EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 2 décembre 2014, la commission a examiné le rapport pour avis sur le projet de loi n° 636 (2013-2014) portant nouvelle organisation territoriale de la République.

M. Hervé Maurey , président . - Nous examinons le rapport pour avis sur le projet de loi n° 636 (2013-2014) portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit NOTRE, que nous avons confié à Rémy Pointereau. Celui-ci étant toutefois empêché cette semaine, il a demandé à notre nouveau collègue Michel Vaspart de le remplacer.

Il n'est évidemment pas nécessaire d'insister sur l'importance de ce texte pour l'ensemble des collectivités territoriales et les territoires que nous représentons.

Plusieurs articles interviennent dans des champs concernant directement notre commission - aménagement du territoire, accès aux services publics, transports, mobilité, déchets, fracture numérique... Il est donc important que notre commission puisse lui imprimer sa marque. Les amendements que nous adopterons en seront un premier signe. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai demandé à avoir un temps de parole spécifique, en tant que président de notre commission, dans la discussion générale qui aura lieu le mardi 16 décembre après-midi.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis - Je vous présente ce rapport au nom de notre collègue Rémy Pointereau, qui ne peut être présent cette semaine et vous prie de l'excuser. Les propos que je tiendrai ici sont donc les siens, même si je les exprime à la première personne.

La présentation de ce projet de loi n'est d'ailleurs pas trop difficile puisque, comme l'a très justement résumé Jean-Pierre Raffarin au cours de son audition, « nous connaissons tous le sujet ; il s'agit maintenant d'arbitrer. C'est le gros avantage du Sénat : nous n'avons pas à chercher les compétences ailleurs. » Je m'en tiendrai donc à quelques remarques d'ordre général, avant de vous présenter plus en détail les articles soumis à l'avis de notre commission.

Tout d'abord, sur la forme. Cette réforme territoriale est menée dans un désordre et une confusion absolus ! Les élus des zones rurales ne comprennent pas l'enchaînement des lois relatives à l'organisation de la République - mais les communes urbaines le comprennent-elles mieux ? Il aurait sans doute été préférable de réfléchir à une loi-cadre, déclinée ensuite dans d'autres textes. Or l'approche qui a été retenue est celle d'une fragmentation entre la loi du 27 janvier 2014 qui crée les métropoles, le projet de loi sur la délimitation des régions dont l'adoption définitive est imminente et le présent texte sur l'organisation territoriale de la République.

La première erreur, nous la connaissons, a été de faire des redécoupages avant de réfléchir à la répartition des compétences ! En effet, il ne s'agit pas simplement de redessiner une carte ! La réforme n'est pas faite pour les élus, mais pour les citoyens, pour l'amélioration de leur cadre de vie. Le but ultime est de faire en sorte que le service qui leur est rendu soit de meilleure qualité et coûte moins cher. Sur ce point, la question du regroupement des régions touche finalement peu les élus de terrain. En revanche, l'évolution des conseils généraux est un vrai sujet, car ce sont bien les premiers partenaires des élus au quotidien.

Les élus locaux se font également du souci s'agissant des ressources financières. Il est vrai que les communes rurales sont habituées à la disette, compte tenu de la faiblesse de leur base fiscale et de l'absence de cotisation foncière des entreprises sur leurs territoires. Mais ce n'est pas pour autant qu'il faut se satisfaire de l'absence d'étude des impacts financiers de ce projet de loi ! Une telle évaluation faisait également défaut à la loi du 27 janvier 2014, muette sur les nouveaux coûts supportés par les intercommunalités.

Il aurait donc fallu définir, dès le départ, les ressources et les compétences des régions avant de les fusionner. Comment évoquer en effet la puissance financière des régions si elles n'ont pas de ressources ? La fusion de deux régions n'augmente pas leurs moyens !

J'en viens maintenant aux remarques de fond, puisque l'objectif est de clarifier les compétences pour renforcer l'efficacité de chaque collectivité, en mettant notamment fin à la clause de compétence générale. Encore faut-il définir les missions avant de décliner les compétences ! Le Gouvernement a fait le pari aveugle de renforcer les régions et de confier l'exercice des compétences de proximité aux intercommunalités, avant d'envisager un temps, la suppression des départements à horizon 2020.

En ce qui me concerne, j'estime que cette solution ne correspond pas à la réalité des besoins ressentis sur le terrain. Des missions précises se dessinent : la commune est la base de la démocratie de proximité et du renforcement du lien social ; le département est le gestionnaire de proximité qui garantit la couverture en services publics ; la région est l'échelon de la stratégie qui veille à l'accessibilité du territoire en grandes infrastructures.

Il faut veiller à bien garder à l'esprit cette logique, car elle correspond à la manière dont s'expriment les besoins. Les revirements successifs du Gouvernement ne sont pas de nature à clarifier les choses. Ainsi, on envisage à présent de confier la distribution de l'électricité et de l'eau potable, effectuée par les syndicats, aux départements qu'on voulait supprimer il y a peu ! Il faut bien dire que les conseils généraux sont les principaux perdants du projet de loi. Le département perd beaucoup de compétences, ce qui peut avoir pour effet pervers de faire apparaître une forme de concurrence avec les syndicats. Je pense d'ailleurs que la tendance à venir est la constitution de grands syndicats départementaux pour la gestion de l'eau ou des déchets.

