,12

-719,03

-951,56

Mesures catégorielles (en M€)

158,09

271,21

366,21

479,92

546,02

Dont grilles indiciaires militaires

107,28

188,84

219,84

313,44

347,21

Marges nettes issues des déflations d'effectifs (en M€ en cumul)

- 17,56

- 10,02

- 124,91

-239,10

-405,54

Votre rapporteur constate cependant que ces données optimistes sont difficiles à mettre en perspective avec celle recueillies par la Cour des comptes. Force est de constater que les gains se sont révélés au fil du temps plus limités que prévus.

B. DES DÉPENSES À SURVEILLER

Le niveau des économies brutes générées par la réduction des effectifs dépend de nombreux facteurs et notamment de l'évolution de certaines dépenses dont il convient de suivre l'évolution.

1. Un phénomène de repyramidage des emplois

Dans le contexte de réduction des effectifs, un phénomène de repyramidage des emplois a été observé, tant pour le personnel militaire que pour le personnel civil.

Il doit néanmoins être relativisé. En ce qui concerne le personnel militaire, la part des officiers est passée de 15 % en 2008 à 16 % en 2011 alors même que les armées et services devaient répondre à une évolution forte des besoins en organisation issus des conclusions du Livre blanc et de la loi de programmation militaire (rationalisation des soutiens, retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'OTAN et développement de la fonction «connaissance et anticipation»).

Comme l'a souligné la Cour des comptes, le repyramidage a été plus marqué au sein de la catégorie des officiers avec des grades supérieurs dont le poids relatif augmente, dans un contexte rendu difficile par la situation économique et l'impact de la réforme des retraites, qui pèsent sur les flux de sorties de l'institution.

Afin de s'inscrire dans une perspective de dépyramidage progressif de ses effectifs militaires, le ministère de la défense s'est engagé, depuis 2010, dans une démarche de réduction des avancements dans les grades d'officier supérieur. Corrélativement, un dispositif de contingentement des effectifs militaires par grade a été mis en place dès 2012. Il s'est traduit par la publication des arrêtés interministériels du 13 avril dernier.

Ce dispositif de contingentement sera renforcé en 2013 avec des efforts significatifs sur le haut de pyramide ; la réduction des flux d'avancement au choix s'étalera de 15 à 23 % pour les grades d'officiers supérieurs. Les modalités du contingentement des effectifs militaires par grade font actuellement l'objet d'ultimes échanges interministériels, sur la base des premières conclusions d'une étude confiée conjointement à l'Inspection générale des finances et au Contrôle général des armées.

S'agissant du personnel civil, un repyramidage sensible des effectifs a également été enregistré depuis 2008, notamment sous l'effet d'un processus de civilianisation des fonctions de soutien et des mesures de requalification de B en A financées dans le cadre de la rétrocession aux agents de la moitié des économies générées par les suppressions d'emplois. Ainsi, pour le personnel civil, hors ouvriers de l'Etat, le poids de la catégorie A est passé de 17,5 % en 2008 à 21 % en 2011.

Cette augmentation du taux d'encadrement ne fait cependant que replacer le personnel civil de la défense, dont la structure des emplois était jusqu'alors atypique, dans la moyenne des administrations de l'Etat. A titre de comparaison, la part des catégories A s'élève à environ 27 % pour le ministère chargé du budget, 22 % pour le ministère en charge du développement durable et même 44 % pour les ministères sociaux.

Par ailleurs, en ce qui concerne la structure des emplois au sein de chaque corps de fonctionnaire civil, un dispositif interministériel fondé sur des ratios "promus-promouvables" encadre les avancements aux grades supérieurs et permet de maîtriser le pyramidage des effectifs administratifs et techniques.

2. Des dépenses sociales en progression

L'évolution des dépenses d'action sociale constitue également une source de préoccupation. En effet, elles ont progressé rapidement de 2009 à 2011 (+ 27 %) alors que les effectifs diminuaient (- 6 %).

L'évolution des dépenses de 2009 à 2011 s'explique notamment par l'inscription progressive d'une dotation de 18 millions d'euros au titre de la protection sociale complémentaire (5 millions d'euros en 2010 pour la protection sociale du personnel civil complétés de 13 millions d'euros en 2011 pour la protection sociale du personnel militaire).

La loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique a en effet autorisé le versement d'une subvention à des organismes de référence désignés au terme d'une procédure de mise en concurrence.

L'évolution des dépenses entre 2012 et 2013 tient notamment à la baisse de la subvention versée à l'institut de gestion sociale des armées (IGESA).

Le budget de l'action sociale du ministère de la défense s'élève à 78,4 millions d'euros en PLF 2013.

Seront privilégiées les actions destinées à l'accueil des jeunes enfants, à la protection sociale complémentaire (18 millions d'euros), au soutien psychologique des familles des militaires stationnés en opération extérieure en Afghanistan (1 million d'euros) et à la politique en faveur des personnes handicapées (5 millions d'euros).

En 2013, le ministère poursuivra en particulier sa politique en faveur de la petite enfance, outil majeur de fidélisation du personnel et d'accompagnement des mobilités, dont l'axe principal vise l'ouverture d'établissements de garde de jeunes enfants propres à la défense et gérés par l'institution de gestion sociale des armées (deux structures multi-accueil en région parisienne et un établissement en province).

3. Les mesures de revalorisation de la condition militaire

Les personnels militaires du ministère de la défense bénéficieront, sur la période 2011-2013, de deux types de revalorisation : d'une part, celles résultant de la transposition ministérielle de dispositions générales ou de mise en oeuvre d'engagements pluriannuels, d'autre part, les mesures destinées à répondre à des besoins de gestion des ressources humaines spécifiques.

Ces mesures visent notamment à faire bénéficier les militaires des fruits de la réforme et à atténuer l'écart à qualification égale entre la condition militaire et celle des fonctionnaires civils.

Dans le cadre de la loi de finances pour 2012, la prévision actualisée de dépenses au titre des mesures catégorielles en faveur du personnel militaire s'élève à 22,64 millions d'euros dont 21,71 millions d'euros pour le programme 178.

Au plan statutaire, les principales mesures de l'année 2012 sont :

ü la mise en oeuvre de la première annuité du NES en faveur des sous-officiers;

ü la transposition des protocoles Jacob-Bertrand et Bachelot aux corps de militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) ;

ü la deuxième annuité de l'augmentation de l'enveloppe NBI de l'encadrement supérieur ;

ü la mise en oeuvre de la bonification d'ancienneté d'échelon au profit des praticiens hospitaliers des armées ;

ü l'extension du bénéfice de la délégation de la solde d'office (DSO) aux ayants cause du militaire défunt ;

ü le financement de la deuxième annuité de l'augmentation prévue sur trois ans du contingent des colonels hors échelle lettre B (HE.B).

Au plan indemnitaire, l'année 2012 est caractérisée par différentes mesures dont les principales sont :

ü l'attribution aux MITHA infirmiers anesthésistes de la prime spéciale versée à leurs homologues de la fonction publique hospitalière depuis 2011 en application du protocole Bachelot ;

ü la réforme de la rémunération à l'étranger (harmonisation, majorations familiales, ISSE au 1 er jour, cumul IRE/ISSE et création d'une circonscription territoriale d'IRE propre à Stavanger en Norvège) ;

ü l'indemnité proportionnelle de reconversion (IPR) au profit des militaires non officiers, sous-contrat, radiés des cadres à l'initiative de l'administration et quittant les armées avec un droit à jouissance différée ou immédiate.

Dans le cadre de la programmation budgétaire triennale, les mesures catégorielles pour 2013 s'établissent à 44,85 millions d'euros pour la mission « Défense » dont 41,85 millions d'euros pour le programme 178.

Au plan statutaire, sont principalement prévus:

ü la poursuite de la transposition du NES B aux sous-officiers du ministère par la création de nouveaux échelons de rémunération et la revalorisation des indices afférents ;

ü la transposition du protocole Bachelot par l'intégration des personnels infirmiers dans le corps des infirmiers des services en soins généraux et spécialisés ;

ü le passage à la solde mensuelle des élèves officiers et l'assujettissement des soldes spéciales des élèves à la CSG, CRDS et de l'ensemble des soldes spéciales à retenue pour pension.

ü Au plan indemnitaire, les principales mesures prévues sont :

ü le maintien de l'effort consacré à la mise en place de l'IPR pour continuer à faire face aux conséquences de la réforme des retraites sur les conditions d'attribution du minimum garanti en particulier pour les militaires du rang et à préserver des conditions attractives de reconversion ;

ü la poursuite de la réforme de la rémunération à l'étranger ;

ü la revalorisation de diverses primes répondant à des besoins spécifiques pour conserver certaines compétences rares indispensables à la mise en oeuvre de la politique de défense.

Mesures

Mesures actualisées

2012

PLF 2013

STATUTAIRES

3,26 M€

1,04 M€

NES B

1,98 M€

0,13 M€

Requalification d'emplois administratifs

0,38 M€

0,54 M€

Reclassement des TSEF en IEF

0,70 M€

0,02 M€

Statut d'emploi des Conseiller technique de la Défense (CTD)

0,05 M€

Diverses autres mesures

0,20 M€

0,30 M€

INDEMNITAIRES

6,23 M€

5,68 M€

Modulation et régimes indemnitaires

6,15 M€

5,45 M€

Autres mesures d'amélioration de la condition du personnel

0,01 M€

0,17 M€

Revalorisation de la masse salariale ICT-TCT

0,07 M€

0,06 M€

TOTAL GÉNÉRAL

9,49 M€

6,72 M€

Pour le personnel civil, dans le PLF 2013, le plan ministériel de reconnaissance professionnelle de la mission « Défense » s'élève à 15,20 millions d'euros, dont 6,72 millions d'euros pour le programme 178.

4. Une déflation des effectifs dans les territoires d'outre-mer en cours

Déployées dans les départements, territoires et collectivités d'outre-mer (DOM-COM), les forces de souveraineté garantissent la protection du territoire national et des installations stratégiques. Elles contribuent au maintien de la sécurité dans leur zone respective, participent au dialogue régional et concourent à la préservation des intérêts de la France en y maintenant une capacité d'intervention permanente des forces armées.

Elles sont en effet en mesure de conduire ou de participer à une opération militaire nationale ou multinationale, à être engagées dans des opérations d'urgence (assistance humanitaire, évacuations de ressortissants ou catastrophes naturelles).

Enfin, elles contribuent à l'action de l'Etat en assurant des missions de service public et participent à la stabilité et au développement des collectivités territoriales.

Elles sont réparties sur cinq implantations principales, complétées par un petit détachement maritime à Saint-Pierre et Miquelon :

- les forces armées de la zone sud de l'océan Indien (FAZSOI) ;

- les forces armées en Nouvelle-Calédonie (FANC) ;

- les forces armées en Polynésie française (FAPF) ;

- les forces armées en Guyane (FAG) ;

- les forces armées aux Antilles (FAA).

A l'été 2012, les effectifs militaires des forces de souveraineté détaillés pour les trois armées sont donnés ci-dessous :

EMPLOI FORCES 11 ( * )

TERRE

MARINE

AIR

TOTAL 12 ( * )

FAG Guyane

70

1264

120

261

1715

FAA Antilles

50

423

382

28

883

FAPF Polynésie

45

201

332

45

623

FAZSOI La Réunion /Mayotte

54

660

497

95

1306

FANC Nouvelle-Calédonie

49

560

339

159

1107

Saint-Pierre et Miquelon

0

0

11

0

11

TOTAL

268

3108

1681

588

5645

Ces effectifs sont en diminution par rapport à 2011 (6 833) de 21 % après une diminution de 9 en 2011 traduisant le ralliement en 2012 du format capacitaire prévu par la réorganisation des forces de souveraineté qui se concrétise par la fermeture et la dissolution de 3 bases aériennes et 3 régiments. Ils prennent en compte le personnel militaire affecté en mission de courte durée (MCD) et de longue durée (MLD).

Afin de répondre aux orientations stratégiques fixées par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008 et aux principes de rationalisation liés à la révision générale des politiques publiques (RGPP), la réorganisation des forces de souveraineté vise à conserver des capacités opérationnelles centrées sur les missions militaires et dimensionnées de façon strictement suffisante en fonction des risques et menaces potentiels.

Initiée dès 2008, cette réorganisation a pour objectif le ralliement de la cible en effectifs militaires en 2014 et en effectifs civils en 2020. La réduction globale des effectifs défense entre 2008 et 2020 représentera au total 23 %.

Recentré sur les missions militaires tout en conservant une capacité d'intervenir en soutien de l'Etat, le dispositif s'organise selon une logique de théâtre autour de trois points d'appui principaux : la Guyane pour la zone Caraïbes, la Réunion pour l'océan Indien et la Nouvelle-Calédonie pour l'océan Pacifique avec des dispositifs interarmées capables d'intervenir avec des groupements tactiques interarmes et les moyens de projection aéromaritimes associés.

Un effort majeur est porté sur le dispositif des forces armées en Guyane, en raison de l'importance stratégique du centre spatial guyanais (CSG). Les Antilles et la Polynésie constituent désormais des points d'appui secondaires avec des dispositifs allégés à dominante maritime, capables d'accueillir des renforts intra-théâtre ou venant de métropole.

5. Les forces prépositionnées : la montée en puissance de la base d'Abu Dhabi et les restructurations des forces en Afrique

La France dispose de forces prépositionnées dans quatre pays. Elle stationne traditionnellement des unités dans trois anciennes colonies d'Afrique avec lesquelles elle est liée par des accords de défense : le Sénégal, Djibouti et le Gabon.

Les forces présentes depuis parfois fort longtemps en Côte d'Ivoire ou au Tchad ne figurent pas dans le dispositif des forces prépositionnées, s'agissant d'opérations extérieures en cours. Une fois celles-ci terminées, nos forces auront vocation à rentrer dans leur totalité en France. De la même manière, l'Allemagne n'apparaît plus dans la liste des pays qui accueillent des forces prépositionnées. En revanche, une nouvelle implantation a été inaugurée en mai 2009 à Abou Dhabi, aux Émirats Arabes Unis.

Par ailleurs, les forces de présence en Afrique ont été réorganisées à l'été 2011 avec la mise en place du pôle opérationnel de coopération à effectifs réduits au Sénégal, la consolidation des capacités au Gabon, et le départ d'un régiment de Djibouti.

Les forces françaises du Cap Vert (FFCV) sont devenues les éléments français au Sénégal (EFS) le 1 er août 2011. Avec la dissolution des formations des trois armées (11) et l'organisation en base de défense, les EFS sont structurés autour d'un module opérationnel de coopération (regroupant une unité de commandement et de coopération opérationnelle, une escale aérienne et une station navale) et d'un pôle de soutien (groupement de soutien et entités locales des directions et services interarmées).

Au Gabon, la base de Libreville prend en compte une composante terrestre à capacité amphibie, en remplacement de celle qui a été retirée du Sénégal à la dissolution du 23 ème BIMa. Les Forces françaises du Gabon ont ainsi la capacité de conduire des opérations amphibies, en coordination avec la mission Corymbe (12) et fournissent le GTE (groupement tactique embarqué) à son profit. A compter de l'été 2012, la gestion de cette capacité amphibie a été rendue plus souple, le noyau de force constituant le GTE pouvant, en fonction de la situation opérationnelle, être stationné indifféremment à Port-Bouët (Côte d'Ivoire) ou à Libreville.

S'agissant de Djibouti, un nouvel accord de partenariat de défense a été signé avec ce pays, le 21 décembre 2011. Non ratifié à ce jour, ce texte confirme notamment la répartition des emprises à partir desquelles le dispositif des Forces françaises de Djibouti (FFDj) a été restructuré à l'été 2011.

La rationalisation de notre présence sur le sol djiboutien ainsi que la confirmation de son caractère permanent interviennent au moment où l'importance stratégique du point d'appui de Djibouti n'a jamais été aussi forte, amenant une concentration militaire multinationale toujours plus grande, en particulier pour ce qui concerne la présence américaine (déploiement d'avions de chasse F15...).

Identité des unités constituant les forces prépositionnées

ARMEES?

ETATS?

TERRE

AIR

MER

Djibouti

5e RIAOM

BA 188

EC 4/33 « Corse »

ETOM 088

1 UNIMAR

Gabon

6e BIMa,
DICOM

Détachement air

Sénégal

Unité de coopération régionale (UCR) incluse dans le GCO

1 station navale,
1 ATL2
inclus dans le GCO

Emirats Arabes Unis

GTIA EAU sous
13e DBLE

BA 104

1 UNIMAR

La montée en puissance de l'implantation française aux Émirats Arabes Unis est plus que compensée par la diminution des effectifs stationnés au Gabon et surtout à Djibouti.

Les forces présentes dans ce pays devraient continuer à baisser dans les années à venir, jusqu'à s'établir aux alentours de 1 900 militaires.

Effectifs des forces prépositionnées en 2012

ETATS

TOTAL

TERRE

AIR

MARINE

SOUTIEN

AUTRES

DJIBOUTI

2109

725

423

204

376

381

SENEGAL

365

114

25

48

61

117

GABON

927

575

50

0

118

184

EAU

712

335

141

42

65

129

TOTAL

4113

1749

639

294

620

811

Le coût total de notre dispositif pré-positionné a diminué au cours des deux dernières années. De 437,39 millions d'euros en 2011, il est passé à 408,77 millions d'euros l'année suivante et devrait être de 408,35 millions d'euros en 2013. En fonction, notamment, des rationalisations opérées sur les soutiens, le coût de ce dispositif devrait encore baisser en 2014 et 2015.

Les perspectives pour 2013 sont une stabilisation globale, avec une déflation correspondant à la poursuite des optimisations locales des soutiens. Ces optimisations porteront pleinement leurs fruits en 2014-2015, notamment à Djibouti (rétrocession de l'hôpital médico-chirurgical Bouffard). Le dispositif des forces prépositionnées pourrait toutefois être révisé en fonction des conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.

6. Vers une réduction des opérations extérieures ?

Depuis une dizaine d'années, le nombre de militaires français déployés simultanément en opérations extérieures reste supérieur à 10 000. Les théâtres où notre présence militaire diminue sont généralement compensés par ceux où elle augmente : c'est le cas, ces dernières années, avec une réduction régulière de nos forces dans les Balkans, contrebalancée par une augmentation de notre présence en Afghanistan puis par notre engagement en Lybie.

