Avis n° 152 (2012-2013) de M. Jean-Pierre LELEUX , Mme Maryvonne BLONDIN et M. Pierre LAURENT , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 22 novembre 2012

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N° 152

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi de finances pour 2013 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME II

Fascicule 2

CULTURE :

CRÉATION, CINÉMA, SPECTACLE VIVANT, ARTS VISUELS

Par M. Jean-Pierre LELEUX, Mme Maryvonne BLONDIN
et M. Pierre LAURENT,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : Mme Marie-Christine Blandin , présidente ; MM. Jean-Étienne Antoinette, David Assouline, Mme Françoise Cartron, M. Ambroise Dupont, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jacques Legendre, Mmes Colette Mélot, Catherine Morin-Desailly, M. Jean-Pierre Plancade , vice-présidents ; Mme Maryvonne Blondin, M. Louis Duvernois, Mme Claudine Lepage, M. Pierre Martin, Mme Sophie Primas , secrétaires ; MM. Serge Andreoni, Maurice Antiste, Dominique Bailly, Pierre Bordier, Mme Corinne Bouchoux, MM. Jean Boyer, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Jacques Chiron, Claude Domeizel, Mme Marie-Annick Duchêne, MM. Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Vincent Eblé, Mmes Jacqueline Farreyrol, Françoise Férat, MM. Gaston Flosse, Bernard Fournier, André Gattolin, Jean-Claude Gaudin, Mmes Dominique Gillot, Sylvie Goy-Chavent, MM. François Grosdidier, Jean-François Humbert, Mmes Bariza Khiari, Françoise Laborde, M. Pierre Laurent, Mme Françoise Laurent-Perrigot, MM. Jean-Pierre Leleux, Michel Le Scouarnec, Jean-Jacques Lozach, Philippe Madrelle, Jacques-Bernard Magner, Mme Danielle Michel, MM. Philippe Nachbar, Daniel Percheron, Marcel Rainaud, Michel Savin, Abdourahamane Soilihi, Alex Türk, Hilarion Vendegou, Maurice Vincent.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 235 , 251 à 258 et T.A. 38

Sénat : 147 et 148 (annexe n° 7 ) (2012-2013)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Vos rapporteurs s'attacheront à étudier successivement les budgets et politiques publiques conduites dans trois secteurs majeurs de la culture : le soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant et des arts plastiques, qui font l'objet des deux actions du programme « Création » de la mission « Culture » dont ils représentent respectivement 90,4 % et 9,6 % des crédits de paiement pour 2013, ainsi que le soutien au secteur du cinéma.

Les rapporteurs pour avis de votre commission sont respectivement Mme Maryvonne Blondin pour le spectacle vivant, MM. Pierre Laurent pour les arts plastiques et Jean-Pierre Leleux au titre du cinéma. Si les deux premiers secteurs concernés sont financés sur crédits budgétaires, rappelons que tel n'est pas le cas du cinéma, qui bénéficie de taxes affectées via le CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée), ces dernières étant pour partie en suspens dans l'attente d'une décision de la Commission européenne.

Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Création » ainsi qu'à la politique conduite en faveur du cinéma. Par ailleurs, elle a adopté un amendement à l'article 56 afin de rétablir le régime fiscal des SOFICA dans la rédaction prévue dans le projet de loi de finances initial.

L'édition 2012 du Forum d'Avignon, qui s'est déroulée du 15 au 17 novembre dernier, et auquel une délégation de votre commission a participé, avait pour thème : « Culture : les raisons d'espérer ». Les politiques engagées ou envisagées par le Gouvernement en font partie.

I. LE SPECTACLE VIVANT : UN BUDGET PRÉSERVÉ, DES DÉFIS À RELEVER

A. UN BUDGET 2013 PRÉSERVÉ : UNE PRIORITÉ DONNÉE À L'EMPLOI

1. Une priorité budgétaire donnée au spectacle vivant
a) L'évolution des crédits depuis 2006

Le tableau ci-après retrace l'évolution des crédits spectacle vivant du programme 131 depuis six ans, hors titre 2.

Il montre une progression de ces crédits entre 2006 et 2011 :

- en euros courants : +26,2 % en autorisations d'engagement (AE) et + 9,48 % en crédits de paiement (CP) ;

- en euros constants : + 23,85 % en AE mais seulement + 1,16 % en CP.

En outre, si l'on raisonne en base glissante en intégrant les crédits votés en loi de finances initiale pour 2012, on constate une forte baisse de 16,85 % en AE en euros courants, la hausse en CP étant ramenée à 2,32 %.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS SPECTACLE VIVANT DU PROGRAMME 131 DEPUIS 2006, HORS TITRE 2

RAP 2006

RAP 2007

RAP 2008

RAP 2009

RAP 2010

RAP 2011

PAP 2012

PAP 2013

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

P131-1 hors T2 euros courants

634,12

641,81

630,66

635,11

642,99

646,74

651,48

660,08

646,07

651,99

800,14

702,67

665,28

718,94

678,98

712,52

P131-1 hors T2 euros constants

634,12

641,81

621,20

625,59

615,99

619,58

624,12

632,36

609,24

614,82

739,33

649,26

Taux d'évolution par rapport à 2006 en euros courants

-0,54%

-1,04%

1,40%

0,77%

2,74%

2,85%

1,88%

1,59%

26,18%

9,48%

4,92%

12,02%

7,08%

11,02%

Taux d'évolution par rapport à 2006 en euros constants

-2,04%

-2,53%

-2,86%

-3,46%

-1,58%

-1,47%

-3,92%

-4,20%

16,59%

1,16%

Taux d'évolution en base glissante en euros courants

-0,54%

-1,04%

1,95%

1,83%

1,32%

2,06%

-0,83%

-1,23%

23,85%

7,77%

-16,85%

2,32%

2,06%

-0,89%

Taux d'évolution en base glissante en euros constants

-2,04%

-2,53%

-0,84%

-0,96%

1,32%

2,06%

-2,38%

-2,77%

21,35%

5,60%

Source : ministère de la culture et de la communication.

Il convient également de noter l' impact sur les dotations du financement des travaux de construction de la Philharmonie de Paris à partir de 2011 , selon l'échéancier ci dessous :

Échéancier prévisionnel (Part MCC)

AE

CP

Avant 2013

158 265 347

106 934 347

PLF 2013

25 000 000

50 000 000

Après 2013

-

26 331 000

Total

183 265 347

183 265 347

Source : Documents budgétaires

b) La reconstitution des crédits d'intervention gelés début 2012 : une bouffée d'oxygène bienvenue

Les crédits du ministère avaient subi le gel de 6 % appliqué à l'ensemble du budget de l'État, mesure qui avait suscité l'inquiétude des professionnels, en particulier celle des structures les plus fragiles.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, a décidé la reconstitution de l'intégralité des crédits d'intervention prévus en loi de finances initiale 2012 pour le spectacle vivant. Cette mesure, qui concerne en premier lieu les crédits des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), permet de verser l'intégralité des subventions prévues en région, notamment en faveur des compagnies indépendantes, des structures labellisées et des réseaux. Elle bénéficie également aux associations à vocation nationale financées directement par le ministère. Le montant des crédits reconstitués représente 23,5 millions d'euros : 18,5 millions versés par les DRAC et 5 millions par l'administration centrale.

Cette reconstitution des crédits a donné une bouffée d'oxygène et rassuré les professionnels. Ce signal a démontré le soutien du Gouvernement à ce secteur parfois fragilisé de la culture .

c) La relative préservation des crédits pour 2013

Les crédits consacrés au spectacle vivant s'établissent, avant transferts, à 679 millions d'euros en AE et 712,5 millions d'euros en CP, soit une hausse de 2,06 % en AE et une baisse de 0,9 % en CP.

Le tableau ci-après en précise la ventilation.

CRÉDITS DE L'ACTION N°1 DU PROGRAMME « CRÉATION » POUR 2013

(en millions d'euros)

LFI 2012

PLF 2013

Évolution
2013/2012 (en %)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant

665,28

718,94

678,98

712,52

+ 2,06

- 0,89

dont :

Subventions pour charges de service public

289,23

290,36

270,11

270,11

- 6,61

- 6,97

Dépenses d'investissement

5,30

11,50

3,63

7,41

- 31,51

- 35,57

Dépenses d'intervention

370,75

417,08

395,47

422,70

+ 6,67

+1,35

Dotations en fonds propres

9,77

12,29

Source : commission de la culture et de la communication sur le fondement des documents budgétaires

Les subventions pour charges de service public aux établissements publics nationaux représentent 38 % des CP. Elles enregistrent une baisse de 6,6 % qui traduit la participation des opérateurs de l'État à l'effort de maîtrise des dépenses publiques. Elles s'établissent à 270,1 millions d'euros en AE=CP.

Si l'on ajoute les dépenses de fonctionnement et les dotations en fonds propres , les crédits connaissent une baisse d'environ 7 millions d'euros, avec - 2,5 % pour l'Opéra de Paris, la Cité de la musique et l'établissement public du parc et de la grande halle de la Villette, et -1 % pour l'ensemble des autres opérateurs du spectacle vivant (notamment les théâtres nationaux).

Précisons que le contrat de performance de la Villette pour la période 2009-2011, arrivé à son terme, n'a pas été renouvelé en 2012. Selon le ministère, « l'année 2013 devra voir aboutir les réflexions sur l'articulation de la Cité de la Musique avec la Philharmonie de Paris, qui recouvrent à la fois le périmètre des activités de la Cité, ses équilibres financiers et l'avenir de la Salle Pleyel ».

S'y ajoutent des baisses exceptionnelles qui varient en fonction de chaque opérateur et ne touchent pas l'ensemble des établissements : elles dépendent de leur niveau de fonds de roulement et de leurs marges de manoeuvre complémentaires. Ainsi, on enregistre une baisse de 0,5 million d'euros pour la Comédie française, 0,1 million d'euros pour la Villette et 3,4 millions d'euros pour l'Opéra de Paris.

Les dépenses d'investissement baissent de 35,6 % en CP pour s'établir à 7,4 millions d'euros. En effet, la loi de finances pour 2012 prévoyait le paiement de la première phase de la campagne de travaux de rénovation engagée à l'Opéra-comique, soit 4 millions d'euros. 800 000 euros permettront en 2013 d'assurer le paiement du solde restant dû.

Les dépenses d'intervention progressent de 1,35 % en CP et 6,7 % en AE. Les transferts aux collectivités territoriales connaissent une hausse de 2,6 %, qui s'explique principalement par les crédits destinés à financer la montée en charge de la Philharmonie de Paris. La répartition des crédits d'intervention entre crédits centraux et crédits déconcentrés reste néanmoins à l'identique.

Les crédits centraux de fonctionnement sont globalement stables, à 67,26 millions d'euros avec cependant des évolutions variables. Une mesure de périmètre transfère les crédits dévolus au Théâtre de l'Athénée-Louis Jouvet et au Théâtre des Bouffes du Nord vers les crédits déconcentrés, gérés par la DRAC d'Île-de-France, respectivement à hauteur de 1,8 million d'euros et de 600 000 euros. Surtout, 4 millions d'euros vont à l'association de la Philharmonie de Paris, structure de préfiguration financée à parité avec la Ville de Paris.

Les crédits centraux d'intervention finançant l'investissement augmentent de 4 millions d'euros, avec une augmentation de 5 millions d'euros des sommes destinées à couvrir les échéances de paiement du chantier de la Philharmonie de Paris , pour un montant total de 50 millions d'euros. Une autorisation d'engagement de 25 millions d'euros est destinée à couvrir d'éventuels surcoûts. Notre collègue Yann Gaillard s'en est ému dans son récent rapport d'information sur le sujet 1 ( * ) . Il a souligné les dérives en termes de coûts et de calendrier. Le retard accumulé est estimé à 24 mois, reportant l'ouverture de l'équipement au dernier trimestre 2014. S'agissant de l'inflation des coûts, alors que l'estimation initiale était de l'ordre de 170 millions d'euros, les dernières évaluations anticipent une facture globale finale de l'ordre de 386 millions d'euros.

Ce projet comportera une salle de concert de 2 400 places, une salle polyvalente de 200 places, six espaces de répétition et dix studios. Il porte une ambition très forte en matière d'éducation artistique et culturelle, et favorisera la démocratisation de l'accès à la musique classique des habitants de l'Est de Paris et de la banlieue parisienne. Ses coûts de fonctionnement sont évalués à environ 9 millions d'euros pour l'État (et la même somme pour la Ville de Paris). Les ressources propres attendues sont de 15 millions d'euros, dont 9 de billetterie et 6 de mécénat.

Les crédits déconcentrés de fonctionnement progressent pour s'établir à 283,8 millions d'euros. Ils permettront aux DRAC de soutenir les activités artistiques et culturelles mises en oeuvre par les labels, réseaux, équipes artistiques, scènes conventionnées et autres dispositifs, lieux et institutions de création et de diffusion du spectacle vivant . Cette légère augmentation concerne principalement les sept labels (centres dramatiques nationaux, centres chorégraphiques nationaux, scènes nationales, centres nationaux de création musicale, SMAC, centres nationaux pour les arts de la rue, pôles nationaux pour les arts du cirque) et les quatre réseaux de création et de diffusion artistique (orchestres permanents, opéras en région et centres de développement chorégraphiques, scènes conventionnées).

Relevons que le nombre de compagnies conventionnées a pu être stabilisé autour de 600. Néanmoins, le constat de difficultés rencontrées par les nouvelles compagnies conventionnées, compte tenu d'un tassement des montants alloués à celles ne disposant pas d'un lieu, conduit le ministère à réfléchir à une nouvelle réforme du dispositif.

Au total, les subventions versées aux équipes artistiques et aux institutions en réseaux ou labellisées sont maintenues à leur niveau de 2012, soit 347,4 millions d'euros, à périmètre constant et hors Philharmonie de Paris. Cette « sanctuarisation » permettra de préserver l'action en faveur de la création, de l'insertion des artistes au sein de ces institutions, en poursuivant les mesures engagées dans le cadre du plan d'action pour le spectacle vivant annoncé en août 2011 et mis en oeuvre en 2012.

En revanche, les crédits d'investissement déconcentrés baissent pour s'établir à 16,7 millions d'euros en AE (soit - 21,40 %) et à 19,5 millions d'euros en CP (soit - 13 %). Ils correspondent notamment aux engagements de l'État souscrits dans le cadre des contrats de projets État-région, 2013 étant l'année de clôture de l'actuelle génération des CPER. Hors CPER, les crédits financent des opérations d'intérêt national ayant fait l'objet d'engagement de tous les partenaires publics telles que la reconstruction du Bateau Feu, scène nationale de Dunkerque, le Pôle théâtre de la friche de la Belle de mai à Marseille ou encore la SMAC de Nîmes).

d) La poursuite de la clarification de l'action financière de l'État

La clarification de l'action de l'État à travers ses dispositifs de financements et ses réseaux constitue l'un des axes de réforme issus des Entretiens de Valois.

Les textes régissant les rapports entre l'État et chaque type de label ou réseau ont tous été revus, notamment dans le cadre de la circulaire du 31 août 2010. Les critères artistiques, culturels, économiques et administratifs de soutien et d'évaluation de chacun des réseaux ont été arrêtés. Avec le développement de la contractualisation avec l'État, chaque établissement a désormais des obligations précises en matière de création, diffusion, place dévolue aux artistes et développement des publics.

Ce travail a été poursuivi en 2012 et devrait aboutir en 2013 et 2014 . Ainsi, les commissions d'experts attribuant les aides de l'État aux équipes et ensembles artistiques dans les disciplines du spectacle vivant seront refondées en 2013.

La publication d'un corpus complet de nouveaux textes est envisagée début 2014 , pour une durée de cinq ans, en substitution des arrêtés et circulaires existants qui sont organisés par discipline.

La refonte de la circulaire de mai 2009 sur le programme des scènes conventionnées a aussi été engagée. Le périmètre de ce texte devait être étendu aux aides attribuées par l'État aux autres lieux de création et de diffusion non labellisés . Il s'agissait de requalifier des aides fondées sur une partie spécifique de l'activité des lieux concernés, et non sur leur fonctionnement global. Les aides auraient été apportées pour un temps donné et renouvelables un nombre limité de fois, afin d'en encourager la mobilité et, avec le temps, d'élargir le cercle potentiel des bénéficiaires. Elle visait également à améliorer la diffusion des formes et disciplines insuffisamment représentées sur les territoires, à soutenir l'émergence et l'innovation et les nouveaux modes de travail et de production artistique ainsi que les actions de sensibilisation et de formation des publics. Toutefois, courant 2012, ce travail de réflexion a été suspendu, les professionnels doutant de son utilité. Le ministère devrait reprendre ce dialogue en 2013 .

2. D'autres sources de financement essentielles

Il faut rappeler que le secteur bénéficie d'autres sources de financement que celles de l'État.

- En effet, les collectivités territoriales financent aux deux tiers le spectacle vivant, la décentralisation culturelle ayant porté ses fruits.

- Les sociétés de perception et de répartition des droits (SPRD) conduisent des actions culturelles, 25 % de la rémunération pour copie privée leur étant notamment consacrés.

Ainsi, auditionné par votre rapporteure, M. Jean-Noël Tronc, directeur général de la Sacem (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) a indiqué que cette société avait consacré 104 millions d'euros à l'action culturelle de 2002 à 2011, pour 15 500 projets, à raison de :

- 15 millions d'euros dédiés « au soutien à l'émergence » ;

- 63 millions d'euros d'aides pour faciliter la diffusion des répertoires ;

- 570 festivals soutenus en moyenne par an ;

- 487 aides à la résidence ;

- 448 aides à l'autoproduction (depuis 2004).

Par ailleurs, cette société vient de lancer un site dédié au financement des projets musicaux professionnels (MonProjetMusique.fr). Les aides financières à la musique étant très dispersées, ce site permettra de présenter l'ensemble des dispositifs proposés par la filière musicale et les régions. 132 programmes d'aides y sont référencés pour l'instant.

Ce site apporte une simplification pour les porteurs de projet et un outil de connaissance du secteur et de transparence sur les aides allouées. Votre rapporteure salue cette mesure qui répond à de réels besoins de la filière .

- Le mécénat soutient des opérations dans ce secteur, les grandes institutions étant privilégiées car plus visibles (Opéra national de Paris, grands festivals comme celui d'Aix-en-Provence, par exemple). Mais les acteurs culturels s'organisent de plus en plus pour mobiliser les entreprises régionales sur des actions territoriales. Votre rapporteure estime que des actions collectives devraient être davantage développées en région pour mobiliser le potentiel de mécénat existant, sous une forme juridique à débattre (fondation ou autre).

A cet égard, votre commission se réjouit du maintien du dispositif fiscal en faveur du mécénat. C'était essentiel et logique puisqu'il est demandé aux structures culturelles de développer leurs ressources propres. Le prix des billets de spectacles ayant une faible élasticité, le recours au mécénat peut être vital pour leur équilibre financier.

- Les structures devraient davantage recourir aux financements européens. Mais leur taille et leurs effectifs leur permettent rarement de monter de tels dossiers, votre rapporteure soutient l'idée d'une mutualisation des démarches au sein d'une même région, en vue d'obtenir des crédits européens. Une concertation entre DRAC et missions économiques pourrait être conduite à cette fin.

- Par ailleurs, rappelons que la billetterie du spectacle vivant devrait continuer à bénéficier du taux réduit de TVA.

3. Des dispositifs d'aides extra budgétaires en suspens
a) Des inquiétudes en passe d'être apaisées

Les professionnels ont exprimé à votre rapporteure leurs inquiétudes suites aux déclarations de Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, de suspendre le projet de Centre national de la musique (CNM) dont la création avait été décidée par le précédent gouvernement.

Les professionnels du spectacle vivant avaient d'abord craint d'être les laissés pour compte d'un projet qui, initialement, semblait faire la part belle aux industries musicales. La mission de préfiguration confiée à M. Didier Selles leur avait cependant permis de se faire entendre et de rapprocher les points de vue.

Notre ancien collègue Serge Lagauche avait déjà regretté le morcellement de la filière musicale et appelé les professionnels à dialoguer. De ce point de vue, la concertation autour du projet de CNM a porté ses fruits. En revanche, le financement de l'établissement n'était pas assuré. Outre les dispositifs existants, qui auraient été fusionnés, une partie du financement restait à trouver . L'idée d'employer une partie de la taxe sur les services de télévision (TST) distributeurs au profit de la filière musicale a été suspendue à l'attente de la validation de sa dernière réforme par la Commission européenne. La priorité était donc de sécuriser les financements.

Néanmoins, les professionnels du spectacle vivant musical avaient fondé beaucoup d'espoir sur cette perspective, le rapport Riester-Selles ayant évalué les besoins du secteur à 90 millions d'euros.

Votre rapporteure se réjouit que la ministre ait relancé la concertation sur ce sujet, préservant ainsi la dynamique engagée. En effet, le 25 octobre 2012, Mme Aurélie Filippetti a évoqué la création d'une mission « musique » au sein du ministère, avec la création d'une plateforme commune entre la direction générale de la création artistique (DGCA) et la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC), afin « d'offrir un support pertinent à la création musicale dans toute sa complexité et sa diversité ». Il est en effet indispensable que le dialogue entre les deux secteurs se prolonge au sein des autorités de tutelle.

Par ailleurs, le fait que le directeur de l'Association de préfiguration sur le Centre national de la musique (APCNM) ait rejoint la mission Lescure doit permettre d'assurer une certaine continuité dans le travail fourni par la filière musicale depuis plus d'un an.

Votre rapporteure insiste pour que le spectacle vivant soit pleinement pris en compte, dans tous ses aspects . Ainsi, si elle se réjouit de l'adoption par l'Assemblée nationale d'une nouvelle prolongation pour trois ans du crédit d'impôt phonographique, elle estime que la réflexion devrait être poursuivie quant à son périmètre : pourquoi exclure les producteurs de spectacles du dispositif ? Ceci d'autant plus que les producteurs phonographiques s'orientent de plus en plus vers la production de spectacles, entrant ainsi en concurrence avec les opérateurs habituels.

En outre, Jacques Renard, directeur du Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), a indiqué à votre rapporteure que 2012 devrait être une année difficile pour les spectacles musicaux et de variétés, donc pour de nombreuses entreprises de spectacles, notamment celles portant de petits et moyens projets. Plusieurs facteurs à cela : la crise, la période électorale (qui n'incite pas les gens à sortir) et certains facteurs conjoncturels (tels que les conditions climatiques ayant pu perturber la fréquentation de certains spectacles en plein air).

b) Quelle structure pourrait être envisagée ?

Le projet initial de CNM visait à créer un nouvel établissement public afin d'assurer le financement de la filière musicale dans toutes ses composantes. Il s'agirait plutôt désormais de s'appuyer sur un outil existant, qui pourrait être :

- le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), avec l'avantage de s'adosser à un organisme solide et expérimenté, sous réserve que les acteurs de la filière puissent y avoir pleinement leur place. Y serait alors créé un compte de soutien dédié à la production musicale ;

- le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), ce qui supposerait d'en modifier la gouvernance pour intégrer la musique enregistrée, car il ne s'occupe aujourd'hui que du spectacle vivant ;

- le Fonds pour la création musicale (FCM).

c) Les analyses et préconisations du rapport Dorny-Martinelli-Metzger-Murat

Le 22 mars 2012, MM. Serge Dorny, Jean-Louis Martinelli, Hervé-Adrien Metzger et Bernard Murat ont remis leur rapport à la suite de la mission que l'ancien ministre de la culture et de la communication leur avait confiée sur le financement du spectacle vivant. Intitulé « Développer, structurer, pérenniser », le rapport a identifié les principales faiblesses structurelles du spectacle vivant et relevé l'existence de trois problèmes structurels :

- une dispersion préoccupante et une fluidité insuffisante des aides de l'État ;

- un manque dommageable de coordination entre l'État et les collectivités territoriales ;

- des lacunes lourdes en matière d'observation et d'évaluation.

La mission a proposé de renforcer les politiques publiques du spectacle vivant autour de quatre objectifs :

- intégrer création et diffusion dans un continuum culturel ;

- reconquérir les marges artistiques du secteur subventionné ;

- réaffirmer le rôle des artistes du spectacle vivant dans la société ;

- promouvoir rencontres et fertilisations croisées entre disciplines du spectacle vivant.

