III. L'ENGAGEMENT ASSOCIATIF, GRANDE CAUSE NATIONALE

Dans un entretien au quotidien Le Monde en date du 20 octobre 2014, le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, M. Patrick Kanner, a rappelé que l'engagement associatif avait été déclaré « grande cause nationale », en s'engageant à mettre en oeuvre les dispositions de la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire en faveur du secteur associatif, qui rassemble 165 000 associations employant près d'1,8 million de salariés, soit près d'un salarié sur dix, ces emplois étant des emplois qualifiés et non délocalisables . À cet égard, il a annoncé qu'un premier décret d'application de la loi devrait intervenir dans le courant du mois de décembre 2014 sur les modalités de mise en place des dispositifs locaux d'accompagnement (DLA) destinés à accompagner la création d'associations. Un autre décret devrait, à la même période, revoir le fonctionnement et le mode de désignation des membres du Haut Conseil de la vie associative (HCVA), avec notamment l'instauration officielle de la parité.

Pour rappel, les crédits du programme 163 sont tenus de respecter les orientations fixées par la lettre de cadrage budgétaire et de s'inscrire dans les plafonds définis par la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 (LPFP). Par conséquent, il n'est pas surprenant que la progression des moyens alloués au service civique au sein du programme pèse sur l'évolution des crédits disponibles pour les autres actions en soutien à la jeunesse et au secteur associatif . Hors service civique et fonds d'expérimentation de la jeunesse (FEJ), non budgété en loi de finances pour 2014, les dispositifs traditionnels en faveur de la jeunesse et de la vie associative bénéficieront, dans le projet de loi de finances pour 2015, de 80,9 millions d'euros, contre 87,3 millions d'euros en 2014, soit une diminution de 7,3 % .

Le débat sur l'éventuel phagocytage des autres actions du programme consacrées à la jeunesse et à la vie associative par la montée en puissance du service civique est désormais dépassé. Le service civique est une locomotive du programme et exerce des effets de levier pas seulement sur l'intégration des jeunes mais également sur le développement du tissu associatif. Grâce au service civique, les associations agréées ont acquis en expertise dans la conduite de projet et ont renforcé la formation de leurs bénévoles. Le monde associatif revendique légitimement sa part du succès que connaît le service civique. Le service civique constitue également un outil pour les services déconcentrés du ministère qui ont su se saisir du dispositif pour accompagner le développement du réseau associatif local.

Votre rapporteur pour avis reconnaît que la principale difficulté réside désormais dans la capacité du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports à apporter un soutien direct et de long terme aux projets associatifs .

A. DES MODES D'INTERVENTION STRUCTURANTS POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA VIE ASSOCIATIVE

Les crédits en faveur du soutien aux associations et au développement de leurs ressources, à l'emploi dans les associations et à la formation des bénévoles sont globalement préservés dont :

- 24,88 millions d'euros (soit un montant identique à celui consenti en 2014) pour le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) qui vise à structurer l'action associative en versant des unités de subvention, appelées « postes FONJEP », qui couvrent la rémunération d'un salarié associatif au profit de près de 2 500 associations ;

- 10,31 millions d'euros (contre 10,83 millions d'euros en 2014, soit une diminution légèrement inférieure à 5 %) pour le fonds de développement de la vie associative (FDVA), destiné à soutenir des initiatives de développement de la vie associative, notamment dans le cadre d'actions de formation en conduite de projet associatif.

L'unité de subvention versée par le FONJEP, en moyenne 7 000 euros par an, soit près d'un tiers d'un salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) chargé, permet à une association de recruter un premier salarié, qui constitue bien souvent un saut de complexité difficile à négocier. Compte tenu du nombre important d'associations qui n'emploient qu'un seul salarié, il est indispensable de sanctuariser les moyens du FONJEP, fonds interministériel qui bénéficie d'un budget avoisinant les 35 millions d'euros alimenté par la participation d'autres structures comme l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSÉ) ou la direction générale de la cohésion sociale.

Le FDVA constitue, pour sa part, un levier important de la consolidation du fonctionnement de la vie associative, en soutenant la qualification des bénévoles de tout secteur, hors les associations sportives. En moyenne, le FDVA permet le financement annuel de près de 6 000 projets de formation bénéficiant à près de 170 000 bénévoles, élus ou responsables d'activité.

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de la commission des finances et de son rapporteur spécial sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », M. Régis Juanico, deux amendements tendant à augmenter les moyens dévolus au soutien de la vie associative :

- un premier amendement visant à transférer 520 000 euros de l'action n° 2 « Développement du sport de haut niveau » du programme 219 « Sport » vers l'action n° 1 « Développement de la vie associative » du programme 163 « Jeunesse et vie associative ». Cet amendement entend prélever 520 000 euros sur la prise en charge des cotisations retraite des sportifs de haut niveau, un poste qui est traditionnellement sur-budgété, afin de les reverser au FDVA, dont la dotation a été initialement diminuée d'autant dans le projet de loi de finances pour 2015 ;

- un second amendement visant à transférer 500 000 euros de l'action n° 2 « Développement du sport de haut niveau » du programme 219 vers l'action n° 2 « Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire » du programme 163. Cet amendement a pour objectif de renforcer l'aide versée par l'État au secteur associatif au travers de subventions aux associations et fédérations bénéficiant d'un agrément national de jeunesse et d'éducation populaire.

