Avis n° 166 (2015-2016) de M. Yves POZZO di BORGO et Mme Michelle DEMESSINE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 19 novembre 2015

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N° 166

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VI

DÉFENSE :
PRÉPARATION ET EMPLOI DES FORCES

Par M. Yves POZZO di BORGO et Mme Michelle DEMESSINE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Mmes Nathalie Goulet, Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Emorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, MM. Gaëtan Gorce, Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Jean-Vincent Placé, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk, Raymond Vall .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602

Sénat : 163, 164, 165 et 167 à 170 (2015-2016)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS POUR AVIS

1.- Le programme 178 « Préparation et emploi des forces », qui constitue le coeur de la mission « Défense », représente 67 % de ses dépenses prévisionnelles en crédits complets , soit 26,8 milliards d'euros . Ce sont 237 418 équivalents temps plein travaillé (ETPT)*, soit 87 % des ETPT qui concourent à la réalisation du programme 178. Il est doté de crédits de paiement à hauteur de 7,2 milliards d'euros , soit, par rapport à 2015, une hausse de près de 1,5 % . Ses autorisations d'engagement (AE) s'élèvent à 9 milliards d'euros , en augmentation de 2,8 % par rapport à l'année dernière.

Cette évolution est conforme à l'actualisation de la loi de programmation militaire (LPM) votée cet été. En effet, la progression des AE prend en compte l'allocation supplémentaire par rapport à la LPM initiale d'une enveloppe de 500 millions d'euros dédiée à l'entretien programmé du matériel .

Vos rapporteurs pour avis resteront attentifs au fait que le niveau des AE respecte , en 2017 également, la programmation actualisée , afin que l'effort consenti en faveur de la disponibilité des matériels ne « glisse » pas dans le temps. De même, les crédits de paiement devront être inscrits en temps et en heure pour ne pas aggraver, en fin de LPM, les reports de crédits déjà importants que connait la mission « Défense ».

2.- L'effort consenti en faveur des crédits alloués au maintien en condition opérationnelle était indispensable pour permettre de maintenir, en 2016, le niveau d'engagement très important de la France en OPEX et sur le territoire national dans le cadre de l'opération SENTINELLE.

Vos rapporteurs constatent que l'érosion des taux de disponibilité des matériels est infléchie , mais que cela ne permet pas d'atteindre encore le plein respect des normes d'activité . Il est essentiel que, pendant cette période de programmation, les niveaux de préparation des forces progressent afin de respecter les normes de l'OTAN .

3.- Cette amélioration ne sera pas possible tant que le coût du maintien en condition opérationnelle des équipements utilisés en OPEX restera sous-évalué . La suractivité et la surintensivité de l'utilisation de parcs vieillissants, ou non-matures, engendrent des surcoûts importants et sous-estimés en construction de la LPM .

Vos rapporteurs, qui ont centré leur attention, cette année, plus particulièrement sur le maintien en condition opérationnelle estiment que l'évolution des acteurs et des méthodes du maintien en condition opérationnelle est satisfaisante , comme en témoignent la remontée de la disponibilité des équipements en OPEX. Pour autant, les limites du modèle sont désormais atteintes .

Faute d'équipements et d'instructeurs, accaparés par les engagements, les jeunes militaires ne peuvent obtenir les qualifications suffisantes pour être projetés, les militaires expérimentés repartent donc en OPEX, avec les équipements disponibles, surutilisés. Un cercle vicieux s'est mis en place que les réformes internes aux structures intégrées de maintien en condition opérationnelle ne suffisent pas à briser. Vos rapporteurs pour avis souhaitent attirer l'attention sur ce déficit organique qui fragilise la préparation des armées .

4.- A cela s'ajoute l'insuffisante compensation des efforts consentis par les armées pour soutenir les exportations d'armement . Si vos rapporteurs pour avis constatent que les niveaux records de commandes d'armements atteints en 2015 lèvent les hypothèques qui pesaient sur la LPM, ils remarquent que les mécanismes de soutien aux exportations (SOUTEX) ne prennent pas en compte les surcoûts de maintenance des matériels vieillissants, utilisés plus longtemps pour permettre à l'industriel de prendre aux armées les frégates ou les Rafale qu'il n'a pas encore produits et qu'il exporte ainsi. Cette conception du coût du soutien à l'exportation ne paraît pas complète si l'on n'ajoute pas le « coût de possession des matériels » remplaçant les livraisons des matériels attendus et finalement exportés.

Sous le bénéfice de ces observations, vos rapporteurs pour avis émettent une appréciation positive sur les crédits inscrits dans le PLF 2016 pour le programme 178.

À l'issue de sa réunion du mercredi 25 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

* Les ETPT sont imputés sur le programme 212 « Soutien de la politique de la défense ».

INTRODUCTION

Madame, Monsieur,

Depuis l'adoption par le Parlement de la loi de programmation militaire (LPM), le contexte stratégique a évolué, instabilités et menaces allant croissant. Le niveau d'engagement pour les forces françaises en opérations extérieures s'est accru avec les opérations SANGARIS 1 ( * ) menée en République Centrafricaine depuis décembre 2013, BARKHANE 2 ( * ) qui a succédée à SERVAL 3 ( * ) au Mali depuis l'été 2014 et CHAMMAL 4 ( * ) mise en oeuvre en Irak depuis septembre 2014 et en Syrie depuis septembre 2015. Le besoin d'engagement sur le territoire national pour garantir la sécurité est devenu indiscutable après les attentats des 7 et 9 janvier 2015 et a donné lieu à la mise en place de l'opération SENTINELLE.

Dans cette perspective, la préparation et l'emploi des forces, alors que l'activité opérationnelle était déjà un objectif prioritaire de la LPM, sont devenus des enjeux essentiels. L'actualisation de la LPM a permis de dégager de nouvelles marges de manoeuvre dans un modèle de défense qui ne permettait pas de répondre aux nouveaux engagements demandés à nos armées. La révision à la baisse des prévisions initiales de diminutions d'effectifs du ministère de la défense a permis notamment de dimensionner la force opérationnelle terrestre à la hauteur des enjeux. L'augmentation de 500 millions d'euros au profit de l'équipement programmé des matériels était indispensable pour permettre la régénération des matériels soumis à de fortes pressions lors de leur utilisation très intensive en opérations extérieures.

Ainsi, l'évolution des crédits du programme 178 est conforme, dans le projet de loi de finances pour 2016, à la LPM actualisée.

Les autorisations d'engagement de l'ensemble du programme augmentent de 3 % et atteignent 9,03 milliards d'euros. Pour 2015, les crédits de paiement du programme s'élèvent à 7,19 milliards d'euros, soit une progression de 1,47 %.

L'effort budgétaire consenti est satisfaisant, à condition de maintenir dans le projet de loi de finances pour 2017 le même niveau d'autorisations d'engagement complémentaires que dans le projet de loi de finances pour 2016, soit 250 millions d'euros, afin que les effets attendus sur l'entretien programmé des matériels puissent se produire avant la fin de la période de programmation. Le temps du maintien en condition opérationnelle est un temps industriel dans lequel une décision n'est suivie d'effet que 18 mois à deux ans et demi après avoir été mise en application. Il est donc important pour soutenir le niveau d'engagement élevé demandé à nos armées de mettre en oeuvre sans retard les autorisations d'engagement. De même, il conviendra de veiller à ce que le niveau des crédits de paiement correspondant aux autorisations d'engagement soit inscrit, sans retard, tout au long de la loi de programmation militaire, afin de ne pas aggraver les phénomènes de report de charges que connaît le budget de la mission défense.

Enfin, la problématique du maintien en condition opérationnelle a fait l'objet d'une attention particulière de la part de vos rapporteurs, dans la lignée de l'actualisation de la LPM.

PREMIÈRE PARTIE : LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016

I. L'INDISPENSABLE EFFORT D'ACTUALISATION DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE...

Le niveau des engagements auxquels participent les forces armées impose un rythme extrêmement soutenu d'utilisation des équipements. Leur intensité réduit en outre la durée de vie des équipements et impose une maintenance accrue, d'autant que certains matériels sont aujourd'hui très âgés. Cette très forte sollicitation est par ailleurs aggravée par les conditions environnementales sévères rencontrées sur les théâtres d'opérations extérieures actuelles qui éprouvent le matériel, mais aussi le personnel.

En conséquence de l'insuffisance des crédits du maintien en condition opérationnelle (MCO), une crise de la disponibilité du matériel s'est déclarée au début des années 2000. Dans le contexte stratégique post guerre froide, les crédits affectés à la maintenance des équipements avaient en effet diminué.

Certes, des réformes d'organisation et de structures ont été menées pour améliorer les choses et contrecarrer la baisse des crédits, mais les performances sont restées décevantes en termes de disponibilité. La dégradation a même repris dans la deuxième moitié des années 2000 et touchait les trois armées. Le Général Girier, Directeur de la structure de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la Défense (SIMMAD) indiquait, lors de son audition en 2014, qu'il manquait une demi-annuité au MCO aéronautique sur la dernière LPM, soit un décrochage d'environ 1 milliard d'euros.

À ceci s'ajoute le fait que la loi de programmation militaire pour 2014-2019 fixait comme objectif d'enrayer la baisse d'activité opérationnelle constatée pour retrouver progressivement des niveaux d'activité comparables à ceux de l'OTAN. Ceci imposait un effort significatif en matière d'entretien programmé des matériels.

A. LES FACTEURS QUI RENDAIENT NÉCESSAIRE UN EFFORT PARTICULIER EN FAVEUR DU MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE

1. La disponibilité des matériels : le poids des OPEX

La disponibilité technique opérationnelle (DTO) des matériels de l'armée reflète le rapport entre la couverture des besoins liés aux contrats opérationnels et la disponibilité des parcs nécessaires à la satisfaction de ces contrats. Le tableau suivant présente la DTO des matériels par rapport aux exigences des contrats opérationnels, en 2014 et en 2015.

Disponibilité technique opérationnelle

(en pourcentage du contrat opérationnel)

Matériels

2014*

2015**

Armée de terre char Leclerc

82

96

Armée de terre AMX 10 RCR

46

66

Armée de terre VAB

57

73

Armée de terre VBCI

74

95

Armée de terre pièces de 155 mm

53

72

Armée de terre Hélicoptères de manoeuvre

45

57

Armée de terre Hélicoptères d'attaque ou de reconnaissance

59

65

Marine nationale Porte-avions

92

90

Marine nationale SNA

69

73

Synthèse autre bâtiments de la marine

79

76

Marine nationale Composante frégates

61

60

Marine nationale Chasse

60

69

Marine nationale Hélicoptères

53

55

Marine nationale Guet aérien, Patrouille et surveillance maritime

50

53

Armées de l'air Avions de combat

88,5

86

Armées de l'air Avions de transport tactique

69

69

Armées de l'air Avions d'appui opérationnel

86

86

Armées de l'air Avions à usage gouvernemental

100

100

Armée de l'air Hélicoptères de manoeuvre et de combat

81

77

Armée de l'air Système sol - air moyenne portée

_

90

*Réalisation,**prévision actualisée.

Source : Projet annuel de performance « Défense »

a) L'armée de terre

Pour les matériels de l'armée de terre, l'activité soutenue sur des théâtres exigeants accélère le vieillissement des matériels et amoindrit par conséquent les capacités de réengagement immédiat. En effet, les conditions d'emploi des matériels font subir une attrition significative et accélèrent le vieillissement. La remise à niveau du matériel de retour d'opération constituera l'effort principal des années à venir. Elle devrait s'étaler sur les cinq prochaines années et conditionnera la remontée de la disponibilité.

Les principaux parcs sous tension sont les véhicules de l'avant blindé (VAB), les blindés médians et les vecteurs logistiques. En ce qui concerne les VAB, la disponibilité de ce parc, très fortement employé dans les opérations terrestres, est préservée au prix d'un investissement financier et humain important. L'arrivée de son successeur, le véhicule blindé multirôles (VBMR) permettra de desserrer la contrainte. Pour les matériels aériens de l'armée de terre, la régénération des hélicoptères, extrêmement sollicités en OPEX, est lente. L'ancienneté des parcs, les visites préventives, le déficit de maintenance et les réparations des dégradations directement liées aux opérations en cours expliquent la faible disponibilité de ce parc. En 2014, on observait une saturation des capacités de l'outil de maintenance étatique comme industriel. Des plans d'actions spécifiques ont été mis en oeuvre pour chacune des flottes en 2015.

Selon les chiffres communiqués par le ministère de la défense, les surcoûts en entretien programmé des matériels, dus aux OPEX, atteindraient pour les équipements de l'armée de terre 53,5 millions d'euros en 2015 et 53,2 millions d'euros pour les matériels aéroterrestres.

b) La marine

Pour la marine, outre naturellement l'âge de ses bâtiments et équipements, l'essentiel des difficultés se concentre sur les flottes « avions de patrouille maritime » et « hélicoptères de combat ». Les retards de production induits par le changement du système d'information technico-logistique du SIAé sur le site de Cuers et les difficultés spécifiques de la montée en puissance du Caïman sont deux facteurs d'explication partielle des difficultés rencontrées dans ce domaine.

Selon les chiffres communiqués par le ministère de la défense, les surcoûts en entretien programmé des matériels, dus aux OPEX, atteindraient pour les équipements de la marine 39,53 millions d'euros en 2015 5 ( * ) soit une augmentation d'un peu moins de 50 % par rapport à 2014.

c) L'armée de l'air

Pour l'armée de l'air, les engagements dans la bande sahélo-saharienne, la République centre-africaine (RCA) et au Levant ont accru les tensions logistiques et les problèmes de disponibilité en métropole pour l'aviation de chasse et de transport. Ceci se traduit en particulier par des difficultés dans la formation des jeunes pilotes.

Ceci a également pour conséquence une fragilisation des capacités du transport aérien qui n'est plus en mesure de faire face aux demandes des armées, que ce soit pour leur préparation opérationnelle (projection pour exercices, entraînement des troupes aéroportées,...) ou au profit des opérations.

Les difficultés majeures qui pénalisent durablement la qualité de l'entraînement des équipages restent le ravitaillement en vol et les équipements de mission (nacelles de désignation laser, nacelles de reconnaissance,...) qui se raréfient en raison d'un engagement élevé d'une vingtaine d'avions de combat en opérations extérieures.

Les besoins en préparation opérationnelle ne peuvent être pleinement satisfaits dans l'attente de la montée en puissance de l'A400M. Le parc des avions de transport stratégique est pour sa part sous-dimensionné en nombre par rapport aux contrats opérationnels. La vétusté du parc des ravitailleurs et la difficulté à assurer leur rénovation expliquent que la situation de leur disponibilité soit très tendue. Enfin la baisse de la disponibilité de la flotte des hélicoptères légers, datant de 2014, résulte de difficultés industrielles. L'amélioration de la disponibilité n'est pas attendue avant 2016.

Selon les chiffres communiqués par le ministère de la défense, les surcoûts en entretien programmé des matériels, dus aux OPEX, atteindraient pour les équipements de l'armée de l'air 87,25 millions d'euros en 2015 soit une augmentation d'un peu moins de 120 % par rapport à 2014.

2. Les répercussions sur la capacité opérationnelle des troupes

La préparation des forces nécessite de disposer d'équipements techniquement disponibles et d'un niveau quantitatif et qualitatif de préparation opérationnelle conforme aux normes organiques nécessaires à la satisfaction des contrats. Tel est l'objet de l'indicateur 5.1 du projet annuel de performance, intitulé « niveau de réalisation des activités et de l'entraînement ».

L'indisponibilité des matériels ne joue que pour partie sur le niveau de réalisation des activités et de l'entraînement, la forte sollicitation des forces en OPEX et en OPINT influe également sur cet indicateur.

