Avis n° 68 (2017-2018) de M. Alain JOYANDET , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 novembre 2017

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N° 68

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 novembre 2017

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , de financement de la sécurité sociale pour 2018 ,

Par M. Alain JOYANDET,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

269 , 313 , 316 et T.A. 29

Sénat :

63 (2017-2018)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES FINANCES

Réunie le mardi 7 novembre 2017 sous la présidence de Vincent Eblé, président, la commission des finances du Sénat a procédé à l'examen du rapport pour avis d'Alain Joyandet sur le projet de loi n° 269 (2017-2018) de financement de la sécurité sociale pour 2018 , transmis par l'Assemblée nationale 1 ( * ) .

La commission a relevé les points suivants :

1° alors que le régime général de la sécurité sociale devrait dégager un excédent de 1,2 milliard d'euros en 2018, les comptes de l'ensemble des organismes de sécurité sociale entrant dans le champ des lois de financement, à savoir les régimes obligatoires de base et le fonds de solidarité vieillesse (FSV) seraient déficitaires à hauteur de 2,2 milliards d'euros . 2,7 milliards d'euros d'économies sont attendus en 2018 sur cet agrégat, première étape vers un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale annoncé à horizon 2020 ;

2° la perspective d'un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale d'ici 2020 semble très optimiste , au regard des estimations de solde présentées par le Gouvernement ces prochaines années, dans un contexte de relèvement de l'ONDAM à 2,3 % jusqu'en 2020 et de dynamisme à venir des prestations de retraite et des dépenses d'assurance maladie ;

3° le présent projet de loi traduit la volonté du Gouvernement de faire contribuer les retraités au financement des baisses de charges des actifs. Cette mise à contribution est injustifiée et disproportionnée , d'autant plus qu'elle intervient concomitamment au gel des pensions de retraites en 2018 , qui découlerait du décalage de la date de revalorisation des pensions de retraites proposée par le présent projet de loi de financement ;

4° la branche maladie serait la seule à enregistrer un solde déficitaire en 2018 (-800 millions d'euros). Alors que des réformes structurelles sont attendues de cette branche, le plan d'économies proposé sur l'ONDAM s'inscrit dans la continuité du plan ONDAM 2015-2017 du précédent Gouvernement, aux succès pourtant limités ;

la réduction de la dette sociale enregistrée en 2016 et en 2017 résulte principalement de faibles taux d'intérêt . Elle s'accompagne d'une augmentation de la part portée par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), fortement exposée aux risques d'évolution des taux d'intérêt. Dès lors qu'aucune solution d'apurement n'est prévue, la stratégie de désendettement de l'ACOSS repose sur la perspective incertaine d'excédents croissants de la sécurité sociale d'ici 2021 .

La commission a adopté 2 amendements :

- un amendement proposant la suppression de la hausse du taux de la CSG sur les revenus de remplacement prévue par l'article 7 ;

- un amendement visant à supprimer l'article 26 relatif à l'harmonisation du barème et des plafonds de la PAJE et du complément familial ;

Sous réserve de l'adoption des modifications qu'elle propose, la commission des finances a émis un avis favorable aux articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 dont elle s'est saisie.

PREMIÈRE PARTIE - LE PROJET DE LOI DE FINANCEMENT POUR 2018 DANS LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE PLURIANNUELLE

I. LES PERSPECTIVES PLURIANNUELLES DES FINANCES SOCIALES

Dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, le Gouvernement a prévu de ramener le déficit structurel à 0,8 % du PIB potentiel et le déficit effectif à 0,2 % du PIB en 2022 , contre respectivement 2,5 % du PIB potentiel et 3,4 % du PIB en 2016.

Objectif d'évolution du déficit nominal et du déficit structurel entre 2017 et 2022

(en % du PIB, en % du PIB potentiel)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Déficit nominal

- 2,9

- 2,6

- 3,0

- 1,5

- 0,9

- 0,2

Déficit structurel

- 2,2

- 2,1

- 1,8

- 1,6

- 1,2

- 0,8

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

L'effort de redressement des comptes publics reposerait exclusivement sur la maîtrise de la dépense publique , compte tenu de la baisse des prélèvements obligatoires prévue au cours de la période.

Évolution prévisionnelle de la part des prélèvements obligatoires et de la dépense publique dans la richesse nationale

(en % du PIB)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2017-2022

Prélèvements obligatoires

44,7

44,3

43,3

43,6

43,6

43,6

- 1,1

Dépense publique (*)

54,6

53,9

53,3

52,5

51,8

50,9

- 3,7

Note : (*) hors crédits d'impôts

Source : commission des finances du Sénat (d'après le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022)

Dans ce cadre, la trajectoire des administrations de sécurité sociale revêt une importance décisive , dans la mesure où elles constituent le principal acteur de la dépense publique , devant les administrations centrales et la sphère locale.

Part des différents sous-secteurs des administrations dans la
dépense publique en 2016 (hors crédits d'impôts et transferts)

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de : Insee, comptes nationaux, 2016)

Afin de respecter les orientations pluriannuelles des finances publiques, le taux de croissance moyen de la dépense publique serait significativement infléchi : il s'établirait à 0,5 % en volume entre 2018 et 2020, puis à 0,1 % au cours des deux dernières années du quinquennat.

Objectif d'évolution de la dépense publique des sous-secteurs
des administrations publiques

(taux de croissance en volume)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépense publique hors crédits d'impôts

0,8

0,5

0,6

0,4

0,2

0,1

dont APUC

1,0

0,1

0,8

1,2

0,7

0,2

dont APUL

0,7

0,3

0,7

- 0,3

- 1,6

- 0,6

dont ASSO

0,6

0,9

0,4

0,1

0,6

0,4

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

La déclinaison de l'objectif d'évolution de la dépense publique entre les différents sous-secteurs est toutefois insuffisante pour apprécier l'ampleur des efforts d'économies demandés et leur répartition. Pour ce faire, il est nécessaire de comparer l'objectif d'évolution de la dépense publique à la croissance tendancielle de cette dernière « à politique inchangée » .

Or, le Gouvernement a jusqu'à présent refusé d'indiquer son estimation de la croissance tendancielle de la dépense publique pour l'ensemble des administrations publiques, ainsi que sa déclinaison entre les différents sous-secteurs.

Ce choix apparaît d'autant plus critiquable qu'il entre en contradiction avec l'article 31 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 , qui impose au Gouvernement de présenter au Parlement, en préalable à l'examen du projet de loi de finances, ses estimations de la croissance tendancielle de la dépense publique des différents sous-secteurs.

En retenant les hypothèses d'évolution tendancielle de la dépense publique publiées en juin dernier par la Cour des comptes 2 ( * ) , il peut néanmoins être estimé que le respect de la trajectoire de dépense du Gouvernement implique la mise en oeuvre d'un plan d'économies d'environ 80 milliards d'euros au cours du quinquennat, dont 36 milliards d'euros pour les administrations de sécurité sociale .

Répartition des économies à réaliser au cours du quinquennat reconstituée
à partir du tendanciel d'évolution de la dépense publique de la Cour des comptes

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir du rapport de la Cour des comptes précité)

La part des économies portée par les ASSO (45 %) serait donc en ligne avec leur poids dans la dépense publique (46,5 %).

Du côté des recettes , l'amélioration de la conjoncture exercerait un effet dynamique sur les cotisations sociales et les prélèvements sociaux, qui sont principalement assis sur la masse salariale du secteur privé.

Évolution prévisionnelle du PIB et de la masse salariale entre 2017 et 2022

(en %)

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

PIB

1,2

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

1,8

Masse salariale du secteur privé

2,4

3,3

3,1

3,2

3,6

3,8

3,8

Source : rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour 2018

Sous le double effet de la maîtrise de la dépense sociale et du dynamisme des recettes, le solde des administrations de sécurité sociale retrouverait l'équilibre dès 2017, avant de devenir fortement excédentaire à compter de 2018 .

Trajectoire de solde effectif des administrations de sécurité sociale

(en % du PIB)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

0,2

0,5

0,8

0,8

0,8

0,8

Source : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

Il est toutefois difficile d'apprécier la crédibilité de cette trajectoire .

En effet, le Gouvernement n'a pas souhaité transmettre au Parlement une déclinaison de l'évolution du solde au niveau des principaux régimes et organismes relevant du champ social , en comptabilité nationale 3 ( * ) .

En outre, la trajectoire inclut une « contribution du secteur des ASSO à la réduction du déficit de l'État, sous forme de transfert, dès 2019 », pour un montant que le Gouvernement n'a pas souhaité communiquer aux parlementaires. L'excédent des ASSO est ainsi plafonné à 0,8 % du PIB sur la période 2019-2022.

En procédant à de tels transferts, le Gouvernement entend s'assurer que les excédents de la sphère sociale ne seront pas recyclés sous forme de hausses des dépenses mais contribueront au désendettement de l'ensemble des administrations publiques.

Si cet objectif est louable, il serait préférable de mobiliser ces excédents pour anticiper le désendettement de la sphère sociale, dans la mesure où la dette sociale est significativement plus exposée que la dette de l'État à une remontée des taux d'intérêt 4 ( * ) .

II. UNE AMÉLIORATION PRÉCAIRE DES COMPTES SOCIAUX QUI NE PERMET PAS COMME ANNONCÉ LE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DU RÉGIME GÉNÉRAL EN 2017

A. UN REDRESSEMENT DES COMPTES PLUS IMPORTANT QUE PRÉVU EN 2016

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 prévoyait une amélioration substantielle des comptes des régimes obligatoires de base et du FSV pour 2016, de près de 2,4 milliards d'euros par rapport à la loi de financement pour 2016.

Le déficit des comptes s'avère en exécution en effet assez éloigné des prévisions initiales et proche des prévisions actualisées de l'automne 2016, pour s'établir à 7 milliards d'euros, conformément au tableau d'équilibre présenté à l'article 1 er du présent projet de loi de financement, soit une amélioration de 3,2 milliards d'euros par rapport au résultat de 2015 .

Le déficit du régime général est néanmoins plus lourd que prévu , avec un écart de 700 millions d'euros par rapport aux prévisions actualisées de la loi de financement pour 2017.

Comparaison des prévisions et de l'exécution 2016 des régimes de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B aux lois de financement de la sécurité sociale pour 2016, 2017 et au projet de financement pour 2018)

Cette variation entre la prévision initiale de l'automne 2015 et le résultat constaté pour l'année 2016 découle principalement d'un effet de base positif , liée au surcroît de recettes en 2015 et enregistré dans la prévision d'exécution réalisée à l'automne 2016 .

Ainsi, cet effet de base facilite l'effort de consolidation des comptes , prévu par la loi de financement pour 2016, qui devait se concentrer sur la dépense et non plus sur des mesures supplémentaires en recettes, comme lors des exercices précédents .

L'année 2016 marque néanmoins la première réduction du déficit par rapport au niveau de l'avant-crise financière de 2008 5 ( * ) . Si cette réduction concerne toutes les branches du régime général, elle se révèle largement « en trompe-l'oeil » s'agissant de la branche maladie.

En premier lieu, le solde de la branche vieillesse s'est amélioré de 1,2 milliard d'euros en 2016, redevenant temporairement (cf. infra ) excédentaire, après plus d'une décennie de déficits . Cette amélioration s'explique principalement par la montée en charge du relèvement de l'âge légal de départ en retraite et de l'âge de départ à taux plein (de 65 à 67 ans), prévu par la réforme des retraites de 2010 6 ( * ) , et par l'apport de recettes nouvelles à court terme permis par la réforme de janvier 2014 7 ( * ) .

Le déficit de la branche famille s'est résorbé de 500 millions d'euros , grâce à des dépenses stables découlant d'une inflation faible et de la montée en charge de la modulation des allocations familiales en fonction des revenus entrée en vigueur en 1 er juillet 2015.

Tandis que l'excédent de la branche AT-MP reste stable, le solde de la branche maladie s'est amélioré d'1 milliard d'euros par rapport à 2015 . Cette amélioration revêt toutefois un caractère purement comptable. La comptabilisation d'une ressource exceptionnelle de 700 millions d'euros de CSG, liée à la mise en oeuvre de la protection universelle maladie (PUMa), source de réserve à la certification des comptes de la CNAMTS par la Cour des comptes en juin dernier 8 ( * ) , a en effet permis de réduire artificiellement le déficit de l'Assurance maladie en 2016 9 ( * ) .

Ainsi corrigé, et en dépit de la sous-exécution d'un ONDAM pourtant historiquement faible (+ 1,75 %), le solde de la branche ne s'améliorerait que de 300 millions d'euros entre 2015 et 2016 , pour atteindre 5,5 milliards d'euros.

Aussi l'amélioration du solde de la branche maladie résulte-t-elle principalement de mesures de gestion plutôt que de la mise en oeuvre de réformes structurelles , comme en témoigne l'annulation en fin d'année de crédits mis en réserve sur le sous-objectif établissements de santé de l'ONDAM (près de 500 millions d'euros), redeployés afin de couvrir les dépassements non contenus du sous-objectif soins de ville.

En excluant la ressource exceptionnelle de CSG perçue en 2016, le déficit du régime général et du FSV s'élèverait à 8,5 milliards d'euros, se réduisant de 2,3 milliards d'euros par rapport à 2015, soit une consolidation du même ordre de grandeur que celle réalisée entre 2014 et 2015 .

Solde du régime général et du FSV entre 2014 et 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

De surcroît, la progression contenue des dépenses résulte principalement de la stratégie adoptée par le Gouvernement en 2016, consistant à compenser les pertes de recettes pour la sécurité sociale découlant des mesures du pacte de responsabilité et de solidarité, telle la baisse des cotisations famille, par une prise en charge par l'État de prestations - les allocations de logement à caractère familial (ALF) et la protection juridique des majeurs, pour un montant total de 4,8 milliards d'euros. Pour autant, la prise en charge par l'État de prestations sociales ne saurait constituer une mesure sérieuse de régulation de la dépense.

La consolidation relative des comptes de la sécurité sociale découle en réalité d'une progression contenue des dépenses en raison du contexte favorable de très faible inflation et de recettes dynamiques, portées par l'évolution de la masse salariale plus élevée en 2016 qu'en 2015 - 2,4 % contre 1,7 %, mais moindre que la prévision actualisée en loi de financement pour 2017, de 2,6 %- , et non d'un effort réel de maîtrise des dépenses, sans cesse repoussé , conduisant à retarder le retour à l'équilibre du régime général pourtant annoncé pour 2017.

B. UNE AMÉLIORATION DES COMPTES SOCIAUX PLUS FAIBLE QU'ATTENDUE EN 2017, QUI NE PERMET PAS LE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DU RÉGIME GÉNÉRAL

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 prévoyait un renforcement du rythme de réduction du déficit du régime général et du FSV à hauteur de 3,6 milliards d'euros par rapport à 2016 , à même d'assurer un retour à l'équilibre du régime général en 2017 (-400 millions d'euros).

L' article 5 du présent projet de loi de financement réévalue les prévisions de solde à la baisse. Le solde du régime général et du FSV ne s'améliorerait plus que de 2,6 milliards d'euros et celui du régime général de 2,5 milliards d'euros, soit une consolidation du même ordre de grandeur que les années précédentes (cf. graphique supra ) et ne permettant pas un retour à l'équilibre du régime général en 2017.

Comparaison des prévisions et de l'exécution 2017
des régimes de sécurité sociale

(en milliards d'euros)

Exécution

2016

2017

Écart 2017 (PLFSS 2018) avec

Prévision LFSS 2017

Prévision PLFSS 2018

Exécution 2016

Prévision

LFSS 2017

Maladie

- 4,8

- 2,6

- 4,1

0,7

- 1,5

AT-MP

0,8

0,7

1,0

0,2

0,3

Famille

- 1,0

0

0,3

1,3

0,3

Vieillesse

0,9

1,6

1,3

0,4

- 0,3

Régime général

- 4,1

- 0,4

- 1,6

2,5

- 1,2

FSV

- 3,6

- 3,8

- 3,6

0

0,2

Total régime général et FSV

- 7,8

- 4,2

- 5,2

2,6

- 1,0

Total ensemble des régimes obligatoires de base et FSV

- 7,0

- 4,1

- 4,9

2,1

- 0,8

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 et au projet de loi de financement pour 2018)

Cet écart à la trajectoire d'évolution prévue en loi de financement initiale pour 2017 s'explique par un effet de base négatif en exécution 2016, auquel se conjuguent deux mesures proposées par le présent projet de loi de financement :

- d'une part, la suppression de la contribution supplémentaire à la C3S , créée par le précédent Gouvernement (article 4), dont votre rapporteur pour avis se satisfait (cf. infra ) ;

- d'autre part, la non-compensation pour la sécurité sociale des pertes de recettes résultant de la mise en oeuvre en 2017 du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires (CITS).

Pour mémoire, l'amélioration des comptes sociaux en 2017 devait découler en partie de recettes non pérennes, pour près de 1,4 milliard d'euros, s'ajoutant à une progression spontanée des recettes résultant d'une conjoncture favorable - la prévision de croissance de la masse salariale associée au projet de loi de financement pour 2017 s'élevait à 2,7 %, contre 2,4 % en 2016.

Parmi ces mesures non pérennes figurent :

- la modification de la période d'imposition de la taxe sur les véhicules de sociétés , offrant une recette de plus de 160 millions d'euros ;

- le prélèvement des ressources mises en réserve au sein de la section III du FSV , au profit du régime général, de plus de 719 millions d'euros 10 ( * ) ;

- la création d'une contribution supplémentaire à la C3S par la loi de finances rectificative pour 2016 11 ( * ) , de 400 millions d'euros en 2017.

Deux mesures rectificatives sont par ailleurs proposées par le présent projet de loi de financement, qui n'ont d'autre objectif que de minimiser les pertes résultant des mesures précitées pour les régimes de base de la sécurité sociale.

Mesures rectificatives sur 2017 présentées en projet de loi de financement pour 2018

(en milliards d'euros)

Suppression de la contribution sociale supplémentaire de solidarité sur les sociétés (C4S)

- 0,5

Abandon de la compensation à la sécurité sociale des pertes de recettes résultant de la mise en oeuvre en 2017 du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires (CITS)

- 0,6

Pertes de recettes pour la branche maladie

- 1,1

Prélèvement sur le Fonds CMU (au profit de la branche maladie)

+ 0,15

Révision de la dotation au FIVA (au profit de la branche ATMP)

+ 0,15

Solde des mesures rectificatives sur 2017

- 0,8

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'annexe 4 « Recettes, dépenses et solde des régimes par catégorie et par branche » au présent projet de loi de financement

La perte de recettes pour la branche maladie résultant de ces deux mesures est compensée par un prélèvement sur le fonds CMU, excédentaire en 2016 en raison de l'affectation de recette de taxe de solidarité additionnelle (TSA) finalement supérieure aux besoins de financement du fonds pour l'année, proposé à l' article 3 du présent projet de loi de financement .

Alors même que la dynamique de la masse salariale est revue à la hausse - + 3,3  % en 2017 -, ces mesures rectificatives contribuent à la dégradation du solde des comptes sociaux en 2017 , comme l'illustre le tableau ci-dessous . Néanmoins, il illustre le caractère précaire et biaisé que revêtait la stratégie de consolidation des comptes sociaux proposée initialement pour 2017 .

Écart entre les prévisions actualisées du présent projet de loi et les prévisions initiales de la loi de financement pour 2017 pour l'ensemble des régimes

(en milliards d'euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

-1,3

0,2

-1,5

AT-MP

0,1

-0,3

0,4

Famille

0,4

0,5

-0,1

Vieillesse

0

-0,3

0,3

Régimes obligatoires

-0,8

0,1

-0,9

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 et au projet de loi de financement pour 2018)

De surcroît, l'effort de consolidation se révèle très inégal entre les différentes branches au regard de leur part dans la dépense, alors même que trois branches affichent un solde excédentaire .

La branche famille contribue de façon importante à la réduction du solde du régime général, portant la moitié des économies réalisées alors qu'elle ne représente que 15 % des dépenses. Son solde reviendrait excédentaire en 2017 grâce à la baisse des dépenses de prestations familiales, leur revalorisation de 0,3 % au 1 er avril 2017 étant compensée par la  poursuite du ralentissement de la natalité.

La situation de la branche maladie devient de plus en plus inquiétante, le respect de l'ONDAM, depuis quelques années, peinant à masquer de réelles difficultés à assurer la maîtrise des dépenses de soins de ville. Aussi en 2017 le solde de la branche maladie ne s'améliore-t-il que de 700 millions d'euros par rapport à 2016 , amélioration qualifiée de « largement artificielle » par le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale 12 ( * ) : le solde de la branche maladie est en effet minoré de près de 900 millions d'euros par un produit versé à l'assurance maladie dans le cadre de la mise en place du fonds de financement de l'innovation pharmaceutique, qui a bénéficié d'une dotation initiale de 876 millions d'euros provenant des réserves de la section III du FSV.

Enfin, l'amélioration de la branche vieillesse ne saurait occulter le déficit persistant du FSV , qui se maintiendrait au même niveau qu'en 2016.

De façon plus générale, le rapporteur général de la commission des finances redoutait, lors de l'examen en commission du projet de loi de finances pour 2017, les effets de la redistribution interbranches qui devaient découler des choix de compensation de pertes de recettes pour la sécurité sociale faits en loi de finances pour 2017 13 ( * ) .

Alors qu'il s'agissait principalement de compenser des pertes de recettes portant sur la branche famille , que ce soit pour l'extension des allègements de cotisations entre 1,6 et 3,5 SMIC ou pour l'extinction de la recette temporaire tirée en 2015 et 2016 de la mesure de prélèvement à la source des cotisations des caisses de congés payés, prise pour compenser les précédents allègements de cotisations familiales, les mesures prévues concernaient des compensations d'exonérations de cotisations sociales portant sur toutes les branches de la sécurité sociale . Aussi cette stratégie de compensation a-t-elle donné lieu aux effets anticipés sur les soldes prévisionnels des différentes branches .

Les réaffectations de recettes internes réalisées ont ainsi provoqué un transfert de recettes de 1,4 milliard d'euros de la branche vieillesse à la branche maladie, soit un montant équivalent au double de la consolidation réalisée entre 2016 et 2017 par la branche maladie.

Ainsi, en 2017, la branche maladie et le FSV restent marqués par un très fort déséquilibre, accentué par les réaffectations de recettes réalisées en 2017, non compensé par des réformes structurelles d'envergure.

Au total, le solde des régimes obligatoires de base et du FSV se dégrade de 800 millions d'euros par rapport aux prévisions faites en loi de financement pour 2017, révélant l'échec de la stratégie de pilotage par les recettes du précédent Gouvernement et l'absence de réformes visant à assurer la maîtrise des dépenses, en particulier concernant la branche maladie.

III. UN EFFORT DE CONSOLIDATION IMPORTANT EN 2018, CONDITIONNANT LE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE À L'HORIZON 2020

A. UN DÉFICIT DU RÉGIME GÉNÉRAL ET DU FSV DE 2,2 MILLIARDS D'EUROS ET UN RÉGIME GÉNÉRAL EXCÉDENTAIRE EN 2018

Les articles 20 et 21 du présent projet de loi de financement fixent un objectif de réduction du déficit de l'ensemble des régimes obligatoires de base et du FSV de 2,7 milliards d'euros en 2018 . Le solde cumulé du régime général et du FSV atteindrait ainsi - 2,2 milliards d'euros , égal à celui de l'ensemble des régimes obligatoires et du FSV. Le régime général seul dégagerait quant à lui un excédent de 1,2 milliard d'euros .

Évolution du solde du régime général
et des régimes obligatoires de base par branche

(en milliards d'euros)

Source : annexes B au projet de loi de financement pour 2018

Votre rapporteur pour avis note le fort volontarisme qui caractérise le présent projet de loi de financement, le solde du régime général et du FSV devant s'améliorer de 3 milliards en 2018 par rapport aux prévisions de solde actualisées pour 2017, soit un montant supérieur de plus de 500 millions d'euros aux consolidations réalisées entre 2014 et 2015 et entre 2015 et 2016 .

Cet effort sans précédent constituerait la première étape vers un retour à l'équilibre de l'ensemble des comptes de la sécurité sociale à horizon 2020 , conformément à l'engagement du Premier ministre dans son discours de politique générale du 4 juillet 2017, devant permettre d'assurer l'apurement de la dette de la sécurité sociale d'ici 2024 (cf. infra ).

Une analyse détaillée permet de relever le caractère hétérogène des évolutions attendues selon les branches : l'effort de consolidation en 2018 pèserait exclusivement sur les branches famille et maladie .

Alors qu'en loi de financement pour 2017, 59 % de l'effort de consolidation sur le régime général par rapport à 2016 reposait sur la branche maladie, l'effort attendu sur cette même branche en 2018 représente 118 % du montant total de la réduction du solde attendu sur cet agrégat (soit une consolidation de 3,3 milliards d'euros pour la branche maladie et une réduction du déficit de 2,8 milliards d'euros du régime général).

L'effort à consentir pour la branche est considérable , alors même que le relèvement de l'ONDAM à 2,3 % (2,1 % en 2017) nécessite un montant d'économies sans précédent . Dans son avis du 24 septembre 2017, le Haut Conseil des finances publiques notait ainsi qu'en 2018, « l'évolution tendancielle des dépenses dans le champ de l'ONDAM devrait augmenter, selon le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, de 4,2 % en 2017 à 4,5 % en 2018 : effet des conventions récentes avec les professionnels de santé, poursuite de la mise en oeuvre du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) dans les établissements publics de santé et arrivée de plusieurs médicaments innovants. Cette évolution suppose un quantum d'économies plus important que les années précédentes (4,2 milliards d'euros, contre 4,05 milliards d'euros en 2017 et 3,4 milliards d'euros en 2016) » 14 ( * ) .

Le solde de la branche vieillesse resterait quant à lui temporairement excédentaire en 2018, mais se dégradait de plus d'1 milliard d'euros . Un déficit de 800 millions d'euros réapparaîtrait dès 2019 , en raison de l 'impact du transfert du financement du minimum contributif du FSV à la branche vieillesse. Le solde agrégé de la branche vieillesse et du FSV ne parviendrait ainsi pas à l'équilibre à court-terme.

En outre, les prévisions de solde des régimes de base de la sécurité sociale et de FSV présentées reposent sur l'hypothèse d'une progression globale des recettes de 2 % , contre 2,1 % dans le rapport remis à la Commission des comptes de la sécurité sociale en septembre 2017.

Pour 2018, l'annexe C au présent projet de loi de financement, qui détaille les recettes par catégorie et par branche, prévoit une progression moins forte des cotisations sociales en 2018, de + 1 % contre + 2,8 % dans le rapport précité, en raison de la suppression des cotisations salariales d'assurance maladie et d'assurance chômage prévue en 2018.

Le rendement attendu de la CSG augmenterait de 28 % par rapport à 2017, en raison de l'augmentation de 1,7 point de CSG prévue par le présent projet de loi de financement . Cette évolution entraînerait également une diminution importante des recettes fiscales en 2018 , la branche maladie « perdant » la quasi-totalité de la fraction de TVA dont elle bénéficiait, dans le cadre de la compensation à l'Unédic de ses pertes de recettes résultant de la suppression des cotisations sociales d'assurance chômage.