D'une façon générale, il ressort bien, de l'ensemble des débats et auditions sur ce texte, que les conseils généraux souhaiteraient conserver certaines compétences que les régions ne semblent d'ailleurs pas demander. Et les régions, elle, aspirent à certaines compétences d'État, qu'il ne veut pas leur déléguer. Nous sommes ici un certain nombre de sénateurs à avoir imaginé que les régions et les départements puissent fonctionner comme les communes et les communautés de communes. Nous aurions ainsi deux couples où l'instance inférieure, douée de compétence générale, mutualiserait dans l'instance supérieure ce qu'elle ne peut faire seule. Une élection des conseillers régionaux au second degré, comme autrefois, ferait de la région une communauté de départements, ce qui éviterait les doublons.

Ces réflexions m'amènent logiquement à aborder la question du bloc communal. Je partage la vision d'une République au plus près du terrain. La seule réponse à la complexité croissante de notre société, c'est la proximité. Il faut que les compétences de proximité restent au bloc local. Il est essentiel de remettre la commune au coeur du dispositif. Le citoyen comprend ce qui se passe dans la commune : elle constitue la base de la République, il n'est pas possible de s'en passer. Je me méfie de l'administration parisienne, qui envisage, tous gouvernements confondus, de faire élire les présidents de communautés de communes au suffrage universel et à terme, de supprimer les maires.

Faire le pari de la commune ne freine en rien la mutualisation. Nous la pratiquons d'ailleurs depuis longtemps aves les déchetteries, les équipements sportifs et dans bien d'autres domaines ! Qu'est-ce d'autre qu'une communauté de communes ? Il y a bien mutualisation, mais les décisions sont prises autour de la table : le maire reste le médiateur de la complexité générale.

Il faut donc faire attention à ne pas renforcer excessivement les intercommunalités. En zone rurale, les élus locaux ont du mal à les appréhender. En zone périurbaine, elles ne sont parfois que des décompressions des budgets des villes-centre. Et leur domination politique sur les communes périphériques est une réalité. N'oublions pas que les élus locaux éprouvent toujours une sorte de rejet du pouvoir politique dominant !

Je regarde également d'un mauvais oeil le système qui consiste à répartir les dotations en fonction du degré de mutualisation. La mutualisation doit rester libre pour s'adapter au territoire.

L'intercommunalité n'est pas la réponse à tout. Associer 20 ou 25 communes pauvres ne fait pas une intercommunalité riche. Je ne crois pas aux fusions arbitraires. Le seuil des 20 000 habitants, prévu par le projet de loi, soulève une profonde inquiétude chez les élus ruraux. Dans ces territoires, il est en effet difficile d'atteindre un ensemble de cette taille, sauf à ignorer les distances et les coûts induits. En zone urbaine en revanche, 20 000 habitants, c'est peu. Nous devons sortir d'une logique purement quantitative et privilégier l'humain en adoptant une logique qualitative ! Faisons confiance à l'intelligence collective des élus locaux pour placer le curseur au bon endroit. Pourquoi ne pas laisser chaque département, par le biais de la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI), décider du niveau pertinent du seuil en fonction des réalités territoriales ?

J'en ai terminé avec ces considérations générales qui expliquent ma position sur chacun des sujets précis dont notre commission s'est saisie sur ce projet de loi. Pour rappel, celui-ci comporte 36 articles divisés en six titres. Le titre Ier, qui comporte les articles 1 à 13, a trait au renforcement des compétences régionales et à l'évolution de la carte des régions. Le titre II, avec les articles 14 à 23, porte sur les questions relatives aux communes et à l'intercommunalité. Le titre III, qui contient les articles 24 à 29, traite des enjeux d'accessibilité et de solidarité territoriale. Le titre IV, avec les articles 30 à 34, vise à améliorer la transparence et la responsabilité financières des collectivités territoriales. Le titre V, avec les articles 35 et 36, regroupe les dispositions relatives aux agents. Enfin, le titre VI rassemble les dispositions transitoires et finales dans un unique article 37.

J'entre à présent dans le détail des onze articles dont notre commission s'est saisie pour avis.

L'article 5 crée un plan régional de prévention et de gestion des déchets. Vous le savez, trois schémas coexistent aujourd'hui : les plan régionaux de gestion des déchets dangereux, les plans départementaux de gestion de déchets non dangereux, et les plans départementaux de gestion des déchets du bâtiment. L'objectif de l'article est de simplifier cette planification en rassemblant ces trois plans en un seul, au niveau régional. L'idée est de mieux prendre en compte les évolutions démographiques, techniques, et les objectifs de valorisation. Je crois que cet article participe d'une rationalisation nécessaire de la planification en matière de gestion des déchets et je vous proposerai donc d'émettre un avis favorable à son adoption.

L'article 6 crée un schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire, qui a vocation à absorber les schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie, les schémas régionaux de l'intermodalité et les plans régionaux de prévention et de gestion des déchets. Le SRADDT est donc conçu pour devenir le document essentiel de planification des orientations stratégiques des régions en matière d'aménagement du territoire, de mobilité et de lutte contre le dérèglement climatique.

Là encore, la volonté de rationalisation de la planification est louable ; pour autant, un point mérite notre attention. Le gouvernement souhaite que ces nouveaux schémas aient une valeur prescriptive à l'égard des documents d'urbanisme (SCoT, PLU) élaborés par les communes ou leurs groupements. À l'heure où nous réfléchissons tous aux moyens de réduire le nombre de normes afin de simplifier la vie des collectivités, des entreprises et des citoyens, le principe de subsidiarité devrait prévaloir dans le cadre de cette réforme territoriale. Il n'est pas souhaitable que ces schémas régionaux puissent imposer des règles territorialisées aux échelons inférieurs. Sans aller jusqu'à parler de tutelle, je crois toutefois qu'il s'agit d'une atteinte contreproductive à la libre administration des collectivités. Sans modifier l'équilibre du schéma, qui me semble être un outil rationnel de planification, je vous proposerai donc de supprimer ce caractère prescriptif.

