EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er - Création d'un malus automobile assis sur la quantité de polluants atmosphériques émise

Objet : cet article vise à instaurer une taxe additionnelle sur les véhicules les plus émetteurs d'oxydes d'azote et de particules fines.

I. Le droit existant

Concrétisée lors du Grenelle de l'environnement de 2007, l'idée de favoriser l'acquisition de véhicules peu polluants a donné lieu à la mise en place de deux dispositifs complémentaires destinés à orienter les consommateurs vers des modèles automobiles propres :

- un bonus pour l'acquisition de véhicules propres, assorti d'un superbonus pour la destruction d'un véhicule ancien ;

- un malus applicable aux voitures particulières les plus polluantes, ainsi qu'une taxe annuelle pour certains modèles.

Mais ce malus ne vise aujourd'hui que les émissions de dioxyde de carbone (CO 2 ).

C'est l'article 63 de la loi n°2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007, codifié à l'article 1011 bis du code général des impôts (CGI), qui a institué cette taxe applicable aux voitures particulières les plus polluantes. Le malus est établi en fonction du nombre de grammes de CO 2 émis par kilomètre pour les véhicules qui ont fait l'objet d'une réception communautaire et en fonction de la puissance fiscale pour les véhicules qui n'ont pas fait l'objet d'une telle réception.

Sont ainsi concernés :

- les voitures particulières au sens du 1 du C de l'annexe II à la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil ;

- les véhicules à usages multiples qui, tout en étant classés dans l'annexe précitée, sont destinés au transport de voyageurs et de leurs bagages ou de leurs biens.

Cette taxe additionnelle perçue sur le certificat d'immatriculation des véhicules dont le taux d'émission de CO 2 dépasse le taux fixé par l'article 1011 bis du CGI, est due lors de la délivrance du premier certificat d'immatriculation définitive délivré en France.

Pour 2014, le montant de la taxe s'échelonne de 150 à 8 000 €.

II. Le dispositif proposé

L'article 1 er de la proposition de loi crée une taxe additionnelle à la taxe additionnelle (prévue par l'article 1011 bis du code général des impôts) à la taxe sur les certificats d'immatriculation des véhicules prévue par l'article 1599 quindecies du code général des impôts.

Cette nouvelle taxe serait due par les véhicules, appartenant aux catégories déjà visées par le malus écologique, dépassant une certaine quantité d'émission d'oxydes d'azote et de particules fines.

Le III de l'article prévoit que le barème et les modalités d'application de cette taxe sont définis par décret.

III. La position de votre commission

Votre commission a émis un certain nombre de réserves , tant de forme que de fond.

Sur la forme, votre rapporteure pour avis a pointé des difficultés dans la rédaction du dispositif , rendant ce dernier inopérant.

En premier lieu, la taxe envisagée pose un problème de constitutionnalité dans la mesure où le dispositif prévoit une fixation du barème par voie réglementaire. L'article 34 de la Constitution dispose que « la loi fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures » .

En second lieu, l'article crée un dispositif à plusieurs étages (une taxe additionnelle au malus écologique déjà additionnel au certificat d'immatriculation). En outre, tout en faisant référence au malus prévu par l'article 1011 bis du CGI, la taxe créée n'est, pour sa part, pas codifiée.

Sur le fond, votre rapporteure pour avis a estimé que les effets pervers de ce type de dispositif isolé étaient nombreux et qu'il convenait d'en étudier tous les impacts à l'occasion du projet de loi de finances pour 2015 et du projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte.

Votre commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet article.

Article 2 - Rapport au Parlement sur l'indépendance de l'expertise technique relative à la définition et à la méthodologie des mesures des émissions de polluants par les véhicules automobiles

I. Le droit existant

Aujourd'hui, le taux d'émissions de CO 2 d'un véhicule est indiqué sur la carte grise, cette mention étant prévue par l'annexe III de l'arrêté du 9 février 2009 relatif aux modalités d'immatriculation des véhicules.

Toutefois, si cette mention ne figure pas sur la carte grise, il convient de se rapporter aux documents techniques du véhicule, qui sont en principe fournis lors de l'acquisition, et qui doivent mentionner le taux d'émission de CO 2 mesuré lors de la réception.

Cependant, seules font foi les données émanant de l'organisme technique central (organisme chargé de l'homologation des véhicules) prévu à l'article R. 323-7 du code de la route.

Conformément au décret n° 2002-1508 du 23 décembre 2002 relatif à l'information sur la consommation de carburant et les émissions de dioxyde de carbone des voitures particulières neuves, ce taux d'émission de dioxyde de carbone fait l'objet d'une communication auprès du grand public sous diverses formes :

- dans chaque point de vente, par une étiquette indiquant les émissions de dioxyde de carbone apposée sur chaque voiture particulière neuve ou affichée près de celle-ci, ainsi que par une liste de ces données dressée par marque et par type de véhicule affichée dans le point de vente ;

- dans la documentation utilisée pour la commercialisation, la publicité et la promotion des véhicules , y compris les manuels techniques, par la mention des données relatives aux émissions de dioxyde de carbone se rapportant au véhicule concerné ;

- par la mise à disposition de tout consommateur, dans chaque point de vente, d'un guide de la consommation de carburant et des émissions de dioxyde de carbone des voitures particulières neuves mises en vente sur le territoire national, élaboré par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) à partir des informations transmises par les constructeurs. Il est précisé que ce guide, qui comporte l'ensemble des types de voitures particulières disponibles sur le marché national à la date de sa constitution, est établi une fois par an. Les informations qu'il contient sont en outre disponibles sur un site internet constitué par l'ADEME.