Recettes par catégorie des régimes obligatoires de base et du FSV

(en milliards d'euros)

2015

2016

%

2017

2018

%

Cotisations effectives

255,5

258,2

1,1

265,5

2,9

267,1

1

Transferts d'équilibre de l'employeur

39,0

39,5

1,2

39,5

0

40,4

2

Cotisations prises en charge par l'État

3,5

3,7

5,1

6,4

++

6,0

-6

CSG

86,9

89,2

2,6

89,9

0,8

115,5

28

Autres contributions sociales

13,7

13,0

-5,0

13,2

1,5

53,0

Impôts et taxes

50,7

50,6

-0,3

53,0

4,8

Transferts

10,6

10,6

-0,4

10,6

0,1

10,7

1

Autres produits

5,1

5,9

15,7

5,9

1,4

5,9

=

Produits financiers

0,1

TOTAL

464,9

470,5

1,2

484,1

2,9

496,1

2

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2017 et de l'annexe C au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

Au total, les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base et du FSV s'élèveraient en 2018 à 496,1 milliards d'euros, pour 498,3 milliards de dépenses, d'où un déficit de 2,2 milliards d'euros.

B. UN SOLDE AMÉLIORÉ DE 6,4 MILLIARDS D'EUROS PAR RAPPORT À UNE ESTIMATION DE SOLDE TENDANCIEL CRITIQUABLE

Sans tenir compte des mesures nouvelles, les estimations de soldes tendanciels indiquent que le déficit de l'ensemble des régimes obligatoires de base et du FSV atteindrait 8,6 milliards d'euros en 2018 , soit 3,7 milliards d'euros de plus que le solde prévisionnel pour 2017.

Néanmoins, les soldes tendanciels, présentés dans le graphique ci-dessous, intègrent d'ores et déjà une compensation en 2018, d'un montant de 1,3 milliard d'euros, « en relais de l'extinction de mesures non pérennes ayant permis la compensation du pacte de responsabilité et de solidarité en loi de finances et en loi de financement pour 2017 » 15 ( * ) . Figurent ainsi parmi ces compensations de mesures de recettes non pérennes :

- la fin du prélèvement sur les réserves de la section III du FSV , d'un montant de 700 millions d'euros, affecté en 2017 à la branche maladie ;

- la suppression de la C4S , décidée par le présent projet de loi de financement, qui compensait le relèvement des seuils d'assujettissement à la CSG sur les revenus de remplacement ; celle-ci aurait procuré 400 millions d'euros de recettes supplémentaires pour la branche maladie en 2017 ;

- la fin de l'effet de la modification du fait générateur de la taxe sur les véhicules de société (TVS) , qui a apporté 200 millions de ressources supplémentaires pour la branche famille en 2017 ;

La comptabilisation au sein des soldes tendanciels de la compensation de la part de l'État de l'extinction de mesures non pérennes prises dans le cadre de la compensation des dispositions du pacte de responsabilité constitue une simple mesure « d'affichage », rehaussant artificiellement le niveau de solde tendanciel, et permettant ainsi de maximiser l'effort d'économies nécessaire pour atteindre le solde prévisionnel prévu pour 2018 .

Comparaison des soldes tendanciels et des soldes prévus par
le projet de loi de financement pour 2018

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

Les mesures contenues dans le présent projet de loi de financement devraient permettre d'améliorer le solde tendanciel de 6,4 milliards d'euros .

Tableau d'équilibre financier simplifié du PLFSS 2018

(en milliards d'euros)

Solde tendanciel (tous régimes + FSV)

-8,6

Gain provisoire lié à la mesure de pouvoir d'achat en faveur des actifs

(hausse de la CSG, suppression des cotisations salariales d'assurance maladie et de cotisations travailleurs indépendants)

+14,9

Transferts de dépenses de l'État à l'assurance maladie

-0,3

Compensation de la sécurité sociale à l'État

Rétrocession à l'État du prélèvement de solidarité sur les revenus du capital

Ajustement de la fraction de TVA

-13,7

-2,6

-11,2

Économies relatives à l'ONDAM

4,0

Mesures nouvelles en recettes

0,5

Mesures nouvelles en dépenses

1,1

Solde 2018 après mesures (tous régimes + FSV)

-2,2

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

Seul le quart des économies par rapport à l'évolution tendancielle retenue par le Gouvernement provient de mesures nouvelles en dépenses et en recettes. Ces économies en dépenses résultent d'ailleurs pour moitié (600 millions d'euros) de mesures de gestion , comme la maîtrise des dépenses de gestion courante ou le décalage de la date de revalorisation des pensions. Celles-ci ne semblent d'ailleurs pas à même d'infléchir l'évolution tendancielle des dépenses prévues ces prochaines années, en particulier s'agissant des dépenses des branches maladie et vieillesse .

Mesures nouvelles en dépenses ayant un impact financier sur le
solde du régime général et du FSV

(en milliards d'euros)

Alignement du plafond et du montant de la PAJE

0,1

Modération de la progression du FNAS

0,2

Mesure de maîtrise des dépenses de gestion courante

0,3

Revalorisation du minimum vieillesse

- 0,1

Décalage de la date de revalorisation des pensions

0,3

Lutte contre la fraude aux prestations

0,2

Abaissement de la dotation de la branche ATMP au FIVA

0,1

Total des économies en dépenses du PLFSS 2018

1,1

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe 9 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

IV. UNE TRAJECTOIRE DE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DES COMPTES SOCIAUX D'ICI 2020 « SUR LE FIL »

Le retour à l'équilibre de l'ensemble des comptes de la sécurité sociale à horizon 2020 repose en partie sur une accélération de la masse salariale, permettant une progression spontanée des recettes , d'autant plus dans un contexte d'augmentation massive des produits de CSG, en particulier de la CSG sur les revenus d'activité, résultant de la hausse des taux de CSG proposée par le présent projet de loi de financement.

Lors de l'examen du projet de loi de financement pour 2017 16 ( * ) , le rapporteur pour avis de la commission des finances, Francis Delattre, soulignait le caractère optimiste des hypothèses macroéconomiques fondant la trajectoire des comptes sociaux du précédent Gouvernement, soit une forte accélération du taux de croissance de la masse salariale privée , conditionnant des recettes attendues en hausse, et une inflation contenue à un niveau faible , limitant la progression des prestations versées. La révision des hypothèses macroéconomiques réalisée dans le dernier programme de stabilité confirme cette analyse.

Comparaison des hypothèses de croissance de la masse salariale

Comparaison des hypothèses d'inflation

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des annexes B aux projets de loi financement de la sécurité sociale pour 2017 et 2018 et du programme de stabilité d'avril 2017)

Les hypothèses de croissance de la masse salariale associées au présent projet de loi de financement sont ainsi proches de celles présentées dans le programme de stabilité en avril dernier, et qualifiées de « prudentes » par le Haut Conseil des finances publiques.

Toutefois, la trajectoire du Gouvernement repose sur un niveau d' inflation très faible, qui, s'il devait être sous-estimé, serait particulièrement problématique dans un contexte de dépenses d'assurance maladie et de retraite plus dynamiques ces prochaines années. Un niveau d'inflation plus élevé qu'anticipé renchérirait en effet les revalorisations annuelles de prestations.

Comme le souligne la Cour des comptes, « l'évolution tendancielle des dépenses d'assurance maladie et de retraite pourrait en effet compliquer l'atteinte de l'objectif » d'un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale à horizon 2020.

Ainsi, entre 2014 et 2017, les prestations vieillesse ont été contenues par les effets du relèvement progressif de 60 ans à 62 ans de l'âge légal de départ en retraite et surtout par le niveau très faible d'inflation. À partir de 2018, les prestations de retraite versées repartiraient à la hausse (+ 2,4 %) 17 ( * ) , dès lors que seul le relèvement de l'âge du taux plein automatique de 65 à 67 ans continuerait de produire des économies.

Si le présent projet de loi de financement intègre la dégradation des soldes agrégés de la branche vieillesse du régime général et du FSV d'ici 2020, prévue par le Conseil d'orientation des retraites (COR) dans son dernier rapport 18 ( * ) , une remontée de l'inflation conduirait à revoir à la baisse la prévision de solde et compromettrait le retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale en 2020.

Il en va de même pour la branche maladie, appelée à financer de nombreuses mesures antérieures et nouvelles d'ici 2020 , telle la montée en charge de la convention médicale du 25 août 2016 ou la convention qui résultera des négociations avec les chirurgiens-dentistes - l'article 44 du présent projet de loi repoussant l'application de mesures phares du règlement arbitral.

La Cour des comptes estime même que « si la progression annuelle de l'ONDAM était relevée à + 2,3 % à partir de 2018, il en résulterait, toutes choses égales par ailleurs, une détérioration supplémentaire du solde 2020 de 1,7 milliard d'euros, qui pourrait remettre en cause le retour effectif du régime général et du FSV à l'équilibre à cette date » 19 ( * ) .

La perspective d'un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale d'ici 2020 semble ainsi très optimiste, dans un contexte de relèvement de l'ONDAM à 2,3 % jusqu'en 2020 et de dynamisme à venir des prestations de retraite et des dépenses d'assurance maladie .

D'importantes économies apparaissent ainsi indispensables, afin de limiter le poids des déficits pesant sur l'ACOSS, en l'absence de reprise prévue par la CADES.

V. UNE EXTINCTION DE LA DETTE SOCIALE D'ICI 2024 ?

A. UN AMORTISSEMENT EFFICACE DE LA DETTE SOCIALE PAR LA CADES REND PROBABLE LA PERSPECTIVE DE SON APUREMENT D'ICI 2024

La dette sociale est composée de la dette portée par la CADES ainsi que de la somme des déficits cumulés du régime général et du FSV conservés par l'ACOSS. Depuis sa création jusqu'à la fin de l'année 2017, le montant total de la dette transférée à la CADES atteindrait 260,5 milliards d'euros .

Au 31 décembre 2017, 139,5 milliards d'euros de dette sociale auront été amortis par la CADES, soit 54 % du montant total de dette lui ayant été transféré 20 ( * ) . À cette date, le montant de dette lui restant à rembourser s'élève à 121 milliards d'euros.

L'amortissement annuel de dette par la CADES s'est élevé en 2016 à 14,4 milliards d'euros, soit un montant supérieur à celui fixé en loi de financement pour 2016 - 14,2 milliards d'euros. En 2017, l'amortissement annuel augmenterait de 500 millions d'euros, pour atteindre 14,9 milliards d'euros. L'article 22 du présent projet de loi de financement fixe un objectif d'amortissement de 15,2 milliards d'euros pour 2018.

Deux facteurs expliquent les hauts niveaux d'amortissement assurés par la CADES :

d'une part, les conditions de financement favorables , comme l'illustre le graphique ci-dessous, se traduisant par des taux de refinancement très faibles, le point « historique » le plus bas ayant été atteint en 2016 : 1,61 % au 31 décembre 2016. Une légère remontée a été amorcée en juin 2017 - 1,64 % - en raison d'une proportion plus importante de financements réalisés à taux fixe (58 %) par rapport aux financements à taux variables (32 %).

Montant de la dette annuelle amortie par la CADES et taux global de financement entre 2011 et 2017

(en milliards d'euros et en %)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données transmises par la CADES

- d'autre part, la hausse spontanée du rendement des recettes affectées à la CADES conjuguée à une diminution des charges , comme l'illustre le graphique ci-dessous. Cette évolution devrait permettre un amortissement annuel de près de 17,6 milliards en 2021 .

Évolution prévisionnelle des produits et des charges de la CADES
entre 2016 et 2021

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données transmises par la CADES

Le rapprochement des équipes de la CADES et de l'Agence France Trésor (AFT)

Une convention de gestion et une convention cadre de mise à disposition des personnels sont mises en oeuvre depuis le 1 er octobre 2017.

La première phase du rapprochement entre la CADES et l'AFT correspond au rapprochement administratif-RH et à l'intégration des opérations financières de la CADES à l'AFT. Au cours de cette phase, la CADES confie à l'AFT la gestion de ses émissions et de ses activités connexes. Les personnels aujourd'hui employés par la CADES et affectés à ces missions sont mis à la disposition de l'AFT.

Les équipes de la CADES continuent à réaliser leurs missions selon leurs procédures actuelles et dans leur cadre de travail actuel mais sont placées sous l' autorité hiérarchique de la direction générale de l'AFT . Cette dernière rend compte de sa gestion, pour ce qui concerne les activités de la CADES, au président, au conseil d'administration et aux tutelles de la CADES.

La deuxième phase correspondra au rapprochement géographique et à la relocalisation des équipes de la CADES sur un site de travail commun avec celles de l'AFT.

La troisième phase correspondra à l'intégration complète des équipes de la CADES et de l'AFT par rapprochement des métiers . Ceci pourra, dans certains cas, occasionner des nouvelles répartitions de missions, les agents pouvant se voir confier des missions relevant à la fois du périmètre de la CADES et de celui de l'AFT.

Source : annexe 8 au présent projet de loi de financement et réponse au questionnaire du rapporteur

En tout état de cause, la perspective d'une extinction de la CADES en 2024 est aujourd'hui « une hypothèse probable » selon le Haut Conseil du financement de la protection sociale 21 ( * ) .

Compte tenu du rapprochement de la date d'extinction de la dette portée par la CADES, ce dernier appelle de ses voeux une réflexion sur le devenir des recettes qui lui sont attribuées. La Cour des comptes 22 ( * ) suggère que « les recettes pérennes jusqu'ici affectées à la CADES et sans affectation à compter de 2024 avec l'achèvement de sa mission pourraient servir, en tant que de besoin, à opérer les abondements nécessaires pour doter un fonds de lissage conjoncturel », qui serait mis à contribution en période de déficits conjoncturels, afin d'éviter la constitution d'une nouvelle dette sociale.

Ces réflexions paraissent prématurées , à l'heure où les déficits cumulés portés par l'ACOSS s'inscrivent à des niveaux élevés, et où la solution d'apurement proposée, reposant sur des excédents croissants d'ici 2022, paraît hypothétique.

B. L'ACCUMULATION DES DÉFICITS PORTÉS PAR L'ACOSS, UNE SITUATION INQUIÉTANTE DANS UN CONTEXTE DE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DES COMPTES SOCIAUX INCERTAIN

Le niveau de dette sociale s'apprécie non seulement au regard de l'évolution de l'amortissement annuel réalisé par la CADES mais aussi de celle des déficits cumulés des régimes de base non repris par la CADES et portés par l'ACOSS. Or, à la fin de l'année 2017, la « dette » du régime général et du FSV s'élèverait à 19,9 milliards d'euros.

Cette situation contrevient à l'article L. 225-1 du code de la sécurité sociale consacrant pour l'ACOSS la mission d'assurer la trésorerie des branches du régime général, et non de couvrir des déficits cumulés. De plus, elle est particulièrement inquiétante dès lors que les dispositions votées en loi de financement pour 2016, entendant tirer profit du contexte financier favorable, ont conduit à saturer les capacités de reprises de dettes par la CADES fixées en 2011 , avec une reprise de 23,6 milliards d'euros.

1. Les déficits cumulés portés par l'ACOSS ne soulèvent pas de difficultés particulières de financement

Dans un contexte de taux d'intérêt négatifs 23 ( * ) , le financement des besoins de court terme des branches du régime général conduit l'ACOSS à constater des produits financiers sur ses emprunts , engendrent un résultat net de trésorerie positif , de l'ordre de 92 millions d'euros en 2016, et des charges sur ses placements.

Votre rapporteur pour avis partage le constat du directeur de l'ACOSS : « en termes strictement techniques, si cette dette avait été transférée à la CADES, l'impact aurait finalement été moins favorable pour les finances publiques, du fait du contexte très particulier que nous avons connu ces dernières années. La CADES emprunte à long terme, ce qui la rend moins à même de tirer profit de cette situation tout à fait exceptionnelle » 24 ( * ) .

2. Sans solution éventuelle d'apurement, le désendettement de l'ACOSS repose en réalité sur une trajectoire d'excédent dont la réalisation est plus qu'incertaine

La diminution du volume de déficits portés par l'ACOSS repose en réalité sur le pari d'un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale d'ici 2020 . Les perspectives pluriannuelles des régimes de sécurité sociale, présentées ci-avant, font en effet état d'un retour à l'équilibre à partir de 2018 puis d'une situation excédentaire croissante jusqu'en 2022.

Le directeur de l'ACOSS, entendu par la commission des affaires sociales du Sénat le 25 octobre 2017, affirme que « si ces hypothèses se réalisent, l'ACOSS devrait donc s'engager dans une trajectoire durable de désendettement . La dette du régime général et du FSV sera de 21,3 milliards d'euros en 2018 et ne serait plus que de 5,8 milliards d'euros en 2021 si les hypothèses figurant à l'annexe B du projet de loi de financement se vérifient ».

Or, votre rapporteur pour avis rappelle l'optimisme entourant le scenario de retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale d'ici 2020, dans un contexte de dynamisme à venir des prestations de retraite et des dépenses d'assurance maladie .

Cette stratégie de désendettement de l'ACOSS apparaît ainsi périlleuse . Comme le rappelle la Cour des comptes, « tout décalage du retour à l'équilibre a en tout état de cause pour effet de laisser s'accumuler des déficits à l'ACOSS » 25 ( * ) , qui porteraient un frein à la perspective d'un apurement de la totalité de la dette sociale d'ici 2024.

DEUXIÈME PARTIE - LES MESURES RELATIVES AUX RECETTES

I. MESURE EN FAVEUR DU POUVOIR D'ACHAT DES ACTIFS ET TRANSFERTS PRÉVUS

A. LA SUPPRESSION DES COTISATIONS SOCIALES EN CONTREPARTIE DE LA HAUSSE DE LA CSG (ARTICLE 7)

Le présent article traduit l'engagement du Président de la République de modifier structurellement le financement de la sécurité sociale , en élargissant son mode de financement, qui repose à l'heure actuelle majoritairement sur les revenus du travail, via les cotisations sociales. En contrepartie d'une hausse de 1,7 point du taux de CSG, la mesure proposée consiste ainsi à supprimer en deux temps, au cours de l'année 2018, les cotisations salariales d'assurance maladie et de chômage pour les salariés du secteur privé.

Cette mesure contribuerait à une réduction du coût du travail bienvenue pour les salariés du privé . Cependant, les effets de l'augmentation du taux de CSG sur les revenus d'activité ne seraient intégralement compensés qu'à compter de 2019, première année pleine d'application de ces deux mesures. D'ici là, elle n'offrirait qu'un modeste gain de pouvoir d'achat, à compter d'octobre 2018 . Surtout, l'augmentation de la CSG ne fait pas l'objet d'une compensation directe pour les titulaires de revenus de remplacement (pensions de retraite et d'invalidité) concernés par la réforme, raison pour laquelle votre rapporteur pour avis propose la suppression de la hausse du taux de CSG pour ces derniers .

1. Une augmentation du taux de 1,7 point de CSG en contrepartie de la baisse de cotisations sociales pour les actifs
a) Pour les salariés du secteur privé, un gain de pouvoir d'achat en deux temps et non systématique

La mesure proposée prévoit la suppression des cotisations salariales d'assurance maladie (dont le taux est actuellement de 0,75 % 26 ( * ) ) et l'exonération du paiement des contributions d'assurance chômage (dont le taux est actuellement de 2,40 %), en contrepartie d'une augmentation de 1,7 point de CSG. Il est ainsi proposé d'abaisser de 3,15 points les cotisations et contributions acquittées sur le salaire brut par les salariés du secteur privé .

Alors que la hausse du taux de CSG s'appliquerait à compter du 1 er janvier 2018, la mesure de baisse des cotisations salariales se décomposerait en deux temps , au cours de l'année 2018 :

- d'une part, la totalité de la cotisation salariale d'assurance maladie serait supprimée au 1 er janvier 2018 (soit 0,75 %) et 1,45 des 2,40 points de contribution d'assurance chômage serait supprimé ;

- d'autre part, au 1 er octobre 2018, 0,95 point supplémentaire de la contribution salariale d'assurance chômage serait supprimé.

Le gain pour un salarié rémunéré au SMIC serait effectivement de 263 euros en année pleine, soit en 2019 . Toutefois, le gain net de l'augmentation du taux de CSG ne sera que de 8 euros par mois en janvier 2018 , avant d'atteindre 22 euros par mois en octobre 2018, soit un gain de pouvoir d'achat de 1,45 % de la rémunération brute.

Aussi la totalité du gain de pouvoir d'achat annoncé par le Gouvernement ne sera-t-elle effective qu'à compter d'octobre 2018 .

Le choix d'étaler la suppression des cotisations salariales en deux temps sur l'année 2018 procède d'un renforcement du pouvoir d'achat des actifs en réalité conditionné par la contrainte budgétaire . En effet, la bascule du financement de la protection sociale des cotisations salariales vers la CSG constitue une opération gagnante pour les administrations de sécurité sociale d'ici octobre 2018, dès lors qu'elles bénéficieront à la fois des produits de l'augmentation du taux de CSG et des cotisations salariales qui n'auront pas encore été supprimées.

Effets nets de la suppression des cotisations salariales / augmentation du taux de CSG pour plusieurs niveaux de revenus

(en euros)

Revenus mensuels nets

Hausse de CSG

Suppression de la cotisation salariale maladie

Suppression de la cotisation salariale chômage

Gain mensuel

janvier-septembre 2018

Gain mensuel à partir d'octobre 2018

Gain annuel 2018

1 SMIC (1 188 € / mois)

+25

-11

-36

+8

+ 22

+ 266

2 SMIC (2 376 € /mois)

+50

-22

-72

+16

+44

+532

7 000 € / mois

+145

-65

-209

+46

+129

+1 545

Source : commission des finances du Sénat d'après les réponses au questionnaire

Il convient de noter que, d'après l'évaluation préalable, les personnes bénéficiant d'un haut niveau de revenus d'activité ne seraient pas bénéficiaires de la mesure : l'assiette des cotisations d'assurance chômage est en effet plafonnée à quatre fois le plafond annuel de sécurité sociale (PASS) 27 ( * ) , soit un salaire mensuel supérieur à 13 284 euros au 1 er janvier 2018. Ainsi, « les personnes percevant de très hauts revenus contribueront davantage sur la fraction des revenus dépassant ce plafond ».

b) Des mesures particulières de baisse de cotisations sont prévues pour les indépendants

Dans la mesure où les indépendants n'acquittent pas de cotisations salariales ni de cotisations d'assurance chômage , le présent article propose des mesures équivalentes, qui, comme le précise l'évaluation préalable, portent « préférentiellement sur les cotisations destinées au financement de risques non contributifs afin d'éviter tout impact sur la constitution de leurs droits sociaux ».

La première mesure consiste en une réduction du taux de cotisations d'allocations familiales applicables aux travailleurs indépendants . En pratique, le présent article renvoie au pouvoir réglementaire la définition du seuil de revenus d'activité au-delà duquel les travailleurs indépendants ne sont pas éligibles à cette réduction de cotisations, d'ailleurs expressément limitée à 5,25 points.

Alors qu'à l'heure actuelle, le taux de cotisation d'allocations familiales s'élève à 2,15 % pour un revenu annuel inférieur ou égal à 110 % du PASS , soit 43 151 euros en 2017, et à 5,25 % pour un revenu annuel supérieur à 140 % du PASS , soit 54 919 euros en 2017, la mesure proposée neutraliserait les effets de la hausse de CSG en prévoyant une réduction du taux des cotisations d'allocations familiales ayant pour effet d'annuler le taux de cotisations jusqu'à 110 % du PASS et d'atteindre le nouveau taux « normal » de 3,10 % à 140 % du PASS (soit environ 55 000 euros).

En outre, un renforcement de l'exonération dégressive des cotisations d'assurance maladie et maternité des travailleurs indépendants , créée par la loi de financement pour 2017, est proposé. Aux termes du nouvel article L. 621-3 du code de la sécurité sociale, le taux de ces cotisations serait réduit dans la limite de 5 points, pour les travailleurs dont les revenus sont inférieurs à un seuil fixé par décret. Actuellement le taux normal de cotisations est de 6,5 %. Ce taux maximal ne serait dû qu'à partir de 110 % du PASS .

La combinaison de ces deux mesures devraient offrir un gain de pouvoir d'achat de l'ordre de 180 millions d'euros pour 75 % des indépendants , dont les revenus sont inférieurs à 110 % du PASS.

Ainsi, la mesure proposée priverait 25 % des travailleurs indépendants (dont les revenus sont supérieurs à 140 % du PASS, soit 55 000 euros) de gain de pouvoir d'achat , la hausse de CSG finançant pour ces derniers la diminution de 2,15 points du taux de cotisations d'allocations familiales.

Mesures concernant les micro-entrepreneurs

Des ajustements du taux global de cotisations applicable aux micro-entrepreneurs seraient réalisés par décret pour tenir compte du renforcement de ces exonérations et du doublement du seuil de la microentreprise. Selon les hypothèses actuelles, le taux unique de cotisations passerait à 12,80 % pour les activités de commerce, à 21,60 % pour les activités artisanales et à 21,30 % pour les activités des professionnels libéraux.

Source : évaluation préalable du présent article

La même exonération est proposée pour les exploitants agricoles, en remplacement de l'exonération de 7 points de la cotisation maladie prévue par la loi de financement pour 2016 (de 10,04 % en 2015 à 3,04 % depuis 2016). L'évaluation préalable rappelle en effet que n'étant soumise à aucune condition de ressources, « l'exonération actuelle est mal ciblée et bénéficie pour 50 % de son montant aux 15 % des exploitants agricoles dont les revenus sont les plus élevés ».

2. Un objectif louable d'allégement du poids du financement de la protection sociale reposant sur les revenus du travail

Comme le relève le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de juillet 2017 28 ( * ) , « si les ressources de la protection sociale se sont diversifiées depuis 1980, les prélèvements sociaux sur les salaires en restent la principale source de financement » : en 2015, les cotisations sociales ont représenté 63 % des recettes des administrations de sécurité sociale (ASSO) et la CSG assise sur les revenus d'activité 12 %.

Évolution de la structure des recettes du régime général
entre 2000 et 2016 par assiette

(en %)

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale

Les revenus d'activité représentent une part encore plus importante des recettes du régime général , comme l'illustre le graphique ci-dessus. Ainsi, en dépit de la diversification des sources de recettes de la sécurité sociale, et plus particulièrement du régime général, le financement de cette dernière repose pour plus de 80 % sur les revenus du travail.

Comme le rappelle le Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements, « faire reposer le financement de la protection sociale essentiellement sur les revenus du travail peut nuire à l'emploi » 29 ( * ) .

La suppression des cotisations salariales, en plus de contribuer à la diminution du coût du travail, permet également de toucher tous les travailleurs, y compris ceux dont les revenus annuels sont faibles et se situent dans les premiers déciles de revenus, à la différence, par exemple d'une mesure de pouvoir d'achat qui se traduirait par une baisse de l'impôt sur le revenu, dont seule la moitié des foyers sont aujourd'hui redevables. Ainsi, votre rapporteur pour avis est favorable à la baisse des cotisations salariales proposée.