L'article 7 prévoit l'entrée en vigueur du nouveau schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire : ces schémas pourront être mis en place à l'expiration des précédents schémas régionaux, ce qui laisse un délai aux collectivités pour s'adapter. L'article prévoit aussi, comme c'est malheureusement de plus en plus souvent l'usage, une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance dans un délai de 18 mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi, pour préciser le contenu du nouveau schéma. Je vous proposerai de supprimer cette habilitation. Les modalités d'élaboration et le contenu du schéma sont précisés dans le projet de loi : cette habilitation ne se justifie pas.

L'article 8 octroie aux régions la responsabilité de l'ensemble des services de transport routier non urbain, y compris les transports scolaires. Or, il s'agit d'une compétence de proximité, qui ne sera à mon sens pas mieux gérée à l'échelon régional, en particulier si les régions sont élargies ! Leur transfert pourrait même engendrer des surcoûts de gestion. Je vous propose donc un amendement de suppression de l'article, afin que les départements puissent continuer à gérer ces services de transport routier comme aujourd'hui, qu'il s'agisse des services réguliers ou à la demande.

L'article 9 transfère la voirie départementale aux régions. Dans la même logique, je vous proposerai un amendement de suppression. La gestion des routes nécessite d'être effectuée au plus près du terrain, afin de permettre une certaine réactivité face aux accidents ou intempéries. Dans ce cadre, il ne me paraît pas raisonnable de transférer cette compétence aux régions, qui doivent rester des collectivités territoriales à dimension stratégique et non opérationnelle. Je rappelle en outre que les départements ont développé une réelle expertise dans ce domaine depuis le début des années 1980 ; il serait dommage de s'en priver.

L'article 10 ouvre une possibilité pérenne de transférer, au cas par cas, les aérodromes pour lesquels il est plus approprié de confier la compétence aux collectivités territoriales intéressées. La logique est radicalement différente de celle retenue en 2004, où le transfert de 150 aérodromes était une opération ponctuelle et unilatérale de l'État. Il s'agit désormais de reconnaître aux collectivités un droit permanent, à partir du moment où l'aéroport n'est plus d'intérêt national ou nécessaire à des besoins militaires, à bénéficier du transfert, sur la base du volontariat. Je suis favorable à cette disposition, qui aura pour effet de décentraliser un nombre limité d'aéroports. Cela donnera surtout une cohérence d'ensemble aux aéroports restant de la compétence de l'État, c'est-à-dire ceux qui jouent un rôle structurant ou stratégique.

L'article 11 met en place une procédure de transfert des ports relevant du département aux autres échelons, à savoir la région et le bloc communal. Environ 270 ports sont a priori concernés par cette opération. La procédure sera conduite sous l'égide du préfet de région, qui tranchera in fine entre les candidatures concurrentes, si la concertation prévue n'a pas abouti. Je suis favorable à cette disposition, en phase avec les conclusions du rapport remis l'été dernier par notre collègue Odette Herviaux au ministre Frédéric Cuvillier, sur la décentralisation portuaire. Les ports sont des noeuds économiques stratégiques, qui nécessitent des compétences très larges, afin d'exploiter au mieux leur hinterland. Je vous propose simplement de supprimer le caractère automatique du transfert à la région au 31 mars 2016, afin de laisser davantage de temps à la concertation, en particulier pour les petits ports de plaisance qui représentent beaucoup de charges d'entretien et qui ne susciteront pas forcément de candidature spontanée.

L'article 14 propose d'accroître la taille minimale des EPCI à fiscalité propre en relevant le seuil de 5 000 à 20 000 habitants. Je viens de vous exposer ma position sur ce sujet. Je vous propose donc logiquement d'adopter un amendement qui conserve le seuil actuel des 5 000 habitants, laissant à la CDCI le choix de l'augmenter en fonction des réalités du département concerné. Cet article a également pour objectif de réduire le nombre des structures syndicales intervenant dans les domaines de l'eau potable, de l'assainissement, des déchets, du gaz, de l'électricité et des transports. Je vous proposerai un amendement pour préciser que l'objectif n'est pas tellement d'éviter les double-emplois, mais plutôt de viser la rationalisation des compétences et des périmètres, afin d'éviter une stérile mise en concurrence des EPCI à fiscalité propre et des grands syndicats.

L'article 25 relance la dynamique des schémas d'amélioration de l'accessibilité des services au public sur le territoire départemental. Je n'y suis pas hostile, mais j'espère simplement qu'ils connaîtront un meilleur succès que ceux initialement prévus par la loi d'aménagement du territoire du 4 février 1995, qui étaient restés lettre morte. Il est vrai qu'il faut continuer à mobiliser les acteurs pour lutter contre l'éloignement préoccupant de certains services publics et privés en zone rurale.

L'article 26 propose une nouvelle mouture des « maisons de services au public » en mettant l'accent sur la mutualisation des services publics et privés. Il s'agit pour l'essentiel d'adapter le droit aux faits, et j'y suis favorable. En effet, ces espaces connaissent depuis quelques années une hybridation croissante entre public et privé. Ils présentent des statuts et des formes d'organisation variés, selon les contextes locaux, et peuvent être portés aussi bien par une personne publique que par une association loi 1901 ou une entreprise commerciale. Il est donc nécessaire de prévoir un cadre juridique souple qui puisse s'adapter à l'ensemble de ces situations. Je me méfie en revanche de l'objectif annoncé par le Gouvernement d'atteindre 1 000 maisons de service au public à horizon 2017, ce qui reviendrait à doubler leur nombre. En dépit de la création annoncée d'un fonds pour les financer, alimenté par les opérateurs, je n'ai aucun doute sur le fait que cette dynamique contribuera inéluctablement à augmenter la charge pesant sur les collectivités locales.

