C. LE DIALOGUE SUR LES NOUVELLES LIGNES DIRECTRICES CONTINUE

Les nouvelles lignes directrices sur les aides d'État aux aéroports et aux compagnies aériennes ont été publiées le 4 avril 2014, après plus de deux ans de débats intenses. De très nombreuses contributions ont été apportées par tous les acteurs du transport aérien et les États membres. À l'initiative de la commission des affaires européennes, le Sénat s'était saisi de cette question sensible pour l'aménagement du territoire et avait adopté, le 3 novembre 2013, une résolution européenne 10 ( * ) . Cette dernière visait notamment à soutenir la position du Gouvernement, en faveur de l'introduction d'une nouvelle catégorie, pour les petits aéroports, qui pourraient ainsi bénéficier d'un régime d'aides plus souple.

Par ailleurs, l'élaboration de ces lignes directrices ayant été concomitante à l'instruction de dizaines de plaintes touchant des aéroports en Europe (fin 2013, 78 aéroports européens étaient visés par des plaintes pour aides d'État dont une trentaine en France), ces deux processus se sont alimentés mutuellement.

Au final, les évolutions proposées par la Commission européenne sont globalement positives au regard des demandes d'ajustement qui avaient été formulées par la France . Il reste cependant clair que l'orientation générale des nouvelles lignes directrices, confirmée par les premières décisions de la Commission dans le cadre des plaintes engagées à l'encontre des aéroports français, consiste à réduire le niveau des aides d'État dans le secteur, notamment des aides à l'exploitation aéroportuaire et des aides aux compagnies aériennes, considérées comme une distorsion de concurrence particulièrement marquée .

• Pour l'application des nouvelles lignes directrices, la DGAC a mis en place une intense campagne d'information et de mobilisation de ses services et des aéroports en 2014-2015. Une attention particulière est portée aux renouvellements de délégation de service public , qui sont l'occasion de remettre à plat les modalités de financement de l'aéroport, ainsi que sur la situation des aérodromes dit « proches » (situés à moins d'une heure de transport ou à moins de 100 km les uns des autres).

À cette occasion, la DGAC a signalé à la Commission le caractère souvent disproportionné des analyses demandées pour de très petits aéroports , soumis, au degré d'intensité près, aux mêmes critères d'examen que les plus gros. La Commission a accepté à ce stade le principe de l' extension du règlement d'exemption par catégories (RGEC) aux aéroports jusqu'à 3 millions de passagers, tout en refusant d'assouplir les critères de compatibilité applicables aux plus petits aéroports. Cette position n'est pas satisfaisante car elle permet seulement de réduire les notifications à la Commission, et donc de décharger celle-ci, sans pour autant simplifier les contrôles et les analyses pour les États membres et pour les petits aéroports . Les discussions sont toujours en cours et devraient se poursuivre jusqu'au 2 e trimestre de l'année 2017.

• Au total, sur un peu plus d'une soixantaine d'aéroports français de plus de 10 000 passagers commerciaux, la DGAC estime que plus de quarante perçoivent des aides d'État pour leurs investissements ou pour équilibrer leur compte d'exploitation et/ou versent des aides aux compagnies aériennes. Très peu d'entre eux ont formellement notifié leurs aides et donc la plupart sont dans l'illégalité au regard du droit communautaire : 23 d'entre eux sont toujours sous le coup d'une plainte déposée par Air France en raison des avantages accordés à la compagnie Ryanair sur 27 aéroports français 11 ( * ) .

Les principales difficultés semblent se concentrer sur un groupe d' une vingtaine à une trentaine d'aéroports dont le trafic est compris entre 50 000 et 500 000 passagers. Ils sont directement menacés de fermeture , à la fois en raison de leur faiblesse économique structurelle, de leur dépendance très forte à une compagnie et/ou de la proximité avec d'autres moyens de transport (aéroports proches, régions desservies par le TGV). Pour cette raison, les nouvelles lignes directrices ont suscité beaucoup de réactions de la part des collectivités territoriales propriétaires d'aérodromes décentralisés. Pour celles-ci, l'enjeu principal est en effet l'avenir des petits et moyens aéroports européens : ceux-ci sont généralement subventionnés et octroient souvent des aides pour attirer les compagnies aériennes et développer leur trafic.

Entre la fin 2014 et juin 2016, une quinzaine de dossiers ont fait l'objet d'échanges techniques , souvent prolongés sur de nombreux mois. Mais, en raison de trop nombreuses non-conformités persistantes dans les projets, seulement sept d'entre eux ont fait l'objet d'une transmission à la Commission ( La Réunion, Tarbes, deux dossiers pour Clermont-Ferrand, Biarritz, Agen, Aéroports corses) et un seul (La Réunion) a pu être notifié formellement et a fait l'objet d'une décision positive . Plusieurs des dossiers en cours pourraient d'ailleurs être retirés car malgré les échanges de questionnaires avec la Commission, il semble difficile pour certains de converger suffisamment avec le cadre fixé par les nouvelles lignes directrices.


* 10 Résolution n°27 du 3 novembre 2013 sur la révision des lignes directrices concernant les aides d'État aux aéroports régionaux.

* 11 Quatre décisions déjà ont été prononcées, en février 2014 pour Marseille et en juillet 2014 pour Angoulême, Nîmes et Pau : les compagnies Ryanair et Transavia doivent rembourser près de 10 millions d'euros d'aides illégales au total et la Commission a annoncé avoir traduit la France devant la Cour de Justice de l'Union européenne le 27 juillet 2015, pour ne pas les avoir récupérées. Ces trois dernières décisions ont été contestées par Ryanair et Transavia, qui ont engagé des procédures devant le Tribunal de l'Union européenne. Trois autres dossiers sont actuellement en cours d'examen par la Commission (Beauvais, Carcassonne et La Rochelle) et il restera encore, sous réserve du dépôt de nouvelles plaintes, vingt dossiers susceptibles de faire l'objet d'investigations approfondies de la Commission.

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