En 2014 et en 2015, l'entraînement des forces terrestres aurait dû être maintenu à 83 journées de préparation opérationnelle (JPO). Pour 2015, la prévision actualisée est de 64 journées, alors que la LPM 2014 - 2019 fixait un objectif de 90 JPO, dont 35 jours réalisés en espace de manoeuvre pour garantir dans la durée la tenue des contrats opérationnels fixés par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (LBDSN) de 2013.

Le déclenchement sans délai, puis la pérennisation de l'opération Sentinelle, ont amené à réviser le niveau de la préparation opérationnelle en 2015, réduisant le nombre de JPO d'environ 30 % faute d'unités disponibles pour les activités programmées, du fait de leur mobilisation pour Sentinelle.

Le tableau suivant recense également les heures de vol ou jours de mer par militaire, réalisés en 2014 et en 2015. Pour 2015, il s'agit d'une prévision actualisée.

Niveau de réalisation des activités et de l'entraînement

2014*

2015**

LPM***

JPO

84

64

90

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Terre

156

156

180

Heures de vol par pilote de chasse Air

153

150

180

Heures de vol par pilote de transport Air

235

260

320

Heures de vol par pilote d'hélicoptère air

174

170

200

Jours de mer par bâtiment marine

dont bâtiments de premier rang

83

92

86

94

100

110

Heures de vol par pilote de chasse Marine

pilote qualifié nuit

136

194

150

180

180

220

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Marine

218

180

220

Heures de vol par pilote de patrouille maritime Marine

360

288

340

*Réalisation, ** Prévision actualisée, *** Objectif

Les objectifs fixés par la LPM sont loin d'être atteints en 2015. Pour l'armée de terre, à partir de 2015, la mise en place de l'opération Sentinelle a eu pour effet mécanique de réduire les journées de préparation, en mobilisant les troupes qui n'étaient pas en OPEX ou en préparation d'OPEX, au détriment de la préparation. Pour l'armée de l'air, selon les informations recueillies par vos rapporteurs, l'activité des pilotes de chasse français est inférieure de plus de 10 % à celle des pilotes de chasse américains et britanniques. Pour la marine, la disponibilité dégradée des Atlantique2 (ATL2), des frégates anti sous-marines ainsi que l'ancienneté des sous-marins nucléaires d'attaque, notamment, expliquent que les objectifs ne puissent pas être atteints.

Dans le cadre de la préparation de la LPM 2014-2019, la mise en oeuvre du nouveau modèle d'armée accompagnée des réformes engagées dans le domaine du soutien, devait, selon le ministère de la Défense permettre de « tendre vers les normes d'activité reconnues dans le cadre de l'OTAN à partir de 2016 au fur et à mesure de la réalisation du nouveau modèle » 6 ( * ) . Il apparait que les valeurs cibles fixées pour 2016 sont bel et bien inférieures aux normes d'entraînement de l'OTAN : 90 jours d'entrainement pour les forces terrestres, 100 jours de mer pour les bâtiments, 240 heures de vol pour les pilotes en moyenne. Les efforts budgétaires consentis aboutissent à une inflexion de la tendance mais ne permettent pas d'atteindre les objectifs OTAN que votre commission considère comme une référence pertinente.

B. 500 MILLIONS D'EUROS SUPPLÉMENTAIRES EN FAVEUR DU MCO ET DE L'EPM

1. Les dispositions prévues par la loi de programmation militaire initiale

Le maintien en condition opérationnelle des matériels est la condition de l'efficacité des armées tout autant que celle de leur sécurité. Il regroupe trois types de dépenses : l'entretien programmé des matériels (EPM) qui correspond aux achats de prestations et de pièces de rechange et qui est présenté sous forme d'agrégats dans les documents budgétaires, la masse salariale de la main-d'oeuvre interne au ministère et enfin les dépenses d'investissement et d'entretien des infrastructures (figurant au programme 212 « Soutien de la politique de la Défense »). L'EPM représente plus de la moitié des dépenses totales de MCO, la masse salariale environ 40 % et les dépenses d'investissement moins de 5 %.

Les enveloppes financières des lois de programmation militaire précédant celle de 2014-2019 étaient sous-calibrées par rapport à l'activité qu'ont connue nos armées. Celles-ci ont d'ailleurs dû faire face, au début des années 2000, à une crise de disponibilité des matériels, préjudiciable en termes d'objectifs et de respect des missions.

Le rapport de la Cour des Comptes, déposé en septembre 2014 7 ( * ) , précise que l'ensemble des actions de maintenance préventive et curative a représenté 15 % du budget de la mission défense en 2012 soit un peu plus de 6 milliards d'euros. Il a mobilisé 45 000 agents du ministère. Son coût a augmenté de 22 % en euros constants depuis 2000, « sans que les problèmes d'insuffisance de disponibilité des matériels relevés à l'époque n'aient été résolus ».

La LPM pour la période 2014-2019 a pris acte de la nécessité de faire de l'activité opérationnelle un objectif prioritaire, d'une part, et de produire un effort financier important au service d'une préparation opérationnelle renouvelée, d'autre part. La LPM, avant actualisation, prévoyait ainsi que les crédits alloués à l'EPM devaient progresser en moyenne de 4,3 % par an en valeur pour s'établir à un niveau moyen de 3,4 milliards d'euros courants par an sur la période.

2. L'actualisation de la loi de programmation militaire

La loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense augmente de 3,8 milliards d'euros les crédits de la défense prévue entre 2016 et 2019, portant ses ressources à un total de 162,41 milliards d'euros sur la période restant à courir jusqu'en 2019, contre 158,61 milliards initialement prévus. Les moyens supplémentaires ainsi ouverts sont destinés à financer entre 2016 et 2019 :

- à hauteur de 2,8 milliards d'euros, la masse salariale et les dépenses de fonctionnement impliqués pour l'essentiel par le maintien d'effectifs prévus par la loi d'actualisation,

- pour un montant d'un milliard d'euros, un double effort en matière d'équipement des forces, équitablement réparti entre eux les crédits destinés à l'EPM et ceux destinés aux opérations d'armement. Ils bénéficieront l'un et l'autre d'un abondement de 500 millions d'euros sur la période.

Les 500 millions d'euros nouveaux destinés à l'EPM devront permettre la régénération de matériels soumis à de fortes pressions lors de leur utilisation en opérations extérieures. C'est ainsi en moyenne annuelle 125 millions d'euros supplémentaires qui seront consacrés à l'EPM sur la période 2016-2019. En conséquence, les crédits consacrés à l'EPM s'établiront à un niveau moyen de 3,5 milliards d'euros courants par an sur la période 2014-2019.

Après deux années consécutives de hausse, de 5 % environ par an en 2014 et 2015, les crédits d'entretien programmé des matériels croissent, en 2016, de 196 millions d'euros, soit une progression de plus de 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015 à périmètre constant. Ces crédits s'établissent ainsi à 3,4 milliards d'euros. Dès 2016, 250 millions d'euros d'autorisations d'engagement sont ouverts afin de lancer des projets relatifs au MCO des patrouilleurs, des SNA et frégates, au soutien des C130 ou encore aux pièces de rechange au profit des hélicoptères.

Les indicateurs d'activité pour 2016 devraient ainsi être en amélioration par rapport à ceux de 2015.

II. ... DEVRAIT PERMETTRE DES AMÉLIORATIONS EN 2016

A. LE PROGRAMME 178 DANS LE PLF 2016

La présentation du programme dans les documents budgétaires est double :

- par « actions », conformément à la loi organique relative aux finances publiques ;

- par « opérations stratégiques », agrégats propres au ministère de la défense qui sont de nature plus transversale et qui peuvent se retrouver dans plusieurs programmes de la mission.

Vos rapporteurs ont décidé d'utiliser les deux outils car ils apportent tous deux des éléments intéressants pour l'analyse ; pour autant, leur coexistence complique la lecture des crédits du programme. Le tableau suivant présente l'évolution, entre 2016 et 2015, des crédits du programme 178, par actions.

Présentation des crédits du programme 178 par actions
(hors fonds de concours et attributions de produits)

Lois de finances initiales,
en milliards d'euros

Autorisations d'engagement
(AE)

Crédits de paiement
(CP)

2015

2016

2015

2016

Planification des moyens et conduite des opérations

0,464

0,434

-6,48 %

0,446

0,441

-1,31 %

Préparation des forces terrestres

1,401

1,388

-0,94 %

1,280

1,225

-4,29 %

Préparation des forces navales

3,003

2,881

-4,06 %

1,958

1,954

-0,2 %

Préparation des forces aériennes

2,171

2,546

+17,29 %

1,867

1,950

+4,48 %

Logistique et soutien interarmées

1,464

1,502

+2,57 %

1,256

1,342

+6,79 %

Surcoûts liés aux opérations extérieures

0,280

0,280

0 %

0,280

0,280

0 %

Total du programme 178

8,783

9,031

+2,82 %

7,088

7,192

+1,47 %

N.B. : pour 2014, il s'agit des crédits hors titre 2.

Les crédits de paiement progressent de 1,47 %. Les autorisations d'engagement augmentent de 2,82 % en 2016, soit un net ralentissement par rapport à l'année dernière où elles progressaient de 18% pour faire face aux besoins d'entretien programmé des matériels des forces sous-marines hors dissuasion. Les engagements croissaient ainsi de 62 % principalement du fait du maintien en condition opérationnelle des sous-marins nucléaires d'attaque (SNA), des bâtiments de surface ou encore du maintien en condition opérationnelle des Rafale.

Le graphique suivant présente la répartition des crédits du programme 178 par actions. La préparation des forces navales et la préparation des forces aériennes bénéficient chacune de 27 % du total des crédits du programme. La préparation des forces terrestres représente 17 % des ressources du programme.

Répartition en actions des crédits du programme 178 :
7,19 milliards d'euros pour 2016

La structure du programme ne varie donc pas par rapport à 2015, la part de chaque action restant extrêmement stable.

Présentation des crédits du programme 178 par « opérations stratégiques »
(y compris attributions de produit du service de santé des armées)

Lois de finances initiales,
en millions d'euros

Autorisations d'engagement
(AE)

Crédits de paiement
(CP)

2016

2016

Entretien programmé du matériel

4 340

3 386

Dissuasion

1 073

423

Renseignement

33

32,1

Équipements d'accompagnement

745

721

Activités opérationnelles

1 149

1 145

Fonctionnement et entretien programmé du personnel

1262

1204

Opex

280

280

Total du programme 178

8 884

7 192

N.B. : Il s'agit des crédits hors titre 2. De plus, les autorisations de programme n'incluent pas les autorisations d'engagement supplémentaires, soit 97 millions d'euros, accordées au service de santé des armées (SSA) pour lui permettre d'amorcer, dès le début de la gestion, des opérations qui ont ensuite vocation à être couvertes par des attributions de produit. De même les autorisations d'engagement supplémentaires, à hauteur de 50 millions d'euros, qui ont vocation à être couvertes par des sessions de matériel ne sont pas incluses.

1. La planification des moyens et la conduite des opérations

L'action n° 1 du programme 178, « Planification des moyens et conduite des opérations », a une vocation interarmées et contient les crédits visant à préparer et conduire les opérations militaires au niveau national et international.

La sous-action relative à l'« Emploi des forces » concerne les services ou organismes à vocation interarmées ou de commandement : état-major des armées, commandement des opérations spéciales,... Elle se caractérise cette année par la création du centre de soutien des opérations et des acheminements (CSOA) et le transfert des ressources associées à son fonctionnement sur cette sous-action, soit 0,11 million d'euros.

Elle regroupe également plusieurs contributions à l'OTAN : 59,2 millions d'euros correspondant au budget militaire de l'alliance (entraînement et qualification des forces), 68,05 millions pour le programme d'investissement de l'alliance, contre 41 millions d'euros en 2015, ou encore 22,11 millions liés à la cyberprotection d'une part et à la cyberdéfense, d'autre part. Ces ressources en nette augmentation par rapport à 2015 témoignent de la priorité opérationnelle donnée à la cyberdéfense.

La sous-action « Renseignement d'intérêt militaire » regroupe les crédits de la Direction du renseignement militaire (DRM) hors dépenses de personnel. Après une année de forte augmentation des autorisations d'engagement, conformément à la priorité accordée par la LPM renseignement, l'année 2016 enregistre une diminution des autorisations d'engagement et des crédits de paiement.

La sous-action « Système d'information et de communication » a connu en 2015 des évolutions de structure, notamment le transfert de trois centres de développement auparavant situés au niveau des trois armées. Ceci avait induit une augmentation des autorisations d'engagement qui n'a plus de raison d'être en 2016. Les crédits de la direction interarmées des réseaux d'infrastructure et des systèmes d'information de la défense (DIRISI) sont également en diminution, conformément au niveau des consommations constatées les années précédentes.

2. La préparation des forces terrestres

L'action n° 2 « Préparation des forces terrestres » regroupe les crédits permettant de garantir l'aptitude de la composante terrestre à assurer, dans un cadre interarmées, national ou multinational, les missions qui lui sont confiées, aux termes des contrats opérationnels.

Après huit années consécutives de déflation des effectifs, le projet de loi de finances pour 2016 marque une rupture. L'armée de terre augmentera son volume de forces engagées sur le territoire national pour répondre aux nouveaux contrats opérationnels d'engagement majeur permanent. La force opérationnelle terrestre (FOT) devra ainsi atteindre le format des 77 000 hommes décidé par le Président de la République.

Selon les informations recueillies par vos rapporteurs lors de l'audition du chef d'état-major de l'armée de terre, jeudi 29 octobre 2015, l'augmentation du format de l'armée de terre se traduira par la création de 30 000 postes supplémentaires étalée sur les exercices 2016 et 2017. Le chef d'état-major de l'armée de terre souhaite répartir ainsi les créations de postes : 80 % de recrutement et 20 % de fidélisation des contrats. Il lui apparaît important, grâce au lissage du recrutement sur deux ans, de maintenir un ratio de sélection satisfaisant, soit un recrutement pour deux candidats.

S'agissant de la sous-action relative au maintien en condition opérationnelle du matériel, 30 000 matériels terrestres majeurs seront soutenus par les organismes de maintenance en 2016. L'année 2016 sera encore marquée par la poursuite de la montée en puissance des parcs de nouvelle génération, la prolongation de service des matériels d'ancienne génération et la remontée progressive de l'activité conformément à la LPM. Par ailleurs, l'effort important de remise à niveau de matériel devrait être amplifié pour soutenir l'activité de la nouvelle FOT.

3. La préparation des forces navales

L'action n° 3 relative à la préparation des forces navales est décomposée en quatre sous-actions présentées dans le tableau suivant et dont la finalité est de maintenir l'aptitude de la marine nationale à assurer les missions qui lui sont confiées, dans un cadre interarmées, interministériel et international.

La marine nationale contribue à la dissuasion nucléaire grâce aux sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) et à la composante aéronavale embarquée sur le porte-avions.

En 2016, les arrêts techniques majeurs concerneront une frégate de la défense aérienne, deux frégates anti sous-marines, un bâtiment de projection et de commandement, deux bâtiments de commandement et de ravitaillement, deux chasseurs de mines, une frégate de surveillance, deux patrouilleurs de haute mer, cinq bâtiments-écoles et quatre bâtiments de moindre importance. De même, 2016 verra la fin de l'indisponibilité périodique pour entretien réparation (IPER) et adaptation des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE) « Le Triomphant » et « Le Téméraire ». L'IPER n° 3 du SNA « Améthyste » commencera en 2016.