Dans un contexte d'universalisation des prestations sociales versées par les régimes de base de la sécurité sociale - qu'il s'agisse de la branche famille, ou de la branche maladie, avec la protection maladie universelle instaurée en 2016 - il apparaît en outre logique et nécessaire de rééquilibrer les efforts contributifs et de diversifier encore davantage le financement de la protection sociale par l'impôt.

3. ... mais la hausse de la CSG constitue une solution inappropriée, en particulier s'agissant des bénéficiaires de revenus de remplacement
a) La CSG, un rendement important en raison d'une large assiette ...

La CSG, instituée par la loi de finances pour 1991 30 ( * ) , est un impôt proportionnel, composé en réalité de « quatre impôts juridiquement distincts portant sur quatre assiettes différentes » 31 ( * ) :

- les revenus d'activité des personnes fiscalement domiciliées en France, soit les salaires et assimilés ; l'assiette de la CSG sur les revenus d'activité est plus large que celle des cotisations de sécurité sociale, dès lors que contrairement à cette dernière, elle inclut les accessoires de rémunération comme l'épargne salariale, l'actionnariat salarié, la protection sociale complémentaire 32 ( * ) ;

- les revenus de remplacement , soit les pensions de retraite ou d'invalidité, les rentes viagères à titre gratuit, et les allocations de chômage, de préretraite, les indemnités d'activité partielle et indemnités et allocations diverses ;

- les revenus du capital (soit les revenus du patrimoine et les revenus de placement) des personnes domiciliées fiscalement en France et des non-résidents sur leurs revenus fonciers et plus-values immobilières d'origine française ; les produits réalisés à l'occasion des jeux .

Sur chacune de ces assiettes s'appliquent des taux différents, variant en fonction des types de revenus, voire en fonction du revenu fiscal de référence (RFR) du contribuable. Par exemple, les titulaires de revenus de remplacement peuvent bénéficier d'un taux réduit de CSG de 3,8 % ou d'une exonération :

- le taux réduit de 3,8 % 33 ( * ) concerne les personnes dont le revenu fiscal de référence (RFR) est compris entre 10 996 euros pour la première part majorée de 2 936 euros pour chaque demi-part supplémentaire et 14 375 euros pour la première part majorée de 3 838 euros pour chaque demi-part supplémentaire ;

- l'exonération de CSG 34 ( * ) s'applique :

• aux titulaires d'un avantage de vieillesse ou d'invalidité non contributif versé par un régime de base de sécurité sociale sous condition de ressources 35 ( * ) et financé par le FSV ou le Fonds spécial d'invalidité ;

• aux titulaires de pensions de retraite ou d'invalidité et d'allocations chômage dont le RFR de l'avant-dernière année n'excède pas 10 996 euros pour la première part de quotient familial, majorés de 2 936 euros pour chaque demi-part supplémentaire.

Seuils de revenus fiscaux de référence régissant l'assujettissement au taux réduit
et à l'exonération de CSG

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat

De cette large assiette découle un rendement important , d'un montant de 97,4 milliards d'euros en 2016 , en augmentation de 2,9 % par rapport à 2015 - le rendement prévisionnel pour 2017 est estimé à 98,3 milliards d'euros - , dont l'évolution est essentiellement déterminée par la dynamique de la masse salariale du secteur privé et des pensions versées par les régimes d'assurance vieillesse, en raison de leur poids dans l'assiette totale de la CSG.

Comme l'illustre le graphique ci-dessous, la CSG basée sur les revenus d'activité représente près de 70 % du rendement total de la CSG, 20 % découlent des revenus de remplacement et 10 % proviennent des revenus du capital.

Produit de la CSG par assiette en 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après le rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2017

b) ... exclusivement affecté au financement de la protection sociale

En 2016, 72 % de la CSG est affecté à la CNAM, 10 % à la CNAF, 10 % au FSV et 8 % à la CADES.

Produit de la CSG par attributaire en 2016

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale, juillet 2017

La modification de l'affectation des prélèvements sociaux
sur les revenus du capital

En réponse à la décision préjudicielle rendue le 26 février 2015 par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) dans l'affaire dite « de Ruyter » 36 ( * ) , la loi de financement pour 2016 a affecté le produit des contributions sociales sur les revenus du capital (CSG, CRDS, prélèvement social, contribution de solidarité additionnelle (CSA) et prélèvement de solidarité) au financement exclusif de prestations sociales non contributives prises en charge par le FSV et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

La CJUE ayant considéré que les prélèvements sociaux sur les revenus du capital acquittés sur critère de résidence relevaient du champ d'application du règlement n° 1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale 37 ( * ) , dans la mesure où ils étaient affectés directement et spécifiquement à certaines branches de la sécurité sociale, la mise en conformité du droit national au droit européen a ainsi été réalisée en changeant uniquement l'affectation de ces contributions, sans remettre en cause le principe d'assujettissement uniquement sur critère de résidence, voire de source des revenus pour les revenus fonciers et les plus-values immobilières 38 ( * ) .

Les prélèvements sociaux sur les revenus du capital ont donc été affectés au financement de dépenses de « prestation spéciale en espèces à caractère non contributif (PSNC) », prises en charge par le FSV (principalement l'ASPA) qui ne relèvent pas du principe d'unicité de la législation sociale prévu par le règlement n° 1408/71 précité 39 ( * ) .

Les parts de CSG sur les revenus d'activité et de remplacement, de forfait social, de contribution sociale de solidarité (C3S) et de taxe sur les salaires auparavant affectées au FSV ont été transférées aux branches du régime général. Si l'opération est restée neutre sur les recettes de chaque branche, ces transferts ont affecté l'évolution de solde des branches (en particulier du FSV), leur élasticité à la conjoncture et leur dynamisme variant sensiblement.

Source : commission des finances du Sénat

c) La réforme proposée : un gain de pouvoir d'achat pour les actifs qui s'effectue au détriment des retraités

Le présent article propose l'augmentation de 1,7 point des taux de CSG applicables aux revenus d'activité, aux pensions d'invalidité et aux pensions de retraite assujetties au taux de 6,6 %, aux revenus des jeux, et aux revenus du capital.

Plusieurs revenus sont expressément exclus du champ de la réforme :

- les allocations de chômage et les indemnités journalières ;

- les revenus de remplacement soumis au taux réduit de 3,8 % ;

- les revenus de remplacement exonérés de CSG.

Les graphiques ci-dessous synthétisent le périmètre d'application et le rendement estimé par assiette de la mesure proposée. 22,4 milliards d'euros sont ainsi attendus de l'augmentation des taux de CSG en 2018 .

Taux de CSG selon l'assiette avant et après l'augmentation de 1,7 point

(en %)

* les revenus de remplacement exonérés de CSG ne figurent pas sur le graphique et resteraient exonérés dans le cadre de la mesure proposée.

Impact financier de l'augmentation de taux de CSG par assiette en 2018

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Les mesures proposées par le Gouvernement se traduisent par un excédent de 5,4 milliards d'euros pour la sécurité sociale : en effet, les mesures d'exonération et de suppression de cotisations salariales provoquant des pertes de recettes inférieures au surplus de recettes qui résulterait de l'augmentation du taux de CSG, en raison du décalage d'entrée en vigueur de ces deux mesures (au 1 er janvier 2018 pour l'augmentation du taux de CSG, et en deux temps, au 1 er janvier 2018 et au 1 er octobre 2018 pour les baisses de cotisations sociales). Compte tenu de la non-compensation par l'État de la baisse des cotisations maladie des exploitants agricoles, le surplus serait porté à 5,9 milliards d'euros 40 ( * ) .

Ce surplus serait restitué à l'État , afin de compenser pour ce dernier l'impact de la suppression de la contribution de solidarité (CES) et de la mise en place de primes dans la fonction publique d'État, en contrepartie de la hausse de la CSG. Or ces mesures coûteraient, d'après le Gouvernement, 2,1 milliards d'euros. Au total, le surplus de recettes publiques de 3,8 milliards d'euros pour 2018 serait attribué au budget de l'État.

Évaluation du bilan du dispositif
hausse de CSG / baisse de cotisations salariales

(en milliards d'euros)

Hausse de la CSG

22,4

Baisse des cotisations salariales maladie

-4,7

Baisse des cotisations salariales chômage compensée par l'Acoss

-9,4

Baisse des cotisations des travailleurs indépendants

-2,3

Mesures de compensation dans la fonction publique

-0,6

Impact sécurité sociale

5,4

Autres effets (dont non compensation des baisses de cotisations sur les exploitants agricoles)

0,47

Transfert à l'État au titre de la mesure CSG

5,9

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'annexe 10 du présent projet de loi de financement

Compensation de la hausse du taux de CSG pour les agents publics

Non soumis aux cotisations salariales maladie et non systématiquement affiliés à l'assurance chômage, les agents publics, sauf exception 41 ( * ) , sont toutefois redevables de la CSG sur leurs revenus d'activité et d'une contribution exceptionnelle de solidarité (CES), au taux de 1 %, qui participe au financement de l'allocation de solidarité spécifique (ASS).

La suppression de cette dernière est proposée à l'article 47 du projet de loi de finances. Néanmoins, alors que son rendement s'élevait à 1,4 milliard d'euros en 2016, sa suppression ne suffira pas à compenser l'intégralité de la hausse de la CSG.

Le Gouvernement a annoncé que cette mesure devrait être accompagnée de la création d'une prime destinée à compenser la perte de revenus pour les agents publics résultant de l'augmentation du taux de CSG et non entièrement compensée par la suppression de la CES. Cette prime sera versée aux agents des trois versants de la fonction publique en janvier 2018 et calculée sur la moyenne de la rémunération 2017. Elle sera actualisée une fois, au 1 er janvier 2019, sur la base de la rémunération 2018. Cette prime sera maintenue pour les nouveaux entrants. Elle fera l'objet d'une compensation aux employeurs locaux et hospitaliers.

Source : commission des finances du Sénat

Ainsi, l'augmentation du taux de la CSG ne concernerait pas les bénéficiaires d'allocataires chômage ou d'indemnités journalières, mais serait néanmoins applicable aux pensions de retraite et d'invalidité assises sur les pensions dues à compter du 1 er janvier 2018, lorsqu'elles sont assujetties à un taux plein de CSG, soit lorsque leur revenu fiscal de référence est supérieur au seuil permettant l'assujettissement au taux réduit (14 375 euros pour une personne seule, comme mentionné supra ).

Il importe de préciser que le revenu fiscal de référence (RFR) peut être minoré, par exemple, pour les contribuables âgés de plus de 65 ans 42 ( * ) . En effet, aux termes de l'article 157 bis du code général des impôts, le contribuable âgé de plus de 65 ans (ou invalide) peut bénéficier d'un abattement de :

- 2 352 euros lorsque le revenu global net est inférieur à 14 750 euros ;

- 1 176 euros si son revenu global net est compris entre 14 750 euros et 23 760 euros.

Au total, comme l'illustre le tableau suivant, les retraités concernés par l'augmentation du taux de CSG sont ceux percevant un revenu mensuel supérieur :

- à 1 286 euros pour les pensionnés âgés de moins de 65 ans, et à 2 042 euros pour un couple ;

- à 1 392 euros pour les pensionnés âgés de plus de 65 ans, et à 2 200 euros pour un couple.

Revenus fiscaux de référence (RFR) et niveaux de pensions au-delà desquels la hausse de la CSG est applicable

(en euros)

RFR au-delà duquel la hausse de CSG s'applique

Niveau de pension mensuelle

- 65 ans

Niveau de pension mensuelle

+ 65 ans

Célibataire (1 part)

14 375

1 286

1 392

Couples (2 parts)

22 051

2 042

2 200

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données fournies par la direction de la sécurité sociale.

8,2 millions de retraités relèvent à l'heure actuelle du taux plein de CSG et se verront donc appliquer une augmentation de 1,7 point de CSG sur les revenus issus de leurs pensions, soit près de 60 % des retraités 43 ( * ) : d'après les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, pour une personne seule de plus de 65 ans percevant 1 440 euros de pension mensuelle, cette augmentation représente une perte de revenus de 27 euros par mois, soit 324 euros par an .

5,8 millions de retraités ne seraient quant à eux pas concernées par la hausse de la CSG, soit 40 % des retraités :

- 4 millions en raison de l'exonération de CSG ;

- 1,8 million de pensionnés car ils restent assujettis au taux réduit.

Certes, les retraités modestes, exonérés de CSG ou assujettis au taux réduit, sont préservés dans la réforme proposée. Toutefois, si l'objectif de diminuer les charges pesant sur les revenus du travail est tout à fait louable, l'effort demandé par le Gouvernement aux personnes retraitées percevant une pension de retraite de 1 440 euros mensuels pour une personne seule, que l'on peut difficilement qualifier de retraités « riches », est injustifié.

L'objectif d'un travail plus rémunérateur ne saurait être atteint au prix d'une diminution du niveau de vie des retraités.

Alors que des mesures de compensation sont prévues pour la plupart des salariés et les fonctionnaires, voire des mesures permettant d'assurer un gain de pouvoir d'achat comme il a été précédemment décrit, nulle mesure de compensation de la hausse du taux de CSG n'est prévue spécifiquement pour les personnes retraitées.

Le Gouvernement argue que la mesure d'allégement puis d'exonération de taxe d'habitation, prévue par l'article 3 du projet de loi de finances, constitue une compensation dont bénéficierait cette catégorie de la population .

Dégrèvement de taxe d'habitation : focus sur les retraités

Les retraités dont le RFR excéderait le seuil au-delà duquel s'applique le taux plein de CSG, soit 14 375 euros pour une personne seule et 22 051 euros pour un couple, bénéficieront en effet d'un dégrèvement progressif de taxe d'habitation, lorsque leur revenu est inférieur au seuil prévu pour l'éligibilité au dégrèvement de TH, soit 27 000 euros pour un célibataire et 43 000 euros pour un couple. Ainsi , les retraités percevant une pension de retraite supérieure à 1 400 euros et inférieure à 2 500 euros , montant au-delà duquel le dégrèvement de TH s'applique, bénéficieront effectivement d'un dégrèvement étalé sur trois ans.

Source : commission des finances du Sénat

Toutefois cet argument n'est pas recevable, pour deux raisons :

- d'une part, les salariés et fonctionnaires, qui bénéficient de mesures de compensation de la hausse de CSG, sont également bénéficiaires de la baisse progressive de la taxe d'habitation : cette mesure, qui devrait conduire à exonérer 80 % des ménages actuellement redevables de la taxe d'habitation, sans distinguer entre actifs et retraités , ne peut donc par elle-même être présentée comme une compensation ;

- d'autre part, en 2018, seul un retraité sur dix devrait être intégralement compensé de la perte de pouvoir d'achat résultant de la hausse de CSG par une baisse de taxe d'habitation , celle-ci s'étalant sur trois ans. D'après les chiffres avancés par le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, 56 % auraient une compensation partielle, et 36 %, soit 2,5 millions de retraités, n'auraient aucune compensation en 2018 .

Ainsi, la mesure proposée traduit la volonté assumée du Gouvernement de faire contribuer les retraités au financement des baisses de charges des actifs : au-delà de 1 392 euros de pension de retraite mensuelle lorsqu'elles ont plus de 65 ans, et de 1 286 euros lorsqu'elles ont moins de 65 ans, les personnes âgées paieront davantage de CSG, et dès lors que leur revenu mensuel est inférieur à 2 500 euros, elles profiteront d'une baisse de la taxe d'habitation, étalée sur trois ans. Aucune compensation n'est prévue pour les retraités percevant un revenu mensuel supérieur à 2 500 euros.

Cet effort demandé aux retraités est d'autant plus inadmissible qu'il intervient concomitamment au gel des pensions de retraites en 2018 , proposé à l'article 26 du présent projet de loi de financement (cf. infra ), qui découlerait du décalage des revalorisations des pensions de retraites d'octobre à janvier.

À cette fin, votre commission a adopté un amendement proposant la suppression de l'augmentation du taux de CSG prévue s'agissant des revenus de remplacement, afin de « préserver » les retraités qui auraient subi une hausse de CSG sans compensation.

Une clarification des modalités d'application de la hausse du taux de CSG
sur les revenus du capital

Un amendement du Gouvernement déposé à l'article 7 est venu préciser les modalités d'application de la hausse du taux de CSG aux revenus du capital :

- pour les revenus du patrimoine , la hausse de taux entrera en vigueur à raison des rôles émis à compter du 1 er janvier 2018 ;

- pour les produits de placement , la hausse du taux s'appliquera aux faits générateurs intervenant à compter du 1 er janvier 2018 .

En outre, ce relèvement de taux sera accompagné d'une disposition garantissant que les gains acquis ou constatés avant le 1 er janvier 2018 continueront à être taxés en fonction des « taux historiques » , c'est-à-dire le taux en vigueur au moment de la constatation du gain et qui aurait été appliqué si le fait générateur était intervenu à cette date. Cette disposition ne concernera que les produits d'épargne soumis à prélèvements sociaux pour lesquels ce mécanisme particulier est encore applicable, soit essentiellement les plans d'épargne en actions (PEA) et l'épargne salariale .

En revanche, pour les gains générés par les flux d'épargne enregistrés à compter du 1 er janvier 2018, la taxation en fonction des « taux historiques » est abandonnée , y compris pour les PEA et l'épargne salariale.

Source : commission des finances du Sénat

B. LES TRANSFERTS ENTRE ÉTAT ET SÉCURITÉ SOCIALE ET LES COMPENSATIONS INTERNES À LA SÉCURITÉ SOCIALE (ARTICLE 26 DU PLF ET ARTICLE 18 DU PLFSS 2018)

1. Un surplus de recettes temporaire pour la sécurité sociale intégralement restitué à l'État

Les mesures proposées par le Gouvernement à l'article 7 du présent projet de loi de financement se traduisent par un excédent de 5,4 milliards d'euros pour la sécurité sociale.

Hors la non-compensation par l'État de la baisse des cotisations maladie des exploitants agricoles, le surplus aurait été porté à 5,9 milliards d'euros. Ce surplus serait intégralement affecté à l'État en 2018.

Cette affectation constitue le socle des transferts proposés pour 2018. Or votre rapporteur pour avis relève trois éléments biaisant la présentation faite par le Gouvernement des surplus de recettes présumés pour la sécurité sociale :

- d'abord, la perte de recettes pour l'Unédic résultant de la suppression des cotisations d'assurance chômage est intégralement supportée par la sécurité sociale en 2018 (9,4 milliards d'euros, qui seront compensés à l'Unédic par l'ACOSS) ;

- ensuite, le montant total restitué à l'État intègre une recette pour la sécurité sociale dont elle ne bénéficiera pourtant pas : la sécurité sociale doit ainsi restituer à l'État 5,9 milliards d'euros, et non 5,4 milliards d'euros, alors même que la baisse de cotisations des exploitants agricoles constitue une perte de recettes qui ne lui est pas compensée ;

- enfin, le Gouvernement apporte une justification critiquable à la restitution du surplus à l'État : ce surplus devrait en effet permettre de compenser pour l'État l'impact de la suppression de la Contribution de solidarité (CES) et les primes dans la fonction publique de l'État, qui devraient compenser l'augmentation de la CSG. Or le coût de ces deux mesures atteindrait 2,1 milliards d'euros. L'État conserverait ainsi un surplus de 3,8 milliards d'euros, aux dépens de la sécurité sociale .

Le schéma de transferts entre l'État et la sécurité sociale proposé pour 2018 et présenté ci-après repose ainsi sur un surplus de recettes pour la sécurité sociale surestimé et constitue en réalité une ponction de recettes de la sécurité sociale, destinée à augmenter les recettes du budget de l'État.

2. La compensation de mesures non pérennes prises en 2017 (article 26 PLF 2018)

Comme le rapporteur général de la commission des finances l'avait relevé dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2017 44 ( * ) , le montant des compensations portées par le budget de l'État en 2017 ne coïncidait pas avec le montant total des mesures entraînant une perte de recettes pour la sécurité sociale . Deux dispositifs proposés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 étaient en effet comptabilisés en réduction du montant à compenser, pour un montant total de 879 millions d'euros :

- le prélèvement des ressources mises en réserve au sein de la section III du fonds de solidarité vieillesse au profit du régime général, à hauteur de 719 millions d'euros ;

- la modification de la période d'imposition de la taxe sur les véhicules de sociétés , provoquant une imposition spécifique du dernier trimestre 2017 et une recette ponctuelle de 160 millions d'euros.

Enfin, la contribution supplémentaire à la contribution sociale de solidarité (C3S) créée par la loi de finances rectificative pour 2016, dont la suppression, y compris pour 2017, est proposée par le présent projet de loi de financement (cf. infra ), n'aurait pu générer qu'un gain de trésorerie.

En tout état de cause, cette comptabilisation de recettes non pérennes ne pouvait constituer un moyen sérieux de compensation , ce dont témoigne la compensation de ces pertes de recettes prévue par le schéma de compensation pour 2018.

Toutefois, ni le crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS) ni l'exonération de taxe sur les salaires pour les primes d'impatriation, instaurées respectivement par les articles 88 et 71 de la loi de finances pour 2017, ne sont compensés .


Impact des mesures de compensation 2017 non pérennes

(en milliards d'euros)

Fin de la mesure section III FSV

-0,7

Impact non pérenne de la C4S

-0,4

Modification fait générateur TVS

-0,2

Compensation CITS

Non compensé

Exonération taxe sur les salaires du régime impatrié

Non compensé

Total

-1,3

Source : évaluation préalable de l'article 18 du présent projet de loi de financement

3. De nouveaux transferts entre l'État et la sécurité sociale dégradent le solde de la sécurité sociale de 150 millions d'euros

Plusieurs mesures de transferts prévues par le projet de loi de finances et par le présent projet de loi de financement dégraderaient le solde de la sécurité sociale de plus de 300 millions d'euros . En outre, deux mesures instaurées par les lois financières pour 2018 ne feraient pas l'objet de compensation à la sécurité sociale : la suppression de la quatrième tranche de taxe sur les salaires, prévue à l'article 44 du projet de loi de finances, et le doublement du seuil du régime du microsocial.

a) La suppression de cofinancements État -sécurité sociale (article 26 PLF)

L'article 26 du projet de loi de finances prévoit :

- la suppression de la subvention pour charges de service public de l'État à l'Agence française de biomédecine , retracée au sein du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » de la mission Santé, qui s'élevait, en 2017, à 13,2 millions d'euros ;

- la suppression de la participation de l'État à la prise en charge des frais de santé des personnes écrouées , jusqu'à présent retracée au sein du programme 107 « Administration pénitentiaire » de la mission « Justice » ; la participation de l'État consistait à prendre en charge la part dite « complémentaire » des soins des personnes écrouées, à savoir le ticket modérateur, le forfait journalier hospitalier, ainsi que la cotisation versée à l'ACOSS. Ce transfert augmente les dépenses de la sécurité sociale de 136 millions d'euros .

b) Autres transferts entre l'État et la sécurité sociale

Les transferts de l'État à la sécurité sociale proposés en projet de loi de financement et en projet de loi de finances concernent :

- le transfert des missions de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux ( ANESM ) au sein de la Haute Autorité de santé ( HAS ), proposé à l'article 51 du projet de loi de financement , et la suppression du financement de l'ANESM par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et l'État, qui constitue une dépense de 900 000 euros ;

- le transfert du financement de l'École des hautes études en santé publique ( EHESP ) de l'État aux établissements de santé, pour un montant de 8,9 millions d'euros ;

- la recentralisation des politiques sanitaires jusqu'ici exercées par certains départements et financée par l'assurance maladie via le fonds d'intervention régional ( FIR ), pour un montant de 2,2 millions d'euros.

4. Les transferts de recettes de la sécurité sociale vers l'État (article 26 du PLF et article 18 PLFSS)

L'ensemble des mesures précitées conduit à prévoir le transfert de 4,3 milliards d'euros de recettes de la sécurité sociale vers l'État .

Bilan des transferts entre l'État et la sécurité sociale pour 2018

(en milliards d'euros)

Rétrocession à l'État du gain lié à la mesure de CSG

5,9

Compensation 2017 non pérennes à compenser à nouveau en 2018

-1,3

Mesures de transfert en PLF et PLFSS

-0,3

Montant à restituer à l'État

4,3

Source : commission des finances du Sénat

L'article 26 du projet de loi de finances propose une diminution de la fraction de TVA affecté à la CNAMTS , qui passerait de 7,03 % à 0,35 %, soit une perte de recettes pour la CNAMTS d'1,7 milliard d'euros .

Au surplus, l'article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 prévoit de transférer les recettes du prélèvement de solidarité, estimées à 2,6 milliards d'euros pour 2018 du FSV à l'État .

Tableau récapitulatif des mesures prévues en 2018

(en millions d'euros)

Mesures concernant la sécurité sociale

Mesures concernant l'État

Surplus de recettes affectées lié à la hausse de la CSG / suppression et exonération de cotisations

+ 5 885

Mise en oeuvre des frais d'assiette et de recouvrement sur les impôts recouvrés par l'État pour la sécurité sociale

-150

Mise en oeuvre des frais d'assiette et de recouvrement sur les impôts recouvrés par l'État pour la sécurité sociale

+ 150

Mesures de transfert

-162

Mesures de transfert

+ 133,8

Financement de l'Agence de la biomédecine

Financement de l'EHESP

Couverture santé des personnes écrouées

Fusion HAS-ANESM

Recentralisation compétences sanitaires FIR

Emploi mis à la disposition de la DGOS

Prise en charge par les ARS des conseillers techniques régionaux en soins infirmiers

Financement par l'État de 80 postes de CCU-MG

- 14

-9

- 136

-1

-2

+0,2

+3

+2

Couverture santé des personnes écrouées

Fusion HAS-ANESM

Recentralisation compétences sanitaires FIR

Emploi mis à la disposition de la DGOS

Prise en charge par les ARS des conseillers techniques régionaux en soins infirmiers

Financement par l'État de 80 postes de CCU-MG

+ 136

+1

+2

-0,2

-3

-2

Mesures décidées en lois financières 2016-2017

-1 279

Modification période d'imposition de taxe sur les véhicules de sociétés (TVS)

Prélèvement sur les ressources FSV

Acompte de C3S

-160

-719

-400

Transferts de recettes

- 4 299

Transferts de recettes

+ 4 299

Transfert du prélèvement de solidarité

Minoration de la fraction de TVA

- 2 567

- 1 732

Transfert du prélèvement de solidarité

Minoration de la fraction de TVA

+ 2 567

+ 1 732

TOTAL net

0

TOTAL net

4 583

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'évaluation préalable du présent article annexée au projet de loi de finances pour 2018

5. Les réaffectations de recettes internes à la sécurité sociale (article 18 du PLFSS)

Prenant en compte les conséquences différentes selon les branches des mesures ayant un impact sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale et les transferts de recettes de la sécurité sociale vers l'État prévus, l'article 18 du présent projet de loi de financement prévoit des réaffectations internes de recettes . Une logique de rationalisation présiderait également aux modifications proposées d'affectation des recettes entre branches.