En outre, le rapport proposait de nouvelles sources de financement extrabudgétaires . Outre celle relative à la taxe sur les services de télévision due par les fournisseurs d'accès à Internet (FAI), six autres pistes étaient aussi avancées, dont certaines pourraient être « revisitées » à l'occasion des réflexions en cours :

- affecter d'une redevance l'exploitation commerciale des oeuvres du domaine public ou adaptées du domaine public ;

- instaurer une contribution compensatoire du secteur audiovisuel au profit du spectacle vivant ;

- établir une contribution additionnelle de 2 % sur le chiffre d'affaires hors taxes des parcs d'attraction à thème ;

- rénover le dispositif du « 1 % artistique » en l'étendant à l'ensemble des travaux publics et en le complétant au profit du spectacle vivant ;

- créer une taxe additionnelle sur le chiffre d'affaires des entreprises du secteur hôtellerie/restauration dans certaines zones festivalières ;

- affecter au spectacle vivant la quote-part des successions en déshérence qui n'est pas versée à la Fondation du patrimoine.

4. Une priorité donnée à l'emploi

En préservant les crédits du spectacle vivant, au sein d'une Mission « Culture » qui doit contribuer à l'effort général d'économies budgétaires, la ministre a donné la priorité à un secteur fortement pourvoyeur d'emplois, tant permanents qu'intermittents.

a) Un secteur dynamique

Le nombre d'entreprises du spectacle vivant a triplé en une décennie, entre 1996 et 2007, pour atteindre 17 000 structures cette dernière année. Elles sont majoritairement de petite taille et à 77 % constituées sous forme d'associations.

Parallèlement, le nombre d'emplois a fortement augmenté. Les seuls artistes et techniciens ont vu leur nombre augmenter fortement. Ainsi par exemple, le nombre de musiciens est passé d'environ 5 500 à près de 26 000 en vingt ans 2 ( * ) .

Si l'on observe une forte concentration des structures et des emplois sur l'Île-de-France, les autres territoires sont de plus en plus concernés, compte tenu de leur vitalité culturelle croissante et des financements très importants des collectivités territoriales en faveur de l'ensemble des composantes de ce secteur (théâtre, musique, danse, arts de la rue, arts du cirque) et de ses modes d'expression (lieux fixes, espace public, festivals saisonniers...).

b) Le régime de l'intermittence : vers une renégociation en 2013

Rappelons que le régime dérogatoire d'assurance chômage des salariés intermittents du cinéma, de l'audiovisuel et du spectacle vivant est fixé par les annexes 8 et 10 du Règlement général de l'assurance chômage, qui concernent respectivement les techniciens et les artistes. Il prend en compte les spécificités des professions concernées qui entrainent souvent une situation de précarité, marquée par la succession - voire la simultanéité - de contrats de travail à durée déterminée, l'alternance de périodes travaillées et non travaillées, des périodes de répétition, etc.

En 2003, le seuil minimum d'activité pour l'ouverture des droits a été augmenté : soit 507 heures en dix mois pour les techniciens et en dix mois et demi pour les artistes. Le régime actuel des annexes 8 et 10, entré en vigueur le 1 er avril 2007 et prolongé par la convention d'assurance chômage du 6 mai 2011, arrive à échéance le 31 décembre 2013. Les partenaires sociaux seront donc amenés à le renégocier l'an prochain.

Il s'intègre dans une politique plus large menée par les ministères de la culture et du travail en faveur de l'emploi dans le spectacle vivant.

En effet, il s'accompagne d'un certain nombre de mesures complémentaires, en particulier :

- la création d'un Fonds permanent de professionnalisation et de solidarité financé par l'État, qui s'adresse notamment aux artistes et techniciens qui, arrivés au terme de leurs droits au titre des annexes 8 et 10, ne peuvent prétendre à une réadmission ;

- un dispositif renforcé de lutte contre le travail illégal et les abus.

c) Un point sur les commissions régionales des professions du spectacle (COREPS)

Rappelons que les COREPS ont été créées, à partir de 2004, afin de « favoriser le développement au plan régional d'espaces de dialogue et de concertation avec les partenaires sociaux et les collectivités territoriales sur les questions professionnelles ». Concernant à la fois le spectacle vivant et le spectacle enregistré, contrairement aux conférences régionales du spectacle vivant, dont elles devraient être complémentaires, elles ont vocation à examiner des questions liées à l'emploi et aux politiques de formation au plan régional : diffusion et explicitation de l'information sur les évolutions des réglementations applicables au secteur, analyse des caractéristiques et besoins régionaux en matière d'emploi et de formation, conception ou analyse des expériences régionales innovantes de gestion de l'emploi.

Leurs modalités d'organisation et de fonctionnement varient selon les régions , à l'initiative des préfets de région et des directeurs régionaux des affaires culturelles. Leur secrétariat est assuré par les DRAC. Certaines régions se sont dotées d'un comité de pilotage ou de suivi. De nombreuses COREPS ont mis en place des groupes de travail, généralement sur les thèmes suivants :

- connaissance de la réglementation en vigueur dans le spectacle (en lien avec les instances chargées de la lutte contre le travail illégal) ;

- économie du spectacle et financements publics ;

- état des lieux régional sur l'emploi ;

- formation ;

- éducation artistique ;

- publics ;

- questions spécifiques au secteur de l'audiovisuel et du cinéma.

Leurs travaux ont souvent débouché sur des réalisations concrètes : états des lieux, études prospectives, publication périodique de données statistiques et élaboration de contrats d'objectifs emploi-formation.

B. UNE ACTUALITÉ LÉGISLATIVE DENSE

1. Un sujet de satisfaction : la loi relative à la lutte contre la vente illégale de billets de spectacles

Rappelons qu'en vertu de la loi n° 2012-348 du 12 mars 2012 tendant à faciliter l'organisation des manifestations sportives et culturelles, désormais : « le fait de vendre, d'offrir à la vente ou d'exposer en vue de la vente ou de la cession ou de fournir les moyens en vue de la vente ou de la cession des titres d'accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, de manière habituelle et sans l'autorisation du producteur, de l'organisateur ou du propriétaire des droits d'exploitation de cette manifestation ou de ce spectacle, est puni de 15 000 euros d'amende (...). »

S'il est encore trop tôt pour disposer d'un réel bilan d'application de la loi, les premiers retours d'information laissent néanmoins penser qu'elle a un effet dissuasif notable . Les pratiques de commercialisation des billets sur les sites de revente et les plates-formes d'échange sont en cours de régularisation conformément à l'objectif recherché. Les sites repérés semblent donner suite aux demandes de retrait des offres illégales qu'ils proposent.

Nous sommes donc sur le chemin d'une plus grande transparence des pratiques tarifaires.

La loi française suscite d'ailleurs beaucoup d'intérêt en Europe, semble-t-il.

Votre rapporteure relève la nécessité d'informer les publics sur les règles en vigueur et de les inciter à la vigilance. L'efficacité de la loi suppose aussi un effort de pédagogie.

2. 2013 : enfin un projet de loi d'orientation pour le spectacle vivant

Serpent de mer ou Arlésienne ? L'attente prolongée d'un projet de loi d'orientation pour le spectacle vivant, envisagé en 2003, puis annoncé après les Entretiens de Valois, a fini par lasser les professionnels.

Suite à l'engagement du Président de la République, une faille devrait enfin être comblée en 2013, ce secteur étant le seul champ culturel à ne pas être reconnu ni encadré par une loi fondatrice.

D'après les informations fournies par le ministère à votre rapporteure, le projet de loi devrait :

- définir la notion de spectacle vivant et les disciplines qui la composent ;

- préciser les objectifs et les moyens de la politique nationale en faveur de la création et du spectacle vivant ;

- fixer le cadre d'intervention de l'État et des collectivités territoriales ;

- proposer un nouveau pacte d'équité territoriale afin de corriger les déséquilibres en termes d'aménagement culturel du territoire et de répartition de l'offre artistique et culturelle ;

- intégrer les missions fondamentales relevant du service public du spectacle vivant ainsi que les principes structurants qui régissent les labels et les réseaux nationaux. Ceci permettra de sécuriser juridiquement les financements accordés aux établissements ainsi que les conventions conclues avec eux ;

- comporter un volet social précisant les dispositifs et actions pour structurer l'emploi artistique, renforcer la protection sociale des artistes et améliorer leurs conditions de travail. Il évoquera le suivi des carrières, les dispositifs de formation et de reconversion ainsi que l'adaptation du « contrat de génération » aux entreprises du spectacle. Le texte devrait encourager la parité et la diversité dans les recrutements aux postes de responsabilité des établissements subventionnés par l'État. Il pourrait fixer des objectifs en matière de diffusion des créations et d'élargissement des publics, en précisant le rôle des établissements et des projets subventionnés dans ce domaine ;

- s'agissant de la création de ressources nouvelles de nature extrabudgétaire, le cas échéant par la création de taxes affectées permettant d'accompagner le dynamisme du secteur, une articulation devra être trouvée avec les lois de finances.

Cette loi devra bien entendu s'articuler également avec la future réforme de la décentralisation.

3. Vers l'Acte III de la décentralisation

Un nouveau projet de loi de réforme de la décentralisation sera présenté au Parlement début 2013. Il devrait renforcer l'autonomie des collectivités territoriales.

Si la logique des blocs de compétence sera développée, afin de reconnaître la pleine responsabilité d'une collectivité sur un type de politique publique, il est essentiel cependant que la culture continue à faire l'objet de compétences partagées entre les différents niveaux de collectivités. Votre commission, qui avait déjà soutenu cette position lors de l'examen de la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010, y veillera s'il en était besoin.

Par ailleurs, le texte devrait renforcer le droit à l'expérimentation des collectivités pour qu'elles puissent mettre en place des politiques nouvelles, des pratiques différentes ou adapter des dispositifs existants. Cette faculté pourra être particulièrement utile dans le domaine culturel.

Dans ce cadre, il conviendra d'organiser et clarifier les compétences de chacun ainsi que la gouvernance des politiques culturelles territoriales, dans le cadre d'une co-construction de ces dernières. La concertation et le partenariat entre collectivités territoriales, et entre celles-ci et l'État, devront donc être encore renforcés, les premières finançant aux deux tiers les actions publiques du secteur. Ceci suppose la restauration d'un lien de confiance entre collectivités et État.

A cet égard, il est heureux que le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel (CCTDC) ait été réactivé. Lors de la séance du 2 juillet 2012, la ministre a proposé la création d'un groupe de travail interne sur cette future loi. En outre, et votre commission s'en réjouit, elle a annoncé une réforme du fonctionnement du Conseil afin d'y renforcer la place et le rôle des collectivités. Elle a proposé notamment la mise en place de CCTDC régionaux courant 2013 ; ils constitueront l'instance privilégiée de mise en cohérence des politiques du ministère et des collectivités territoriales.

La Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC), qui regroupe des élus de tous échelons territoriaux et de toutes sensibilités, y prendra pleinement sa part. Votre commission a souhaité entretenir des relations régulières avec elle.

Votre rapporteure relève que cette réforme supposera une clarification du rôle de l'État en région. Décentralisation ne signifie pas retrait de l'État : ses missions sont essentielles et il doit trouver sa juste place. A cet égard, les DRAC doivent être confortées dans leur rôle majeur. Votre rapporteure propose d'interroger la ministre sur sa position en la matière .

C. DES DÉFIS À RELEVER

1. Une exigence récurrente : améliorer la diffusion des spectacles

Le ministère conduit des actions en vue d'accompagner des artistes dans leurs projets de création , en favorisant le pluralisme esthétique et le renouvellement des formes. Le soutien aux projets portés par les artistes a été conforté par un meilleur accompagnement des ensembles musicaux et des compagnies chorégraphiques et théâtrales, la création d'un fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation, un soutien renforcé aux écritures du spectacle.

En revanche, votre rapporteure , comme son prédécesseur et comme le groupe de travail constitué en 2011 par votre commission, réitère sa préoccupation concernant la trop faible diffusion de nombre de spectacles .

En 2009, la Cour des comptes notait le « faible nombre de représentation de chaque spectacle dont la création est aidée, phénomène défavorable aux efforts de structuration du secteur » et signalait un décalage entre l'objectif, clairement affiché par l'État, de renforcement de la diffusion et sa traduction budgétaire, jugée incertaine.

Ce point a également été relevé dans le rapport précité de MM. Dorny, Martinelli, Metzger et Murat, remis en mars 2012. La mission a estimé que ce problème pouvait être envisagé sous quatre angles :

- l'écart entre production abondante et diffusion insuffisante ;

- l'enjeu de la diffusion régionale et interrégionale ;

- l'enjeu de la diffusion internationale ;

- l'enjeu des diffusions audiovisuelle et numérique.

Pour votre rapporteure, les problèmes budgétaires et de rétrécissement des marges artistiques incitent les acteurs à développer des coproductions, ce qui devrait favoriser la diffusion des spectacles. Cependant, le ministère estime nécessaire de clarifier les règles de coproduction entre institutions et compagnies.

Il est indispensable de mieux accompagner la vie des spectacles par une meilleure diffusion des oeuvres, en termes de nombre de représentations, de répartition territoriale, d'itinérance, d'exportation.

Il est également essentiel que les projets subventionnés s'engagent dans une démarche de conquête de nouveaux publics . Ceci suppose à la fois les moyens de développer la médiation et un renforcement de l'éducation artistique et culturelle.

Le ministère a demandé aux établissements publics (Centre national de la danse, Centre national des variétés et du jazz, Cité de la musique,...) d'amplifier leur action territoriale et de développer des partenariats avec les collectivités territoriales.

Par ailleurs, il souhaite encourager les établissements de spectacle vivant à développer des séries longues de représentations. Votre rapporteure soutient cette démarche.

Relevons les efforts engagés pour favoriser la diffusion à l'international. La mise en oeuvre de deux mesures préconisées dès 2009 se poursuit, avec la mise en place de 5 bureaux et relais spécialisés (à Berlin, Londres, New-York, Belgrade et Rome). L'objectif est de porter leur nombre à une quinzaine d'ici 2020 avec une logique de large couverture territoriale pour l'Europe et une approche plus stratégique et souple pour le reste du monde (bureaux à vocation régionale en Asie, en Amérique latine,...).

En 2013, dans un contexte de resserrement des budgets alloués à l'action internationale, le soutien du ministère portera de façon encore plus affirmée sur des dispositifs structurants bien identifiés.

2. La direction des structures artistiques : une parité à établir, une égalité hommes/femmes à assurer

Votre rapporteure, par ailleurs membre de la Délégation sénatoriale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, est préoccupée par la faible représentation des femmes à la direction d'établissements culturels.

D'après les informations fournies à votre rapporteure par le ministère, en 2011, les femmes représentaient 36 % des dirigeants des établissements publics relevant de l'action 1 (spectacle vivant) du programme 131 « Création » (soit 4 sur 11) et seulement 15 % des dirigeants des principaux réseaux subventionnés.

A l'occasion d'une conférence organisée le 6 juin 2012 au Sénat, sous le patronage de Mme Marie-Christine Blandin, présidente de votre commission, la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) a également défendu la nécessité de mettre en oeuvre une nouvelle politique de promotion de l'égalité hommes/femmes dans la culture et le spectacle vivant. Elle a précisé que :

- 81,5 % des postes dirigeants de l'administration culturelle sont occupés par des hommes ;

- 75 % des théâtres nationaux sont dirigés par des hommes ;

- 96 % des opéras sont dirigés par des hommes ;

- 70 % des centres chorégraphiques nationaux sont dirigés par des hommes ;

- 85 % des centres dramatiques nationaux sont dirigés par des hommes ;

- 95 % des concerts sont dirigés par des hommes.

Votre commission adhère aux trois objectifs évoqués à cette occasion :

- systématiser le recensement statistique des inégalités ;

- sensibiliser les publics, les élus et les responsables d'administration à la nécessité de faire évoluer cette situation ;

- promouvoir l'égalité hommes/femmes, cet objectif devant figurer dans les circulaires et décrets qui fixent la politique culturelle ainsi que dans les cahiers des charges qui dressent les obligations et engagements des lieux subventionnés. De la même manière, la composition des jurys et des comités d'experts doit permettre la revalorisation de la place des femmes.

Votre rapporteure a interrogé récemment le ministère sur ses intentions dans ce domaine : il semble se mobiliser et il est en réflexion sur les outils à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés par la ministre en vue d'assurer à terme une parité effective . En effet, en 2012, l'Inspection générale des affaires culturelles a été chargée de coordonner la mise en place d'un dispositif permanent de suivi de cette question au sein du ministère. A cette fin, la direction générale de la création artistique (DGCA) s'est engagée à encadrer, à partir de l'automne 2012, un premier état des lieux exhaustif de la situation. Ce système d'information alimentera un comité ad hoc chargé d'établir annuellement le bilan des évolutions . Il devrait porter sur les données suivantes :

- l'encadrement des établissements culturels dépendant de l'État ;

- la nomination des directeurs ;

- la composition des conseils d'administration ;

- la programmation, afin notamment d'analyser le genre des artistes programmés dans les établissements publics et les labels (auteurs et metteurs en scène, chorégraphes, chefs d'orchestre) ;

- le repérage d'un « vivier » des artistes femmes ayant candidaté et n'ayant pas été retenues.

Votre commission soutient cette démarche. Elle veillera à ce que la loi d'orientation sur le spectacle vivant encourage bien la parité et la diversité dans les recrutements aux postes de responsabilité des établissements subventionnés par l'État. Elle souhaite que les collectivités territoriales soient également sensibilisées à cette question , puisqu'elles participent aux décisions de nomination de nombreuses structures cofinancées.

3. Focus sur les festivals : victimes de leur succès ?
a) Une irrigation croissante des territoires

Un festival est un ensemble de représentations qui revient de façon périodique avec une programmation identifiée. Ce terme désigne cependant une réalité extrêmement diverse : un festival peut durer un week-end ou durer plusieurs semaines, s'ancrer dans un lieu unique ou démultiplier ses lieux d'accueil, être thématique ou pluridisciplinaire. En outre, objectifs, taille, moyens, publics sont très divers. Une certitude : la France est au premier rang pour le nombre et la variété des propositions festivalières.

Cet engouement pour les festivals, souvent encouragé par les élus, contribue fortement à la démocratisation, l'animation et l'attractivité culturelles des territoires. En outre, ils participent à l'émergence de nouveaux talents. Une étude, présentée par la Sacem le 25 octobre 2012, évalue à 65 % des 34 groupes ou artistes émergents français observés, ceux ayant vu leurs droits d'auteur augmenter après leur passage en festivals.

Le public s'y déplace de plus en plus, y compris pour des raisons économiques : dans le domaine musical, où ils sont les plus nombreux, ils permettent de voir beaucoup d'artistes pour un prix global moins élevé que de multiplier les concerts dans l'année.

b) Parallèlement, une érosion des financements

- L'évolution des crédits budgétaires spécifiquement dédiés aux festivals connaît une lente érosion depuis dix ans, avec une diminution globale de 1,4 million d'euros.

Comme le montre le tableau suivant, en faisant abstraction de l'année 2003, année de la crise dite des intermittents du spectacle, qui a entraîné la mobilisation d'aides exceptionnelles aux nombreux festivals contraints à l'annulation, on constate le maintien des crédits jusqu'en 2007, puis leur diminution régulière jusqu'en 2010.

ÉVOLUTION DU SOUTIEN DES FESTIVALS
PAR LE MINISTÈRE DE LA CULTURE
SUR 10 ANS

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Nombre de festivals subventionnés

376

413

342

319

317

303

240

235

201

202

Subvention État
(en milliers d'euros)

19 361

26 109

19 047

20 131

20 591

19 684

18 939

18 533

17 782

17 950

Source : ministère de la culture et de la communication

Parallèlement, le nombre de festivals soutenus a presque diminué de moitié, dans des proportions donc beaucoup plus importantes que les crédits. En voici l'explication : le recul du nombre de festivals aidés a concerné très largement des festivals bénéficiant de subventions de moindre importance, inférieures à 10 000 euros, alors que les festivals les plus fortement soutenus ne voyaient pas leur subvention entamée.

Les écarts de subventions sont en effet très importants : de 3 000 euros à plus de 3 millions d'euros par festival. En 2011, les deux festivals les plus soutenus par le ministère (Avignon et Aix-en-Provence) représentent à eux seuls près de 40 % du total des crédits consacrés aux festivals.

- Cependant, au-delà de ces crédits dédiés, une part non négligeable du soutien aux festivals est assurée par le financement des labels et réseaux du spectacle vivant. En effet, de nombreuses structures soutenues à ce titre (centres dramatiques, scènes nationales, etc.) sont elles-mêmes organisatrices de festivals souvent reconnus, dont le financement est intégré à leur subvention globale.

Le ministère organise son soutien aux festivals autour d'objectifs liés à l'exigence des projets artistiques, à l'irrigation territoriale, à l'accompagnement d'artistes en développement et à la conquête de nouveaux publics.

c) Vers un label d'accessibilité aux handicapés

Le ministère a confié à trois festivals le soin de réfléchir, en 2013, à un futur label d'accessibilité des handicapés à des événements culturels non rattachés à des salles. Le festival « Au foin de la Rue » représentera les festivals en milieu rural, les « Francofolies » de La Rochelle, les festivals en milieu urbain, et « Chalon dans la Rue », les manifestations d'arts de rue.

Votre rapporteure soutient cette démarche, le label d'accessibilité n'existant pas encore dans le milieu culturel.

4. Un observatoire national du spectacle vivant à finaliser

La création d'un observatoire national permettra de nourrir l'évaluation des politiques publiques mais aussi les processus de prise de décision stratégiques. Nous l'appelons de nos voeux depuis plusieurs années.

Où en est le dossier ?

La plate-forme d'observation (PFO), instance nationale de concertation sur l'observation du spectacle vivant, a sollicité depuis 2009 l'ensemble des collectivités publiques, organisations professionnelles, sociétés d'auteurs et structures perceptrices de la taxe sur la billetterie. Son objectif est de dégager un cahier des charges dans la perspective de l'installation d'un observatoire national, en mutualisant les procédures existantes d'une part, et en développant de nouvelles bases d'information, d'autre part.

Ses travaux pour 2012-2013 s'articulent autour de cinq axes :

- assurer une réelle représentation des collectivités territoriales ;

- installer un outil de remontée de données fiables sur la fréquentation du spectacle vivant via l'analyse de la faisabilité d'un système fondé sur la centralisation de billetteries ;

- avancer sur la mise en place d'une « centrale de bilans » ;

- constituer un tableau de bord de dix indicateurs synthétiques sur le spectacle vivant (nombre d'entreprises, d'employeurs, de salariés, chiffre d'affaires, financement public et privé, nombre d'entrées payantes et gratuites, d'individus spectateurs, de spectacles, de représentations) ;

- étudier les financements culturels publics dans cinq régions, via cinq états des lieux détaillés et totalement comparables, afin d'améliorer la lecture nationale du financement public du spectacle.

Quels sont les résultats attendus de cette démarche ?

- une carte des labels et des interventions de l'État et des collectivités redessinée ;

- une meilleure observation des logiques du spectacle vivant, une appréhension du secteur comme une filière économique à part entière ;

- la mise en place des instances régionales de régulation et de coordination ;

- des engagements réciproques entre structures et collectivités publiques ;

- des spectacles mieux exploités et rencontrant un plus large public ;

- des crédits davantage consacrés à favoriser l'émergence des talents et l'épanouissement de la création.

Votre rapporteure forme le voeu que ce processus, essentiel tant pour les pouvoirs publics que pour les professionnels, aboutisse dans les meilleurs délais .

5. Les musiques actuelles : un secteur à conforter

Relativement récemment arrivées dans le paysage du spectacle vivant, les musiques actuelles représentent une pratique plébiscitée par nos concitoyens.

L'action du ministère conduisant à mieux définir le cadre des actions de diffusion portées par les salles de spectacles a trouvé une illustration particulière dans ce secteur qui appelait, plus que tout autre, un effort de clarification.

L'élaboration du texte relatif au label scènes de musiques actuelles (SMAC) et du schéma d'orientation des lieux musicaux (SOLIMA) permettra de mettre en oeuvre le Plan pour des politiques territoriales concertées en faveur des musiques actuelles préconisé par le conseil supérieur des musiques actuelles en 2006. Le réseau des SMAC relève prioritairement des collectivités territoriales mais a été soutenu par le ministère à hauteur de 9,1 millions d'euros en 2011, soit 45 % des aides que l'État apporte aux musiques actuelles, représentant environ 15 à 20 % des aides publiques dont bénéficient ces structures.