Le ministère de la ville, de la jeunesse et des sports rappelle que, selon les chiffres récents publiés par Mme Viviane Tchernonog, chargée de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et au Centre d'économie de la Sorbonne, la part des fonds d'origine publique dans le budget total des associations a diminué de façon continue au cours des quinze dernières années , pour passer de 53,7 % en 1999 à 51,4 % en 2005 et 49,6 % en 2011. Toutefois, il souligne qu'en valeur absolue, le poids des financements publics progresse à l'inverse, puisqu'en 2005 ils représentaient 39,8 milliards d'euros et 42,14 milliards d'euros en 2011. Il convient de rappeler que, résultat de la décentralisation, les financements provenant des départements ont progressé, constituant, avec ceux des communes, près d'un quart des ressources des associations.

Votre rapporteur pour avis se félicite de la signature, le 14 février 2014, par le Premier ministre, les grandes associations de collectivités territoriales et le Mouvement associatif (anciennement appelé la Conférence permanentes des coordinations associatives) de la nouvelle charte des engagements réciproques entre les pouvoirs publics et le monde associatif . Cette charte a été élaborée sur la base du rapport remis en juillet 2013 par notre collègue Claude Dilain et l'ancien préfet de la région Île-de-France, M. Jean-Pierre Duport, qui proposait de :

- refonder les bases du partenariat entre les associations et les collectivités territoriales en intégrant plusieurs dimensions : conforter la place des citoyens au sein des instances de concertation ; rendre plus lisibles et plus transparents les critères d'octroi de subventions ; favoriser la création de lieux d'accueil, d'information et de conseil aux associations en partenariat avec les acteurs associatifs et enfin améliorer la gouvernance démocratique des associations au travers notamment du non cumul des mandats associatifs, de la recherche de la parité et de la non-discrimination ;

- mobiliser le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) pour rendre compte de l'application de cette nouvelle charte dont l'évaluation serait réalisée avec le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et les structures régionales (CESER) ;

- de mettre en place une fonction de délégué interministériel à la vie associative pour assurer une cohérence tant dans la mise en oeuvre de la charte qu'au sein de l'État dans le portage institutionnel de la politique de soutien au développement de la vie associative.

Pour mémoire, le directeur de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative du ministère de la ville, de la jeunesse et des sports est aussi, désormais, le délégué interministériel à la jeunesse. Il serait cohérent que lui soit également confiée la responsabilité de délégué interministériel à la vie associative.

Afin de sécuriser les procédures d'octroi de financements publics aux associations, le Gouvernement a mis en place quatre principaux outils :

- l'adoption d'une disposition législative définissant la subvention insérée , par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire, à l'article 9-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- l'analyse et la formalisation d'une procédure sécurisée d'appel à initiatives qui relève du domaine de la subvention apportant des réponses au besoin de sécurité juridique des collectivités publiques tout en laissant l'initiative des projets aux acteurs ;

- la révision de la circulaire du 18 janvier 2010 en vue de l'adoption d'une nouvelle circulaire du Premier ministre proposant un nouveau modèle de convention pluriannuelle ;

- l'élaboration d'un guide méthodologique à destination des collectivités territoriales qui définisse l'encadrement juridique de la subvention et en précise les modalités de mise en oeuvre.

Les associations d'éducation populaire doivent être au coeur de la réforme des rythmes éducatifs, dans le cadre des activités périscolaires. À ce titre, le décret n° 2013-707 du 2 août 2013 relatif au projet éducatif territorial et portant expérimentation relative à l'encadrement des enfants scolarisés bénéficiant d'activités périscolaires dans ce cadre modifie à titre expérimental, pour une durée de trois ans, les taux d'encadrement des accueils organisés dans le cadre d'un tel projet éducatif territorial afin de faciliter la mise en place des nouveaux rythmes scolaires dans les écoles maternelles ou élémentaires. Dans le projet de loi de finances pour 2015, le soutien national aux associations agréées « Jeunesse et éducation populaire » devrait bénéficier de 8,63 millions d'euros, contre 9,13 millions d'euros en 2014, soit une diminution de 5,5 %.

Un sondage commandé par l'association Les Francas à la société Mediaprism et publié le 26 juin 2012 fait apparaître que les deux tiers des personnes interrogées ne savent pas quoi rattacher au terme d'éducation populaire .

Nos associations d'éducation populaire peuvent compter sur le développement du numérique pour tirer profit des nouvelles perspectives qui se dessinent en matière de travail collaboratif et de partage et de diffusion de contenus, et ainsi renforcer leur proximité auprès des jeunes et des familles, en particulier les plus défavorisés. Votre rapporteur pour avis relève, en effet, que le « texte de positionnement » du Conseil national de la jeunesse et de l'éducation populaire (CNAJEP) posait, dès novembre 2010, la question « L'éducation populaire 2.0 est-elle possible ? » et invitait les acteurs de l'éducation populaire à se saisir des nouvelles potentialités offertes par les technologies de l'information et de la communication, tout en soulignant la nécessité de renforcer l'éducation des jeunes à l'usage du numérique, notamment dans le cadre des réseaux sociaux.

L'audition, le 9 juillet 2014, de Mme Justine Atlan, directrice de l'association « e-Enfance », par le groupe d'études sénatorial sur l'éducation populaire et la culture, consacrée à l'usage sécurisé du numérique 18 ( * ) , a permis de rappeler que la responsabilisation des jeunes dans leurs comportements sur Internet et les réseaux sociaux implique une sensibilisation accrue de l'ensemble de l'équipe éducative, des jeunes et des familles aux enjeux du respect de la dignité humaine et de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la prévention des atteintes à la vie privée et du droit à l'oubli.


* 18 http://www.senat.fr/espace_presse/actualites/201407/quel_usage_securise_du_numerique_pour_les_jeunes.html

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page