En 2011, près de 13 000 hommes ont été engagés à l'extérieur avec un très large spectre de moyens déployés. Le taux d'engagement pour l'aviation de combat Air et Marine n'est pas loin d'avoir atteint le niveau maximum du contrat le plus exigeant décrit dans le Livre blanc pour la défense et la sécurité nationale (LBDSN).

Après le pic d'engagement sur les théâtres extérieurs en 2011, l'année 2012 se caractérise par une très forte inversion de tendance. Pour la première fois depuis le début des années 90, les effectifs déployés en OPEX passent sous la barre de 7 500.

Ils devraient être de l'ordre de 5 000 à la fin du mois de décembre, soit une réduction des deux tiers par rapport au point culminant de l'année précédente. Conformément aux orientations données par le président de la République, la France achèvera le retrait de ses forces combattantes d'Afghanistan en 2012.

La forte diminution des forces projetées, après une longue période d'engagements soutenus, constitue un véritable défi pour les armées, qui doivent s'adapter, que ce soit en termes d'entraînement ou de gestion des personnels.

Zone

Théâtre d'opération

Opération

2010

2011

Prévision
2012

Europe

Kosovo

TRIDENT

791

424

323

Bosnie

ASTREE

1

1

1

Afrique

Tchad

EPERVIER

996

959

981

Rép. Centre-Africaine

BOALI

240

238

247

Côte d'Ivoire

LICORNE

1 133

1 092

796

Libye

HARMATTAN

-

1 789

-

Océan-Indien

ATALANTA )

495

283

431

Asie

Liban

DAMAN

1 460

1 354

1072

Jordanie

TAMOUR

-

-

40

Afghanistan

PAMIR
HERACLES
EPIDOTE

4 361

4 269

3 472

Autres

Haïti (séisme)

95

0

0

Petites opérations

387

450

365

Total effectifs engagés

9 959

10 860

7 728

L'année 2012 a représenté un tournant pour la présence française en Afghanistan.

Les forces de combat françaises - Task Force Lafayette, détachement EPIDOTE et détachement aérien - doivent être retirées d'Afghanistan avant la fin de l'année 2012.

Si le calendrier est respecté, il restera en Afghanistan, au 1 er janvier prochain, de 1 400 à 1 450 hommes regroupés sur Kaboul ou ses environs. Il est en effet nécessaire de maintenir une présence militaire au-delà de 2012 afin de permettre la poursuite du retrait des matériels français et d'assurer la protection des personnels qui resteront.

De même, les missions de formation des forces afghanes conduites dans le cadre de la FIAS se poursuivront jusqu'en 2014 tout comme notre présence dans les états-majors de cette force ainsi que dans les structures de soutien tels que l'hôpital militaire, le laboratoire contre les IED et l'aéroport international.

Onze ans après nos premières reconnaissances aériennes sur ce territoire, votre rapporteur estime que nous pouvons être fiers du travail formidable réalisé là-bas par nos soldats, nos marins et nos aviateurs.

Nous avons joué un rôle majeur dans l'« afghanisation » des provinces placées sous notre responsabilité. Nous avons joué un rôle majeur dans la formation et l'encadrement des forces armées et de sécurité afghanes. Certes, les choses ne se passent pas toujours comme nous le voudrions ici mais les progrès sont incontestables

Votre rapporteur au nom de la commission rend hommage à l'action de nos militaires, aux quatre vingt-huit d'entre eux qui ont vécu leur engagement jusqu'au don de leur vie, aux centaines d'autres qui ont été blessés dans leur chair, souvent de manière durable, parfois de manière irrémédiable.

D'un point de vue budgétaire, les forces servant en opérations extérieures correspondent à des dépenses partiellement budgétées.

Logiquement, cette déflation des opérations extérieures se traduit par une baisse des coûts, plus exactement du « surcoût OPEX », c'est-à-dire la différence entre les coûts du dispositif sur le théâtre et le coût de son équivalent en métropole. Proche de 1,2 milliard d'euros en 2011, il devrait être de 873 millions d'euros à la fin de l'année 2012 :

2008

2009

2010

2011

(2)

LFI 2012

Prévision 2012

PLF 2013

Loi de finances initiale

475

510

570

630

630

630

630

Coûts non prévus par la LFI

376

361

290

541

243

Total

851

871

860

1 171

873

Décrets d'avances

222

228

247

462

ND

dont : « gage » sur des crédits d'équipement

169

228

247

ND

dont « gage » sur des annulations de crédits de ministères civils

42

372

ND

Crédits d'équipement ouverts en LFR

223

247

ND

Autres (dont fonds de concours)

41

79

50

79

56

Total

263

307

297

541

ND

En 2013, la provision en LFI s'élève à 630 millions d'euros.

(en CP)

2011

LFI 2012

Prévision 2012

PLF 2013

Loi de finances initiale

630

630

630

630

Coûts non prévus par la LFI

541

243

Total

1 171

873

7. Le retour de la France au sein du commandement intégré de l'OTAN

La pleine participation de la France dans l'OTAN a des conséquences en termes de mise à disposition de personnel mais aussi de contribution aux budgets de fonctionnement et d'investissement.

Concernant les effectifs, la France a obtenu lors des négociations pour la nouvelle NCS (NATO Command Structure) 13 postes d'officiers généraux pour 19,5 étoiles OTAN. A cela s'ajoutent les personnels dédiés au soutien, ceux insérés dans les agences de l'OTAN et dans les entités connexes hors NCS.

Pour la France, la cible 2011 initiale pour l'ensemble de l'OTAN était de 925 postes (comprenant la NCS, où se trouvent déjà 700 insérés, les agences, les organismes hors NCS, les écoles, les représentations et les éléments de soutien nationaux). Cette cible initiale a été réajustée en exécution 2011 à hauteur de 912 personnels et elle est fixée à compter de 2012 à 901 personnels. Cette nouvelle cible 2012 est reprise pour la période 2013-2015.

Le surcoût financier consécutif à la mise en place du personnel français dans la structure de commandement a été évalué à près de 24 millions d'euros (titre 2) en 2010, à 43 millions d'euros en 2011 et à 39 millions d'euros en 2012.

Le surcoût lié à notre réintégration dans le commandement intégré de l'Alliance est estimé, pour le fonctionnement de l'ensemble des états-majors de l'OTAN, à 15 millions d'euros en 2012.

La fin de la participation « à la carte » au budget d'investissement de l'OTAN entraînera à terme (à l'horizon 2020) un surcoût estimé à 21 millions d'euros par an.

Au total, les surcoûts de la montée en puissance en année pleine (régime établi), hors budgets opérationnels, sont actuellement évalués à 75 millions d'euros par an.

IV. DES DYSFONCTIONNEMENTS GRAVES QUI ONT AFFECTÉ LE VERSEMENT DES SOLDES DANS L'ARMÉE DE TERRE DEPUIS LE DÉPLOIEMENT DE LOUVOIS

Après plus d'un an et demi de fonctionnement du logiciel Louvois, de nombreuses difficultés existent notamment pour le personnel de l'armée de terre. Pour de nombreux militaires et leur famille, la situation est devenue insoutenable et incompréhensible.

Louvois restera dans l'histoire comme un grand ratage de la modernisation de l'État.

D'où le plan d'action annoncé par le ministre, le plan d'action dont la mise en oeuvre fait l'objet d'un suivi très précis par le cabinet du ministre et les état-major et directions concernées.

La mise en place de ce logiciel est un projet ancien. Son origine remonte à une décision ministérielle du 26 octobre 1996 qui indique que "le commissariat de l'armée de terre pilotera l'élaboration d'un logiciel de calcul de la solde commun aux trois armées et à la gendarmerie, avec extension ultérieure à la délégation générale pour l'armement...".

La mise au point de ce projet a nécessité des travaux importants en raison de la complexité de la réglementation et s'est faite parallèlement à la transformation des systèmes d'information ressources humaines (SIRH) des armées. Elle a dû prendre en compte la décision de mettre en place pour l'ensemble de l'Etat l'opérateur national de paie, que la défense doit rejoindre en 2017. Cet opérateur calculera les rémunérations à partir des informations transmises par les SIRH et pour l'ensemble du personnel civil et militaire du ministère par le SIRH unique SOURCE dont le pilotage est assuré par la direction des ressources humaines du ministère (DRH-MD).

Cette réforme a pour effet de rapprocher les fonctions "solde" et "ressources humaines" et donc de modifier l'organisation traditionnelle dans ce domaine. C'est ce qui explique en grande partie la décision prise de fermer les centres territoriaux d'administration et de comptabilité de l'armée de terre (CTAC).

Un plan de bascule des différentes armées dans LOUVOIS a été arrêté en septembre et novembre 2010. Après plusieurs mois de déroulement d'un processus qui comporte trois phases principales :

- Solde sur un échantillon représentatif ;

- solde en double sur la totalité de la population, pendant plusieurs mois ;

- et enfin répétition générale de bascule, la décision de bascule est prise.

Le service de santé a basculé pour la solde d'avril 2011. Des difficultés ont été constatées à ce moment-là, en particulier pour le paiement des gardes dans les hôpitaux. Le service de santé s'est appuyé sur la structure de suivi de la solde qu'il a mise en place pour corriger ces anomalies. Les équipes chargées de la mise au point du logiciel ont étudié ces anomalies et apporté des corrections au système d'information.

La marine a utilisé LOUVOIS à partir de la solde de mai 2012, après avoir franchi les étapes évoquées précédemment et mis en place la structure de suivi adaptée pour vérifier les soldes et corriger les anomalies.

La solde d'octobre 2011 des militaires de l'armée de terre a été la première solde sur LOUVOIS après 9 mois de solde double (de janvier à septembre 2011) et deux répétitions générales en juin et septembre 2011.

Tant que l'armée de terre n'était pas prise en compte dans LOUVOIS, les CTAC ont été maintenus en activités et les dissolutions de ces organismes se sont déroulées à l'été 2011 et à l'été 2012 afin de conserver au sein de l'armée de terre des compétences nécessaires pour traiter les soldes, puis pour armer le centre expert mis en place à Nancy.

Des difficultés sont apparues à différentes périodes depuis octobre 2011, et très nettement à partir de septembre 2012.

Ces difficultés ont pour partie un caractère technique qui affecte par exemple le calcul des indemnités liées à la présence du militaire outre-mer, la prise en compte d'évènements intervenant en cours de mois, ou encore le calcul de masse d'un grand nombre d'évènements passés comme les indemnités de service en campagne (ISC) qui sont versées deux fois par an et nécessitent de nombreuses opérations compte tenu du volume de dossiers à traiter (environ 60 000 dossiers à traiter en mai et novembre de chaque année).

Il y a également depuis juillet des difficultés de reprise des avances de solde.

Ces difficultés peuvent aussi résulter de l'organisation de soutien de la chaîne RH et solde.

L'ensemble de ces difficultés est en cours d'examen dans le cadre de plusieurs audits conduits en interne ou avec l'aide de cabinets extérieurs.

Ces différents audits permettent de mieux connaître les causes de la situation actuelle et aideront à corriger les problèmes rencontrés.

Les principales difficultés sont :

- la simultanéité de plusieurs réformes qui impactent l'organisation

Les difficultés organisationnelles s'expliquent en partie par une succession de décisions malheureuses : le nouveau dispositif a été déployé alors que l'organisation des fonctions de soutien dans les bases de défense n'était pas stabilisée et que dans le même temps, les services de solde (CTAC de l'armée de terre) étaient supprimés pour contribuer aux baisses des effectifs de soutien prévus par la révision générale des politiques publiques (RGPP) avant même que les nouveaux systèmes ou organismes de soutien de la solde soient mis en oeuvre.

- le traitement d'éléments de solde antérieurs à Louvois (armée de terre)

A fin août 2012, 120 208 opérations de régularisation correspondants à des droits ouverts avant 2011 (principalement pour les années 2011 et 2010, mais certaines dataient de 2009 voire marginalement avant) ont été réalisées par l'armée de terre. Par exemple plus de 30 000 dossiers de réservistes ou plus de 23 000 dossiers d'ISC (Indemnité de Service en Campagne) ou d'ISSE (OPEX) qui n'étaient pas soldés depuis début 2011 (voire 2010) ont été traités. Ces opérations des régularisations représentent près de 110 millions d'euros de masse salariale déjà reversés en 2012 au titre des années antérieures. C'était le point le plus prégnant jusqu'à l'été 2012.

- des dysfonctionnements techniques

La chaîne système d'information de la Solde qui interconnecte plusieurs applications informatiques (les SIRH des armées, le calculateur Louvois, les référentiels, et le système comptable de l'état Chorus) est complexe, porte encore des dysfonctionnements ou est incomplète pour prendre en compte toute les spécificités du traitement de la solde de certaines populations. Plusieurs anomalies engendrent aussi des calculs erratiques sur certaines indemnités qui imposent une compensation manuelle par les centres experts RH des armées.

Le ministère est confronté à un problème de communication, d'information et de pédagogie vis-à-vis aussi bien des administrés (ou de leurs ayants droit) que des gestionnaires de proximité. Le manque de connaissance de la réglementation - du fait aussi de sa complexité - un retour au réglementaire avec Louvois, ou le non respect des procédures établies amplifient le phénomène.

Une grande partie de ces difficultés s'explique par une compétence insuffisante sur les nouvelles modalités de traitement de la solde par les Bases de défense et les formations qui ne sont plus en mesure d'assurer un relais de proximité efficace et sécurisant, voire parfois réalise des saisies de données incorrectes. C'est une des conséquences des difficultés organisationnelles rencontrées. En conséquence la durée de résolution d'un problème individuel de solde peut prendre plusieurs mois.

Pour faire face à la situation, un plan en 8 points a été lancé le 25 septembre 2012 à Nancy par le ministre et complété de trois nouvelles mesures le 29 octobre 2012.

1. Mise en place d'un numéro vert (0 800 00 69 50) accessible à tous depuis le 1 er octobre 2012. C'est le principe d'un "Call Center" qui permet de répondre en direct aux préoccupations des administrés ou de leurs proches. Il est armé de 33 personnes. Au 5 novembre, plus de 8 074 appels reçus depuis son ouverture donnant lieu à 4 095 dossiers ouverts. La moyenne est passée de 527 appels/jour à 370 appels/jours. 95 % des dossiers concernent l'armée de terre. Le taux de réponse des organismes experts (CERH des armées) est de 17 % en global, soit 16 % pour l'armée de terre, 59 % pour la marine et 72 % pour le SSA. Mais l'analyse des dossiers complexes exigera des délais supplémentaires. Le CERHS de Nancy (armée de terre) se renforce progressivement depuis la mi-octobre (70 personnes supplémentaires d'ici le 10 novembre, 40 étaient déjà installées fin octobre). Sa capacité de traitement est actuellement de 100 dossiers/jour, elle sera portée à 200 dossiers/jour prochainement pour être en cohérence avec le flux constaté par le "Call Center".

2. Création d'un groupe d'utilisateurs (acteurs du ministère de la fonction Solde, représentants du personnel, conjoints....) dont l'objectif est de confronter les idées pour améliorer le service rendu, dialoguer sur les meilleures mesures pour accompagner les administrés en difficulté et améliorer en continu le système. La première réunion s'est tenue le 23 octobre 2012 en présence de trois épouses.

3. Réalisation d'une liste exhaustive de tous les dossiers en latence datant d'avant la bascule de la solde dans Louvois. Les centres de paie (CTAC) qui existaient avant l'arrivée de LOUVOIS ont été audités. Le ministère a déjà traité plus de 120 000 dossiers pour une masse salariale distribuée de près de 110 millions d'euros. Le « reste à faire » est évalué entre 5 000 à 6 000 dossiers. Une procédure de paiement accéléré est mise en place (cf. mesure §9).

4. Mise en place d'un dispositif de contrôle de la fonction solde afin d'organiser tous les mois une double remontée des incidents par la chaîne de commandement et par la chaîne solde afin de disposer d'un moyen de comparaison dans la remontée des problèmes.

5. Mise en place d'un dispositif spécifique pour les personnels qui rentrent d'opérations extérieures afin de pré-identifier des difficultés éventuelles sur la solde pour les traiter avant qu'elles ne surviennent et surtout de porter toute l'attention sur ce personnel pour lequel il n'est pas acceptable qu'il y ait des difficultés.

6. Amélioration du dispositif d'information et de communication sur la solde pour expliquer la complexité du bulletin de paie, mais aussi la réglementation.

7. Dématérialisation du bulletin de paie pour que les administrés puissent consulter leur bulletin dès son édition sans attendre le courrier papier. Ils pourront ainsi réagir immédiatement s'il y a une erreur ou de se renseigner en cas d'incompréhension.

8. Simplification administrative de la réglementation notamment pour les ISC (Indemnités de Service en Campagne) qui vont être mensualisées début 2013. Le processus de gestion des avances en opération (OPEX) sera clarifié.

9. Mise en place d'une procédure de paiement accéléré via le CIAS (Centre Inter-Armée de la Solde) et les trésoriers militaires pour tous les dossiers où l'Etat est redevable d'une dette vis-à-vis des administrés.

10. Moratoire d'au moins trois mois sur la reprise des avances ou des paiements directs qui arrivent brutalement et sans information préalable en déduction des soldes de base de nombreux administrés.

11. Report de deux mois des raccordements de l'armée de l'air et de la gendarmerie nationale initialement prévus en mars et septembre 2013, tant que le système ne sera pas stabilisé.

12. Mobilisation du réseau de l'action sociale et délivrance en cas de besoin de secours non remboursables aux militaires impactés par les dysfonctionnements du logiciel.

SECTION 3 - LES CRÉDITS HORS TITRE 2

I. DES CRÉDITS GLOBALEMENT PRÉSERVÉS DANS UN CADRE MARQUÉ PAR LE REFLUX DES ENGAGEMENTS EXTÉRIEURS

Le titre 3 du programme 178 regroupe les crédits consacrés au fonctionnement des armées hors personnel. Il rassemble donc l'ensemble des moyens nécessaires notamment au soutien des forces et à leur entraînement opérationnel. Les crédits demandés pour 2013 s'élèvent à 6,1 milliards d'euros (en crédits de paiement).