Ce secteur est néanmoins fragile, en particulier le tissu des très petites entreprises. Votre rapporteure demandera à la ministre quelles mesures d'urgence pourraient leur être allouées en 2013, dans l'attente des décisions structurelles de financement extrabudgétaires , évoquées ci-dessus.

6. Les arts de la rue : l'avenir d'une jeune filière

Après une première phase concentrée, dans les années 1990, autour des festivals et des compagnies, le « Temps des arts de la rue », initié en 2005, a permis de franchir une étape essentielle dans la structuration de la profession.

Aujourd'hui, le paysage des arts de la rue se compose d'environ 1 000 équipes artistiques, dont une trentaine conventionnées par l'État et une cinquantaine aidées annuellement sur des projets, neuf centres nationaux des arts de la rue (CNAR) et un centre national de création dirigé par un artiste, une école de formation professionnelle, une trentaine de lieux de fabrique et autant de festivals, dont certains, comme celui d'Aurillac ou de Chalon-sur-Saône, ont une renommée internationale.

En 2010, les neuf centres nationaux des arts de la rue (CNAR) ont bénéficié d'un nouveau label. Leurs principales missions sont la production et la diffusion, notamment au-delà des périodes de festival. Les dispositifs de soutien à la création ont été renforcés par une aide spécifique à l'écriture.

Dans les prochaines années, le ministère devrait porter son action sur trois axes :

- renforcer et compléter le réseau des CNAR, avec une attention particulière à l'équilibre territorial (dans le nord-est notamment). Une aide spécifique de résidence itinérante et territoriale sera mise à l'étude ;

- favoriser la présence artistique sur les territoires par des dispositifs d'aide à la résidence ;

- instituer un Conseil national des arts et de la culture dans l'espace public, sous la tutelle du ministère et réunissant collectivités territoriales et professionnels.

7. L'application du droit communautaire : quid du « Paquet Almunia » ?

Au premier semestre 2012, votre commission a créé un groupe de travail sur « l'influence du droit communautaire sur le financement des services culturels par les collectivités territoriales », à la suite de l'adoption, le 20 décembre 2011, de nouvelles règles communautaires contenues dans le « Paquet Almunia ». Il a été initié et présidé par notre collègue Vincent Éblé et votre rapporteure en était membre.

Il est utile d'en rappeler les principales conclusions 3 ( * ) .

La grande complexité du corpus juridique concerné est une source majeure d'insécurité. Craignant des contentieux, les services juridiques des collectivités et les élus ont souvent adopté une attitude de prudence, voire de frilosité. Les pratiques ont donc évolué, avec une sorte d'autocensure à l'égard des subventions, au bénéfice de la passation de marchés publics. Or l'essentiel des projets culturels et artistiques initiés et menés par des associations ne relèvent pas de la commande publique ; ces structures sont d'ailleurs peu outillées pour y répondre.

La procédure utilisée pour vérifier la compatibilité des aides publiques avec le droit communautaire est celle de la notification préalable auprès de la Commission européenne, obligation à laquelle est soumise toute aide au-delà d'un certain seuil de subvention. Sont désormais exemptées de notification :

- les aides inférieures au seuil de minimis applicable aux services culturels, considérés comme des services d'intérêt économique général (SIEG) ; ce seuil est passé de 200 000 à 500 000 euros sur trois ans. En revanche, le droit communautaire n'a pas prévu d'exemption pour les services publics culturels, les demandes en ce sens de la France, et de six autres pays, n'ayant pas été entendues ;

- les aides qualifiées de « compensation de service public » d'un montant supérieur à 500 000 euros sur trois ans, mais inférieur à 15 millions d'euros par an, à condition de satisfaire aux conditions requises.

Voici les principales recommandations du groupe de travail :

- un effort d'information et de pédagogie à l'égard des élus, de leurs services et des acteurs culturels est indispensable. Il convient de respecter le cadre légal - mais sans sur-appliquer le droit - et de profiter des facilités offertes par la législation. Il faudrait appliquer, au cas par cas, une sorte de principe de proportionnalité consistant à ne retenir que la procédure juridique adaptée à la réalité des exigences.

A cet égard, rappelons que la subvention est tout à fait légale à condition de respecter les formes : une convention entre la collectivité et l'opérateur suffit le plus souvent, à condition qu'elle définisse missions et objectifs, et qu'elle justifie le montant de la subvention. Les subventions d'importance méritent bien entendu une analyse plus fine du montant de la compensation ;

- il serait souhaitable d'identifier les cas qui dépasseraient le seuil et justifieraient une notification du régime d'aide ;

- par ailleurs, État, élus et professionnels doivent se mobiliser pour obtenir des autorités européennes l'incorporation de secteurs culturels dans un règlement général d'exemption. Une action d'influence doit donc être développée, à l'instar de celle engagée avec succès en faveur des services sociaux.

Il faut se féliciter que la commission des affaires européennes du Sénat ait relayé ce message.

La Commission européenne a publié, le 8 mai 2012, une communication relative à la modernisation de la politique de l'Union européenne en matière d'aides d'État, dans laquelle elle a proposé la révision des règlements en vigueur afin de permettre de déclarer compatible a priori d'autres catégories d'aides, parmi lesquelles les aides en faveur de la culture . Elle en a confirmé la teneur à notre collègue Vincent Eblé dans une lettre du 1 er juin 2012, ce dont on peut se réjouir.

Votre rapporteure propose d'interroger la ministre sur la suite donnée à l'ensemble des préconisations du groupe de travail.

II. LES ARTS VISUELS : DES ÉVOLUTIONS PEU ENCOURAGEANTES

Pour la deuxième année consécutive, votre commission présente un avis budgétaire sur les arts visuels.

Comme précédemment, il s'agit d'analyser, au sein du programme « Création » de la mission « Culture », les crédits de l'action 2 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts plastiques ». Toutefois le rapport embrasse un sujet plus large puisqu'il s'attache à analyser les efforts budgétaires consacrés à la photographie, ce qui peut dépasser le cadre strict du programme 131 précité.

La politique publique financée par les crédits de l'action 2 vise à encourager la création contemporaine ainsi que sa diffusion dans toutes les formes de l'expression plastique telles que la peinture, la sculpture, les arts graphiques, la photographie, les métiers d'art, la mode, le design, les nouveaux médias. Elle repose essentiellement sur une politique de commandes et d'acquisitions d'oeuvres et sur un dispositif d'aides directes aux artistes et aux professionnels attribuées par les directions régionales des affaires culturelles (DRAC) ou le Centre national des arts plastiques (CNAP).

Comme l'indique le projet annuel de performances (PAP) pour 2013, l'action de l'État dans le domaine des arts plastiques recouvre cinq activités principales :

- le soutien à la création par l'acquisition et la commande d'oeuvres d'art ;

- la structuration des professions et de l'économie du secteur ;

- le soutien au fonctionnement des institutions de production et de diffusion ;

- les aides à la création et à la diffusion ;

- le soutien en faveur des manufactures nationales et des métiers d'art.

Dans ses réponses au questionnaire budgétaire, le ministère de la culture et de la communication indique quelques évolutions liées à des transferts de crédits, avec une maquette identique à celle de 2012. Sont ainsi signalés :

- 0,16 million d'euros en AE=CP transférés, au sein de l'action 2, depuis l'action 7 du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » au titre de crédits de masse salariale relevant de l'établissement public Cité de la Céramique Sèvres Limoges ;

- 0,08 million d'euros en AE=CP transférés, depuis le programme 180 « Presse » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » en faveur des dépenses pour charge de service public du Centre national des arts plastiques au titre du fonds photo-documentaire ;

- 0,04 million d'euros en AE=CP transférés depuis l'action 2 du programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » pour le soutien aux lieux de diffusion en région.

Les objectifs, indicateurs et sous-indicateurs de performance n'évoluent pas entre 2012 et 2013 (seules deux modifications de périmètre d'indicateurs interviennent pour l'action 1 du programme relative au spectacle vivant).

A. UNE BAISSE DES CRÉDITS DE PAIEMENT PRINCIPALEMENT LIÉE À L'ACHÈVEMENT DES TRAVAUX DU PALAIS DE TOKYO

1. L'évolution des crédits en 2013

AE 2012

AE 2013

Variation AE

CP 2012

CP 2013

Variation CP

131 - CRÉATION

735 664 586 €

751 438 796 €

+ 2,1 %

787 894 586 €

774 898 772 €

- 1,6 %

01. Spectacle vivant

665 233 001 €

678 981 391 €

+ 2,1 %

718 893 001 €

712 515 871 €

- 0,9 %

02. Arts plastiques

70 431 585 €

72 457 405 €

+ 2,9 %

69 001 585 €

62 382 901 €

- 9,6%

Comme l'indique le projet annuel de performances (PAP) pour 2013 dont les chiffres sont repris dans le tableau ci-dessus, le programme 131 « Création » connaît, par rapport à 2012, une hausse de ses autorisations d'engagement (AE) de 2,1 % et une baisse de ses crédits de paiement (CP) de 1,6 %. Au sein du programme 131, l'action 2 relative aux arts plastiques, qui représente 9,6 % du total des crédits de ce programme, suit une évolution similaire, mais plus marquée. En effet, les AE augmentent de 2,025 millions d'euros pour s'établir à 72,45 millions d'euros, soit une hausse de 2,9 %, tandis que les CP diminuent de 6,6 millions pour atteindre 62,38 millions d'euros, soit une baisse de 9,6 %.

a) Un recul des dépenses d'investissement masqué par l'achèvement du Palais de Tokyo

Il est toutefois utile d'examiner l'évolution des crédits de paiement au sein de ces dépenses. L'an passé, votre rapporteur pour avis avait souligné le « phénomène d'aspiration des crédits » par le projet national et parisien du Palais de Tokyo.

Lui étaient ainsi dédiés 71 % des crédits d'investissement en CP en 2011, puis en 2012 (où les crédits s'élevaient alors à 7,85 millions d'euros en AE et 7,55 millions d'euros en CP dont 5,4 pour le Palais de Tokyo et 2,15 millions pour les autres dépenses d'investissement). Or si l'on constate une chute drastique des dépenses d'investissement cette année, puisque les AE s'élèvent à 1,58 million d'euros et les CP à 1,54 million d'euros (soit une baisse de 80 % ), on note toutefois que cela correspond à l'achèvement des travaux du Palais de Tokyo dont la réouverture a bien eu lieu en avril 2012 comme cela était programmé.

On peut donc dire que, hors crédits du Palais de Tokyo, les crédits d'investissement diminuent de 0,61 million d'euros en CP et de 1,87 million d'euros en AE, ce qui représente tout de même une baisse de 28 % pour les CP et de 54 % pour les AE. Les priorités pour 2013 en dépenses d'investissement sont :

- Sèvres-la Cité de la céramique, puisque 0,7 million d'euros en AE et 0,83 million en CP sont prévus au titre des travaux d'entretien et de mise aux normes ;

- le Mobilier national avec 0,89 million en AE et 0,71 million en CP pour la poursuite des études de schéma directeur de rénovation des sites, des travaux de mise aux normes urgents. Le PAP prévoit également 0,23 million en AE=CP pour les acquisitions des pièces d'ameublement.

LE PALAIS DE TOKYO

Le Palais de Tokyo est un centre d'art national.

Le projet de rénovation et d'agrandissement de ce centre a été présenté comme le symbole d'une nouvelle dynamique en faveur de l'art contemporain, visant à :

- mettre en valeur la scène française dans un contexte international ;

- établir un dialogue avec les institutions françaises et étrangères ;

- mettre en oeuvre des partenariats.

Le Palais de Tokyo a subi une double mutation :

- celle de la structure : une société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU), a été créée en juillet 2011, absorbant l'association « Palais de Tokyo - Site de création contemporaine ». La formule de l'établissement public n'a pas été retenue, afin, selon le ministère de la culture, d'offrir une certaine souplesse et d'adresser un signal fort aux acteurs du marché de l'art contemporain désireux de voir naître en France une dynamique similaire à celle existant à l'étranger.

L'objectif est donc d'associer les efforts de tous les acteurs, privés et publics, autour d'un projet dédié à l'art d'aujourd'hui.

- celle de la politique de diffusion : la politique de diffusion doit permettre de valoriser la scène française tout au long de la carrière en offrant un lieu d'exposition supplémentaire et ciblé sur les artistes qui ne bénéficient pas de la promotion offerte à la sortie des écoles d'art ou aux artistes confirmés. Le ministère de la culture a ainsi souhaité « mieux accompagner les artistes sur un segment, entre émergence et confirmation, que nous valorisons mal ».

Le chantier a abouti en avril 2012 comme cela était initialement prévu, la surface de l'établissement passant ainsi de 8 000 à 22 000 m 2 . 20 millions d'euros ont été attribués au titre des travaux.

Le budget de fonctionnement s'élève à 11 millions d'euros. La masse salariale représente 39 % du budget (62 ETP permanents et de nombreux CDD notamment pour la médiation), les moyens généraux et la communication représentent 32 % du budget et la programmation culturelle et l'action culturelle 29 %.

Le Palais de Tokyo a bénéficié d'une subvention de 6 millions d'euros dès 2012, qui est reconduite en 2013 dans le projet de loi de finances.

Il a accueilli en 2012 la « Triennale » manifestation initiée par le ministère de la culture et de la communication (direction générale de la création artistique), ayant pour but de présenter un état de la création dans le domaine des arts visuels au public le plus large. 204 640 visiteurs ont ainsi pu être accueillis pour cette manifestation qui s'est tenue du 19 avril au 26 août 2012.

Source : commission de la culture du Sénat à partir des informations fournies par le ministère de la culture dans ses réponses au questionnaire budgétaire.

Votre rapporteur regrette que ce projet, devant symboliser la dynamique de la création contemporaine au niveau national, n'ait pas débouché, dès sa réouverture, sur une dynamique avec les territoires.

S'agissant de son lien avec les établissements en région , la lettre de mission du président en date du 10 mai 2012 prévoit que le Palais de Tokyo, constituant une référence emblématique en France et en Europe, s'attachera à travailler en étroite collaboration avec les réseaux institutionnels et professionnels de l'art contemporain et accordera une place significative dans sa programmation aux collections publiques nationales et régionales, en association régulière et suivie avec les Fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) et les centres d'art . Auditionnés par votre rapporteur, les représentants du CIPAC, fédération des professionnels de l'art contemporain (dont les dirigeants de l'association des FRAC et de l'association de développement des centres d'art), ont pourtant regretté :

- que les 30 ans des FRAC n'aient pu avoir lieu au Palais de Tokyo (qui demandait un financement de l'événement dont le coût dépassait la subvention de 315 000 euros accordée par le ministère de la culture) ;

- qu'aucune dynamique ni aucun partenariat n'existe actuellement entre le Palais de Tokyo et les structures territoriales d'art contemporain.

Interrogés à ce sujet par une délégation de votre commission en visite sur place, les responsables du Palais de Tokyo ont mis en avant le calendrier extrêmement chargé du centre d'art dont la programmation des premiers mois de réouverture avait été arrêtée par le précédent gouvernement. Votre rapporteur encourage l'État, actionnaire de la SAS du Palais de Tokyo, à mieux respecter cet objectif et à mettre en oeuvre dans les plus brefs délais toutes les mesures appropriées pour que soient valorisées les dynamiques entre Paris et les territoires en matière d'art contemporain .

b) Les dépenses d'intervention : un effort en période de repli budgétaire

Les dépenses d'intervention représentent comme chaque année le principal poste de l'action 2. Elles s'élèvent, dans le PLF pour 2013, à 54,41 millions d'euros en AE et à 44,38 millions d'euros en CP. En 2012, ces montants étaient respectivement de 44,9 et de 43,66 millions d'euros. Les AE connaissent donc une hausse de 21,4 % et les CP de 1,6 % .

Ils se décomposent comme suit :

- 19,36 millions de crédits centraux en AE=CP dont 2,2 millions d'euros de crédits d'investissement principalement dédiés à la commande publique, et 17,23 millions d'euros de crédits de fonctionnement destinés :

• à la structuration des professions et de l'économie du secteur (près de 4,5 millions d'euros dont 4 millions inscrits au titre de la compensation à l'ACOSS de la baisse du taux de contribution des commerces en art au régime de protection des artistes auteurs, le reste étant destinés aux organisations professionnelles telles que l'association des FRAC « Platform » ou l'association de développement des centres d'art) ;

• aux aides à la création et à la diffusion (1,93 million d'euros en AE=CP qui doivent soutenir des associations, salons, manifestation) ;

• au soutien aux lieux de création et de diffusion pour 6,7 millions d'euros (dont 6 sont prévus pour le fonctionnement du Palais de Tokyo et 0,760 pour les métiers d'art) ;

• aux crédits de fonctionnement du Jeu de Paume, ce dernier n'étant pas encore transformé en opérateur (un peu plus de 4 millions d'euros).

- 34,96 millions d'euros en AE et 24,93 millions d'euros en CP de crédits déconcentrés . Au sein de cette catégorie les crédits de fonctionnement (17,5 millions d'euros en AE=CP) sont stables, tandis que la hausse provient des crédits d'investissement (17,47 millions d'euros en AE et 7,47 millions d'euros en CP) dont la forte hausse des AE ( près de 90 %) répond surtout aux besoins de financement de l'extension de la collection Lambert en Avignon , qui mobilisera 8 millions d'euros. L'agrandissement des locaux de cette collection doit permettre la présentation permanente de la donation « exceptionnelle » faite par Yvon Lambert à l'État en 2012. Votre rapporteur note qu'une fois de plus les efforts sont très concentrés, même s'il ne s'agit plus d'une structure parisienne.

Les autres crédits déconcentrés sont destinés au financement des 22 FRAC (fonds régionaux d'art contemporain) et des 47 centres d'art. Ils doivent permettre de poursuivre des travaux des FRAC dits de « nouvelle génération ».

Les 22 FRAC ont pour mission de soutenir la création par la constitution d'une collection et la production d'oeuvres et d'en assurer la diffusion auprès du public le plus large. Trois objectifs sont ainsi visés :

- la constitution de collections d'art contemporain en région et le soutien à la création vivante par l'acquisition et la commande d'oeuvres d'art ;

- la diffusion de la collection par une politique d'expositions et de prêts ;

- la sensibilisation du public aux formes contemporaines des arts plastiques.

Comme le note le ministère de la culture dans sa réponse au questionnaire budgétaire, c'est au milieu des années 1990 que les FRAC se dotent progressivement d'espaces plus propices à l'exercice de leurs missions. Mais, c'est la construction en 2000 d'un bâtiment pensé spécifiquement pour l'activité du FRAC des Pays de la Loire à Carquefou, qui a ouvert la voie aux FRAC dits de « nouvelle génération » .

Cinq chantiers sont en cours dans le Centre, en Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Franche-Comté, Nord-Pas-de-Calais et Aquitaine et le nouveau FRAC Bretagne a été inauguré en 2012. Ces nouveaux bâtiments prévoient des surfaces d'exposition, des espaces consacrés à la médiation culturelle et à l'accueil du public, à la documentation, aux rencontres et des réserves répondant aux normes internationales de gestion et conservation.

Avec ces bâtiments, les FRAC doivent être mieux à même de contribuer, au côté des centres d'art et des écoles d'art notamment, à l'animation du réseau de diffusion de l'art contemporain en région et d'attirer de nouveaux publics.

Le développement de ces nouveaux lieux s'accompagne d'un renforcement de leurs équipes , notamment sur les postes de médiation et d'accueil des publics. En 2008, un FRAC comptait en moyenne 7,5 agents et 9,26 agents en 2011. Le format des équipes des futures structures remises à niveau se situera plutôt autour de quinze agents .

Les FRAC développent aussi des initiatives internationales (cas des FRAC Champagne-Ardennes, Lorraine, Bourgogne, Franche-Comté et Alsace) qui exposent depuis 2001 leurs collections en Italie, Allemagne, Pologne et Grande-Bretagne. Le FRAC Centre, spécialisé dans l'architecture, a présenté en 2008 sa collection à Taiwan (100 000 visiteurs).

L'association Platform qui regroupe les FRAC depuis 2005 s'efforce de renforcer la diffusion de leurs collections et constitue un centre de ressources et d'information. Elle a notamment largement oeuvré pour l'organisation d'une exposition au CNAC (Centre national d'art et de Culture) Georges Pompidou inaugurée le 4 septembre 2012 pour fêter les 30 ans de ces institutions d'art contemporain créées dans le cadre de la politique de décentralisation de 1982.

LES FRAC ET LES CENTRES D'ART EN CHIFFRES

Il existe :

- 22 FRAC co-financés par l'État aux côtés des régions, auxquels il faut ajouter le FRAC Corse qui ne reçoit pas de subvention du ministère de la culture ;

- 47 centres d'art conventionnés (hors centres d'art nationaux comme le Palais de Tokyo et le Jeu de Paume) selon les critères définis par la circulaire du ministère de la culture relative aux centres d'art en date du 9 mars 2011, qui prévoit désormais des conventions pluri-annuelles d'objectifs. Selon l'association de développement des centres d'art, le réseau est en fait plus large et compte une centaine de structures réparties sur le territoire, la cinquantaine de centres supplémentaires étant des associations guidés par les mêmes objectifs et financés par des subventions locales. Ce dernier élément vient donc certainement compenser le déséquilibre géographique d'implantation des 47 centres d'art conventionnés puisque 60 % des départements métropolitains en sont dépourvus. Le périmètre inclut la ferme du Buisson (Noisiel), le parvis (Tarbes), le carré (Château-Gonthier) et le confort moderne (Poitiers), à la fois scènes nationales ou scène de musique actuelle et centres d'art. Il inclut également la Villa Arson à Nice à la fois école supérieure d'art et centre d'art.

L'institut d'art contemporain (IAC) à Villeurbanne, les abattoirs à Toulouse et le plateau à Paris, à la fois FRAC et centre d'art sont désormais exclusivement pris en compte au titre de FRAC pour une meilleure lisibilité de l'action publique.

Les moyens humains dont disposent FRAC et centres d'art font apparaître une grande hétérogénéité : le nombre moyens d'agents pour les FRAC est de 9,26 agents en 2011, mais varie de 1,5 ETP à la Réunion à 14,2 ETP en Rhônes-Alpes. La moyenne pour les centres d'art est de 5,28 agents, ce qui prend en compte des réalités très diverses allant de 1,5 ETP (centre d'art photographique de Niort) à 20,21 ETP (collection Lambert en Avignon).

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication, à partir des informations transmises par le ministère de la culture et de la communication.

Les tableaux suivants mettent en évidence l'activité et l'impact des FRAC et des centres d'art (Source : ministère de la culture et de la communication, réponse au questionnaire budgétaire) :

Pour les FRAC

(Chiffres pour 2012 non communiqués car la saison est en cours)

Périmètre 22 FRAC*

2008

2009

2010

2011

Nombre d'expositions **

490

474

477

540

Fréquentation*** (en visiteurs)

1 276 443

1 143 000

1 226 603

929 131

Prix moyen payé par le visiteur pour les expositions ****

0,41 €

0,41 €

0,41 €

0,41 €

Subvention (programmes 131 et 224) hors acquisitions

4,9 M€

5,5 M€

5,9 M€

6,3 M€

Coût pour l'État par visiteur

3,8 €

4,8 €

4,8 €

6,7 €

* Hors FRAC Réunion en 2008 (temporairement fermé).

** Expositions dans les murs et hors les murs (hors expositions internationales qui réalisent en moyenne 115 000 visiteurs par an).

*** Fréquentation des expositions et des autres événements (colloques, conférences, ateliers.....).

**** 3 FRAC seulement sont payants (le FRAC Limousin et Rhône-Alpes et Midi-Pyrénées).

Pour les centres d'art

(Chiffres pour 2012 non communiqués car saison en cours)

2008

2009

2010

2011

Nombre d'expositions

380 + événements

375 + événements

380 + événements

326 + événements

Fréquentation*

835 568

771 990

793 574

801 280

Prix moyen payé par le visiteur pour les expositions

0,46 €

0,46 €

0,46 €

0,54 €

Subvention programmes 131 et 224

5,94 M€ 53 centres d'art

5,75 M€ 50 centres d'art

5,88 M€ 50 centres d'art

5,77 M€ 47 centres d'art

Coût pour l'État du visiteur

7,1 €

7,4 €

7,5 €

7,2 €

Hors centres d'art nationaux et hors IAC, Abattoirs et Plateau déjà comptabilisés en tant que FRAC.