Enfin, l'article 27 clarifie la gouvernance et la répartition des compétences d'aménagement numérique : il est désormais précisé qu'un groupement de collectivités doit avoir bénéficié d'un transfert préalable de compétence de ses membres pour établir et exploiter des réseaux de communications électroniques. Cet article facilite en outre la participation financière des collectivités à un projet numérique porté par un syndicat mixte, en leur permettant le versement de fonds de concours pouvant être inscrits dans la section d'investissement de leur propre budget - et non en section de fonctionnement, comme c'est actuellement le cas. Je vous propose un amendement étendant cette possibilité à l'ensemble des groupements de collectivités, et non aux seuls syndicats mixtes, afin de sécuriser certains montages existants ; je vous propose également de rallonger de dix à trente ans la fenêtre durant laquelle il est possible de recourir à ce dispositif.

Pour conclure, je voudrais insister sur le fait que la décentralisation n'est pas une politique comme une autre. Quand nous sommes dans les territoires, nous voyons la situation des PME, des artisans, des agriculteurs. Or plus leur douleur est grande, moins elle est entendue. A Paris, les gens n'en ont pas conscience. Le véritable succès de la décentralisation, c'est d'avoir apporté la République au plus près du terrain. En s'éloignant de cet esprit, on se rapproche du populisme.

M. Jean-Jacques Hyest , rapporteur de la commission des lois . - Je ne vois pas vraiment de désaccord entre les amendements présentés et ce que sera sans doute le rapport de la commission des lois.

L'évolution du projet de loi qui visait à supprimer progressivement les départements n'est plus à l'ordre du jour, si j'en crois les derniers propos tenus par le Premier ministre. Par conséquent, tous les transferts de compétences initialement prévus du département vers la région, par exemple les collèges et les routes, doivent être oubliés.

Il importe en revanche que les régions aient des compétences stratégiques. C'est la raison pour laquelle je suis favorable au regroupement des schémas, à l'instar de ce qui est prévu en matière de déchets. Il faut qu'un niveau de collectivité se charge d'assurer la cohérence d'ensemble. Certaines choses sont impossibles à gérer si l'on reste au niveau du département. On ne va pas construire une usine de déchets à Paris, même si l'on aimerait parfois que la capitale contribue davantage aux dépenses.

Un seul sujet me pose problème dans le rapport qui vient d'être présenté : à quoi servirait un schéma régional qui ne serait pas prescriptif ? Si j'ai bien compris les propos du rapporteur, sa critique vaut uniquement en matière d'urbanisme : il est favorable à un schéma prescriptif dans les autres domaines. C'est un point important, car on a multiplié les plans et les schémas sur de nombreux sujets : aménagement du territoire, mobilité, lutte contre le réchauffement climatique... il faut bien rationaliser. Simplement, la question se pose sur le caractère prescriptif du SRADT à l'égard des documents d'urbanisme, SCoT et PLU. En Ile-de-France, notre schéma est prescriptif, il est même approuvé par décret ! La rédaction de l'article 6 est sans doute maladroite, mais il faudra bien réfléchir à ce sujet.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - Je précise que Rémy Pointereau entend supprimer le caractère prescriptif dans tous les domaines, et pas uniquement en matière d'urbanisme. En ce qui me concerne, je pense que l'on a dans notre pays un enchevêtrement de documents, qui dépendent tous les uns des autres, et qui bloquent nos projets. Plus nous multiplierons les dispositions prescriptives, plus le problème se posera. À l'heure de la simplification, cette démarche n'est pas très cohérente ! Sur mon territoire, nous venons d'approuver un SCoT et on est en train d'élaborer une charte de parc naturel régional (PNR) : il va donc falloir revoir le SCoT pour assurer sa compatibilité. On gaspille de l'argent public alors même que l'on a de moins en moins de moyens dans les collectivités locales. Attention à ne pas ajouter de nouvelles normes prescriptives : on a besoin de libérer, et non de contraindre à outrance !

M. Jean-Jacques Hyest , rapporteur de la commission des lois . - Mais il n'y aura plus qu'un seul schéma, c'est quand même un avantage !

M. Hervé Maurey , président . - Mon sentiment est qu'il y a deux grandes difficultés dans ce projet de loi. La première concerne le seuil des intercommunalités, uniformément fixé à vingt mille habitants : je crois que l'on est tous d'accord pour dire que ce n'est pas satisfaisant. La seconde porte sur le SRADT prescriptif, et je rejoins les propos du rapporteur. Autant il est intelligent de fusionner les trois schémas relatifs aux déchets en un seul, autant l'idée d'un SRADT qui s'imposerait aux SCoT et aux PLU me paraît hérétique. Je suis l'un des rares à ne pas avoir voté le Grenelle de l'environnement, précisément à cause des SCoT prescriptifs. Je trouvais déjà qu'il s'agissait d'une contrainte trop forte. Et là, on décide d'ajouter un niveau supplémentaire qui irait s'imposer aux documents d'urbanisme. C'est beaucoup trop contraignant !

Éventuellement, comme le suggère Jean-Jacques Hyest, on pourrait peut-être différencier ce qui relève de l'urbanisme du reste, car l'urbanisme n'est vraiment pas une compétence de la région. Cela mérite réflexion !

Pas plus tard que la semaine dernière, Ségolène Royal nous a elle-même confirmé que l'on faisait beaucoup trop de schémas dans notre pays. Elle nous a d'ailleurs demandé de l'aider à enrayer cette tendance. J'invite nos collègues de l'opposition à écouter ces sages propos !