A. DES CRÉDITS GLOBALEMENT PRÉSERVÉS

Titre 3 du P178 : autorisations d'engagement

2010 LFI

2011 LFI

2012 LFI

2013 PLF

6 763,19 M€

6 413,24 M€

6 699,34 M€

6 805,95 M€

Source : ministère de la Défense, réponse au questionnaire budgétaire

Évolution des autorisations d'engagement

2010/2011

2011/2012

2012/2013

absolue (M€) :

- 349,95

+ 286,10

+ 106,61

relative :

- 5,17 %

+ 4,46 %

+ 1,59 %

Titre 3 du P178 : crédits de paiement

2010 LFI

2011 LFI

2012 LFI

2013 PLF

5 493,43 M€

5 773,35 M€

6 029,53 M€

6 176,73 M€

Source : ministère de la Défense, réponse au questionnaire budgétaire

Source : ministère de la Défense, réponse au questionnaire budgétaire

Évolution des crédits de paiement

2010/2011

2011/2012

2012/2013

absolue (M€) :

+ 279,92

+ 256,18

+ 147,20

relative :

+ 5,10 %

+ 4,44 %

+ 2,44 %

Source : ministère de la Défense, réponse au questionnaire budgétaire

B. L'APPLICATION DIFFÉRENCIÉE DE LA NORME DE DIMINUTION DE 7 % DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT PILOTABLES

Compte tenu de l'existence de nombreuses dépenses incompressibles (comme les fluides ou l'énergie) , le respect de l'objectif gouvernemental de réduction des dépenses de fonctionnement pilotables de 7 % en 2013 par rapport à la loi de finances initiale pour 2012 a donné lieu à des choix particulièrement difficiles et minutieux.

Et ce d'autant plus que les contraintes opérationnelles exercent en fait un effet haussier sur les besoins d'activité et d'entraînement du fait de la baisse de l'engagement en opérations extérieures.

Ont été préservées :

- la plus grande partie du fonctionnement directement lié à l'activité opérationnelle. En effet, celle-ci conditionne directement la capacité opérationnelle des armées. Seules les dépenses d'alimentation, qui financent les repas de service des militaires, sont considérées comme réductibles ;

- les dépenses spécifiques, comme la compensatrice SNCF, la contribution Djibouti et les subventions à l'OTAN, à l'UE et aux états-majors multinationaux ;

- les fonctions « support » des bases de défense, compte tenu de la situation budgétaire particulière dans laquelle elles se trouvaient (cf. ci-dessous).

Sur cette base, les efforts du programme 178 sont notamment axés sur l'alimentation, les frais de mutation, la formation, le fonctionnement courant et la communication.

C. L'ARTICULATION PAR ACTIONS DES CRÉDITS DU PROGRAMME 178 HORS TITRE 2

Répartition des crédits de soutien des actions d'armées au PLF 2013 - autorisations d'engagement

Numéro et intitulé de l'action / sous-action

Titre 3
Dépenses de fonctionnement

Titre 5
Dépenses d'investissement

Titre 6
Dépenses d'intervention

Total pour 2013

FDC et ADP
attendus en 2013

01-10 - Emploi des forces

71 653 000

34 172 000

147 120 000

252 945 000

01-11 - Renseignement d'intérêt militaire

14 313 000

20 080 000

34 393 000

01-14 - Systèmes d'information et de communication

62 027 000

134 386 000

196 413 000

01 - TOTAL « Planification des moyens et conduite des opérations »

147 993 000

188 638 000

147 120 000

483 751 000

02-01 - Commandement et activités des forces terrestres

146 205 056

85 860 000

5 200 000

237 265 056

02-05 - Ressources humaines des forces terrestres

117 512 124

117 512 124

02-07 - Maintien en condition opérationnelle du matériel des forces terrestres

868 613 235

868 613 235

02-08 - Environnement opérationnel du matériel des forces terrestres

264 041 276

264 041 276

02 - TOTAL « Préparation des forces terrestres »

1 396 371 691

85 860 000

5 200 000

1 487 431 691

10 175 000

03-01 - Commandement et activités des forces navales

239 497 000

239 497 000

03-05 - Ressources humaines des forces navales

46 643 000

4 000 000

50 643 000

03-07 - Maintien en condition opérationnelle du matériel des forces navales

1 281 415 000

90 920 000

1 372 335 000

03-08 - Environnement opérationnel du matériel des forces navales

133 057 000

7 618 000

140 675 000

03 - TOTAL « Préparation des forces navales »

1 700 612 000

102 538 000

1 803 150 000

9 416 000

04-02 - Commandement et activités centralisées des forces aériennes

4 211 000

4 211 000

04-03 - Activités des forces aériennes

285 572 000

285 572 000

04-04 - Activités des forces aériennes stratégiques

28 722 000

28 722 000

04-05 - Ressources humaines des forces aériennes

84 770 000

84 770 000

04-06 - Entretien et équipements des forces aériennes

1 749 345 000

51 605 000

1 800 950 000

04 - TOTAL « Préparation des forces aériennes »

2 152 620 000

51 605 000

2 204 225 000

23 073 000

05-80 - Fonction santé

183 518 000

68 718 000

252 236 000

05-81 - Fonction pétrolière

17 137 000

3 713 000

20 850 000

05-82 - Soutien des forces des bases de défense

686 000 000

686 000 000

05-83 - Soutiens complémentaires

137 783 000

844 000

138 627 000

05-84 - Service interarmées des munitions

7 179 000

7 179 000

05-85 - Service du commissariat aux armées

15 739 000

8 000 000

23 739 000

5 - TOTAL « Logistique et soutien interarmées »

1 047 356 000

81 275 000

1 128 631 000

203 419 000

06-90 - Surcoûts liés aux opérations extérieures

361 000 000

59 000 000

420 000 000

06 - TOTAL « Surcoûts liés aux opérations extérieures »

361 000 000

59 000 000

420 000 000

30 000 000

Total crédits de soutien

6 805 952 691

509 916 000

211 320 000

7 527 188 691

276 083 000

Répartition des crédits de soutien des actions d'armées au PLF 2013 - crédits de paiement

Numéro et intitulé de l'action / sous-action

Titre 3
Dépenses de fonctionnement

Titre 5
Dépenses d'investissement

Titre 6
Dépenses d'intervention

Total pour 2013

FDC et ADP
attendus en 2013

01-10 - Emploi des forces

71 653 000

31 780 000

147 120 000

250 553 000

01-11 - Renseignement d'intérêt militaire

14 313 000

20 080 000

34 393 000

01-14 - Systèmes d'information et de communication

61 111 000

130 542 000

191 653 000

01 - TOTAL « Planification des moyens et conduite des opérations »

147 077 000

182 402 000

147 120 000

476 599 000

02-01 - Commandement et activités des forces terrestres

146 375 056

84 160 000

5 200 000

235 735 056

02-05 - Ressources humaines des forces terrestres

117 508 124

117 508 124

02-07 - Maintien en condition opérationnelle du matériel des forces terrestres

696 677 571

696 677 571

02-08 - Environnement opérationnel du matériel des forces terrestres

266 667 276

266 667 276

02 - TOTAL « Préparation des forces terrestres »

1 227 228 027

84 160 000

5 200 000

1 316 588 027

10 175 000

03-01 - Commandement et activités des forces navales

239 497 000

239 497 000

03-05 - Ressources humaines des forces navales

46 643 000

3 660 000

50 303 000

03-07 - Maintien en condition opérationnelle du matériel des forces navales

1 308 013 000

100 150 000

1 408 163 000

03-08 - Environnement opérationnel du matériel des forces navales

131 211 000

8 618 000

139 829 000

03 - TOTAL « Préparation des forces navales »

1 725 364 000

112 428 000

1 837 792 000

9 416 000

04-02 - Commandement et activités centralisées des forces aériennes

4 211 000

4 211 000

04-03 - Activités des forces aériennes

285 572 000

285 572 000

04-04 - Activités des forces aériennes stratégiques

28 722 000

28 722 000

04-05 - Ressources humaines des forces aériennes

84 770 000

84 770 000

04-06 - Entretien et équipements des forces aériennes

1 344 832 000

52 720 000

1 397 552 000

04 - TOTAL « Préparation des forces aériennes »

1 748 107 000

52 720 000

1 800 827 000

23 073 000

05-80 - Fonction santé

86 518 000

68 718 000

155 236 000

05-81 - Fonction pétrolière

17 137 000

3 713 000

20 850 000

05-82 - Soutien des forces des bases de défense

700 000 000

700 000 000

05-83 - Soutiens complémentaires

141 383 000

844 000

142 227 000

05-84 - Service interarmées des munitions

7 179 000

7 179 000

05-85 - Service du commissariat aux armées

15 739 000

8 000 000

23 739 000

5 - TOTAL « Logistique et soutien interarmées »

967 956 000

81 275 000

1 049 231 000

203 419 000

06-90 - Surcoûts liés aux opérations extérieures

361 000 000

59 000 000

420 000 000

06 - TOTAL « Surcoûts liés aux opérations extérieures »

361 000 000

59 000 000

420 000 000

30 000 000

Total crédits de soutien

6 176 732 027

512 985 000

211 320 000

6 901 037 027

276 083 000

L'analyse des évolutions par actions montre une hausse des crédits d'entretien des matériels et une baisse des moyens de fonctionnement courant.

Action 1 : Planification des moyens et conduite des opérations

Cette action regroupe au sein de trois sous-actions l'état-major des armées et ses différents organismes, la direction du renseignement militaire (DRM) et la direction interarmées des réseaux d'infrastructures et des systèmes d'information de la défense (DIRISI). Ses crédits connaissent une nette augmentation en crédits de paiement, à hauteur de 6,7 %, mais une diminution en autorisations d'engagement de 4,2 %, pour atteindre respectivement 1 605 et 1 612 millions d'euros.

Action 2 : Préparation des forces terrestres

Cette action, la plus importante de la mission, représente, avec 7 659 millions d'euros en crédits de paiement et 7 564 millions d'euros en autorisations d'engagement, plus du tiers des ressources du programme. Hors titre 2, les crédits sont en baisse de 2,6 %.

Au sein de cette enveloppe contrainte, l'évolution des moyens reflète la priorité donnée aux activités opérationnelles , afin de permettre aux personnels de maintenir le nombre de journées d'activité à 105 jours par an, dans un contexte de décrue des opérations extérieures. À ce titre, les moyens prévus pour les dépenses de carburant et de carburéacteur sont en nette hausse, de même que les crédits d'entraînement des forces. L'entretien des matériels fait également l'objet d'une revalorisation, notamment en autorisations d'engagement, à hauteur de 47,2 %, pour atteindre 847,8 millions d'euros ; les crédits de paiement augmentent de 16,4 %, pour atteindre 676 millions d'euros. La hausse des autorisations d'engagement est destinée à assurer la contractualisation du soutien des matériels de nouvelle génération, c'est-à-dire le véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) et les hélicoptères Tigre et NH 90.

La croissance des moyens dévolus à l'entraînement et à la maintenance des équipements est compensée par d'importantes économies sur le fonctionnement courant et l'entretien programmé des personnels . Les crédits alloués au soutien collectif et individuel (habillement, tenues spécifiques, tentes...) connaissent une baisse drastique, de près de 25 % ; les ressources, qui atteignent 105 millions d'euros, permettront de préserver a minima le paquetage du combattant ; le renouvellement des tenues de service courant et des effets de sport est en revanche différé. Les dépenses de communication, d'alimentation, de soutien des ressources humaines et de mobilité des personnels sont elles aussi réduites, de même que les crédits alloués aux équipements dits d'accompagnement, c'est-à-dire les munitions et les petits matériels de la fonction opérationnelle « génie » : les moyens prévus en la matière baissent de 24 %, pour atteindre 163 millions d'euros.

Action 3 : Préparation des forces navales

Les moyens prévus pour permettre à la marine d'accomplir ses missions représentent environ 18,5 % des crédits du programme, soit 4 308 millions d'euros en crédits de paiement, en hausse de 3,16 %, et 4 274 millions d'euros en autorisations d'engagement, en baisse de 5,3 %. L'augmentation des crédits de paiement concerne uniquement les ressources de titre 2. Les ressources relevant des autres titres sont stables .

Comme pour les forces terrestres, priorité est donnée aux activités opérationnelles, ce qui se traduit par l'augmentation des crédits de carburant , de carburéacteur et de combustibles de navigation. Toutefois, les volumes de carburant prévus sont en légère diminution par rapport à 2012, en raison du renchérissement de leur coût. Les crédits d'entretien des matériels augmentent de 2,9 % en crédits de paiement, pour s'établir à 1 386 millions d'euros (dissuasion incluse). En revanche, les autorisations d'engagement sont en diminution de 20 %, pour s'élever à 1 349 millions d'euros, compte tenu de la notification prévue en 2012 d'un contrat d'entretien majeur d'un sous-marin nucléaire lanceur d'engin (SNLE-NG).

Pour compenser l'effort consenti en matière d'activités opérationnelles, les dépenses de fonctionnement courant sont là encore réduites - les crédits destinés au soutien collectif et individuel baissent notamment de 36,9 % - de même que les dépenses de petits matériels et munitions (- 29 %).

Action 4 : Préparation des forces aériennes

Les moyens prévus pour l'armée de l'air s'inscrivent en légère diminution par rapport à 2012 en crédits de paiement, avec 4 357 millions d'euros, tandis que les autorisations d'engagement, s'élevant à près de 4 760 millions d'euros, sont en hausse de 5,7 %, essentiellement du fait de l'évolution des moyens dévolus à l'entretien des matériels.

La même logique prévaut, à savoir la préservation des moyens alloués aux carburants et carburéacteurs, stables par rapport à 2012, ainsi qu'aux activités, et la nette hausse des crédits d'entretien des équipements . Toutefois, les moyens inscrits pour le carburéacteur, dont le montant est estimé à partir des prévisions d'activités opérationnelles, correspondent à un volume de 361 000 mètres cubes, nettement en deçà du volume prévu en 2012 (442 700 mètres cubes), ce qui aura une incidence sur l'activité des forces aériennes ; cette diminution de volume s'explique par la forte hausse du prix du carburant et par les incidences de la parité euro-dollar.

Les crédits d'entretien des matériels augmentent de 24 % en autorisations d'engagement et 6,6 % en crédits de paiement, pour atteindre respectivement 1 653 et 1 246 millions d'euros. La croissance des autorisations d'engagement résulte notamment de la passation de contrats pluriannuels pour l'avion Rafale et d'autres équipements. L'augmentation des crédits d'entretien programmé risque de ne pas suffire, l'écart entre les ressources disponibles et les besoins d'entretien des matériels aurait en effet atteint 300 millions d'euros en 2012 13 ( * ) .

Les dépenses de soutien (communication, soutien des ressources humaines, mobilité) sont, comme pour les autres armées, en baisse ; les crédits dits d'entretien programmé des personnels sont réduits, de même que ceux destinés aux équipements d'accompagnement (- 37,3 %).

Action 5 : Logistique et soutien interarmées

Relèvent de cette action plusieurs organismes chargés d'assurer le soutien opérationnel interarmées, à savoir le service de santé des armées, le service des essences des armées, les bases de défense, le service interarmées des munitions ainsi que le service du commissariat des armées. Les moyens inscrits sont dans l'ensemble en baisse de 1,9 % en crédits de paiement comme en autorisations d'engagement. La réduction des ressources pèse particulièrement sur le service des essences des armées , à hauteur de 12,5 %, ainsi que sur le service du commissariat aux armées , pour 17,3 %. Ce dernier poursuit sa restructuration, qui se traduit en 2013 par la poursuite de la déflation de ses effectifs et par la forte diminution de ses dépenses de fonctionnement. On relèvera enfin la hausse des moyens hors titre 2 alloués aux bases de défense , lesquels passent de 630 millions d'euros en 2012 à 700 millions d'euros en 2013.

Action 6 : Surcoûts liés aux opérations extérieures

De même qu'en loi de finances pour 2012, les crédits inscrits au titre des surcoûts issus des opérations extérieures s'établissent à 630 millions d'euros (voir infra).

II. MALGRÉ L'EFFORT BUDGÉTAIRE LA SITUATION RESTE PRÉOCCUPANTE POUR L'ENTRAÎNEMENT DES FORCES ARMÉES

L'entraînement fonde la valeur opérationnelle des forces armées. La qualité de la préparation opérationnelle de l'armée française et sa cohérence avec les standards OTAN, validée à travers les cycles de certification et de nombreux exercices multinationaux, conditionnent la capacité d'intégration de nos forces dans des dispositifs multinationaux, complexes, engagés en opérations.

Votre commission s'alarme depuis plusieurs années de l'écart croissant entre les objectifs affichés et les niveaux réels d'entraînement. Chaque année, les rapports annuels de performances publiés en même temps que le projet de loi de règlement des comptes viennent confirmer les craintes exprimées par votre commission au moment de l'examen des lois de finances initiales.

En juillet 2012, dans un rapport public thématique sur le bilan d'exécution de la loi de programmation militaire 14 ( * ) , la Cour des comptes a très largement confirmé cette analyse, et détaillé précisément les déficits de nos forces en matière d'entraînement et de disponibilité opérationnelle des matériels.

Ainsi la Cour observe qu'en 2011, bien que les capacités opérationnelles des armées aient été démontrées, avec des interventions décisives en Côte d'Ivoire et en Libye, tout en maintenant un niveau d'engagement élevé sur plusieurs autres théâtres (Afghanistan, Liban), les « dimensions les plus exigeantes des contrats opérationnels conventionnels sont hors d'atteinte, la disponibilité des matériels et l'entraînement des forces s'avérant insuffisants . »

La Cour estime que les arbitrages effectués ont conduit trop souvent à sacrifier les dépenses d'entraînement des forces et de maintien en condition opérationnelle des matériels . « Par exemple, dans l'armée de terre, où 117 jours d'activité en 2011 et 111 en 2012 ont été réalisés pour 150 prévus par la loi de programmation militaire. La situation est aussi critique pour les pilotes de transport de l'armée de l'air avec 287 heures de vols par an pour un objectif de 400. »

Accordant des paragraphes très détaillés à la question de la préparation opérationnelle, la Cour conclut en indiquant être «  préoccupée par le niveau insuffisant d'entraînement, notamment pour l'armée de terre . ».

Dans ses documents budgétaires, le ministère de la défense fait valoir que, compte tenu de sa volonté de préserver l'activité opérationnelle des armées, le projet de loi de finances prévoit une augmentation de 300 millions d'euros des crédits d'entretien programmé du matériel, de fonctionnement opérationnel et de carburants, afin de préserver l'activité générale des forces.

