AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Malgré un fort recul des ventes en 2013, les véhicules fonctionnant au gazole représentaient encore en France plus de 60 % du parc automobile total et environ 67 % des ventes de nouveaux véhicules . Parallèlement, la part du gazole dans le total des consommations de carburants dépasse 80 %. Tandis que la diésélisation du parc automobile français constitue encore la principale caractéristique de cette filière industrielle, l'Organisation mondiale de la santé a classé en septembre 2012 les fumées émises par les moteurs diesel comme « agents cancérogènes » certains.

Dans un avis de juin 2014 1 ( * ) sur les émissions de particules et de NOx des véhicules routiers, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise d'énergie (Ademe) souligne que « 56 % des émissions nationales d'oxydes d'azote (NOx) sont liées au transport » , dont « 89 % proviennent des véhicules diesel » et rappelle que « 61 % des véhicules légers sont des diesels » dont sept millions sont équipés d'un filtre à particule et douze millions n'en ont pas.

L'impact sur notre santé des fumées émises par les moteurs de véhicules diesel est aujourd'hui avéré, et notamment celui des particules fines et des oxydes d'azote qu'elles contiennent. Cet impact est d'autant plus préoccupant que le secteur des transports routiers contribue à hauteur de 19 % environ des émissions de particules fines les plus dangereuses pour notre santé. Les pics de pollution que l'Île-de-France a connus en mars 2014 ont montré que les concentrations de ces particules pouvaient atteindre des niveaux particulièrement élevés.

D'une manière générale, l'exposition à ces particules fines a des conséquences importantes sur la santé humaine : des pathologies pulmonaires comme la bronchite ou l'asthme jusqu'à un risque aggravé de cancers du poumon ou de la vessie. Si on ne dispose pas aujourd'hui de chiffres permettant de distinguer spécifiquement l'aggravation de la mortalité due au diesel de celle due aux autres sources de pollution, on sait que les particules fines, présentes en grande quantité dans ces fumées, en sont responsables.

Au-delà d'un problème de santé publique grave , se pose également la question du modèle économique de notre filière automobile. La diésélisation du parc automobile, qui a été favorisée par une fiscalité préférentielle, conduit aujourd'hui, d'une part, les constructeurs à investir dans des techniques de « dépollution » de leurs moteurs très coûteuses pour se conformer à la réglementation européenne, d'autre part, l'industrie de raffinage à importer du diesel pour satisfaire la demande.

Dans ce contexte, les sénateurs du groupe écologiste ont déposé le 16 septembre 2014 la proposition de loi n° 802 relative à la prise en compte par le bonus-malus automobile des émissions de particules fines et d'oxydes d'azote et à la transparence pour le consommateur des émissions de polluants automobiles . Il s'agit d'une version « remaniée » de la proposition de loi n° 496 relative à la nocivité du diesel pour la santé, qui avait été rejetée par la commission des finances et qui, faute de temps, n'avait pas pu être examinée en séance publique.

Votre commission s'était déjà saisie pour avis de cette première proposition de loi 2 ( * ) , dont l'article unique visait à créer une nouvelle taxe additionnelle de 500 euros, revalorisée de 10 % tous les ans, sur les véhicules diesel dans le but de renchérir progressivement leur prix afin d'aboutir, comme l'expliquait l'exposé des motifs, à une « quasi-extinction de la filière d'ici dix ans » . Elle avait, lors de sa réunion du 10 juin 2014, émis un avis défavorable à l'adoption de ce texte, regrettant la déconnexion d'une telle mesure d'une réforme globale de plus grande ampleur et plus progressive sur la fiscalité des carburants et de mesures d'accompagnement de la filière industrielle automobile, que la création d'une telle taxe n'aurait pas manqué de déstabiliser profondément.

La présente proposition de loi poursuit les mêmes objectifs mais modifie les moyens pour y parvenir , en tenant compte notamment des remarques formulées par la commission des finances 3 ( * ) et par votre commission au mois de juin en retenant la piste d'un élargissement du bonus-malus écologique aux particules fines.

Elle comporte ainsi trois articles et son exposé des motifs indique que l'objectif du texte est d'intégrer les émissions de polluants atmosphériques (oxydes d'azote et particules fines) dans les critères du malus automobile , qui aujourd'hui ne repose que sur les émissions de dioxyde de carbone. Le dispositif, qui ne traduit toutefois pas exactement cette ambition, crée un nouveau malus pour les véhicules les plus émetteurs de NOx et de particules fines. En renvoyant la fixation du barème de cette nouvelle taxe au cadre réglementaire, il pose d'emblée un problème de constitutionnalité.

Mais cette nouvelle mouture de la proposition de loi écologiste a le mérite de mettre l'accent sur un problème de santé publique plus que jamais d'actualité, qui nécessitera, en tout état de cause, que des mesures adaptées soient prises dans un délai rapproché.


* 1 Les avis de l'Ademe - Émissions de particules et de NOx par les véhicules routiers - juin 2014.

* 2 Avis n° 593 (2013-2014) de Mme Odette HERVIAUX, fait au nom de la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire, déposé le 10 juin 2014.

* 3 Rapport n° 600 (2013-2014) de M. Gérard MIQUEL, fait au nom de la commission des finances, déposé le 11 juin 2014.

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