* fréquentation des expositions et des événements (colloques, séminaires, ateliers...), hors international

Votre rapporteur souhaite ici souligner que la baisse d'un montant total de 400 000 euros en faveur des centres d'art dans le PLF pour 2013 correspond en fait à la diminution du nombre des centres d'art identifiés au sens du décret précité du 9 mars 2011, que l'on observe d'ailleurs dans le tableau ci-dessus. Les sommes correspondant aux autres centres ont été transférées sur les crédits centraux d'après le ministère de la culture.

c) Les dépenses de fonctionnement : le poids des choix budgétaires

Les crédits de fonctionnement de l'action 2 s'établissent à 11,06 millions d'euros en AE=CP contre 17,8 millions en 2012 (soit une baisse de 38 %) . Comme l'indique le ministère de la culture, l'effort de maîtrise budgétaire s'applique aux opérateurs des arts plastiques. Les crédits de ces derniers en fonctionnement diminuent de 3 % avec 8,07 millions d'euros en 2013 à périmètre constant avant transferts. Sont ainsi concernés le CNAP (centre national des arts plastiques), le Mobilier national et les manufactures des Gobelins, Beauvais et de la Savonnerie.

Les subventions pour charges de service public ne concernent plus que deux opérateurs : le CNAP (4,55 millions d'euros contre 9,6 millions en 2012) et Sèvres-Cité de la céramique (2,6 millions d'euros contre 2,8 millions d'euros en 2012). En 2012, cette catégorie de dépenses concernait également la RMN-Grand Palais au titre des manifestations telles que Monumenta (pour 1,3 million d'euros). L'arrêt de cette dernière, annoncé par la ministre de la culture à la rentrée 2012, explique l'évolution des crédits même s'il convient de noter un transfert de 1,16 million d'euros vers les crédits d'intervention des sommes précédemment consacrées aux manifestations.

Le budget global des opérateurs a été diminué de 2,5 % ce qui correspond au taux appliqué aux opérateurs les plus solides. En revanche, compte tenu des besoins évoqués depuis les entretiens du monde des arts plastiques, celui du CNAP n'a diminué que de 1 %.

2. Une mise en oeuvre des politiques publiques qui sous-estime certaines priorités du secteur des arts plastiques
a) Un gel en 2012 dramatique pour le secteur des arts plastiques

Le gel de 6 % des crédits en 2012 a représenté un « coup dur » pour tous les acteurs du secteur des arts plastiques. Si ce gel a également concerné le spectacle vivant, force est de constater que les deux secteurs du programme 131 « Création » n'ont pas subi les mêmes conséquences : non seulement le spectacle vivant dispose de 90 % des crédits du programme, mais il a bénéficié d'une mesure de dégel dès le lendemain des élections de juin 2012.

En revanche, la situation n'est toujours pas réglée pour le secteur des arts plastiques. Si une reconstitution de crédits a bien eu lieu à partir des réserves de précaution appliquées aux opérateurs du programme et ce, seulement récemment, le ministère de la culture attendait toujours une décision de dégel de la part du ministère de l'économie et des finances au moment de son audition par votre rapporteur. L'absence d'une telle décision serait une sérieuse source de difficultés étant donné que les crédits des DRAC ont été versés à 100 % au titre de l'année 2012.

Lors de son audition devant votre commission, le 14 novembre 2012, la ministre de la culture a confirmé que le dégel était finalement acquis. Votre rapporteur s'en félicite d'autant que la fragilité financière des acteurs des arts plastiques ne leur permettrait pas de faire face longtemps à ce type de déstabilisation . Comme le soulignaient les représentants du CIPAC, fédération des professionnels des arts plastiques, 6 % ce sont, par exemple, 15 000 euros pour un FRAC comme celui de Languedoc-Roussillon, soit deux postes ETP.

En outre, les professionnels ont souligné les effets préjudiciables croisés de l'annualisation des budgets et de l'application du droit de la concurrence . Ce témoignage illustre les conclusions du groupe de travail sur l'influence du droit communautaire sur le financement des services culturels par les collectivités territoriales, adoptées par votre commission le 4 avril 2012. Ces travaux ont permis de mettre évidence :

- la complexité du droit des aides d'État et de celui de la commande publique ;

- des situations paradoxales oscillant entre deux extrêmes : la non-prise en compte des contraintes par les acteurs, ou, au contraire, un recours croissant aux procédures d'appel d'offres même lorsque cela n'est pas imposé par le droit en vigueur ;

- enfin une déstabilisation des acteurs culturels, et en particulier des associations qui ne sont pas outillées pour répondre aux appels d'offres et ne peuvent segmenter l'analyse de leurs missions pour apprécier les compensations de mission de service public .

Les représentants du CIPAC ont fait part à votre rapporteur de leurs vives inquiétudes à ce sujet, regrettant que certaines DRAC organisent des procédures d'appels à projets pour la réalisation de missions fondamentales de médiation culturelle , excluant ainsi des centres d'art pourtant très compétents mais peu aguerris aux techniques de mise en concurrence. On perçoit ici la dérive qu'induit le recours systématique à cette philosophie du droit de la concurrence qui s'impose en Europe.

Interrogée par votre collègue Vincent Eblé, la ministre de la culture s'est dite tout à fait favorable à la réforme des régimes d'exemption de notification, afin d'y inclure le secteur culturel.

Il est fort à craindre que le secteur des arts plastiques ne soit perçu qu'à travers le seul marché de l'art qui masque clairement une précarisation constante du secteur .

b) Le défi de la structuration professionnelle

L'accompagnement social figure au rang des priorités pour les acteurs des arts plastiques qui rappellent les grandes difficultés rencontrées par des professions très différentes, peu organisées, et dont le régime social ne permet pas aujourd'hui de faire face à la crise économique.

Votre rapporteur rappelle que parmi les quinze mesures en faveur du monde des arts plastiques annoncées par le précédent ministre de la culture, et dont la nouvelle ministre souhaite assurer la continuité, figurent les décisions suivantes :

- la mise en place d'un groupe de travail pour l'élaboration d'une convention collective propre au secteur des arts plastiques ;

- le développement d'une approche globale des questions liées à la rémunération des artistes ;

- la mise en place d'un fonds pour la formation professionnelle continue des artistes auteurs .

Seule cette dernière mesure semble avoir été réellement mise en oeuvre . D'après le PAP pour 2013, la création de ce fonds est en train d'aboutir (ce que les représentants du ministère ont confirmé en audition) et sa gestion serait assurée par l'AFDAS, organisme paritaire collecteur agréé (OPCA). L'objectif est de former entre 6 000 et 7 000 professionnels par an , grâce à une cotisation des artistes auteurs, de leurs diffuseurs (éditeurs, galeries, etc.), et un apport des sociétés d'auteurs (Sacem, ADAGP, SACD) au titre des fonds issus des ressources liées à la copie privée. Ces prélèvements, qui doivent être effectifs à compter du 1 er juillet 2012, ont été définis par l'article 89 4 ( * ) de la loi de finances rectificative pour 2011 du 28 décembre 2011. Le décret relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie et au financement de l'action sociale des artistes auteurs vient ainsi d'être examiné par la section sociale du Conseil d'État, d'après les informations transmises par le ministère de la culture.

Les autres annonces n'ont pas été encore suivies d'effet et surtout, à la faveur des auditions budgétaires, votre rapporteur a eu l'occasion de prendre la mesure d'une situation paradoxale :

- d'un côté, le ministère de la culture met en avant sa contribution « à l'amélioration des conditions d'exercice des professions artistiques » et indique qu'il « constitue un partenaire permanent sur toutes les questions relatives à leur situation professionnelle et sociale » ( cf. PAP de la mission « Culture » pour 2013, p. 155). En audition les représentants de la ministre ont indiqué que le ministère soutient totalement les travaux en cours des professionnels ;

- de l'autre, les représentants des professionnels des arts plastiques expliquent que le CIPAC a décidé de s'associer au Syndeac, syndicat national des entreprises artistiques et culturelles, afin de pallier la carence d'initiative du ministère en la matière. Ils ne savent pas clairement quelle est la position de ce dernier.

Enfin, afin d'améliorer la protection sociale des artistes, les représentants du ministère ont indiqué que des contacts avaient été établis avec le ministère du travail pour réfléchir à un regroupement de l'AGESSA et de la Maison des artistes (MDA). Pour votre rapporteur, un tel rapprochement devrait nécessairement associer largement les artistes de la MDA dont les pratiques anciennes (liées arts de la sculpture, peinture, etc.) doivent être prises en compte dans la mesure où elles constituent leur spécificité.

L'AGESSA ET LA MAISON DES ARTISTES

La loi n° 75-1348 du 31 décembre 1975 instaure un régime de sécurité sociale spécifique aux activités de création et permet d'unifier et de simplifier la prise en charge de la protection sociale des artistes auteurs. Deux organismes ont été investis pour gérer ce régime : l'Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs (AGESSA), compétente pour les activités de création littéraire, dramatique, musicale, audiovisuelle, photographique et la Maison des artistes (MDA), compétente pour l'affiliation des auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques.

L'AGESSA est un organisme chargé d'une mission de gestion pour le compte de la sécurité sociale et placé sous la double tutelle du ministère des solidarités, de la santé et de la famille et de celui de la culture et de la communication. Elle sert de passerelle entre les auteurs et les caisses primaires d'assurance maladie pour déterminer les conditions d'affiliation au régime de sécurité sociale des artistes auteurs et faire bénéficier les auteurs affiliés des prestations sociales et de la carte vitale . Elle n'est néanmoins pas une caisse de sécurité sociale et ne verse donc aucune prestation : elle recouvre pour le compte de la sécurité sociale les cotisations et contributions dues sur les rémunérations artistiques . Ces fonds sont transférés journellement à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

La MDA est, comme l'AGESSA, un organisme chargé d'une mission de gestion pour le compte de la sécurité sociale. Mais elle a aussi une mission associative, selon sa vocation d'origine (sa création remonte à 1962), qui vise à favoriser et à animer toutes les actions et réalisations sociales en faveur des artistes des arts graphiques et plastiques. La MDA s'assure du recensement permanent des artistes des arts graphiques et plastiques et des diffuseurs de leurs oeuvres résidant fiscalement en France, des obligations des employeurs en matière d'affiliation à la sécurité sociale pour les artistes dont elle instruit les dossiers, du recouvrement des cotisations et contributions concernant les artistes et les diffuseurs et du secrétariat conjoint avec l'AGESSA d'une commission d'action sociale. Ses missions concernent donc un spectre plus large que l'AGESSA.

Auditionné par votre rapporteur en tant que représentant du SNAP (syndicat national des arts plastiques) de la CGT Culture, M. Gilles Fromonteil est fort d'une expérience en tant que secrétaire général (de 1992 à 2001) puis président (de 2001 à 2011) de la MDA. Ainsi son témoignage a mis en évidence l'important travail de recensement des artistes plasticiens et graphistes qui étaient au nombre de 19 000 en 2001 et de 53 000 en 2011. Le poids de ce secteur, voire de cette « filière » professionnelle, ne permet plus d'éluder la question de la structuration de son champ social.

M. Gilles Fromonteil a insisté sur la priorité que constitue la mise en place d'une convention collective dont les trois objectifs principaux pourraient être les suivants :

- consacrer le droit au revenu des artistes , qui relève de trois sortes : les ventes, les droits d'auteur (dont il faut rappeler le droit de représentation, défini à l'article L. 122-2 du code de la propriété intellectuelle), et les interventions (en milieux scolaires, hospitaliers, etc.) ;

- contractualiser le rapport de la création à la diffusion (aujourd'hui ce rapport pâtit d'une absence d'harmonisation des règles de diffusion entre les territoires, les artistes devant payer la production à certains endroits, la salle d'exposition à d'autres, etc.) ;

- garantir les droits sociaux et les devoirs des artistes.

Votre rapporteur souhaite ici souligner l'importance de la coordination interministérielle dans ce domaine mais aussi dans celui de l'éducation artistique et culturelle (EAC) . Car si le ministère annonce le lancement d'un plan d'éducation artistique et culturelle dans le cadre du programme budgétaire 224, celui-ci n'aura de sens que si le ministère de l'éducation nationale décide enfin de s'impliquer pleinement dans ce projet.

Votre rapporteur se félicite de la nomination de Marie Desplechin à la tête du comité de pilotage national qui regroupe des élus et des personnalités de la culture aux côtés de représentants des deux ministères. Seule une réelle dynamique interministérielle permettra de généraliser l'EAC, dont le ministère estime qu'elle ne touche aujourd'hui que 15 % des élèves. Il faudra enfin ne pas oublier le risque d'une action qui reposerait trop fortement sur les collectivités territoriales, à un moment où elles manquent de moyens.

B. LA PHOTOGRAPHIE : UN SECTEUR TOUJOURS EN QUÊTE D'ACCOMPAGNEMENT DES POUVOIRS PUBLICS

1. Une meilleure traçabilité des crédits qui ne doit pas masquer les lacunes
a) Des crédits mieux identifiés

Votre rapporteur note une meilleure traçabilité des crédits de soutien à la photographie au sein du programme 131. Un total de 6,964 millions d'euros sont ainsi prévus à travers :

- la commande publique (1,157 million) : les crédits consacrés en 2012 par le CNAP aux acquisitions de photographies correspondent à 600 000 euros, attribués par une commission spécialisée au sein du CNAP et dont on peut apprécier la part relative dans le tableau ci-dessous (qui montre la répartition budgétaire pour les acquisitions du centre). Les vingt-deux FRAC consacrent environ 437 000 euros sur leurs crédits d'acquisitions aux oeuvres photographiques. En matière de commande publique une dotation de 120 000 euros est prévue au CNAP en 2012 pour des projets sélectionnés à la suite d'un appel à projets ;

- les centres d'art dont le Jeu de Paume (4,601 millions) : le Jeu de Paume, spécialisé dans la photographie bénéficie d'une subvention de 4,06 millions d'euros en fonctionnement. Les subventions aux six centres d'art en région spécialisés dans la photographie correspondent à 541 000 euros (le centre de la photographie d'Ile-de-France à Pontault-Combault, le centre d'art de Lectoure en Midi Pyrénées, le Point du jour à Cherbourg, le Centre régional de la photographie de Douchy-les-Mines, l'Espace croisé de Roubaix et le centre d'art Pour l'instant à Niort) ;

- les festivals (0,876 million) : les manifestations et festivals spécialisées dans la photographie bénéficient d'un soutien du ministère de la culture et de la communication à hauteur de 876 000 euros, les principaux bénéficiaires étant les rencontres internationales de la photographie d'Arles (543 000 euros en fonctionnement et 50 000 euros en investissement), le festival de photojournalisme Visa pour l'image à Perpignan (129 000 euros) et le Printemps de septembre à Toulouse (200 000 euros). Par ailleurs, la manifestation Paris-Photo est attributaire d'une subvention de 50 000 euros du ministère de la culture et de la communication. En région, les DRAC apportent leur soutien à des expositions, éditions et résidences dans le domaine de la photographie pour un montant évalué à près de 200 000 euros ;

- les aides aux projets (0,330 million) : ces aides sont attribuées par le CNAP pour un montant global de 146 000 euros et par les DRAC sur crédits déconcentrés à hauteur de 106 000 euros. Un fonds pour la photo documentaire, constitué au sein du CNAP, a attribué des aides spécifiques en 2012 pour un montant global de 78 000 euros.

CNAP - RÉPARTITION BUDGÉTAIRE PAR TYPE DE COMMISSION

Chapitre 657-11

ANNEE

BUDGET EN €

Dotation Initiale

ARTS PLASTIQUES

PHOTO

ARTS DECO

Peinture Dessin

Sculptures

3 dimensions

Photo

Estampe

Images animées

2008

3,138 M€

Nbre d'oeuvres : 635

116

2,323 M€

61

55

14

0,601 M€

194

0,214 M€

185

2009

3,110 M€

Nbre d'oeuvres : 539

89

2,573 M€

71

128

12

0,391 M€

96

0,146 M€

143

2010

2,876 M€

Nbre d'oeuvres : 1 238

80

2,149 M€

47

580

7

0,522 M€

67

0,205 M€

457

2011

2,378 M€

Nbre d'oeuvres 401

47

1,639 M€

37

38

8

0,532 M€

70

0,206 M€

201

2012

2 M€*

Nbre d'oeuvres : 186*

6

0,62 M€*

18

13

3

0,6 M€*

50

0,196 M€

96

* au 31 juillet 2012

Source : ministère de la culture - réponse au questionnaire budgétaire

En revanche les actions de soutien dans les autres programmes budgétaires ne sont plus évoquées dans les réponses au questionnaire budgétaire. En audition, le chef de la mission de la photographie du ministère de la culture a évoqué une enveloppe globale comprise entre 12 et 13 millions d'euros, incluant les crédits répartis sur les autres programmes de la mission « Culture ».

b) Le portail Arago

Le portail « Arago » a pour but d'offrir l'accès libre et direct sur Internet à la connaissance de l'ensemble des collections et des fonds de photographies conservés en France . Il est conçu pour être un outil de repérage et de suivi des ce fonds, par delà la simple présentation « d'images ». Sa conception repose sur une approche de l'indexation des photographies présentées, qui soit à la fois homogène quel que soit le détenteur du fonds (musée, archives, bibliothèque, structure privée...) et qui justement puisse renvoyer à une description du fonds auquel elles appartiennent.

Le portail est aussi conçu pour proposer une meilleure connaissance des auteurs, des collections et une meilleure compréhension de « l'objet photographique » . Il s'adresse à tous : aux professionnels et scientifiques à qui il apporte une valeur ajoutée en facilitant la recherche, mais aussi au grand public, dans une logique pédagogique, à des fin de connaissance sur l'histoire de la photographie.

Enfin, « Arago » est une plateforme participative : les détenteurs de fonds ou de collections sont invités à enrichir l'information du portail en remplissant directement en ligne un formulaire descriptif de leurs fonds, par le biais de Wikiconos, une plateforme participative en web 2.0 qui permet aux structures extérieures de renseigner une notice explicitant la nature de leurs fonds et les photographes diffusés. Ce processus devrait permettre l'enrichissement maîtrisé et continu de cette base de données. De plus, il sera accessible aux publics scolaires, ce qui permettra de renforcer les projets d'éducation à l'image. Un comité de pilotage et un comité scientifique sont chargés de l'étude des demandes de mises en ligne et de la sélection des images proposées.

Ce portail a été mis en ligne le 27 mars 2012 avec près de 17 000 images issues essentiellement de fonds déjà numérisés (détenus par la médiathèque du patrimoine et les établissements publics du ministère). « Arago » s'ouvrira ensuite progressivement à d'autres ensembles et fonds, tant publics (établissements publics, collectivités locales), que privés (associations, fondations, fonds d'auteurs, collections).

Une convention pluriannuelle a été signée en 2011 entre le ministère de la culture et de la communication et la Réunion des monuments nationaux . Dans ce cadre, l'État a contribué à hauteur de 450 000 euros à la conception de l'outil informatique en 2011 et participera à son développement à hauteur de 300 000 euros par an pour les quatre années qui suivent, soit une participation de 70,8 % du budget prévisionnel total évalué à 2 330 279 euros.

Les représentants d'agences photographiques privées auditionnés par votre rapporteur ont fait part des craintes suscitées par l'exploitation commerciale des photos du fonds d'Arago par l'agence de photographie de la RMN qui pourrait tirer les prix vers le bas.

Enfin, votre rapporteur insiste sur les moyens nécessaires à l'avenir des fonds photographiques dont il faut assurer la conservation patrimoniale. Cet objectif soulève plusieurs questions : celle des contraintes technologiques qui évoluent - la seule alternative à la mise à jour récurrente des techniques de numérisation étant le stockage sur le cloud américain, celle de l'absence de fonds unique en France, etc.

2. Des priorités qui doivent être rappelées cette année encore
a) Les problématiques évoquées lors des manifestations d'Arles et Perpignan

LES RENCONTRES D'ARLES ET VISA POUR L'IMAGE

Les Rencontres d'Arles

Les Rencontres d'Arles sont un festival estival annuel de photographie fondé en 1970 par le photographe Lucien Clergue, l'écrivain Michel Tournier et l'historien Jean-Maurice Rouquette.

- Mission : à travers plus de soixante expositions installées dans divers lieux patrimoniaux de la ville, les Rencontres d'Arles contribuent à transmettre le patrimoine photographique mondial et se veulent le creuset de la création contemporaine ;

- Fréquentation : lors de l'édition de 2011, le festival a accueilli 84 000 spectateurs . Le programme tire sa richesse de la multiplicité des points de vue d' une vingtaine d'experts d'horizons différents ;

- Budget : environ 5,5 millions d'euros en 2011.

Visa pour l'image

Visa pour l'image est un festival de photojournalisme basé à Perpignan et fondé en 1989 par le journaliste et photographe Jean-François Leroy ; il se déroule depuis lors sur deux semaines du mois de septembre.

- Mission : cette manifestation tente d' apporter au public des clés pour mieux comprendre les événements qui font l'actualité , tout en axant sa programmation autour de trois axes : « la découverte de jeunes talents, la confirmation de photographes confirmés et la redécouverte de gens formidables » ;

- Fréquentation : chaque année, ce sont environ 3 500 professionnels qui font le déplacement ainsi que 260 agences venues de 63 pays . Quant à la trentaine d'expositions , elles enregistrent près de 200 000 entrées par an ;

- Budget : environ 1,05 million d'euros en 2011 (ce qui ne comprend pas la valorisation des aides en nature de la Ville de Perpignan, très engagées aux côtés des organisateurs).

Votre commission a souhaité investir le champ de la photographie qui constitue l'un des sujets du présent avis budgétaire. Deux délégations, conduites par votre présidente, se sont ainsi déplacées cette année : les 6 et 7 juillet à Arles puis les 6 et 7 septembre à Perpignan. Des rencontres ont pu avoir lieu avec de nombreux représentants du secteur, faisant ainsi émerger des thématiques parmi lesquelles figurent :

- les problématiques budgétaires . Certaines ont été réglées depuis, comme la question du financement par l'État du déménagement des locaux de l'École nationale de la photographie de Arles, devenus inadaptés non seulement en raison de l'accroissement de la population étudiante, mais aussi au regard des normes d'accessibilité. En revanche, votre présidente a noté un déséquilibre entre les subventions de l'État versées aux deux festivals. En 2013 elles sont respectivement de 593 000 euros pour Arles et de 129 000 euros pour Perpignan. Si l'histoire et l'ampleur de ces deux manifestations n'étaient pas nécessairement similaires il y a 20 ans, la fréquentation a évolué et l'on note même un accès gratuit à l'ensemble des expositions de Perpignan, quand celles de Arles sont payantes (entre 9 et 12 euros l'entrée).

- le problème de la carte de presse dont les règles d'attribution ne sont plus en phase avec la réalité professionnelle des photojournalistes, puisque la diversification de leurs activités professionnelles (indispensable pour leur survie économique) ne leur permet plus de remplir les critères d'attribution - à tout le moins pas sans rencontrer de sérieuses difficultés.

La commission d'attribution de la carte d'identité des journalistes professionnels (CCIJP) se base sur la définition de l'activité de journaliste donnée par la loi n° 73-4 du 23 novembre 1973 et codifiée ensuite jusqu'en 2008 à l'article L. 761-2 du code du travail : « est journaliste professionnel toute personne qui a pour activité principale, régulière et rétribuée, l'exercice de sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, publications quotidiennes et périodiques, ou agences de presse et qui en tire le principal de ses ressources ».

Par ailleurs la loi du 4 juillet 1974, dite « loi Cressard », a précisé que « toute convention par laquelle une entreprise de presse s'assure, moyennant rémunération, le concours d'un journaliste professionnel, est présumée être un contrat de travail. Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée à la convention par les parties ». Bien que le statut des photojournalistes pigistes soit régi par cette loi, le statut de salariat a été progressivement abandonné, avec la montée des difficultés financières des éditeurs de presse.

Concrètement la commission vérifie si le demandeur de carte de presse tire au moins 50 % de ses revenus de cette activité de journaliste. Le lien employeur-salarié est l'indicateur de référence, ce qui complique la situation, pourtant de plus en plus courante, des journalistes payés en droits d'auteur. Même si une telle situation est prise en compte 5 ( * ) , les demandeurs doivent défendre leur dossier pendant de longs mois, recommençant chaque année la même démarche, ce qui pourrait laisser présumer qu'il n'existe pas de jurisprudence de la commission d'attribution.