Sans ces mesures, les transferts entre l'État et la sécurité sociale présentés ci-avant se traduiraient par un gain pour la branche maladie de 2,1 milliards d'euros, tandis que la branche famille verrait son solde dégradé de 1,7 milliard d'euros . L'annexe 6 au présent projet de loi de financement précise les principaux transferts prévus :

- le transfert de la taxe sur les farines, actuellement affectée au régime vieillesse des non-salariés agricoles, vers le régime complémentaire obligatoire (RCO) des non-salariés agricoles, prévue dans le cadre de la conférence sur les retraites agricoles du 30 novembre 2016, pour un montant de 64 millions d'euros ;

- l'ajustement de l'affectation de la taxe sur les salaires . Dans la mesure où elle constitue, avec la CSG, la principale recette partagée entre l'ensemble des branches du régime général, la taxe sur les salaires constitue une variable d'ajustement des effets entre branches. La branche maladie transférerait ainsi 1,4 milliard d'euros de produit de taxe sur les salaires en 2018 vers la branche famille .

C. UNE STRATÉGIE DE TRANSFERTS TRANSITOIRE ET OPPORTUNE

1. Une stratégie transitoire, laissant en suspens la question des ressources des régimes sociaux

La perte de recettes pour l'Unédic résultant de la suppression des cotisations d'assurance chômage proposée à l'article 7 du présent projet de loi de financement serait intégralement compensée par l'ACOSS en 2018.

D'après le directeur de l'ACOSS, Yann-Gaël Amghar, entendu par la commission des affaires sociales du Sénat dans le cadre de l'examen du présent projet de loi 45 ( * ) le 25 octobre 2017, la modification du financement de l'assurance chômage prévue à l'article 7 « fait en quelque sorte de l'ACOSS une chambre de compensation entre l'État et l'Unédic ».

L'ACOSS continuerait à verser aux régimes d'assurance chômage les sommes correspondant aux contributions salariales exonérées. Cette « compensation » serait financée par l'affectation de 5,64 % de TVA à l'ACOSS, proposée par l'article 26 du projet de loi de finances. Or, cette fraction de TVA est fixée en fonction du coût estimé des exonérations à date d'aujourd'hui. Un écart entre le coût de l'exonération et le niveau de la compensation n'est donc pas à exclure , et reposerait sur la sécurité sociale :

- dans le cas où les recettes de TVA seraient supérieures aux charges résultant de la compensation à l'Unédic, le surplus de recettes serait redistribué aux branches du régime général ;

- si les recettes de TVA se révélaient inférieures aux charges résultant de la compensation à l'Unédic, le poids des pertes serait réparti entre les branches du régime général .

Les informations transmises par la direction de la sécurité sociale confirment cette analyse : « si un écart est constaté en fin d'année entre ces charges et ces produits, celui-ci sera imputé entre les différentes branches du régime général, afin de garantir que le résultat de l'ACOSS demeure nul ».

« Pour l'instant, nous percevons les cotisations chômage et les versons à l'organisme bénéficiaire. Aux termes de cet article, les salariés seront exonérés de cotisation, conduisant à une perte de recettes pour l'assurance chômage. Nous continuerons toutefois à verser à l'Unédic des ressources intégrant le montant de ces exonérations, la compensation étant effectuée par l'affectation à l'ACOSS d'une recette fiscale, en l'espèce d'une part de TVA . L'écart potentiel entre cette dernière et les ressources qui auraient été obtenues par les cotisations salariales, qu'il soit positif ou négatif, sera réparti entre les différentes branches du régime général par arrêté interministériel . Cela répond à un double objectif : préserver les recettes de l'assurance chômage sans pour autant créer de relations financières directes entre l'État et cette dernière (...)

À la différence des exonérations compensées par voie budgétaire, la compensation ne s'effectue pas à l'euro près. Il s'agit d'une recette affectée pour 2018 ; en 2019, les modalités de compensation pourront être revues . Un décalage est donc possible, dans les deux sens, entre le coût de l'exonération et le montant de la compensation. Le solde pourrait être positif pour l'ACOSS si le niveau de la consommation permet des rentrées de TVA plus dynamiques que la masse salariale ».

Source : Yann-Gaël Amghar, directeur de l'ACOSS, compte-rendu de la commission des affaires sociales du Sénat, 25 octobre 2017.

Or aucune raison ne justifie de faire peser sur la sécurité sociale le poids éventuel de l'écart qui pourrait apparaître entre les recettes de TVA affectées à l'ACOSS et le coût des exonérations de cotisations d'assurance chômage . D'ailleurs, le Gouvernement insiste sur le caractère transitoire d'une stratégie de transferts pour le moins contestable :

- des réformes de la gouvernance de l'Unédic et sur l'avenir de l'assurance chômage ont été annoncées par le Gouvernement ; aussi l'évaluation préalable de l'article 18 précise-t-elle que « le schéma financier retenu entre l'ACOSS et l'assurance chômage présente un caractère transitoire, de manière à ne pas préempter les négociations avec les partenaires sociaux relatives à l'avenir de l'assurance chômage »;

- la perte de recettes pour l'Unédic des exonérations de cotisations chômage, étalées en deux temps, s'élève à 9,4 milliards d'euros en 2018, mais pourrait s'élever à près de 13 milliards d'euros en année pleine. La stratégie de compensation à l'Unédic choisie pour 2018 ne pourra être utilisée en 2019, sauf à augmenter le pourcentage de produit de TVA affecté à l'ACOSS. Le Gouvernement concède ainsi qu'en 2019, le schéma de transferts devra être intégralement repensé .

Alors que les recettes basées sur les cotisations sociales devraient logiquement s'amenuiser, et que le surplus de recettes résultant de l'augmentation de la CSG en contrepartie de la suppression des cotisations salariales est « restitué » à l'État, la question des ressources des régimes sociaux n'est pas réglée . Cette question est ainsi renvoyée au rapport sur la rénovation des relations financières entre l'État et la sécurité sociale , que le Gouvernement devrait remettre au Parlement avant la fin du premier trimestre 2018, aux termes de l'article 23 du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022.

2. Une stratégie opportune, qui grève le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) d'une partie de ses recettes

L'amélioration de la situation économique 46 ( * ) et l'augmentation de 1,7 point du taux de CSG sur les revenus du capital auraient pu permettre un redressement plus marqué de la situation financière du FSV . Or le solde du FSV ne s'améliorerait que légèrement en 2018 , pour atteindre 3,4 milliards d'euros, soit une amélioration de 200 millions d'euros par rapport à 2017 (cf. infra ).

Alors que l'augmentation du taux de la CSG sur les revenus du capital devait augmenter les recettes du FSV - de 2,1 milliards d'euros -, le projet de loi de finances prévoit, dans le cadre du schéma de transfert proposé à l'article 26, un transfert de la totalité du rendement du prélèvement de solidarité sur le capital , actuellement affecté au FSV, à l'État, soit 2,6 milliards d'euros . L'effet de la hausse du taux de CSG est ainsi plus que neutralisé par le transfert de recettes proposé par le projet de loi de finances.

Ces mesures dégraderaient le solde du FSV de 600 millions d'euros en 2018 et de 3,5 milliards d'euros d'ici 2021.

II. MESURES RELATIVES À L'EMPLOI ET AUX ENTREPRENEURS

A. LA SUPPRESSION DE LA CONTRIBUTION SUPPLÉMENTAIRE À LA C3S ET LA FUSION DE LA C3S ET DE SA CONTRIBUTION ADDITIONNELLE (ARTICLE 4)

1. La C3S : une contribution assise sur le chiffre d'affaires dont le produit est affecté à la sécurité sociale

Instituée par la loi du 3 janvier 1970 47 ( * ) afin de compenser les pertes de recettes subies par les régimes des non-salariés et des non agricoles du fait du développement de l'exercice sous forme sociétaire des professions artisanales et commerciales, la C3S a ensuite fait l'objet de trois évolutions :

- une extension, en loi de finances rectificative pour 1995, du champ de recouvrement, de l'assiette et une augmentation de son taux maximal de 0,10 % à 0,13 %, afin d'augmenter son rendement ;

- l a loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie a institué une contribution additionnelle à la C3S , assise, recouvrée, exigible et contrôlée selon les mêmes modalités ; son taux est de 0,03 % ;

- la loi de finances rectificative du 29 décembre 2016 a modifié les modalités de recouvrement de la C3S, en introduisant une contribution supplémentaire , due l'année de réalisation du chiffre d'affaires, et imputée sur le montant de C3S calculé sur ce même chiffre d'affaires l'année suivante. Au taux de 0,04 %, la contribution fait l'objet d'un acompte, versé l'année de réalisation du chiffre, portant sur 90 % de son montant estimé.

Sous réserve de la contribution supplémentaire introduite à compter du 1 er janvier 2017, la C3S due au titre du chiffre d'affaires réalisé en année n doit être acquittée avant le 15 mai de l'année n+1 . Elle est déductible des bénéfices imposables de l'exercice n . Son taux est fixé par décret dans la limite de 0,13 % , actuellement applicable.

Depuis le 1 er janvier 2017, son produit, ainsi que celui de la contribution additionnelle, sont intégralement affectés à la CNAVTS 48 ( * ) .

2. Une assiette réduite par l'introduction d'un abattement

Dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité, une réforme en trois étapes de la C3S était prévue, en vue d'une suppression à compter de l'exercice 2017. Si la C3S est toujours en vigueur, deux évolutions ont été inscrites dans le droit :

- l'article 3 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 a introduit un abattement d'assiette de 3,25 millions d'euros à compter du 1 er janvier 2015. Auparavant, aucun abattement n'était prévu, le seuil d'entrée dans l'imposition était fixé à 760 000 euros ;

- l'article 9 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 a relevé l'abattement d'assiette de 3,25 millions à 19 millions d'euros à compter du 1 er janvier 2016.

Ces deux évolutions ont entraîné une diminution des recettes tirées de la C3S et du nombre d'entreprises redevables, retracée dans le tableau ci-après.

Évolution du produit et du nombre d'entreprises
assujetties à la C3S (y compris additionnelle) entre 2013 et 2016

2013

2014

2015

2016

Produit en milliards d'euros

5,6

5,4

4,4

3,6

Évolution

- 3,5 %

- 18 %

- 18 %

Nombre de redevables

302 000

302 000

97 000

19 890

Évolution

- 68 %

- 79 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données de la direction de la sécurité sociale

3. Le dispositif proposé : une suppression de la contribution supplémentaire et une fusion de la C3S et de sa contribution additionnelle

L'article 4 du présent projet de loi de financement procède à une rationalisation du régime de la C3S , par trois modifications principales :

- la contribution supplémentaire introduite par la loi de finances rectificative pour 2016 est supprimée . Sa suppression n'entraîne aucune perte de recettes, dans la mesure où son montant s'imputait sur le chiffre d'affaires de l'année suivante. Elle ne constituait qu'un gain de trésorerie opportunément introduit pour 2017 ;

- la contribution additionnelle à la C3S, au taux de 0,03 %, est fusionnée avec la C3S 49 ( * ) ;

- compte tenu du maintien de la C3S, il est prévu de rétablir l' obligation de téléréglement , supprimée en loi de finances rectificative pour 2016.

D'après l'évaluation préalable de l'article, la suppression de la contribution supplémentaire constituera en 2017, un gain net de 100 millions d'euros pour l'Éta t, en raison d'une hausse de produit lié à l'impôt sur les sociétés (la contribution supplémentaire ayant vocation à se déduire de l'assiette de l'impôt sur les sociétés dû au titre de la même année).

4. Une simplification bienvenue, mais une pression fiscale maintenue sur les grandes entreprises

Cette mesure corrige le choix du précédent Gouvernement de gonfler artificiellement le montant des recettes publiques en 2017 par des mesures de pure trésorerie , au détriment des entreprises. La contribution supplémentaire s'est en effet traduite par une charge supplémentaire définitive de 320 millions d'euros pour les entreprises concernées en 2017.

Néanmoins, l'attractivité de notre pays s'apprécie également au regard de l'intelligibilité et de la stabilité du régime fiscal .

De ce point de vue, même ainsi rationalisée, les caractéristiques de la C3S ne correspondent pas au cycle des affaires. Impôt de production, son montant et son paiement sont, contrairement à l'impôt sur les sociétés, indépendants du montant des bénéfices de l'entreprise.

C'est pourquoi le précédent Gouvernement avait prévu de supprimer entièrement la C3S, avant d'y renoncer.

La suppression de la contribution supplémentaire et la fusion de la C3S et de sa contribution additionnelle sont bienvenues.

Cette mesure ne réduira toutefois pas la pression fiscale exercée au moyen de la C3S sur les grandes entreprises, dans un contexte où celles-ci seront fortement mises à contribution par les majorations d'impôt sur les sociétés prévues par le projet de loi de finances rectificative.

Afin de compenser le coût du contentieux né de la censure de la taxe à 3 % sur les montants distribués, le Gouvernement propose d'assujettir en 2017 les sociétés réalisant respectivement un chiffre d'affaires supérieur à un milliard d'euros et supérieur ou égal à trois milliards d'euros à une contribution exceptionnelle et à une contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés. Ce sont ainsi 5,4 milliards d'euros d'impôt supplémentaire qui devront être acquittés par les grandes entreprises , dont 4,8 milliards d'euros dès 2017.

B. LE RENFORCEMENT DES ALLÉGEMENTS GÉNÉRAUX EN CONTREPARTIE DE LA SUPPRESSION DU CICE (ARTICLE 8)

Alors que le projet de loi de finances pour 2018 supprime le CICE et le crédit d'impôt de taxe sur les salaires (CITS), respectivement aux articles 42 et 43, à compter du 1 er janvier 2019, le présent article propose, à cette même date, d'une part d'instaurer un allégement permanent de cotisation patronale maladie de 6 points, en contrepartie de la suppression du CICE prévue pour 2019 et ramené à 6 % pour les revenus de 2018 ; d'autre part, un renforcement du dispositif des allégements généraux .

Ces mesures , qui prendront effet au titre des rémunérations dues pour les périodes d'activité à compter du 1 er janvier 2019 50 ( * ) , traduisent le choix du Gouvernement de concentrer les allégements de cotisations sur les bas salaires tout en modifiant radicalement le financement de l'assurance chômage, l'abandon d'un financement par les seules cotisations ouvrant ainsi la voie à l'universalisation de l'assurance chômage souhaitée par le Président de la République.

1. Un allégement de cotisation patronale maladie en contrepartie d'une suppression du CICE prévue pour 2019
a) Le CICE : un dispositif opportuniste et complexe qui n'entre pas en compte dans les comparaisons internationales

À la suite du « rapport Gallois » 51 ( * ) et en contrepartie de la suppression de la « TVA compétitivité » prévue par la précédente majorité, la troisième loi de finances rectificative pour 2012 52 ( * ) a introduit un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

Assis sur les rémunérations brutes n'excédant pas 2,5 SMIC 53 ( * ) , son taux de droit commun a été fixé à 4 % au titre des rémunérations versées en 2013, puis à 6 % à compter de 2014. Depuis 2015, un taux majoré s'applique au titre des rémunérations versées à des salariés affectés à des exploitations situées dans les départements d'outre-mer, déterminé à 7,5 % en 2015, puis porté à 9 % à partir de 2016.

Afin de palier le renoncement du précédent Gouvernement à supprimer la dernière tranche de C3S ainsi qu'il s'y était pourtant engagé, le taux de droit commun a été porté à 7 % par la loi de finances pour 2017.

Le CICE est ouvert aux entreprises imposées d'après leur bénéfice réel , qu'elles soient assujetties à l'impôt sur les sociétés ou l'impôt sur le revenu. Il s'impute sur l'impôt dû au titre de l'année durant laquelle les rémunérations servant d'assiette ont été versées. Dans le cas où le crédit d'impôt est supérieur à l'impôt dû, l'entreprise détient une créance sur l'État qui peut être imputée sur l'impôt dû au titre des trois années suivantes. À défaut d'imputation totale au terme des trois exercices suivants, l'excédent est remboursé. Cependant, les petites et moyennes entreprises (PME) au sens communautaire 54 ( * ) peuvent obtenir le remboursement immédiat de la créance de CICE.

Parallèlement, afin de compenser l'exclusion des organismes à but non lucratif, un crédit d'impôt de taxe sur les salaires a été créé par la loi de finances pour 2017, pour un coût estimé à environ 300 millions d'euros par an. Compte tenu des exonérations et des abattements applicables, cette mesure ne bénéficiait toutefois pas à de nombreuses associations.

Le choix de privilégier un crédit d'impôt à un allègement des prélèvements sur les entreprises comme le recommandait le rapport Gallois procède d'un pur opportunisme budgétaire . Il s'agissait en effet de décaler l'imputation budgétaire et comptable d'un an afin de réduire l'effet immédiat sur le solde public nominal.

Cette contingence initiale a en partie conditionné le dispositif . S'il vise à réduire les coûts salariaux unitaires de nos entreprises et ainsi à augmenter leur taux de marge, sa complexité et son caractère non pérenne obèrent une partie de ses effets.

De fait, les différentes études menées 55 ( * ) peinent à mesurer l'impact réel de la mesure sur l'emploi . Le bilan du comité de suivi publié en octobre dernier conclut ainsi à un effet globalement positif, « de l'ordre de 100 000 emplois sauvegardé ou créés sur la période 2013-2015, mais dans une fourchette large, allant de 10 000 emplois à 200 000 emplois ».

Surtout, contrairement à la « TVA compétitivité » prévue par le Gouvernement Fillon, le dispositif hybride présente plusieurs inconvénients :

- dans la mesure où il est subordonné à une demande des entreprises, de nombreuses petites entreprises n'y ont pas recours - le taux de non-sollicitation était ainsi évalué à 10 % en moyenne au titre de 2014, accentué pour les micro-entreprises 56 ( * ) ;

- n'entrant pas en compte dans les comparaisons internationales relatives aux prélèvements assis sur les salaires, il n'est guère compréhensible pour les investisseurs étrangers et n'est pas appréhendé comme un dispositif pérenne d'allègement du coût du travail.

b) Un allégement de cotisation patronale maladie en contrepartie de la suppression du CICE

Le projet de loi de finances pour 2018 propose la suppression du CICE à compter du 1 er janvier 2019, concomitamment à l'entrée en vigueur des allégements de cotisations patronales proposés par le présent article.

Cet allégement consiste en une réduction forfaitaire de 6 points de la cotisation sociale patronale d'assurance maladie pour les salariés relevant du régime général de la sécurité sociale et du régime des salariés agricoles, applicable aux salaires inférieurs à 2,5 SMIC. Actuellement de 12,89 %, le taux de cotisation maladie serait ainsi ramené à 6,89 %.

Il s'agit d'un soutien certes, pérennisé, mais qui n'en demeure pas moins réduit, dès lors que l'allégement proposé n'est que de 6 points, sur la base de la diminution du CICE proposée à l'article 42 du projet de loi de finances, de 7 % à 6 %. Cependant, à la différence du CICE et du CITS, l'allègement proposé bénéficiera à tous les employeurs, qu'ils soient ou non assujettis à l'impôt sur les sociétés ou à la taxe sur les salaires.

Votre rapporteur pour avis est favorable à la transformation du CICE en baisse de cotisations patronales , qui accorde aux entreprises une exonération équivalente au CICE tout en permettant aux entreprises d'en bénéficier de manière immédiate, et non plus l'année suivante, comme c'est le cas pour le crédit d'impôt.

Au surplus, comme le souligne l'évaluation préalable, le CICE n'était pas systématiquement interprété par les entreprises comme une baisse du coût du travail ce qui en limitait les effets sur les décisions d'embauche.

2. Un renforcement des allégements généraux bienvenu

Le présent article propose en outre un allégement renforcé de 3,9 points de cotisations sociales au niveau du SMIC (soit un total de 9,9 points), dégressif jusqu'à 1,6 SMIC.

Cet allégement porterait :

- sur les contributions d'assurance chômage, actuellement fixées au taux de 4,05 % 57 ( * ) et plafonnée à 4 PASS ;

- sur les cotisations patronales de retraite complémentaire (soit les taux de cotisation de retraite complémentaire au taux de 4,65 % et de la cotisation pour l'association pour la gestion du fonds de financement, l'AGFF, au taux de 1,20 %).

L'évaluation préalable note qu'avec la mesure proposée, dont le coût est estimé à 3,3 milliards d'euros en 2019 , « aucune cotisation ou contribution sociale payée par les entreprises ne sera plus due au niveau du SMIC, sauf la cotisation ATMP. Quelques prélèvements en dehors du champ de la protection sociale resteront dus : versement transport, apprentissage, construction, etc. ».

Ces allégements sont bienvenus. En effet, le Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements (COSAPE) a rappelé dans un récent rapport qu'« il existe en France un écart important entre le coût de la main d'oeuvre pour l'employeur et le salaire net perçu par le salarié, par rapport aux pays où le financement du système de protection sociale repose davantage sur l'impôt » 58 ( * ) .

Les cotisations patronales expliquent en partie les différences de coûts horaires moyens de la main d'oeuvre entre pays européens, comme l'illustre le graphique ci-dessous : les cotisations dues par les employeurs atteignent un niveau élevé en France, de 11,7 euros en moyenne par heure en 2016 dans le secteur privé, pour un salaire brut de 23,9 euros et in fine un coût horaire total de 35,6 euros après allégements . Comme le relève le COSAPE, « seule la Suède présente des cotisations plus élevées en valeur, mais elles restent proportionnellement plus faibles par rapport au salaire brut ». En comparaison, le coût horaire total s'élève, en Allemagne, à 33 euros.

Coût horaire de la main d'oeuvre en 2016

(en euros)

Champ : industrie, construction et services (sauf l'administration publique, la défense et la sécurité sociale obligatoire). Pour la France, le coût de la main d'oeuvre est calculé net des exonérations de cotisations sociales mais également du CICE.

Source : Eurostat

En outre, malgré les exonérations de cotisations patronales, « le coin socio-fiscal français - soit l'écart entre coût total pour l'employeur et salaire net - reste parmi les plus élevés (au niveau international) au niveau du SMIC (si l'on inclut, outre les cotisations sociales, l'impôt sur le revenu et la CSG) pour un salarié célibataire sans enfant ».

Évaluation des effets des exonérations de cotisations sociales sur l'emploi

« Toutes les évaluations de l'impact des exonérations générales de cotisations sociales patronales ont jusqu'à présent conclu qu'elles ont un effet positif sur l'emploi, même si ce fait stylisé mérite d'être nuancé.

Les résultats des différentes évaluations portant sur la période antérieure à 1998 (allégements « Juppé ») s'inscrivent dans une fourchette relativement large : entre 120 000 et 490 000 emplois auraient été créés ou sauvegardés, une fois que la mesure est montée en charge et a produit tous ses effets, pour un coût brut de 6,4 milliards d'euros en 1998 (valeur 1998). Le Conseil d'orientation pour l'emploi a ainsi été amené à considérer le chiffre de 300 000 emplois créés ou sauvegardés par les seuls allégements « Juppé » comme un ordre de grandeur raisonnable, partagé par la plupart des économistes.

L'évaluation des deux autres vagues d'allégements (« Aubry » et « Fillon ») est plus difficile à réaliser du fait de la simultanéité de la mise en place des allégements avec la réduction de la durée légale du travail dans un premier temps, puis la convergence du salaire minimum avec les GMR. La politique de réduction de la durée légale du travail a conduit à un rapide enrichissement de la croissance en emplois, chiffré à près de 350 000 postes sur la période 1998-2002 (Gubian et al. , 2004 ; Crépon, Leclair et Roux, 2004), sans pour autant que les évaluations parviennent à distinguer l'impact de l'abaissement de la durée légale de travail de celui des allégements de cotisations sociales patronales mis en place conjointement afin de contenir le coût du travail.

Il n'existe pas non plus d'évaluation des effets emploi des allégements portant sur l'ensemble de la période cumulant l'effet des trois vagues « Juppé », « Aubry » et « Fillon ». La question d'éventuels rendements décroissants des allégements - une éventuelle baisse d'efficacité des allégements en termes de création d'emplois au fur et à mesure de leur extension - n'a pas non plus été explorée ».

Source : « Les exonérations générales de cotisations », Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements (COSAPE), France Stratégie, juillet 2017

3. Les effets cumulés de ces deux mesures sur les entreprises et sur l'emploi restent à déterminer

Le choix d'une suppression du CICE au 1 er janvier 2019, accompagné de la mise en place, à cette même date, d'un double allègement de cotisations permet de maintenir ininterrompues les incitations à l'emploi mais entraîne un surcoût pour les finances publiques en 2019, année totalisant à la fois le coût associé au nouvel allégement de cotisations et celui des créances associées au CICE et au CITS de l'année 2018 .

Le choix de la suppression du CICE simultanément au déploiement du double allégement offre en réalité au Gouvernement l'occasion de doubler les incitations à l'emploi en 2019, afin de le soutenir temporairement . L'évaluation préalable de l'article 42 du projet de loi de finances note d'ailleurs que ces mesures seraient « favorables à l'activité et à l'emploi à court terme ».

En outre, ces mesures entraîneront un double effet sur les entreprises, difficile à mesurer à ce stade :

- un effet retour , la transformation du CICE en allégements de charges conduisant à élargir l'assiette de l'impôt sur les bénéfices : les cotisations sociales patronales sont en effet déductibles de cette assiette. Le gain résultant de la bascule serait ainsi intégré au sein du résultat imposable et augmenterait l'impôt sur les sociétés dû pour les entreprises qui y sont soumises 59 ( * ) . La question d'une éventuelle mesure de neutralisation de cet « effet retour » demeure, alors même que le Gouvernement propose, à l'article 41 du projet de loi de finances, une nouvelle trajectoire de réduction du taux de l'impôt sur les sociétés, selon les modalités suivantes.

Source : commission des finances

À ce titre, l'évaluation préalable de l'article 42 du projet de loi de finances précise que le dispositif d'exonérations de cotisations sociales remplaçant le CICE à compter de 2019 « présentera le même coût pour les finances publiques que le CICE lorsque son taux était de 6 % (c'est-à-dire jusqu'aux salaires versés en 2017) et entraînera, par rapport au CICE à 7 %, une baisse de coût de près de 5 milliards d'euros pour les finances publiques en régime de croisière compte tenu de la hausse des recettes d'impôt sur les sociétés qui résulte de la baisse des cotisations patronales ».

- un « effet décomposition » lié au fait que le CICE porte sur la masse salariale jusqu'à 2,5 SMIC pour 7 points aujourd'hui et 6 points seulement retenus dans la « bascule », mais 9,9 points au SMIC. De fait, pour les entreprises des secteurs dont la masse salariale est composée de peu de salariés rémunérés au SMIC mais davantage de salariés rémunérés au-delà de 2,5 SMIC, la « bascule » est défavorable . L'effet inverse se produit pour les secteurs où la masse salariale se concentre au SMIC.

Autrement dit, selon les entreprises, en fonction de leur taille (PME, ETI, grandes entreprises) et des secteurs, l'effet de la mesure proposée sera différent, compte tenu de la réduction du CICE à 6 points et d'une distinction opérée selon le niveau de salaires lors de la bascule vers des allègements de charges.

En tout état de cause, la stratégie d'allégements sur les bas salaires adoptée par le Gouvernement devrait contribuer à soutenir l'emploi , d'autant qu'elle s'accompagne d'un double effet transitoire en 2019 , résultant du nouvel allégement et du reliquat de créances de CICE qui resteraient à être imputées ou restituées en 2019. Toutefois, cette stratégie devra être complétée de mesures visant à accompagner la montée en gamme des entreprises.