Enfin, pourquoi examine-t-on aujourd'hui un texte qui vide les départements de leurs compétences ? On ne comprend plus très bien.

M. Jean-Jacques Hyest , rapporteur de la commission des lois . - Ce projet de loi a été déposé il y a un certain temps déjà, mais ce n'est plus la volonté du Premier Ministre !

M. Hervé Maurey , président . - Tout cela n'est pas très cohérent. On ne sait plus quels sont réellement les projets du Gouvernement en la matière. On entend désormais qu'il est question de maintenir les départements uniquement dans les territoires ruraux. Mais qu'est-ce qu'un département rural ? J'aimerais le savoir. On est dans le flou !

M. Louis Nègre . - Le projet de loi pose un problème de méthodologie, qu'a soulevé le rapporteur. On a l'impression de mettre la charrue avant les boeufs. On a défini les périmètres des régions avant de savoir ce qu'elles étaient. On le découvre petit à petit. Deux questions sont posées, celle des compétences et celle du financement de ces compétences. Nous avons défini de « grandes régions » - je le mets entre guillemets car en fait le périmètre a été variable en fonction des personnalités politiques sur place. Nous en définissons maintenant les compétences, la question du financement restant encore assez floue. J'espère que nous aurons des réponses.

On ne peut que se féliciter du passage de trois schémas à un schéma. Ségolène Royal l'a évoqué lors de son audition l'autre jour. Mais le caractère prescriptif pose problème. Poussé à l'extrême, il devient une tutelle. Soit on supprime ce caractère prescriptif, comme le propose le rapporteur, soit on autorise ce caractère prescriptif, mais à condition que le schéma soit un document consensuel élaboré après une discussion commune des collectivités concernées. Je suis très réservé sur la prescriptivité s'il n'y a pas de co-élaboration des documents.

Les transports routiers et la voirie sont deux points d'achoppement. Qui va s'occuper de tel ou tel virage sur une voie départementale au chef-lieu de région ? Personne. Les départements s'en occupent bien, il faut leur laisser cette compétence. C'est pareil pour les transports scolaires. Donner cette compétence aux régions risquerait de laisser des élèves au bord de la route...

Sur le seuil de 20 000 habitants, le Gouvernement a évolué, semble-t-il, ce qui est positif, compte tenu des réalités du terrain.

Mme Évelyne Didier . - Notre commission est saisie pour avis sur quelques articles et j'ai l'impression d'entendre un débat de commission saisie au fond. Sur les plans régionaux, celui qui concerne les déchets en particulier, il faudra bien dimensionner les outils et limiter les investissements multiples, qui nuisent aux investissements publics comme privés. Les grands équipements, les centres de tri par exemple, pourraient être gérés au niveau régional. Mais il faudra veiller à ce que la région récupère le savoir-faire et les compétences des départements, qui s'étaient saisis du sujet, peut-être par des transferts de personnels. Notre groupe avait déposé une proposition de loi qui prenait en compte les bassins de vie, pour dépasser les frontières administratives.

Ne soyons pas naïfs. Cette massification et régionalisation mettra sur le même plan les déchets ménagers, industriels et du bâtiment. Avec le développement du déchet comme ressource, nous avons tendance à nous tourner vers le privé. Il faudra veiller au maintien de la compétence de salubrité publique des communes. À défaut, les zones non rentables seront délaissées, et nous aurons des zones blanches en matière de déchets, comme il en existe dans le domaine numérique.

Sur la voirie et les transports, il y a quand même une cohérence du Gouvernement, qui s'attache à déshabiller les départements de toutes leurs compétences, mis à part le social. On a en effet réalisé que les intercommunalités ne sont pas en mesure de l'assumer, sauf quelques agglomérations. Le renforcement des intercommunalités et des régions est cohérent, et je vous invite à lire l'étude d'impact annexée au projet de loi, qui est très révélatrice des objectifs que le Gouvernement poursuit avec ce texte.

M. Hervé Maurey , président . - Nous n'avons jusqu'à présent parlé que des articles dont nous sommes saisis...

M. Jean-Jacques Filleul . - Dans son intervention, Rémy Pointereau parle de désordre et de confusion, ce que je trouve un peu sévère. Il s'agit tout de même d'un problème un peu compliqué. Les régions ont été regroupées en treize grandes régions, et les Français en ont l'air satisfaits, puisque d'après un sondage, 53 % d'entre eux sont favorables au nouveau découpage. Si ce projet de loi était étudié sans que ce découpage ait eu lieu, on se poserait les mêmes questions. Il faut que le Sénat fasse preuve de sagesse, comme il a l'habitude de le faire. Je ne partage pas l'avis du rapporteur. Le débat est de toute façon difficile. Il y a eu des modifications, des évolutions, ce qui est positif. Cela ne signifie pas que le débat est anarchique, ou qu'il faille le caricaturer. La région existe. Les départements vont jouer leur rôle. Le bloc communal aussi. Il joue déjà un rôle important, et il continuera de le faire, ce qui est souhaitable. L'arrivée des intercommunalités a été une grande révolution territoriale. Lorsqu'on est regroupé, on fait mieux les choses que quand on est seul. J'aime bien le fait qu'il y ait un seul schéma régional, et qu'il soit prescriptif. J'ai été maire pendant trente-et-un ans, et président de communauté de communes. Lorsqu'on fait les plans locaux d'urbanisme et le schéma de cohérence territoriale, il faut avoir une vision territoriale plus large que celle de la commune.