Les professionnels ont mentionné une diminution de 7 % par an des photojournalistes en sa possession. 4 % des photojournalistes sont ainsi détenteurs de ladite carte aujourd'hui selon l'Union des photographes professionnels (UPP). Sans revenir sur les critères, il pourrait être utile dans un premier temps de mener une réflexion sur la façon dont est appréhendé le cas des photojournalistes au sein de toutes les demandes de carte de presse, afin de faciliter une vision globale des conditions d'attribution aujourd'hui.

b) Les droits d'auteur : une difficulté toujours d'actualité
(1) La nécessité de poursuivre une meilleure protection juridique des droits d'auteur des photographes

En octobre 2010, le Sénat s'est intéressé à la question des droits d'auteur des photographes en examinant la proposition de loi n° 441 (2009-2010)de votre présidente, Mme Blandin. Ce texte abordait à la fois la question des droits réservés et des oeuvres orphelines.

Il convient de rappeler que la problématique de l'utilisation abusive des « droits réservés » pour la photographie est un véritable enjeu qui va au-delà de la seule problématique des oeuvres visuelles orphelines, incorporant également la reproduction des oeuvres d'art. Elle est aussi liée à la numérisation des oeuvres de l'écrit, qui incorporent des photographies à titre d'illustration.

Les professionnels de la photographie se sont inquiétés de voir de plus en plus de photographies publiées dans la presse (photojournalisme) ou dans des ouvrages avec la mention droits réservés ou DR en lieu et place du nom de l'auteur. Ainsi l'usage de la mention DR sur les photographies tend à se banaliser chez certains éditeurs au mépris des droits d'auteur reconnus par le code de la propriété intellectuelle . Outre le non-respect du droit moral du photographe, la généralisation de ces pratiques tend à priver les photographes d'une juste rémunération de leur travail et contribue ainsi au mouvement de baisse du prix de la photographie.

L'usage des DR recouvre plusieurs cas de figure :

- la photo dite « orpheline » dont l'auteur ou ses ayants droit sont inconnus ou non retrouvés ;

- la photo dont l'auteur souhaite garder l'anonymat ;

- la photo qui circule sur Internet et dont l'auteur est inconnu mais n'a pas posé de restrictions à l'utilisation de sa photo ;

- des fonds ou bases de données photos pour lesquels certains auteurs ou ayants droit sont non identifiés ou non retrouvés et dont les propriétaires de ces fonds peuvent être cessionnaires ou non des droits d'auteur.

La proposition de loi précitée instaurait un dispositif de gestion collective obligatoire par les sociétés d'auteurs pour les droits rattachés aux oeuvres visuelles orphelines, abordant ainsi un sujet plus large que celui des droits réservés. Elle a été débattue et adoptée partiellement par le Sénat en première lecture, à l'unanimité , le 28 octobre 2010. Déposée à nouveau à l'Assemblée nationale le 2 juillet 2012, la proposition de loi n'est pas encore inscrite à l'ordre du jour, ce que regrette votre rapporteur pour avis.

Le ministère de la culture, à l'issue de son audition, a indiqué qu'« il a été convenu avec les professionnels que ce sujet devrait être traité par l'édiction de règles de bonne conduite. Il a été proposé aux professionnels d'examiner cette question dans le cadre de l'observatoire du photojournalisme mis en place en 2011 sous l'égide de F. Hémon, afin de réfléchir à un régime de bonnes pratiques en matière de mentions de l'origine des photos publiées. Mais les organisations professionnelles de photographes et des agences de presse ont préféré que la concertation, associant les représentants des éditeurs, soit menée directement par l'administration. La DGMIC a organisé une série de réunions avec les organisations professionnelles (photographes et agences d'une part et éditeurs de presse d'autre part) et un premier projet de cadre conventionnel de signature des photos de presse a été élaboré sur lequel les éditeurs de presse n'ont pas encore apporté leurs observations. La concertation se poursuit sous l'égide de la DGMIC . »

Enfin, au plan européen, une proposition de directive du Parlement et du Conseil, sur certaines utilisations autorisées des oeuvres orphelines, vient d'être adoptée par le Parlement européen le 13 septembre 2012 . Son champ d'application se limite à autoriser les grandes institutions publiques comme les bibliothèques, les établissements d'enseignement, les musées et les archives à numériser et à exploiter des oeuvres orphelines écrites, cinématographiques ou audiovisuelles.

Les photographies, ou, de manière générale les oeuvres visuelles, ne sont pas en elles-mêmes dans le champ de la directive mais peuvent être concernées par ce projet dès lors qu'elles sont incorporées dans un ouvrage écrit . Ce texte est encore en cours de discussion.

(2) La nécessité de mieux tenir compte du nouveau modèle économique de rémunération des photographes

L'évolution du modèle économique du secteur de la presse, avec l'apparition de l'Internet, a considérablement modifié les modes de rémunération des photographes, notamment des photojournalistes.

Comme le décrit très bien le rapport de 2009 de l'inspection générale des affaires culturelles sur le photojournalisme 6 ( * ) , la crise économique touchant la presse a entraîné la disparition des services de photographie au sein des organismes de presse, et la diminution du nombre de photographes salariés. La rémunération par le paiement des droits d'auteur est ainsi devenue la règle la plus souvent suivie.

Parallèlement, la généralisation du recours aux « microstocks », fonds photographiques proposant des photos pour un prix dérisoire (14 centimes d'euros) constitue évidemment un défi supplémentaire pour les photojournalistes qui y voient une concurrence déloyale et méprisant les règles de la propriété intellectuelle, puisque le nom des auteurs n'y figure généralement pas, des pseudonymes étant souvent utilisés. En outre, le rapprochement entre Getty et l'Agence France-Presse a eu pour effet de tirer les prix vers le bas.

c) Le photojournalisme : une catégorie qui peine à trouver sa place dans les politiques publiques

Votre rapporteur a auditionné les représentants de l'observatoire du photojournalisme ainsi que ceux de l'Union des photographes professionnels (UPP). Tous ont regretté les éléments suivants :

- l'absence de ligne budgétaire dédiée , puisque leur spécificité ne leur permet pas de prétendre aux aides en faveur de la création artistique, ni aux aides en faveur de la presse. « Coincés » entre deux secteurs, ils peinent à trouver une place dans les actions ciblées de l'État ;

- l'absence de prise en compte administrative de la diversification des activités. Auditionnés par votre rapporteur, les représentants de l'observatoire du photojournalisme ont indiqué qu'en diversifiant leurs activités , les professionnels les plus entreprenants parviennent à compenser cette baisse des revenus de la presse. Mais cela les oblige à concilier plusieurs types de revenus (droits d'auteur, aides au financement de projets documentaires, etc.)

L'exemple de Samuel Bollendorff, auditionné avec d'autres membres de l'observatoire du photojournalisme, illustre bien cette évolution du métier car l'intéressé doit chaque année passer plusieurs fois devant la commission d'attribution de la carte de presse afin de justifier de la réalité de son métier de photojournaliste. Confronté au problème de la raréfaction du salariat au sein des organismes de presse, il a développé une activité de réalisation de web-documentaires (devenant ainsi réalisateur). La production de ces documentaires a nécessité de se tourner vers le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) (qui attribue des aides) et vers France Télévisions. A cela s'ajoutent les revenus issus de son activité d'enseignant ou de celle des piges.

Ainsi, comme le montre cet exemple, pour résister économiquement à la baisse des revenus issus de la presse, les photojournalistes les plus avisés ont dû déployer un modèle économique « à 360° » (expression utilisée par l'observatoire du photojournalisme). Comme l'ont indiqué les personnes auditionnées : « En fonction de leur personnalité, de leur situation ou des opportunités, ceux-ci diversifient leur production et surtout cherchent à en élargir la diffusion. En restant dans le domaine de la photographie : production d'images d'entreprises, vente de tirages d'art dans les galeries, animation de stages et workshops, poste de formateurs dans les écoles de photographie ; en produisant des documents audiovisuel traditionnels : reportage et documentaires vidéo ; ou encore en s'engageant sur la voie du transmédia au sein d'équipes de production,» d'objets audiovisuels » destinés à une diffusion sur le web » .

Toutefois ceux-ci se heurtent en permanence à la question de leur statut, face aux interlocuteurs auxquels ils s'adressent : producteurs audiovisuels, galeristes, agences, ONG, éditeurs, institutions d'État. Ils se comportent par ailleurs souvent comme de véritables artisans en autofinançant leur production. Dans la plupart des cas les statuts n'étant pas compatibles entre eux, il leur est parfois difficile de rester dans les stricts cadres règlementaires, soit de profiter des cotisations pourtant versées (indemnités chômage notamment) ;

- un modèle économique en profonde mutation dont les conséquences remettent en cause non seulement la survie d'un secteur d'activité, mais aussi et surtout le maintien du principe démocratique de pluralité des sources d'information.

Votre rapporteur souhaite souligner le danger que représente la concentration des sources d'information et la nécessité de ne pas éluder le problème d'une pluralité des points de vue y compris dans le domaine du photojournalisme.

Parmi les solutions envisageables, les professionnels du secteur ont notamment évoqué l'idée d'assujettir l'attribution d'un numéro d'agrément des organismes de presse d'une obligation à produire un quota de photographie, ce qui mériterait évidemment une réflexion approfondie.

Interrogé par votre rapporteur, le ministère a indiqué avoir engagé une action en faveur de cette profession depuis deux ans avec la commande d'un rapport à l'inspection générale des affaires culturelles, la création de l'observatoire du photojournalisme ou encore le lancement de la concertation évoquée ci-avant avec les professionnels sur la question de l'usage de la mention « droits réservés ». Il ajoute :

« Le ministère entend poursuivre le travail mené en faveur de cette profession qui subit de plein fouet les conséquences d'une mutation profonde du modèle économique de la photographie de presse et de la presse en général, conséquences qui se manifestent souvent par une détérioration des conditions d'exercice de ce métier et l'apparition de nouvelles précarités. L'Observatoire du photojournalisme a lancé, dans son rapport d'étape de mai 2012 rendu public auprès des professionnels, plusieurs pistes de réflexion qui seront étudiées par les services » .

* *

*

Au total, le secteur des arts plastiques, malgré les efforts du ministère de la culture pour en protéger les crédits d'intervention, n'échappe pas au repli budgétaire global, alors que les acteurs de la filière souhaiteraient la sanctuarisation des crédits du ministère dès 2013.

Cela prive ce secteur de toute ambition du développement et des marges de manoeuvre nécessaires, notamment pour faire reculer la précarisation de la filière des métiers et de la création dans les arts plastiques, action dont tous les acteurs soulignent la nécessité.

A titre personnel, votre rapporteur propose, compte tenu de l'ensemble de ces observations, de donner un avis défavorable. Il laisse à votre commission le soin d'apprécier l'état des crédits proposés et inscrits dans l'action 2 du programme « Création » de la mission « Culture ».

* *

*

Après avoir entendu l'ensemble des rapporteurs, la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits inscrits dans la mission « Culture » .

III. LE CINÉMA

A. UN SECTEUR GLOBALEMENT EN CROISSANCE

1. La production cinématographique : un nouveau record historique

En 2011 , l'activité de production de films cinématographiques atteint un nouveau record historique : 272 films ont été agréés, soit 4,2 % de plus qu'en 2010, avec 11 films supplémentaires. Cette augmentation est cependant moins importante qu'entre 2009 et 2010 (+ 13,5 %). Cette augmentation est moins due au nombre de films d'initiative française qui tend à se stabiliser, qu'au nombre de premiers et de deuxièmes films qui augmente à nouveau après un recul en 2010.

Les investissements dans les films agréés accusent une légère baisse (- 3,5 %) et se stabilisent autour de 1,4 milliard d'euros. Néanmoins, les investissements dans les films d'initiative française affichent une augmentation mesurée de 1,4 %. Le nombre de coproductions internationales s'établit à 120 films, soit le plus haut niveau jamais enregistré depuis 1980 et représentent 44,1 % de l'ensemble des films agréés, contre 45,2 % en 2010.

Le nombre de films intégralement financés par la France s'établit à 152 en 2011 (contre 143 films en 2010), soit 73,4 % des films d'initiative française agréés (67,5 % en 2010).

Enfin, le nombre de films à devis dit moyen, compris entre 4 et 7 millions d'euros, a reculé en 2010 tandis que le nombre de ceux aux devis les plus faibles, c'est-à-dire inférieur à 2 millions d'euros, a augmenté. Les films d'initiative française dont le devis est supérieur à 7 millions d'euros recueillent 60 % des financements, pour 25,6 % des titres, soit une stabilisation par rapport à 2010.

Votre rapporteur pour avis relève que la question de l'exposition des films continue de se poser avec beaucoup d'acuité.

2. Le secteur de la distribution : une concentration croissante des acteurs

Le secteur de la distribution comprend un tissu diversifié d'entreprises, dont la concentration continue cependant de s'accroître :

- les dix premières entreprises ont réalisé, comme en 2010, plus de 76 % des encaissements en 2011 . Il s'agit notamment des filiales des entreprises intégrées, celles des majors américaines et des services de télévision ainsi que quelques grosses sociétés indépendantes ;

- les autres distributeurs indépendants sont de taille variable et diffusent majoritairement un cinéma d'auteur et de recherche. Certains d'entre eux sont en situation de fragilité financière.

Entre 2004 et 2010, quasiment tous les postes de distribution connaissent une baisse de leurs dépenses moyennes par film : - 15,9 % pour les frais divers de promotion, - 17,4 % pour les achats d'espaces et - 18,8 % pour les frais de laboratoire. Ces diminutions sont essentiellement dues à la progression d'Internet comme outil de promotion de plus en plus incontournable pour les petites combinaisons de sortie. Le seul poste en progression est celui des dépenses en matériel publicitaire. En moyenne, le coût définitif d'un film d'initiative française s'établit à 6,2 millions d'euros pour les films de 2010, celui de la distribution représentant 9,2 %. Réaffirmée dans le Livre Blanc des Distributeurs indépendants réunis européens (DIRE), actualisé en mars 2012, la tendance à la concentration de l'aval du secteur continue son accentuation avec l'arrivée du numérique dans l'ensemble de la filière.

3. La fréquentation cinématographique : au plus haut niveau depuis 1966
a) Portée par quelques très gros succès, la tendance est à la hausse
(1) Une augmentation importante de la fréquentation de toutes les catégories de publics

La moyenne nationale du nombre annuel d'entrées par spectateur a augmenté de façon linéaire depuis 1993 , passant de 4,6 entrées à 5,4 en 2011 . En 2011, ce sont près de 40 millions de Français âgés de six ans et plus qui sont allés au moins une fois au cinéma . Ce nombre est en hausse de 3,4 % par rapport à 2010. Depuis deux ans, plus des deux tiers des Français vont au cinéma chaque année, contre 61 % dix ans plus tôt et 55,4 % en 1993.

Si les moins de 25 ans constituent la tranche d'âge la plus consommatrice de cinéma (5,5 entrées par an pour les 15-19 ans, 7,7 pour les 20-24 ans), ce sont les seniors qui, pour la première fois en 2011, deviennent la population cinématographique la plus importante (33,6 %). A ce titre, on assiste à un vieillissement général de la population cinématographique (60 % des plus de 50 ans fréquentent les salles de cinéma en 2011) et à une progression du public habitué.

En 2011, le record de 216,63 millions d'entrées (hausse de 5,2 % par rapport à 2010) est établi, niveau jamais observé depuis 1966 !

Néanmoins , selon les dernières estimations de la direction des études, des statistiques et de la prospective du CNC, 160,97 millions d'entrées ont été réalisées au cours des dix premiers mois de l'année 2012, soit 2,4 % de moins qu'au cours de la même période en 2011.

(2) Un accroissement de la part de marché des films français

Après deux années consécutives de recul, la part de marché en recettes du cinéma français en salle s'établit à 40,9 % en 2011 (contre 35,7 % en 2010). Cette hausse est générée par une augmentation importante des entrées pour des films français : 88,63 millions d'entrées soit une progression de 19,6 % par rapport à 2010 et le plus haut niveau depuis 1984. Sur la période janvier-octobre 2012, la tendance est même renforcée avec 42,3 % de part de marché des films français contre 35,8 % sur la même période en 2011.

Même si cette part tient surtout à la performance d'un film, Intouchables (avec 16,6 millions d'entrées), il faut aussi mettre en avant la moindre concentration des entrées, notamment dans le poids des 20, 30, 50 et 100 premiers films. La tendance au tassement de la place du cinéma français observée les années passées est donc à relativiser.

En dépit d'un nombre croissant de films français programmés sur les écrans étrangers (486 titres en 2011, contre 429 en 2010), l'année 2011 se caractérise par un déficit de films en langue française à fort potentiel international (mis à part Intouchables ). Ces films ont réalisé 71,7 millions d'entrées à l'étranger, soit une progression de 20,3 % par rapport à 2010, les recettes aux guichets augmentant encore plus fortement (+ 27,2 %) : ces performances s'expliquent principalement par un regain d'intérêt sur la plupart des territoires majeurs comme les États-Unis et l'Allemagne, tout en masquant les performances modestes des films d'initiative française ainsi que des films en langue originale française.

b) Un parc en croissance mais une attention soutenue à porter aux petites exploitations

5 464 salles sont actives en France en 2011, soit une seule de moins qu'en 2010. Ce solde résulte de la fermeture provisoire ou définitive de 76 écrans et de l'ouverture ou réouverture de 75 écrans. Néanmoins, le nombre d'établissements continue de chuter de façon quasi continue depuis 2002 (2 030 établissements recensés en 2011, contre 2 145 en 2002).

La contraction du nombre d'établissements, que l'on doit corréler à la progression du nombre d'écrans, s'explique essentiellement par le développement des multiplexes (établissements dotés de 8 écrans au moins) : l'expansion de structures déjà existantes et l'implantation de nouvelles forcent des établissements de petite taille, mais aussi désormais de taille moyenne, à fermer. Néanmoins, le parc de salles a su rester stable .

Les investissements en faveur d'une modernisation , concernant la numérisation mais aussi le confort, l'accès, concourent à renforcer l' attractivité du secteur et, par conséquent, la fréquentation.

Il est à noter que la pénétration du cinéma progresse dans les zones les moins densément peuplées : pour la deuxième année consécutive, les zones rurales et les agglomérations de moins de 20 000 habitants contribuent légèrement à l'élargissement de la population cinématographique en 2011. En effet, Paris et les agglomérations de plus de 100 000 habitants ne concentrent plus la majorité des spectateurs depuis quelques années (45 %) même si elles captent toujours la plus grande part des entrées (58,8 %).

Le maillage territorial que forme le réseau des salles de cinéma en France est unique au monde par sa densité et sa vitalité, notamment dans un contexte de crise économique . A ce titre, les statistiques dans le reste de l'Europe et dans le monde sont beaucoup plus mauvaises avec des diminutions de fréquentation de 7,9 % en Italie, de 5,4 % en Espagne et de 4,7 % aux États-Unis.

B. DES MODES DE FINANCEMENT PUBLICS À SÉCURISER

1. Un CNC à conforter et à réconforter !
a) Les priorités pour 2013

Le document stratégique de performance du CNC pour 2013 précise ses priorités pour l'année à venir : il s'agit de la réforme de maillons essentiels à la diffusion des oeuvres, qui n'avaient pas été revus depuis plusieurs années. Seront ainsi revalorisés tant le soutien à la distribution (volets automatique et sélectif) que le soutien automatique à l'exploitation.

Le soutien automatique serait ainsi revalorisé globalement à hauteur de 6 % pour l'ensemble de l'exploitation, à partir du 1 er janvier 2013. Cette réévaluation s'inscrit dans un contexte où le soutien automatique a connu une érosion mécanique, liée au franchissement de paliers de fréquentation par certains opérateurs et à la place prépondérante aujourd'hui occupée par la grande exploitation. Le président du CNC a assuré que cette revalorisation « ne contribuerait pas à accroître les écarts entre petite, moyenne ou grande exploitation » .

Les autres dispositifs de soutien seront, en revanche, mis sous tension, en préservant quelques priorités très ciblées :

- l'éducation à l'image,

- la sauvegarde et la valorisation du patrimoine en région, plate-forme Internet et inventaire,

- le soutien à la création de musique originale pour les oeuvres cinématographiques et audiovisuelles,

- l'aide à l'audio description et au sous-titrage pour favoriser l'accessibilité des oeuvres.

b) Des recettes partiellement en suspens
(1) Des taxes directement affectées

Rappelons que les ressources du CNC sont constituées du produit de taxes affectées, prélevées sur les diffuseurs de films en vue d'alimenter le compte de soutien aux professionnels du secteur.

Leur montant total pour 2013 est estimé à près de 700 millions d'euros . Il ne fait pas l'objet d'écrêtement. Rappelons que les recettes du CNC avaient progressé de 54,6 % en 7 ans, entre 2004 et 2011.

Ces taxes ont été créées et adaptées (dans leur assiette et leur taux) au fur et à mesure des évolutions technologiques et des marchés concernés. Il s'agit de :

- la taxe sur les entrées en salle de cinéma ( TSA ), dont le taux est fixé à 10,72 % du prix d'un billet de cinéma et le produit évalué à 133,2 millions d'euros pour 2013, en baisse de 3,5 % par rapport aux recettes probables de 2012 ;

- les taxes vidéo et vidéo à la demande (VàD) : assises sur le chiffre d'affaires des secteurs de l'édition de vidéo physique et de vidéo à la demande, leur taux est fixé à 2 %. Leur produit est estimé à 30,25 millions d'euros pour 2013, en baisse d'environ 7 % compte tenu du tassement du marché ;

- la taxe sur les services de télévision ( TST ), dont le produit est évalué à 537,2 millions d'euros pour 2013, en recul de 0,33 % par rapport au budget 2012 mais en hausse de 2,5 % par rapport aux recettes réellement attendues.

Elle comporte deux volets :

. le volet « éditeurs » , acquitté par les éditeurs de services de télévision (les chaînes) : le taux de ce volet est fixé à 5,5 % de l'assiette imposable au-delà d'une franchise de 11 millions d'euros. Cette assiette est constituée des recettes de publicité et de parrainage (déduction faite de 4 % pour frais de régie), celles issues des appels surtaxés et SMS, sur la redevance audiovisuelle et, depuis 2009, les autres ressources publiques (notamment les dotations budgétaires). Le produit de la TST à ce titre est estimé à 290,2 millions d'euros pour 2013 ;

. le volet « distributeurs » , qui fait l'objet d'un développement spécifique ci-dessous, le dispositif adopté fin 2012 étant suspendu.

Précisons néanmoins que cette taxe est acquittée par les distributeurs de services de télévision : son taux est progressif, de 0,5 % à 4,5 % selon neuf tranches d'imposition applicables à l'assiette imposable au-delà d'une franchise de 10 millions d'euros. Cette assiette est composée des abonnements et autres sommes acquittées par les usagers en rémunération d'un ou plusieurs services de télévision, ainsi que des abonnements à des offres composites pour un prix forfaitaire incluant des services de télévision, sous réserve d'une déduction de 10 %. Cette dernière est portée à 55 % lorsqu'une offre composite inclut également, pour un prix forfaitaire, un accès à des services de communication au public en ligne ou à des services de téléphonie. Le produit de la TST à ce titre était estimé à 247 millions d'euros pour 2013, en hausse de près de 8 % par rapport aux recettes prévisionnelles pour 2012 (229 millions d'euros).

(2) Une TST distributeurs en suspens

Rappelons que la loi de finances pour 2012 a élargi le champ de la TST distributeurs, allégé et simplifié son barème, en vue de mettre fin à des comportements d'optimisation fiscale tendant à contourner le dispositif. L'objectif était donc de sécuriser cette taxe, tout en modérant son rendement très dynamique.

La loi de finances pour 2012 a prévu que le produit de la TST distributeurs s'élèverait à 300 millions d'euros, dont la part au-delà de 229 millions d'euros devait revenir au budget général de l'État. Pour les opérateurs télécoms, la prévision 2013, quoiqu'en progression, traduit donc bien une modération du rendement de la taxe.

Cette réforme a été notifiée à la Commission européenne mais celle-ci s'interroge sur sa compatibilité avec la directive « autorisation » de 2002 (dite « paquet télécoms »).

Le Gouvernement n'a pas pu trouver d'accord avec la Commission. Alors que le délai de négociation arrivait à échéance le 21 octobre 2012, après deux prorogations, il a donc décidé de retirer , juste avant ce terme, la notification en cours , au lieu d'entrer dans une période d'examen approfondi qui aurait pu bloquer le dossier pendant 18 mois.