Pour autant votre commission juge que ces crédits risquent de ne pas être à la hauteur des besoins. Après le pic d'engagements sur les théâtres extérieurs en 2011, puis l'inflexion de l'année 2012, 2013 sera l'année du repli des forces armées sur le territoire national. Pour la première fois depuis ces 20 dernières années, le nombre de personnels déployés en opérations extérieures va passer en 2013 sous la barre des 5000. Dans ce contexte, les besoins augmentent, qu'il s'agisse des jours d'entraînement ou de la régénération du matériel.

A. L'ARMÉE DE TERRE : UN ENTRAÎNEMENT INSUFFISANT POUR ACCOMPAGNER LE REPLI SUR LE TERRITOIRE NATIONAL ET MAINTENIR L'ATTRACTIVITÉ DES CARRIÈRES

L'objectif de 150 jours d'entraînement par an pour l'armée de terre, fixé par la loi de programmation, est désormais budgétairement hors d'atteinte. Il a d'ailleurs déjà été revu à la baisse, dans une fourchette fluctuant selon les années entre 105 jours (comme c'est le cas en 2013) et 120 jours, niveau que la Cour des comptes jugeait déjà dans son rapport précité insuffisant et qui « risque d'altérer la capacité opérationnelle des forces. ».

1. Un entraînement qui reposait sur la préparation opérationnelle différenciée, au détriment de la préparation générique

Les engagements extérieurs ont conduit à mettre l'accent sur la préparation à la projection davantage que sur la préparation générique.

Le plan d'entraînement de l'armée de terre était fortement orienté vers les opérations extérieures programmées pour les différentes unités. Ceci ne permet pas de mettre l'accent sur certaines compétences liées aux combats de haute intensité, par exemple avec une utilisation importante de l'arme blindée cavalerie, qui n'a pas connu d'engagement massif depuis la première guerre du Golfe. Avec la pression d'un fort engagement opérationnel et une contrainte accrue en termes de ressources budgétaires, les forces terrestres ont focalisé leurs efforts sur la préparation des opérations en cours, parfois au détriment de l'entraînement à un engagement générique.

Cette préparation générique constitue le socle de la préparation des forces terrestres et définit le seuil de leur crédibilité opérationnelle. Elle consiste à maîtriser les savoir-faire communs à tous les soldats, en opérations extérieures comme sur le territoire national, et les savoir-faire spécifiques de chaque métier (infanterie, cavalerie, logistique, etc.)...

En clair, la fameuse « préparation opérationnelle différenciée » des forces a permis de garantir un niveau d'entraînement adéquat aux unités devant partir en opérations à court terme, mais a conduit à relâcher l'effort pour les forces dont la projection n'est pas prévue à court terme.

La préparation opérationnelle différenciée

Le concept de préparation opérationnelle différenciée repose sur la distinction entre la préparation à « la guerre » de manière générique et la préparation à « une guerre » spécifique correspondant à un théâtre d'opérations donné.

Préparation à « la guerre générique ».

Cette première partie de la préparation opérationnelle (PO) différenciée est fondamentale. Elle constitue le socle de la PO des forces terrestres et définit le seuil de leur crédibilité opérationnelle. Elle consiste à maîtriser les savoir-faire communs à tous les soldats, en opérations extérieures comme sur le territoire national, et les savoir-faire spécifiques de métier (infanterie, cavalerie, logistique, etc.).

Programmée sur un cycle de 48 mois, elle prévoit la réalisation d'un certain nombre d'activités (parcours normés, spécifiques à chaque fonction opérationnelle). La réalisation de ces parcours est mesurée et rapportée sous forme d'indicateurs.

Préparation à « une guerre spécifique ».

Cette seconde partie de la PO différenciée, également appelée Mise en Condition avant Projection (MCP), permet de cibler les savoir-faire et les connaissances indispensables à la projection sur un théâtre donné. Sa durée varie de 2 à 6 mois en fonction de la complexité de la mission ou de la dangerosité du théâtre. Elle repose notamment sur la connaissance culturelle et comportementale du théâtre et intègre les retours d'expérience.

Mécanisme général de la PO.

Ce mécanisme repose sur un cycle dont une photographie sur une phase de 6 mois donnerait l'image suivante :

2 brigades sont en projection (engagement dans «une guerre spécifique ») ;

2 brigades se préparent à partir en mission (préparation à «une guerre spécifique ») ;

4 brigades se préparent de manière générique (préparation à «la guerre générique »), assurent des missions sur le théâtre national et pour deux d'entre elles participent au dispositif d'alerte GUEPARD.

Au cours des dernières années, le taux très élevé de projection en opérations extérieures ou en missions de courte durée et les volumes d'effectifs impliqués, a eu un impact sur la réalisation des parcours normés.

Au bilan, hommes et unités ont gagné en expérience opérationnelle et perdu en entraînement générique.

Source : ministère de la défense, réponse aux questionnaires budgétaires

Sous contrainte de ressources (équipements, budgets, munitions et espaces d'entraînement) et de temps, la priorité à été donnée à la préparation des déploiements. Le déficit en journées de préparation opérationnelle « génériques » a été compensé, en quantité et en qualité, par un nombre élevé de journées « spécifiques » et de journées d'activité opérationnelle (OPEX). La baisse des effectifs en OPEX diminue mécaniquement le volume global des jours d'activité (moins de jours passés en opérations, et moins de jours de mise en condition à la projection).

La période à venir devrait logiquement conduire à un transfert de priorité. L'enjeu pour l'armée de terre consiste désormais à mettre à profit cette « pause opérationnelle » pour relancer une préparation opérationnelle générique visant l'ensemble de ses contrats opérationnels et entretenant le haut niveau de savoir-faire atteint au cours de ce cycle de projection soutenu.

2. Des crédits 2013 trop étriqués pour répondre aux besoins d'entraînement accrus

Avec le désengagement de théâtres majeurs et la réduction du volume des forces projetées, les forces terrestres vont connaître une diminution des journées de préparation «spécifiques» probablement dans des proportions inusitées depuis le début de la professionnalisation. Moins de 5.000 hommes seront en OPEX à la fin 2012, toutes armées confondues, pour une moyenne supérieure à 10.000 sur les 10 dernières années.

L'effort doit être transféré sur la préparation générique, afin de réacquérir ou approfondir les savoir-faire fondamentaux de métier, et de maintenir le moral des unités par la conduite d'activités motivantes en métropole, ce qui a un impact direct sur la fidélisation. Or le taux de fidélisation est insuffisant pour les militaires du rang : l'armée de terre observe d'ores et déjà un déficit dans la fourchette des « 5 à 11 ans d'ancienneté », lié à un faible taux de renouvellement des contrats au bout de 5 ans. Il s'agit de soldats déjà formés et expérimentés que les forces aspireraient à fidéliser.

Il faut rappeler en outre que la revalorisation de la prime de fidélisation, annoncée par le précédent gouvernement, n'a pas été effectuée.

Dans ce contexte, votre commission observe avec inquiétude le fait que les ressources dévolues à l'entraînement restent comptées. D'autre part, la politique d'emploi et gestion des parcs (PEGP), qui monte en puissance, et qui doit contribuer à restaurer la disponibilité des matériels, n'atteindra véritablement ses objectifs de mise à disposition qu'à l'horizon 2014.

Il est vraisemblable que les unités n'auront d'autre choix que de privilégier l'entraînement qui se déroule dans et à proximité des garnisons.

a) Une cible dégradée, ne permettant qu'un niveau de préparation minimal des unités

Le bilan de l'activité des forces terrestres en 2010, 2011, au 1 er semestre 2012 et les prévisions pour 2013, détaillés dans les tableaux ci-dessous, confirment les préoccupations de votre commission.

NOMBRE DE JOURNÉES DE PRÉPARATION ET D'ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES (JPAO) ET D'HEURES DE VOL POUR L'ARMÉE DE TERRE

Année

Nombre de JPAO par homme

Nombre d'HdV par pilote

Référentiel

2010

119

177,4

RAP 2010

2011

117

180

RAP 2011

1 er semestre 2012*

58,6

83,1

DPG 2T 2012

Prévisions actualisées 2012

111

175

PAP 2012

Prévisions 2013

105

172

PAP 2013

Objectifs
LPM 2009-2014

150 (révisé à 120)

180

LPM 2009-2014

Référentiel OTAN

n.c.

180

Allied command operations forces standards volume VI-shape tactical evaluation manual (STEM)- janvier 2011

* Réalisés au 1 er semestre 2012 (données au 30/06/2012).

L'objectif de l'actuelle loi de programmation militaire (LPM) est de 150 JPAO par homme et par an. Il s'inscrit dans la perspective d'un engagement maximal des forces. Cette cible initiale a été ajustée à 120 JPAO.

Ce tableau montre que les efforts ont été maintenus au profit des unités se préparant à être projetées, puisque le niveau d'activité et d'entraînement atteint en 2011 est de 117 JPAO (-2 jours par rapport à 2010). En dépit des mesures de rationalisation des activités, d'optimisation de l'emploi des parcs de matériels, de densification du parcours de mise en condition avant projection (MCP), de son extension à de nouveaux bénéficiaires, la légère dégradation entre 2010 et 2011 s'explique par l'importance des activités opérationnelles et par l'effort financier supplémentaire à fournir pour améliorer l'entretien programmé du matériel.

La prévision pour 2012 (111 JPAO) est en retrait du fait de la réduction des effectifs de l'armée de terre déployés en OPEX. La préparation avant projection est maintenue à son niveau actuel afin de garantir au personnel engagé en opération une préparation en cohérence avec les missions réalisées sur les théâtres.

Les ressources budgétaires demandées pour 2013 permettront tout juste de maintenir le nombre de JPAO à 105 jours. Le financement de jours de préparation opérationnelle de l'armée de terre supplémentaires ne vient que partiellement compenser la moindre activité opérationnelle liée au désengagement progressif d'Afghanistan.

b) Alors que le besoin réel des pilotes s'établit à 200 heures de vol, l'atteinte de la cible des 180 heures de vol est de plus en plus aléatoire

Si l'activité opérationnelle des pilotes de l'aviation légère de l'armée de terre (ALAT) a progressé durant l'année 2011, il est néanmoins observé un certain tassement de l'activité sur le premier semestre 2012, compte tenu des problèmes de disponibilité des appareils.

Les difficultés rencontrées en termes de disponibilité des aéronefs sont la conséquence du haut niveau d'engagement de 2011 et de la nécessaire phase de régénération qui lui succède, tant pour le personnel (équipages mais surtout maintenanciers) que pour le matériel (reconstitution des stocks). Elles proviennent aussi d'un allongement sensible des périodes d'entretien lié à l'hétérogénéité du parc (effet cumulé d'un parc d'ancienne génération demandant toujours plus de travaux d'entretien et d'un parc de nouvelle génération, complexe et plus exigeant sur le plan normatif).

Avec une moyenne estimée de 83,1 heures de vol réalisée depuis le début de l'année 2012, le niveau pourrait n'atteindre que 175 heures de vol réelles par pilote d'hélicoptère .

Il faut noter que ce calcul du nombre d'heures de vol inclut, qui plus est, des éléments comme les vols de « substitution » et le temps passé par les pilotes sur des simulateurs.

La cible pour 2013 n'est que de 172 heures de vol...

3. Un entraînement rationné par la rareté des « indemnités de service en campagne » (ISC)

Le projet de loi de finances prévoit 105 journées de préparation et d'activités opérationnelles (JPAO) pour l'armée de Terre. L'indicateur JPAO est un indicateur global, en ce qu'il caractérise l'activité de l'armée de terre quelle qu'en soit la finalité (et le financement) : opérations extérieures, opérations intérieures, missions de courte durée outre-mer ou à l'étranger, préparation opérationnelle stricto sensu, etc.

Parmi ces 105 jours, les crédits budgétaires ne permettront d'en indemniser que 59. Pour l'armée de Terre, 46 des 105 JPAO ne seront pas indemnisés et devront donc être réalisés à l'intérieur des garnisons.

Par analogie avec les « jours à la mer » des marins, l'armée de Terre a élaboré un nouvel indicateur de la préparation opérationnelle, basé sur les "jours à la Terre" (JT), qui sont les jours de préparation et d'activité opérationnelle hors garnison , indemnisés comme tels notamment par des indemnités de service en OPEX et des indemnités de service en campagne (ISC), et figurant dans le schéma ci-dessous.

Cette évolution pose un double problème, à la fois opérationnel et humain :

- opérationnel , car en étant obligée de réaliser 46 JPAO en garnison, l'armée de Terre ne pourra pas conduire de façon optimale son projet de compenser la baisse de ses engagements par une montée en puissance de la préparation opérationnelle « générique » (JPO), réalisée en grande partie dans les camps et les centres spécialisés pour être conduite au bon niveau (régiment, brigade) et le plus près possible des conditions d'engagement de nos futures opérations ;

- un problème humain , car la baisse importante des indemnités touchées par nos soldats en opérations (et budgétisées au titre des OPEX) représente une baisse de revenu qui, à terme, nuira au moral de la troupe et à la qualité du recrutement de l'armée de Terre. Les ISC perçues lors des entraînements sur tous les terrains sont bien la seule prime dont peuvent bénéficier les militaires du rang de l'armée de Terre.

ÉVOLUTION DES « JOURS À LA TERRE » DE L'ARMÉE DE TERRE

Source : état major de l'armée de terre

Votre commission veillera tout particulièrement en cours de gestion à ce qu'une régulation en cours d'année de crédits du titre 2 ne vienne pas réduire encore ce niveau déjà insuffisant.

B. LA MARINE NATIONALE : L'ÉROSION CONTINUE D'UNE ACTIVITÉ QUI SERA PÉNALISÉE EN 2013 PAR L'ENTRETIEN DU PORTE-AVIONS

L'entraînement opérationnel des unités de la marine nationale est organisé autour d'une activité régulière à la mer lors d'exercices et de stages spécifiques. Dans un souci d'efficience, les déploiements opérationnels sont valorisés autant que possible en réalisant simultanément des actions d'entraînement qui permettent d'entretenir les savoir-faire de l'équipage.

L'activité de l'année 2013 risque d'être fortement obérée par la longue période d'entretien du porte-avions (6 mois).

Le bilan de l'activité des unités de la marine nationale en 2010, 2011, 2012 et les prévisions pour 2013 sont détaillés dans les tableaux ci-dessous :

NOMBRE DE JOURS DE MER ET D'HEURES DE VOL POUR LA MARINE NATIONALE

Année

Bâtiment (bâtiment de haute mer de plus de 1000 tonnes)

Jours de mer

Pilote de chasse (pilote qualifié nuit)

Heures de vol

Pilote d'hélicoptère

Heures de vol

Équipage d'avions de patrouille maritime

Heures de vol

Référentiel

2010

91 (103)

199 (224)

218

318

RAP 2010

2011

92 (107)

196 (232)

199

353

RAP 2011

1er semestre 201215 ( * )

49 (53)

85 (92)

106

179

prévision 2012

Prévisions actualisées 2012

90 (99)

170 (180)

210

320

PAP 2012

Prévisions 2013

88 (97)

180 (220)

220

350

PAP 2013

Objectifs LPM 2009-2014

100 (110)

180 (220)

220

350

LPM 2009-2014

Source : ministère de la défense, réponse aux questionnaires budgétaires

1. L'effritement continu des jours de mer des équipages ne permet pas d'aller au-delà de la seule préservation des savoir-faire essentiels

L'objectif de la loi de programmation est de 100 jours de mer ( 110 jours pour les grands bâtiments) afin de garantir un niveau optimal d'entraînement et d'activité, satisfaisant aux exigences du Livre blanc. Les opérations en Libye ont entraîné un très fort besoin de régénération organique des bâtiments. En conséquence, les crédits 2013 ne permettront pas d'aller au-delà de la seule régénération des savoir-faire prioritaires.

Le tableau ci-dessus fait apparaître une diminution continue des jours de mer depuis 2010, puisqu'ils passent de 91 en 2010 à 92 en 2011, 90 en 2012 et seulement à 88 jours en prévision pour 2013, et, simultanément, entre 2010 et 2013 de 103 à 97 jours pour les bâtiments de haute mer.

Malgré une hausse significative des crédits budgétaires en 2012 et 2013, le potentiel d'activité n'a pas pu être amélioré compte tenu de l'accroissement encore plus dynamique des coûts de maintien en condition opérationnelle (MCO).

2. Les conséquences de l'arrêt technique du porte-avions

Le porte-avions devrait être rendu indisponible environ 180 jours en 2013 pour réaliser un arrêt technique intermédiaire (Indisponibilité pour Entretien Intermédiaire ou IEI). Cette période de travaux, qui intervient à mi-chemin entre les deux arrêts techniques majeurs de 2008 et celui prévu en 2017, est caractérisée par un passage au bassin permettant des travaux de carénage et d'entretien des circuits eau de mer. Elle sera mise à profit pour la réalisation des travaux correctifs et préventifs sur l'ensemble du navire, des essais et entretiens réglementaires des chaufferies nucléaires, la mise en place sur les lignes propulsives d'accouplements de nouvelle génération et des travaux d'anticipation du prochain arrêt technique majeur devant se dérouler en 2016.

Ce calendrier d'entretien conduira naturellement à une importante baisse de réalisation du contrat intervention du groupe aéronaval en 2013. Il nécessite en particulier de conduire l'ensemble des formations et des entraînements des jeunes pilotes de chasse de la marine avant la fin de l'année 2012.

MARINE NATIONALE TAUX DE DISPONIBILITÉ DU PORTE-AVIONS (EN JOURS)

2011
Réalisation

2012
Prévision PAP 2012

2012
Prévision actualisée

2013
Prévision

Objectif
LPM 2015

51

46

63

38

60

Source : PAP 2013

3. Un entraînement de l'aéronavale « au plancher », pénalisé par la sous-disponibilité des parcs, avec un point noir pour la patrouille maritime

L'objectif est de 180 heures de vol pour les pilotes de chasse pour les vols de jours (220 heures de vol pour les pilotes de chasse qualifiés « vol de nuit »), 220 heures de vol pour les pilotes d'hélicoptères et 350 heures de vol pour les pilotes de patrouille maritime.

Ces objectifs peuvent être considérés comme un plancher indispensable à la sécurité des vols et donc, des pilotes.

En 2010 et 2011, compte tenu des opérations, le niveau d'activité de la chasse embarquée a été légèrement supérieur à la norme. Cependant la réalisation quantitative d'activité masque des déséquilibres entre équipages qualifiés, engagés en opérations, et équipages en entraînement, ne disposant pas d'une activité suffisante.