C. L'AMÉNAGEMENT DU RÉGIME SOCIAL DES ACTIONS GRATUITES (ARTICLE 8 TER)

Mis en place par la loi de finances pour 2005 60 ( * ) , le dispositif des actions gratuites permet l'attribution gratuite d'actions aux mandataires sociaux et salariés afin de les fidéliser et de les intéresser à la performance de l'entreprise.

En application de l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, les employeurs sont redevables d'une contribution de 30 % sur la valeur, à la date d'acquisition, des actions attribuées gratuitement.

En effet, alors que l'article 135 de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques 61 ( * ) avait abaissé le taux de la contribution patronale de 30 % à 20 %, l'article 61 de la loi de finances pour 2017 62 ( * ) a durci le régime fiscal et social applicable aux actions gratuites, en soumettant le gain d'attribution au régime de droit commun des traitements et salaires et en portant de 20 % à 30 % le taux de la contribution patronale, sauf lorsque la distribution est réalisée par une petite et moyenne entreprise n'ayant jamais versé de dividendes 63 ( * ) .

Le rapporteur général de la commission des finances avait ainsi regretté, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2017 64 ( * ) , le retour de la contribution patronale à un niveau de 30 %, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture.

Comme il le rappelait dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2017 précité, la réforme du régime des actions gratuite , intervenue en août 2015 dans le cadre de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, ciblait tout particulièrement les PME , avec l'exonération de contribution patronale pour les PME n'ayant jamais distribué de dividendes, dans la limite du plafond de la sécurité sociale.

En outre, il avait été constaté, avant la réforme proposée par la loi « Macron », que l'attribution d'actions gratuites était restée peu développée, compte tenu du coût particulièrement élevé pour une PME de recourir à ce dispositif, notamment en raison de la contribution patronale de 30 %.

Le retour de la contribution patronale au niveau de 20 % est donc opportun. En effet, la possibilité pour les PME de recourir à ce dispositif à un coût modéré est un atout particulièrement important, dans la mesure où l'attribution d'actions gratuites leur permet d'attirer dès leur lancement des compétences fortes et des dirigeants expérimentés qu'elles ne peuvent pas encore rémunérer à leur juste valeur sous forme de salaires, compte tenu de leurs contraintes de trésorerie.

En théorie, le dispositif des actions gratuites est particulièrement pertinent pour les PME dans la mesure où :

- la distribution d'actions gratuites ne nécessite aucune contribution financière de la part des salariés , alors que le régime des stock-options implique par exemple le règlement du prix de souscription ;

- elle permet de fidéliser les salariés, compte tenu des délais minimums d'acquisition et de conservation, ainsi que de la possibilité pour l'entreprise de fixer des conditions de présence.

Le coût de la mesure, annoncé en séance publique à l'Assemblée nationale 65 ( * ) , serait de 120 millions d'euros.

D. LA CRÉATION D'UN DISPOSITIF D'EXONÉRATION GÉNÉRALISÉ DE DÉBUT D'ACTIVITÉ POUR LES CRÉATEURS D'ENTREPRISES (ARTICLE 9)

1. Conditions d'accès à l'aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise (ACCRE)
a) Une exonération de cotisations sociales pendant un an

Créée par la loi n° 79-10 du 3 janvier 1979 portant diverses mesures en faveur des salariés privés d'emploi qui créent une entreprise, l'aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise (ACCRE) vise à soutenir la création ou la reprise d'entreprises par les demandeurs d'emploi 66 ( * ) .

L'aide prend la forme d' une exonération de cotisations sociales 67 ( * ) (cotisations patronales et salariales d'assurance maladie, maternité, vieillesse, invalidité, décès et d'allocations familiales) pendant un an pour la fraction de revenu n'excédant pas 1,2 SMIC au titre de l'activité créée ou reprise . Pour les personnes relevant du régime micro-social prévu à l'article L. 133-6-8 du code de la sécurité sociale, l'aide prend la forme d'un taux de cotisations dérogatoire et progressif sur trois ans .

Les crédits destinés à compenser à la sécurité sociale le coût de l'ACCRE sont portés par l'action 03 « Développement de l'emploi » du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » de la mission « Travail et emploi ». Une dotation de 217 millions d'euros en AE comme en CP est inscrite à ce titre dans le projet de loi de finances pour 2018 .

b) Des conditions d'éligibilité modifiées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017

Pour bénéficier de l'aide, le créateur ou repreneur de l'entreprise doit en exercer effectivement le contrôle 68 ( * ) (article L. 5141-1 du code du travail).

Par ailleurs, l'article R. 5141-3 du code du travail fixe un délai de trois ans entre deux demandes d'aide : « lorsqu'une personne a obtenu le bénéfice d'une aide à la création, à la reprise d'entreprise ou pour l'exercice d'une autre profession non salariée, elle ne peut obtenir à nouveau cette aide qu'à l'expiration d'un délai de trois ans suivant la précédente décision ».

Enfin, à la suite de deux rapports de 2010 69 ( * ) et 2015 70 ( * ) appelant à la prise en compte des revenus dans les critères d'éligibilité de l'aide, l'article 6 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 71 ( * ) a institué un plafond de revenu fixé à 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS ; soit 29 421 euros en 2017) au-dessus duquel le montant de l'aide est dégressif.

Le décret du 8 mars 2017 a précisé les modalités de plafonnement en fonction du niveau de revenus des montants d'exonérations au titre de l'ACCRE. L'exonération est nulle lorsque le revenu est supérieur ou égal au plafond annuel de la sécurité sociale (soit 39 228 euros en 2017).

2. Le dispositif proposé : un élargissement de l'ACCRE à l'ensemble des créations ou reprises d'entreprise

L'article 9 du présent projet de loi de financement prévoit la mise en place, à compter du 1 er janvier 2019 , d'un dispositif d'exonération « des cotisations dues aux régimes d'assurance maladie, maternité, veuvage, vieillesse, invalidité et décès et d'allocations familiales » dont sont redevables les créateurs et repreneurs d'entreprise au début de leur activité .

Il étend ainsi le bénéfice de l'ACCRE , renommée « exonération de début d'activité de création ou reprise d'entreprise », à l'ensemble des repreneurs ou créateurs d'entreprise au titre de leur début d'activité . Cette exonération sera accordée pour une durée de douze mois .

Comme pour l'ACCRE, le bénéfice de cette « année blanche » sera soumis à une condition de revenu , identique à celle actuellement en vigueur pour l'ACCRE.

Le premier alinéa du 3° du I précise que le bénéfice de cette exonération « ne peut être cumulé avec tout autre dispositif de réduction ou d'abattement applicable à ces cotisations ». Deux exceptions sont cependant prévues pour les dispositifs inscrits aux articles L. 613-1 et L. 621-3 du code de la sécurité sociale, créés par l'article 7 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui correspondent aux allègements pérennes de cotisations sociales en faveur des indépendants et destinés à compenser la hausse de la CSG.

Enfin, le second alinéa du 3° du I de l'article 9 fixe un « délai de carence » de trois ans. Ce délai ne court cependant plus à partir de « la précédente décision » mais de « la date à laquelle elle a cessé d'en bénéficier au titre d'une activité antérieure » .

Cette évolution apparaît moins favorable pour le demandeur dans la mesure où, dans le dispositif actuel, la première période durant laquelle il a bénéficié de l'aide est prise en compte dans les trois ans, ce qui ne sera pas le cas dans le dispositif prévu par l'article 9.

3. Une mesure bienvenue mais dont la mise en oeuvre soulève des questions

Selon l'évaluation préalable de l'article 9, l'exonération prévue devrait bénéficier à 350 000 créateurs ou repreneurs d'entreprise, en plus des 250 000 bénéficiaires actuels de l'ACCRE .

Le coût de ce dispositif, qui fera l'objet d'une compensation par l'État, est estimé à 200 millions d'euros en 2019, 270 millions d'euros en 2020 et 310 millions d'euros à compter de 2021 .

Ce soutien massif apparaît de nature à favoriser les créations d'entreprises . Le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires de 2010 précité relevait ainsi que « les entreprises bénéficiaires de l'ACCRE présentent un taux de survie plus élevé que les entreprises non bénéficiaires , et ce même après trois ans, soit après la fin de l'exonération : pour les bénéficiaires, le taux de survie à trois ans est de 70 % pour les entreprises artisanales et de 66 % pour les entreprises commerciales, contre respectivement 62 % et 54 % pour les entreprises non bénéficiaires. Bien que générant des revenus plus faibles l'année de leur création, les entreprises des bénéficiaires de l'ACCRE connaissent une progression de leur revenu les rapprochant, au bout de trois ans, des niveaux des entreprises créées par les non bénéficiaires ».

Par ailleurs, la généralisation de l'exonération permettra de simplifier la vie des bénéficiaires en allégeant les procédures . Votre rapporteur pour avis estime cependant que ce dispositif comporte deux risques :

- un possible report des reprises ou créations d'entreprises envisagées en 2018 à 2019 , les repreneurs ou créateurs d'entreprise préférant attendre un an pour bénéficier de l'exonération ;

- un éventuel effet d'aubaine , l'ensemble des créations ou reprises d'entreprises ouvrant droit à l'exonération (sous réserve de respecter les conditions de revenu).

III. MESURES RELATIVES À LA FISCALITÉ COMPORTEMENTALE ET À LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE

A. LE DURCISSEMENT DU BARÊME DE LA TAXE SUR LES VÉHICULES DE SOCIÉTÉS (ARTICLE 13)

1. Les barèmes de la taxe sur les véhicules de sociétés (TVS) sont devenus obsolètes, ce qui entraîne une baisse de son rendement et nuit à son caractère incitatif

L'article 1010 du code général des impôts prévoit que les sociétés sont soumises à une taxe annuelle, dite « taxe sur les véhicules de sociétés » (TVS) , à raison des véhicules de tourisme 72 ( * ) qu'elles utilisent en France ou qu'elles possèdent et qui sont immatriculés en France.

Deux types de véhicules sont visés par cette taxe : les véhicules de tourisme ainsi que les camionnettes destinées au transport de voyageurs et de leurs bagages ou de leurs biens . En revanche, elle ne s'applique ni aux poids lourds, ni aux autobus, ni aux autocars.

Cette taxe, outre son objectif de rendement, vise à inciter les sociétés à utiliser des flottes de véhicules plus propres . Son assiette et son taux varient donc en fonction du caractère plus ou moins polluant des véhicules auxquels elle s'applique.

La première composante de la taxe sur les véhicules de sociétés dépend du taux d'émission de dioxyde de carbone du véhicule, ou, à défaut, de sa puissance fiscale (en chevaux-vapeur).

Son barème actuel n'a plus été modifié depuis 2011 et apparaît aujourd'hui dépassé en raison des progrès accomplis par les constructeurs automobiles et du renouvellement du parc automobile : la moyenne en 2016 des émissions des véhicules neufs immatriculés en France était de 110,4 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre , ce qui implique une taxation de 4 euros par an seulement par véhicule au titre de la TVS .

Sa seconde composante, introduite en 2014 et qui n'a plus évolué depuis, varie en fonction du type de motorisation du véhicule (essence ou gazole) et de l'année de sa première mise en circulation . Elle a vocation à prendre en compte les polluants atmosphériques autres que le dioxyde de carbone : oxydes d'azote, composés organiques volatils non méthaniques, particules en suspension, etc.

Là encore, ce barème est de moins en moins susceptible d'avoir un effet sur le comportement des entreprises puisque la taxation qui pèse sur les véhicules mis en circulation à compter de 2011 est relativement faible et n'a plus été revue ces trois dernières années.

La réduction progressive de l'assiette de la TVS due à l'obsolescence des barèmes de ses deux composantes s'est naturellement traduite par une baisse de son rendement , celui passant de 930 millions d'euros en 2012 à 800 millions d'euros en 2016 , soit une diminution de -14 % .

2. Des barèmes plus progressifs, un retour espéré au rendement de la TVS en 2012

Pour tenir compte des évolutions technologiques qui ont entraîné une diminution des émissions de dioxyde de carbone et des autres polluants atmosphériques des véhicules de tourisme neufs utilisés par les entreprises françaises, le présent article apporte des modifications à chacune des deux composantes de la TVS .

En ce qui concerne la première composante, l'exonération de TVS , jusque-là acquise en cas d'émissions inférieures à 50 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre ne sera plus valable qu'en dessous de 20 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre . Une tranche supplémentaire, portant sur les véhicules dont les émissions sont comprises entre 20 grammes et 60 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre, est créée.

Dans le même temps, les tarifs de l'ensemble des tranches du barème sont durcis pour le rendre plus progressif et renforcer l'incitation pour les entreprises à l'acquisition de véhicules propres , en particulier des véhicules électriques ou hybrides rechargeables.

Barème de la première composante de la taxe sur les véhicules de sociétés

Taux d'émissions de dioxyde de carbone (en grammes par kilomètre)

Tarif applicable par gramme de dioxyde de carbone (en euros)

Durcissement du barème
(en euros)

Inférieur ou égal à 20

0

-

Supérieur à 20 et inférieur ou égal à 60

1,0

+1,0

Supérieur à 60 et inférieur ou égal à 120

4,5

+0,5

Supérieur à 120 et inférieur ou égal à 140

6,5

+1,0

Supérieur à 140 et inférieur ou égal à 160

13,0

+1,5

Supérieur à 160 et inférieur ou égal à 200

19,5

+1,5

Supérieur à 200 et inférieur ou égal à 250

23,5

+2,0

Supérieur à 250

29,0

+2,0

Source : article 13 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

Pour la seconde composante de la taxe, l'ensemble de la taxation est décalé de quatre années afin de lui permettre de redevenir opérante .

Barème de la seconde composante de la taxe sur les véhicules de sociétés

Année de première mise en circulation du véhicule

Essence et assimilé

Gazole et assimilé

Jusqu'au 31 décembre 2000

70

600

De 2000 à 2005

45

400

De 2006 à 2010

45

300

De 2011 à 2014

45

100

À compter de 2015

20

40

Source : article 13 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

L'évaluation préalable prévoit que l'actualisation des barèmes des deux composantes de la TVS entraînera une hausse des recettes de cette taxe de 112 millions d'euros par an au profit des organismes de sécurité sociale et entraînera pour les entreprises un alourdissement de 28 euros par an en moyenne de la taxation de leurs véhicules de tourisme .

Si l'actualisation du barème de la TVS s'avère plutôt justifiée compte tenu de la baisse constatée de son rendement et de la diminution de son efficacité pour « verdir » les flottes automobiles des entreprises, votre rapporteur pour avis ne peut manquer de regretter que le Gouvernement s'appuie sur ce type de hausse des prélèvements sur les entreprises au lieu de chercher à mieux maîtriser les dépenses sociales .

B. MESURE RELATIVE À LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE (ARTICLE 57)

1. Les organismes de sécurité sociale, principalement l'assurance maladie, disposent d'outils de lutte contre la fraude sociale peu dissuasifs

Diverses dispositions ont été introduites lors des précédentes lois financières en vue de renforcer la lutte contre la fraude sociale , qu'elle porte sur les prestations ou sur les cotisations.

S'agissant de la lutte contre la fraude aux prestations sociales , « les montants détectés sont relativement faibles si on les rapporte au volume des prestations : 0,15 % pour la branche maladie, 0,08 % pour la branche vieillesse, 0,4 % pour la branche famille », comme l'ont rappelé nos collègues Agnès Canayer et Anne Emery-Dumas dans un rapport 73 ( * ) : en 2016, 540 millions d'euros de fraude aux prestations ont ainsi été détectés par les organismes de sécurité sociale (+ 7 % par rapport à 2015).

La sanction de la fraude aux prestations constitue le socle d'une politique efficace de lutte contre la fraude aux prestations sociales. Aux termes de l'article L. 114-9 du code de la sécurité sociale, au-delà de 4 PASS pour les prestations vieillesse et 8 PASS pour les autres prestations, les caisses ont l'obligation légale de déposer une plainte au pénal .

L'assurance maladie peut également saisir les juridictions ordinales d'une plainte devant la section des assurances d'un conseil régional d'un ordre. Ces sanctions ordinales sont particulièrement dissuasives : d'après l'évaluation préalable, en 2015, 87 % des décisions des Ordres ont consisté en l'interdiction de donner des soins aux assurés, pour une durée de un à six mois. Toutefois, ces saisines ne permettent pas aux organismes de sécurité sociale  de recouvrer les montants indûment perçus dans tous les cas. Par exemple, lorsqu'un ordre constate un abus d'actes 74 ( * ) sur saisine d'un organisme d'assurance maladie, ce dernier n'obtient pas le reversement du trop-remboursé .

Les sanctions administratives offrent quant à elles des dispositifs lisibles, rapides et directement opposables aux assurés . Or force est de constater que les outils à disposition des organismes de sécurité sociale en matière de sanctions administratives apparaissent à l'heure actuelle peu dissuasifs. Parmi ces instruments figurent :

- la pénalité administrative , prononcée par le directeur d'un organisme local d'assurance maladie 75 ( * ) , ou par le directeur de l'organisme chargé de la gestion des prestations familiales ou d'assurance vieillesse 76 ( * ) . Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées , dans la limite de 50 % de celles-ci pour la branche maladie, soit forfaitairement dans la limite de 2 fois le PMSS pour les branches maladie, famille et vieillesse. En outre, le montant de la pénalité est doublé en cas de récidive dans les trois ans .

En 2016, 3 200 pénalités financières ont été prononcées par les directeurs des CPAM, pour un montant de 7 millions d'euros.

- l' avertissement offre un instrument de gradation des sanctions, en ce qu'elle concerne les cas de fraude de moindre gravité. Il permet de tenir compte de la situation financière des assurés , mais en cas de réitération d'un comportement frauduleux dans les trois ans, constitue une première sanction autorisant le doublement du montant des pénalités financières.

L'assurance maladie a adressé en 2016 plus de 2 600 avertissements.

La possibilité de prononcer un avertissement n'existe actuellement qu'à un certain point de la procédure et seulement pour certaines fraudes commises uniquement au détriment de l'assurance maladie .

Au contraire, en cas de précarité de la situation du débiteur, seule la branche famille dispose actuellement d'une interdiction de remise de dettes en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration.

S'agissant de la lutte contre le travail dissimulé , les inspecteurs du recouvrement disposent d'un droit de communication des documents nécessaires pour accomplir leur mission : le refus d'y déférer est puni d'une amende. Ce droit de communication peut porter sur des informations relatives à des personnes non identifiées 77 ( * ) . Or, cette sanction ne peut être appliquée par les URSSAF en matière de droit de communication visant des personnes non identifiées, dans la mesure où en l'absence de communication, il n'est pas possible de déterminer une amende proportionnelle à un nombre de cotisants, assurés ou allocataires puisque ce nombre reste inconnu.

2. Un renforcement proposé de l'arsenal des outils de lutte contre la fraude aux prestations

Dans cette perspective, le présent article prévoit utilement de modifier le cadre juridique des sanctions administratives :

- d'abord, en les rendant plus dissuasives, en relevant le quantum des pénalités financières que peuvent prononcer les organismes d'assurance maladie, comme le décrit le tableau ci-dessous ;

- ensuite, en permettant aux branches familles et vieillesse de prononcer des avertissements.

En outre, deux mesures visent à éviter les pertes de recettes pour les organismes d'assurance maladie résultant des remises de dette partielle ou totale prévues en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausses déclarations, et du non reversement du trop-remboursé par les praticiens en cas de condamnation par les juridictions ordinales pour abus d'actes.

Ainsi, il est ainsi proposé que le praticien condamné par la juridiction ordinale pour abus d'acte reverse les sommes indûment perçues aux organismes de sécurité sociale. Au surplus, comme c'est actuellement le cas pour la branche famille, les remises de dettes en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausse déclaration seraient désormais interdites pour la branche famille.

DEUXIÈME PARTIE
LES MESURES RELATIVES AUX RECETTES

- 81 -

TROISIÈME PARTIE - LES MESURES RELATIVES AUX DÉPENSES

I. LES MESURES RELATIVES AUX DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE

A. LA FAIBLE AMÉLIORATION DU SOLDE DE LA BRANCHE MALADIE EN 2016 ET 2017 TRADUIT L'ABSENCE DE RÉFORMES STRUCTURELLES

Alors même que l'ONDAM est respecté chaque année depuis 2010, le solde de l'assurance maladie peine à retrouver l'équilibre. Le déficit enregistré en 2016 s'élève ainsi à 4,8 milliards d'euros en 2016, dépassant à lui seul le solde du régime général (- 4,1 milliards d'euros). La perspective d'un net redressement du solde de la branche en 2018 (- 0,8 milliard d'euros) paraît optimiste et nécessitera le cas échéant un effort considérable , dans la mesure où le rythme de consolidation marque le pas en 2017 .

Évolution du solde annuel de la branche maladie depuis 2011

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

1. En excluant l'intégration d'une ressource exceptionnelle de CSG, le solde de la branche maladie ne s'améliore que de 300 millions d'euros en 2016 par rapport à 2015

D'après la prévision de l'automne 2016, le solde de l'ensemble des régimes obligatoires d'assurance maladie et du régime général devait être de 4,1 milliards d'euros en 2016, soit une amélioration de près de 2,1 milliards d'euros par rapport à ce qui était prévu en loi de financement pour 2016. Il s'élève finalement à - 4,8 milliards d'euros, soit 700 millions d'euros de moins que la prévision actualisée de l'automne 2016. Le tableau ci-après illustre les écarts importants entre les prévisions initiales, actualisées et l'exécution de la branche maladie.

Le déficit de l'assurance maladie s'est ainsi réduit d'1 milliard d'euros par rapport à l'exécution observée en 2015.

Écarts entre la prévision et l'exécution du régime général
d'assurance maladie

(en milliards d'euros)

2015

2016

2017

2018

Exécution 2015

-5,8

Prévision LFSS 2016

-6,2

-4,7

-2,9

Prévision LFSS 2017

-4,1

-2,6

-0,9

Exécution 2016

-4,8

Prévision LFSS 2018

-4,1

-0,8

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des lois de financement de la sécurité sociale pour 2016 et 2017 et du projet de loi de financement pour 2018)

En réalité, comme démontré supra , le déficit de l'assurance maladie ne diminue pratiquement pas par rapport à 2015 si l'on retranche le produit exceptionnel de CSG perçu en 2016 : il ne s'améliore que de 300 millions d'euros, pour s'établir à 5,5 milliards d'euros.

L' ONDAM pour 2016 , dont le taux d'évolution par rapport à 2015 était de 1,8 %, a quant à lui été sous-exécuté de 40 millions d'euros par rapport à l'objectif voté en loi de financement pour 2016, pour s'établir à 185,1 milliards d'euros. Néanmoins, la dynamique de ses composantes révèle que ce résultat a une nouvelle fois été atteint grâce à une régulation infra-annuelle . La sur-exécution des dépenses de soins de ville (515 millions d'euros) a été compensée par la sous-exécution des dépenses afférentes aux établissements de santé (400 millions d'euros, dont 250 millions d'euros d'annulation de crédits à destination des établissements).

2. 2017 marquerait un net ralentissement du rythme de consolidation du solde de la branche maladie

Selon les prévisions actualisées du présent projet de loi de financement, le solde de la branche maladie s'améliorerait de 700 millions d'euros, pour atteindre - 4,1 milliards d'euros en 2017 . Pour mémoire, le précédent Gouvernement prévoyait un tel solde pour la branche maladie pour l'année 2016, en loi de financement pour 2017.

Toutefois, cette légère amélioration présente un caractère factice résultant d'une mesure artificielle en recettes . En effet, si les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base croîtraient de façon prononcée en 2017, pour partie grâce à une masse salariale du secteur privé dynamique (+ 3,3 %), l'amélioration du solde de la branche en 2017 découlerait principalement du prélèvement des ressources mises en réserve au sein de la section III du FSV.

S'agissant de la construction de l'ONDAM, il y a lieu de rappeler la « réserve de méthode sur les éléments ayant permis l'élaboration de l'objectif de dépenses en 2017 » émise par le comité d'alerte sur le respect de l'objectif national de dépenses de l'assurance maladie dans son avis 12 octobre 2016, estimant que « l'évolution de l'ONDAM est minorée , plus qu'à l'accoutumée, par des dispositions qui permettent de financer hors ONDAM certaines dépenses d'assurance maladie ».

Le fonds de financement pour l'innovation des produits de santé (FFIP)

Le fonds de financement pour l'innovation des produits de santé (FFIP) créé par l'article 95 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a pour objectif de lisser les variations de dépenses de l'assurance maladie relatives aux médicaments innovants.

En plus d'une dotation initiale de 876 millions d'euros, le FFIP reçoit chaque année une dotation de l'assurance maladie comptabilisée au sein de l'ONDAM, ainsi que l'ensemble des remises conventionnelles liées aux produits dont les dépenses sont prises en charge par le fonds, et celles des dispositifs de régulation qui leur sont liés (W et Lh).

La LFSS pour 2017 a par ailleurs fixé des règles de pilotage de ce fonds, à savoir :

- l'interdiction d'être en déficit plus de trois fois sur une période de cinq ans ;

- l'interdiction de présenter un déficit supérieur à 25 % des réserves du fonds sur un exercice donné ;

- de manière symétrique, le plafonnement des excédents du fonds à 25 % des réserves qu'il a consommées sur les exercices antérieurs, afin d'éviter un cumul d'excédents au-delà de la réserve initiale.

L'impact en 2018 de la contribution du FFIP au financement des médicaments innovants a été neutralisé pour garantir une plus grande transparence et stabilité des méthodes de construction de l'ONDAM

Source : réponse au questionnaire du rapporteur pour avis

Comme l'avait relevé le rapporteur pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 78 ( * ) , Francis Delattre, la création d'un fonds de financement pour l'innovation des produits de santé (FFIP) , destiné à lisser dans le temps l'impact des variations de dépenses entraînées par l'arrivée d'innovations thérapeutiques, a permis de sortir du champ de l'ONDAM la réalité des charges induites par les médicaments innovants . Autrement dit, les dépenses de remboursement au titre des médicaments inscrits sur la liste en sus, bénéficiant d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) ou en post-ATU, ainsi que les dépenses de rétrocession restent comptabilisées dans les comptes de la branches maladie, mais leur variation n'est plus présentée dans l'ONDAM .

En outre, 270 millions d'euros ont été pris en compte parmi les économies relatives à l'ONDAM, résultant de la seconde étape de la réduction du taux de cotisation maladie des personnels de santé exerçant en ville, pour l'aligner sur celui des travailleurs indépendants, alors même que cette mesure était sans effet sur le solde de l'assurance maladie. Aussi la Cour des comptes estime-t-elle que, corrigé de ces deux mesures, l'ONDAM progresserait en réalité de 2,4 % en 2017 79 ( * ) .

En dépit des biais de construction qui ont conduit à minorer son évolution , l'ONDAM pour 2017 serait une nouvelle fois respecté.

