C. LA NOUVELLE DOCTRINE D'EMPLOI DES FORCES D'INTERVENTION

Les modes opératoires retenus par les auteurs des derniers actes terroristes, individus déterminés recherchant la confrontation avec les forces d'intervention, ont conduit à une réorganisation tant des structures des forces d'intervention que de leurs schémas opérationnels.

1. La réorganisation de la force d'intervention de la police nationale

Créée le 31 juillet 2009, la force d'intervention de la police nationale (FIPN) est une structure opérationnelle visant à coordonner les actions des unités d'interventions de la police nationale (RAID 38 ( * ) , GIPN 39 ( * ) et BRI/BAC 40 ( * ) ), placée sous le commandement du chef du RAID.

En avril 2015, dans un souci d'efficacité, de cohérence et d'adaptation à la menace, la réforme des unités d'intervention de la police nationale s'est achevée avec l'intégration complète des sept GIPN métropolitains 41 ( * ) au sein du RAID, leur conférant ainsi le statut d'antennes territoriales du RAID. La FIPN regroupe désormais toutes les unités d'intervention de la police nationale (le RAID et ses implantations territoriales qui seront portées à dix en 2017 42 ( * ) , la BRI/BAC et les 3 GIPN ultra-marins 43 ( * ) ), portant ses effectifs, tous projetables, à 430 opérateurs (379 en métropole). Elle dispose en outre d'un échelon central, le RAID, qui assure la coordination de l'ensemble depuis Bièvres (Essonne).

L'état-major opérationnel de la FIPN peut répondre à toute sollicitation d'intervention des directions centrales de la police nationale ou de services dépendant d'autres ministères. Grâce à ses moyens de communication autonomes, il peut coordonner à distance plusieurs opérations simultanées.

Ce dispositif présente de nombreux atouts, en particulier :

- le pré-positionnement de moyens humains et matériels sur l'ensemble du territoire (les policiers de la FIPN sont tous recrutés, formés et entraînés ensemble au RAID et disposent d'équipements spécifiques comme des véhicules blindés, des moyens de protection balistique ou des moyens d'effraction...), répartis de façon équilibrée dans les régions ;

- la réactivité face à tout type de crise, 24 heures sur 24 et 365 jours par an. Par leur implantation géographique, les unités métropolitaines de la FIPN sont à moins de 2 heures de route du point le plus éloigné de leur base et depuis 2015, un échelon rapide d'intervention est opérationnel en moins de 10 minutes. Par conventions, les vecteurs aériens des ministères de l'intérieur et de la défense sont mis à disposition de chaque unité de la FIPN ;

- la montée en puissance du dispositif : selon la nature et l'ampleur des crises, la FIPN adapte sa riposte en déployant les moyens nécessaires (opérateurs, négociateurs, parachutistes, plongeurs, chiens...). Par ailleurs, le déclenchement de la FIPN permet de coordonner l'action de toutes les unités qui la composent, sous l'autorité du chef du RAID 44 ( * ) .

2. La mise en oeuvre d'un schéma national d'intervention (SNI)

Animé par le souci de renforcer l'efficacité de la riposte à la survenance de crises terroristes, le ministère de l'intérieur a par ailleurs mis au point un schéma national d'intervention (SNI), présenté par le ministre le 19 avril 2016, dont l'objectif principal est de permettre aux forces d'intervention de pouvoir faire cesser, en tout point du territoire métropolitain et ultramarin, le plus rapidement possible une attaque terroriste, y compris en cas d'actions terroristes simultanées.