Le niveau des autorisations de d'engagement pour 2016 est supérieur au niveau des crédits de paiement en raison :

- du renouvellement du contrat pluriannuel de maintien en condition opérationnelle courant des SNLE,

- de la passation de marchés au profit de l'entretien programmé des matériels aéronautiques (26 millions d'euros) et au profit de l'entretien programmé du matériel naval (367 millions d'euros concernant principalement le marché de l'arrêt technique majeur numéro 2 du porte-avions, le renouvellement du marché de MCO des frégates de type Lafayette, le MCO des frégates de surveillance et l'indisponibilité pour entretien de longue durée d'un SNA),

- de la montée en puissance pour 110 millions d'euros d'autorisations d'engagement de la force maritime, en cohérence avec l'augmentation des crédits de paiement dévolus à l'entretien programmé des matériels aux termes de la loi de programmation militaire.

4. La préparation des forces aériennes

L'action n° 4 relative à la préparation des forces aériennes se décompose pour sa part en cinq sous-actions, présentées dans le tableau suivant. Elles ont pour finalité de maintenir l'aptitude de l'armée de l'air à assurer dans un cadre interarmées, interallié et interministériel, les missions qui lui sont confiées (protection, dissuasion et intervention aux termes du LBSDN de 2013 et du contrat opérationnel).

Cette action concourt également à la dissuasion nucléaire puisque l'armée de l'air assure la mise en oeuvre de sa composante aéroportée, qui mobilise des avions de combat mais aussi des avions de ravitaillement en vol et de surveillance aérienne, des systèmes de défense sol-air et des postes de commandement.

Au titre de l'EPM, les activités principales prévues en 2016 sont les suivantes :

- le soutien spécifique au contrat opérationnel, aux opérations extérieures et aux exportations de Rafale,

- la montée en puissance des nouveaux matériels aéronautiques de l'armée de l'air (notamment le Rafale, l'A400M, le REAPER, le MRTT),

- la poursuite de la montée en puissance de la navigabilité des flottes,

- la rationalisation des centres informatiques et la poursuite des travaux d'interopérabilité des systèmes d'information et de communication, notamment dans le cadre de la coopération bilatérale entre la France et le Royaume-Uni et de la coopération trilatérale entre la France, les États-Unis et le Royaume-Uni.

En 2016, les autorisations d'engagements destinées à l'équipement programmé des matériels progresseront de plus de 20 %. Ceci s'explique par :

- la montée en puissance de la flotte Rafale (423,79 millions d'euros) destinée à se substituer progressivement à la flotte M2000 (239,27 millions d'euros en 2016),

- l'arrivée des nouveaux matériels (410 millions d'euros) tels que l'A400M,

- les mises à niveau rendues nécessaires par le maintien de l'activité des C160 jusqu'en 2023 et la pérennisation d'un socle minimal de capacités de transport tactique,

- et la remontée progressive de l'activité programmée à compter de 2016 pour rejoindre à terme l'objectif de la LPM de 180 heures de vol par pilote de chasse.

5. La logistique et le soutien interarmées

Enfin, l'action numéro cinq « Logistique et soutien interarmées » regroupe le service de santé des armées, qui fera l'objet d'un développement ultérieur, la fonction pétrolière, le soutien des forces par les 61 bases de défense, les soutiens complémentaires 8 ( * ) , le service interarmées des munitions, le service du commissariat aux armées.

Dans le cadre du PLF 2016, la sous-action « fonction pétrolière » est supprimée. Elle regroupait les crédits de l'ensemble des organismes du service des essences des armées. À partir de 2016 les dépenses de fonctionnement et d'investissement inhérentes à l'activité du service des essences des armées sont intégrées au compte de commerce « approvisionnements de l'État en produits pétroliers, biens et services complémentaires » qui enregistrait jusqu'à présent uniquement les opérations d'achat de produits pétroliers (voir annexe 1). L'unification de la gestion des achats d'approvisionnement et des dépenses de fonctionnement et d'investissement au sein d'un même compte vise à optimiser la fonction pétrolière. Les crédits budgétaires sont transférés au BOP clients du compte de commerce.

La sous-action « soutien des forces par les bases de défense », à laquelle votre commission est très attentive car elle est traditionnellement sous-dotée, prévoit encore d'importantes mesures de maîtrise de la dépense, qui sont particulièrement volontaristes dans le contexte difficile de la réforme du soutien par les bases de défense. Le périmètre de cette sous-action est modifié, essentiellement du fait du transfert de l'entretien courant de l'infrastructure au programme 212 précité, soit 71,2 millions d'euros.

La sous-action « soutiens complémentaires » bénéficie de transferts de crédits, afin que soit concentrée la totalité de leurs ressources allouées à la mise en place de la politique du sport 2020. De même, la totalité de la « compensatrice SNCF » des programmes 178, espace 146 et 144 est désormais concentrée sur cette sous-action.

La sous action « service interarmées des munitions » est marquée en 2016 par la mise en oeuvre du projet de service « SIMu 2019 » qui prévoit, sur la période de programmation, une déflation de 257 postes et la fermeture de 30 % des emprises du service. En 2016 le dépôt de Connantray sera fermé, soit 40 suppressions de postes sur les 57 postes supprimés en 2016. L'augmentation des crédits de cette sous-action s'explique, d'une part, par la prise en compte des besoins du service relatif au développement des systèmes d'information et au renouvellement des matériels, et, d'autre part, par une augmentation de la ressource sur le poste « déplacements et transports » afin de financer les réorganisations rendues nécessaires par la diminution des dépôts.

Enfin, la sous-action « service du commissariat des armées » se caractérise par la généralisation de la démarche dite « de bout en bout » : c'est-à-dire la mise en place d'une chaîne de soutien continu, de la conception à la fourniture des prestations. En 2016, on notera :

- la modernisation de l'entreposage à Chartres au profit de la filière habillement,

- l'achèvement de la montée en puissance des nouveaux centres experts dédiés respectivement aux filières restauration - hébergement - loisirs et assistance juridique,

- ainsi que la dernière année d'intégration « en masse » d'officiers des différents corps techniques et administratifs, d'officiers des bases et d'officiers du cadre spécial dans le corps des commissaires des armées.

Enfin, en 2016, les crédits relatifs aux droits individuels à l'alimentation en garnison du personnel militaire de l'ensemble des armées, directions et services 9 ( * ) sont transférés au service du commissariat des armées, ce qui explique l'évolution des crédits constatés.

6. Surcoûts liés aux opérations extérieures

Cette année encore, les crédits de cette action sont destinés à financer les dépenses supplémentaires liées aux opérations extérieures. Elles ne sont dotées que de 262 millions d'euros de dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel et de 18 millions d'euros de dépenses d'intervention.

En 2016 les opérations « Barkhane », dans la bande sahélo-saharienne, et « Chammal », au Levant, se poursuivront dans des formats comparables à ceux de 2015. En revanche, la décroissance des effectifs français déployés dans le cadre du dispositif « Sangaris », en République Centrafricaine, devrait se poursuivre en 2016, à un rythme toutefois inférieur à celui initialement envisagé.

Le tableau suivant présente les effectifs et crédits de chaque OPEX, ainsi qu'une synthèse des dépenses des forces françaises hors de métropole.

Effectifs et coûts budgétaires

des OPEX en 2013, 2014 et 2015

(en millions d'euros courants)

2013

2014

Prévision 2015

PAYS/ZONE

OPEX

Effectifs

Coût

Effectifs

Coût

Effectifs PM/PC

Coût (7)

Opérations extérieures (OPEX)

Kosovo

TRIDENT

315

33,5

106

21,1

2

2,8

Bosnie

ASTREE

2,2

2,9

1,5

RCI

LICORNE (1)

792

60,7

750

63,9

262

22,0

Sahel

EPERVIER(2)

874

105,6

1 318

184,4

SERVAL (2) (3)

4 426

641,7

2 086

280,6

EUTM MALI

135

8,2

84

7,1

24

3,6

BARKHANE (3)

3 472

484,2

SABRE

204

56,1

405

78,4

RCA

BOALI MICOPAX

524

27,5

SANGARIS (4)

2 246

223,9

1 272

148,5

EUFOR RCA (5)

170

16,3

73

8,2

Guinée

TAMARIN

9,6

89

16,3

Océan Indien

ATALANTE (6)

308

19,3

194

15,7

102

6,3

Liban

DAMAN

886

56,5

875

58,3

881

67,5

Afghanistan

PAMIR HERACLES

EPIDOTE

1 125

249,6

632

151,6

192

34,4

Levant

CHAMMAL

185

11,6

1 330

235,7

AUTRES OPERATIONS

273

45,4

184

15,0

74

10,5

TOTAL OPEX (7)

9 658

1 250,2

9 034

1 118,1

8 178

1 119,9

(1) LICORNE + CALAO/ONUCI + CORYMBE. Fermeture de l'opération LICORNE le 31 décembre 2014.

(2) L'opération EPERVIER et l'opération SERVAL, regroupées sur le plan opérationnel (opération BARKHANE) depuis le 1 er août 2014 restent suivies séparément en terme d'effectifs durant toute l'année 2014.

(3) MISMA/MINUSMA regroupées avec SERVAL en 2013 et 2014 ; MINUSMA regroupée avec BARKHANE en 2015.

(4) SANGARIS + MISCA/MINUSCA.

(5) EUFOR RCA a pris fin le 15 mars 2015 et devient EUMAM RCA à compter du 16 mars 2015.

(6) ATALANTA (opération de l'UE) y compris le volet français de l'opération consistant à fournir des équipes de protection embarquées (EPE) à certains navires.

(7) A cette prévision de surcoût s'ajoute la perte de recettes hospitalières du service de santé des armées en raison du niveau important de projection en OPEX des équipes chirurgicales. Cette perte est évaluée à 3,5 M€ pour 2015.
Source : questionnaire budgétaire

Si l'on ajoute aux OPEX, les dépenses des forces françaises hors métropole, les effectifs atteignent 21 566 en 2015 contre 19 105 en 2013. Les coûts de ces engagements s'élèvent à 2 194,2 millions d'euros, en 2015, selon les estimations du ministère.

B. DES OBJECTIFS DE DISPONIBILITÉ ET D'ENTRAÎNEMENT QUI DEVRAIENT SE REDRESSER

1. Une progression des DTO espérée en 2016

Le tableau suivant présente la DTO des matériels par rapport aux exigences des contrats opérationnels, pour les années 2014, 2015 et 2016.

Niveau de la disponibilité technique opérationnelle

Matériels

2014*

2015**

2016***

2016/2014

(en %)

Armée de terre char Leclerc

82

96

100

+21,9

Armée de terre AMX 10 RCR

46

66

71

+54,3

Armée de terre VAB

57

73

75

+31,6

Armée de terre VBCI

74

95

96

+29,7

Armée de terre pièces de 155 mm

53

72

77

+45,3

Armée de terre Hélicoptères de manoeuvre

45

57

57

+26,7

Armée de terre Hélicoptères d'attaque ou de reconnaissance

59

65

75

+27,1

Marine nationale Porte-avions

92

90

93

+1,1

Marine nationale SNA

69

73

83

+20,3

Synthèse autre bâtiments de la marine

79

76

74

-6,3

Marine nationale Composante frégates

61

60

64

+4,9

Marine nationale Chasse

60

69

66

+10

Marine nationale Hélicoptères

53

55

55

+3,8

Marine nationale Guet aérien, Patrouille et surveillance maritime

50

53

54

+8

Armée de l'air Avions de combat

88,5

86

88

-0,6

Armée de l'air Avions de transport tactique

69

69

71

+2,9

Armée de l'air Avions d'appui opérationnel

86

86

89

+3,5

Armée de l'air Avions à usage gouvernemental

100

100

100

ns

Armée de l'air Hélicoptères de manoeuvre et de combat

81

77

79

-1,2

*Réalisation,**prévision actualisée, ***prévision.

La progression enregistrée entre 2014 et 2016, alors que le niveau des engagements de la France n'a pas diminué et que les achats d'équipement ne se traduisent que peu à peu en livraison d'équipements nouveaux, montre que les efforts budgétaires et les réformes structurelles engagées commencent à porter leurs fruits et permettent de fixer des objectifs de DTO en augmentation. Trois exceptions voient la DTO baisser : il s'agit des hélicoptères de l'armée de l'air, des avions de combat de l'armée de l'air et de la synthèse des autres bâtiments de la marine. La baisse de la disponibilité anticipée pour 2016 et 2017 des « autres bâtiments de la marine » s'explique par l'ancienneté des navires concernés, notamment des bâtiments de souveraineté et de présence. C'est donc en outre-mer que les répercussions de cette faible disponibilité sont les plus visibles 10 ( * ) .

En revanche, de réelles progressions sont attendues pour tous les matériels de l'armée de terre, y compris les hélicoptères de manoeuvre, les hélicoptères d'attaque et les hélicoptères de reconnaissance. La DTO des hélicoptères de manoeuvre reste cependant de 57 % du contrat opérationnel.

La progression est réelle pour les matériels de la marine, mais elle est moins spectaculaire, en raison notamment de la participation de la marine à l'effort d'exportation, qui l'a privée de la frégate multimissions « ex-Normandie », et de l'âge de bon nombre de bâtiments 11 ( * ) . L'indisponibilité des sous-marins nucléaires d'attaque sera dégradée en 2017 du fait de la réduction du parc d'une unité avec le retrait du Rubis du service actif, le premier bâtiment de type Barracuda, le Suffren , qui remplacera le Rubis , ne devrait être livré qu'en 2018. La disponibilité de ces hélicoptères plafonne à 55 % du contrat opérationnel.

Enfin la DTO des équipements de l'armée de l'air ne croît que modestement, certaines limites étant atteintes en raison des conditions d'utilisation, de l'ancienneté des flottes et du rythme lent de livraison des nouveaux équipements. À titre d'exemple, la disponibilité des avions de transport tactique diminue en même temps que la flotte des C160, des problèmes de disponibilité des C130 et du faible rythme de livraison des A400M.

2. La progression plus lente de l'indicateur relatif à la préparation des troupes en 2016

Les progrès réalisés en termes de MCO des équipements ainsi que les efforts d'organisation interne permettent une amélioration des objectifs de préparation des troupes, présentée dans le tableau suivant.

Niveau de réalisation des activités et de l'entraînement

2014*

2015**

2016***

Delta

2016/2014

LPM***

JPO

84

64

83

ns

90

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Terre

156

156

159

+1,9%

180

Heures de vol par pilote de chasse Air

153

150

159

+3,9%

180

Heures de vol par pilote de transport Air

235

260

268

+14%

320

Heures de vol par pilote d'hélicoptère air

174

170

177

+1,7%

200

Jours de mer par bâtiment marine

dont bâtiments de premier rang

83

92

86

94

90

99

+8,4%

+7,6%

100

110

Heures de vol par pilote de chasse Marine

pilote qualifié nuit

136

194

150

180

180

220

+32,3%

+13,4%

180

220

Heures de vol par pilote d'hélicoptère Marine

218

180

195

-10,5%

220

Heures de vol par pilote de patrouille maritime Marine

360

288

330

-8,3%

340


*Réalisation, ** Prévision actualisée, *** Objectif

Les efforts entrepris ne sont pas suffisants pour permettre de faire remonter le nombre d'heures de vol par pilote d'hélicoptère pour la marine et par pilote de patrouille maritime au niveau de 2014.

De même, les journées de préparation opérationnelle pour l'armée de terre, en amélioration par rapport à 2015 puisqu'elles passent de 64 jours à 83 jours, ne rattrapent toujours pas complètement le niveau de 2014, lui-même inférieur aux normes d'entraînement de l'OTAN. Cette situation s'explique en 2015 essentiellement par la mise en place de l'opération sentinelle pour répondre aux événements de janvier 2015. La remontée de la FOT devrait permettre à moyen terme la progression du temps de préparation des troupes. Ainsi, en 2016 et 2017, la reprise d'activité sera principalement portée par l'arrivée en unités opérationnelles des jeunes soldats recrutés massivement à partir de 2015 pour amener la FOT à 77 000 hommes, en application des dispositions prises par la loi n° 2015-917 du 28 juillet 2015 actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019.