Tandis qu'un plan d'action avait permis d'améliorer en 2011 le niveau de disponibilité de l'aviation de patrouille maritime , la situation de la composante hélicoptère a continué à se dégrader, affectant la qualification opérationnelle des flottilles.

En 2012 , du fait d'une faible disponibilité technique des matériels et en fonction des contraintes financières pesant sur les crédits de l'entretien programmé du matériel aéronautique (pièces de rechange), une réduction d'activité de l'ordre de 9 % est prévue pour l'ensemble des flottes de l'aéronautique navale pour le second semestre 2012 , pour les raisons suivantes :

- sous-dotation des parcs par rapport aux besoins requis par les contrats opérationnels et la préparation opérationnelle (hélicoptères de type Lynx, avions de chasse de type Super Étendard) ;

- disponibilité fragile de certains types d'aéronefs : recrudescence d'aléas techniques, réalisation de chantiers de modification/modernisation (hélicoptères Panther, Atlantique 2,...)

- une diminution globale de l'allocation en heures de vol de 9 % pour l'année 2012 pour contraintes financières .

Concrètement, les réalisations d'entraînement 2012 16 ( * ) seront donc vraisemblablement en dessous du plancher :

Chasse (« non hibou ») : 170 heures contre un plancher à 180 ;

Chasse (« hibou » c'est-à-dire nocturne) : 180 heures contre un plancher à 220 :

PATSIMAR : 320 heures de vol contre un plancher à 350 ;

Hélicoptère : 210 heures de vol contre un plancher à 220.

Dans sa réponse au questionnaire budgétaire de votre commission, le ministère de la défense indique même que « l'activité de la composante patrouille maritime est affectée par la réduction de l'allocation en heures de vol. De ce fait, la mise en sommeil de certains savoir-faire pourrait être envisagée. ».

Un écart entre la norme LPM et l'activité moyenne générée par l'allocation des crédits budgétaires n'est tolérable que si elle est strictement limitée dans le temps. A défaut, votre commission craint que cet écart n'entame le plancher évalué comme indispensable à la sécurité dans la mise en oeuvre des moyens, ne retarde le processus de régénération organique en particulier dans le domaine de la lutte anti sous-marine (étiolement des savoir-faire des opérateurs et des équipages).

C. L'ARMÉE DE L'AIR : DES FRAGILITÉS BIEN IDENTIFIÉES MAIS PERSISTANTES

Lors de son audition devant votre commission, le chef d'état major de l'armée de l'air a fait part de son inquiétude concernant le maintien de l'activité aérienne pour nos équipages.

Il a déclaré : « Elle est essentielle pour garder des compétences, préserver un niveau suffisant de sécurité aérienne et garantir le moral de nos aviateurs. Nous sommes confrontés à la difficulté de contenir les coûts de maintien en condition opérationnelle (MCO). En 2012, l'écart entre les ressources disponibles et les besoins d'entretien programmé des matériels aéronautiques de l'armée de l'air a atteint 300 millions d'euros.

« Cela se traduit par une pression de plus en plus forte sur la formation et l'entraînement des forces et en conséquence une érosion du capital des savoir-faire opérationnels. Malgré les efforts que je salue du ministère sur le domaine, en 2013, le déficit d'activité sera d'environ 20 % par rapport au besoin nominal d'entraînement des équipages. C'est acceptable dans un budget d'attente, mais nous approchons d'un seuil qui pourrait devenir critique. Notre cohérence repose sur notre capacité à trouver le bon équilibre entre notre format et les ressources dédiées à l'entretien programmé de nos matériels » .

Le rapport précité de la Cour des comptes a également mis l'accent sur le fait que l'armée de l'air connaissait un déficit d'heures de vols, posant problème pour le maintien de certaines compétences. Force est de constater que les prévisions de crédits pour 2013 ne permettront que partiellement de redresser la situation décrite par la Cour.

NOMBRE D'HEURES DE VOL POUR L'ARMÉE DE L'AIR

Année

Nombre d'HdV par pilote Chasse

Nombre d'HdV par pilote Transport

Nombre d'HdV par pilote Hélicoptères

Référentiel

2010

170

287

170

RAP 2010

2011

190

310

190

RAP 2011

1 er semestre 2012*

81

121

97

DPG 2T 2012

Prévisions 2012 actualisées

165

265

200

PAP 2012

Prévisions 2013

160

260

195

PAP 2013

Objectifs LPM 2009-2014

180

400

200

LPM 2009-2014

Source : ministère de la défense, réponse aux questionnaires budgétaires

a) Une difficile régénération de la chasse en 2012, des fragilités persistantes pour les hélicoptères et le transport

En 2011, si les pilotes de chasse expérimentés engagés dans l'opération en Libye ont connu une forte activité, la formation des pilotes plus jeunes a été ralentie et a nécessité un rattrapage en 2012.

Les pilotes de transport ont été, quant à eux, fortement mobilisés sur les missions logistiques liées aux opérations, ce qui a conduit à délaisser l'entraînement lié aux savoir-faire tactiques.

L'activité des pilotes d'hélicoptères est demeurée insuffisante. Cette situation pourrait menacer à court terme le maintien du savoir-faire dans le domaine de la recherche et du sauvetage des pilotes éjectés en zone hostile.

En 2012 (constat sur le premier semestre et prévisions) et 2013 (perspectives), l'insuffisance d'activité des équipages de chasse due au manque de disponibilité des matériels a pour conséquence un allongement de la phase de régénération des équipages (difficulté de formation pour les jeunes équipages en unité de combat et d'entretien de compétence pour les équipages expérimentés). Le ministère de la défense indique à vos rapporteurs dans sa réponse aux questionnaires budgétaires que « de ce fait, la mise en sommeil de certains savoir-faire pourrait être envisagée ».

Le faible niveau d'activité des équipages de transport tactique en 2012 s'explique par un format et une disponibilité de la flotte restés insuffisants, malgré la livraison des nouveaux CASA (des défauts techniques ont été constatés à leur réception). En 2013, l'arrivée des premiers A400M amorcera le début du redressement de la situation de la flotte transport.

Pour la composante hélicoptère , les équipages devraient parvenir à préserver leur niveau d'activité individuelle en 2012 et 2013. Cette population actuellement en sous-effectif est fortement mobilisée sur les théâtres d'opérations extérieures, ce qui lui permet d'atteindre de ce fait les objectifs du nombre d'heures de vol. La situation de la flotte Caracal, qui assure la mission de sauvetage au combat, demeure critique : la très forte sollicitation opérationnelle de cette micro-flotte contraint la préparation des équipages non engagés en opération. La situation devrait s'améliorer à compter du dernier trimestre 2012 avec la livraison de deux EC725.

b) Un niveau d'activité encore comparable à nos grands alliés mais des fragilités qui s'installent

En 2010 et 2011, l'activité des pilotes de l'armée de l'air est encore comparable à celle des États-Unis et du Royaume-Uni, tandis que l'Allemagne semble davantage décrocher et que les pilotes russes se situent en deçà.

COMPARAISON INTERNATIONALE DES NIVEAUX D'ENTRAÎNEMENT EN 2010 ET 2011

TYPE D'ACTIVITE

France

(2010/2011)

Allemagne

(2010)

Royaume-Uni

(2011)

Russie

(2010/2011)

États-Unis

(2010/2011)

Heures de vol par pilote de chasse

170/190

125

180

75

180

Heures de vol par pilote de transport

287/310

134

450

75

200

Heures de vol par pilote d'hélicoptère

170/190

78

240 à 380 selon type d'appareil

65

200

L'armée de l'air a démontré à l'occasion des dernières opérations la maîtrise de savoir-faire rares, et une technicité partagée par peu d'alliés. Cependant certaines capacités apparaissent fragilisées.

En matière d'aviation de combat, l'engagement en Libye a notamment montré la capacité à « rentrer en premier » sur un théâtre d'opérations. Elle a également montré, grâce au Rafale, tout l'intérêt de disposer, sans période de montée en puissance, d'équipages d'emblée très polyvalents. La pérennisation de cette polyvalence du personnel navigant repose sur un niveau d'entraînement cohérent et conforme aux standards OTAN.

En revanche, les mesures de reports d'équipements nouveaux (rénovation M2000D et MRTT) ont déjà sensiblement fragilisé les capacités de l'armée de l'air. Les capacités manquantes du soutien opérationnel sont liées essentiellement au sous-dimensionnement et au vieillissement 17 ( * ) de la flotte ravitailleur C135, qui par ailleurs joue le rôle de transport stratégique de fret 18 ( * ) . Quant aux MRTT, les reports successifs de livraison entraînent un risque de rupture capacitaire lié au vieillissement de la flotte actuelle de ravitailleurs. Toutefois le ministre a assuré lors de son audition devant la commission que les commandes seraient passées en 2013 en vue d'une première livraison fin 2017.

D. UN EFFORT BUDGÉTAIRE NOTABLE MAIS INSUFFISANT POUR REDRESSER LA DISPONIBILITÉ TECHNIQUE DES ÉQUIPEMENTS

Dans le projet de loi de finances pour 2013, les crédits d'entretien programmé du matériel, qui regroupent la majeure partie du MCO hors masse salariale, s'élèvent à 2,91 milliards d'euros, en augmentation de 225 millions d'euros, soit + 8 %.

Par ailleurs, le niveau des autorisations d'engagement (3,66 milliards d'euros, en hausse de 22 %) permet la notification de marchés pluriannuels ainsi que les investissements nécessaires à la poursuite de la montée en puissance des matériels nouveaux.

Pour autant, cet effort ne parviendra sans doute pas à redresser une disponibilité des matériels dégradée par l'intensité des engagements de 2011. La disponibilité des équipements devrait donc rester durablement en deçà des objectifs fixés par le précédent Livre blanc.

Ceci d'autant plus que le besoin de régénération n'est pas seul en cause : les coûts du MCO s'envolent continûment, en partie sous l'effet de la livraison de nouveaux matériels (Tigre, NH90, FREMM, VBCI...), mais aussi de la vétusté, de l'hétérogénéité et de l'éparpillement de certains parcs, facteurs de coûts.

Le rapport conjoint de l'Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées sur ce sujet qui a analysé en profondeur les moteurs de cette croissance des coûts et a localisé les postes les plus dynamiques (matériel aéronautique notamment) devrait voir certaines de ses préconisations mises en oeuvre en 2013 par le ministère de la Défense.

1. Des points faibles dans les trois armées

Dans le milieu terrestre, la dégradation de la disponibilité s'explique de façon générale par un effort prioritaire accordé aux théâtres d'opération au détriment de la métropole, par des délais de réparation allongés du fait de difficultés logistiques et par une charge de maintenance accrue (matériels anciens, usés en opérations ou devant faire l'objet de modifications importantes). En particulier le parc des véhicules de l'avant blindés (VAB) a enregistré la baisse la plus importante de sa disponibilité, du fait de longues immobilisations rendues nécessaires pour des opérations industrielles de valorisation, de fiabilisation et de mise au standard Félin, alors que ce matériel est resté fortement sollicité en OPEX.

Pour ce qui est de l'armée de terre, la disponibilité moyenne mesurée par le taux de synthèse ressort à 75 % pour les matériels terrestres et à 67 % pour les matériels aériens en 2009 et en 2010.

Le volume très important d'engagements de l'armée de terre en 2011, avec, en sus des opérations déjà engagées, les interventions en Libye et en Côte d'Ivoire, a conduit à mettre l'accent sur la disponibilité des matériels nécessaires à ces opérations. Cet effort a eu pour conséquence une moindre disponibilité des matériels utilisés en métropole pour l'entraînement, qui est tombée à 60 % pour les matériels terrestres et à 61 % pour les matériels aériens

Cette dégradation a affecté particulièrement le parc vieillissant des véhicules de l'avant blindés (VAB) pour lesquels un plan d'urgence a dû être lancé. Elle a aussi touché le parc de chars Leclerc, peu utilisés en opérations extérieures, pour lesquels une réduction générale de l'objectif de disponibilité de 15 % a été décidée, afin de réduire les stocks de pièces de rechange et de dégager des ressources financières pour d'autres matériels.

La disponibilité des hélicoptères de l'aviation légère de l'armée de terre a connu un net recul lié à la projection simultanée sur des théâtres relativement nombreux de mécaniciens, de lots d'outillage et de rechanges. Cet effort, ajouté à un cumul de visites d'entretien périodique et curatif, sur le parc PUMA notamment, a entraîné des retards allant jusqu'à 6 mois dans les opérations de maintenance en métropole .

Dans le milieu naval, la disponibilité technique des frégates est pénalisée par des difficultés liées aux lignes propulsives et aux armes-équipements. La disponibilité des sous-marins nucléaires d'attaque est principalement affaiblie par la mise en place de mesures de gel des activités 9 mois avant les périodes de maintenance majeure (mesure prise en loi de programmation militaire) qui les classe de fait indisponible dès cette échéance.

Dans l'armée de l'air, l'ancienneté des PUMA alourdit sensiblement leur maintenance, les flottes SUPER PUMA et CARACAL sortiront en 2013 de cycles de visites périodiques. La flotte FENNEC subit des immobilisations importantes pour mise à niveau OACI 19 ( * ) et grandes visites chez l'industriel (Eurocopter). En outre, la situation logistique de cette flotte est pénalisée depuis 2010 par des arbitrages financiers défavorables.

2. L'insuffisance des crédits ne parviendra pas à redresser significativement la disponibilité

Les données récentes communiquées à votre commission ou figurant dans les projets annuels de performance annexés au projet de loi de finances, confirment tous deux que le taux de disponibilité des matériels demeurera en 2013 inférieur aux exigences des contrats opérationnels fixés par le précédent Livre blanc.

Dans le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances, le taux de disponibilité de synthèse pour l'armée de terre prévu pour 2013 est de 69 % pour les matériels terrestres (contre une cible 2015 à 75 %) et de 65 % pour les matériels aéronautiques de l'armée de terre (contre une cible de 70 %).

Pour la marine, le niveau de disponibilité des bâtiments n'est pas, non plus, suffisant pour honorer pleinement les contrats opérationnels, particulièrement pour le groupe d'action navale .

Comme le détaille le projet annuel de performance, en 2013, la simultanéité de la tenue des contrats opérationnels pour le groupe aéronaval, le groupe amphibie et le groupe d'action maritime n'est pas envisageable en permanence. Ainsi par exemple l'arrêt technique du porte-avions, de novembre 2012 à juillet 2013 , entraînera naturellement une baisse de la réalisation du contrat du groupe aéronaval sur l'année 2013 (le taux de disponibilité chute à 38 % pour 2013).

Les difficultés concernent également les sous-marins d'attaque de la classe Rubis dont le taux de disponibilité, qui est de 63 % en 2009, 54 % en 2010, 56 % en 2011, et 60 % en 2012, résulte des décisions prises lors de la construction de la loi de programmation militaire, conduisant à laisser en permanence un bâtiment à quai, en plus des arrêts techniques programmés, en raison d'une limitation des moyens budgétaires

Le parc de frégates affiche, quant à lui, un taux de disponibilité fluctuant selon les années en fonction des arrêts techniques (67 % en 2009 et en 2010, 55,5 % en 2011), qui devrait chuter à 46 % seulement pour 2012 pour n'atteindre que 53 % en 2013 .

La disponibilité des appareils de l'aéronautique navale reste elle aussi loin des objectifs : le taux de disponibilité des aéronefs embarqués passe de 72 % en 2009, à 65 % en 2010 et 60 % en 2011; mais chute à seulement 49 % en 2012 , pour ne se redresser qu'à 50 % en 2013. Celui de la patrouille maritime ne s'améliore pas, contrairement aux prévisions : de 74 % en 2010 il chute à 50 % en 2011 et à 39 % seulement en 2012.

Pour ce qui est de l'armée de l'air, si le taux de disponibilité des avions de combat est excellent avec 97 % en 2010, et 100 % en 2011, il devrait fléchir à 69 % en 2012. Le taux de disponibilité des hélicoptères demeure en deçà des objectifs en raison notamment de problèmes spécifiques liés à la flotte de Puma et de Super Puma qui tombent régulièrement en panne et dont la moyenne d'âge est de 34 ans. Ceci pose des difficultés logistiques notamment pour se procurer certaines pièces détachées. Le taux de disponibilité des avions de transport stratégique est également très bas (45 %).

Pas plus qu'en 2012, les crédits ne seront suffisants en 2013 pour assurer la régénération des matériels et redresser les taux de disponibilité à la suite des engagements à forte intensité de 2011.

C'est ce que reconnaît le projet annuel de performances : « malgré l'accroissement des crédits de maintien en condition opérationnelle, la ressource financière contrainte pour 2013 permettra difficilement de faire face à d'éventuels aléas techniques ou logistiques (...). Il n'est pas attendu d'amélioration de la disponibilité technique en 2013. »

3. L'envolée continue des coûts du maintien en condition opérationnelle vient encore complexifier l'équation budgétaire

Un rapport conjoint de l'Inspection générale des finances et du Contrôle général des armées prévoit une augmentation des coûts du maintien en condition opérationnelle (MCO) de 8,7 % entre 2010 et 2014, plus de la moitié de ces dépenses étant liées à la maintenance des matériels aéronautiques, qui pèse pour la moitié de l'enveloppe globale (5,5 milliards d'euros en crédits de paiement 2010).

Le rapport prévoit ainsi l'envolée des coûts de MCO naval (+ 16%) et aéronautique (+ 10%).

L'enjeu de la maîtrise de ces coûts est essentiel pour garantir leur soutenabilité dans la durée.

Pour faire face à l'envolée continue de ces coûts, le ministère de la défense a mis en place un plan d'action, autour de trois axes :

- externaliser le maintien en condition opérationnelle lorsque des prestataires extérieurs sont susceptibles d'apporter un service au meilleur coût,

- mutualiser, par milieu, la maintenance des matériels,

- optimiser les parcs afin de diminuer les coûts de maintien en condition.

Les 175 propositions du rapport ont été regroupées en 35 actions majeures. Elles sont suivies par un comité de pilotage, se réunissant tous les 3 à 4 mois et qui regroupe sous la présidence du sous-chef d'état-major « soutien » de l'état-major des armées, des représentants de la DGA, du SGA et des 3 états-majors d'armée. Ces modalités d'exploitation du rapport ont été validées en comité ministériel d'investissement (CMI), en présence du ministre, fin janvier 2012.