II. Le dispositif proposé

L'article 2 de la proposition de loi prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport portant sur l'indépendance de l'expertise technique relative à la définition et à la méthodologie des mesures des émissions de polluants par les véhicules automobiles. Ce rapport devra être remis avant le 31 mai 2015.

III. La position de votre commission

Votre rapporteure pour avis a estimé que cette proposition était intéressante et devait également s'inscrire dans le cadre de la réforme d'ampleur sur la mobilité propre et la qualité de l'air prévue par le projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte.

Votre commission a émis un avis favorable à l'adoption de cet article.

Article 3 - Création d'un certificat de diagnostic d'éco-entretien

I. Le droit existant

Le décret n° 78-993 du 4 octobre 1978 pris pour l'application de la loi du 1 er août sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services en ce qui concerne les véhicules automobiles a fixé un certain nombre d'obligations à respecter pour le vendeur d'une voiture d'occasion .

Est tout d'abord requise l'apposition d'un étiquetage sur le véhicule comportant obligatoirement la « dénomination de vente » (marque, type, modèle, version, variante du modèle, date de 1 ère mise en circulation) et le kilométrage total parcouru, ainsi qu'un document de vente écrit obligatoire .

En outre, avant la conclusion du contrat de vente, pour tout véhicule de plus de 4 ans, un rapport du contrôle technique doit être remis au consommateur. Il doit avoir été établi depuis moins de 6 mois, et être accompagné du procès-verbal de l'éventuelle contre-visite.

Ce rapport informe avant la vente sur l'état des organes de sécurité de la voiture. Il ne porte que sur certains points de contrôle (châssis, suspension, essieux, direction, freinage, éclairage, roues, carrosseries, équipements). Au vu du bilan technique, l'acheteur peut refuser l'achat du véhicule.

La remise du certificat de contrôle technique après la vente (au moment de la livraison par exemple) constitue une infraction pénale.

II. Le dispositif proposé

L'article 3 de la proposition de loi crée une nouvelle obligation pour le vendeur d'un véhicule particulier ou utilitaire léger diesel de plus de quatre ans : il devra fournir à l'acheteur un certificat d'éco-diagnostic .

Ce diagnostic thermodynamique recensera l'ensemble des émissions polluantes du véhicule et sera mis en oeuvre à partir du 1 er janvier 2016.

Il est prévu qu'un décret précise les modalités d'application de ce certificat.

III. La position de votre commission

Votre rapporteure pour avis a estimé qu'une mesure de cette nature s'inscrivait dans le cadre d'une démarche plus générale, qu'elle rejoint, sur l'importance de l'identification des véhicules polluants afin d'améliorer la qualité de l'air.

Une mission lancée en mars 2013 par le ministère de l'Ecologie, du Développement durable et de l'Energie, le ministère de l'Intérieur, le ministère du Redressement productif et le ministère délégué en charge des Transports, relative à l'identification des véhicules pour la qualité de l'air, a remis en juin 2013 son rapport 10 ( * ) sur la mise en place d'un dispositif permettant d'identifier l'impact de chaque véhicule sur la qualité de l'air.

La mission propose ainsi d'abord de distinguer 3 catégories de véhicules selon leur date de mise sur le marché. Elle recommande ensuite une approche graduelle d'identification reposant dans un premier temps sur des vignettes de couleurs. Ce dispositif pourrait par la suite être systématisé par l'utilisation de moyens technologiques.

Ces pistes entrent dans le cadre des décisions du Comité interministériel de la qualité de l'air (CIQA), mis en place en septembre 2012 et qui a notamment adopté le 6 février 2013 un Plan d'urgence pour la qualité de l'air (PUQA).

Le dispositif prévu à l'article 3 reprend la mesure 18 de ce Plan, qui a pour objectif de développer l'éco-entretien des véhicules (moteurs, plaquettes de frein, pneus...) : « L'objectif est de renforcer l'entretien des véhicules, notamment ceux roulants en ville, car un véhicule bien entretenu pollue moins. La possibilité de contrôler l'éco-entretien des moteurs, plaquettes de frein et pneus lors des différents contrôles d'usage du véhicule sera étudiée. La réévaluation des standards de contrôle technique sera mise à l'examen afin d'améliorer encore les critères de pollution aux particules fines et aux dioxydes d'azote. »

En outre, une mesure similaire a été intégrée au projet de loi relatif à la transition énergétique pour une croissance verte lors de son examen en séance publique à l'Assemblée nationale, à l'initiative du député Philippe Plisson.

L'article 17 bis du projet de loi relatif à la transition énergétique, actuellement en cours d'examen par le Sénat, prévoit donc déjà qu'à compter du 1 er janvier 2016, « préalablement à la vente d'un véhicule particulier ou utilitaire léger de quatre ans ou plus, le vendeur fait effectuer par un professionnel de l'automobile un diagnostic thermodynamique du moteur et de ses émissions des gaz suivants : monoxyde de carbone, hydrocarbures imbrûlés, oxydes d'azote, dioxyde de carbone et oxygène » .

Votre rapporteure pour avis considère ainsi que votre commission aura très prochainement à se prononcer sur un dispositif identique dans le cadre du titre sur la mobilité propre de la réforme de la transition énergétique.

Votre commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet article.


* 10 Rapport « Mission relative à l'identification des véhicules pour la qualité de l'air » de Philippe Follenfant, CGEDD ; Jean-Yves Le Gallou, IGA ; Pascal Clément, Benoît Bettinelli, Jean-Pierre Dardayrol, CGEIET.

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