À ces exceptions près, le niveau de réalisation des activités et de l'entraînement dépasse celui de 2014. Pour autant, les objectifs fixés par la LPM, compatibles avec les normes de l'OTAN, ne sont pas encore atteints. Il est donc indispensable que l'effort soit maintenu.

En termes de préparation opérationnelle, l'armée de l'air avait consenti une réduction d'activité individuelle pour la période 2014-2015, avec pour objectif une remontée significative à compter de 2016-2017. En 2016, l'activité doit donc remonter vers les objectifs LPM grâce à une dotation des ressources, compatible avec l'activité nominale des équipages. Seule l'atteinte complète des objectifs LPM permettra d'entraîner les forces aériennes sur l'ensemble du spectre des savoir-faire nécessaires à la réalisation des contrats opérationnels de l'armée de l'air. Aujourd'hui, un socle restreint d'équipages entretient les compétences les plus complexes afin de conserver une capacité à remonter en puissance, la LPM ayant acté la mise en place de cet entraînement différencié.

DEUXIÈME PARTIE : LES POINTS DE VIGILANCE

I. FOCUS SUR LE MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE DES MATÉRIELS

A. LA PRIORITÉ DONNÉE AU MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE

L'enjeu de l'ensemble des chantiers de réforme du MCO est d'assurer la remontée, à partir de 2016, de l'activité opérationnelle indispensable aux engagements en opérations et à la préparation opérationnelle.

1. Le développement de la logique interarmées

L'année 2014 a vu la mise en place d'une gouvernance rénovée du maintien en condition opérationnelle. Le chef d'état-major des armées, pour favoriser un meilleur pilotage de la performance, a rendu chaque chef d'état-major d'armée responsable d'un milieu (milieux terrestre, maritime et aérien) et du contrôle de la performance du MCO de son milieu. Cette évolution a d'abord concerné le MCO aéronautique, puis a été étendue à tous les milieux.

La clarification des activités et des structures intervenant dans chaque milieu vise à améliorer le pilotage des activités, tout en affermissant la coopération avec les opérateurs privés. Ainsi la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) assure l'organisation du maintien en condition opérationnelle de tous les matériels aéronautiques qu'ils soient utilisés par l'armée de terre, l'armée de l'air ou la marine. De la même façon, le service de soutien de la flotte (SSF) et la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT) interviennent au titre d'un milieu, sur des parcs, et non plus d'une armée.

En 2016, les actions en cours ou en préparation pour maîtriser les coûts de MCO prennent deux directions complémentaires :

- d'une part, la mise en oeuvre d'une logique de milieu pour la gouvernance et le pilotage de la performance, grâce à des chantiers structurants visant l'optimisation du MCO,

- d'autre part, la consolidation de processus contractuels et du développement de l'ingénierie du MCO, notamment au sein des maîtrises d'ouvrage déléguées.

La déclinaison de ces orientations dans le milieu aéronautique fait l'objet du développement infra.

a) Les équipements navals

Le chef d'état-major de la marine est désormais responsable du MCO du milieu naval et contrôle sa performance. Il bénéficie d'une maîtrise d'ouvrage déléguée, le Service de soutien de la flotte (SSF).

Le SSF est engagé dans une démarche permanente d'optimisation des coûts du MCO naval et d'amélioration de la disponibilité des bâtiments sous contrainte de ressources. Après une phase initiale, jusqu'en 2005, de construction de « marchés globaux pluriannuels à engagement de disponibilité », par famille de bâtiments, et d'ouverture à la concurrence la plus large possible, le SSF a développé à partir de 2008 des plans d'actions pour améliorer la disponibilité des armes et équipements. Puis, en 2012, il a lancé un « plan d'actions » avec les principaux acteurs industriels concernés (maîtres-d'oeuvre et principaux équipementiers) afin d'améliorer la productivité et de redéfinir, au plus juste des besoins, le partage des risques entre les acteurs étatiques et industriels.

Ces actions s'appliquent aussi bien aux marchés en vigueur qu'à ceux en cours de renouvellement et portent en particulier sur :

- une rationalisation des processus industriels et de management associés, afin d'améliorer la performance d'ensemble. Il s'agit de développer une meilleure organisation spatiale et temporelle des acteurs étatiques et industriels concernés, autour des zones dédiées au MCO naval au sein des bases navales de Brest et de Toulon,

- une planification pluriannuelle continue des arrêts techniques par grande famille de bâtiments (frégates, SNA, ...) et par façade, compatible avec les besoins de disponibilité opérationnelle des bâtiments,

- une rationalisation de l'exécution des opérations de maintenance qui peuvent être effectuées hors arrêt technique sans remettre en cause la disponibilité opérationnelle des bâtiments (bâtiments de projection et de commandement, frégates),

- et enfin, l'optimisation des processus logistiques et la rationalisation des stocks de rechanges. Le SSF recherche ainsi à définir le meilleur équilibre possible entre l'acquisition des rechanges par l'État et la fourniture par les industriels titulaires des contrats du MCO naval.

Ces dispositions sont complétées par un axe d'optimisation interne. Le SSF met ainsi en oeuvre, en lien avec le service logistique de la marine, trois schémas directeurs relatifs respectivement à la logistique, à l'entreposage et aux compétences des ateliers. Il a également entamé une réorganisation interne destinée à renforcer tant l'efficacité de l'exécution contractuelle des contrats en cours que l'analyse des coûts pour les contrats en préparation (mise en place d'un système de recueil des coûts, recours accru aux enquêtes de coût et avis sur les prix du bureau d'enquête de coût de la DGA). Enfin, la fonction « finance - service exécutant » a été rationnalisée grâce à la création d'un pôle unique à Brest.

b) Les équipements terrestres

Le chef d'état-major de l'armée de terre est désormais responsable du MCO du milieu terrestre et contrôle sa performance. Il bénéficie d'une maîtrise d'ouvrage déléguée, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT).

Dans le cadre du projet de l'armée de terre « Au contact », des évolutions notables du MCO terrestre sont mises en oeuvre. La maintenance opérationnelle (MO) est dissociée de la maintenance industrielle (MI) pour une meilleure lisibilité et efficacité. La MO regroupe principalement les activités de maintenance réalisées par les maintenanciers militaires en opérations, pour rendre leur disponibilité aux matériels. Elle est mise en oeuvre également en métropole au quotidien pour soutenir la préparation opérationnelle et la capacité d'engagement des forces terrestres. La MI, pour sa part, regroupe principalement les activités de maintenance réalisées par les maintenanciers civils en métropole, afin de régénérer le potentiel des matériels du parc de gestion retirés des forces. La baisse effective des capacités de production étatiques impose un transfert d'activités vers le privé.

Parallèlement, la SIMMT met en oeuvre une politique d'emploi et de gestion des parcs (dite PEGP), dans le cadre d'une politique de préparation opérationnelle différenciée qui doit permettre d'adapter les cycles d'activités aux ressources dédiées au MCO.

Elle recherche également des améliorations de performance dans :

- la régénération plus rapide et économe du potentiel des matériels en retour d'opérations,

- le recours aux marchés globaux à obligation de résultats, qui renforcent la responsabilité des opérateurs privés dans l'atteinte des objectifs de disponibilité tout en leur offrant une visibilité à plus long terme, permettant une diminution des coûts,

- et la recherche permanente d'un meilleur optimum économique entre potentiel alloué et parc en ligne, qui doit permettre de diminuer les coûts de soutien et les délais d'immobilisation des équipements.

2. La rationalisation du MCO par la mise en oeuvre du « Supply chain »

Le projet dit « Supply chain » ou « gestion à la chaîne » a été mis en place en milieu d'année 2013, sous la responsabilité de l'état-major des armées (EMA), avec pour finalité de garantir la satisfaction des chaînes de soutien en fournissant les approvisionnements ou services nécessaires aux forces et aux maîtres-d'oeuvre étatiques au plus juste niveau et dans les délais convenus. Ce projet vise ainsi l'accroissement du niveau de performance des acteurs du maintien en condition opérationnelle.

Cette gestion à la chaîne vise la rationalisation de l'organisation de la logistique physique afin :

- de réduire les coûts de MCO, d'entreposage, d'infrastructures, et les coûts de transport des pièces de rechanges et des équipements en maintenance,

- d'optimiser l'emploi des ressources de MCO en expertisant les plans d'approvisionnement en rechange et en outillage, en systématisant la contractualisation des achats, en définissant les conditions d'une juste utilisation des stocks disponibles, et d'une gestion affinée de la logistique,

- enfin, d'identifier, autant que faire se peut, des pistes de déflation d'effectifs.

Ceci se décline tant en matière de stocks, qu'en matière de flux du MCO :

- en matière de stock, les résultats recherchés sont les suivants :

o définir des méthodes de prévisions plus robustes pour l'évaluation des niveaux des stocks à compléter,

o identifier les excédents dans les stocks existants pour libérer l'espace et rationaliser les entrepôts,

o valoriser les stocks cessibles, notamment dans le milieu aéronautique.

- en matière de flux, trois pistes d'amélioration sont mises en avant afin de :

o fluidifier la distribution des pièces de rechange par le biais d'un réseau de transport réorganisé et plus rapide,

o suivre la ressource en tous points, par la mise en oeuvre d'un nouveau système d'information logistique pour le suivi de la ressource interarmées (SILRIA 12 ( * ) ). Ainsi, un système d'information logistique unique par milieu a été adopté et déployé par chaque service de soutien, à l'exception du milieu aérien pour lequel le travail se poursuit.

o réduire les délais de remise en état des matériels indisponibles et accroître la disponibilité des rechanges donc des matériels majeurs.

Enfin, une meilleure synergie entre la direction générale de l'armement et les maîtrises déléguées de chaque milieu est recherchée. Un gain de l'ordre de 10 % sur les coûts de l'entretien programmé des matériels aéronautiques est espéré, à titre d'exemple, à activité comparable, à l'issue de la période de programmation, soit 2019. À cet effet, trois axes d'efforts font l'objet d'une attention particulière :

- l'axe « physico-financier », visant à mieux caractériser le lien physico-financier du MCO. Il s'agit d'analyser systématiquement les conséquences physiques ou financières des dispositions prévues par un programme budgétaire sur l'autre (en l'occurrence le P146 sur le P178) pour permettre la cohérence globale dans les prises de décision,

- l'axe « contrats », tendant à analyser systématiquement la mutualisation au sein d'un contrat unique de l'acquisition d'un système d'armes ou de sa rénovation avec une période de soutien en service. Cette hypothèse contractuelle n'exclut pas l'analyse comparative d'autres hypothèses, mais permet comme l'a souvent souhaité votre commission, de laisser chaque acteur assumer sa pleine responsabilité à chaque stade d'utilisation d'un équipement,

- enfin, l'axe « ressources humaines ». Il est prévu d'étendre les filières des métiers relevant des compétences de la DGA (acheteurs, managers, spécificateurs, etc.) à l'ensemble des acteurs concernés au sein du ministère dans le but de gérer de façon optimale ces ressources rares.

B. LE CAS DU MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE DES MATÉRIELS AÉRONAUTIQUES DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE

En matière de soutien des équipements aéronautiques, l'organisation de l'armée de l'air repose sur plusieurs acteurs dont le commandement des forces aériennes jouant en quelque sorte le rôle d'un maître d'ouvrage, la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense, la SIMMAD, sorte d'assistant du maître d'ouvrage ou maîtrise d'oeuvre déléguée, et le service industriel aéronautiques, comparable à un maître-d'oeuvre.

1. Les acteurs du MCO aéronautique
a) Le rôle du chef d'état-major de l'armée de l'air

La gouvernance du MCO aéronautique s'appuie désormais sur une logique de milieu qui conforte la place centrale de la SIMMAD en tant qu'intégrateur du MCO aéronautique. Dans une approche d'expertise de milieu, le chef d'état-major de l'armée de l'air (CEMAA), par délégation du chef d'état-major des armées (CEMA), se voit attribuer la responsabilité et le contrôle de la performance du MCO aéronautique (dans les limites des leviers d'actions confiés). À ce titre, le CEMAA :

- préside le comité directeur (CODIR) du MCO aéronautique et dispose d'un secrétariat permanent interarmées depuis le 1 er septembre 2014 ;

- met en cohérence les objectifs et les directives unifiés entre armées, élaborés avec les chefs d'état-major d'armée au travers d'un document annuel, le contrat unifié de gestion (CUG) ;

- établit une politique du MCO aéronautique (sur proposition de la SIMMAD et validation des armées en CODIR du MCO aéronautique).

Pour assurer cette mission, le CEMAA s'appuie sur une maîtrise d'ouvrage déléguée unique, la SIMMAD, pour tous les services clients, intégrant l'ensemble des métiers du MCO. L'organisation de la fonction MCO du milieu aéronautique a été progressivement modernisée depuis le début des années 2000 dont date la création de la SIMMAD et élargissement de son périmètre. En 2008, la création du SIAé vient compléter le dispositif.

b) La SIMMAD

La SIMMAD est donc une structure intégrée de maîtrise d'ouvrage déléguée du MCO aéronautique. C'est aussi une direction centrale du ministère de la défense relevant de l'armée de l'air, et enfin un organisme à vocation interarmées « Air ».

La SIMMAD est organisée autour d'un pôle « direction » situé à Balard et Bagneux qui assure la haute direction et les contacts avec le haut commandement des armées, les instances ministérielles et les sièges des industriels, et d'un pôle « conduite » implanté sur la Base aérienne 106 de Bordeaux-Mérignac, où vos rapporteurs se sont rendus. Ce pôle est chargé d'optimiser au quotidien la disponibilité des matériels. En annexe, le détail de l'organisation et des implantations de la SIMMAD est présenté.

En charge du MCO des matériels aéronautiques, cette structure intégrée, compétente pour les matériels aéronautiques des armées, de la gendarmerie, des douanes et de la direction générale de l'armement, fédère toutes les fonctions qui concourent :

- l'expression des besoins,

- la passation des marchés d'acquisition de rechange et de prestations de soutien,

- la gestion financière des crédits alloués, venant des budgets opérationnels de chaque donneur d'ordre,

- la réalisation de la logistique amont privilégiant le principe de l'autonomie de l'engagement en donnant des lots complets de maintenance et de pièces de rechange aux unités qui se projettent,

- et par délégation des états-majors d'armée la maîtrise d'ouvrage de la maintenance des matériels aéronautiques et de la distribution des pièces de rechange.

La SIMMAD notifie chaque année au service industriel de l'aéronautique (SIAé) une commande recouvrant l'ensemble des prestations confiées au service au profit des matériels aéronautiques des armées. Cette commande, dénommée PAR, plan annuel de réparation, fixe le plan de charges du SIAé et lui permet d'affermir la tranche conditionnelle de ses contrats.

c) Le SIAé

Le SIAé est un service de soutien à vocation interarmées relevant de l'armée de l'air. Créé le 1 er janvier 2008, il a pour mission de contribuer, en réalisant la maintenance des matériels aériens et les rénovations nécessaires, à la disponibilité des moyens aériens des forces. Maître d'oeuvre de l'Etat, il est garant de son autonomie d'action en matière de MCO aéronautique.

Le SIAé est composé d'une direction centrale et de cinq ateliers industriels de l'aéronautique (AIA), dont le détail est présenté en annexe.

Le SIAé ne bénéficie d'aucune dotation budgétaire initiale, le programme 178 supporte à titre temporaire les dépenses de soutien remboursées par le SIAé au travers de son compte de commerce intitulé « Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l'État ». Le compte de commerce doit être équilibré, les personnels du SIAé devant être intégralement payés, ainsi que les investissements par les recettes du MCO réalisé par le SIAé.