En ce qui concerne les moyens humains, la rationalisation engagée sur la période 2008-2015 des structures en charge du MCO (cf. avis budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2012) devrait permettre une réduction de 8 750 emplois, soit environ 20 % du volume des postes avant réforme.

III. LES BASES DE DÉFENSE : UNE PLUS GRANDE SINCÉRITÉ BUDGÉTAIRE, DES ORIENTATIONS CONFORMES AUX TRAVAUX DE LA COMMISSION

A. LE CONSTAT D'UN ÉTRANGLEMENT FINANCIER DES BASES DE DÉFENSE EN 2012

1. Une impasse budgétaire chiffrée à 130 millions d'euros par vos rapporteurs pour l'année 2012

Le rapport d'information « Bases de défense : une réforme à conforter » n° 660 adopté par votre commission en juillet dernier avait fait apparaître une insuffisance de crédits estimée alors à 130 millions d'euros , soit le quart de l'enveloppe attribuée par la loi de finances initiale pour 2012.

Ce calcul résultait d'une simple extrapolation de la situation budgétaire constatée dans plusieurs bases visitées par les rapporteurs.

Cette pénurie de crédit conduisait à des économies forcées qui, si elles « arrangeaient » bien le ministère en ces temps de contrainte budgétaire, avaient pour effet de démotiver les personnels en charge du soutien, et de discréditer la nouvelle organisation du soutien aux yeux des formations soutenues.

Sans parler des cas ubuesques du point de vue de la bonne gestion des deniers publics rencontrés sur place par vos rapporteurs :

- travaux de petit entretien immobilier différés conduisant à l'aggravation d'un problème et générant pour les années futures des dépenses bien supérieures (cas typique : une fuite d'eau non traitée dans un bloc sanitaire) ;

- « siphonage » forcé d'autres lignes budgétaires au mépris de toute rationalité : exemple pour un déplacement, faute de crédits de carburants, un régiment aura recours à des véhicules « verts » de l'armée de terre (qui consomment pourtant davantage d'essence mais sur lesquels des crédits de carburant sont encore disponibles au titre de l'entraînement) au lieu des véhicules de la gamme commerciale.

2. Une analyse confirmée par l'audit du ministère de la défense

Le ministère de la défense a lancé un audit, exhaustif quant à lui, sur les crédits des 60 bases de défense. L'audit a corroboré l'analyse de vos rapporteurs et jugé insuffisante la ressource budgétaire programmée en 2012.

Sans surprise, l'audit conclut que l'insuffisance de la ressource résulte principalement d'un accroissement des dépenses de fonctionnement et de soutien courant. Celui-ci s'expliquerait notamment par une hausse des prix de l'énergie, qui représente près de 40 % des dépenses des bases de défense, soit + 10 % en 2 ans pour l'électricité, + 33 % pour le gazole, et + 40 % pour le fioul sur la même période.

B. UNE ENVELOPPE BUDGÉTAIRE PRESQUE TOTALEMENT « SINCÉRISÉE »

1. Des crédits portés à 720 millions d'euros, sur 770 millions de besoins réels

Le projet de loi de finances pour 2013 prévoit une augmentation significative des ressources, qui passent de 630 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2012 à 700 millions d'euros (+ 11%). A ces crédits budgétaires, s'ajoutent des fonds de concours et attributions de produit au profit des bases de défense à hauteur de 20 millions d'euros environ.

Dans leur questionnaire écrit au ministère de la défense, vos rapporteurs ont souhaité obtenir communication du montant des crédits demandés par les commandants de base de défense, pour avoir une estimation des besoins réels estimés par ces derniers.

Le ministère n'a pas communiqué ces chiffres à vos rapporteurs et a apporté une réponse particulièrement évasive à la question en indiquant que : « Les besoins exprimés par les commandants des bases de défense ont été analysés et ont conduit à établir un budget sur la base de  720 millions d'euros. » !!!

Faute d'éléments tangibles, vos rapporteurs estiment quant à eux, sur la base de l'audit réalisé cet été, que les besoins réels des bases s'élèvent à 770 millions d'euros.

Il faut donc redouter une éventuelle impasse résiduelle sur les crédits des bases. L'enveloppe de crédits, même majorée, ne fera sans doute pas disparaître totalement les phénomènes d'économies forcées.

En effet, non seulement cette enveloppe semble calculée au plus juste, mais encore, il faut souligner que de nouvell es dépenses ont été transférées.

2. Les effets sur « l'échantillon » des bases de défense constitué par votre commission

Vos rapporteurs ont demandé quels étaient les crédits accordés à l'échantillon de bases qu'ils ont visitées l'année dernière dans le cadre de la rédaction de leur rapport d'information.

Cet échantillon a été constitué de telle sorte qu'on y retrouve tous les cas de figure : base à dominante « air », « terre » ou « mer », base de type 1, 2 ou 3, base en extension ou base en restructuration.

D'après les éléments communiqués dans les réponses écrites du ministère de la défense, les dotations semblent en effet en augmentation sensible par rapport à la loi de finances initiale pour 2012.

C. UNE RÉFLEXION À POURSUIVRE : LE POUVOIR BUDGÉTAIRE DU COMMANDANT DE BASE DE DÉFENSE

1. Un « carcan » budgétaire qui condamne le commandant à gérer des inéluctables

Le rapport d'information précité de votre commission faisait le constat de la très faible marge de manoeuvre budgétaire des commandants de base de défense.

Non seulement en raison de la pénurie de crédits, réelle, mais également du fait d'une série de contraintes venant encore restreindre son champ d'action :

- Forte inertie et poids prédominant des dépenses « énergie-fluides »,

- Marchés d'externalisation qui, lorsqu'ils existent, sont « rigidifiants » dans la construction d'un budget, car « préemptés »,

- Exclusion des crédits d'alimentation, de maintenance spécialisée infrastructure, de bureautique ou d'ameublement du périmètre budgétaire géré par le commandant de base,

- Faible réactivité des marchés centralisés,

- Crédits non reportables d'une année sur l'autre,

- Cloisonnement total avec la masse salariale.

Il existe en effet une tension entre deux logiques contradictoires :

- Une démarche locale et transverse de responsabilisation des commandants de base de défense, dans un contexte de déconcentration de l'administration au plus près du terrain et d'irrigation par les bases de défense du tissu économique des territoires ;

- Une démarche nationale et verticale de cohérence fonctionnelle à l'échelle ministérielle, centrée sur les différents « métiers ».

C'est la deuxième option qui prévaut aujourd'hui, à la fois dans une logique d'économie d'échelle et du fait de la réorganisation en cours, métier par métier, des grandes chaînes fonctionnelles du ministère.

La conséquence est l'absence de pouvoir d'arbitrage budgétaire pour les commandants de base de défense.

2. Un « partage » inefficient des crédits d'infrastructure

Le rapport d'information précité a souligné le caractère byzantin des répartitions de rôles et de crédits entre le commandant de base de défense et le service des infrastructures qui relève du secrétariat général pour l'administration (SGA).

Schématiquement : le service d'infrastructure de la défense, (concrètement, sur place : l'USID), a les crédits d'infrastructure, mais le commandant de base fait le schéma directeur de la base et assure ensuite l'entretien du locataire (peinture, carreaux, petites réparations...).

Ces rôles sont parfois complexes à démêler ce qui n'est pas optimal surtout en période de pénurie budgétaire.

Une certaine « fongibilité » des crédits d'infrastructure a été expérimentée, au bénéfice des commandants de base, entre le programme 178 et le programme 212 (programme « Soutien de la politique de la défense » où sont les crédits du SGA).

Cette expérimentation concernant les crédits de maintenance de l'infrastructure s'est traduite par la création de droits de tirage accordés aux commandants de base de défense sur les crédits d'infrastructure leur permettant, dans le respect du principe de spécialité des crédits et des responsabilités « métier » dans le domaine infrastructure, d'exercer pleinement leur rôle en matière de définition, de priorisation et de programmation des dépenses d'infrastructure.

Votre commission considère que cette expérimentation tendait en fait à éviter les situations où l'absence de crédits sur le programme 178 conduirait à reporter indéfiniment l'entretien immobilier, ce qui peut conduire par la suite à des travaux bien plus importants.

Le rapport d'information précité de votre commission a donc engagé le ministère de la défense à aller plus loin en faisant durablement entrer ces crédits dans le périmètre décisionnel du commandant de base de défense.

L'audit budgétaire des bases de défense par le ministère de la défense a depuis relevé, sans surprise, qu'il convient de clarifier les responsabilités financières respectives du programme 178 « Préparation et emploi des forces » et du programme 212 en matière d'entretien de l'infrastructure....

Le projet de loi de finances transfère encore des crédits aux bases en contrepartie d'un élargissement de leur périmètre budgétaire. Ce mouvement va dans le bon sens.

On peut se demander toutefois s'il ne reste pas encore du chemin à faire. Ainsi par exemple, la prise en compte des contraintes opérationnelles dans les programmations de travaux d'infrastructure n'est pas toujours optimale. L'architecture complexe de la chaîne de décision ne permet pas toujours une hiérarchisation optimale des priorités. Certains retards de réalisation liés à la difficulté pour le service des infrastructures d'honorer son plan de charge peuvent avoir des conséquences importantes, comme par exemple pour les travaux relatifs à l'accueil du Rafale sur la base de Saint-Dizier.

Il faut noter que les infrastructures restent, dans les questionnaires de satisfaction sur la qualité du soutien, l'un des trois « points noirs » de la qualité de service (avec le domaine achat-finances et les ressources humaines).

3. Un accroissement de sa liberté d'action qui permettrait peut être au commandant de base d'être un véritable acteur pour la réalisation d'économies

On entend souvent dire que les bases de défense n'ont pas généré les économies attendues. Il est clair en effet que les dépenses de soutien sont devenues plus visibles qu'avant puisqu'elles sont par construction individualisées et affichées en tant que telles. Elles peuvent plus difficilement, aussi, être (volontairement ?) « sous-estimées » d'emblée.

Pour autant, votre commission s'inscrit en faux contre cette analyse qui oublie trop souvent que :

- le nombre de personnels en charge du soutien a diminué de 15 % avec leur mise en place ;

- les bases de défense ont « absorbé » la hausse des tarifs d'eau, d'électricité et de carburant, soit 30 à 40 millions d'euros par an ;

- le périmètre du soutien a été élargi (+ 40 millions d'euros de dépenses en 2012, + 30 millions d'euros en 2013) ;

Le ministère de la défense estime à 150 millions d'euros en 2013 l'effet de ces « hausses subies » par les bases en 2013.

Pour autant, le système a-t-il produit toutes les économies attendues et surtout peut-on en attendre d'autres ?

A chaque fois qu'ils abordent le sujet avec des acteurs du soutien au sein du ministère de la défense, vos rapporteurs sont frappés par la pertinence des rationalisations découlant de la nouvelle organisation, qu'il s'agisse de la densification des implantations rendue possible par les nouveaux schémas directeurs, ou encore d'exemples très concrets comme la diminution du parc automobile.

Les économies dégagées par les bases : quelques exemples concrets.

Globalisation des marchés et optimisation des contrats : contrat de blanchissage à Brest (550 000 € d'économies), contrats téléphoniques dans 4 bases (- 164 000 €), factures d'électricité dans 4 bases (- 245 000 €) ;

Regroupement des infrastructures : Verdun, 700 000 € d'économies

Mise en pool des matériels : voitures, ameublement. 1,2 million d'euros d'économies en ameublement (la direction des ressources humaines de l'armée de terre à Tours a été équipée avec des meubles « recyclés ». Cette opération aurait été impossible avec l'ancienne organisation.

D'après les entretiens de vos rapporteurs avec les responsables du ministère de la défense, des « normes de soutien » vont désormais venir s'appliquer pour chaque type de dépense, afin de limiter les cas particulier. Cela devrait encore accentuer l'effet rationalisateur de l'embasement.

Attention toutefois aux économies forcées qui sapent le moral et reportent les charges sur les exercices futurs...

D. LA POLITIQUE D'ACHATS DU MINISTÈRE ET L'ACCÈS DES PME AUX MARCHÉS DE DÉFENSE : VERS UN « SMART BUSINESS ACT » ?

1. Une part de 10 % pour les PME mais des retards de paiement qui ne se résorbent que progressivement
a) Un euro d'achat sur dix pour les PME

D'après les chiffres communiqués par le ministère de la défense, la part des PME dans les achats du ministère en 2011 (17 800 millions d'euros) s'élève à 10,4 % (1 850 millions d'euros) tous services confondus et hors part des PME dans la sous-traitance. Elle se montait à 8,8 % en 2010 (1 540 millions d'euros pour un volume d'achats de 17 500 millions d'euros).

Ce chiffre global recouvre toutefois de fortes disparités selon les services.

La part directe des PME dans la fonction achat-programmes de la DGA (environ 10 000 millions d'euros) est de l'ordre de 1,2 % en 2011 (soit autour de 120 millions d'euros), comme en 2010. Mais les PME sont plus fortement impliquées dans les chaînes de sous-traitance des opérations d'armement sur lesquelles le ministère ne dispose que d'évaluations : 4 000 PME y interviendraient pour un montant pouvant se situer entre 2 000 et 3 000 millions d'euros.

Hors DGA, la part des PME comme fournisseurs directs est plus élevée.

Pour les plus importants services acheteurs du ministère hors DGA, elle était :

- de l'ordre de 8 % en 2011 dans les services de maintien en condition opérationnelle (254 millions d'euros sur 3 170 millions d'euros d'achats en 2011), en légère augmentation par rapport à 2010 (7,8 %, soit 208 millions d'euros pour un volume global d'achats de 2 650 millions d'euros)

- pour le service d'infrastructure de la défense, de 44,4 % en 2011 (479 millions d'euros sur 1 079 millions d'euros d'achats) et de 43,4 % en 2010 (385 millions d'euros sur 887 millions d'euros d'achats).

- pour le service du commissariat des armées , de 27 % en 2011 (416 millions d'euros sur 1536 millions d'euros d'achats) et 22,7 % en 2010 (254 millions d'euros sur 1 118 millions d'euros d'achats).

b) Des difficultés de paiement qui pénalisent surtout les petites PME

Le diagnostic de l'engorgement du circuit achat-finances du ministère de la défense a déjà été largement dressé dans le rapport d'information précité sur les bases de défense. Inutile d'y revenir aujourd'hui.

Vos rapporteurs se sont toutefois intéressés à l'impact budgétaire des intérêts moratoires pour les bases de défense. Leur montant est détaillé dans le tableau ci-dessous :

2011

1 er semestre 2012*

1,95

0,49

* : Données en date du 23 juillet 2012.

Les 2 millions d'intérêts moratoires payés en 2011 peuvent paraître modestes rapportés aux crédits totaux (0,3 % du budget des bases de défense), mais ce montant est significatif quand on le compare aux efforts qui sont faits par ailleurs pour économiser parfois quelques dizaines de milliers d'euros.

c) Le lent déploiement des cartes achats-finances

Initialement utilisées par la marine nationale, la direction générale pour l'armement et le service de santé des armées, les cartes achats sont un outil bancaire de soutien pour le fonctionnement des bases de défense permettant d'effectuer des achats aussi bien auprès d'opérateurs économiques (titulaires de marchés publics) qu'auprès de fournisseurs locaux. Outre l'intérêt de cette dématérialisation pour les chaînes achats et finances du ministère, l'utilisation des cartes achats représente également un dispositif économiquement intéressant pour les fournisseurs qui sont ainsi payés en seulement quatre jours environ.

Les deux types de carte achats déployés au sein des bases de défense :

- la carte achats dite de niveau 1 permet d'effectuer des achats auprès de commerçants de proximité, préalablement référencés et utilisant un terminal de paiement électronique (TPE), dans des conditions fixées par la base de défense. En général, elles sont utilisées pour les achats urgents ou imprévus et d'un montant inférieur au seuil de mise en concurrence des marchés publics ;

- la carte achats de niveau 3 permet uniquement la passation d'achats sur marchés publics à bons de commande et sur conventions auprès des centrales d'achat (UGAP, Economat des armées). L'achat est déclenché, comme pour les bons de commande papier, par le biais d'une délégation du représentant du pouvoir adjudicateur au porteur de la carte.

Au premier semestre 2012 et pour l'ensemble du ministère de la défense, le total des dépenses réalisées par l'intermédiaire de la carte achats s'élève à 47 millions d'euros, représentant près de 85 000 actes d'achats.

Pour les seules bases de défense, 35 152 555 € ont été dépensés via les 5 233 cartes achats déployées en leur sein :

- 4 120 cartes achats sont dédiées au soutien commun pour une volumétrie financière de 21 768 694 €, dont 4 462 096 € en niveau 1 ;

- 1 113 cartes achats sont dédiées aux achats "métiers" pour une volumétrie financière de 13 383 861 €, dont 1 577 073 € en niveau 1.

Au vu de ces chiffres, on peut dire que ce dispositif nouveau n'a pas encore totalement atteint sa pleine maturité.

Pourtant, les avantages pour chacune des parties ne sont plus à démontrer : satisfaction rapide du besoin et paiement rapide du fournisseur, diminution en conséquence des intérêts moratoires malgré une règlementation qui se durcit.

Votre commission estime que le déploiement de cette carte devrait être une priorité, notamment pour renouer les liens entre le tissu économique local et les bases de défense, au bénéfice des PME.

2. Vers un « Smart business act » ?

Le ministère de la défense travaille actuellement à compléter ce dispositif afin d'élaborer un véritable « Smart business act » au bénéfice des PME. A ce titre, il a notamment été créé une mission ministérielle PME, rattachée directement au ministre, qui anime ce dispositif de soutien, avec le concours de tous les organismes du ministère.