Le problème du seuil des 20 000 habitants est réglé aujourd'hui. Il faut agir en fonction des réalités locales, que connaissent bien les femmes et les hommes présents sur les territoires. Le débat ne sera pas trop dur sur ce point.

Je suis favorable au transfert de la compétence « transports » à la région, mais ce n'est pas le cas de tous mes collègues. Il y a un vrai débat sur ce sujet. Il faut là aussi une vision plus large pour les transports, et en même temps, trouver une solution pour les transports scolaires, ce qui devrait être le cas lors des débats. Puisque les départements continuent d'exister, ils doivent garder ce rôle.

En ce qui concerne la voirie, le débat est difficile. La plupart de nos collègues considèrent qu'elle doit rester aux départements. Peut-être que les anciennes voies nationales qui avaient été transférées aux départements pourraient revenir aux régions.

Ce sont des sujets complexes. Je suis fier que ce débat ait lieu. Quand nous aurons terminé ces deux lois, nous aurons réussi une réforme qui n'ira pas à l'encontre de l'intérêt des territoires.

M. Hervé Maurey , président . - Je n'ai pas compris la position du Gouvernement sur le seuil de 20 000 habitants, qui est la clé de ce texte...

M. Jean-Jacques Filleul . - Il faut plus de souplesse.

M. Hervé Maurey , président . - Qu'est-ce que cela veut dire, concrètement ?

M. Jean-Jacques Filleul . - Que les territoires décideront.

Mme Nicole Bonnefoy . - Nous ne partageons pas l'esprit général du rapport présenté. Ce projet de loi s'inscrit dans un triptyque, après la loi de modernisation de l'action publique et d'affirmation des métropoles (MAPAM) et la loi sur la délimitation des régions. Il vise à clarifier les compétences de chaque collectivité pour moderniser le cadre de l'action publique territoriale. C'est un texte qui tend à spécialiser chaque échelon sur des compétences définies, en supprimant la clause générale de compétence pour optimiser la mise en oeuvre des politiques publiques dans les territoires et engendrer des efforts propres à mettre un terme à la dispersion des subventions publiques. Ce sont des dispositions attendues par de nombreux acteurs, les acteurs économiques et les citoyens, qui demandent plus de lisibilité, d'efficacité et de rationalisation dans l'emploi des fonds publics. Cet effort de clarification se traduit notamment dans l'élaboration de schémas de planification stratégique à l'échelle régionale, au premier rang desquels, le schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire. Nous trouvons cet outil pertinent, comme le rapporteur de la commission des lois. L'élaboration d'un SRADDT intégrateur, prévue aux articles 5 et 6, qui se substituera aux divers schémas existants, est une avancée notoire dans la mise en oeuvre d'une véritable stratégie d'aménagement durable du territoire, en fixant un certain nombre d'objectifs partagés en matière de densité, de logement social et très social, de performance énergétique, de préservation des terres agricoles, d'urbanisme commercial, etc. Il apportera de la clarté tout en préservant la concertation, et fera de la région l'échelon qui impulse et coordonne la définition de ces objectifs avec les autres collectivités concernées. Nous saluons le caractère prescriptif donné au schéma, contrairement à vous. Le groupe socialiste entend même en faire un levier de prise en compte des problématiques propres aux territoires très ruraux en proposant, par voie d'amendement, l'intégration d'un volet spécifique relatif à leur désenclavement et à l'amélioration de l'offre de services publics.

Par ailleurs, le texte a le mérite de laisser de la souplesse pour la répartition de l'exercice des compétences. L'article 8 prévoit ainsi que l'organisation des transports scolaires pourra être déléguée par les régions aux départements.

Les schémas départementaux d'accessibilité aux services publics et les maisons de services publics prévus aux articles 25 et 26 seront des outils efficaces pour renforcer l'offre de services dans les zones qui présentent un déficit d'accessibilité. Ils rendent possible la définition d'obligations de service public, ce qui est important, la contribution des opérateurs pour mutualiser les financements et la possibilité de recourir aux moyens du privé pour combler les retards de dessertes accumulés dans certains territoires.

Nous soutiendrons donc ce texte, qui va dans le bon sens.

M. Gérard Miquel . - L'histoire se répète. Si, dans nos formations politiques respectives, nous avions été capables d'avoir une position commune claire sur ces sujets, nous n'en serions pas là. Louis Nègre dit qu'on fait passer la charrue avant les boeufs. Je disais la même chose au moment de la réforme territoriale de Nicolas Sarkozy. Et souvenez-vous de la loi Raffarin : son objectif était de renforcer les régions, et elle a finalement renforcé les départements ! Je compte beaucoup sur la sagesse du Sénat, qui va adopter un texte d'équilibre. Je me réjouis de ce qui a été fait sur les régions, qui seront plus grandes. Dans ce contexte, le Premier ministre a réfléchi - c'est la preuve qu'il n'est pas fermé - et il a pensé garder les départements pour assurer la solidarité sociale et territoriale, dans la mesure où ils en auront les moyens, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

Sur le seuil d'intercommunalité, je suis persuadé que nous trouverons une solution car la situation diffère si l'on est maire d'une grande agglomération ou d'une petite commune rurale. J'ai dans mon département  des zones avec sept habitants au km 2 : le seuil de 20 000 habitants ne peut y être atteint, sauf à regrouper 80 à 100 communes dans une même communauté de communes !

Le renforcement de la compétence économique des régions est une évidence. Pour les transports scolaires, même si elles les récupèrent, elles les délégueront aux départements. C'est une compétence de proximité.

La voirie doit rester départementale. J'irai plus loin, en proposant à mes élus de constituer un syndicat mixte gérant les voiries départementale et communale, pour mutualiser les moyens. Nous avons besoin de faire de l'optimisation, de la mutualisation, et de la péréquation.