Le SIAé dispose d'une autonomie de gestion proche de celle d'un établissement public industriel et commercial. L'article 4 de la loi du 28 juillet 2015 actualisant la LPM a prévu que la déflation d'effectifs ne portera que sur les emplois financés sur les crédits de personnel du ministère de la défense, excluant explicitement les augmentations d'effectifs éventuelles du service industriel de l'aéronautique. Au vu de l'enjeu capacitaire, industriel et économique, la loi de programmation militaire permet ainsi au SIAé de recruter si nécessaire pour répondre aux besoins de maintien en condition opérationnelle des forces, accrus dans le cadre des OPEX et des contrats d'exportation récents.

Le SIAé a un rôle fondamental de liaison entre les armées et les industriels. Il paraît indispensable à vos rapporteurs pour avis que ce rôle charnière soit conservé et que l'avenir du SIAé soit garanti.

2. Une activité opérationnelle intense marquée par la suractivité et la surintensité

La SIMMAD a fait face, en 2015, a une activité opérationnelle intense 111 appareils ont été engagé en 2015 contre 89 en 2014, auxquels il convient de rajouter le groupe aéronaval qui a rejoint l'opération Chammal du 23 février au 18 avril 2015. Une deuxième campagne de 45 jours est d'ailleurs prévue pour la fin de l'année.

Au plus fort des engagements, en tenant compte à la fois des OPEX et des opérations de souveraineté en Afrique, ont été projeté en 2015 :

• 31 avions de combat, contre 19 en septembre 2014,

• 57 hélicoptères et un avion PC6, pour 47 hélicoptères et un PC6 en septembre 2014,

• 8 avions de transport soit le double des avions de transport projetés l'année dernière,

• le groupe aéronaval avec 25 appareils dont 9 Super Étendard, 12 Rafale et un E2C ou Hawkeye, avion de guet aérien avancé embarqué,

• 2 avions de soutien opérationnel, soit autant qu'en 2014,

• 12 drones, soit un nombre inchangé par rapport à 2014.

L'ouverture de nouveaux théâtres d'une superficie largement supérieure aux théâtres connus jusqu'ici ajoute une « élongation logistique supplémentaire », c'est-à-dire des distances rallongées à prendre en compte pour le transport des pièces de rechange par exemple, qu'il convient de compenser en augmentant les ressources en équipements et pièces de rechange pour soutenir l'activité des forces engagées. À titre d'exemple pour trois avions de combat projetés, ce sont cinq moteurs supplémentaires mobilisés dans les circuits logistiques qui sont nécessaires.

Outre l'agrandissement des superficies couvertes par les théâtres d'opérations, certains matériels voient leur activité croître du fait des besoins opérationnels liés aux OPEX. Les heures effectuées par un équipement en plus des prévisions d'activité sont considérées comme de la suractivité. À titre d'exemple, depuis le 1 er janvier 2015, pour l'armée de terre, le parc des Caracal a effectué 14,9 % d'heures de vol en plus de ses prévisions d'activité. Le parc des Caïman a été sursollicité à hauteur de 7,1 % et celui des Gazelle de 2,5 %. Pour l'armée de l'air, la flotte des M2000C a effectué près de 11 % d'heures de vol supplémentaire, celle des Rafale 6,2 % celle des M2000D 2,3 %.

À cela s'ajoute encore le fait que les conditions d'utilisation des matériels en opérations extérieures sont beaucoup plus contraignantes en raison d'une activité intensive qui accroît les besoins de maintenance. La surintensité est la caractéristique du contexte actuel d'engagements forts notamment lors des moments d'efforts sur un théâtre d'opérations également appelés « SURGE ». La SIMMAD en tire les conséquences en gérant les dommages de combat, les endommagements particuliers liés aux conditions d'emploi en zones sévères, les besoins d'acquisition de lots de déploiements complémentaires et en anticipant des opérations de régénération de potentiel consécutive à la suractivité. Ainsi, en 2015, à titre d'exemple, une visite de C135 a été externalisée pour soutenir la disponibilité de la flotte des ravitailleurs hypothéquée par ailleurs par de nombreux chantiers capacitaires. Des traitements préventifs de la corrosion des mirages 2000 ont été rendus nécessaires par les opérations BARKHANE et CHAMMAL. Pour l'ATL2, enfin, le nombre de lots d'autonomies a été augmenté pour tenir compte de l'éparpillement des ressources logistiques.

Pour lutter contre les conditions sévères d'emploi entraînant des dégradations que sont le sable et les chaleurs extrêmes, la SIMMAD a déclenché le déploiement d'équipes industrielles étatiques du et SIAé ou d'assistances techniques industrielles privées pour régénérer sur place le potentiel nécessaire. Ainsi trois visites de PC6 ont été réalisées directement au Burkina Faso.

3. Des résultats encourageants
a) Les orientations de développement de la performance du MCO aéronautique

Décidés lors de la tenue du comité exécutif de mai 2014, des efforts de rationalisation du MCO aéronautique ont été entrepris afin d'atteindre les niveaux d'activité nécessaires avec les ressources prévues. Ces efforts s'articulent autour de quatre axes :

- la réforme de la gouvernance du MCO ;

- la mise en oeuvre d'une chaîne logistique efficiente « Supply chain » ;

- la mise en oeuvre du projet SIMMAD « CAP 2016 » en développant l'expertise du MCO avec les grands acteurs du ministère 13 ( * ) , en réorganisant la structure et en améliorant les différents processus,

- la mise en oeuvre d'une meilleure synergie entre la DGA (direction générale de l'armement) et la SIMMAD. Il s'agit d'appliquer les conclusions d'un rapport, réalisé conjointement par l'EMA et la DGA. Elles doivent permettre une meilleure caractérisation du lien physico-financier, une approche contractuelle concertée entre l'acquisition des équipements et leur soutien en service 14 ( * ) ainsi qu'une meilleure gestion des compétences de la filière de l'acquisition du soutien.

Dans le cadre de la mise en oeuvre de son projet « CAP 2016 », la SIMMAD doit améliorer sa performance selon quatre axes, en coordination avec l'ensemble des acteurs du MCO aéronautique :

- axe 1 : le renforcement de l'expertise sur le MCO aéronautique. Cette tâche est principalement dévolue au « collège du MCO aéronautique », créé en février 2014 et coprésidé par la SIMMAD et la DGA. Elle inaugure une approche critique sur les pratiques du MCO et la prise en compte d'une vision prospective avec l'objectif d'une optimisation des concepts, des processus et des techniques du MCO ;

- axe 2 : le renforcement de la performance du MCO aéronautique. Cet axe prolonge l'action initiée fin 2013 de remise en cohérence des contrats avec les nouvelles hypothèses d'activité de la loi de programmation militaire et à l'évolution du format. Il s'agit de s'assurer que les contrats de soutien sont cohérents avec les niveaux d'activité envisagés jusqu'à fin 2019. Dans ce contexte, une cinquantaine de contrats (contrats nouveaux ou renouvellements) ont été notifiés en 2014 ;

- axe 3 : l'optimisation de l'organisation de la SIMMAD. En tirant les enseignements du fonctionnement entre le pôle direction parisien et le pôle production bordelais, de l'intégration des nouvelles fonctions que sont la gestion de bien, la fonction technique et le renforcement de la cohérence physico-financière, cette évolution recherche une meilleure lisibilité de cette organisation et une communication renforcée tant en interne qu'en externe.

- axe 4 : la modernisation des outils. La mise en place du système d'information COMP@S-ATAMS rentre dans une phase active de son développement après la validation de son bon fonctionnement. La mise en place de ce système d'information logistique constitue la démarche ultime d'interarmisation du MCO aéronautique, par le partage des données et des procédures. Ce système permettra en effet de fédérer dans une logique de bout en bout des données logistiques, techniques et contractuelles tout en s'interfaçant avec d'autres systèmes d'informations du ministère qu'ils soient financiers (CHORUS) ou techniques (SAPHIR pour le SIAé notamment).

b) La disponibilité des équipements en OPEX est-elle indéfiniment supportable ?

Pour faire face aux besoins, tout en préservant l'activité en métropole, la SIMMAD a réorganisé la logistique en retour des théâtres afin de maîtriser les délais de réparation. Par exemple, les délais de retour des moteurs en panne sont passés de 70 jours en 2013 à 18 jours en 2015 pour le moteur Makila du Caracal.

Pour les avions une organisation ad hoc intitulée « plateau d'amélioration de la disponibilité rapportée aux hélicoptères », PADRHé, a permis d'améliorer les 130 actions menées en 2015 sur l'ensemble du soutien de tous les hélicoptères. PADRHé vise notamment la réduction des délais d'immobilisation des appareils, la satisfaction du besoin technique, la dynamisation des flux logistiques, l'amélioration de la performance des structures de soutien et l'optimisation des relations avec les industriels.

Le fait que la flotte soit dispersée en micro parcs, âgés ou, au contraire, peu matures, très sensibles au théâtre d'opérations, rendait indispensable cette adaptation de la SIMMAD. Les résultats sont excellents puisqu'en 2015 le niveau de disponibilité des matériels aéronautiques des forces projetées a été maintenu à 79,2 % sur l'ensemble du périmètre de la SIMMAD, soit une hausse de 0,4 % par rapport à 2014. Alors que l'objectif de disponibilité technique opérationnelle -DTO pour 2016 pour les hélicoptères de l'armée de terre plafonne à 57 % et 55 % pour la marine.

Il convient toutefois de se demander si les limites du modèle ne se profilent pas. L'amélioration des performances du MCO aéronautique permet de préserver les équipements en métropole, mais cela se fait au prix d'un déficit organique croissant : les personnels formés sont obligés de repartir en OPEX à défaut d'avoir eu le temps de former les nouveaux équipages. Les équipages d'aéronefs basés en métropole ne parviennent pas à se qualifier faute de parvenir à accumuler un nombre d'heures suffisant. Pour répondre aux besoins des OPEX les formations à l'engagement sont très spécifiques, ce qui est le principe même de la différenciation, prévue par la LPM, mais le principe semble poussé à son maximum. La capacité de résistance des personnels navigants et non navigants projetés est mise à rude épreuve, sans parler de l'usure accrue des matériels projetés.

II. DEUX ENJEUX À SUIVRE

A. LA CROISSANCE DES COMMANDES D'ARMEMENT POURRAIT-ELLE AVOIR DES RÉPERCUSSIONS FAVORABLES SUR L'EPM ?

1. Le succès des exportations d'armement

Le montant des commandes annuelles d'armement français est passé de 5,1 milliards d'euros en 2010, à 6,9 milliards d'euros en 2013, 8,2 milliards d'euros en 2014 et 15 milliards d'euros en 2015.

L'exportation de nos armements était une hypothèse de construction de la LPM. Celle-ci prévoyait l'acquisition de 26 rafales sur la période de programmation, ce qui n'était pas suffisant pour permettre à l'industriel de maintenir la chaîne de production en activité. Il lui était nécessaire de produite 40 Rafale supplémentaires, ce qui représentait un coût que la LPM ne couvrait pas. Les exportations de 24 Rafale en Égypte et 24 Rafale au Qatar ont permis de garantir le modèle de production. L'Inde est, par ailleurs, toujours en pourparlers pour acheter 36 appareils. Les Émirats arabes unis pourraient suivre.

À cela s'ajoute des ventes aux Émirats arabes unis dans le secteur satellitaire. Des contrats ont été signés avec l'Arabie Saoudite, que ce soit dans le domaine terrestre, naval ou aéronautique, à hauteur de 3 milliards de dollars. Outre les Rafale, l'Égypte s'est dotée de quatre corvettes, d'une frégate multi missions et des armements associés. Elle a également acheté, pour 950 millions d'euros, les deux bâtiments de projection et de commandement initialement produit pour la Russie.

Début octobre, le gouvernement australien a annoncé l'acquisition de 1.100 4x4 tactiques blindés à Thalès pour plus de 800 millions d'euros. De son côté, Renault Trucks va livrer des véhicules blindés légers au Koweït après avoir décroché en juillet un contrat historique de 1.500 camions pour l'armée canadienne.

2. Le dispositif de soutien à l'exportation

Comme l'indique le ministère de la défense dans le rapport au Parlement 2015 sur les exportations d'armement de la France : « les armées accompagnent par ailleurs tous les grands contrats : en amont en participant à tous les salons d'armement, en France comme à l'étranger, ou en organisant des démonstrations opérationnelles du matériel proposé à l'exportation ; au moment où ils sont conclus, en prêtant aux États clients des capacités initiales avant les premières livraisons ; et durant la vie des contrats, en en assurant souvent intégralement le volet formation, dans le cadre de la coopération militaire entre la France et les états partenaires (en particulier certaines activités ou déploiement uniquement lié aux exportations). Cet accompagnement par les armées représente un véritable investissement financier et humain : en particulier les prêts et mises à disposition constituent, dans les faits, d'importantes d'immobilisation d'actifs ».

Le décret n° 83-927 du 21 octobre 1983 fixant les conditions de remboursement de certaines dépenses supportées par les armées organise le soutien à l'exportation-SOUTEX et prévoit que les industriels remboursent la participation des militaires. Les actions de SOUTEX peuvent prendre deux formes, non exclusive l'une de l'autre : la mise à disposition de personnels des armées et la réalisation d'une prestation effectuée par les armées.

Les dépenses courantes, c'est-à-dire les soldes, les primes d'alimentation et les frais d'amortissement du matériel ne font pas partie des dépenses remboursables. Les dépenses dites supplémentaires, résultant directement de la nature de l'activité ou de la prestation fournie, sont-elles remboursées.

Les dépenses supplémentaires remboursables sont : les majorations de soldes, de traitement ou d'indemnités prévues par la réglementation, les majorations des primes d'alimentation, les frais de déplacement et de transport, les dépenses spéciales d'instruction, les dépenses de carburant, ingrédients et lubrifiants, et une quote-part des dépenses d'entretien et de réparation des matériels mis en oeuvre. À cela s'ajoutent les dépenses du service des transmissions et les dépenses de réparation des dommages causés aux tiers ainsi qu'aux personnes et biens meublent et immeubles des armées.

En 2013 l'armée de terre a facturé 1,3 million d'euros aux industriels dans le cadre du SOUTEX, l'armée de l'air 6,3 millions d'euros. La mise en oeuvre du nouveau système d'information relatif au SOUTEX devrait permettre à l'avenir de collecter des données complètes pour les années 2014 et 2015. Elles ne seront pourtant pas exhaustives, n'incluant pas certains coûts de maintien en condition opérationnelle.

3. Les coûts de maintien en condition opérationnelle non pris en compte par le dispositif de SOUTEX

Outre le soutien ci-dessus décrit, les armées contribuent au soutien des commandes d'armement en prêtant aux États clients les capacités initiales avant les premières livraisons.

Ainsi la frégate livrée à l'Égypte était initialement destinée à la marine nationale, comme l'avait été la frégate livrée au Maroc en 2014. Le programme de livraison de la frégate à la marine a été décalé d'un an, ce qui oblige à prolonger de cette même durée la durée de vie de trois frégates d'ancienne génération F70 et de leurs équipages.

De même, pour honorer la commande passée par l'Égypte, six Rafale ont été prélevés sur la chaîne de production en 2015. Le programme de livraison de l'armée de l'air subira, en 2016, une nouvelle ponction de cinq Rafale au titre du contrat avec l'Égypte. En ajoutant le contrat avec le Qatar, c'est une trentaine d'avions qui seront exportés au lieu d'être livré à l'armée de l'air. L'absence de livraisons oblige là encore à maintenir en activité des matériels vieillissants tels que des Mirage 2000 version D pour l'attaque au sol et des Mirage 2000-5 pour la chasse.

Les dépenses remboursables du SOUTEX ne comprennent pas les frais supplémentaires de maintien en condition opérationnelle des matériels vieillissants, utilisés plus longtemps pour permettre à l'industriel de prendre aux armées les frégates ou les rafales qu'il n'a pas encore produits et qu'il exporte ainsi. Cette conception du coût du soutien à l'exportation ne paraît pas complète si l'on n'ajoute pas le « coût de possession des matériels » remplaçant les livraisons des matériels attendus et finalement exportés.