Dans l'attente des orientations plus précises sur le contenu que pourrait prendre ce dispositif, vos rapporteurs se sont renseignés sur l'état actuel des dispositifs du ministère de la défense. Il faut relever que le ministère a mis en place trois types d'actions :

L'action pour les PME au sein du ministère de la Défense

- les interlocuteurs « entreprises » dans chacune des entités d'achat du ministère (134 au total). Ils sont destinés à orienter les PME vers les organismes susceptibles d'acheter leurs prestations et à les aider, le cas échéant, à résoudre les difficultés pouvant survenir à l'occasion de l'attribution ou de l'exécution de contrat. Cadres placés à haut niveau dans les services, devant être visibles sur les portails et les annuaires, ces interlocuteurs ont vocation à traiter, avec obligation de première réponse dans un délai de 15 jours, toutes les demandes. Ils travaillent dans le cadre d'un engagement qualitatif de service dont la mise en oeuvre est contrôlée par la mission ministérielle PME. Les délais de paiement aux PME font également l'objet de la part de ce dispositif d'une attention soutenue. Cette composante permanente de proximité a été renforcée récemment au niveau de l'administration territoriale par la création d'un échelon local intermédiaire de soutien supplémentaire : les 10 délégués régionaux aux restructurations de la défense placés auprès de certains préfets de région assurent désormais aussi le rôle de premier point de contact régional pour les PME ignorant totalement l'organisation du ministère et peuvent les orienter vers le service compétent du ministère. Ces délégués sont aussi chargés d'entretenir des liens avec les acteurs économiques locaux pour mieux faire connaître le dispositif de soutien économique du ministère. Ils prennent notamment une part active à l'organisation des campagnes d'information sur les achats du ministère de la défense;

- l'accès des PME aux marchés du ministère de la défense est facilité dans l'organisation des consultations . Le ministère de la défense demande aux services acheteurs d'appliquer, à l'occasion de leurs procédures d'acquisition, le plus systématiquement possible les dispositions du code des marchés publics augmentant les possibilités d'accès pour les PME, en particulier l'allotissement, l'autorisation des regroupements d'entreprises et les variantes. Les dispositions du code des marchés publics visant à limiter au juste nécessaire les charges pesant sur les entreprises en matière de constitution de dossiers d'accès aux consultations font l'objet d'une insistance particulière auprès des services.

Il est notamment demandé aux services acheteurs de respecter un principe de proportionnalité entre l'exigence de garanties professionnelles, techniques et financières et l'objet du marché et ses conditions d'exécution.

- une analyse préalable de l'impact sur les PME des politiques d'achat du ministère est toujours conduite . Dans un contexte général de rationalisation des achats du ministère pour en réduire les coûts, les stratégies d'achat sont précédées d'une analyse de l'impact sur les PME d'une modification des modalités d'acquisition (concentration, transfert sur un seul pouvoir adjudicateur d'achats autrefois fractionnés entre de très nombreuses entités locales). L'objectif est de pouvoir informer le tissu des PME concernées de la modification de leur contexte commercial habituel, de façon à ce qu'elles puissent l'anticiper et y faire face. Les opérations d'acquisition correspondant à ces stratégies s'efforcent alors de faire toute leur place aux dispositions du code des marchés publics permettant aux PME de candidater utilement.

Source : ministère de la défense, réponse au questionnaire budgétaire

E. LA LONGUE MARCHE VERS LA SIMPLIFICATION DES PROCÉDURES

1. Une réforme des zonages d'intervention toujours au point mort

L'harmonisation des différentes zones d'intervention des niveaux régionaux des organismes chargés du soutien était une des préconisations de votre commission dans le cadre de son rapport d'information sur les bases de défense.

Toujours attendue pour « la fin 2012 » d'après les réponses écrites aux questionnaires budgétaires, cette réforme ne semble pas avancer très rapidement...

Le groupe de travail constitué à cet effet aurait déjà dégagé des pistes, d'après le ministère de la défense :

- pour les segments d'achats faisant l'objet de marchés nationaux, prévoir que l'exécution budgétaire soit systématiquement réalisée par la plateforme achat-finances de rattachement (avec toutefois une phase transitoire jusqu'en 2015) ;

- au regard des besoins exprimés localement, étudier le renforcement de certaines cellules de soutien juridique/contentieux, ou la création d'antennes supplémentaires ;

- mettre en place au sein des plateformes achat-finances un bureau d'aide et de conseil aux bases de défense, qui traitera de tous les sujets liés à restauration, à l'hébergement, à l'habillement et à la gestion logistique des biens ;

- aménager la carte des antennes vétérinaires afin que chaque implantation au sein d'une même base de défense soit soutenue par une seule antenne vétérinaire (mise en oeuvre dès la rentrée 2012) ;

- accentuer au profit des chefs d'antenne la subsidiarité du chef des centres interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information de la défense soutenant plusieurs bases de défense tout en garantissant la qualité du soutien ;

- faire coïncider les périmètres des unités de soutien d'infrastructure de la défense (USID) et ceux des bases de défense (mesure entrée en vigueur) ;

- dans les bases de défense de Brest-Lorient et Toulon, préciser le rôle de l'établissement du service d'infrastructure de la défense (ESID) comme coordonnateur des USID et conseiller du commandant de base de défense ;

- placer l'ensemble des échelons sociaux de proximité d'une base de défense sous la responsabilité d'un même échelon social d'encadrement ;

- constituer, à effectifs constants, les groupements de soutien des bases de défense (GSBdD) en point d'accueil de proximité pour tous les agents ayant leur résidence administrative dans la base de défense.

Vos rapporteurs ont l'impression que le ministère de la défense a joué sur l'adaptabilité des personnels des bases de défense, qui ont appris à gérer la complexité d'intervenants qui leur était imposée, plutôt que d'entamer une action résolue de simplification et de mise à plat. C'est dommage.

2. Les ressources humaines en base de défense, un chantier inabouti

La gestion des ressources humaines est le principal point noir mis en avant par les personnels de la défense dans les questionnaires de satisfaction et de qualité du service rendu.

a) Vers une amélioration de la gestion des personnels civils ?

Le rapport de votre commission précité sur la réforme des bases de défense avait fait le constat d'une perte de proximité mais aussi de qualité pour la gestion des ressources humaines des personnels civils, rattachés à des centres ministériels de gestion parfois très éloignés du terrain.

Le ministère de la défense a été alerté par vos rapporteurs sur cette problématique. Il semble que les processus de gestion du personnel civil aient été mieux décrits afin de clarifier les rôles et responsabilités de chaque entité.

En outre, on s'acheminerait vers un rattachement de la gestion des personnels civils à chaque groupement de soutien de la base de défense. Cette mesure ne peut qu'avoir des effets positifs pour les personnels civils, mais il faudra veiller à doter en conséquence en nombre d'agents les « services d'administration du personnels ».

b) La convergence et l'harmonisation des processus : un chantier inabouti

L'un des chantiers en cours pour la modernisation de la gestion des ressources humaines du ministère, de laquelle devraient découler de substantielles économies en budget et en personnel, est celui de l'harmonisation des processus et de la simplification des procédures de ressources humaines entre les trois armées, en particulier dans les organisations de proximité. Afin de concrétiser les gains attendus au sein de ces organisations, notamment les bases de défense, l'effort a été mis sur la standardisation et la simplification de l'ensemble des processus de proximité, de gestion administrative et de gestion individuelle.

Ce travail préalable d'harmonisation des processus, entamé, est encore inabouti.

Pour le conduire, il a été établi, en partenariat avec les armées, directions et services du ministère, une cartographie des 26 macro-processus et 66 processus de gestion des ressources humaines régissant l'organisation de la fonction ressources humaines du ministère et les modalités d'alimentation de la solde et de la paye.

3. Les EMSD, toujours sous le coup d'une « évaluation »

Le débat sur l'existence de l'échelon intermédiaire du soutien que constituent les 7 états-majors de soutien défense (EMSD) est bien connu.

La particularité de ces états-majors, non prévus à l'origine, est qu'ils ne jouent pas de rôle « hiérarchique » traditionnel de niveau intermédiaire ou régional. La responsabilité première dans le domaine du soutien est clairement attribuée aux commandants de base de défense, sur lesquels ils n'ont pas autorité. Les états-majors de soutien défense sont des structures relativement légères , sans rapport notamment avec les anciennes régions terre, puisque chaque ESMD comporte environ une centaine de personnes.

Ils exercent trois fonctions : expertise, synthèse, coordination.

Pour autant, plusieurs voix se sont élevées, dont celle de la Cour des Comptes et de votre commission, pour pointer un risque de sur-administration des bases de défense du fait de leur existence.

Dans son rapport précité, votre commission estimait qu'il fallait étudier deux scénarii alternatifs :

- un renforcement du CPCS en termes de moyens dédiés à la coordination, de missions expertes (environnement, développement durable, droit pénal militaire, protection des installations ) et si nécessaire de synthèse, et une suppression corrélative des EMSD ;

- ou le maintien des EMSD, mais dans un format resserré, autour de ses missions « expertes ».

Cette question est toujours en débat. L'évaluation, déjà en cours depuis mi-2012 à l'État major, sera complétée par un rapport du Contrôle général des armées.

D'après de récentes informations obtenues par vos rapporteurs, il semble que la piste d'une fusion des états-majors au niveau zonal soit à l'étude : les états-majors de zone de défense et de soutien défense (recentrés sur certaines missions bien définies) ne feraient plus qu'un.

Dans ce cas, l'officier général de zone de défense continuerait d'avoir en mains à la fois le soutien et les missions intérieures (les « 2 chaînes » entre lesquelles existent de fortes synergies, le soutien et les missions intérieures). Cet élément de cohérence peut s'avérer décisif pour l'organisation d'événements tels que la sécurisation du G20 par exemple.

Dans le même temps le risque de sur-administration serait limité.

Votre commission ne manquera pas de rester en alerte sur cette question. Elle se félicite d'ores et déjà que ses propositions, en « maintenant la pression » sur cette question, aient pu contribuer à faire évoluer le dossier.

F. LA « FATIGUE » DE LA RÉFORME CONTRIBUE À SAPER LE MORAL

Vos rapporteurs ont pu mesurer lors de leurs récents déplacements dans les bases de défense la montée d'une certaine « fatigue » face à l'empilement des réformes, en particulier de la part des personnels du soutien.

Outre les nombreux changements organisationnels, les bases ont supporté une « surdéflation » d'effectifs liée au fait qu'une certaine régulation par les recrutements s'est ajoutée aux suppressions d'emplois programmées dans les référentiels en organisation.

Ainsi dans les bases de défense, au lieu des 1 205 suppressions d'emplois prévues, ce sont en fait près de 2 000 postes qui ont été supprimés ou n'ont pas été pourvus.

Plus globalement, la période de transformation que vient de vivre le ministère de la défense a eu des répercussions sur le moral des troupes. Les relations entre soutenants et soutenus se sont dégradées, les procédures sont jugées encore trop cloisonnées, pas assez mutualisées, harmonisées et dématérialisées.

La réforme, jugée complexe, laisse parfois les personnels dubitatifs : d'après les derniers baromètres internes du ministère de la défense, 21 % seulement jugent que la réforme se met en place facilement (contre 23 % il y a trois ans). 68 % des personnels sont peu convaincus de l'utilité de la réforme pour faire mieux leur métier. Le taux de personnes satisfaites de la mise en commun des moyens administratifs et de soutien a chuté de 61 % en 2009 à 43 % en 2012.

Enfin, seules 38 % des personnes interrogées sont satisfaites des bases de défense, même si 49 % des personnes interrogées estiment que les bases de défense sont facteur d'économies et d'efficacité.

Dans ces conditions, votre commission ne peut que s'interroger sur le projet consistant à lancer, dans ce climat déjà difficile, des réflexions sur une éventuelle réorganisation du niveau central du ministère.

Des informations officieuses sur une première étude confiée au contrôle général des armées en ce sens par le ministre l'été dernier ont fait surgir bien des craintes.

Au moment où votre commission a été entendue par le Gouvernement sur le besoin de consolidation de la réforme à l'échelon local, au moment où la fatigue des restructurations se fait partout sentir, est-il vraiment opportun d'ouvrir un nouveau front ?

Vers une réforme de l'organisation centrale du ministère de la défense ?

D'après certains commentateurs, une étude aurait été réalisée en août dernier par le ministre de la défense pour « réformer et simplifier l'organisation centrale du ministère, en recentrant chaque entité sur son coeur de métier ». Le Contrôle général des armées aurait remis une « note d'étape » début octobre, dans laquelle il estimerait que l'organisation actuelle n'est pas optimale, soulignant que l'état-major des armées participe à la définition de la politique des ressources humaines du ministère, conformément aux décrets de 2009, mais aussi, dans les faits, aux problématiques d'infrastructures, de finances...qui ne relèvent pas en théorie des ses strictes attributions.

Bien que ces études n'aient pas encore été traduites en propositions, ce sera vraisemblablement le cas en vue de décisions à prendre dans un futur COMEX du ministère de la défense, vraisemblablement en décembre. L'idée serait de renforcer la logique fonctionnelle au sein de directions d'administrations centrales plus puissantes qu'aujourd'hui, au détriment de l'état-major des armées.

Votre commission s'interroge sur ces réflexions en cours.

Tout d'abord, la finalité première des forces armées est de mettre en oeuvre les directives fixées par le chef de l'État. A cet égard, l'organisation mise en place en 2009 a montré toute son efficience : dans les opérations, le président de la République, via son chef d'état-major particulier, est en lien direct et étroit avec le chef d'état-major des armées, car sous la V e République, le chef de l'État est réellement le chef des Armées.

Qu'il s'agisse de l'opération Harmattan, ou du retrait en cours des forces combattantes d'Afghanistan, l'organisation actuelle a montré sa réactivité et sa capacité à mettre en oeuvre rapidement les décisions du Président de la République.

Pourquoi casser ce qui marche ?

Lors de son audition devant votre commission, le chef d'état major des armées a très exactement exprimé une inquiétude que votre commission partage : « Troisième idée force : toute réforme ajoutée à la réforme présente un risque. D'abord, parce qu'elle ne laissera pas le temps de tirer tous les dividendes de la réforme actuelle. Ensuite, parce qu'elle pourrait soulever des défis insoupçonnés alors qu'une réforme est toujours une période de vulnérabilité. Je rappelle que l'échéance de notre transformation était fixée à 2015 ! Pour illustrer cette pensée, 2 réflexions de bon sens. Première réflexion : ne réparons pas quelque chose qui n'est pas cassé ! Deuxième réflexion : ne démontons pas une montre pour savoir pourquoi elle marche ! »

« (...) S'agissant des décrets de 2009, nous avons pour l'instant une organisation qui repose sur trois pôles : le secrétariat général pour l'administration, la délégation générale pour l'armement et l'état-major des armées. On pourrait envisager d'en augmenter le nombre. Pourquoi pas quatre voire cinq ? Mais encore une fois, pourquoi vouloir réparer quelque chose qui marche bien ? Les idées dont nous parlons viennent d'un pays qui fait militairement moins que la France et qui dispose de 35 % de crédits en plus. Donc l'idée d'avoir une direction générale du soutien n'est pas selon moi une bonne idée. Si nous fonctionnons bien, c'est précisément parce que nous ne faisons pas que de l'opérationnel, mais aussi du soutien. Pour bien faire du soutien, il faut avoir selon moi l'expérience de l'opérationnel. »

L'histoire militaire de notre pays a montré que séparer soutien et opérationnel pouvait avoir de lourdes conséquences ; c'est ainsi que la défaite militaire du second empire a pu être analysée par les historiens et hommes politiques de l'époque.

Ensuite, sur le plan « psychologique », il ne faudrait pas qu'une démarche d'introspection organisationnelle, qui aurait pu être légitime en soi, ne soit lancée à un moment tellement inadéquat qu'elle ne serve, en fait, de véritable détonateur à une profonde crise de « moral ».

Au moment où le reflux des opérations se cumule à la fatigue de la réforme, au moment où les moyens de fonctionnement, c'est-à-dire le quotidien des unités, sont sévèrement coupés, au moment où l'évolution des carrières sont freinées, où les difficultés à percevoir les soldes ont exaspéré les militaires et leurs familles, au moment où des difficultés de recrutement se font sentir, au moment où toute l'énergie du ministère devrait se concentrer sur les efforts de simplification indispensables, est-il vraiment opportun de faire cet exercice d'introspection ?

IV. QUESTION D'ACTUALITÉ : VERS UNE EXTERNALISATION DE L'HABILLEMENT OU DE LA RESTAURATION ?

Deux projets d'externalisation sont aujourd'hui en cours d'examen, que le ministre de la défense devra trancher d'ici la fin de l'année, celui de la fonction restauration et celui de l'habillement. Le nombre d'emplois en jeu est important, de même que les sommes concernées.

A. RAPPEL DE LA POSITION DE PRINCIPE DE LA COMMISSION SUR L'EXTERNALISATION

Dans son rapport précité sur les bases de défense, votre commission avait tout d'abord constaté que l'étendue limitée des externalisations (de l'ordre de 3 % du budget de la défense), d'ailleurs engagées pour certaines depuis longtemps, contrastait avec leur fort enjeu « émotionnel ».

Constatant la progressive consolidation de la méthodologie du ministère de la défense depuis 2008 ( qui tarde toutefois à se traduire sur le papier puisque la fameuse instruction attendue n'est toujours pas sortie ), et refusant tout dogmatisme, le rapport prônait une approche résolument pragmatique , jugeant que :

- dans certains cas l'externalisation peut s'avérer positive (exemple : les véhicules de la gamme commerciale) ;

- dans d'autres cas elle ne l'est pas (exemple : la bureautique) ou son intérêt peut n'être qu'indirect (en ce qu'il entraîne une modernisation de la régie).

Le rapport estimait enfin que « les deux décisions attendues d'ici l'automne (habillement, restauration) devront être prises sans dogme ni tabou, en fonction des effets produits au regard des quatre critères actuels ; il n'est pas exclu que la rationalisation de la régie ne produise des effets équivalents à ceux de l'externalisation. »

En tout état de cause, il ne faut pas attendre de « miracle » économique systématique des externalisations qui ont toutefois, et c'est sans doute leur principal mérite, pour effet de servir de puissant stimulateur pour la rationalisation et la baisse des coûts.

B. LA RESTAURATION : VERS UN « MIX » ENTRE EXTERNALISATION ET RÉGIE RATIONNALISÉE ?

La restauration est un très gros enjeu pour le ministère de la défense puisqu'il concerne près de 12 000 emplois . Si on comparait le ministère de la Défense aux sociétés collectives de restauration, il serait en 4 e place, juste après Sodexo, Eurest et Elior.