La réduction du nombre de structures, de syndicats en particulier, est une nécessité. Dans mon département, il y a une trentaine de syndicats d'eau. Ce n'est plus possible. Mais ce n'est pas facile. Pour y arriver, il faut donner un peu de pouvoir au préfet. J'ai créé une communauté de communes, à laquelle une commune ne voulait pas adhérer. Le préfet l'a forcée, elle nous remercie aujourd'hui.

En ce qui concerne les déchets, mon département est à la limite extrême d'une région. J'ai un schéma départemental et un gros syndicat départemental, que je préside. Je coopère fortement avec les départements voisins, dont l'un appartient à la région Aquitaine, un autre à la région Auvergne, et un à la région Limousin. Nous avons des coopérations renforcées. Que va-t-il se passer si j'ai un schéma purement régional ? Il faut préserver ces coopérations. Je préférerais que l'on affirme que pour les déchets ménagers, la région coordonne les plans départementaux au niveau régional ou interrégional. Je présenterai des amendements en ce sens.

M. Jean-François Longeot . - Quel est l'objectif de cette réforme ? On a conçu un emballage, les treize régions, et aujourd'hui on se rend compte qu'il est vide, et on se demande ce qu'on met dedans. Ce n'est pas grave qu'il soit vide, car on arrivera bien à trouver des compétences. La difficulté, on l'entend bien lorsque notre collègue évoque la question des syndicats d'eau, mais cela concerne aussi les syndicats d'électricité, qui font bien leur travail. Aujourd'hui, on ne sait pas comment on va financer tout ça, donc on va chercher des financements dans des structures qui ont fait leurs preuves, pour essayer d'alimenter les budgets nouveaux des départements ou des régions. Mais on aura perdu la technicité des syndicats d'énergie et le principe de l'affectation des crédits sur l'énergie.

On a gardé les départements parce qu'on ne savait pas où on allait mettre l'action sociale. On a oublié de fixer un plafond pour les élus. La question est de savoir comment on fait des économies, et où. Ce seuil de 20 000 habitants est stupide, pourquoi pas 19 612 ou 21 416 ? Un regroupement de communes, ce sont des affinités, la volonté de certains territoires de travailler ensemble, ce n'est pas une addition. Le groupe socialiste dit que le problème est réglé. Comme le président, je ne suis pas encore rassuré. La disposition figure toujours. Le Premier ministre a été prudent. Je ne suis pas rassuré si l'on laisse cette question à la commission départementale de coopération intercommunale. J'ai énormément souffert dans ma commission départementale : la discussion a duré deux ans, sur une enclave d'une commune de 120 habitants par rapport à une autre de 125 habitants. Tout le monde s'est battu, personne n'a voulu de la proposition de regroupement. Aujourd'hui, si on les y oblige, ce sera difficile... Il faut faire confiance aux élus et les laisser gérer leurs territoires.

M. Jacques Cornano . - À l'article 8, pour les départements d'outre-mer, un amendement sera présenté pour permettre à ces régions d'évoquer le lien avec les EPCI concernés. Le schéma des transports doit prendre en compte le caractère insulaire, qui n'est pas évoqué lorsqu'on parle de continuité territoriale.

M. Benoît Huré . - Je vais peut-être avoir une approche dissonante. Quand on veut réformer un pays, il faut écouter les concitoyens. Ils ont peur de la mondialisation. Comment l'action publique s'organise-t-elle pour les protéger ? Il faut des réponses de proximité. Avec le développement des technologies, d'Internet, des TGV, des autoroutes, les régions n'ont plus d'utilité. Il faudrait plutôt un État stratège avec des déclinaisons territoriales sur des grands espaces, et qui soit suffisamment fort à Bruxelles. D'expérience, je redoute qu'un Premier ministre ou un président de la République aille négocier à Bruxelles accompagné de douze barons locaux...

Les communes exercent bien leurs compétences de proximité, avec les départements. Il faudrait rendre un peu de pouvoir aux préfets de département.

La Champagne-Ardenne et la Picardie ont construit un pôle de compétitivité sur les agro-ressources, la chimie verte, qui se substituera demain à la pétrochimie. Ce projet a été fait avec la Wallonie. Dans le domaine de l'industrie, la Champagne-Ardenne a construit un pôle de compétitivité avec la Lorraine, aussi avec la Wallonie, ainsi qu'avec la région de Brême, en Allemagne. Si l'on se met dans des carcans artificiels - les entités régionales -, cela va être un peu compliqué. Il ne faut pas se faire d'illusions sur la compétence économique des régions. A chaque fois qu'il y a un problème économique ou industriel, les régions ne les régleront pas, sans une implication forte de l'État. L'économie de proximité, les PME en particulier, ont besoin d'interlocuteurs de proximité.

Je ne crois pas à la péréquation entre collectivités. La seule péréquation est celle qui vient de l'État. Lorsqu'il y a une péréquation entre collectivités, c'est que l'État s'en est mêlé.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - Je vais vous donner mon impression. Je reste sur ma faim, car la population attendait une réforme de fond, et nous allons garder l'ensemble de nos strates. Certes, on essaie de répartir les compétences, ce qui est déjà bien. Mais il y avait une autre attente des élus locaux, que nous avons pu constater lors de notre campagne électorale, qui est celle d'une simplification des structures de gestion du territoire de la République. Cela fait 22 ans que je suis maire, j'ai exercé deux mandats au conseil général, et j'ai été chef d'entreprise auparavant. Nous sommes dans un pays bloqué, à tous les niveaux. Lorsque des artisans veulent recruter des apprentis, ils ne peuvent rien faire. Les collectivités territoriales ne peuvent rien faire. Regardez le temps qu'il faut pour faire avancer des dossiers un peu complexes. C'est terrible. Et il y a un tas de structures qui ont un petit pouvoir sur tous ces projets. S'ajoutent à cela les services déconcentrés de l'État, à l'échelle départementale et régionale, qui peuvent avoir une interprétation différente les uns des autres. La réforme Sarkozy-Fillon a été balayée d'un revers de main. Je m'attendais aujourd'hui à une autre réforme. Or, on a l'impression de mettre un emplâtre sur une jambe de bois, ce qui me pose un problème de fond.