Réalisations prévisionnelles dans le champ de l'ONDAM en 2017

(en milliards d'euros)

Constat 2016

Base 2017 réactualisée

Objectifs 2017 rectifiés

Prévision 2017

Écart à l'objectif 2016 rectifié

Soins de ville

85,1

85,3

86,6

86,8

0,3

Établissements de santé

77,6

77,2

79,2

79,1

-0,1

Établissements et services médico-sociaux

17,9

19,4

20,1

20,1

0

Fonds d'intervention régional (FIR)

3

3,2

3,3

3,3

0

Autres prises en charge

1,6

1,6

1,6

1,7

0

ONDAM total

185,2

186,7

190,7

190,7

0

Source : annexe 7 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

Néanmoins, sa difficile maîtrise en exécution rend nécessaire plusieurs mesures de régulation proposées par le présent projet de loi de financement. La sur-exécution anticipée de 280 millions d'euros des soins de ville, découlant d'une dynamique plus forte qu'anticipée des dépenses de médicaments et d'indemnités journalières, serait partiellement compensée par une sous-exécution de 80 millions d'euros du sous-objectif des établissements de santé (article 5), selon les données retracées dans le tableau ci-dessus.

Ainsi, il serait procédé à l'annulation de crédits mis en réserve sur les sous-objectifs établissements de santé (65 millions d'euros), médico-social (100 millions d'euros) et sur le FIR (25 millions d'euros).

Alors même que les charges relevant de l'ONDAM ont été contenues par un financement en dehors de l'ONDAM de dépenses relevant pourtant de l'assurance maladie , seules des mesures de gestion et de transferts permettraient en 2017 d'assurer la tenue d'une dépense de 190,7 milliards d'euros, conformément au montant voté en loi de financement pour 2017.

En dépit de biais de construction de l'ONDAM 2017, qui témoignent de l'insincérité ayant présidé à sa définition, le rythme consolidation de la branche maladie ralentit en 2017, traduisant le pilotage à court terme ayant présidé à cette amélioration sur les derniers exercices, ne permettant pas de dégager des économies pérennes.

B. LES OBJECTIFS DE DÉPENSES DE LA BRANCHE MALADIE POUR 2018

1. Les objectifs de dépenses de la branche maladie, invalidité et maternité (article 53)

Conformément à l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale définit :

- un objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès pour l'ensemble des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale ;

- et un autre objectif pour le régime général seul .

Ces deux objectifs sont distincts de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ( ONDAM ). En effet, comme le rappelle l'annexe 7 au présent projet de loi de financement, le champ des objectifs de dépenses de la branche maladie intègre des postes de charge plus nombreux que ceux compris dans l'ONDAM. Par ailleurs, l'ONDAM est un objectif inter-branches , puisqu'il porte à la fois sur les dépenses de la branche maladie et sur celles de la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP), comme le montre le tableau ci-après.

Composition de l'objectif de la branche maladie
et de l'ONDAM pour l'exercice 2018

Objectif de la branche maladie, maternité, invalidité décès

Objectif de la branche AT-MP

Hors ONDAM

ONDAM

Hors ONDAM

A. Gestion technique

I- Prestations sociales

- part des prestations médico-sociales financées par la CNSA ;

-prestations en espèces : IJ maternité ;

- prestations invalidité décès ;

- prestations extra-légales (action sanitaire et sociale) ;

- action de prévention (hors FIR) ;

- autres prestations.

I- Prestations légales maladie maternité

- prestations en nature maladie maternité (hors part des prestations médico-sociales financée par la CNSA, hors conventions internationales) minorées des remises conventionnelles pharmaceutiques et de la participation des assurances complémentaires aux rémunérations conventionnelles forfaitaires du médecin traitant ;

- prestations en espèces (hors IJ maternité) ;

I- Prestation pour incapacité temporaire

- prestations en nature ;

- prestations en espèces suite à un accident du travail.

- prestations pour incapacité permanente.

II- Charges techniques

II- Charges techniques, dont :

- dotation ONDAM médico-social à la CNSA ;

- FIR

- prise en charge de cotisations des professionnels libéraux et en centres de santé ;

- autres transferts (ABM, ATIH, FAC dont OGDPC...)

II- Charges techniques

- Prise en charge de cotisations ACAATA (allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante)

- dotations aux fonds amiante.

III- Diverses charges

III- Diverses charges

IV- Dotations aux provisions sur les dépenses hors ONDAM

IV- Dotations aux provisions sur les dépenses hors ONDAM

V- Charges financières

V- Charges financières

B. Gestion courante

- Aide à la télétransmission.

Source : annexe 7 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

En l'absence de mesures nouvelles, le déficit de la branche maladie se creuserait de 3,8 milliards d'euros en 2018 , passant de 4,1 milliards d'euros en 2017 à 7,9 milliards d'euros en 2018 80 ( * ) . Cette dégradation résulterait de la croissance tendancielle des dépenses, et de la montée en charge de la revalorisation de la consultation médicale prévue dans la nouvelle convention médicale ainsi que du relèvement progressif du point d'indice dans la fonction publique.

Un effort de 7,1 milliards d'euros des régimes d'assurance maladie est prévu pour 2018. Le déficit s'établirait ainsi à 0,8 milliard d'euros en 2018, en baisse de 3,3 milliards d'euros par rapport à 2017 .

Pour l'année 2018, l' article 53 du présent projet de loi de financement fixe les objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès :

- pour l' ensemble des régimes obligatoires de base à 211,7 milliards d'euros , soit une progression de 2,2 % par rapport à l'objectif pour 2017 (contre 3 % entre 2016 et 2017) ;

- pour le régime général de sécurité sociale, à 210,6 milliards d'euros, soit une progression de 2,3 % par rapport à l'objectif pour 2017.

2. L'ONDAM pour 2018 est rehaussé à 2,3 % (article 54)
a) Un ONDAM s'élevant à 195,2 milliards d'euros

L'article 54 du présent projet de loi de financement prévoit un taux d'évolution de l'ONDAM de 2,3 % en 2018 . Les dépenses s'établiraient ainsi à 195,2 milliards d'euros .

La construction de l'ONDAM pour l'année à venir repose sur une hypothèse de croissance tendancielle des dépenses de 4,5 % contre 4,3 % en 2017 et 3,6 % en 2016.

Le comité d'alerte sur le respect de l'objectif national de dépenses de l'assurance maladie, dans son avis du 10 octobre 2017, note que cette accélération « concerne principalement les soins de ville, portés notamment par l'effet des mesures tarifaires de la nouvelle convention médicale et d'autres revalorisations. Les dépenses des établissements de santé resteraient dynamiques, portées par la montée en charge de nouvelles classes thérapeutiques innovantes et la disparition des financements hors ONDAM du fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) 81 ( * ) ».

Montants et taux d'évolution de l'ONDAM 2018

(en milliards d'euros)

Base 2018

PLFSS 2018

Taux d'évolution

Soins de ville

86,8

88,9

2,4 %

Établissement de santé

79,1

80,7

2,0 %

(2,2% avec FJH)

Établissements et services médico-sociaux

20,0

20,5

2,6 %

Fonds d'intervention régional (FIR)

3,3

3,4

3,1 %

Autres prises en charge

1,7

1,8

4,3 %

ONDAM total

190,8

195,2

2,3%

Source : annexe 7 au projet de loi de financement pour 2018

En apparence, l'effort à réaliser en 2018 peut ainsi paraître similaire à celui consenti en 2017 .

Comparaison de l'évolution tendancielle de l'ONDAM et du taux d'évolution présentés en projet de loi de financement pour 2017 et pour 2018

(en %)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 et pour 2018

Or, comme le souligne le Haut Conseil des finances publiques dans son avis du 27 septembre dernier, « l'effort d'économies devrait être accru par le fait que certaines mesures facilitant artificiellement le respect de l'ONDAM en 2017 ne seraient pas reconduites en 2018 » 82 ( * ) .

En effet, la mise en oeuvre du fonds de financement de l'innovation pharmaceutique a permis de sortir de l'ONDAM le coût des traitements innovants, contribuant non seulement à réduire la portée de l'outil de pilotage de la dépense d'assurance maladie que doit constituer l'ONDAM mais aussi à afficher le respect d'un ONDAM pourtant déjà rehaussé à 2,1 %.

Aussi le relèvement de l'ONDAM en 2018 a-t-il été rendu inévitable par le pilotage défaillant et la comptabilisation de fausses économies en 2017 .

Le comité d'alerte relève notamment que « malgré le desserrement du taux de progression de l'ONDAM, les dépenses d'assurance maladie sont dynamiques, sous l'effet notamment de la forte croissance des dépenses de médicaments liées au bouleversement des prises en charge liées aux thérapies ciblées et à l'immunothérapie ».

En conséquence, il recommande de mettre en réserve « un volume de crédits suffisant, le cas échéant au-delà du plancher fixé à 0,3 % par la loi de programmation des finances publiques , afin de faire face à tout dérapage des dépenses en cours d'année ».

Modification techniques au mécanisme de clause de sauvegarde (taux L)

Depuis la réforme introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, la clause de sauvegarde constitue un mécanisme de régulation des dépenses de médicaments.

Visant à inciter les entreprises pharmaceutiques à signer une convention avec le Comité économique des produits de santé (CEPS) et à accepter certaines baisses de prix ou des remises sur les quantités de produits de santé, auquel cas celles-ci peuvent être exonérées du paiement des contributions, elle est déclenchée par un « taux L » correspondant à un taux de croissance cible du chiffre d'affaires.

Alors que le taux L , de - 1 % en 2015 et 2016, s'appliquait sur une assiette incluant à la fois les médicaments vendus dans les officines et ceux délivrés dans les établissements hospitaliers, l'article 30 de la loi de financement pour 2017 a « scindé » ce taux en deux mécanismes de régulation distincts , afin de tenir compte de la dynamique contrastée des dépenses des deux secteurs (- 0,5 % pour la dépense issue des officines contre une croissance de 4,5 % pour les médicaments dispensés par les établissements hospitaliers).

Pour 2017, le taux Lv pour les médicaments d'officine a ainsi été fixé à 0 %, et le taux Lh pour l'hôpital à 2 %.

En outre, les modalités de calcul du déclenchement des taux Lv et Lh ont été modifiées, en prévoyant que les clauses de sauvegarde reposent désormais sur l'évolution des chiffres d'affaires des entreprises avant déduction faite des remises consenties par les laboratoires au titre des négociations conclues avec le CEPS.

L' article 14 du présent projet de loi de financement prévoit deux modifications :

- les taux Lv et Lh sont fixés respectivement à 0 % et à 3 % pour l'année 2018 ; l'augmentation du taux relatif s'appliquant aux médicaments délivrés dans les établissements hospitaliers tient compte de l'arrivée de nouvelles innovations, en particulier en cancérologie, qui seront principalement dispensées par ces derniers ;

- la législation existante ne prévoit pas de mécanisme permettant de prendre en compte le circuit de distribution d'un médicament - par exemple, lorsqu'un médicament est rétrocédé par les pharmacies d'usage intérieur (PUI) vers une dispensation par les officines de ville. Or, selon l'évaluation préalable, « le changement de circuit d'un médicament ayant un fort impact budgétaire pourrait entraîner le déclenchement de l'une des clauses, alors même que l'augmentation constatée des dépenses pour l'un des deux secteurs ne correspondrait pas à une réelle augmentation de la consommation globale du médicament ». Il est donc proposé, lorsqu'un médicament change de circuit de distribution au cours d'une année, de modifier les assiettes des taux Lv et Lv de l'année précédente afin de réallouer les dépenses totales pour le médicament entre les deux champs proportionnellement aux dépenses constatées sur l'année en cours.

Source : commission des finances du Sénat

b) Les principales mesures d'économies relatives à l'ONDAM pour 2018

Afin de respecter le rythme de progression de 2,3 % de l'ONDAM tout en tenant compte de l'évolution tendancielle des dépenses de santé de 4,5 %, un montant de 4,2 milliards d'euros d'économies est nécessaire , contre 4,1 milliards d'euros en 2017 et 3,4 milliards d'euros en 2016.

Structuration de l'offre de soins

1 485

Structurer des parcours de soins efficients

250

Améliorer la performance interne des établissements de santé et médico-sociaux

1 215

Optimisation des achats et autres dépenses

575

Liste en sus et autorisation temporaire d'utilisation

390

Rééquilibrage de la contribution de l'ONDAM à l'OGD (1)

200

Améliorer la performance interne des établissements médico-sociaux

50

Pertinence et efficience des produits de santé

1 490

Baisse de prix des médicaments

480

Promotion et développement des génériques

340

Biosimilaires

40

Baisse des tarifs des dispositifs médicaux

Maîtrise des volumes et de la structure de prescription des médicaments et dispositifs médicaux

Remises

100

320

210

Pertinence et qualité des actes

335

Maîtrise médicalisée

110

Action de pertinence et adaptations tarifaires des actes de biologie, imagerie et autres actes médicaux en ville et à l'hôpital

2225

Pertinence et efficience des prescriptions d'arrêts de travail et de transports

240

Transports

75

Indemnités journalières

165

Contrôle et lutte contre la fraude

90

Autres mesures

545

Actualisation du forfait journalier hospitalier

200

Participation des organismes complémentaires au financement de la convention médicale

100

Pertinence et gestion dynamique du panier de soins

180

Évolution des cotisations des professionnels de santé

85

TOTAL

4 165

Mesures d'économies relatives à l'ONDAM 2018

(en millions d'euros)

(1) L'objectif global de dépenses (OGD) est composé d'une partie de l'ONDAM médico-social, augmenté d'une part des recettes propres de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

Source : annexe 7 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

Les mesures d'économies du premier projet de loi de financement du quinquennat reposent sur six axes , récapitulés dans le tableau ci-avant et préfigurant la nouvelle stratégie nationale santé en cours d'élaboration .

Comparaison des axes des stratégies d'économies relatives à l'ONDAM
(PLFSS 2015-2017 et PLFSS 2018)

Axes d'économies des PLFSS 2015-2017

Axes d'économies du PLFSS 2018

Efficacité de la dépense hospitalière

Structuration de l'offre de soins

Virage ambulatoire et adéquation de la prise en charge en établissement

Produits de santé et promotion des génériques

Pertinence et efficience des produits de santé

Pertinence et bon usage des soins

Pertinence et qualité des actes

Pertinence et efficience des prescriptions d'arrêts de travail et de transports

Contrôle et lutte contre la fraude

Autres mesures

Source : commission des finances du Sénat

Ce « plan » d'économies s'inscrit dans la continuité du « plan ONDAM », mis en oeuvre entre 2015 et 2017, et apparaît largement similaire , tant le quantum d'économies proposé que dans la répartition des efforts demandés aux acteurs .

Aussi trois de ces axes présentent-ils de fortes similitudes avec ceux du précédent Gouvernement , au premier rang desquels figure l'axe relatif aux produits de santé , portant un montant d'économies égal à celui prévu en loi de financement pour 2017 (1,4 milliard d'euros) . En outre, la plupart des mesures sont identiques (baisse des prix des médicaments, promotion et développement des génériques, biosimilaires, tarifs des dispositifs médicaux).

Les économies réalisées sur l'ONDAM ces dernières années ont très largement porté sur le médicament, par le développement des génériques et des politiques actives de baisses de prix. Or, votre rapporteur partage le constat du Conseil d'analyse économique 83 ( * ) , selon lequel « utiliser le médicament comme source d'économie n'aura qu'un temps. Ce n'est d'ailleurs pas souhaitable à terme », à l'heure où de nombreuses innovations médicales devraient voir le jour dans le domaine du médicament.

En outre, avant même qu'une nouvelle stratégie de santé ne soit élaborée, le programme d'économies présenté pour 2018 repose en partie, comme l'année précédente, sur la comptabilisation de fausses économies .

Le comité d'alerte note ainsi dans l'avis précité, qu'« une partie des économies pour les crédits de l'ONDAM résulte de la mobilisation d'autres sources de financement ». Ainsi :

- l'augmentation du forfait journalier hospitalier (FJH) est intégrée comme une mesure d'économie, contribuant à réduire de 200 millions d'euros les crédits de l'ONDAM destinés aux établissements de santé ; or, il s'agit d'une recette supplémentaire pour les établissements de santé ;

- la participation des organismes complémentaires au financement de la convention médicale diminue de 100 millions d'euros les crédits de l'ONDAM de soins de ville ; en réalité, l'augmentation de la participation des organismes complémentaires au financement des nouveaux modes de rémunération proposée à l'article 15 du présent projet de loi de financement apporte une recette supplémentaire de 250 millions d'euros en 2018 à la CNAMTS ;

- comme en 2017, pour un montant en baisse de 13 % à 200 millions d'euros, la réduction de la contribution de l'ONDAM aux dépenses des établissements médico-sociaux n'est que le fruit d'une débudgétisation liée à un prélèvement sur les réserves de la CNSA.

Après déduction de ces ressources supplémentaires apportées au financement de dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM, le plan d'économies relatives à l'ONDAM pour 2018 s'élève à 3,6 milliards d'euros .

C. UNE RÉDUCTION DU DÉFICIT DE LA BRANCHE MALADIE REPOSANT DAVANTAGE SUR UNE CROISSANCE DES RECETTES QUE SUR DES RÉFORMES D'ENVERGURE

Le relèvement de l'ONDAM de 2,1 % à 2,3 % entre 2017 et 2018 constitue un mauvais signal dans le cadre d'une stratégie de consolidation de la branche maladie censée reposer sur des réformes structurelles en dépenses et de l'annonce d'un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale d'ici 2020 . Au surplus, cette trajectoire s'inscrit dans le contexte d'un déficit persistant de la branche maladie, représentant une part de plus en plus importante du déficit agrégé du régime général et du FSV .

Part du déficit de la branche maladie dans le solde consolidé du régime général et du FSV

(en %)

Source : commission des finances, d'après l'annexe B au présent projet de loi de financement

Néanmoins, le relèvement du taux d'évolution de l'ONDAM apparaissait incontournable, au regard des mesures prises par le précèdent Gouvernement, pesant sur la dynamique de la dépense en 2018 mais également sur les années suivantes 84 ( * ) . Compte tenu de cette évolution tendancielle, et des économies croissantes qui devront en découler, votre rapporteur appelle de ses voeux un pilotage renforcé des mesures d'économies relatives à l'ONDAM , afin de s'assurer de leur caractère effectif et de limiter les mesures de régulation infra-annuelle aux dépens des établissements de santé et médico-sociaux.

1. Une trajectoire de solde de la branche maladie reposant principalement sur des recettes dynamiques

Le graphique ci-dessous illustre l'évolution prévisionnelle comparée des dépenses et des recettes de la branche maladie d'ici 2021.

Évolution des recettes et des dépenses des régimes obligatoires de base d'assurance maladie

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe B aux projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 et 2018)

Les hypothèses macroéconomiques présentées supr a qui sous-tendent la trajectoire de retour à l'équilibre des régimes de sécurité sociale d'ici 2020, en particulier concernant le dynamisme de la masse salariale du secteur privé, donnent à voir une croissance solide des prévisions de recettes (+ 9,4 % entre 2018 et 2021), plus rapide que celle des dépenses (+ 6,7 %).

En 2018, la branche maladie bénéficie ainsi d'un gain en recettes important, découlant de l'augmentation du taux de CSG et de la suppression des cotisations salariales maladie, compensé pour un montant moindre par l'ajustement de la fraction de TVA qui lui est affectée.

Évolution du solde de la branche maladie du régime général prévue pour 2018 par rapport au solde tendanciel

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'annexe 9 au présent projet de loi de financement)

L'amélioration du solde de la branche maladie ne saurait reposer exclusivement sur des mesures en recettes. Aussi la stratégie de pilotage de l'ONDAM gagnerait-elle à être consolidée.

2. La comptabilisation de fausses économies fragilise la crédibilité de la stratégie de pilotage de l'ONDAM

Au regard de l'impact attendu des mesures antérieures sur la dynamique des dépenses d'assurance maladie ces prochaines années, des efforts d'économies en dépenses considérables sont attendus de la branche maladie.

Alors même que la Cour des comptes dénonce les « faiblesses de méthode » 85 ( * ) qui entachent la construction des hypothèses d'évolution tendancielle des dépenses, que votre rapporteur pour avis tient à nuancer eu égard aux éléments fournis à ce sujet au sein de l'annexe 7 au présent projet de loi de financement, d'importantes marges de progression existent s'agissant de la sincérité et du chiffrage des économies relatives à l'ONDAM.

En effet, la comptabilisation de fausses économies nuit à la sincérité de la construction de l'ONDAM autant qu'elle conduit à différer les efforts ; le caractère lacunaire du chiffrage des économies proposées et l'insuffisance du suivi de leur réalisation ex post produit les mêmes effets.

Comme le relève le comité d'alerte dans son avis précité, « indépendamment des économies pour l'ONDAM qui résultent de la mobilisation d'autres sources de financement, les économies à réaliser pour respecter l'ONDAM ou éviter une détérioration de la situation des hôpitaux sont importantes et, pour certaines, encore incertaines ».

La mise en oeuvre de la recommandation de la Cour des comptes de distinguer les économies stricto sensu , « soit les mesures réduisant de façon effective la dépense ou limitant la progression de l'évolution tendancielle » des autres mesures « qui participent à la construction de l'ONDAM mais repoussent la recherche d'économies réelles tout en majorant l'effort à effectuer ultérieurement pour les mettre en oeuvre » 86 ( * ) constituerait une avancée bienvenue.

Votre rapporteur pour avis salue la mise en place d'une charte de l'ONDAM annexée à la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022 , qui pourra permettre d'évaluer l'évolution de l'ONDAM à périmètre constant.

En tout état de cause, à l'heure où des efforts d'ampleur sont attendus de la branche maladie, les mesures « d'affichage », consistant soit à exclure des dépenses dynamiques du périmètre de l'ONDAM soit à mobiliser des transferts de recettes en provenance d'autres branches ne sauraient constituer des solutions à la hauteur des enjeux.

Une nouvelle stratégie de pilotage de l'ONDAM semble ainsi indispensable, d'autant plus que l'article 9 du projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022 fixe un taux d'évolution de l'ONDAM de 2,3 % par an entre 2018 et 2020.

D. LES PRINCIPALES MESURES NOUVELLES RELATIVES AUX DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE

Le volet santé du Grand plan d'investissement

Avec l'accélération de la transition écologique et l'ancrage de la compétitivité sur l'innovation, la modernisation du système de santé constitue l'une des six priorités du plan d'investissement, dont la préfiguration a fait l'objet d'une mission confiée à Jean Pisani-Ferry, qui a rendu ses conclusions en septembre 2017.

Le volet du Plan d'investissement consacré à la transformation du système de santé et de cohésion sociale a pour but d'intégrer les nouvelles technologies et de répondre aux enjeux des territoires (accès aux soins, prévention, pertinence des prises en charge). Les leviers identifiés pour le quinquennat sont :

- la numérisation du système de santé (1 milliard d'euros) ;

- le développement des maisons de santé pluri-professionnelles et des centres de santé (400 millions d'euros) ;

- la diffusion de la recherche médicale (500 millions d'euros issus du programme d'investissement d'avenir) ;

- la modernisation et le renouvellement des équipements techniques et immobiliers hospitaliers (3 milliards d'euros).

L'assurance maladie contribuerait au financement du programme à travers une mobilisation de l'ONDAM sur le quinquennat et en particulier du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) et des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (MIGAC).

Source : annexe 7 au présent projet de loi de financement

1. Un cadre d'expérimentations pour l'innovation dans le système de santé (article 35)
a) Un cadre juridique facilitant le déploiement de deux types d'expérimentations

Dans son rapport sur l'évolution des charges et des produits de l'Assurance maladie 87 ( * ) , la CNAMTS proposait la création d'un fonds national de soutien à la diffusion de l'innovation organisationnelle en santé et la définition d'un cadre juridique permettant de déroger au droit commun en ce qui concerne les modalités de financement et d'organisation , ou le partage de compétences entre acteurs. L'Assurance maladie recommandait également la mise en place d'un dispositif d'accompagnement des expérimentations sélectionnées par le fonds, afin que leur généralisation se déroule dans les meilleures conditions, et le déploiement d'un système d'évaluation spécifique de ces expérimentations.

Le présent article reprend la philosophie de ces propositions en permettant de lancer, pour une durée qui ne pourrait excéder cinq ans , deux types d'expérimentations :

- d'une part, visant à déployer des innovations organisationnelles , afin d'améliorer la prise en charge et le parcours des patients, l'efficience du système de santé et l'accès aux soins ;

- d'autre part, visant à promouvoir la qualité et la pertinence de la prise en charge et de la prescription des produits de santé.

Cette initiative part du constat que les nombreuses expérimentations initiées, dans le cadre des précédentes lois de financement 88 ( * ) , pâtissent d'un pilotage éclaté . La mesure proposée instaure ainsi un cadre juridique général auquel pourront être intégrées les expérimentations d'ores et déjà lancées, et permettrait de capitaliser sur les innovations les plus probantes.

Les expérimentations « organisationnelles » , avec une possibilité de déroger aux règles de financement de droit commun , pourraient ainsi faire l'objet de « test » afin d'envisager la pertinence d'un déploiement national. Trois expérimentations sont déjà envisagées :

- l'ouverture d'un intéressement collectif versé au groupement d'acteurs en sus de la tarification de droit commun, sur la base d'objectifs de qualité et de la réalisation d'économies ; cette organisation serait adaptée aux patients atteints de maladies chroniques nécessitant l'intervention de plusieurs professionnels ;

- le paiement intégré à l'épisode de soins , pour un panier de services déterminé à partir de « bonnes pratiques » ; ce mode d'organisation correspondrait aux prises en charge nécessitant une coordination ville-hôpital ;

- une rémunération collective alternative à une partie des rémunérations classiques pour les structures pluri-professionnelles, permettant de valoriser les activités de prévention.

S'agissant de la qualité et de la pertinence des prescriptions , les expérimentations pourraient prévoir des évolutions concernant les conditions de prise en charge des médicaments et produits onéreux au sein des établissements de santé, ou encore des mesures incitatives pour les professionnels de santé concernant la pertinence des prescriptions.

b) La création d'un fonds pour l'innovation du système de santé destiné à financer ces innovations

Le financement des expérimentations et leur évaluation seraient pris en charge par un fonds pour l'innovation du système de santé, géré par la CNAMTS et bénéficiant d'une dotation de l'assurance maladie. Le coût d'amorçage s'élèverait à 10 millions d'euros en 2018 , « correspondant à 30 millions d'euros de financements spécifiques, dont 20 millions d'euros se substitueront à des prises en charge classiques » 89 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis est favorable à la mise en place d'un cadre juridique visant la sécurisation et l'accélération des innovations organisationnelles en santé . Le lancement d'expérimentations portant sur l'organisation et la rémunération des actes et séjours, qui pourront concerner aussi bien les soins de ville que l'hôpital ou le secteur médico-social, est bienvenu, d'autant qu'il fait la part belle aux initiatives des professionnels et des établissements de santé .

À compter de 2019, la dotation de l'assurance maladie augmenterait mais la mesure serait autofinancée et dégagerait des économies à partir de 2020, estimées à 20 millions d'euros en 2020 et 40 millions d'euros en 2021 .