Chiffres-clés de la restauration au ministère de la défense :

- 1,1 milliard d'euros de coût total en 2012

- 30 millions d'euros d'investissement en 2012

- 38 millions de repas à terre, 5 millions de repas embarqués

- 11 400 équivalents temps plein (65 % de militaires)

- 350 points de restauration sur 60 bases de défense

Les initiatives menées depuis 2008, pour rationaliser cette fonction dans laquelle le potentiel d'économies est fort, se sont succédé avec des approches différentes qui pourraient finalement s'avérer complémentaires :

- d'abord, une approche « 100% » externalisation, qui a conduit à une expérimentation lancée en 2008 dite « RHL1 » ;

- ensuite, à la demande des syndicats de personnel civils, une approche « régie rationalisée optimisée », qui s'est en fait déclinée en deux expérimentations, dites « RRO » et « RRO 2 », qui se conçoivent comme une modernisation de la fonction gardée en régie par le ministère de la défense.

Ces deux approches pourraient finalement s'avérer complémentaires.

1. Les premières expérimentations menées («  RHL 1 ») concluaient à un avantage pour l'externalisation

Les travaux préparatoires dénommés « RHL-1 », relatifs à l'externalisation des fonctions Restauration - Hôtellerie et Loisirs (« RHL ») ont été lancés en juin 2009. La phase opérationnelle de l'expérimentation, portant sur huit sites, a démarré en janvier 2011 avec la notification des marchés. Leurs titulaires se sont vu confier la gestion de onze restaurants , cinq points de ventes (bar - bimbeloterie) et deux hôtelleries dans huit sites pilotes répartis sur le territoire métropolitain, jusqu'alors gérés en régie. En termes de ressources humaines, l'opération concernait 356 ETPT , dont 216 militaires et 140 personnels civils.

Il faut noter que les prestataires proposaient de réaliser la même activité avec seulement 250 emplois (100 de moins). En outre, en raison de la difficulté pour eux à recruter et fidéliser leurs personnels, les offres proposaient de reprendre un grand nombre de personnels du ministère de la défense (230 sur 250).

Après presque dix-huit mois de fonctionnement, un premier bilan a été dressé. Les résultats couvrent le volet « qualité de service », le bilan économique et financier, ainsi que les projections sur la période 2012-2015.

• Pour les personnels , il a été proposé à 171 personnes de bénéficier du dispositif de mise à la disposition de longue durée (MALD) auprès du prestataire. Sur les 52 agents ayant été placés en MALD en janvier 2011, 13 ont été embauchés par les sociétés d'accueil.

La « MALDE »

L'objectif poursuivi par la mise à la disposition de personnel est d'assurer une manoeuvre de ressources humaines permettant d'accompagner le départ du ministère de la défense, de personnels qui oeuvrent au sein des sites externalisés. La volonté est d'orienter leur reconversion dans le cadre de leur emploi grâce à leur embauche par les prestataires qui bénéficient de la mise à la disposition de ces personnels. La MALD permet également aux personnes de pouvoir être maintenues dans leur bassin d'emploi.

La mise à la disposition de personnel est régie par :

- la loi relative à la mobilité et au parcours professionnel du 3 août 2009 ;

- le décret n°2010-1109 du 21 septembre 2010 relatif aux modalités d'application de la mise à la disposition prévue par l'article 43 de la loi du 3 août 2009 ;

- les conventions RH et financières qui en découlent, de mise à la disposition de personnels militaires et civils auprès des prestataires de service.

Sept sites sont concernés depuis janvier 2011, ainsi qu'un huitième site depuis octobre 2011 par la mise à la disposition (MALD) de 78 personnels (17 personnels civils et 61 personnels militaires). Pour chaque site, des conventions détaillent les modalités de la mise à la disposition, les grilles de calcul des remboursements par les entreprises, les avantages issus des conventions collectives dont bénéficie le personnel mis à la disposition, ainsi que les droits et obligations du personnel placé dans ce dispositif.

Procédure de remboursement de la « mise à la disposition » :

Le personnel mis à la disposition continue d'être rémunéré par l'Etat.

La loi prévoit un remboursement du ministère par le prestataire d'un montant égal au total des rémunérations et charges sociales qu'il aurait versé à un personnel de droit privé occupant le même poste, soit un remboursement au « coût du marché » et non au « coût réel du personnel mis à disposition ». Cette disposition permet au ministère de la défense d'être remboursé pour partie des sommes versées au titre des rémunérations et charges sociales (RCS).

Éléments chiffrés :


• 1 740 000 € versés aux personnels MALDE en 2011


• 950 000 € de demandes de titres de perception effectuées en 2011;


• A ce jour, rétablissement de 230 000€ sous la forme d'atténuation de dépenses.

S'agissant des personnels militaires mis à la disposition, 124 000 € de remboursements sont encore attendus en 2012 au titre de la gestion 2011. Les remboursements attendus au titre des personnels civils de la Défense mis à la disposition, environ 190 000 €, devraient être perçus au cours de la gestion 2012. Sur les 78 personnels « maldés », 45 agents restent mis à la disposition (16 PC, 29 PM) au 1 er juin 2012. Les 33 qui ont quitté ce statut se répartissent comme suit :


• 13 personnels embauchés ;


• 10 sont sortis du dispositif et ont fait valoir leur droit au retour au sein du ministère de la défense ;


• 9 ont quitté le dispositif et l'institution ;


• une personne est décédée.

Éléments d'appréciation :

Bien que les procédures conduisant à la mise à la disposition de personnels ainsi que leur suivi restent complexes, le dispositif a permis de valoriser les métiers et les carrières des personnels, tout en contribuant à leur intégration rapide dans le monde de l'entreprise. Au final, le ministère de la défense a montré ses facultés d'ouverture et d'adaptation par le biais de manoeuvres RH innovantes encadrant efficacement les réformes qui sont entreprises. Près de 60 % des personnes « maldées » restent mises à la disposition, un an et demi après les premières externalisations.

• S'agissant du bilan économique , sur la base des éléments collectés sur les douze premiers mois de fonctionnement des marchés « RHL-1 », le scénario d'externalisation présente une économie de 21 % . Si l'on déduit les coûts de la transformation (remboursement du prestataire au titre de la MALDE etc...), l'économie est encore de 11 %.

2. La régie rationnalisée : l'expérimentation « RRO » et « RRO au carré »

Le ministère de la défense a également expérimenté la piste d'une amélioration de son mode d'organisation pour être en mesure de chiffrer les gains à attendre d'une « régie rationalisée », et de pouvoir comparer très finement trois scénarii :

- le scénario de référence : le ministère de la défense continue d'assurer en régie les fonctions RHL avec le personnel militaire et civil en vigueur avant la rationalisation ;

- le scénario externalisé ;

- un scénario intermédiaire de régie rationalisée optimisée (RRO) : le ministère continue d'assurer en régie les fonctions RHL, tout en modifiant profondément son fonctionnement et en particulier en diminuant le nombre d'emplois qui y sont consacrés.

Une expérimentation de rationalisation de la régie a été lancée en novembre 2011 , portant sur cinq sites pilotes (Coëtquidan, Chalon-sur-Saône, Rochefort, Hyères et Bourges) et 14 restaurants qui, ensemble, ont une activité comparable aux sites retenus pour « RHL-1 » (2 millions de repas servis par an pour « RHL-1 », et 2,2 pour « RRO »).

Les résultats issus de l'évaluation préalable montrent un gain économique de 12 %.

Toutefois, des éléments extérieurs peuvent venir expliquer une petite partie de ces gains (réforme des bases de défense, situation de sureffectif au démarrage de l'expérimentation...).

Une nouvelle expérimentation dite « RRO 2 » a été lancée en avril 2012, concernant 2 bases de défense et 5 points de restauration, pour un total de 970 000 repas. Elle devrait logiquement conduire à des gains encore plus significatifs.

A ce stade, il n'y a pas encore eu de décision de principe sur le recours à l'externalisation ou à la régie rationalisée.

Vos rapporteurs jugent que le ministère de la défense conduit très sérieusement les études et expérimentations préalables à cette décision lourde d'enjeux sur le plan budgétaire et humain. Ils se sont assurés que les syndicats de personnels civils seraient bien consultés avant toute décision.

C. MODERNISATION DE LA FONCTION HABILLEMENT : BIENTÔT L'HEURE DES CHOIX

La fonction « habillement » du ministère de la défense est, de par son organisation et ses volumes de stocks, génératrice de surcoûts importants par rapport aux meilleures pratiques en vigueur dans le monde économique . Des études tendant à son externalisation ont donc été lancées.

Il faut rappeler que la gendarmerie et la police nationale ont déjà externalisé leur habillement.

A la défense, les enjeux sont très importants, tant du point de vue fonctionnel (l'habillement et l'équipement du combattant participent directement de la capacité opérationnelle des forces), que du point de vue de l'impact potentiel sur les ressources humaines du ministère (la fonction emploie au total plus de 1 600 personnes ) et sur le tissu industriel des fournisseurs de l'administration .

Votre commission est particulièrement attentive à l'impact potentiel en termes d'activité économique pour les territoires concernés par des établissements.

Après une phase d'évaluation préalable du projet de rationalisation de la fonction habillement conduite par l'état-major des armées entre octobre 2009 et juin 2010, le précédent ministre de la défense a décidé de lancer un processus de consultation pour l'externalisation de la fonction qui s'est concrétisé par la publication d'un avis d'appel public à la concurrence en février 2011. Il a également demandé que lui soit proposée une alternative réelle à l'externalisation en termes de service et de coûts, en continuant à opérer cette activité en régie (régie rationalisée optimisée).

Contrairement à la restauration, où les expérimentations ont été séquencées, les deux pistes (externalisation et optimisation) sont donc étudiées simultanément . Il faut noter que pendant le même temps les déflations d'emplois découlant de la RGPP s'appliquent à la fonction habillement, ce qui fait que la situation d'origine est elle-même instable.

Avec une organisation correspondant aux meilleures pratiques du secteur privé (stocks minimums, flux tendus, recours à la distribution par correspondance, systèmes d'information performants, etc....), la qualité de service devrait, à moindre coût, être maintenue voire améliorée dans certains cas.

Dans l'étude préalable ayant conduit à lancer le marché, les gains attendus de l'externalisation étaient estimés à 21 %, ceux de la rationalisation de la régie, à 13 %.

1. L'état du dialogue compétitif pour l'externalisation de l'habillement

Ce projet porte sur l'approvisionnement, le stockage et la distribution des effets non stratégiques et concerne 869 équivalents temps plein .

En effet, les effets à haute criticité opérationnelle en sont exclus. Seront également conservées en régie, dans tous les cas de figure, l'étude et la conception des effets. Seuls la réalisation, le stockage, le transport et la distribution de certains effets seraient externalisés. D'autre part, les services à la personne (écussonnage...) font partie intégrante de la fonction « habillement » au sein du ministère, ce qui est une particularité à respecter.

Périmètre du projet d'externalisation de l'habillement

Étude et conception

Réalisation

Stockage

Transport distribution

Services à la personne

Effets à haute criticité opérationnelle (MF1)

Régie

Régie

Régie

Externalisé

Sans objet

Tenues de combat et effets métier soutien et support (MF2)

Régie + co-activité

Externalisé

Externalisé

Externalisé

Externalisé en option

Tenues de service courant, effets de sport (MF3)

Régie + co-activité

Externalisé

Externalisé

Externalisé

Externalisé en option

Six candidats ont été sélectionnés à la suite d'un appel public à la concurrence. Ces candidats sont constitués sous forme de groupements créés pour l'occasion et rassemblant les compétences nécessaires pour répondre aux demandes de l'administration (logistique, textile, systèmes informatiques, etc.). Les mandataires de ces groupements sont de grandes entreprises françaises des secteurs de l'armement, des services ou de la logistique.

Le dialogue compétitif engagé porte sur une externalisation de 8 ans. Il a véritablement débuté en octobre 2011, avec une première phase d'audition de six groupements concurrents. A l'issue de cette étape, un groupement n'a pas souhaité prolonger le dialogue, un autre a été écarté compte tenu de sa proposition trop éloignée du besoin défini. Les deux dernières phases du dialogue compétitif ont ainsi été conduites avec quatre opérateurs organisés de façon à couvrir le large périmètre du projet qui va de l'acquisition de la plupart des effets, jusqu'à leur distribution aux bénéficiaires.

La dernière phase de dialogue s'est achevée et les offres définitives sont en cours d'analyse pour la fin novembre.

La décision définitive d'engager l'exécution de l'opération d'externalisation sera soumise au ministre de la défense à l'issue de cette procédure contractuelle, sur la base d'un bilan économique et social intégrant les offres des soumissionnaires, le montant du remboursement des dépenses afférentes aux rémunérations et cotisations sociales des personnels mis à disposition, et après présentation de ce bilan aux organisations syndicales.

2. L'optimisation de la régie (RRO)

Le ministère de la défense mène parallèlement son étude de régie optimisée. Les conclusions de l'étude RRO sont attendues au même moment que le bilan du dialogue compétitif.

Les leviers d'optimisation envisagés pour l'externalisation et la régie rationalisée sont similaires : réduction des stocks (déjà ramenés pour l'habillement de 1 080 millions d'euros en 2008 à 800 millions d'euros en début d'année 2012, pour un objectif de 600 millions d'euros en octobre de la même année), concentration du stockage, de la maintenance et de la distribution , mise en place d'un système d'information logistique uniforme et performant . Ils se traduisent notamment, dans le cadre de la régie rationalisée, par un schéma directeur logistique et un schéma directeur de maintenance impliquant des hypothèses de restructuration de certains établissements logistiques du service du commissariat des armées (SCA).

3. La question cruciale de l'effet sur l'emploi et les PME doit jouer dans la décision du ministre de recourir ou non à l'externalisation

Beaucoup d'approximations ont été avancées sur les impacts pour l'emploi de ce projet de modernisation de l'habillement.

Vos rapporteurs souhaitent rappeler quelques faits :

- dès aujourd'hui, malheureusement, la confection textile des effets militaires n'est plus assurée sur le territoire national , à l'exception de quelques « niches ». Même les fournisseurs français ne réalisent en fait bien souvent que l'assemblage. Déjà, aujourd'hui, les survêtements, les treillis... ne sont pas tissés en France. Il n'empêche que la préservation de ces emplois, dans un secteur particulièrement sinistré, est vitale ;

- même en l'absence d'externalisation, la fonction « habillement » n'échappera pas à un redimensionnement en termes de nombre de personnels qui y sont affectés, non plus qu'à un rétrécissement du nombre des entrepôts de stockage, car l'organisation actuelle n'est pas assez efficiente ;

- a contrario, des emplois seront maintenus même en cas d'externalisation de la fonction, pour le pilotage, la conception et le contrôle tant de la qualité des effets que de la gestion des droits des personnels ; auxquels s'ajouterait le volant d'emplois ouverts à la mise à disposition par les candidats du marché, qui pourrait s'élever à plusieurs centaines. Au total il n'est pas exclu que cela représente de l'ordre de 5 à 600 emplois.

- Enfin, le cahier des charges de la consultation prévoit, en option, à la disposition du ministère, des dispositions relatives à la situation particulière des maîtres tailleurs de la marine, maîtres ouvriers de l'armée de terre et de l'armée de l'air.

Pour autant, il est clair que la question du maintien de l'emploi sur le territoire est cruciale et devra entrer en jeu dans une décision qui doit, naturellement, tendre principalement à atteindre un meilleur équilibre économique pour la défense dans un contexte de très forte contrainte budgétaire.

Votre commission attirera l'attention du ministre sur trois points en particulier qui devraient faire la décision en faveur ou non de l'externalisation :

- l'impact éventuel sur les PME ;

- le volant d'emplois ouverts pour les personnels de la défense chez les prestataires, notamment par le biais de la mise à disposition ;

- le traitement de la situation particulière des maîtres tailleurs.

PERSONNES AUDITIONNÉES DANS LE CADRE DE LA PRÉPARATION DU RAPPORT

- Auditions de la commission :

- Jean-Yves le DRIAN, ministre de la défense

- Amiral GUILLAUD, chef d'état major des armées

- Général RACT-MADOUX, chef d'état major de l'armée de terre

- Général MERCIER, chef d'état major de l'armée de l'air

- Amiral ROGEL, chef d'état major de la marine

- Auditions des rapporteurs :

- Général de brigade Bertrand HOUITTE de la CHESNAIS, adjoint au sous-chef d'état-major soutien de l'état-major des armées ; Capitaine de Vaisseau Laurent HAVA, adjoint synthèse manoeuvre future, état-major des armées ;

- Commissaire Général Stéphane PIAT, Chef de la division Politique Performance des soutiens auprès du sous-chef d'État major soutien, Commissaire colonel Bernard CHASSAC, Commissaire Colonel Catherine BOURNIZIEN, chargée de mission et directrice du projet "Transformation R2HL", service du commissariat central des armées.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport au cours de sa séance du 29 novembre 2012.

***

Sans préjuger du vote sur les crédits de la mission défense, la commission a donné un avis favorable sur les crédits du programme 178, les groupes SOC, UDI votant pour, les groupes UMP, EELV et CRC s'abstenant.


* 1 http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20121022/etr.html#toc10

* 2 Les suppressions d'emplois sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces » sont réparties à raison de 80 % sur des emplois militaires et 20 % sur des emplois civils.

* 3 EVSO : engagé volontaire sous-officier.

* 4 EVI : engagé volontaire initial.

* 5 ENSOA : Ecole nationale des sous-officiers d'active.

* 6 Définition « départs subis » : départs de l'institution liés à une décision de l'individu. Cette catégorie de départs regroupe les radiations suite aux prescriptions de délai de désertion, les départs à la retraite à 15 et 25 ans de service (RJI), les dénonciations, résiliations et non renouvellements de contrat par les individus

* 7 Départs subis par rapport à l'effectif moyen réalisé.

* 8 Brevet supérieur de technicien de l'armée de terre

* 9 De sergent-chef à adjudant-chef

* 10 Niveau fonctionnel supérieur correspondant au grade d'adjudant-chef à major.

* 11 Effectifs gérés par l'état-major des armées au titre de l'emploi des forces  : états-majors interarmées par exemple.

* 12 Effectif total toutes armées et services compris.

* 13 Source : audition du chef d'état major de l'armée de l'air par la commission

* 14 Bilan à mi parcours de la loi de programmation militaire, rapport public thématique, juillet 2012.

* 15 La colonne « réalisation au 30/06/12 » mentionne la moyenne d'activité réalisée depuis le 1 er janvier 2012.

* 16 Source : état-major de la marine

* 17 48 ans d'âge moyen.

* 18 Sur 14 aéronefs en parc, 3 présentent des limitations opérationnelles (avionique ancienne, incompatible avec certaines normes internationales).

* 19 Organisation de l'aviation civile internationale.

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