J'ai une réserve sur les transports. Je suis persuadé que le transport scolaire doit rester une compétence de proximité. Mais si l'on sépare le rail et la route, cela crée une concurrence stupide entre les deux modes, alors que nous voulons développer le fer. Dans mon département, le même trajet coûte deux à trois euros en autocar, sept euros en train. Il y aurait plus de cohérence si tous les transports étaient gérés par la même collectivité. En même temps, il est difficile de dissocier les transports en général et les transports scolaires. C'est donc une question difficile.

Je ne reviens pas sur les syndicats. Il faut que nous soyons raisonnables les uns et les autres, afin de remettre de l'ordre dans les structures. Il y a trop de gens qui ont une petite bribe de pouvoir et peuvent bloquer nos projets à un moment ou à un autre.

M. Jean-Jacques Filleul . - Nous découvrons des amendements conséquents, je demande dix minutes de suspension de séance.

M. Hervé Maurey , président . - Accordé.

La séance est suspendue dix minutes.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - Les schémas régionaux d'aménagement et de développement durable du territoire ne sauraient avoir un caractère prescriptif à l'égard des documents d'urbanisme, comme le gouvernement le propose à l'alinéa 26 de l'article 6. Une réflexion est en cours sur les moyens de réduire la quantité de normes : le principe de subsidiarité devrait prévaloir. Sans modifier l'équilibre du schéma, qui pourra constituer un outil rationnel de planification, l'amendement n° 1 vise donc à supprimer l'obligation de « compatibilité », au bénéfice d'une seule « prise en compte ».

M. Jean-Jacques Filleul . - Nous sommes contre la suppression du caractère prescriptif.

L'amendement n° 1 est adopté.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'article 7 prévoit une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance. Cette habilitation ne semble pas pertinente. Les modalités d'élaboration et le contenu du schéma sont d'ores et déjà précisés dans le projet de loi. L'amendement n° 2 supprime cette habilitation non justifiée.

L'amendement n° 2 est adopté.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 3 supprime l'article 8 du projet de loi qui transfère aux régions la gestion du transport scolaire et des transports routiers et non urbains.

M. Jérôme Bignon . - Je suis embarrassé par cet amendement. Il faudrait plutôt imaginer des règles de délégation pour les transports scolaires.

M. Jean-Jacques Filleul . - C'est pour cette raison que nous voterons contre.

L'amendement n° 3 n'est pas adopté.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 4 vise à supprimer le transfert de la voirie départementale aux régions.

M. Jean-Jacques Filleul . - Nous y sommes favorables.

M. Jean-Claude Leroy . - Je suis favorable à cet amendement, qui va dans le bon sens, mais j'aurais une petite nuance à ajouter. On aurait peut-être pu conférer aux anciennes routes nationales transférées le caractère de routes d'intérêt régional. Elles sont en effet souvent gérées par plusieurs départements. La maîtrise d'ouvrage pourrait être laissée aux départements, tout en autorisant une participation de la région. Nous déposerons certainement un amendement à cet effet.

L'amendement n° 4 est adopté à l'unanimité.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 5 vise à assouplir la procédure de transfert des ports. Il supprime le caractère automatique du transfert à la région en l'absence d'autre candidature au 31 mars 2016. Le risque d'imposer systématiquement un transfert à une collectivité qui n'en voudrait pas existe, par exemple pour les petits ports de plaisance, dont les charges d'entretien risquent d'effrayer certaines communes ou intercommunalités. Il ne faudrait pas pour autant que la région en soit systématiquement l'attributaire, car il ne lui appartient pas de gérer les petites infrastructures de proximité.

L'amendement n° 5 est adopté à l'unanimité.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 6 supprime la hausse du seuil minimal de constitution d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), que le présent article relève de 5 000 à 20 000 habitants. Il propose de laisser la commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) décider de l'opportunité de relever ou non ce seuil, en fonction des réalités du département.

L'amendement n° 6 est adopté.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 7 supprime la notion de double emploi entre les syndicats mixtes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. Il privilégie un objectif de rationalisation des compétences et des périmètres, qui ne suggère pas une concurrence stérile entre les EPCI à fiscalité propre et des grands syndicats.

L'amendement n° 7 est adopté à l'unanimité.

M. Michel Vaspart , en remplacement de Rémy Pointereau, rapporteur pour avis . - L'amendement n° 8 étend à l'ensemble des collectivités territoriales et à leurs groupements la possibilité de recevoir des fonds de concours des autres collectivités ou groupements concernés par un projet d'aménagement numérique. Cette possibilité n'est prévue que pour les syndicats mixtes par le présent projet de loi. Enfin, la durée maximale de versement des fonds de concours est relevée de dix à trente ans, s'agissant d'investissements lourds à amortir sur de longues périodes.

M. Jean-Jacques Filleul . - Sur cet amendement, nous adoptons une position de sagesse. Nous le comprenons, mais nous aimerions un débat en séance à ce sujet, donc nous nous abstenons.

L'amendement n° 8 est adopté.

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