Un nouveau texte sera proposé dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2013 puis notifié à la Commission européenne. Mme Aurélie Filippetti a précisé, en octobre 2012, à l'occasion des Rencontres cinématographiques de l'ARP, que « ce texte devra reformuler, dans des termes acceptables par la Commission, une taxe d'assiette neutre fait de haut débit fixe et mobile, calé sur l'activité économique des FAI, avec un abattement tenant compte de la densité audiovisuelle du web. Nous respecterons ainsi les principes du compte de soutien ».

La formulation de la nouvelle taxe doit renforcer le lien avec l'activité audiovisuelle du distributeur et prévoir, à cette fin, un abattement tenant compte de sa densité audiovisuelle. Ce dispositif ne devrait donc pas souffrir du type de contournement subi par la TST distributeurs ancienne formule...

Cette solution a été préférée à celle proposée par Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée au numérique, qui reposait sur un prélèvement forfaitaire sur chaque abonnement, fixe ou mobile, intégrant une offre de télévision.

Votre commission sera donc attentive , l'enjeu pour le fonds de soutien au cinéma, à l'audiovisuel et au multimédia ayant été estimée à 140 millions d'euros en année pleine.

Par ailleurs, votre rapporteur pour avis se réjouit du souhait du Président de la République de mettre la défense de l'exception culturelle à l'Agenda européen. Il nous faut défendre à Bruxelles, avec les autres États membres, un système vertueux d'aides publiques au cinéma.

c) Un prélèvement exceptionnel de 150 millions sur le fonds de roulement

Après une ponction de 20 millions d'euros en 2011 et de 50 millions en 2012, le présent PLF prévoit un prélèvement exceptionnel de 150 millions d'euros sur le fonds de roulement du CNC, qui sera opéré en plusieurs tranches selon un calendrier fixé par décret.

L'objectif est de maitriser ses ressources extrabudgétaires, sans remettre en cause sa capacité de soutien aux secteurs concernés.

Le CNC participera donc à un haut niveau à l'effort de maitrise budgétaire demandé à l'État à ses opérateurs.

Le CNC pourra néanmoins accomplir ses missions en 2013, mais sera sans doute contraint à « réduire la voilure » du plan de numérisation des oeuvres cinématographiques, ce que votre rapporteur pour avis regrette.

d) Des rapports d'audit sévères

Dans son rapport sur les agences de l'État de septembre 2012, l'Inspection générale des finances publiques ( IGF ) s'est ainsi exprimée sur le CNC : « Sans se prononcer sur [son] efficience et sur [sa] politique en faveur de l'industrie cinématographique, la mission considère que le statut atypique du centre, qui cumule à la fois le statut d'établissement public et celui d'administration centrale, crée une situation dans laquelle les grandes orientations de la politique en faveur du cinéma, impulsées par le CNC, ne peuvent être réellement discutées et contre-expertisées au sein de l'État . Dans une telle configuration, où la tutelle n'existe de facto pas, l'efficience de la politique publique ne repose que sur la loyauté des équipes du centre et de ses dirigeants, ce qui n'est pas suffisant. »

Par ailleurs, dans son rapport sur « la gestion et le financement du CNC, exercice 2007 2011 » , demandé par la commission des finances du Sénat et présenté le 3 octobre 2012, la Cour des comptes a critiqué les instruments d'évaluation des actions menées par le CNC ainsi que le système même du financement du CNC. Elle estime que les aides évoluent en fonction des recettes plus que des besoins réels.

Elle souligne « la faiblesse de la démarche d'évaluation conduite par le CNC quant à la performance de ces dispositifs d'aides » , notant que « l'augmentation du nombre de films produits ne saurait constituer le seul critère d'analyse de la réussite du soutien public » .

Le président du CNC a fait remarquer que le CNC s'était engagé dans un « chantier qui reste à approfondir, celui du contrôle de gestion et de la performance de nos aides. » Le CNC a déjà entrepris cette démarche, en élaborant deux documents d'évaluation de son action : le dossier stratégique de performance transmis au Parlement et le rapport d'activité. Le CNC y détaille les mesures sur l'ensemble de ses missions. La Cour des comptes insiste, néanmoins, sur « la cohérence globale des soutiens » , mesurée par « des indicateurs fiables » .

La Cour des comptes recommande notamment le passage d'un dispositif de pilotage autonome par la recette à un pilotage par la dépense , dans le cadre d'une concertation entre l'État et son opérateur.

La Cour relève que le CNC bénéficie, depuis sa création, d'une autonomie à la fois budgétaire et institutionnelle qui le conduit à déterminer le niveau des dépenses en fonction des recettes issues du produit des taxes, un modèle remis en cause par la situation globale actuelle des finances publiques et par l'extension des taxes affectées à des secteurs économiques qui ne présentent plus une proximité aussi immédiate qu'auparavant avec les aidées déployées. Ainsi, sans aller jusqu'à préconiser une intégration dans le budget de l'État des recettes actuelles du CNC et de permettre un fonctionnement sous la forme de subventions, ce qui serait d'ailleurs trop lourd techniquement et juridiquement, la Cour recommande plutôt de privilégier une approche qui aboutirait à la subordination du niveau de la recette à une hiérarchisation préalable et aussi précise que possible des besoins du CNC .

Pour votre rapporteur pour avis, toute réforme devra conforter un dispositif à la fois efficace, cohérent et vertueux de soutien public au cinéma, dont il conviendra en effet d'assurer les moyens d'un meilleur suivi.

2. Les autres sources de financement public
a) Le soutien des régions : un maillon essentiel pour la diversité

Les fonds régionaux d'aide à la production en région n'ont cessé de se développer depuis une dizaine d'années et représentent un élément essentiel du financement du cinéma en France.

Allouées sous forme de subventions et/ou d'avances remboursables, les aides régionales ont représenté 1,7 % du financement des films de long métrage d'initiative française agréés en 2011. Leur part dans le financement des films est plus grande pour les devis inférieurs à 4 millions d'euros ainsi que pour le court métrage et le documentaire. Elles contribuent donc au renouvellement des talents.

En 2011, les collectivités territoriales ont engagé 55,8 millions d'euros dans le cadre de leur politique de soutien à la production cinématographique et audiovisuelle, répartis de la façon suivante : 41 millions d'euros en budget propre et 14,8 millions d'euros en provenance du CNC dans le cadre des conventions de développement cinématographique et audiovisuel. Ce montant a augmenté de 4 % par rapport à 2010, après deux années consécutives de baisse.

Une concurrence s'est néanmoins instaurée entre les régions pour attirer les tournages, avec un risque de marginalisation des collectivités les moins dotées. Cependant, on notera les efforts de certaines collectivités pour mettre en place une coopération infra ou interrégionale, qu'elle soit systématique ou ad hoc pour des projets particuliers.

La généralisation des conventions de développement cinématographique et audiovisuel État-CNC-région a permis une sécurisation juridique des aides ainsi qu'une harmonisation des procédures mises en place par les collectivités, ceci afin d'aider les auteurs et les producteurs dans le processus de dépôt de leurs demandes de soutien.

Enfin, les collectivités territoriales financent quasi intégralement les bureaux d'accueil des tournages (également appelés « commissions du film »), qui offrent aux professionnels une assistance gratuite portant sur de nombreux types de services.

b) Les SOFICA : la nécessité de revenir au PLF initial

Les SOFICA sont des sociétés d'investissement qui collectent des fonds auprès des particuliers pour les investir dans la production. Elles favorisent le financement de la production indépendante, le renouvellement de la création et l'émergence de nouveaux talents en soutenant de manière significative la production française. Ces aides sélectives soutiennent la création d'oeuvres de long métrage (avec l'avance sur recettes, notamment) et permettent notamment d'aider de jeunes réalisateurs.

En 2011, 125 films - soit près de la moitié des films agréés - et 28 programmes audiovisuels ont bénéficié de l'apport des SOFICA. L'enveloppe annuelle globale est de 63 millions d'euros.

La loi de finances pour 2012 a reconduit le dispositif des SOFICA jusqu'en 2014 , dans la mesure où son efficacité a été soulignée par l'Inspection générale des finances dans son rapport de juin 2011 sur l'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, qui lui a attribué une note d'efficience de 2 (sur une échelle de 0 à 3).

Or, en deux ans, les « coups de rabot » ont réduit l'avantage fiscal de 48 % à 36 %, rendant la rentabilité de cet investissement plus risquée que d'autres.

Vient de s'ajouter à cette situation un amendement adopté par nos collègues députés qui n'emporte pas l'adhésion de votre rapporteur pour avis.

De quoi s'agit-il ?

L'article 56 du projet de loi de finances initial proposait de diminuer le niveau du plafonnement global des réductions et crédits d'impôt à caractère incitatif ou liés à un investissement à 10 000 euros et de supprimer la part proportionnelle de 4 %.

Toutefois, il envisageait :

- d'exclure du champ de ce plafonnement global les réductions d'impôt accordées au titre du financement d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles (« SOFICA » ) (ainsi que de la restauration complète d'un immeuble bâti (« Malraux ») ;

- et de maintenir le plafonnement actuellement en vigueur concernant les réductions d'impôt sur le revenu en faveur des investissements outre-mer (dispositif Girardin), soit 18 000 euros plus une part proportionnelle de 4 % du revenu imposable.

Cependant, l'Assemblée nationale a adopté, contre les avis du Gouvernement et de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, un sous-amendement présenté par le rapporteur général de la commission des finances tendant à soumettre les SOFICA à un plafonnement global de 18 000 euros et 4 % du revenu imposable.

Les investissements dans des SOFICA seraient donc traités comme ceux du dispositif Girardin, au risque de faire entrer ces deux dispositifs dans une concurrence peu avantageuse pour les SOFICA.

C'est pourquoi, votre rapporteur pour avis vous propose d'adopter un amendement tendant à revenir au projet de loi de finances initial sur ce point et d'exclure donc les SOFICA du plafonnement des dépenses fiscales, sachant que le montant maximal déductible à ce titre par un contribuable est en tout état de cause fixé à 6 480 euros.

c) Les crédits d'impôt à la production cinématographique : un renforcement en vue

En 2011, le nombre cumulé des jours de tournage pour les films de fiction d'initiative française s'établit à 6 879 jours (soit environ 40 jours par film). Le nombre de jours de tournage en France s'établit quant à lui à 5 002 jours, soit 73 % du total. Toutefois, 70 films d'initiative française, soit 40,5 % des 173 films pris en compte, sont partiellement tournés à l'étranger ; ce choix peut être lié à des exigences d'ordre artistique ou répondre à une logique financière en permettant des économies sur les coûts ou l'accès à des financements locaux au travers de coproduction.

(1) Des crédits d'impôt vertueux mais désormais insuffisants

? Le crédit d'impôt national

Il a bénéficié à plus des deux tiers des films de fiction d'initiative française, permettant une relocalisation des tournages cinématographiques sur le territoire français. Ainsi, les films en bénéficiant réalisent 3,6 % de leurs dépenses à l'étranger en 2011, contre 36,8 % pour les autres. Ce sont ainsi 3,3 milliards d'euros de dépenses totales qui ont été générés entre 2005 et 2011 .

La part de crédit d'impôt dans le coût total d'un film est relativement homogène : il varie entre 8 et 9,6 % pour les films au coût inférieur à 15 millions d'euros, de 6,5 % pour les films dont le coût total dépasse 15 millions d'euros.

Ainsi que votre rapporteur pour avis l'avait exposé l'an dernier, il est désormais nécessaire de renforcer l'attractivité du crédit d'impôt :

- une étude commandée par le CNC en septembre 2010 a démontré le caractère vertueux du dispositif : pour un euro de crédit d'impôt cinéma versé en 2009, 11,3 euros de dépenses sont réalisées dans la filière et 3,6 euros de recettes fiscales et sociales sont perçues par l'État.

Toutefois, ces dernières années, plusieurs films français n'ont pas été tournés en France, en raison notamment de coûts élevés de production par rapport à des pays voisins et du plafonnement du crédit d'impôt. Ce dernier étant plafonné à 20 % des dépenses éligibles et à 1 million d'euros, son intérêt est mécaniquement plus important pour les films à faible coût que pour les films à budget élevé ;

- en septembre 2011, le CNC a publié une étude comparative du fonctionnement des systèmes d'incitation fiscale existant dans les secteurs de la production cinématographique et audiovisuelle en Europe et au Canada.

Elle montre que le dispositif fiscal de crédit d'impôt français est le moins attractif sur des critères strictement financiers , avec un taux parmi les plus faibles et un niveau de contrainte supérieur.

L'étude rappelle néanmoins que des éléments tels que la proximité géographique, la langue, les capacités de tournage (infrastructures, formation de la main-d'oeuvre locale, prestataires techniques), le coût du travail et de l'argent (taux d'intérêt des crédits) affectent également la compétitivité des dispositifs. La performance de chaque dispositif doit donc être examinée au regard de l'environnement du pays.

En outre, votre rapporteur pour avis juge paradoxal que le crédit d'impôt national soit moins attractif que le crédit d'impôt international , dont le plafond est de 4 millions d'euros . La France saurait attirer les producteurs étrangers mais non retenir nombre de producteurs français...

Votre rapporteur pour avis rappelle d'ailleurs qu'un alignement complet des deux dispositifs avait été proposé par notre collègue Albéric de Montgolfier dans son rapport sur la valorisation du patrimoine culturel, présenté au Président de la République le jeudi 8 octobre 2010 .

Votre rapporteur pour avis avait lui-même souligné qu'un relèvement du plafond du crédit d'impôt national de 1 à 1,8 million d'euros suffirait à couvrir 95 % des films.

? Le crédit d'impôt international

Il vise à renforcer l'attractivité de la France pour les oeuvres initiées par une société de production étrangère et comportant des éléments rattachés à la culture, au patrimoine et au territoire français ou européen. Ces oeuvres peuvent bénéficier, après agrément par le CNC, d'un crédit d'impôt de 20 %, plafonné à 4 millions d'euros, du montant de leurs dépenses éligibles en France, sous réserve qu'elles soient au minimum de un million d'euros et que les oeuvres valident un test culturel.

Les retombées économiques du crédit d'impôt international sont très supérieures au coût fiscal de la mesure. Chaque euro de crédit d'impôt versé engendre 6 euros de dépenses dans la filière audiovisuelle et cinématographique et 2 euros de recettes fiscales et sociales pour l'État.

Il a généré 213 millions d'euros de dépenses directes en France et créé de nombreux emplois. Néanmoins, si Film France estime à environ 2 milliards d'euros les dépenses réalisées pour raisons fiscales en Europe au titre des tournages, la France n'en capte que de 3 à 5 %, le Royaume-Uni en accaparant 50 %...

Il est donc temps de renforcer aussi notre dispositif de crédit d'impôt international. Ceci d'autant plus que notre pays se dote de studios de grande qualité, susceptibles d'accueillir de nombreux tournages étrangers, au premier rang desquels la Cité du cinéma à Saint-Denis.

Relevons en outre que le dispositif , autorisé par la Commission européenne jusqu'au 31 décembre 2012, devra donc être prorogé à compter du 1 er janvier 2013.

(2) Vers de nouvelles mesures pour renforcer la compétitivité

L'an dernier, votre rapporteur pour avis avait demandé « de considérer ce crédit d'impôt comme une source efficiente d'attractivité davantage que comme une « niche fiscale ». Cette attractivité procure des retombées :

- directes sur les professions concernées, y compris les industries techniques, affectées par le passage de la technologie chimique au numérique ;

- et indirectes pour notre pays, y compris sur le plan touristique. »

Votre rapporteur pour avis est donc satisfait de l'inscription, dans le Pacte pour la croissance, la compétitivité et l'emploi , présenté par le Premier ministre le 6 novembre 2012, de mesures destinées à « renforcer l'attractivité du territoire en matière de tournages de films et de productions audiovisuelles ».

d) La hausse du taux intermédiaire de TVA : des inquiétudes

Votre rapporteur pour avis s'inquiète en revanche des annonces du Gouvernement concernant une hausse du taux intermédiaire de TVA, actuellement à 7 %.

Le Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, a annoncé l'octroi aux entreprises d'un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), qui serait de 10 milliards d'euros pour l'exercice 2013, puis monterait en puissance pour atteindre 20 milliards d'euros en 2016.

Pour financer cette mesure, le Gouvernement a choisi de faire appel à la TVA. Ainsi, le taux de TVA à 19,6 % passerait à 20 %, tandis que le taux de TVA à 7 %, serait relevé à 10 %. Seul le taux réduit de TVA serait préservé, passant de 5,5 % à 5 %, au 1 er janvier 2014.

Rappelons que l'article 24 du PLFR pour 2012 avait rétabli le taux réduit de la TVA de 5,5 % sur le livre et la billetterie des spectacles vivants, sans inclure cependant le cinéma alors qu'il bénéficiait également de ce taux auparavant. Votre rapporteur pour avis avait alors présenté sans succès un amendement visant à soumettre l'ensemble des produits culturels à ce même taux.

Il s'inquiète de la situation du secteur cinématographique, en particulier des salles, si la hausse de la TVA intermédiaire devient effective. Ainsi, alors que le livre et les spectacles vivants seront soumis à un taux de TVA à 5 %, le cinéma subirait une TVA de 10 % !

Or le cinéma fait tout autant partie du secteur culturel que le livre ou le spectacle vivant et il est essentiel pour l'accès des publics les plus larges à la culture.

Il serait très dommageable que cette mesure , alourdissant de manière conséquente les dépenses des consommateurs, provoque une rupture d'égalité de l'accès de tous à la culture, principe auquel nous sommes tous fortement attachés.

C. FOCUS SUR QUELQUES POINTS D'ACTUALITÉ ET/OU DE PRÉOCCUPATION

1. La numérisation des salles de cinéma : une réussite
a) Un projecteur numérique dans près de 9 salles sur 10

86,3 % des établissements cinématographiques français et près de 9 salles sur 10 sont désormais numérisés .

- Rappelons que la loi n° 2010-1149 du 30 septembre 2010 relative à l'équipement numérique des salles, impose le principe du paiement de contributions des distributeurs de films et autres utilisateurs de l'équipement numérique aux exploitants de salles. Elle garantit que les conditions de négociation de ces contributions et de fixation de leurs montants ne nuisent ni à la liberté de programmation des exploitants, ni à la maîtrise des plans de sortie des distributeurs.

Si quelques difficultés subsistent, les négociations entre distributeurs et exploitants ont été facilitées par les recommandations de bonnes pratiques émises par le comité de concertation pour la diffusion numérique en salles, instauré par la loi. En outre, la Médiatrice du cinéma, auditionnée en juillet 2012 par votre rapporteur pour avis, estime à environ 10 % la part des médiations qui concernent la numérisation et son impact sur les relations entre professionnels.

- Cinenum , le dispositif d'aide à la numérisation des salles n'étant pas susceptibles de recueillir suffisamment de contributions des distributeurs pour financer leur transition, fonctionne de façon satisfaisante.

Au total, le CNC a déjà soutenu la numérisation de près de 1 000 écrans répartis dans environ 750 établissements. A terme, près de 1 800 écrans répartis dans plus de 1 200 établissements devraient recourir à l'aide du CNC et à celle des collectivités territoriales pour pouvoir faire face à cette révolution.

Depuis juin 2012, le dispositif est ouvert aux salles dites « peu actives » (organisant moins de cinq séances hebdomadaires), c'est-à-dire aux salles saisonnières et aux salles rurales.

b) Les cinémas itinérants : un problème en voie de résolution

La numérisation des cinémas itinérants concerne 131 cinémas et pose, en premier lieu , la question de l'adaptation de l'équipement de projection à leurs spécificités et contraintes. L'offre étant inexistante, le CNC a rédigé un cahier des charges à l'adresse des fabricants de matériels de projection dès l'été 2010.

Plus récemment, la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) et l'Association nationale des circuits itinérants (ANCI) ont constitué un groupe de travail commun pour identifier une solution technique pertinente. Il semblerait que deux modèles de projecteurs conviennent. Le CNC va ainsi soutenir, pour chaque circuit, autant de projecteurs numériques que de projecteurs 35 mm utilisés, dans la limite de quatre par circuit.

Ce dispositif d'aide couvrira jusqu'à 90 % des dépenses de numérisation, c'est-à-dire autant que pour les salles fixes.

Votre rapporteur pour avis s'en réjouit car les circuits itinérants constituaient jusqu'ici en quelque sorte le talon d'Achille du dispositif d'aide. Or, s'ils ne représentent qu'une faible part de la fréquentation cinématographique annuelle, ils jouent un rôle indispensable d'aménagement culturel du territoire.

En effet, ils font plus que doubler le nombre de points de rencontre des spectateurs avec le cinéma : ils ajoutent plus de 2 000 communes aux 1 545 équipées d'une salle fixe, portant le nombre de communes équipées d'un cinéma à 3 635 (chiffres 2008).

En à peine plus de deux ans, la France aura ainsi réussi sa transition numérique , ce qui a aussi permis de réduire la durée, et donc le coût de la coexistence de deux systèmes. Le coût global pour le CNC est évalué entre 100 et 120 millions d'euros.

2. La numérisation des films : un pied sur le frein

En raison du prélèvement de 150 millions d'euros sur le fonds de roulement du CNC en 2013, qui comporte une « réserve numérique » (de 250 millions d'euros au 1er janvier 2012) dédiée pour partie au plan de numérisation des oeuvres cinématographiques, l'établissement devra « réduire la voilure » de ce dernier.

On peut donc craindre un ralentissement, sinon un arrêt provisoire de la numérisation des films de patrimoine. Le coût est d'environ 100 000 euros par film , les sommes pouvant varier selon l'état de la pellicule. L'inventaire, la restauration puis la numérisation de ces oeuvres sont pourtant importantes pour plusieurs raisons :

- un enjeu patrimonial : il s'agit de sauver des oeuvres souvent en mauvais état ;

- un enjeu économique, social et culturel : elle contribue à l'activité d' industries techniques du cinéma fragilisées par la révolution numérique, et donc aussi au maintien des compétences nécessaires en leur sein, au risque sinon de voir la filière chimique disparaître ;

- un enjeu en termes de développement de l'offre légale en ligne .

3. L'Agence pour le développement régional du cinéma (ADRC) : de nouvelles perspectives

L'ADRC est une association créée en 1983 pour soutenir et favoriser le développement de la petite exploitation et du cinéma de proximité, dans les villes dites petites et moyennes. Cette mission se décline en quatre activités spécifiques :

- l'aide aux salles par l'accès aux films (tirage et circulation de copies à fort potentiel commercial) : avec 2 207 copies pour 156 titres au total en 2011, ce sont ainsi 1 533 localités qui ont obtenu au moins une copie ADRC. La hausse de plus de 25 % par rapport à 2010 (1 765 copies) est liée à la transition numérique, les établissements les plus importants étant désormais numérisés, les distributeurs tirent donc de moins en moins de copies 35 mm pour les petites salles qui ne seraient pas encore équipées ;

- la fonction « études et conseils » (lors de création ou de transformation de salles) : en 2011, le nombre d'interventions s'est élevé à 37 (contre 45 en 2009). Celles-ci se concentrent de plus en plus sur la projection numérique et les problématiques d'accessibilité ;

- depuis 2000, la mission « patrimoine » (diffusion de films de répertoire) : elle propose aujourd'hui près de 300 longs-métrages disponibles à des conditions aménagées. La fréquentation pour ce type de films est en hausse : 75 000 entrées en moyenne en 2011 contre 55 000 en 2010 ;

- une activité d'observatoire du milieu du cinéma (conditions de diffusion, rapport distributeurs exploitants).

En mai 2012, M. Bertrand Eveno , président de la Commission nationale art et essai, a remis au CNC un rapport sur les perspectives que devrait embrasser l'ADRC pour 2013 :

- continuer l'accompagnement sur la fin de la période de transition entre les supports argentique et numérique ;

- garantir l'accès aux films de la diversité ;

- confier l'intervention financière afférente à une autre instance que l'ADRC, la Caisse de répartition créée sur la recommandation du Comité de concertation pour la diffusion numérique en salles ;

- assurer la médiation entre exploitants et distributeurs.

4. Le bilan plutôt positif d'une HADOPI en sursis

Au terme de sa deuxième année d'activité effective, le rôle de régulateur, de veille et d'expertise dévolu à la Haute Autorité peut désormais être évalué.

a) La réponse graduée : un impact pédagogique

La mise en oeuvre du dispositif de réponse graduée assurée par la Commission de protection des droits (CPD) de l'HADOPI s'est principalement orientée vers une démarche pédagogique à l'égard des internautes . Il s'agit davantage de conduire les internautes à modifier leur comportement que de les sanctionner pénalement.