D'une part, la perspective d'un autofinancement dès 2019 apparaît très optimiste . D'autre part, si des précisions auraient été appréciées quant au chiffrage des économies attendues, un tel dispositif , qui tente de remédier à l'organisation « en silos » du système de santé, ne pourra que s'inscrire dans le cadre d'une stratégie de moyen terme sur l'ensemble des dépenses de l'assurance maladie.

2. L'amélioration de la pertinence et la qualité de soins : renforcer l'intéressement des établissements de santé à la qualité des soins (article 39)

L'article 81 de la loi de financement pour 2016 a unifié l'ensemble des dispositifs contractuels visant le recours à des soins de qualité au sein d'un contrat d'amélioration de la qualité et de l'efficience des soins (CAQES), conclu entre les établissements de santé, les agences régionales de santé (ARS) et l'assurance maladie. Ce contrat constitue le socle de l'amélioration des pratiques en matière de régulation des prescriptions de médicaments, de pertinence et de sécurité des soins.

Applicable à compter du 1 er janvier 2018, le CAQES comporte :

- un volet obligatoire , relatif à l'usage pertinent des médicaments, des produits et des prestations de soins.

- des volets additionnels facultatifs , comportant des dispositions dépendant des objectifs fixés dans le cadre du dialogue annuel entre l'ARS et l'établissement et du plan pluriannuel de gestion du risque et d'efficience du système de soins.

Le décret du 20 avril 2017 90 ( * ) a fixé les modalités d'application de ce nouveau contrat tripartite. Aux termes de l'article D. 162-16 du code de la sécurité sociale, le contrat doit comporter les modalités de détermination des sanctions et des intéressements :

- la réalisation des objectifs du contrat fait ainsi l'objet d'une évaluation annuelle par l'ARS et l'assurance maladie, qui peut donner lieu à sanction ;

- un intéressement est possible dans le cadre des engagements pris au sein des volets additionnels relatifs au transport et à pertinence des soins.

D'après les informations transmises par la direction de la sécurité sociale, le CAQES est actuellement en cours de déploiement : aucune sanction n'a été mise en oeuvre à ce jour.

Le présent article propose de créer un dispositif d'intéressement dédié et modélisé, afin de récompenser la tenue des objectifs fixés dans le contrat et ainsi, d'impulser une incitation forte vers la recherche d'une qualité des soins et des prescriptions.

En pratique, il est proposé que le fonds d'intervention régional (FIR) soit abondé chaque année des économies supplémentaires procurées par l'exécution des contrats, et péréqué par région en fonction des économies réalisées . Les ARS pourraient ainsi verser un intéressement, réparti selon des critères définis dans le CAQES, sur l'ensemble des volets.

Un établissement atteignant les objectifs fixés pourrait donc percevoir un intéressement sous la forme d'une dotation du FIR, dans la limite de 30 % des économies constatées .

Cette mesure, consistant à allouer un intéressement aux établissements de santé réalisant des économies, par exemple, sur les médicaments ou les achats groupés, constitue une avancée intéressante , permettant de faire reposer le dispositif d'intéressement sur un même vecteur, le FIR , pour l'ensemble des volets du CAQES. En outre, elle constitue un mécanisme de mobilisation plus incitatif que le dispositif de sanctions.

L'évaluation préalable du présent article précise que l'enveloppe d'amorçage serait dotée de 25 millions d'euros pour 2019 , dans le cadre de l'évaluation des CAQES 2018. Les économies attendues, qui seraient comptabilisées sur le sous-objectif établissements de santé de l'ONDAM, paraissent toutefois surévaluées : il est prévu que l'intéressement produirait 10 % des économies de maîtrise médicalisée fixées. Celles-ci s'élevant à 250 millions d'euros en 2017, le montant d'économies serait de 25 millions d'euros par an , dès 2018, première année d'effet des contrats bénéficiant de l'intéressement en 2019 - et donc, autant en 2019, déduction faite de l'enveloppe d'amorçage, puis 50 millions d'euros en 2020.

3. La modernisation du financement du système de santé : la prolongation du dispositif transitoire de financement des établissements de SSR (article 48)

L'activité de soins de suite et de réadaptation (SSR) a « pour objet de prévenir ou de réduire les conséquences fonctionnelles, physiques, cognitives, psychologiques ou sociales des déficiences et des limitations de capacité des patients et de promouvoir leur réadaptation et leur réinsertion » 91 ( * ) .

L'article 78 de la loi de financement pour 2016 a introduit un nouveau modèle de financement , commun aux secteurs public, privé non lucratif et privé lucratif, reposant sur une dotation modulée à l'activité ( DMA ) comprenant :

- une fraction fixe, fondée sur l'activité historique des établissements, leur assurant un niveau de ressources minimal ;

- une fraction tarifée à l'activité , permettant de valoriser les établissements développant leur activité tout en optimisant leurs coûts.

L'article 82 de la loi de financement pour 2017 a adapté la mise en oeuvre de la réforme du financement des établissements de SSR, en prévoyant une entrée en vigueur progressive de la réforme : une année de transition , où les modalités anciennes seraient combinées avec la dotation nouvelle, était ainsi prévue entre le 1 er mars 2017 et le 28 février 2018. Cette période transitoire devait, d'après l'évaluation préalable du présent article, permettre de finaliser les « évolutions techniques nécessaires ».

Le présent article propose une prolongation de la période transitoire, de deux ans , jusqu'au 31 décembre 2019, afin de prendre en compte ces contraintes techniques, notamment l'adaptation nécessaire des systèmes d'information.

Cet aménagement induit une charge supplémentaire pour l'exercice 2018, estimée à 5 millions d'euros par l'évaluation préalable annexée au présent projet de loi de financement.

Ce décalage de la pleine entrée en vigueur du nouveau modèle de financement des établissements de SSR n'est pas surprenant . Votre commission des finances avait souligné, lors de l'examen du projet de loi de financement pour 2016, le caractère lacunaire de l'évaluation préalable de la réforme du financement des activités de SSR. Elle avait adopté un amendement demandant au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport étudiant l'impact de la réforme, d'une part, sur l'équilibre financier des établissements de santé et, d'autre, sur les finances publiques, dans les six mois suivant l'adoption du présent projet de loi, amendement qui avait finalement été retiré.

II. LES MESURES RELATIVES À LA BRANCHE VIEILLESSE

A. UN SOLDE EXCÉDENTAIRE DE LA BRANCHE VIEILLESSE POUR LA TROISIÈME - ET DERNIÈRE - ANNÉE CONSÉCUTIVE

1. La branche vieillesse : une dégradation continue du solde jusqu'en 2021

D'après les prévisions actualisées du présent projet de loi de financement, l'excédent du régime général d'assurance vieillesse atteindrait 1,3 milliard d'euros en 2017 . Tous régimes confondus, la branche vieillesse serait en excédent de 1,5 milliard d'euros cette année.

Cette amélioration prolonge le retour à un solde positif de 900 millions d'euros constaté en 2016 , qui a d'ailleurs marqué le premier exercice excédentaire de la branche vieillesse depuis onze ans .

Évolution du solde agrégé de la branche vieillesse et du FSV

(en milliards d'euros)

Source : annexes B au projet de loi de financement pour 2018

L'amélioration du solde entre 2016 et 2017 découle de deux facteurs :

- la poursuite du ralentissement des dépenses (+ 1,7 %, contre 1,9 % en 2016 et 3,2 % en 2015), grâce d'une part aux effets de la réforme des retraites de 2010 92 ( * ) , le relèvement des âges de départ sans décote et à taux plein ayant généré un creux de départs en retraite important en fin d'année 2016 ; d'autre part, à la faible revalorisation du montant des pensions de retraite en moyenne annuelle (+ 0,2 % en 2017), dans un contexte d'inflation faible ;

- une hausse du produit des cotisations sociales (+4 %), soutenues par une progression dynamique de la masse salariale et par une nouvelle hausse de taux de cotisations déplafonnées résultant de la réforme des retraites de 2014.

Cet excédent traduit les derniers effets de la réforme engagée en 2010 . D'après les informations transmises par la direction de la sécurité sociale, la loi de 2010 a eu un impact positif estimé à 17,3 milliards d'euros par rapport à une évolution à législation inchangée , soit un montant légèrement inférieur à l'évaluation initiale de l'étude préalable (18,6 milliards d'euros).

La dégradation du solde de la branche vieillesse prévue pour 2018 révèle ainsi qu'au-delà des effets structurels liés à la réforme du système de retraite précitée, une partie de l'amélioration enregistrée en 2016 et 2017 résulte de motifs conjoncturels , portant sur les dépenses, en raison d'une inflation faible, et sur les recettes.

Ainsi, en 2018, le solde de la branche vieillesse du régime général se dégraderait de 1,1 milliard d'euros par rapport à 2017, en raison d'un effet de ciseaux :

- une forte hausse des dépenses de la branche , résultant de la fin des effets du décalage de l'âge légal de départ en retraite , celui-ci étant porté à 62 ans pour la première génération entière, née en 1956 ; surtout, le retour d'une inflation plus soutenue signe également une revalorisation des pensions en moyenne annuelle plus élevée ; de façon plus générale, les dépenses d'assurance vieillesse des régimes obligatoires de base de sécurité sociale augmenteraient de 2,3 % entre 2017 et 2018 ;

- une diminution des recettes , qui résulte pour partie de la fin des hausses de taux de cotisations prévues par la loi retraite de 2014 : les produits de cotisations suivraient désormais la progression de la masse salariale du secteur privé ; les transferts reçus par la branche vieillesse diminuent de façon significative à la suite de la réforme du financement du minimum contributif prévue en loi de financement pour 2017 (cf. infra ).

La réforme du minimum contributif par la loi de financement pour 2017

Depuis la loi de 2010 portant réforme des retraites, le FSV finance une partie du minimum contributif (MICO), qui s'adresse aux travailleurs relevant du régime général, du régime des salariés agricoles et du régime social des indépendants ayant cotisé pendant tout ou partie de leur carrière sur la base de revenus modestes. Il s'ajoute à la pension du bénéficiaire, dans la limite d'un plafond fixé à 1 135,73 euros depuis le 1 er janvier 2016. Son coût total est de 7 milliards d'euros , dont 3,5 milliards d'euros financés par le FSV, pour un nombre stable de 6 millions de bénéficiaires .

La loi de financement pour 2011 a prévu le versement par le FSV d'un montant forfaitaire de 3,5 milliards d'euros , correspondant à la moitié du coût total , en direction des régimes de base de la branche vieillesse. Ensuite portée à 3,9 milliards d'euros par la loi de financement pour 2012, puis reconduite lors des trois exercices suivants, cette contribution est devenue proportionnelle à compter du 1 er janvier 2016 .

Ainsi, avant la réforme de la loi de financement pour 2017, le FSV versait une contribution aux régimes à hauteur d'une fraction du coût réel du dispositif, fixée par décret, correspondant au minimum à 50 % du total .

La loi de financement pour 2017 a prévu de revenir progressivement sur la prise en charge par le FSV d'une partie des dépenses au titre du MICO .

En 2017, le transfert d'un milliard d'euros vers les régimes au titre de cette dépense a ainsi été prévu, pour un transfert intégral effectif en 2020 . Des réaffectations de recettes ont permis de compenser l'effet de cette mesure.

Source : commission des finances du Sénat

La trajectoire d'évolution du solde de la branche vieillesse du régime général (cf. supra ) donne à voir une dégradation continue jusqu'en 2021, date à laquelle le déficit atteindrait 3 milliards d'euros . Les charges nettes des régimes d'assurance vieillesse augmenteraient de 2,5 % en 2019 et 2,6 % en 2020, mais la reprise de l'inflation renforcerait le coût des revalorisations, à compter de 2019.

Cette trajectoire diverge de celle présentée en projet de loi de financement pour 2017, prévoyant une accentuation des excédents, devant atteindre 1,1 milliard d'euros en 2020 pour la branche vieillesse du régime général. La Cour des comptes mentionne un écart provenant « pour partie de transferts prévisionnels de recettes entre branches qui ont été intégrés aux trajectoires pluriannuelles de la loi de financement pour 2017 sans être portés à la connaissance du Parlement (pour 3 Md€ au total au bénéfice de la branche vieillesse à l'horizon 2020, répartis à parts égales entre les branches maladie, AT-MP et famille) » 93 ( * ) . Cette analyse témoigne de l'insincérité des projections présentées au Parlement par le précédent Gouvernement .

Projections des soldes de la branche vieillesse du régime général
entre 2018 et 2020

(en milliards d'euros)

2018

2019

2020

LFSS 2017

0,6

0,7

1,1

COR 2017

-0,7

-2,1

-3,5

PLFSS 2018

0,2

-0,8

-2,0

Source : commission des finances du Sénat, d'après la loi de financement pour 2017, le rapport du Conseil d'orientation des retraites de juin 2017 et les prévisions du présent projet de loi de financement

De façon générale, le Gouvernement a annoncé la mise en oeuvre au cours du quinquennat d'une réforme « systémique » visant à « faire en sorte qu'un euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous » 94 ( * ) .

Toutefois, alors qu'il avait été indiqué lors de la campagne présidentielle que cette dernière ne se traduirait pas par une modification de l'âge de départ à la retraite 95 ( * ) , la dégradation de la situation financière du système de retraite mise en évidence par le Conseil d'orientation des retraites (COR) dans son rapport annuel de juin 2017 96 ( * ) pourrait changer la donne. Le solde financier resterait ainsi déficitaire jusqu'en 2040 dans tous les scénarios économiques, alors qu'il devait dégager des excédents significatifs à partir du milieu des années 2020 dans deux des cinq scénarios d'après le précédent exercice de projection. Cette évolution défavorable tient principalement à la révision des hypothèses démographiques par l'Insee.

Votre rapporteur pour avis souligne que la situation des régimes de retraite reste préoccupante, dans un contexte de dynamisme à venir des dépenses et où les effets des réformes antérieures s'estompent progressivement . Le même constat est d'ailleurs dressé par la Cour des comptes, qui estime que « la dégradation importante des soldes de la branche vieillesse d'ici 2020, mise en lumière par le COR à périmètre inchangé de recettes, appelle également des mesures rapides de redressement » 97 ( * ) .

2. Le FSV : une trajectoire jusqu'en 2020 en « miroir » de celle de la branche vieillesse

La dégradation du solde de la branche vieillesse contraste avec l'amélioration de la situation financière du FSV d'ici 2020 .

Le déficit du FSV se stabilise à 3,6 milliards d'euros en 2017 et devrait se redresser ces prochaines années, grâce au transfert progressif du financement du minimum contributif du FSV à la branche vieillesse d'ici 2020, produisant une économie d'1 milliard d'euros en 2017.

Toutefois, comme l'affirmait Francis Delattre lors de l'examen du projet de loi de financement pour 2017 98 ( * ) , le transfert du MICO vers la branche vieillesse constituait une évolution souhaitable , mais pas une « solution miracle » pour la soutenabilité financière du FSV, dès lors que le transfert progressif de la part du MICO financée par le FSV s'est accompagné d'une réduction des recettes qui y étaient affectées. Il s'ensuit donc un délai avant que le transfert des charges excède celui des produits et permette d'améliorer le solde du FSV. Les effets du transfert du minimum contributif vers la branche vieillesse seraient maximisés en 2020 , année où le déficit du FSV, estimé à 1,5 milliard d'euros, serait, pour la première fois depuis 2013, inférieur à celui de la branche vieillesse.

L'amélioration de la situation économique 99 ( * ) et l'augmentation de 1,7 point du taux de CSG sur les revenus du capital auraient pu conduire à un redressement plus marqué de la situation financière du FSV . Or le solde du FSV ne se réduirait que légèrement en 2018 , pour atteindre 3,4 milliards d'euros, soit une amélioration de 200 millions d'euros par rapport à 2017.

Cette situation découle d'un choix contestable du Gouvernement. Alors que l'augmentation du taux de la CSG sur les revenus du capital devait augmenter les recettes du FSV - de 2,1 milliards d'euros -, le projet de loi de finances prévoit, dans le cadre du schéma de transfert proposé à l'article 20, un transfert de la totalité du rendement du prélèvement de solidarité sur le capital , actuellement affecté au FSV, à l'État, soit 2,6 milliards d'euros . L'effet de la hausse du taux de CSG est ainsi plus que neutralisé par le transfert de recettes proposé par le projet de loi de finances.

Incidence des mesures nouvelles proposées par les projets de lois financières pour 2018 sur le solde du FSV

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

Cumul

Revalorisation de l'ASPA

- 115

- 355

- 540

- 555

- 1 565

Perte du prélèvement de solidarité

- 2 567

- 2 643

- 2 725

- 2 817

- 10 752

Augmentation de 1,7 point de CSG sur les revenus du capital

2 061

2 141

2 211

2 289

8 703

Incidence nette sur le déficit

- 621

- 857

-1 054

- 1 083

- 3 614

Source : informations communiquées par le FSV

Au total, comme l'illustre le tableau ci-dessus, les mesures nouvelles proposées par les lois financières dégraderaient le solde du FSV de 600 millions d'euros en 2018 et de plus de 1 milliard d'euros en 2021.

Alors que le déficit cumulé du FSV atteindrait un montant de 15,5 milliards d'euros en 2021 , les mesures proposées par le Gouvernement ne sont ni opportunes, s'agissant du transfert du prélèvement de solidarité à l'État, ni financées, s'agissant de la revalorisation de l'ASPA.

Solde annuel du FSV de 2016 à 2021 avant et après les mesures proposées
par les lois financières pour 2018

(en milliards)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les informations communiquées par le FSV

Comme s'agissant de la branche maladie, l'apurement des dettes cumulées du FSV repose sur une reprise économique dynamique . En ce qui concerne le FSV, le retour à l'équilibre pourrait être envisagé en 2023, avec une hypothèse d'un niveau d'effectifs de chômeurs proche de celui de 2012, et le remboursement des dettes cumulées soldé à l'horizon 2030 , dans l'hypothèse d'une baisse moyenne du chômage de 3,2 % des effectifs par an, correspondant à une diminution moyenne annuelle de 100 000 chômeurs environ sur la période 100 ( * ) , conjuguée à une croissance annuelle moyenne des recettes sur le capital de 2,5 %.

B. LES OBJECTIFS DE DÉPENSES DE LA BRANCHE VIEILLESSE ET DU FSV EN 2018 (ARTICLES 30 ET 55)

L' article 30 du présent projet de loi de financement fixe les objectifs de dépenses de la branche vieillesse pour 2018, à :

- 236,4 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de base , soit une augmentation de 3 % par rapport à l'objectif fixé en 2017 ;

- 133,6 milliards d'euros pour le seul régime général , soit un accroissement de 7 % par rapport à l'objectif pour 2017.

Compte tenu des prévisions de recettes fixées par les articles 20 et 21 du présent projet de loi de financement, le régime général serait en excédent de 200 millions d'euros en 2018.

Évolution des recettes et des dépenses des régimes obligatoires de base d'assurance vieillesse

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de l'annexe B aux projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 et 2017)

S'agissant du FSV , l' article 55 du présent projet de loi de financement prévoit un montant de dépenses de 19,3 milliards d'euros , ses recettes devant atteindre 15,8 milliards d'euros. Par conséquent, le FSV serait déficitaire à hauteur de 3,4 milliards d'euros en 2018 , en raison en partie du transfert du prélèvement de solidarité, perçu par le fonds, mis en oeuvre projet de loi de financement (cf. infra ).

C. LA REVALORISATION DE L'ASPA ET DES ANCIENNES ALLOCATIONS DU MINIMUM VIEILLESSE (ARTICLE 28)

1. Le minimum vieillesse, une des prestations portées par le FSV

Établissement public administratif créé en 1993 pour opérer la distinction entre les dépenses contributives relevant des régimes de retraite et les dépenses de solidarité nationale correspondant au champ de l'État , le FSV finance deux types de dispositifs sous forme de transferts vers les régimes de retraite :

- d'une part, la prise en charge de prestations , à l'instar du minimum vieillesse, de certaines majorations de pensions, et une part progressivement réduite du minimum contributif, jusqu'en 2019 ;

- d'autre part, la prise en charge de cotisations au titre de certaines périodes d'inactivité ou n'ayant pas donné lieu à cotisation mais assimilées à des périodes validées pour le calcul du nombre de trimestres requis pour l'ouverture des droits à pension.

Répartition des charges du FSV en 2017

Source : commission des finances du Sénat

Créé par la loi du 10 juillet 1952, le minimum vieillesse ou allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), pris en charge par le FSV, vise à garantir un niveau minimum de ressources aux personnes âgées disposant de faibles revenus.

Entre 1956 et 2006, le minimum vieillesse était composé de deux étages, le premier comprenant différentes allocations et le second, constitué de l'allocation supplémentaire du minimum vieillesse (ASV) qui complétait le revenu jusqu'au minimum vieillesse. Une prestation unique a été instaurée en 2006 101 ( * ) , l'allocation de solidarité aux personnes âgées, se substituant, pour les nouveaux assurés, aux deux étages du minimum vieillesse. Deux systèmes coexistent depuis 2007, les anciennes allocations du minimum vieillesse étant toujours versées aux personnes qui en bénéficiaient avant la création de l'ASPA en 2007.

Le minimum vieillesse s'adresse aux personnes âgées de 65 ans et plus 102 ( * ) , résidant en France, et ayant fait valoir l'ensemble de leurs droits à pensions. Dans la mesure où il s'agit d'une prestation différentielle , elle complète les ressources des bénéficiaires jusqu'à un revenu annuel de 9 638,4 euros pour une personne seule et 14 963,7 euros pour un couple, soit respectivement 803,2 euros et 1 247 euros par mois . Son coût total est de 3,1 milliards d'euros en 2016, soit un montant stable depuis 2014, pour un nombre de 553 000 bénéficiaires 103 ( * ) .

Aux termes de l'article L. 816-2 du code de la sécurité sociale, les montants de l'ASPA et les plafonds de ressources conditionnant son attribution sont revalorisés chaque année, au 1 er avril, en fonction de l'inflation constatée, par l'application d'un coefficient 104 ( * ) .

2. La revalorisation du minimum vieillesse proposée, un soutien au niveau de vie des personnes âgées modestes

Dans l'objectif de réduire les situations de pauvreté des personnes âgées, le présent article met en oeuvre l'engagement présidentiel de revaloriser le montant du minimum vieillesse et de l'ASPA.

Aussi la mesure proposée prévoit-elle de déroger aux dispositions de l'article L. 816-2 du code de la sécurité sociale, afin que les montants de l'ASPA et des anciennes allocations du minimum vieillesse et les plafonds de ressources conditionnant leur attribution puissent être portés à des niveaux supérieurs à ceux prévus par l'article précité, par voie réglementaire.

L'évaluation préalable du présent article précise que le montant de l'ASPA serait ainsi porté à 903 euros par mois en 2020 pour une personne seule, soit une augmentation de 100 euros. Le montant de l'ASPA servi à un couple serait revalorisé dans les mêmes proportions : le montant de l'ASPA pour un couple serait porté à 1 402 euros par mois en 2020 (+ 155 euros).

Évolution du montant mensuel de l'Allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) entre 2018 et 2020

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'évaluation préalable du présent article

Par ailleurs, la date de revalorisation de l'ASPA serait avancée au 1 er janvier à compter de 2019, contre une date de versement au 1 er avril à l'heure actuelle, comme le propose l'article 29 du présent projet de loi (cf. infra ).

Le coût de cette revalorisation s'élèverait à 115 millions d'euros en 2018, 340 millions d'euros en 2019 et 525 millions d'euros en 2020 , en tenant compte de l'inflation prévisionnelle attendue ces prochaines années 105 ( * ) .

3. Un chiffrage reposant sur une ouverture totale des droits pour les nouveaux bénéficiaires potentiels

Alors que la dernière revalorisation exceptionnelle datait d'octobre 2014, votre rapporteur pour avis se réjouit de la revalorisation prévue par la présente mesure, qui permettra d'améliorer le pouvoir d'achat des bénéficiaires de l'ASPA. En 2015, 73 % des personnes percevant le minimum vieillesse étaient « isolées », la majorité de ces personnes isolées étant des femmes (70 %) 106 ( * ) .

L'augmentation des plafonds de ressources permettant de bénéficier de l'ASPA devrait s'accompagner de l'entrée dans le dispositif d'environ 46 000 nouveaux bénéficiaires. Renaud Villard, directeur de la CNAV, affirmait lors de son audition par la commission des affaires sociales du Sénat le 18 octobre 2017 qu'il reviendrait à la CNAV de « contacter les nouveaux bénéficiaires potentiels » 107 ( * ) . Au regard des difficultés de gestion de la CNAV, d'ailleurs soulignées au cours de cette même audition - 20 000 dossiers sont traités en retard chaque année sur un total de 700 000 dossiers liquidés par an -, l'intégration de la totalité des nouveaux bénéficiaires potentiels par l'initiative de la CNAV apparaît peu probable.

Le cas échéant, il est à craindre que les personnes qui auraient droit au versement de l'ASPA dans le cadre de la revalorisation des plafonds n'en fassent pas systématiquement la demande, d'autant qu'il s'agit très fréquemment de personnes isolées.

D. L'HARMONISATION DES DATES DE REVALORISATION DES PENSIONS DE RETRAITE ET DU MINIMUM VIEILLESSE (ARTICLE 29)

Depuis 2014, les pensions de retraite font l'objet d'une revalorisation à la date du 1 er octobre, par application d'un coefficient fixé par référence à l'évolution des prix. Ainsi, les pensions de retraite ont été revalorisées de 0,8 % au 1 er octobre 2017.

Le minimum vieillesse, ainsi que d'autres prestations telles la pension de vieillesse des veuves et veufs ou les allocations de veuvage, sont actuellement revalorisées au 1 er avril, chaque année.

Le présent article propose qu'à compter du 1 er janvier 2019, le minimum vieillesse et les pensions de retraite soient revalorisés à la même date, au 1 er janvier de chaque année, comme l'illustre le graphique ci-dessous.

Évolution des dates de revalorisation des prestations avec la mesure proposée

Source : commission des finances du Sénat, d'après l'évaluation préalable du présent article

Sous prétexte d'une volonté « d'unifier » les dates de revalorisation de versement des pensions et du minimum vieillesse, afin de « favoriser une cohérence accrue avec le calendrier de revalorisation des autres prestations ainsi qu'avec le calendrier des lois de financement » 108 ( * ) , cet alignement de la date de revalorisation au 1 er janvier conduit certes, à avancer de trois mois la revalorisation du minimum vieillesse, mais également à repousser de trois mois la date de revalorisation des pensions de retraite .

Autrement dit, la présente mesure conduit à un gel des pensions de retraite en 2018 , la prochaine revalorisation des pensions de retraite ne pouvant intervenir avant le 1 er janvier 2019.

Votre rapporteur pour avis déplore le choix d'une mesure de gestion , destinée à soutenir artificiellement le solde de la branche vieillesse en 2018, prise au détriment des personnes retraitées, alors même que la majorité d'entre elles subiraient au 1 er janvier 2018 la hausse de 1,7 point de CSG sur ces mêmes pensions, que votre rapporteur pour avis propose de supprimer .

Le décalage de trois mois de la revalorisation des pensions de retraite, au prix d'un gel de ces dernières en 2018, représente une économie de 380 millions d'euros pour les régimes de base obligatoire d'assurance vieillesse. En 2019, la conjugaison du décalage des dates de revalorisation des pensions et du minimum vieillesse représenteraient une économie de 405 millions d'euros pour ces mêmes régimes , et jusqu'à 450 millions d'euros en 2021 109 ( * ) .