Si l'on ne peut que se féliciter des bons résultats des exportations d'armement de la France, il convient de ne pas négliger leur impact sur la progression des coûts du maintien en condition opérationnelle. Les exportations permettent de réduire les frais fixes de la chaîne de production que supportent les armées. Des efforts devraient sans doute être faits pour réduire les frais de maintien en condition opérationnelle afin que les armées obtiennent ainsi une sorte de « retour » compensant les coûts induits des exportations d'armement.

B. L'AVENIR DU SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES

Le ministre de la défense devrait prochainement adopter le nouveau modèle d'organisation du Service de santé des armées (SSA), découlant de son projet de service intitulé « Service de Santé des Armées 2020 ».

1. Le projet « SSA 2020 »
a) L'engagement opérationnel du SSA

Le SSA comprend cinq composantes principales complémentaires les unes des autres : la médecine des forces, la médecine hospitalière, le ravitaillement, la recherche et la formation. Le SSA a un rôle essentiel dans le dispositif de projection puisqu'il participe à la capacité de l'armée française « d'entrer en premier  sur les théâtres d'opérations. En 2013, 248 équipes médicales de premier recours et 35 équipes chirurgicales ont été déployées sur l'ensemble des théâtres d'opérations. En 2014, les chiffres sont comparables avec 228 équipes médicales de premier recours et 31 équipes chirurgicales. Le pic d'engagement simultané a été, durant ces deux années, de 70 postes médicaux et 10 antennes chirurgicales ou de structures équivalentes. En 2013 938 militaires ont été évacué en métropole et 786 en 2014, dont près des deux tiers en provenance des théâtres d'opérations.

b) Vers un fonctionnement resserré du SSA

La sujétion opérationnelle accrue, un système national de santé en pleine mutation, et un contexte budgétaire de plus en plus contraint, ont conduit le SSA à élaborer dès 2013 une nouvelle vision stratégique : le projet de Service « SSA 2020 » 15 ( * ) .

Ce projet, validé par le ministre de la défense le 25 novembre 2013, est tourné vers le soutien santé des forces en opérations. Il repose sur trois principes :

- la concentration : recentrage sur la mission opérationnelle, densification des équipes et des structures,

- l'ouverture au service public de santé, à l'interministériel, à la société civile et à l'international, pour en devenir un acteur à part entière et bénéficier de leur soutien,

- et enfin, la simplification, basée sur la délégation et la transversalité.

Tout au long de l'année 2014, la déclinaison des principes de ce projet de Service a donné lieu à l'élaboration d'un nouveau modèle pour le SSA. Achevé en décembre 2014, ce modèle vise à garantir aux militaires, face aux risques spécifiques des théâtres d'opération, un soutien santé permanent et d'une qualité optimale qui peut se résumer en cette phrase : « Apporter à tout militaire soumis à un risque lié à son engagement opérationnel, un soutien santé lui garantissant la prévention la plus efficace et la meilleure qualité de prise en charge en cas de blessure ou de maladie, préservant ainsi ses chances de survie et le cas échéant de moindres séquelles physiques ou psychiques ».

Pour améliorer sa réponse au contrat opérationnel et développer sa résilience face à une sollicitation opérationnelle intense, le SSA doit adopter d'ici 2020 un format resserré tout en conservant sa proximité avec les forces armées. Le ravitaillement sanitaire, la formation et la recherche ont été fortement réformés au cours de la précédente loi de programmation militaire. Ces réformes seront approfondies. En revanche, la médecine des forces et la médecine hospitalière seront réorganisées en profondeur.

2. La réforme de la médecine des forces et de la médecine hospitalière
a) La médecine des forces s'appuiera sur les centres médicaux des armées de nouvelles générations

La médecine des forces doit devenir le centre de gravité du SSA. Ceci se traduira par la création de centres médicaux des armées de nouvelle génération (CMA NG), en nombre réduit par rapport aux structures actuelles (19 en 2018 contre 54 en 2014).

Ces centres médicaux intégreront certaines des responsabilités assumées par les directions régionales du service, amené à disparaître. Ils seront directement subordonnés à un échelon de direction déconcentrée, la direction de la médecine des forces. Ils regrouperont les fonctions administratives au sein d'une portion centrale et intégreront certaines des responsabilités assumées par les directions régionales du SSA, amenées à disparaître en 2017-2018.

Cette réorganisation permettra de renforcer les activités de soins, d'expertise et de préparation opérationnelle au sein des antennes médicales, qui resteront placées au plus près des forces armées et de la gendarmerie. Elle permettra également à l'ensemble de la composante de bénéficier d'un renforcement de ses moyens (humains, équipements, infrastructures, systèmes d'information et de communication).

b) La médecine hospitalière s'organisera autour de deux plates-formes

La composante hospitalière sera réorganisée sur la base du concept de différenciation des établissements en fonction de leur contribution au contrat opérationnel du SSA. Deux types d'établissements hospitaliers seront ainsi différenciés selon leur rôle dans la réponse au contrat opérationnel :

- les quatre hôpitaux composant les plateformes de l'Île-de-France et de la région PACA (Bégin à Saint-Mandé et Percy à Clamart, Laveran à Marseille et Sainte-Anne à Toulon) seront clairement identifiés comme outils de défense détenus en propre par le ministère de la Défense. Ils supporteront la part la plus exigeante du contrat opérationnel, notamment la mission d'entrer en premier sur un théâtre d'opérations : ils exerceront aussi bien les activités indispensables au respect du contrat que celles garantissant leur cohérence et celles répondant à un besoin d'expertise ;

- les quatre hôpitaux hors plateforme, situés, à Brest, Metz, Bordeaux et Lyon, contribueront quant à eux à la régénération des équipes projetées et participeront à la réponse aux besoins de santé de la collectivité militaire dans leur région. Le périmètre de leurs activités sera réduit et les partenariats qu'ils développeront avec les établissements de leur territoire de santé garantiront leur pérennité. Le sort de ces quatre hôpitaux restants ne semble pas avoir encore été définitivement tranché. Ces hôpitaux hors plate-forme pourraient être, à moyen terme, insérés dans le secteur public hospitalier, en tant que fonction hospitalière militaire, ou subsisteraient en tant que structure hospitalière militaire au sein de Regroupements hospitaliers de territoire (dans lesquels des structures hospitalières militaires et des structures hospitalières civiles seraient rassemblées).

c) Le devenir du Val-de-Grâce.

La réforme de la médecine hospitalière a été conduite sur un format de huit hôpitaux d'instruction des armées (HIA) et non plus neuf puisque la décision de fermer l'hôpital du Val-de-Grâce a été prise.

Sans revenir longuement sur les raisons de ce choix, que ne conteste pas votre commission, rappelons que la mise aux normes de cet hôpital aurait coûté environ 200 millions d'euros, et qu'il semblait difficile de réaliser ces travaux en site occupé tout comme il était difficile de fermer durablement cet hôpital en espérant lui conserver sa patientèle. De plus, cet hôpital était devenu inadapté. Certaines spécialités ne répondaient plus aux besoins actuels des forces armées telles que l'hémodialyse ou la radiothérapie. En revanche des activités essentielles au soutien des forces telles que l'accueil des urgences ou l'orthopédie-traumatologie n'étaient pas représentées. Enfin, il était indispensable de densifier les hôpitaux de Percy et Bégin, pour leur permettre de projeter les personnels nécessaires aux OPEX tout en maintenant l'activité des hôpitaux, ce qui n'était pas possible sans fermer le Val-de-Grâce et redistribuer son personnel sur la plate-forme d'Île-de-France.

Ainsi, la majeure partie des activités médico-chirurgicales de l'HIA du Val-de-Grâce a été transférée entre janvier et juillet 2015. Seules certaines spécialités médicales et les services médicotechniques poursuivront leurs activités jusqu'au 1 er juillet 2016. Un organe liquidateur sera ensuite chargé du démantèlement des installations de l'hôpital afin de libérer les locaux et l'emprise de l'hôpital à l'été 2017.

Le ministère de la défense ne souhaite pas conserver l'usage de cette emprise, mais reste néanmoins vigilant à conserver le site historique et les jardins du Val-de-Grâce, selon les réponses apportées au questionnaire budgétaire. L'emprise hospitalière pourrait faire l'objet d'une cession qui sera conduite, comme toutes celles relatives aux emprises foncières de l'État à Paris, par le préfet de la région Ile-de-France, mandaté par le Premier ministre. Votre commission considère que le ministère de la Défense doit naturellement bénéficier des recettes d'une éventuelle cession.

Par ailleurs, la partie historique du Val-de-Grâce sera densifiée. Dévolue au SSA depuis 1793, elle héberge l'école du Val-de-Grâce, qui pilote et met en oeuvre la formation initiale et continue de l'ensemble du personnel du SSA, ainsi que sa préparation opérationnelle. Elle accueille également le musée et la bibliothèque centrale du SSA. Dans le cadre de la rénovation de la gouvernance du SSA, de futures directions du service seraient regroupées au Val-de-Grâce. Enfin, le SSA envisage également le maintien des capacités d'hébergement de l'école du Val-de-Grâce, afin d'en développer les activités pédagogiques (formation continue et préparation opérationnelle).

3. Les effectifs du SSA

Le modèle « SSA 2020 » structurera des parcours professionnels attractifs et privilégiera l'innovation et la considération pour le personnel.

Depuis le 1 er janvier 2015, l'ensemble des crédits de personnel du ministère de la Défense est regroupé au sein du programme 212 « Soutien de la politique de la défense », placé sous la responsabilité du secrétaire général pour l'administration et réparti au sein de budgets opérationnels de programme (BOP) relevant de chaque gestionnaire.

Dans ce cadre, le service de santé des armées (SSA) est responsable d'un BOP qui regroupe l'ensemble des populations gérées par le service : praticiens, officiers du corps technique et administratif 16 ( * ) du SSA, militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées et volontaires du service de santé des armées, ainsi que le personnel civil des branches professionnelles paramédicales et tous les contractuels employés en son sein.

Les effectifs du SSA évoluent depuis 2013 conformément aux objectifs de déflation fixés par la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019. Ces dernières années, le SSA a fortement diminué le recrutement initial et s'est attaché à maîtriser ses flux de sortie sur les métiers et spécialités sensibles (chirurgiens orthopédiques, infirmiers anesthésistes diplômés d'État, infirmiers de bloc opératoire diplômés d'État et des masseurs kinésithérapeutes, notamment).

L'équilibre qui en résulte, est toutefois régulièrement questionné, compte tenu de la longueur des formations pour nombre des métiers de la santé, générant des effets retardés sur les viviers. L'année 2016 sera, de ce point de vue, très importante puisqu'une nouvelle réforme des études médicales est en voie de finalisation qui aura notamment pour effet d'allonger d'une année le cursus de formation des médecins qualifiés en médecine générale.

Enfin, la montée en puissance de la FOT, décidée dans le cadre de l'actualisation de la loi de programmation militaire, alourdit la charge de travail pesant sur le service de santé des armées. Il convient donc de veiller à ce que les effets induits de l'augmentation du format de la FOT soient pris en compte. Il paraît souhaitable que la déflation d'effectifs du SSA, prévue par la loi de programmation militaire initiale, c'est-à-dire 2 000 emplois sur les 16 000 que compte le SSA, soit compatible avec l'alourdissement de sa mission.

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EXAMEN EN COMMISSION

Réunie sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin, président, la commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du mercredi 4 novembre 2015.

M. Yves Pozzo di Borgo, rapporteur pour avis. - Michelle Demessine et moi-même sommes très heureux d'ouvrir l'examen des rapports budgétaires 2016 de la mission « Défense », en tant que rapporteurs du programme 178 qui regroupe, sous l'autorité du chef d'état-major des armées, des crédits relatifs à la préparation et à l'emploi des forces.

De manière liminaire, il est important de préciser que nous sommes globalement satisfaits de l'évolution des crédits du programme 178 qui progressent de 1,47 % en crédits de paiement, par rapport à 2015, et surtout de près de 3 % en autorisations d'engagement. Ceci est conforme à l'actualisation de la loi de programmation militaire (LPM) du 28 juillet 2015.

Nous avons souhaité cette année approfondir un sujet que nous avions déjà perçu comme essentiel l'année dernière, qui était notre première année de rapporteurs du programme 178. Sujet dont nous avons largement débattu lors du vote du projet de loi portant actualisation de la LPM : le maintien en condition opérationnelle (MCO). Nous l'avons abordé chacun sous des angles différents. Je cède la parole à Michelle Demessine.

Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis. - La préparation opérationnelle est le gage de notre réactivité et de notre efficacité ; c'est aussi l'assurance de la sécurité du personnel. Les problèmes de disponibilité des matériels expliquent largement le fait que l'activité opérationnelle reste inférieure aux objectifs fixés : de près de 10 % en deçà des normes reconnues par l'OTAN et des objectifs exprimés par la LPM pour 2014-2019.

Or, les précédentes lois de programmation militaire ont plutôt sacrifié ce poste de dépenses, ce qui a entraîné une crise de la disponibilité du matériel au début des années 2000. Dans le contexte stratégique post Guerre froide, les crédits affectés à la maintenance des équipements avaient fortement diminués. Certes, des réformes d'organisation et de structures ont été menées pour améliorer les choses et contrecarrer la baisse des crédits, mais les performances sont restées décevantes en termes de disponibilité. La dégradation a même repris dans la deuxième moitié des années 2000 et touchait les trois armées. Comme nous l'avait indiqué le Général Girier, Directeur de la structure de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense (SIMMAD), en 2014, il manquait une demi-annuité au MCO aéronautique sur la dernière LPM, soit un décrochage d'environ 1 milliard d'euros. Ainsi, la disponibilité des aéronefs, très variable selon le type d'appareil, atteignait 63 % du contrat opérationnel en 2005 mais plafonnait à 40 % en 2013.

C'est ce qui nous a décidés à nous rendre à Mérignac pour rencontrer les acteurs du MCO aéronautique, c'est-à-dire essentiellement le directeur de la SIMMAD et le directeur central du service industriel aéronautique (SIAé), Patrick Dufour. À l'issue de ce déplacement, le constat que je dresse est triple :

- l'actualisation de la LPM, ouvrant 500 millions d'euros supplémentaires en faveur de l'EPM, va dans le bon sens ;

- les efforts entrepris ont permis de redresser la disponibilité des matériels en OPEX, mais on atteint la limite des hommes, des machines et du modèle de contrat opérationnel ;

- enfin, les perspectives du SIAé me semblent obscurcies par les problèmes de recrutement de personnels.

Les personnes que nous avons auditionnées pour préparer ce rapport ont été rassurantes mais prudentes : selon elles, l'effort budgétaire consenti est satisfaisant, à condition de maintenir le même niveau d'autorisations d'engagement dans le PLF pour 2017 que dans le PLF pour 2016, soit 250 millions d'euros, et de veiller à ce que le niveau des crédits de paiement correspondant soit inscrit tout au long de la LPM. De plus, il faut accepter que les effets des efforts budgétaires fournis ne se produisent qu'à moyen terme. Le temps du maintien en condition opérationnelle est un temps industriel : une décision n'est suivie d'effet que 18 mois à deux ans et demi après avoir été mise en application.