Rappelons que la réponse graduée repose sur la contravention de négligence caractérisée, prévue à l'article L. 335-5 du code de la propriété intellectuelle. Elle est punie d'une amende de 1 500 euros pour les personnes physiques et de 7 500 euros pour les personnes morales, assortie d'une peine complémentaire de suspension de la connexion internet d'un mois maximum.

Les faits de contrefaçon sur les réseaux de pair à pair doivent d'abord être constatés par les ayants droit par l'intermédiaire de leurs agents assermentés. Ils le sont sur le fondement du manquement à l'obligation de sécurisation par le titulaire de l'abonnement de son accès à internet.

La CPD est saisie de 68 000 constats/jour par les cinq représentants des ayants droit qui disposent chacun d'une autorisation de 25 000 constats/jour. Il convient de relever qu'un constat transmis par les ayants droit ne signifie pas nécessairement un fait commis par un nouvel infracteur en raison du nombre important de doublons. La méconnaissance du fonctionnement des logiciels de mise en partage peut conduire, par exemple, à établir 70 constats pour une seule oeuvre puisque seul le fait de mettre à disposition est sanctionné. La commission est chargée d'envoyer par la voie électronique un message aux titulaires d'un abonnement à internet en cas d'utilisation de cet accès pour télécharger ou mettre à disposition une oeuvre protégée afin de leur rappeler leur obligation de surveillance de cet accès. Mais une seule recommandation est adressée pour plusieurs constats d'infraction à la loi.

Entre octobre 2010 et juillet 2012, 1,25 million de mails ont été envoyés au titre de ce premier avertissement .

D'après les services de l'HADOPI, le fait de recevoir un premier avertissement modifie le comportement des internautes contrevenants puisque 95 % d'entre eux ne font pas l'objet d'un autre avertissement . Cette statistique porte sur la période comprise entre octobre 2010 et décembre 2011.

En cas de renouvellement de l'infraction, dans un délai de six mois à compter de l'envoi de la première recommandation, un deuxième avertissement est adressé par la voie électronique et assorti de l'envoi d'une lettre recommandée. Pour la période précitée, plus de 110 000 lettres recommandées ont été envoyées. L'envoi de la deuxième recommandation amène souvent les abonnés à prendre contact avec les services de l'HADOPI, essentiellement pour connaître le contenu des oeuvres incriminées. A cette occasion, une information sur les moyens techniques de sécurisation de l'accès internet est délivrée, du fait le plus souvent d'une méconnaissance du fonctionnement des logiciels de pair à pair .

A la suite de ces avertissements, 37 % déclarent avoir cessé de télécharger, ce qui montre une certaine efficacité du rappel à la loi.

En cas de manquement réitéré à ces obligations, qui fait suite à l'envoi des deux recommandations, la CPD peut saisir le procureur de la République au titre de la contravention de cinquième classe de négligence caractérisée.

La troisième phase de procédure a porté sur l'examen de 340 dossiers au 30 juin 2012 . Avertis de l'éventualité d'une poursuite pénale suite à un nouveau manquement constaté, tous les abonnés concernés ont été convoqués par la Haute autorité et un contact a pu être établi avec 75 % d'entre eux. Cette procédure d'échanges entre l'HADOPI et les abonnés doit les conduire à modifier leur comportement.

En dernier recours, seuls 14 dossiers ont été transmis au procureur de la République, la majorité des dossiers examinés ayant fait l'objet d'une délibération de « non-transmission » par la Commission de protection des droits en l'absence de réitération des faits reprochés . Le titulaire de l'abonnement a alors fait l'objet de poursuite sur le fondement de la contravention de négligence caractérisée.

La première condamnation a été prononcée par le tribunal de police de Belfort le 13 septembre 2012. Le titulaire de l'abonnement a été condamné à 150 euros d'amende pour « défaut de sécurisation de son accès Internet ».

Certes, seuls les échanges de pair à pair sont concernés et des stratégies de contournement sont utilisées par des internautes, au profit de sites de téléchargement direct ou de streaming . Votre rapporteur pour avis souligne néanmoins l'importance de l'action pédagogique , dont l'efficacité paraît renforcée par une certaine « peur du gendarme ».

La mission confiée à Pierre Lescure, concernant l'acte II de l'exception culturelle face aux enjeux du numérique, devrait proposer d'améliorer un dispositif dont le législateur savait qu'il ne serait sans doute pas gravé dans le marbre mais dont les objectifs ont été partiellement remplis. Ainsi, outre le renforcement de l'offre légale, de nouvelles propositions sont avancées pour se substituer à l'actuelle sanction de suspension de l'accès à Internet, par exemple une amende ou un déréférencement de liens donnant accès à des contenus illégaux , chez les hébergeurs, moteurs de recherche, annonceurs, opérateurs de paiement à distance...

Votre rapporteur pour avis considère que le dispositif peut sans doute être amélioré sur certains points, mais il appelle à la vigilance : attention de ne pas « jeter le bébé - c'est-à-dire le respect du droit d'auteur - avec l'eau du bain » !

De nombreux autres pays 7 ( * ) mettent en oeuvre des dispositifs de lutte contre la consommation illégale de biens culturels. Ainsi, par exemple, au Japon , une loi vient d'entrer en vigueur le 1er octobre 2012. Elle rend passibles d'une amende pouvant atteindre 2 millions de yens (20 000 euros) et d'un maximum de deux ans de prison, les internautes téléchargeant illégalement des fichiers.

b) Le développement de l'offre légale

Le législateur a aussi confié à l'HADOPI une mission d'encouragement au développement de l'offre légale. Elle comporte trois axes : l'attribution du label pour proposer aux internautes une offre diversifiée, la poursuite des travaux engagés pour le portail de référencement et le développement de la musique en ligne.

? La procédure de labellisation

Même si la politique d'offre légale relève d'abord des ayants droits, l'HADOPI a mis en place une procédure de labellisation qui permet d'identifier le caractère légal d'un site.

Au 30 juin 2012, 59 plateformes avaient été labellisées contre 20 un an auparavant. Elles couvrent une grande diversité de secteurs culturels, de modes de diffusion, de modalités d'accès et d'accessibilité. Tous les modèles de diffusion et d'accès aux contenus sont désormais présents. Cette montée en puissance devrait se poursuivre avec un objectif de 70 plateformes labellisées à la fin 2012 et une centaine fin 2013.

Depuis 2008, le CNC oeuvre également au développement de l'offre légale par le biais d'un soutien sélectif à l'exploitation en vidéo à la demande (VàD). Le secteur de la VàD compte près de 70 plateformes légales mais seules 8 sont estampillées du label PUR. Ainsi, il semble y avoir des réticences à solliciter le label délivré par l'HADOPI en raison d'un impact positif non avéré.

Se pose donc la nécessité d'améliorer la visibilité et la valeur ajoutée du label HADOPI , tout en simplifiant la procédure d'obtention et de renouvellement. En décembre 2011, selon une étude réalisée par Opinion Way, le label PUR n'était connu que de 11 % des internautes sondés et seuls 5 % savaient exactement de quoi il s'agit. Neuf internautes sur dix n'avaient jamais entendu parler de ce label.

? Un portail de référencement

L'HADOPI a également développé un portail de référencement des offres légales labellisées : le site informatif www.pur.fr . Son objectif est de permettre aux internautes d'identifier formellement l'offre légale, sachant que cette identification n'est pas toujours évidente, l'offre payante n'étant pas forcément garante d'offre licite.

Le portail de référencement ne reçoit en moyenne que 9 109 visites mensuelles, qui transitent pour la plupart par le site de l'HADOPI, alors que celui-ci enregistre 46 965 connexions par mois.

Des réserves ont été émises sur la mise en place d'un portail de référencement piloté par les pouvoirs publics des offres légales labellisées par l'HADOPI. Ce sont, en effet, des initiatives privées qui s'inscrivent dans un environnement concurrentiel.

Une réflexion s'est engagée sur l'amélioration de la visibilité des catalogues des opérateurs privés sur internet. L'offre légale devrait pouvoir être mieux identifiée dans les moteurs de recherche. En outre, alors que l'HADOPI a mis en place un portail généraliste, des plateformes spécialisées sembleraient mieux répondre à la demande actuelle.

5. Le renforcement de l'offre légale et la chronologie des médias

La chronologie des médias est un pilier essentiel du système de préfinancement des oeuvres cinématographiques en France ; elle repose sur un principe de cohérence et de proportionnalité entre les différentes fenêtres d'exploitation d'une part et entre le poids et les obligations de chacun dans le préfinancement des oeuvres, d'autre part.

Néanmoins, son adaptation doit permettre de suivre le rythme des évolutions technologiques et des nouvelles pratiques des consommateurs.

- A ce titre, l'un des principaux points de discussion concerne le positionnement de la vidéo à la demande par abonnement (SVàD) : plusieurs rapports ainsi que certains professionnels préconisent un avancement de cette fenêtre autour de 22 mois (contre 36 actuellement).

- Par ailleurs, la Commission européenne 8 ( * ) et certains producteurs souhaitent que des expérimentations soient conduites en 2013, afin de tester des sorties simultanées ou quasi-simultanées en salle et VàD (modèles de distribution dits day-and-date ).

Une première expérimentation a été récemment réalisée en France : deux films indépendants sortis sur moins de vingt copies ont été diffusés, début novembre 2012, en avant-première sur Internet, mais plusieurs cinémas ont alors décidé de les déprogrammer car ils n'avaient plus aucun intérêt à maintenir ces films en salle.

Votre rapporteur pour avis fait part de son scepticisme sur ce point. Il souligne la nécessité de préserver l'exclusivité de la salle, sachant qu'un film peut parfaitement être diffusé sans passer par une salle.

La mission de Pierre Lescure devrait, quant à elle, apporter des éclaircissements sur la position des différents acteurs du secteur sur ces questions.

6. Le marché de la vidéo : le constat d'un inexorable déclin
a) L'évolution du marché : des masses financières qui se contractent

En mars 2012, le CNC a réalisé une étude établissant un bilan du marché de la vidéo physique en France. Il en ressort notamment que :

- en 2011, les Français ont dépensé 1,26 milliard d'euros en achats de DVD et de Blu-ray. Après deux années relativement stables, la dépense des ménages en vidéo physique diminue de 9,2 %. Au cours des neuf premiers mois de 2012, les ménages en France ont dépensé 716 millions d'euros en achat de DVD et Blu-ray , soit une baisse de 8,8 % en valeur et 7,9 % en volume ;

- le prix moyen de vente d'un DVD de catalogue vendu à l'unité progresse de 0,7 % à 8,41 euros ;

- les recettes du hors film reculent encore nettement en 2011 (- 9,5 %) et durant les neuf premiers mois de 2012 (- 7,2 %) ;

- les ventes de films français accusent une baisse moins importante que les films américains en 2011 (9,1 % contre 15,1 %) et sont même en hausse sur les neuf premiers mois de 2012 (+ 5,8 %) alors que les films américains continuent de baisser (- 5,4 %) ;

- les hypermarchés et supermarchés captent toujours près de 40 % du chiffre d'affaires total de la vente vidéo ;

- l'offre ne fait que s'accroître, le nombre de titres de DVD avoisinant les 61 400 références et en Blu-ray 4 800 .

b) Les nouvelles pratiques vidéo : vers une érosion de la demande

Avec moins de 4 DVD visionnés par mois en moyenne, les spectateurs de cinéma, pour la première fois depuis 2007, ont vu moins de DVD que l'année passée. Si les bonus sont de plus en plus regardés (30 % des spectateurs), cela ne suffit généralement pas à justifier l'achat d'un DVD et les DVDthèques sont moins fournies en 2011 qu'en 2010 (38,3 DVD en moyenne).

Concernant l'achat, les lieux privilégiés pour l'approvisionnement en DVD demeurent les supermarchés et magasins spécialisés (21 % des DVD qui entrent dans un foyer sont empruntés), même si Internet constitue un troisième circuit d'achat en pleine progression.

7. L'accès des salles de cinéma aux handicapés

La loi n° 2005-102 du 11 janvier 2005 sur l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a rendu obligatoire, à compter du 1 er janvier 2015, l'adaptation des bâtiments dont les salles de cinéma. 233 établissements ont ainsi bénéficié d'une aide spécifique du CNC pour réaliser un diagnostic. Les travaux d'aménagement des salles aux handicaps moteurs ou sensoriels sont pris en charge aujourd'hui tant en termes de soutien automatique (pour toutes les salles) que d'aides sélectives à la modernisation ou à la création de salles (3 000 salles éligibles).

S'agissant du développement de l'offre de films audio écrits et sous-titrés pour les personnes atteintes d'un handicap sensoriel , le CNC a élaboré un dispositif d'aides qui pourrait profiter à 180 films par an pour une enveloppe totale d'1 million d'euros par an .

8. L'actualité européenne

La Commission européenne a lancé une consultation publique sur les critères en matière d'aides d'État qu'elle propose d'utiliser à l'avenir pour évaluer les régimes d'aides au secteur audiovisuel au sens large (audiovisuel et cinématographique) des États membres.

Trois principaux changements sont proposés dans le projet de communication :

- élargir le champ des activités couvertes par la communication (non plus que les aides à la production mais toutes les phases, de la conception à la diffusion) ;

- limiter la territorialisation des aides à un montant correspondant à 100 % de l'aide au maximum, c'est-à-dire limiter les obligations que les États peuvent créer pour conditionner l'octroi de l'aide à des dépenses réalisées sur leur territoire (à l'heure actuelle, il suffit que le producteur bénéficiaire de l'aide garde la possibilité de dépenser 20 % de l'ensemble du budget de production ailleurs que sur le territoire de l'autorité qui octroyait l'aide) ;

- exiger, dans le cas spécifique des régimes d'aide à la production cinématographique pour lesquels le montant de l'aide est calculé sur la base des dépenses de production effectuées sur un territoire donné, que soit désormais prise en compte toute dépense de production réalisée non plus sur ce seul territoire mais dans l'ensemble de l'Espace économique européen (EEE).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 20 novembre 2012, sous la présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente, la commission examine le rapport pour avis de M. Jean-Pierre Leleux sur les crédits « Cinéma » de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2013 .

Un débat s'engage après la présentation du rapporteur pour avis.

Mme Marie-Christine Blandin , présidente. - Merci monsieur le rapporteur. La parole est à Mme Morin-Desailly pour le groupe UC-UDI.

Mme Catherine Morin-Desailly. - Je voudrais tout d'abord remercier notre collègue pour son excellent rapport. Je crois qu'on peut se réjouir dans ces temps de crise de voir un secteur aussi vivant et qui produit d'aussi bons résultats, mais surtout de voir que les salles, malgré les nouveaux outils technologiques, continuent à être pleines et à être des lieux de rencontres et d'échanges... comme quoi les innovations technologiques ne tuent pas forcément les lieux de culture et de rassemblement.

Il faut souligner que c'est lié à un excellent système de financement qu'on nous envie dans l'Europe toute entière : comme nombre d'entre vous, j'étais à Avignon au Forum Économie et Culture en fin de semaine dernière, et les nombreuses personnalités du monde du cinéma, tant les distributeurs que les producteurs et les réalisateurs, se félicitaient encore de ce mode de financement. Aussi, je soutiendrai d'amendement proposé par Jean-Pierre Leleux à propos du plafonnement des SOFICA car je pense légitime de revenir sur ce qui a été proposé par M. Eckert.

Au rang des satisfactions - parce que je pense que c'est aussi l'heure de dire ce qui est positif -, je voudrais mettre en avant la numérisation qui a été faite très rapidement de nos salles puisque l'on a approche 90 % aujourd'hui. Je trouve cela très impressionnant d'avoir pu aller aussi vite. On nous disait au Forum d'Avignon que beaucoup de salles ont fermé, a contrario , dans des pays voisins : en Allemagne, en Italie, en Espagne... Nous avons pu enrayer sinon anticiper un mouvement qui aurait pu être inverse.

Quelques mots sur la HADOPI : je suis prête à parier que l'on va garder le système existant, seulement on va le rhabiller d'un autre nom... Je dis cela parce qu'au Forum, j'ai interrogé beaucoup d'acteurs du secteur : ils sont tous favorables à ce que l'on maintienne ce système de prévention car c'est la réponse graduée qui fait prendre conscience de ce que représente la création.

Concernant la chronologie des médias qui incite au piratage, je pense qu'en effet, suite à la mission Lescure, il va falloir affiner et toujours progresser sur ce sujet : on avait déjà été, dans cette Commission, à l'époque de la loi DADVSI, auteurs d'amendements visant à la réduire. Cela n'avait d'ailleurs pas été un combat très simple mais, finalement, le temps nous a donné raison. Je crois plutôt qu'il faut travailler sur l'offre légale, sa richesse, sa diversité, son accessibilité en termes de prix et puis aussi et surtout sur la chronologie des médias, même s'il faut bien prendre conscience que chaque élément du segment produit des financements pour la culture.

Voilà les quelques éléments que je tenais à souligner mais je ne suis pas plus bavarde, tout ou presque ayant été dit dans le rapport.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente . - Merci. Monsieur Gattolin.

M. André Gattolin . - Oui, cela semble être un amendement de bon sens, à une nuance près néanmoins : le secteur du cinéma, dynamique en France, fait partie des secteurs de la culture les plus aidés. Quand on regarde au niveau des aides directes pour le cinéma, elles représentent pratiquement deux fois les aides directes à la presse : je pense donc qu'il faut faire attention à conserver un équilibre dans les fonctions culturelles et citoyennes du pays.

Personnellement, je suis favorable comme tout le monde à un cinéma français riche et développé. Certes les salles se sont numérisées, certes nous avons encore un nombre d'entrées particulièrement important puisqu'il est équivalent à ce que l'on avait au début des années soixante-dix et c'est une grosse performance. En revanche, il faut noter que tout le réseau des salles dites d'art et d'essai a diminué et qu'on est, en termes de présentation dans les salles aujourd'hui, sur une offre de plus en plus formatée sur un certain nombre de films et de sorties. Il serait important, là aussi, de repenser le pluralisme : le CNC, au cours de ces dernières années, a peut-être un petit peu manqué à ses fonctions de développement d'oeuvres plus spécifiques et, en tous les cas, manqué d'équilibre dans la répartition et le niveau de ses aides.

Je n'ai donc pas d'avis particulier sur cet amendement parce qu'il est toujours intéressant de développer un des secteurs de la culture et des médias... Je dis simplement qu'on en fait déjà beaucoup pour le cinéma et qu'il ne faut pas oublier les autres industries culturelles et le secteur des médias qui est, à mon avis, essentiel à la démocratie.

Mme Marie-Christine Blandin , présidente . - Merci. Autres interventions ? Je vous propose d'en arrêter là et d'examiner l'amendement. Néanmoins, je vais demander une précision à M. Leleux, que je vous rappellerai demain au moment du vote sur les crédits de la culture : votre rapport est-il suivi d'un avis plutôt favorable, défavorable ou de sagesse ?

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur pour avis . - Personnellement, je demande que l'on donne un avis favorable à la politique conduite en faveur du cinéma. Au fond, quel est le problème qui pourrait nous diviser mais qui ne doit pas le faire ? C'est la ponction des 150 millions sur le fonds de roulement du CNC. Néanmoins, on ne peut pas les refuser... Mais il faut tout de même rappeler que cela doit rester exceptionnel.

Pour répondre maintenant à ma collègue Catherine Morin-Desailly : effectivement, l'ensemble de la profession reconnait dans la loi de septembre 2010, une loi excellente qui a dynamisé considérablement et accéléré, parallèlement aux dispositifs du CNC (Cinenum), la numérisation des salles, ce qui fait de nous les premiers en Europe et les deuxièmes dans le monde.

Et pour répondre à notre éminent collègue Gattolin : on ne peut pas comparer les aides du CNC à celles octroyées à la presse. On ne peut pas dire que le CNC est davantage aidé ou deux fois plus aidé que la presse, parce que les financements du CNC sont injectés par la profession elle-même. D'ailleurs, les professionnels appellent cela des avances sur investissements puisqu'ils contribuent eux-mêmes à un retour sur investissements ; et c'est d'ailleurs cela toute l'intelligence du dispositif du CNC. On ne peut donc pas tout à fait le comparer aux financements d'autres secteurs, même si j'admets que les taxes que nous avons votées se sont avérées plus dynamiques que prévu... Ce qui, par ailleurs, nous permet de dire aujourd'hui qu'il est possible de prélever 150 millions d'euros sur le fonds de roulement du CNC. Mais on ne pourra pas le faire éternellement sans mettre en péril le programme de numérisation.

Concernant l'amendement, il s'agit de revenir au projet de loi de finances initial afin d'exclure les SOFICA du plafonnement des dépenses fiscales instituées à cet article, sachant que le montant maximal déductible à ce titre par un contribuable est, en tout état de cause, fixé à 6 480 euros. Comme je l'ai dit dans ma présentation tout à l'heure, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement et contre l'avis de sa commission des affaires culturelles, mettait les SOFICA au même niveau de « niche » que les investissements outre-mer. Or, si l'on met ces deux dispositifs en concurrence, celui des SOFICA sera fragilisé.

Mme Marie-Christine Blandin , présidente . - Merci de cette présentation monsieur Leleux. Je mets au vote cet amendement. Il est adopté et devient un amendement porté par la commission.

Au cours d'une séance tenue le mercredi 21 novembre 2012, sous la présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente, la commission examine le rapport pour avis de Mme Maryvonne Blondin sur les crédits « Spectacle vivant » de la mission « Culture » du projet de loi de finances pour 2013 .

Un débat s'engage après la présentation de la rapporteure pour avis.

Mme Catherine Morin-Desailly . - Merci pour cet exposé clair et précis. Les crédits de ce programme sont sanctuarisés, mais il nous faut aborder le budget dans sa globalité. Or, il prévoit une baisse drastique des dotations aux collectivités locales, alors que ces dernières assurent 75 % du financement du spectacle vivant. Il faut donc en tenir compte dans l'évaluation de ce budget. J'exprime une inquiétude : comment État et collectivités peuvent-ils co-construire les politiques culturelles quand les dotations aux collectivités sont si diminuées ? Par ailleurs, puisque vous avez évoqué la création d'un observatoire, avez-vous évalué l'action des COREPS ?

M. André Gattolin . - Je relèverai deux ou trois points dans ce rapport intéressant. Il est important de recourir aux crédits européens qui sont, il est vrai, complexes à mettre en place, car ils requièrent beaucoup d'ingénierie. A part quelques expériences, l'État et les régions ne jouent pas vraiment leurs rôles dans ce domaine, quand on compare aux efforts fournis en Allemagne par les Länder . La France est en quelque sorte déficitaire au regard des crédits qu'elle est en mesure d'espérer. Avez-vous pris en compte l'importance de l'économie solidaire et sociale, car elle participe au développement et au renforcement des actions culturelles dans les territoires ?

Mme Françoise Laborde . - Je suis globalement d'accord avec la rapporteure. Des efforts sont demandés aux grandes institutions, ce qui n'est pas toujours facile pour elles, mais cela permet de maintenir les crédits déconcentrés. Il faut voir comment les DRAC les géreront. Il fallait en effet maintenir le dispositif du mécénat puisque l'on demande aux structures d'augmenter leurs fonds propres. Comme la rapporteure pour avis a pu le constater aux réunions du groupe d'étude que je préside sur les arts de la scène, les arts de la rue et les festivals en région, des secteurs comme le cirque ou la danse demandent une certaine reconnaissance. Par ailleurs, nous nous interrogeons sur le point de savoir si les chiffres que vous avez donnés intègrent ou non les crédits destinés aux pensions des fonctionnaires.

Mme Maryvonne Blondin, rapporteure pour avis sur les crédits de la mission « Spectacle vivant » . - Vous trouverez quelques éléments sur les COREPS dans mon rapport.

M. Jean-Pierre Plancade . - Je remarque que certains FRAC (fonds régionaux d'art contemporain) ont une politique de gestion des oeuvres qu'ils détiennent en sommeil alors que d'autres sont plus dynamiques.

La loi sur le mécénat a heureusement été maintenue. Le Sénat a bataillé en ce sens. Cependant il faudrait sécuriser certaines de ses dispositions sur le plan fiscal car elles sont appliquées différemment selon les services des impôts. Cela fragilise les petits et gros investissements que certains voudraient réaliser.

Enfin, la commission examine le rapport pour avis de M. Pierre Laurent sur les crédits « Arts visuels » de la mission « Culture » du projet de loi de finances 2013 .

Un débat s'engage après la présentation du rapporteur pour avis.