Le SNI définit et organise les unités d'intervention selon différents niveaux de difficultés qui vont de l'intervention élémentaire, dévolue à tous les policiers et gendarmes, à l'intervention spécialisée qui relève des forces d'intervention 45 ( * ) . Entre ces deux niveaux, ce sont plus de 750 unités d'intervention dite « intermédiaire », principalement constituées des brigades anti-criminalité (BAC) de la police nationale et des PSIG Sabre de la gendarmerie nationale, qui quadrillent le territoire. Ces unités de proximité ont pour mission d'assurer la première intervention dans les meilleurs délais. Elles reçoivent, à cet effet, une formation spéciale et font l'objet d'un plan de déploiement de matériels et d'armements destinés à faire face à un commando lourdement armé dès les premières minutes. L'objectif qui leur est imparti est de « fixer » immédiatement les terroristes afin qu'ils se retranchent tout en préservant la vie des otages et des membres des forces de l'ordre.

Les forces d'intervention spécialisée de la gendarmerie et de la police nationales agissent pour leur part immédiatement après la primo-intervention pour déjouer les différents pièges et contourner les difficultés mises en place par les terroristes avant de donner l'assaut final.

Le SNI s'appuie dans ce cadre sur un renforcement du maillage territorial des forces d'intervention. Outre les trois nouvelles unités du RAID, la BRI de la préfecture de police de Paris verra ses effectifs doubler et la gendarmerie nationale fait évoluer les « pelotons d'intervention interrégionaux de gendarmerie » sous la dénomination « antennes GIGN ». Trois nouvelles antennes GIGN ont par ailleurs été créées à Nantes, Reims et Tours ainsi qu'une unité supplémentaire des groupes des pelotons d'intervention, leur équivalent en outre-mer, à Mayotte.

Au total, l'ensemble des agglomérations et des territoires les plus sensibles sera couvert à bref délai par les unités d'intervention intermédiaire de la gendarmerie et de la police, réparties et dimensionnées afin d'être en mesure de réagir immédiatement pour fixer et gérer efficacement un début de crise de type « tuerie de masse ».

Le SNI s'appuie par ailleurs sur une meilleure collaboration entre les différentes unités d'intervention, notamment pour l'utilisation de leurs savoir-faire ou capacités techniques propres, et sur la création d'une procédure d'urgence absolue, systématiquement utilisée dans une situation de gravité extrême (tuerie de masse, prise d'otages massive avec péril imminent des otages, actions kamikazes, etc.). Cette procédure prévoit ainsi la suspension des zones de compétence territoriale des différentes unités, limitée au temps de la réaction et au lieu de crise, afin d'optimiser la réponse des forces de sécurité intérieure. Cette procédure se concentre sur la primo-intervention et l'intervention spécialisée et précise les cas particuliers de la préfecture de police. Le but de cette procédure est de permettre aux antennes du GIGN et du RAID d'intervenir sans délai, sans procédure complexe, en cas de nécessité là où elles sont présentes quelle que soit la zone de compétence.

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Compte tenu du fait que les créations d'emplois annoncées par le Gouvernement dans le cadre des différents plans de lutte antiterroriste et contre l'immigration clandestine trouvent une traduction concrète dans le budget soumis à son examen, la commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités », hors programme « Sécurité civile », du projet de loi de finances pour 2017 .


* 38 Recherche, Assistance, Intervention, Dissuasion.

* 39 Groupes d'Intervention de la Police Nationale.

* 40 Brigade de Recherche et d'Intervention et Brigade Anti-Commandos.

* 41 Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nice, Rennes et Strasbourg.

* 42 Ouverture de trois nouvelles antennes à Montpellier, Nancy et Toulouse.

* 43 Guadeloupe, La Réunion, Nouvelle-Calédonie.

* 44 En cas de crise grave ou multiple dans la capitale, le préfet de police peut demander le déclenchement de la FIPN, plaçant alors les deux forces d'intervention (RAID et BRI-PP) sous le commandement unique du chef du RAID, qui sera appuyé par un PC tactique commun coordonnant les actions mises en oeuvre afin d'optimiser la répartition des effectifs et moyens, en fonction de l'évolution de la crise. À ces occasions le RAID pourra, de surcroît, apporter des moyens spéciaux dont il est seul détenteur.

* 45 RAID, GIGN, BRI parisienne et GIPN ultra-marins.

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