J'en viens maintenant au MCO des matériels aéronautiques. La SIMMAD a fait face, en 2015, à une activité opérationnelle intense : 111 appareils ont été engagés, contre 89 en 2014. Pour faire face aux besoins de projection, tout en préservant l'activité en métropole, la SIMMAD a réorganisé la « logistique en retour des théâtres » afin de maîtriser les délais de réparation. Par exemple, les délais de retour des moteurs en panne sont passés de 70 jours en 2013 à 18 jours en 2015 pour le moteur Makila du Caracal. De même, l'organisation ad hoc d'un « plateau d'amélioration de la disponibilité rapportée aux hélicoptères », PADRHé, a permis d'améliorer les 130 actions menées en 2015 en soutien de l'ensemble des parcs d'hélicoptères. Le fait que la flotte soit dispersée en micro-parcs, âgés ou, au contraire, peu matures, très sensibles aux théâtres d'opérations, rendait indispensable cette adaptation de la SIMMAD. Les résultats sont excellents, puisqu'en 2015 le niveau de disponibilité des matériels aéronautiques des forces projetées a été maintenu à 79,2 % sur l'ensemble du périmètre de la SIMMAD. En revanche, l'objectif de disponibilité technique opérationnelle (DTO) plafonne, en 2016, à 57 % pour les hélicoptères de l'armée de terre et 55 % pour ceux de la marine.

Les limites sont atteintes : la SIMMAD tente de préserver les équipements en métropole, mais cela se fait au prix d'un déficit organique croissant : les personnels qualifiés sont obligés de repartir en OPEX à défaut d'avoir eu le temps de former les nouveaux pilotes. Les équipages d'aéronefs basés en métropole ne parviennent pas à se qualifier faute d'instructeurs mais aussi faute de parvenir à accumuler un nombre d'heures de vol suffisant. De plus, pour répondre aux besoins des OPEX, on oriente les formations à l'engagement, ce qui est le principe même de la différenciation, prévue par la LPM, mais ce principe est poussé à son maximum. Il me semble que la capacité de résistance des personnels navigants et non navigants projetés est mise à rude épreuve, sans parler de l'usure des matériels projetés dont mon co-rapporteur fera état. Notre commission aurait tout intérêt à réfléchir au format du contrat opérationnel et au nombre de théâtres qui peuvent être ouverts dans le contexte budgétaire contraint que nous connaissons.

Enfin, je souhaite attirer votre attention sur le fait que ma position personnelle est qu'il faut soutenir la démarche du ministre de la défense visant à embaucher des ouvriers d'État dans quatre spécialités du MCO aéronautique. Le besoin d'embauche, au regard des caractéristiques démographiques du SIAé, est à mon sens de 160 ouvriers d'État (et non seulement 50 ouvriers d'État comme le prévoit la LPM). Si la réunion interministérielle de novembre ne donnait pas satisfaction de ce point de vue au ministère de la défense, le service du SIAé, fleuron du MCO, serait fragilisé. Cela serait d'autant plus regrettable que le SIAé a su se positionner sur les flottes nouvelles que sont le Rafale et l'A400M, dès le début de leur utilisation, et que l'on sait très bien que les industriels ne maintiennent pas les équipements aussi longtemps que notre armée les utilise. Il faut avoir conscience que ce secteur est extrêmement concurrentiel et que le recrutement, qui de toute façon se fait au prix du secteur privé, ne garantit pas la fidélisation des personnels. Le statut d'ouvrier d'État permet de fidéliser les personnels, ce qui me paraît personnellement indispensable au moment où le SIAé acquiert des compétences sur les nouvelles flottes, susceptibles d'intéresser le secteur privé.

M. Yves Pozzo di Borgo, rapporteur pour avis. - Je voudrais insister sur trois points : la question de l'externalisation du MCO, le coût réel du MCO en opérations extérieures (OPEX), et l'articulation entre le soutien à l'exportation (SOUTEX) et le financement du MCO. Enfin, je vous dirai un mot du service de santé des armées puisque je sais que cette question intéresse la commission qui en avril dernier s'est rendue au Val-de-Grâce.

S'agissant de l'externalisation, et sans empiéter sur le programme 212 « Soutien de la politique de la défense », je souhaite souligner certains faits. Près de 5 milliards d'euros sont consacrés au MCO, dont 2 milliards de masse salariale pour les personnels du ministère, militaires et civils, chargés de ses fonctions, et 3 milliards qui vont à l'entretien programmé du matériel (EPM). Ce type « d'externalisation » qu'est l'EPM est assez captif : les industriels font ce qu'ils savent, veulent et peuvent faire. Or au cours des auditions que nous avons eues pour préparer notre rapport, la qualité de l'EPM, notamment lorsqu'il est réalisé hors de France, semble poser des questions, a minima de délai. J'ajouterai que la projection sur les théâtres d'opérations des personnels civils, n'appartenant pas au ministère de la défense, chargés d'EPM, n'est pas évidente. Enfin, la qualité de certaines prestations, selon ce qui nous a été rapporté, n'est pas toujours pleinement satisfaisante. Il me semble donc indispensable de veiller à garder, en interne, au ministère de la défense, les compétences permettant d'entretenir les équipements dont la durée de vie est souvent plus longue que ce que le modèle industriel prévoit. Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, je souligne que lors de ces auditions, l'engagement et le dévouement des industriels partenaires du ministère ont été salués.

Ceci m'amène à ma deuxième réflexion : le coût en ressources humaines et en matériel des OPEX me semble sous-évalué. Les modèles industriels de MCO s'avèrent parfois erronés une fois les matériels projetés sur les théâtres. Nos interlocuteurs au niveau central, les acteurs du maintien en condition opérationnelle à Mérignac, mais aussi les utilisateurs des équipements, pilotes et mécaniciens, nous ont tous confirmés que les modèles en aéronautique enregistraient un déficit de 20 % à 25 % d'hommes. Il faut presque un quart de personnel en plus de ce qui était prévu pour assurer le MCO. Une heure de vol de certains aéronefs devait se traduire par 12 heures de maintenance, c'est en fait 25 heures de maintenance qui sont nécessaires. Dernier exemple, pour trois avions de combat projetés, cinq moteurs sont mobilisés dans les circuits logistiques. Ceci pose un réel problème auquel s'ajoutent la suractivité et la surintensité. La suractivité concerne les matériels qui voient leur activité croître du fait des besoins opérationnels liés aux OPEX. Ainsi, le Caracal a dépassé les prévisions d'activité de 15 %, le M2000C a volé près de 11 % de plus que prévu. À cela s'ajoute la surintensité de l'utilisation des matériels en OPEX qui oblige à la mise en oeuvres de traitements préventifs de la corrosion pour le mirage 2000, à de longues opérations de remise en état post OPEX pour les Tigre engagés dans la bande sahélo-saharienne, enfin, le nombre de lots d'autonomie de l'ATL2 a dû être augmenté. Nos actions sur tous les théâtres d'opérations le prouvent, les acteurs ont su s'adapter, mais il me semble que nous approchons des limites du raisonnable.

C'est en suivant ce raisonnement que j'en suis arrivé à la conclusion que nous devrions être très attentifs au retour attendu des opérations dites de soutien à l'exportation (SOUTEX) réalisées par nos armées. L'exportation de nos armements était une condition sine qua non pour maintenir en activité la chaîne de production du Rafale à son minimum de 11 appareils par an, sans que le ministère de la défense n'ait à acquérir 40 appareils en plus des 26 prévus par la LPM. L'armée de l'air contribue à la réussite de ces exportations, comme la marine nationale et l'armée de terre. Le montant des commandes annuelles d'armement français est passé de 5,1 milliards d'euros en 2010, à 6,9 milliards d'euros en 2013, 8,2 milliards d'euros en 2014 et 15 milliards d'euros en 2015.

Le décret de 1983 qui organise le SOUTEX prévoit que les industriels remboursent la participation des militaires. Les dépenses courantes, c'est-à-dire les soldes et les frais d'amortissement du matériel, ne font pas partie des dépenses remboursables, les dépenses supplémentaires sont quant à elles remboursées. Mais elles ne comprennent pas les frais supplémentaires de MCO des matériels vieillissants, utilisés plus longtemps pour permettre à l'industriel de prendre à nos armées les frégates ou les Rafale qu'il n'a pas encore produits et qu'il exporte ainsi. J'aimerais que cette question soit approfondie et que soit évalué ce que j'appellerai « le retour sur MCO » des exportations d'armement. Les frais fixes de la chaîne de production que supporte l'armée devraient être réduits du fait des exportations, mais aussi les frais de maintien en condition opérationnelle. Et cette vision n'est pas complète si l'on n'ajoute pas également le « coût de possession » des matériels remplaçant les livraisons des matériels attendus et finalement exportés.

Enfin, mes chers collègues, je voulais attirer votre attention sur la prochaine adoption par le ministre de la défense du nouveau modèle d'organisation du Service de santé des armées (SSA), découlant de son projet « SSA 2020 ». La réforme engagée me semble très bien menée. Elle resserre la définition de la mission du service sur cette phrase : « Apporter à tout militaire soumis à un risque lié à son engagement opérationnel un soutien santé lui garantissant la prévention la plus efficace et la meilleure qualité de prise en charge en cas de blessure ou de maladie, préservant ainsi ses chances de survie et le cas échéant de moindres séquelles physiques ou psychiques ». Le SSA tire toutes les conséquences de cette redéfinition de sa mission, dont la première et la plus importante est la restructuration de la fonction hospitalière en deux plates-formes comprenant quatre hôpitaux : Bégin à Saint Mandé et Percy à Clamart, Laveran à Marseille et Sainte-Anne à Toulon. Le Val de Grâce est fermé pour sa partie hospitalière. Le sort des quatre hôpitaux restants, situés à Brest, Metz, Bordeaux et Lyon, n'est pas encore définitivement réglé. Ces hôpitaux, hors plate-forme, seront, à moyen terme, soit insérés dans le secteur public hospitalier, en tant que fonction hospitalière militaire, l'hôpital public accueillant une équipe militaire, soit insérés dans des regroupements hospitaliers de territoire, dans lesquels des structures hospitalières militaires et des structures hospitalières civiles seraient rassemblées. Il nous appartiendra de suivre avec attention ces évolutions.

Si nous nous réjouissons de la montée en puissance de la force opérationnelle terrestre (FOT) décidée dans le cadre de l'actualisation de la LPM, il est certain qu'elle alourdit la charge de travail pesant sur le SSA. Il nous faut donc être particulièrement vigilant dans les prochaines années à ce que la déflation d'effectifs prévue par la LPM, c'est-à-dire 2 000 emplois sur les 16 000 que compte le SSA, soit compatible avec l'alourdissement de sa mission.

M. Daniel Reiner. - Je remercie tout d'abord les rapporteurs de l'appréciation positive qu'ils portent sur l'effort fait en faveur du MCO dans le cadre du PLF pour 2016. Il est vrai que la question de la répartition entre le MCO réalisé par les forces civiles et militaires du ministère et l'entretien programmé du matériel, à la charge des industriels, peut soulever les questions de fond au sein de notre commission. Je rappelle qu'il existait un comité qui contrôlait les prix de revient de l'armement, qui a été supprimé. Il me semble qu'aujourd'hui MCO et EPM coexistent. Ce sont bien sûr les personnels militaires, navigants ou non, qui réalisent l'entretien sur les théâtres d'opérations. En dehors de cette activité clairement identifiée, il faut parvenir à choisir le bon acteur. Pour reprendre les exemples que vous avez développés, le SIAé fait de l'excellent travail mais ne peut pas tout faire. De même, les contrats d'achat d'armement par l'armée française laissent à la charge de l'industriel une partie de l'EPM, c'est un modèle économique qu'il faut respecter. De plus, face à certains ajustements nécessaires du MCO après projection des équipements, il convient de laisser aux industriels leurs responsabilités.

M. Jean-Marie Bockel. - Je voudrais aborder deux sujets de fond. Pour reprendre un terme un peu à la mode, il me semble que nous assistons à un changement de paradigme avec la mise en place du nouveau dispositif des OPINT qui pose la question de l'emploi de nos forces sur le territoire. L'articulation avec les OPEX, la manière dont ceci doit s'organiser et le rôle de la réserve sont autant de sujets à surveiller. Il est évident que chaque acteur de la défense fournit les efforts nécessaires pour remplir ses missions, et que les marges de manoeuvre se réduisent, comme le soulignaient nos rapporteurs. En tant que parlementaires, nous devons avoir un rôle de vigilance bienveillante, notamment sur les questions de MCO et d'EPM soulevées aujourd'hui.

M. Gilbert Roger. - Je remercie nos rapporteurs qui ont bien montré la progression que les efforts budgétaires consentis ont permis dans leur secteur. J'ai connu moi aussi, lorsque je travaillais sur ces questions en tant que rapporteur pour la commission, ces problématiques difficiles de formation des nouveaux pilotes qui, faute d'effectuer un nombre d'heures de vol suffisant, doivent céder la place aux pilotes aguerris pour les missions. Les jeunes ne peuvent pas voler, les pilotes expérimentés accumulent missions et fatigue. Il est certain que les niveaux de disponibilité technique opérationnelle ne sont pas encore optimums, mais il faut se souvenir que c'est la conséquence des réductions de crédits décidés dans le cadre des précédentes LPM. La loi de programmation militaire pour 2014-2019 a permis de corriger en partie cette tendance, l'actualisation l'été dernier de la LPM a confirmé cet effort.

Par ailleurs, il n'est pas aisé de déterminer le bon niveau de répartition entre MCO et EPM. Il ne faut pas non plus oublier, dans le cadre de cette réflexion, de prendre en compte les formats d'activité nécessaires aux industriels français pour parvenir à exporter les armements qu'ils produisent.

M. Christian Cambon. - Je me demande si la réforme du SSA est suffisamment articulée avec la carte hospitalière du territoire, comme le montre l'exemple de la fermeture de la maternité à Saint-Mandé. Peut-on avoir des plates-formes militaires efficientes si elles réduisent ainsi leur offre et s'insèrent-t-elles encore, de façon satisfaisante, dans le service public de santé dû à la population d'un territoire ?

M. Xavier Pintat. - Je me félicite que les crédits du programme 178 augmentent dans le respect de la LPM et de son actualisation. Il me semble donc que nous pouvons être globalement satisfaits, tout en tenant compte des remarques de nos rapporteurs sur le MCO.

Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis. - Notre rapport est effectivement positif, nous ne boudons pas les efforts faits, mais nous voulions pointer les problèmes qui nous semblent mettre le modèle sous tension. Il ne faut pas que la préparation des forces pâtisse de la situation. Le niveau de crédit trop faible hérité des précédentes LPM, l'accroissement des OPEX et le succès des exportations d'armement sollicitent les forces. Ce ne doit pas être au détriment de leur capacité organique à préparer les futurs engagements.

M. Yves Pozzo di Borgo, rapporteur pour avis. - Il me paraît évident qu'il existe une complémentarité étroite entre les industriels et les services de maintien en condition opérationnelle des équipements des armées. Pour reprendre notre exemple, le SIAé travaille en étroite et bonne relation avec les industriels, chacun profitant des compétences techniques de l'autre. Je voulais insister sur l'accroissement des commandes d'armement en 2015 qui atteint 15 milliards d'euros. Il me semble nécessaire de tirer tous les profits possibles de ces exportations record.

Enfin, de nombreuses conventions sont signées entre le service de santé des armées et les structures nationales ou régionales du service public de santé. Les évolutions de l'offre militaire de soins se font donc en pleine concertation avec les responsables de la carte hospitalière.

* *

*

À l'issue de sa réunion du mercredi 25 novembre 2015, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Défense ».