M. André Gattolin . - A-t-on une identification précise à l'intérieur de ce domaine de l'investissement destiné aux arts numériques ? Il y a des initiatives prises au niveau des collectivités territoriales comme la Gaîté lyrique à Paris. Nous avons des écoles performantes comme les Gobelins. C'est un domaine en plein essor. Or, je pense que les efforts consentis ne sont pas à la hauteur des défis et des enjeux.

M. Pierre Laurent, rapporteur pour avis des crédits « Arts visuels » . - Je n'ai pas de réponse précise. Je vous propose d'interroger le ministère pour nous donner des éléments d'identification plus précis comme nous l'avons fait dans le domaine de la photo. Nous pourrions également regarder du côté de la commande publique des FRAC car il y a une part grandissante d'acquisition concernant les arts numériques.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente . - Je vous rappelle que la commission s'exprime globalement sur l'ensemble des crédits de la mission « culture » qui ont été commenté par :

- M. Jean-Pierre Leleux sur le cinéma, qui a émis un avis favorable ;

- Mme Maryvonne Blondin sur le spectacle vivant, qui a émis un avis favorable ;

- M. Vincent Eblé sur les patrimoines, qui a émis un avis favorable ;

- M. Philippe Nachbar sur les transmissions des savoirs, qui a émis à titre personnel un avis favorable et qui propose à la commission un vote de sagesse ;

- M. Pierre Laurent sur les arts visuels, qui a émis à titre personnel un avis défavorable et qui laisse la commission faire son choix.

Mes chers collègues, je vous donne la parole pour des explications de vote.

M. Pierre Laurent . - Je considère ce budget en très forte diminution. La justification qui consiste à penser qu'en période de difficultés budgétaires et de crise, il est normal que ce secteur comme les autres contribue, nous pose problème. Du même qu'il est utile de protéger les crédits du secteur de l'éducation, il est aussi nécessaire de sanctuariser ceux de la culture. Nous pensons que cette évolution risque de nous entraîner dans de plus grandes difficultés d'autant qu'elle s'ajoute à une pression accrue sur le budget des collectivités territoriales. Pour la première année du changement, cela nous semble un très mauvais signal et c'est pour cette raison que nous émettrons un avis défavorable.

Mme Françoise Cartron . - Je n'ai pas une lecture aussi sévère de ce budget. Certes, globalement il y a une baisse mais, comme l'a dit la ministre, en examinant chaque domaine, certaines priorités sont préservées, notamment les crédits dévolus aux DRAC dans nos territoires pour maintenir la vivacité de la création culturelle et ceux consacrés au spectacle vivant et à la création. Certes, certains grands projets « pharaoniques » ont été arrêtés. Dans une période de crise, la coupe me paraît juste et raisonnable. Cela n'a pas été un coup de rabot indifférent dans tous les domaines. Comme nous partageons les priorités qui sont affichées, nous émettrons un vote favorable.

Mme Françoise Laborde . - Le groupe RDSE est favorable à ce budget. Cela fait plusieurs années que nous avons des budgets « contraints ». Nous émettrons donc un vote de confiance car nous savons que lors de la loi d'orientation, du texte sur les intermittents et dans les discussions avec l'éducation nationale, beaucoup de nos choix seront portés et défendus.

M. Jacques Legendre . - La réalité et les difficultés ont rattrapé l'actuel titulaire du ministère de la culture et nous mettent dans une situation étrange. Il est difficile d'apprécier le budget tellement sa présentation est « émiettée ». Il est difficile d'avoir une vision claire des politiques culturelles. Ce budget peut être comparé avec les ambitions affichées par l'ancien gouvernement. J'ai en mémoire les déclarations de Mme Aubry au Festival d'Avignon en 2011 annonçant une augmentation de 50 % des crédits de la culture. Je crois que les années précédentes nous étions attentifs au moins à sanctuariser le budget de la culture. Et nous y étions encore arrivés l'an dernier. Je constate cette année que pour la première fois, le budget est en baisse. Il y a sans doute des points satisfaisants dans ce budget, il faut être objectif. Mais le budget est en recul et c'est une sacrée évolution par rapport aux ambitions proclamées. C'est parce que les difficultés et les contraintes sont là. Ce qui m'intéresse, c'est de savoir quelle est l'attitude à prendre pour aider l'actuel titulaire du ministère de la culture, Mme Filippetti, à résister à la pression de ses collègues de Bercy pour qui il est toujours tentant de réduire le budget de la culture et d'en faire une variable d'ajustement. On est passé de l'ambition à la variable d'ajustement. Il y a dans ce budget des diminutions préoccupantes ou choquantes. Je m'inquiète pour le patrimoine où les besoins sont énormes. Si tous les crédits ne sont pas consommés il faudrait peut-être secouer sérieusement les services du ministère et je considère cette baisse comme très préoccupante. Ce qui nous a aussi choqués, c'est en matière d'éducation artistique, une volonté affirmée qui se traduit dans le domaine de l'architecture mais en ce qui concerne la musique, il y a un net recul des crédits consacrés aux conservatoires de musique. C'est très fâcheux, j'espère que l'on ne remettra pas en cause l'existence des conservatoires. Cela veut dire aussi que les collectivités territoriales vont devoir mettre la main à la poche et dépenser encore plus alors que la part des dépenses culturelles dans le budget des collectivités n'a cessé d'augmenter. Nous nous en sommes déjà préoccupés. Je ne méconnais pas les efforts qu'a faits Mme Filippetti, mais nous émettrons un vote défavorable.

Mme Catherine Morin-Desailly . - Le groupe UDI-UC ne votera pas ce budget en l'état d'une part, pour les remarques qui viennent d'être formulées par Jacques Legendre mais aussi parce que nous examinons ce budget dans sa globalité. Je rappellerai qu'au-delà même du secteur qui intéresse notre commission, il y a la prise en compte de toutes les dotations qui vont vers les collectivités territoriales. La mission du Sénat est aussi de défendre les collectivités territoriales et d'examiner quel va être leur sort dans les missions qui sont les leurs, notamment l'accès à la culture au plus grand nombre, lors du vote de ce budget. Ce que je retiens, c'est que le gouvernement souhaite un pacte de confiance et de stabilité avec les collectivités territoriales. Je trouve qu'il y aurait dû y avoir, pour le moins, une stabilité du budget à travers les dotations aux collectivités comme dans l'attribution des subventions du ministère de la culture vers les collectivités. Je m'inquiète de cette double baisse. C'est un tour de passe-passe quand Mme Cartron dit que la priorité doit être donnée aux crédits des DRAC pour l'action dans les territoires puisque par ailleurs, on va baisser les dotations aux collectivités, voire les subventions directement affectées aux établissements. En regardant le budget à l'aune de tout ceci, je regrette que la seule priorité soit donnée au ministère de l'éducation nationale, car la culture est aussi un facteur d'émancipation et d'épanouissement pour tous. Je m'inquiète également de l'appréciation de la culture par des notions d'évaluation, de rentabilité, d'indicateurs et de résultats. Quand Mme Filippetti parle de « redressement créatif », on est dans le seul domaine économique. C'est autre chose la culture et cela ne se mesure pas forcément en terme de rentabilité directe, c'est une action de long terme. Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes très déçus par ce budget. Malgré la crise et les difficultés financières, les précédents budgets de la culture ont toujours été stabilisés au moins en pourcentage, si ce n'est en euros constants. Nous sommes vraiment sur une pente très inquiétante.

M. David Assouline . - Les débats ont habituellement lieu en séance, mais quand il s'agit du budget, les arguments s'échangent beaucoup en commission car le temps manque en séance. Donc je me permets de dire quelques mots sur le fond.

En réponse à M. Pierre Laurent qui considère qu'un budget qui baisse n'est pas bon, je voudrais lui dire que par exemple, pour sauver France Télévisions, nous avons adopté un amendement à l'unanimité, y compris vous Pierre Laurent, avec enthousiasme parce que la réalité est là et lors de la discussion d'un budget, c'est la réalité qui prime. Si on allait au bout de cette logique, le rejet de ces crédits, mais je ne préjuge de rien, ferait que l'on n'aurait pas ces 50 millions pour le service public.

Après, j'entends bien le débat sur la sanctuarisation. Il y a dans ce qu'a fait Aurélie Filippetti et le budget tel qu'il nous est présenté, une sanctuarisation. Est-elle absolue ? Non, mais les missions fondamentales ont été sanctuarisées après des batailles. Monsieur Legendre, maintenant que vous êtes dans l'opposition, vous nous dites que ce budget en baisse est inacceptable, alors que vous êtes contre le déficit et vouliez une règle d'or. Nous avons 600 milliards de déficit et tout le monde est d'accord sur la règle d'or. Il faut aller chercher l'argent, on ne peut plus faire semblant. C'est notre indépendance économique qui est en jeu. L'année dernière, vous plastronniez en disant que l'opposition voulait dépenser à tout va, alors que la majorité de l'époque était sérieuse dans la gestion. Et vous nous reprochez cette année cette baisse des crédits, alors que cet effort est destiné à résorber la dette de la France pour préserver notre indépendance économique. Sur tous les budgets vous pouvez faire les mêmes remarques, mais cela n'empêchera pas que les DRAC ont été affaiblies avec la politique de la droite et que nous, on n'y touche pas.

Dans le domaine de l'éducation artistique, un effort sans précédent va être fait non pas sur le budget de la culture mais dans le cadre de la refondation de l'école et la façon dont on permet réellement que tous les enfants puissent avoir accès à cette éducation, y compris par des rythmes scolaires modifiés. Des vrais moyens ont été dégagés. Il faut défendre nos conservatoires, mais l'éducation artistique ne se résume pas seulement aux conservatoires. Ils sont souvent réservés aux privilégiés. Cette éducation n'est pas à la portée de tous les enfants. Je connais les capacités de ces structures dans le XX e arrondissement. Les gens doivent faire la queue la nuit pour y inscrire leur enfant. Que cela soit pris en compte par l'éducation nationale compensera largement la baisse évoquée du budget du ministère de la culture.

Quant à l'audiovisuel, vous avez supprimé la manne qui venait de la publicité et déstabilisé le service public tout en affirmant qu'il fallait arrêter de dépenser trop.

Vous êtes dans l'incohérence !

Nous essayons de composer avec cet héritage. Ici, il n'y a que des parlementaires qui ont combattu pour que la culture ne soit pas la variable d'ajustement et qui continueront à le faire avec la même détermination et non pas avec des propos à géométrie variable et des postures politiques en fonction de qui est au gouvernement.

M. André Gattolin . - Le groupe écologiste votera ce budget de la culture non sans regret car dès qu'il y a réduction budgétaire, c'est toujours inquiétant. Mais comme membres de la majorité, nous considérons devoir participer à l'effort pour le redressement des finances publiques. Si le ministère de la culture est affecté, je rappellerai que le ministère de l'écologie connaît une baisse de son budget de 4,5 %. D'une manière générale, les économies ont été faites d'abord en direction d'anciens grands travaux décidés dans l'urgence et en fin de mandat. Nous avons auditionné cette année le Président du Louvre, on a eu des effets d'annonce l'année passée à Avignon où on nous créait des antennes décentralisées de tous les grands musées, de choses absolument pas budgétées. Je ne suis pas nécessairement malheureux de voir la Maison de l'Histoire de France dont le financement n'était absolument pas assuré, passer à la trappe.

Bien sûr, il faudra être vigilant dans les budgets à venir, voir comment éviter des coupes immédiates et comment réorganiser l'investissement culturel sachant que le budget de l'État en matière culturelle représente aujourd'hui une minorité des investissements et des politiques publiques engagées en France. Tout cela doit s'apprécier au global de la part des collectivités locales et du rôle joué par l'État.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente . - J'ai bien noté les positions des uns et des autres.

Je vous rappellerai deux chiffres qui font mal : Il y a 110 millions d'euros en moins dans le budget de la culture et personne ne s'en réjouit. Mais ces 110 millions sont à mettre en perspective avec d'autres chiffres. La Philharmonie était prévue à 100-150 millions, et ce sont finalement 390 millions d'euros qui seront nécessaires pour achever le chantier. Éviter que le BTP nous réitère systématiquement ce racket sur les fonds publics, qu'ils soient des collectivités ou de l'État, nous donnerait l'oxygène indispensable pour ne pas avoir ces débats de regrets sur une culture qui subit les conséquences de ces dérapages financiers. Ce genre de pratiques nous coûte cher. C'est une remarque personnelle.

La commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Culture ».

AMENDEMENT PRÉSENTÉ PAR M. JEAN-PIERRE LELEUX, RAPPORTEUR POUR AVIS DES CRÉDITS « CINÉMA » AU NOM DE LA COMMISSION DE LA CULTURE, DE L'ÉDUCATION ET DE LA COMMUNICATION

A M E N D E M E N T

présenté par

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur pour avis

Au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Article 56

I - A l'alinéa 3, supprimer la référence 199 unvicies .

II - En conséquence, procéder à la même suppression à l'alinéa 4.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Au titre du secteur du « Spectacle vivant »

Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC)

M. Guy DUMÉLIE, vice-président d'honneur, co-président des commissions, éducation, enseignements et pratiques artistiques, et spectacle vivant

Ministère de la culture et de la communication - Direction générale de la création artistique ( MCC - DGCA )

MM. Michel ORIER, directeur général, Pierre LUNGHERETTI, adjoint au directeur général de la création artistique et Bernard BORGHINO, adjoint à la sous-directrice des affaires financières et générales, secrétaire général du programme « création »

Opéra de Paris

MM. Christophe TARDIEU, directeur général adjoint, et Jean-Louis BLANCO, directeur administratif et financier, adjoint au directeur

Scènes musicales actuelles (SMA)

Mme Aurélie HANNEDOUCHE, déléguée générale, et M. Cédric CLACQUIN, membre du Conseil d'administration des SMA et secrétaire national de CD1D

Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)

MM. Pascal ROGARD, président, et Guillaume PRIEUR, direction des affaires institutionnelles et européennes

Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles ( SYNDEAC )

MM. Alain HERZOG, directeur, et Jacques PORNON, vice-président et trésorier

Union fédérale d'intervention des structures culturelles (UFISC)

M. Philippe BERTHELOT, président

Contributions écrites

Centre national des arts de la rue (CNAR)

Groupement national des arts du cirque (GNAC)

Au titre du secteur « Arts visuels »

Fédération des professionnels de l'art contemporain (CIPAC)

Mme Sylvie BOULANGER, membre de l'association française de développement des centres d'art (DCA), directrice du Centre national d'art contemporain dédié à l'oeuvre média (CNEAI)

Mme Marie-Cécile BURNICHON, secrétaire général de Platform

Mme Catherine ELKAR, présidente de l'Association nationale des directeurs de fonds régional d'art contemporain (ANDF), membre de Platform, directrice du Frac Bretagne

Mme Delphine FOURNIER, secrétaire général du CIPAC

Mme Nathalie GIRAUDEAU, vice-présidente du CIPAC, secrétaire de DCA, directrice du Centre photographique d'Île-de-France (CPIF)

M. Emmanuel LATREILLE, président du CIPAC, directeur du Frac Languedoc-Roussillon

M. Dominique PASQUALINI, membre du conseil d'administration de l'Association nationale des écoles supérieures d'art (ANDEA), directeur de L'École média/art fructidor, École des beaux-arts de Chalon-sur-Saône

Mme Catherine TEXIER, vice-présidente du CIPAC, co-présidente de l'Association de développement et de recherche sur les artothèques (ADRA), directrice de l'Artothèque du Limousin

Observatoire du photojournalisme

M. Jacques HEMON, président de l'observatoire du photojournalisme

M. Daniel BARROY, chef de la mission Photographie au ministère de la culture

M. Alain GÉNESTAR, directeur de Polka magazine

M. Samuel BOLLENDORF, photographe-réalisateur

M. Éric LARROUIL, directeur général de l'agence VU

Ministère de la culture et de la communication

Mme Romane SARFATI conseillère pour les arts plastiques au cabinet de Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, et M. Pierre OUDART, directeur adjoint en charge des arts plastiques

Union des photographes professionnels / auteurs (UPP)

M. Jorge ALVAREZ, administrateur, responsable des affaires juridiques, Mme Nolwenn BESCHER, chargée des affaires juridiques, MM. Christian DUCASSE, membre de l'UPP, et Carlos MUÑOZ, administrateur et photojournaliste

Syndicat national des artistes plasticiens CGT (SNAP CGT)

M. Gilles FROMONTEIL

Au titre du secteur du « Cinéma »

Juillet - Novembre 2012

Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC)

M. Éric GARANDEAU, président, Mme Audrey AZOULAY, directrice générale déléguée, MM. Olivier WOTLING, directeur du cinéma, et Olivier GUILLEMOT, directeur juridique et financier

Fédération des industries du cinéma audiovisuel multimédia (FICAM)

MM. Thierry de SEGONZAC, président, et Hervé CHATEAUNEUF, délégué général

Fédération nationale des distributeurs de films (FNDF)

M. Victor HADIDA, président, et Mme Julie LORIMY, déléguée générale

Fédération nationale des cinémas français (FNCF)

MM. Jean LABÉ, président, et Marc-Olivier SEBBAG, délégué général

Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI)

Mmes Marie-Françoise MARAIS, présidente, Mireille IMBERT-QUARETTA, présidente de la Commission de protection des droits, M. Éric WALTER, secrétaire général, et Mme Marion SCAPPATICCI, responsable des relations institutionnelles

Médiatrice du cinéma

Mme Jeanne SEYVET

Société civile des auteurs-réalisateurs-producteurs (ARP)

Mme Florence GASTAUD, déléguée générale

Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)

MM. Pascal ROGARD, directeur général, et Guillaume PRIEUR, directeur des affaires institutionnelles et européennes

Syndicat des producteurs indépendants (SPI)

M. Cyril SMET, délégué Cinéma, et des représentants

ANNEXE

COMPARAISONS INTERNATIONALES EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA CONSOMMATION ILLÉGALE DE BIENS CULTURELS

Allemagne

Une décision de la Cour fédérale datant de mai 2010 a contraint les internautes à sécuriser l'accès à leur réseau Internet, sous peine d'amende. La Cour a également précisé, en avril 2012, que les FAI (fournisseurs d'accès à Internet) étaient tenus de délivrer l'identité de leurs clients contrefacteurs à la demande des ayants droit, que la contrefaçon ait été commise à des fins commerciales ou non.

Australie

Le gouvernement australien a engagé des discussions entre ayants droit et FAI sur la mise en place d'un dispositif de lutte contre le piratage, suite à l'arrêt rendu par la Cour fédérale en mars 2011 sur la responsabilité des FAI relative aux actes de contrefaçon commis par leurs abonnés.

Belgique

L'opposition rencontrée lors de la discussion au Sénat, en mai 2011, d'un texte de loi prévoyant l'instauration d'une réponse graduée a conduit à écarter ce dispositif.

Canada

L'Assemblée nationale a adopté en juin 2012 un projet de loi sur le droit d'auteur, qui doit être validé par le Sénat. Ce texte instaure un dispositif de protection des mesures techniques, l'élargissement des exceptions et le régime de la rémunération pour copie privée.

Corée du Sud

La loi du 22 juillet 2009 sur le piratage a mis en place un mécanisme de réponse graduée pouvant aboutir à des mesures de suspension de la connexion à Internet.

Espagne

La loi 2/2011 relative à l'économie durable - dite loi Sinde -, contient des dispositions permettant le blocage ou la suspension de l'accès aux sites depuis lesquels des contenus protégés sont susceptibles d'être téléchargés. Elle n'est pas applicable aux sites de pair à pair.

États-Unis

Les projets de loi prévoyant le filtrage ou le blocage de noms de domaine (DNS) par les FAI et les opérateurs de moteurs de recherche n'ont pu aboutir en raison de l'opposition d'une partie de l'opinion américaine, relayée par des opérateurs privés. Les obligations actuelles ( Digital Millennium Copyright Act ) concernent le retrait, au cas par cas, des seuls liens renvoyant directement vers des pages contrevenantes à la demande des ayants droit.

En juillet 2011, des accords signés entre les industries musicale et cinématographique et les principaux FAI prévoient l'envoi de messages pédagogiques aux internautes partageant illégalement des contenus via les réseaux de pair à pair. L'accord crée un organisme, le Copyright Information Center, chargé d'une mission pédagogique auprès du grand public et de contribuer à la mise en place de la réponse graduée.

Finlande

Le cadre législatif, voté en 2010, instaurant un mécanisme de réponse graduée prévoit la possibilité de suspension de la mise à disposition du contenu litigieux par l'autorité judicaire.

Irlande

Depuis février 2012, une disposition législative permet aux ayants droit de demander à la Haute Cour une injonction contre un intermédiaire technique en cas d'utilisation de ses services pour violation des droits d'auteur.

Italie

Le projet de réglementation de l'AGCOM (régulateur italien) qui prévoit la mise en place d'une procédure de notification et de retrait doit entrer en vigueur après promulgation de la loi relative aux pouvoirs du régulateur en matière de lutte contre le piratage.

Japon

La loi entrée en vigueur le 1 er octobre 2012 rend passibles d'une amende pouvant atteindre 2 millions de yens (20 000 euros) et d'un maximum de deux ans de prison, les internautes téléchargeant illégalement des fichiers.

Nouvelle-Zélande

La loi entrée en vigueur en 2011 a instauré un mécanisme de réponse graduée en trois étapes, afin de sanctionner le partage illégal de fichiers, avec la possibilité de suspension de l'accès à Internet par le juge pour une durée maximale de six mois.

Pays-Bas

La loi sur les télécommunications, entrée en vigueur en juin 2012, n'autorise plus le blocage de sites diffusant des contenus illégaux. Plusieurs procédures contentieuses ont été engagées par les ayants droit, conduisant à une décision judiciaire ordonnant à deux FAI de bloquer l'accès à un site de pair à pair.

Royaume-Uni

Le Digital Economy Act , adopté en avril 2010, prévoit un dispositif de réponse graduée en deux phases pour lutter contre la contrefaçon en ligne, envoi de messages d'avertissement puis suspension de l'accès ou réduction du débit par les FAI. La mise en application de ce dispositif a été repoussée suite aux interrogations des FAI sur la répartition des coûts.

Suède

Depuis la loi dite IPRED du 1 er avril 2009, les FAI ont obligation de communiquer aux ayants droit, sur décision du juge, les données d'identification d'un abonné dont l'adresse IP a été utilisée pour des actes de contrefaçon sur les réseaux. Cependant, l'absence de coopération des FAI a privé en partie la loi de ses effets.

Taiwan

Un mécanisme législatif de réponse graduée est entré en vigueur en juillet 2009. Les FAI ont l'obligation d'informer leurs abonnés d'une suspension possible de leur accès à internet après la réception de trois messages d'avertissement.


* 1 Rapport d'information n° 55 de M. Yann Gaillard au nom de la commission des finances du Sénat « La Philharmonie de Paris : une dérive préoccupante » (2012-2013).

* 2 Source : Département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la culture et de la communication.

* 3 Note de synthèse du 4 avril 2012 de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat.

* 4 Cet article crée dans le code du travail un article L. 6331-65 ainsi rédigé : « Pour le financement des actions prévues à l'article L. 6331-1 au profit des artistes auteurs définis à l'article L. 382-1 du code de la sécurité sociale, il est créé 1° Une contribution annuelle des artistes auteurs assise sur les revenus définis à l'article L. 382-3 du même code. Le taux de cette contribution est de 0,35 % ; 2° Une contribution annuelle des personnes physiques ou morales mentionnées à l'article L. 382-4 du même code, assise sur les éléments mentionnés au deuxième alinéa du même article. Le taux de cette contribution est de 0,1 %. Les contributions prévues aux 1° et 2° du présent article ne sont pas exclusives de financements par les sociétés d'auteurs. »

* 5 « Dans ce cas, la Commission recherchera s'il s'agit d'une activité d'auteur ou de journaliste en fonction de la description des activités exercées et de la nature des entreprises. S'il s'agit bien d'une activité journalistique exercée à titre principal et procurant à l'intéressé la majorité de ses ressources, la carte sera délivrée. C'est cependant l'occasion de rappeler que tout journaliste doit normalement être rémunéré en salaires, au mois ou à la pige ». Source : site Internet de la CCIJP.

* 6 « Photojournalistes : constat et propositions », rapport n° 2010-23 du 23 juillet 2010, Marie Bertin et Michel Balluteau.

* 7 Voir l'annexe du présent rapport présentant une synthèse des comparaisons internationales dans le domaine de la lutte contre la consommation illégale de biens culturels.

* 8 Avec le projet TIDE (Transversal International Distribution in Europe).

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