LISTE DES DÉPLACEMENTS

Vendredi 23 octobre 2015, déplacement à Mérignac. Ont été organisées les auditions suivantes, citées dans l'ordre où elles ont eu lieu :

- audition du Directeur central de la SIMMAD, le Général de corps aérien Guy Girier,

- audition des syndicats : (par ordre alphabétique du nom des syndicats) pour la CFDT : Mme HERNANDEZ et M. RIVOAL, pour la CGC : MM. TURPIN et TORMO, pour la CGT : MM. FRAGUAS et SCALONA, pour FO : M. ANFIF et Mme CARRE-TEA, et pour l'UNSSA : MM. GAILLARD et SIMON,

- audition du Directeur central du SIAé, l'Ingénieur général de l'armement hors classe Patrick DUFOUR,

- audition du Commandant en second les forces aériennes, le Général de division aérienne Gilles MODÉRÉ,

- audition des personnels navigants et non navigants : CNE David DUPONT (ESTA Mont de Marsan), CNE David BOUREZ (ECE Mont-de-Marsan), CNE Loïc GILIET (EH Cazaux) et CNE Ludovic ESKHANIAN (ESTA Nancy),

- audition du colonel AUTOURDE et lieutenant-colonnel VANNET du pôle production de la SIMMAD.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Vendredi 16 octobre 2015 ont été auditionnés :

- Mme Monique LEGRAND-LARROCHE, Ingénieur général de l'armement, directrice des opérations à la direction générale de l'armement,

- MM. les Colonel Philippe POTTIER, (Terre), chef du bureau en charge du P178 à la division « Plans, programmation et évaluation », et son adjoint, Sébastien RABEAU (Air), et M. le capitaine de vaisseau Pierre CANAL (Marine), chef du bureau « mise en condition opérationnelle », pour l'état-major des armées.

ANNEXE 1 : COMPTE DE COMMERCE « APPROVISIONNEMENTS DE L'ÉTAT ET DES FORCES ARMÉES EN PRODUITS PÉTROLIERS, BIENS ET SERVICES COMPLÉMENTAIRES »

Depuis 2013, le périmètre des dépenses et des recettes du compte de commerce prenait en compte tant les recettes que les dépenses afférentes aux biens et services complémentaires nécessaires à l'utilisation des matériels de l'État et à l'exploitation de ses infrastructures pétrolières. À compter de 2016, le périmètre des dépenses et des recettes du compte de commerce prend également en compte tant les recettes que les dépenses afférentes au fonctionnement et aux investissements du service des essences des armées (SEA).

Ligne du compte de commerce

LFI 2015

PLF 2016

11 - Cessions de produits aux clients relevant du ministère de la défense

608,4

654,6

37 - Fonction pétrolière (dépenses de fonctionnement) (nouveau)

24,9

38 - Fonction pétrolière (dépenses d'investissement) (nouveau)

12,2

Pour 2016, les hypothèses budgétaires suivantes ont été retenues : cours du baril de Brent à 59 $ pour une parité €/$ établie à 1,10.

À la suite de l'extension du périmètre du compte de commerce, les lignes 37 et 38, nouvellement créées, retracent les dépenses liées à la fonction pétrolière. La ligne 37 regroupe les dépenses de fonctionnement évaluées à 24,9 millions d'euros. Celles-ci se répartissent comme suit :

- soutien pétrolier (soutien opérationnel des formations du SEA et soutien métier du personnel) : 7,4 millions d'euros,

- carburants des véhicules opérationnels du SEA : 1,7 million d'euros,

- acquisition et entretien du matériel pétrolier spécifique : 9,6 millions d'euros,

- entretien des infrastructures pétrolières spécifiques : 5,1 millions d'euros

- participation du SEA au programme d'entretien des installations désactivées des oléoducs interalliés du « Central Europe pipeline system » (CEPS) : 1,1 million d'euros.

La ligne 38, estimée à 12,2 millions d'euros, correspond aux dépenses d'investissement relatives à l'acquisition et à l'entretien du matériel spécifique du SEA.

ANNEXE 2 : LA SIMMAD

1. Organisation de la SIMMAD

Depuis l'été 2012, la SIMMAD est organisée en deux pôles : le pôle « direction » et le pôle « conduite ».

Le pôle « direction » comprend notamment la division stratégie, méthodes et réglementation (DSMR) en charge de la stratégie du MCO aéronautique, des études d'optimisation et de modernisation du MCO aéronautique, de l'élaboration des textes réglementaires de niveau interarmées, de la vérification de leur mise en application ainsi que de la définition des méthodes de travail.

La composante « responsables de soutien en service » (RSS) dépend de la direction de la SIMMAD. Les RSS travaillent au sein des équipes de programmes intégrées afin d'apporter une expertise du soutien dans les programmes d'armement. Les RSS sont implantés à Bagneux, auprès des unités de management de la DGA.

Le pôle « conduite » travaille selon un fonctionnement matriciel. Son coeur est la division des flottes. Chaque responsable de flotte, est le garant de la cohérence technique, logistique et contractuelle des matériels de sa compétence. Il est le chef d'orchestre du MCO, responsable de la disponibilité de sa flotte. Il bénéficie des prestations transverses des autres composantes de la SIMMAD détaillées ci-après.

La division des flottes comprend dix flottes : sept d'entre elles veillent au soutien en service d'aéronefs :

Les flottes « Rafale », « Mirage - Alphajet », « Transport - Écoles », « Avions de support opérationnel » (KC-135 FR, AWACS, Falcon...), « Aviation embarquée et patrouille maritime », « Hélicoptères » et « Hélicoptères de nouvelle génération ». Trois flottes exercent leurs responsabilités sur un domaine transverse : les flottes « SIC », « Matériel d'environnement » et « Armement ».

Le bureau des contrats des flottes (BCF) assure l'animation des contrats transverses au profit des flottes.

La sous-direction de la comptabilité et du budget (SDCB) est le point de contact privilégié des états-majors, responsables des budgets opérationnels de programme (RBOP). Cette sous-direction centralise les besoins financiers annuels exprimés par les flottes, élabore le plan d'emploi des autorisations d'engagement (AE) en fonction des ressources allouées par les RBOP et assure la gestion financière tout au long de l'année (consommation des AE et des crédits de paiement (CP)). La sous-direction technique (SDT) est responsable du maintien à jour des référentiels techniques utilisés pour chacun des types de matériel dont la SIMMAD a la charge. La documentation relève donc de la SDT.

La division de l'animation technico-opérationnelle (DATO) a la responsabilité d'animer le traitement des faits techniques, de suivre l'application des modifications et de prendre en compte le retour d'expérience par l'exploitation des faits techniques et la participation aux travaux de gestion des états physique et fonctionnel des matériels aéronautiques. La division logistique (DLOG) est en charge :


• de définir les règles et de préparer les décisions de prêts, de cession, de délivrance et d'élimination des pièces de rechanges et des matériels référencés ;


• de gérer et de préparer les décisions de mouvements des matériels en assurant le maintien du niveau approprié de stocks, les approvisionnements et les mises en réparation.

Le service des contrats et des finances (SCF) est chargé de préparer les marchés de MCO et d'acquisition de la responsabilité de la SIMMAD. Il tient la comptabilité des crédits.

Le bureau des systèmes d'information (BSI) est chargé


• d'assurer la maîtrise d'ouvrage des systèmes d'information spécifiques au MCO aéro (SIGMA pour l'Armée de l'air, Magellan et Amasis pour la Marine). Il prépare le schéma directeur des systèmes d'information correspondants et fait procéder à l'acquisition, à l'installation, à l'exploitation, à l'administration et au soutien des matériels et logiciels, en cohérence avec les systèmes d'information de la direction générale pour l'armement et des armées ; en particulier, il est chargé de préparer la mise en service du système interarmées COMP@s, et reprend la responsabilité du déploiement d'ATAMS au sein de toutes les armées ;


• de piloter la convergence des systèmes d'information logistiques du milieu aéronautique. Il participe aux études relatives aux systèmes d'information mis en oeuvre dans les programmes développés en coopération internationale (systèmes propres au Rafale, à l'A400M, au NH90...).

La division pilotage-performance (DPP) est chargée de coordonner les activités et l'instruction des dossiers transverses de la structure, de réaliser le contrôle de gestion de la SIMMAD, d'animer le dialogue de gestion avec les autorités et le contrôle interne de la SIMMAD. Elle assure aussi la gestion du budget de fonctionnement de la structure et les fonctions RH (évolution du référentiel d'organisation, chancellerie, préparation des mutations, formation du personnel).

Les échelons d'équipes techniques centralisés (EETC) sont répartis dans les escadrons de soutien aéronautiques (ESTA) des bases aériennes. Ils dépendent de la DATO. Ils sont implantés sur les sites suivants :


• Avord (E3F et Xingu),


• Cognac (TB30 Epsilon),


• Creil (CN235),


• Évreux (C160 Transall),


• Istres (C135),


• Nancy (M2000)


• Orléans (C130 Hercule),


• Romorantin (planeurs),


• Salon de Provence (avions légers),


• Tours (Alphajet),

La DATO pilote aussi l'activité des équipes techniques :


• ETIA Rafale à Mont de Marsan


• STMAI de Montauban


• ETIA 3S d'Ambérieu


• ETIA NH90 situé au Luc


• ETIA CARACAL à Mérignac


• ETIA Fennec à Orange, antenne détachée du STMAI de Montauban.

Dépendant du chef de la division des flottes, des antennes SIMMAD auprès de l'industriel (ASPI) sont positionnées dans les ateliers industriels de l'aéronautique (AIA) et chez certains industriels :


• AIA Cuers-Pierrefeu,


• AIA Floirac,


• AIA Clermont-Ferrand


• Cellule de coordination technique du marché OGMA


• Cellule logistique Air à Marignane


• Antenne ORRMA à Brétigny sur Orge


• CICOMORE situé au sein de l'AIA de Floirac.

2. Chiffres caractérisant l'activité de la SIMMAD

Données au 31 décembre 2014 :


1 228 aéronefs de 46 types différents


1 426 personnes réparties sur 25 sites


55 milliards d'euros de patrimoine aéronautique


Plus de 5 200 faits techniques annuels


208 260 directives et instructions logistiques


550 000 références en stock


175 000 ordres de mouvements de matériels


340 actes contractuels par an et 35 marchés principaux

Source : Réponses au questionnaire budgétaire et documents budgétaires

ANNEXE 3 : LE SIAÉ

1. Organisation du SIAé

Le SIAé comprend 5 ateliers industriels de l'aéronautique (AIA) :

- l'AIA d'Ambérieu traite la maintenance et la fabrication de matériels liés à l'environnement aéronautique comme les équipements de sécurité, de survie et de sauvetage ainsi que des prestations de métrologie ;

- l'AIA de Bordeaux est spécialisé dans la maintenance des moteurs des aéronefs ;

- l'AIA de Clermont-Ferrand et l'AIA de Cuers-Pierrefeu traitent la maintenance des cellules d'aéronefs et de leurs équipements, réalisent des chantiers de rénovation et ont également une activité de conception d'évolutions limitées de certains aéronefs ;

- l'AIA de Bretagne sur 3 bases aéronavales (Lann-Bihoué, Lanvéoc-Poulmic et Landivisiau) réalise la maintenance au deuxième niveau technique des cellules, des équipements et des moteurs des aéronefs de la marine.

Le SIAé réalise également des activités de maintenance aéronautique de la base aéronautique d'Hyères.

À sa création, 3 455 personnes civiles et militaires travaillaient au SIAé.

2. Données budgétaires

En 2015, 620,07 millions d'euros étaient inscrits en recettes et en dépenses au compte de commerce « Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l'État ». En 2016, 633,96 millions d'euros sont inscrits, soit une augmentation de 2,24 %.

Les prévisions du budget 2016 résultent, tant en dépenses qu'en recettes, des commandes de prestations attendues, notamment de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense (SIMMAD). Les prestations réalisées par le SIAé sont valorisées au coût complet en référence au guide comptable des industries aéronautiques et spatiales. Elles couvrent une large gamme des besoins des forces armées : la maintenance de cellules, de moteurs et d'équipements, la transformation et la modernisation d'aéronefs, la conception et la réalisation de radômes, d'éléments en matériaux composites, de simulateurs d'entraînement ou de bancs de test, l'entretien et la fabrication de matériels d'environnement aéronautique.

En 2016, 98,5 % des prévisions de recettes sont constituées des commandes passées par les clients budgétaires, dont les deux principaux sont la SIMMAD (dont les crédits sont inscrits au programme 178 « Préparation et emploi des forces »), pour l'entretien des aéronefs, et la direction générale de l'armement (dont les crédits sont inscrits au programme 146 « Équipement des forces »), pour les chantiers de transformation et de modernisation des matériels aéronautiques.

L'importance et la nature des prises de commandes induisent le niveau de dépenses nécessaires à leur exécution et celui des ressources de trésorerie à constituer pour leur couverture.

Les prévisions de recettes et de dépenses pour 2016 sont fondées sur les commandes en cours ouvertes au titre des années antérieures à 2016, pour lesquelles un échelonnement d'emploi des ressources est prévisible, et sur les prises de commandes prévisibles en 2016, notamment de la SIMMAD.

Les dépenses de personnel pour 2016 sont déterminées sur la base des effectifs attendus afin de mettre en corrélation le plan de charge du service avec les ressources humaines. À la fin de l'année 2015, le SIAé devrait atteindre la cible de déflation fixée par la précédente loi de programmation militaire avec un effectif de 4582 ETP. Le simple maintien de l'activité au niveau de 2015 devrait conduire à recruter au-delà des départs naturels prévus. Le format du SIAé en 2016 et sur les prochaines années sera déterminé par le conseil de surveillance du service, sur la base des orientations stratégiques arrêtées au regard notamment de l'engagement des forces en opérations ainsi que du soutien apporté par celles-ci aux exportations.

Source : Réponses au questionnaire budgétaire et documents budgétaires


* 1 En République centrafricaine.

* 2 Dans la bande sahélo-saharienne.

* 3 Dans la bande sahélo-saharienne, également.

* 4 Au Levant.

* 5 Soit 19,83 millions d'euros au titre de l'EPM naval et 19,52 millions d'euros au titre de l'EPM aéronaval. Ces chiffres sont des estimations. Les surcoûts les plus importants concernent la maintenance du Chammal.

* 6 Extrait de l'article « Armées : la préparation des militaires reste très en deçà des exigences OTAN » de Michel Cabirol, La Tribune, 23/09/2014.

* 7 Rapport public thématique : « Le maintien en condition opérationnelle des matériels militaires : des efforts à poursuivre ».

* 8 Tels que le financement de la compensation SNCF, le partenariat public-privé relatif aux travaux de réhabilitation et l'exploitation du centre national des sports de la défense, les marchés subséquents d'externalisation de la poste interarmées, les travaux de réhabilitation des sites de la direction des centres d'expérimentation nucléaire, etc.

* 9 À l'exception, notamment, des droits des personnels en OPEX, des marins embarqués, du personnel nourri au sein des hôpitaux d'instruction des armées, etc.

* 10 Le déficit actuel est de trois bâtiments sur neuf et pourrait atteindre six sur neuf à l'horizon 2020, conformément aux anticipations du Livre blanc.

* 11 L'utilisation pendant une année supplémentaire des F70, afin de tenir le contrat opérationnel malgré le retard dans la livraison des FREMM du fait de l'exportation de l'une d'elles à l'Égypte, n'est pas optimale. Les F70 ont un âge moyen de 29 ans, ce qui rend leur maintenance longue et coûteuse.

* 12 Système d'information logistique pour le suivi de la ressource interarmées

* 13 Création du collège du MCO aéronautique développée ci-dessous.

* 14 En cours de réalisation, par exemple, dans le cadre du marché de soutien de l'Awacs .

* 15 Le SSA n'a plus aujourd'hui à prendre en charge, de la même façon que lors de sa création, la communauté de la défense située en métropole, qui trouve désormais dans le secteur public hospitalier une offre de soins satisfaisante. De la même façon, la disparition des appelés du contingent et la réorganisation des bases de défense ont réduit le besoin d'implantation nationale du SSA.

* 16 Ce corps disparaitra le 31 décembre 2015, lorsque l'intégration de ses membres dans le corps des commissaires des armées, géré par le service du commissariat des armées, sera achevée.

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