III. LES MESURES RELATIVES À LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL-MALADIES PROFESSIONNELLES (AT-MP)

A. À L'ÉQUILIBRE DEPUIS 2013, LA BRANCHE AT-MP ENREGISTRERAIT UN EXCÉDENT EN BAISSE EN 2018

Les comptes de la branche AT-MP de la sécurité sociale sont excédentaires depuis 2013 , après avoir présenté un déficit continu entre 2009 et 2012.

Évolution du solde annuel de la branche AT-MP depuis 2013

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des rapports à la Commission des comptes de la sécurité sociale et de l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

En 2016 , la branche a présenté un excédent de 762 millions d'euros , en hausse de 12 millions d'euros par rapport à 2015 . Cet excédent est supérieur de 103 millions d'euros à ce qui avait été prévu (659 millions d'euros) par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, en raison notamment d'un ralentissement des charges (- 0,5 %) et du dynamisme de la masse salariale du secteur privé (+ 2,4 % en 2016).

En 2017 , le solde de la branche du régime général devrait présenter un excédent de 919 millions d'euros, en hausse de près de 21 % par rapport à l'exercice 2016 . Les charges demeureraient stables, en raison notamment d'un nouveau recul des charges liées aux fonds amiante (- 3,9 %) . Les produits progresseraient plus fortement (+ 1,9 %), grâce à la nouvelle hausse du volume de cotisations sociales (1,2 %) résultant du dynamisme de la masse salariale (+ 3,3 %), qui viendrait compenser la diminution du taux de cotisation (- 0,06 point), identique à celle de 2016.

Évolution des dépenses et des recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de la branche AT-MP depuis 2014

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des rapports à la Commission des comptes de la sécurité sociale et de l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

En 2018 , l'excédent des comptes de la branche AT-MP devrait diminuer de moitié, passant de 1 à 0,5 milliard d'euros , soit 1,1 milliard de moins que prévu dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017. Les dépenses de la branche progresseraient modérément (+ 2,2 %) , tandis que le gain de recettes généré par la nouvelle hausse de la masse salariale (+ 3,1 %) serait en partie absorbé par une nouvelle diminution du taux de cotisation moyen .

Cette troisième baisse consécutive du taux de cotisation accidents du travail , qui représentera pour la branche AT-MP un manque à gagner de 700 millions d'euros en 2018, vise à prendre en compte l'accumulation d'excédents par la branche, comme l'a souligné la Cour des comptes 110 ( * ) . Cette diminution s'accompagnerait d'une hausse parallèle du taux de cotisations d'assurance maladie , qui procurerait 500 millions d'euros de recettes supplémentaires à la branche maladie dès 2018 et permettrait ainsi de financer indirectement le déficit porté par l'ACOSS 111 ( * ) . D'après les données fournies dans l'étude d'impact, ce transfert de taux entre la branche AT-MP et la branche maladie aurait un impact strictement neutre sur le coût du travail.

Le dynamisme attendu de la masse salariale du secteur privé stimulerait la hausse des cotisations à compter de 2018 jusqu'en 2021, tandis que les dépenses de la branche enregistreraient une faible augmentation.

B. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA BRANCHE AT-MP POUR 2018

1. L'objectif de dépenses pour 2018 (article 33)

Pour l'année 2018, l'article 33 du présent projet de loi fixe à :

- 13,5 milliards d'euros l'objectif de dépenses de la branche AT-MP pour l'ensemble des régimes obligatoires de base, identique à l'objectif de dépenses qui avait été fixé pour 2017 ;

- 12,2 milliards d'euros l'objectif de dépenses pour le régime général , marquant une hausse limitée (+ 0,8 %) par rapport à l'objectif pour 2017 (12,1 milliards d'euros).

Les objectifs de dépenses inscrits dans le présent projet de loi sont ainsi quasiment identiques à ceux fixés pour 2017.

2. Les dotations de la branche AT-MP aux fonds « amiante » et les versements au titre de la sous-déclaration des accidents du travail, du dispositif de départ en retraite anticipée et du compte professionnel de prévention (article 32)

Dans la continuité des exercices précédents, l 'article 32 fixe les montants de quatre dotations versées par la branche AT-MP du régime général, qui représentent près de 2,1 milliards d'euros , soit 17 % de ses dépenses .

Cet article détermine tout d'abord le montant de la dotation versée au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) 112 ( * ) , fixée à 270 millions d'euros pour 2018, soit une baisse de 33 % par rapport à la dotation initiale pour 2017 .

L'article 3 du présent projet de loi de financement propose toutefois de ramener la dotation pour 2017, initialement prévue à 400 millions d'euros, à 250 millions d'euros , afin de tenir compte des prévisions actualisées d'exécution des dépenses d'indemnisation, rectifiées à la baisse - 385 millions d'euros, alors que l'estimation des dépenses du fonds s'élevait à 514 millions d'euros en loi de financement pour 2017. Cette tendance reflète la baisse importante (- 4,6 %) des prévisions de dépenses du FIVA pour 2018, qui s'explique notamment par la diminution tendancielle du nombre de demandes d'indemnisation liées à l'amiante ces dernières années.

Les recettes totales du fonds devraient s'élever à 360 millions d'euros en 2018 , grâce à une dotation de l'État de 7,8 millions d'euros, ainsi que par divers produits prévus à hauteur de 88,9 millions d'euros .

Au regard de l'estimation des dépenses du fonds (375 millions d'euros), le résultat net serait déficitaire en 2018 de 16 millions d'euros. Toutefois, le fonds de roulement disponible, de 80 millions d'euros en 2018 (trois mois de dépenses d'indemnisation), se maintient au-delà du fonds prudentiel, qui correspond à deux mois de dépenses d'indemnisation.

L'article 32 détermine également le montant de la contribution de la branche AT-MP au FCAATA 113 ( * ) , fixée à 613 millions d'euros pour 2018 , en baisse de 2 % par rapport à 2017. Sous le double effet d'une baisse continue du nombre d'allocataires (- 12,2 % en 2016) et d'une faible revalorisation des allocations , en lien avec une inflation quasi-nulle, la décroissance rapide des charges d'allocation enregistrée en 2016 et en 2017 (- 10,2 %) se poursuivrait, dans une moindre mesure, en 2018 (- 4,7 %). Comme indiqué dans l'étude d'impact annexée au projet de loi, le montant de la contribution de la branche AT-MP au FCAATA est toutefois calibré de manière à dégager un excédent de 8 millions d'euros , afin de rééquilibrer le résultat net cumulé du fonds, nécessitant de dégager un excédent de 7 millions d'euros.

L'article 32 précise en outre le montant du versement annuel de la branche AT-MP au profit de la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles .

Une commission, présidée par un magistrat de la Cour des comptes, remet tous les trois ans au Parlement et au Gouvernement un rapport évaluant le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des AT-MP. La commission de sous-déclaration, qui s'est réunie en 2017, a réévalué ce coût à la hausse, le situant dans une fourchette comprise entre 815 millions et 1,5 milliard d'euros . Malgré cette réévaluation à la hausse, le Gouvernement propose de maintenir la dotation de compensation à 1 milliard d'euros pour 2018 . Le maintien à un tel niveau se justifie, d'après l'évaluation préalable, afin de prendre en compte les progrès mis en avant par la commission en matière de lutte contre la sous-déclaration des AT-MP.

Évolution des dépenses de transfert instituées par des dispositions légales
à la charge de la branche AT-MP

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016

2017 (p)

2018 (p)

FIVA

Dotation CNAM-ATMP

115

435

380

430

250

270

Taux d'évolution

- 64%

+ 278 %

- 13 %

+ 13 %

- 42 %

+ 8 %

FCAATA

Dotation CNAM-ATMP

890

821

693

600

626

613

Taux d'évolution

0 %

- 8 %

- 16 %

- 13 %

+ 4 %

-2 %

Versement de compensation de la sous-déclaration des AT-MP

Dotation CNAM-ATMP

790

790

1000

1000

1000

1000

Taux d'évolution

0 %

0 %

+ 27 %

0 %

0 %

0 %

Versement à la CNAV au titre du dispositif de départ en retraite anticipée pour pénibilité

Dotation CNAM-ATMP

-

-

-

44,7 114 ( * )

59,8

186

Taux d'évolution

+ 34 %

+ 210 %

Total des versements 115 ( * )

Dotation CNAM-ATMP

2 046

2 073

2 073

2 074,7

2 085,8

2 069

Taux d'évolution

+14%

+ 1 %

+ 1%

- 2 %

+ 0,5 %

- 1 %

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des lois de financement de la sécurité sociale pour 2013 à 2017 et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

L'article 32 fixe enfin le montant de la dotation destinée à couvrir les dépenses supplémentaires engendrées par le dispositif de retraite anticipée pour incapacité permanente et par le compte professionnel de prévention , issu de la réforme du compte pénibilité, et financé à compter de 2018 par la branche AT-MP. Ces montants sont fixés à respectivement 82 et 104 millions d'euros pour 2018, soit un total de 186 millions d'euros .

3. L'indemnisation des victimes de maladies professionnelles à la date de la première constatation médicale (article 31)

Cet article, pris en application d'une jurisprudence récente de la Cour de cassation, vise à permettre l'indemnisation des victimes de maladies professionnelles à compter de la date de la première constatation médicale de leur maladie, et non plus à compter de la date du certificat médical établissant le lien possible entre leur maladie et leur activité professionnelle .

La date de début d'indemnisation ne pourrait toutefois pas remonter au-delà de deux ans avant la demande de reconnaissance de maladie professionnelle . Cette limitation est justifiée, dans l'étude d'impact fournie par le Gouvernement, tant par des raisons opérationnelles 116 ( * ) que par la volonté de limiter l'impact de la mesure sur le taux de cotisation des employeurs concernés.

Cette mesure aura pour effet d' accroître les prestations de soins et d'indemnités journalières financées par la branche AT-MP , pour un coût estimé à 65 millions d'euros en 2018, puis 130 millions d'euros à compter de 2019. Les dépenses correspondantes étant jusqu'alors prises en charge par la branche maladie, la mesure aura pour effet symétrique de réduire , dans une moindre mesure cependant, les charges de la branche maladie , à hauteur de 40 millions d'euros en 2018 et de 80 millions d'euros au-delà .

Pour l'ensemble du régime général, la mesure aurait donc un coût total de 25 millions d'euros en 2018 , puis 50 millions d'euros à partir de 2019.

Impact financier global de l'indemnisation des victimes de maladies professionnelles à la date de la première constatation médicale

(en millions d'euros)

Organismes impactés

2018

2019

2020

2021

Branche AT-MP

-65

-130

-130

-130

Branche maladie

+40

+80

+80

+80

Régime général

-25

-50

-50

-50

Source : commission des finances du Sénat, à partir de l'étude d'impact annexée au projet de loi.

Cette mesure permettra non seulement une indemnisation justifiée par le principe assurantiel de la branche et imposée par la jurisprudence, mais aussi, indirectement, d'alléger la branche maladie d'une partie de ses dépenses et vient ainsi compléter les transferts directs déjà opérés par la branche AT-MP au profit de la branche maladie au titre de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles.

IV. LES MESURES RELATIVES À LA BRANCHE FAMILLE

A. À L'ÉQUILIBRE POUR LA PREMIÈRE FOIS EN DIX ANS, LA BRANCHE FAMILLE VERRAIT SES EXCÉDENTS CONSOLIDÉS D'ICI 2021, AU DÉTRIMENT DES FAMILLES

1. Une branche à l'équilibre pour la première fois en dix ans

Le solde de la branche famille connaît une amélioration continue depuis 2014 , après avoir présenté un déficit record de 3,2 milliards d'euros en 2013 .

Évolution du solde annuel de la branche famille depuis 2013

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

En 2016, la branche a présenté un déficit d'un milliard d'euros, en baisse de 500 millions d'euros par rapport à l'exercice précédent . Cette amélioration provient principalement d'un fort ralentissement des charges (- 8,7 % au lieu des + 0,3 % prévus 117 ( * ) ) , lié notamment à des transferts de charges au budget de l'État 118 ( * ) ainsi qu'à la montée en charge de différentes mesures d'économies inscrites dans les précédentes lois de finances et de financement de la sécurité sociale 119 ( * ) (cf. encadré infra ). Parallèlement, malgré la diminution des cotisations famille liée à la mise en oeuvre du pacte de responsabilité 120 ( * ) , la baisse des recettes (- 7,9 %) a été partiellement ralentie par une nouvelle hausse de la masse salariale (+ 2,4 % après + 1,7 % en 2015).

En 2017, la branche famille deviendrait excédentaire pour la première fois en dix ans, avec un solde positif de 300 millions d'euros . Les transferts de charges à l'État ne joueraient quasiment plus sur la progression des charges, qui serait à nouveau déterminée par l'évolution des prestations servies par la branche. Les dépenses liées aux prestations légales connaîtraient une légère baisse (- 0,3 %) , en raison d'une inflation toujours très faible et de la poursuite de la baisse de la natalité (- 2 % en 2016) : les prestations familiales, revalorisées de 0,3 % au 1 er avril 2017, seraient ainsi quasiment stables en valeur sur l'ensemble de l'année 121 ( * ) . Seules les dépenses de prestations extra-légales, qui financent les modes de garde collectifs, demeureraient dynamiques (+ 3,8 %).

2. Un redressement permis par une conjoncture favorable et par des économies structurelles, au prix d'une dévitalisation de la branche
a) Des facteurs socio-économiques favorables

L'amélioration du solde de la branche famille observée depuis 2014 relève en partie de facteurs conjoncturels, aussi bien économiques que démographiques.

Les recettes de la branche évoluant simultanément avec la masse salariale 122 ( * ) et ses dépenses étant majoritairement indexées sur l' inflation 123 ( * ) , le contexte économique des dernières années a conduit, par un effet-ciseau, à améliorer spontanément le solde tendanciel de la branche , estimé à + 1,1 milliard d'euros en 2018. Les hypothèses macro-économiques retenues par le Gouvernement pour 2018 à 2022, qui reposent sur une hausse continue de la masse salariale et une reprise progressive de l'inflation, ont été jugées « plausibles » par le Haut Conseil des finances publiques 124 ( * ) et devraient ainsi permettre la poursuite du redressement tendanciel de la branche.

La trajectoire de redressement esquissée par le Gouvernement repose en outre sur l'hypothèse d'une poursuite de la baisse du nombre de naissances observée depuis 2014 (- 3 % en 2015, - 2 % en 2016 125 ( * ) ), qui contribue à diminuer le volume des prestations versées par la branche. Cette baisse de la natalité, à rebours des objectifs poursuivis par la politique familiale, ne saurait constituer un motif de réjouissance , quand bien même elle conduit à améliorer le solde de la branche.

b) Des mesures d'économies prises aux dépens des familles

Un redressement de la branche à un rythme aussi soutenu que celui présenté (+ 5 milliards d'euros d'ici 2021) ne saurait résulter uniquement d'une conjoncture favorable et s'appuie surtout, depuis plusieurs années, sur d' importantes mesures d'économies en dépenses prises au détriment des familles (cf. encadré infra ).

Au total, comme le montre le tableau ci-dessous, les montants économisés à travers ces différentes mesures représentent en 2017 près d'1,6 milliard d'euros de moindres dépenses , qui se traduisent pour les familles soit en perte d'ouverture de droits , soit en réduction du montant des prestations perçues.

Retour sur les principales mesures d'économies liées aux prestations de la branche famille depuis 2014

Dans le cadre des différentes lois de financement de la sécurité sociale votées depuis 2014, les conditions d'attribution ainsi que les montants de plusieurs prestations ont été modifiés, dans une perspective constante de rabotage au détriment des familles, y compris les plus modestes.

S'agissant de la prime d'accueil du jeune enfant (PAJE) , les montants de l'allocation de base (AB) ainsi que des primes à la naissance et à l'adoption ont été gelés à compter de 2014. Leur plafond a également été modifié : la majoration pour isolement a été abaissée et la progression du plafond par enfant linéarisée. En outre, les bénéficiaires du complément de libre choix d'activité (CLCA) dont les ressources dépassent le plafond de l'allocation de base n'en perçoivent plus la majoration.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a instauré la modulation des allocations familiales (AF) en fonction du revenu à compter du 1 er juillet 2015. Les 5 % d'allocataires les plus aisés ont ainsi vu le montant de leur allocation mensuelle réduit de 75 %, tandis que les 5 % d'allocataires suivants ont vu ce même montant réduit de moitié.

Enfin, la date de versement de la prime à la naissance a été décalée de quatre mois pour les grossesses déclarées à compter du 1 er janvier 2015. La prime est dorénavant versée le deuxième mois suivant la naissance de l'enfant, afin que son versement coïncide avec le premier versement de l'allocation de base.

Source : commission des finances du Sénat, d'après le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, septembre 2017.

Estimation de l'impact des principales mesures d'économies depuis 2014 sur le solde de la branche famille

(en millions d'euros)

2014

2015

2016

2017

Gels de l'AB et de la prime à la naissance de la PAJE

30

100

180

260

Réforme du CLCA

10

50

100

110

Modulation des allocations familiales

0

380

760

760

Modulation du CMG de la PAJE

10

30

50

70

Modulation de l'AB de la PAJE

50

180

310

400

Décalage de la date de versement de la prime à la naissance

0

200

0

0

Montant total des économies réalisées pour la branche famille

100

940

1 400

1 600

Source : commission des finances du Sénat, à partir des données de la Cour des comptes (rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017)

B. DANS LA CONTINUITÉ DU PRÉCÉDENT GOUVERNEMENT, LES NOUVELLES ÉCONOMIES PRÉVUES PÈSERONT SUR LES FAMILLES

1. L'objectif de dépenses pour 2018 (article 27)

L'article 27 du présent projet de loi de financement fixe les objectifs de dépenses de la branche famille pour 2018 à 49,7 milliards d'euros, un montant en légère baisse (- 0,5 %) par rapport à l'objectif déterminé pour 2017 (49,9 milliards d'euros), mais stable (+ 0,1 %) par rapport aux dépenses effectivement réalisées (49,6 milliards d'euros).

La croissance des dépenses serait très faible. En dépit d'une reprise progressive de l'inflation (1 % en 2017 et 1,2 % en 2018 126 ( * ) ), qui joue avec un léger décalage sur la revalorisation des prestations, les dépenses en valeur n'augmenteraient que de 0,1 % en 2018 , puis de 0,8 % en 2019 et 2020 127 ( * ) , rythme bien inférieur à celui de la croissance économique en valeur.

Comme lors de l'exercice 2017, l'écart positif entre les recettes et les dépenses permettrait une amélioration du solde de la branche, avec un excédent de 1,3 milliard d'euros , soit une progression de 1 milliard par rapport à l'excédent de 2017.

Évolution des recettes et dépenses des régimes obligatoires de base

de la branche famille

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir de l'annexe B au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018)

2. Des dépenses nouvelles plus que compensées par de nouvelles mesures d'économies prises au détriment des familles

Au-delà de l'évolution constante du périmètre des dépenses financées par la branche, qui complexifie l'analyse de la réduction de ses déficits, votre rapporteur pour avis souhaite appeler l'attention sur deux points :

- d'une part, comme détaillé infra , les mesures de dépenses nouvelles inscrites dans le présent projet de loi représentent un montant total (20 millions d'euros en 2018, 40 millions d'euros à terme) très largement inférieur à celui des économies envisagées (290 millions d'euros en 2018 128 ( * ) , au moins 500 millions d'euros d'ici 2022), tout comme le nombre de familles bénéficiaires des nouvelles mesures (44 000) sera nettement moindre que celui des familles impactées négativement (1,6 million) ;

- d'autre part, comme les années précédentes, le projet de loi présenté par le Gouvernement poursuit une logique de démantèlement progressif du caractère universel de la politique familiale, au travers de mesures d'économies prises au détriment de familles dont le pouvoir d'achat a déjà été réduit par différentes mesures liées aux prestations familiales (cf. encadré supra ).

Si l'orientation des dépenses nouvelles vers les familles modestes se justifie amplement, votre rapporteur pour avis déplore ainsi l'ambition inavouée du Gouvernement de faire basculer la politique familiale vers une politique de redistribution verticale, à rebours de sa conception traditionnelle.

Dans ce contexte, les objectifs et moyens de la branche famille pour les prochaines années devront impérativement être clarifiés par le Gouvernement dans les tous prochains mois. La prochaine convention d'objectifs et de gestion, qui devrait être signée au début de l'année 2018, ainsi que la mission parlementaire relative à la politique familiale, récemment mise en place à l'Assemblée nationale, devraient être l'occasion non seulement de passer en revue les moyens de la branche famille, mais également de définir plus globalement une ligne claire pour l'avenir de la politique familiale, qui apparaît aujourd'hui fragilisée.

3. Des incertitudes sur le montant et la nature des économies d'ici 2021

Plusieurs incertitudes pèsent sur l'impact des économies à réaliser sur la branche famille d'ici 2021.

D'une part, l'incertitude concerne le montant des économies inscrites dans le présent projet de loi pour les années 2019 à 2021 , comme l'illustre le tableau ci-dessous :

Bilan de l'impact financier des mesures relatives à la branche famille inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 pour 2018

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

2022

Majoration de 30% du CMG pour les familles monoparentales

-10

-40

-40

-40

-40

Droit à l'erreur CMG

-10

Nc ( * )

Nc

Nc

Nc

Harmonisation de la PAJE et du CF

90

Nc

Nc

Nc

500

Modération de la progression du FNAS

200

Nc

Nc

Nc

Nc

Total

270

Nc

Nc

Nc

Nc

(* )Nc : données non communiquées par les administrations concernées.

Source : commission des finances du Sénat, à partir de l'étude d'impact annexée au projet de loi et des données fournies par la CNAF.

Malgré les demandes répétées de votre rapporteur pour avis, les montants intermédiaires des économies prévues n'ont pas été communiqués.

D'autre part, comme indiqué dans le rapport annexé au projet de loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022, la modération des dépenses de la branche famille reposera notamment une « meilleure priorisation des dépenses du fonds national d'action sociale (FNAS) de la CNAF », qui doivent être réduites à hauteur de 200 millions d'euros en 2018.

Pour les années 2019 à 2022, les modalités de cette modération resteront à déterminer dans le cadre de la prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG), qui devrait être signée au début de l'année 2018. À cet égard, l'annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale se contente d'indiquer que la prochaine COG « définira une évolution maîtrisée du FNAS et poursuivra, selon une approche résolument territorialisée, les efforts pour améliorer le taux de couverture en mode d'accueil du jeune enfant, avec une attention renforcée aux territoires les plus fragiles ».

C. LES PRINCIPALES MESURES RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA BRANCHE FAMILLE POUR 2018

1. L'harmonisation du barème et des plafonds de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) et du complément familial (article 26)

Cet article prévoit l' alignement par le bas entre, d'une part, l'allocation de base (AB) et la prime à la naissance de la PAJE, et, d'autre part, le complément familial (CF) pour les enfants nés ou adoptés à compter du 1 er avril 2018. S'agissant de l'AB, cet alignement concernerait aussi bien les conditions de ressources que le montant de la prestation. S'agissant de la prime à la naissance, l'alignement sur le complément familial se limiterait aux plafonds de ressources.

En contrepartie, les montants de l'allocation de base et de la prime à la naissance, gelés depuis 2014, bénéficieraient à nouveau d'une revalorisation annuelle à compter du 1 er avril 2018.

a) L'alignement du montant de l'allocation de base sur celui du complément familial

Le montant de l'allocation de base de la PAJE est fixé depuis 2014 à 184,62 euros par mois s'agissant de l'AB à taux plein (1 561 223 allocataires fin 2016) et à 92,31 euros par mois s'agissant de l'AB à taux partiel (151 629 allocataires fin 2016). Le complément familial s'élève quant à lui à 169,02 euros par mois au 1 er avril 2017.

En conséquence, l'alignement du montant de l'AB sur celui du CF aura pour effet de diminuer le montant de l'AB à taux plein de 15,60 euros par mois (soit 187 euros par an) et celui de l' AB à taux partiel de 7,80 euros par mois (soit 94 euros par an).

Cet alignement des montants procurerait une économie de 25 millions d'euros en 2018 , avec une montée en charge progressive jusqu'en 2022 (cf. tableau supra ). À terme, l'ensemble des allocataires de cette prestation, soit environ 1,6 million de familles, seraient touchés par cette diminution .

Les prestations de la PAJE et du complément familial

Créée en 2004, la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE) se compose d'un ensemble de prestations en faveur de la petite enfance :

- une prime à la naissance ou une prime à l'adoption pour chaque enfant, d'un montant de 923,08 euros en 2017, versée sous conditions de ressources deux mois après la naissance ou l'arrivée de l'enfant au foyer ;

- une allocation de base (AB), visant à compenser le coût lié à l'entretien de l'enfant et versée sous conditions de ressources aux personnes ayant au moins un enfant de moins de trois ans à leur charge. L'allocation de base bénéficie à 1 712 852 familles et s'élève depuis 2014 à 184,62 euros par mois s'agissant de l'AB à taux plein (1 561 223 allocataires), 92,31 euros par mois s'agissant de l'AB à taux partiel (151 629 allocataires) ;

- un complément de libre choix d'activité (CLCA) versé au(x) parent(s) qui choisi(ssen)t de ne plus exercer d'activité professionnelle ou de travailler à temps partiel pour s'occuper d'un enfant jusqu'à ses trois ans. Il a été remplacé par la « Prepare » (prestation partagée d'éducation de l'enfant) pour les enfants nés après le 1 er janvier 2015 ;

- un complément de libre choix du mode de garde (CMG), versé sans plafond de ressources pour compenser le coût de la garde d'un enfant jusqu'à ses six ans.

Pour sa part, le complément familial est une prestation, elle aussi soumise à des conditions de ressources, réservée aux familles comptant au moins trois enfants à charge de plus de trois ans (sauf dans les DOM). Au 1 er avril 2017, son montant s'élève à 169,03 euros par mois . Pour les familles comptant plus de trois enfants, cette prestation a ainsi vocation à succéder dans le temps à l'allocation de base.

b) L'alignement des plafonds de l'allocation de base et de la prime à la naissance sur ceux du complément familial

Les plafonds applicables à l'allocation de base ainsi qu'à la prime à la naissance ou à l'adoption sont actuellement plus élevés que les plafonds applicables au complément familial, comme le montre le tableau ci-dessous :

Plafonds de ressources applicables à l'allocation de base à taux plein et au complément familial au 1 er avril 2017

(en euros)

Allocation de base à taux plein

Complément familial

Nombre d'enfants

Couple monoactif

Couple biactif/parent isolé

Couple monoactif

Couple biactif/parent isolé

1 enfant

30 027

38 148

26 184

34 604

2 enfants

35 442

43 563

31 421

39 841

3 enfants

40 857

48 978

37 705

46 125

4 enfants

46 272

54 393

43 989

52 409

Nb : Les plafonds applicables à la prime à la naissance ou à l'adoption ainsi qu'à l'AB à taux partiel correspondent actuellement à 119,47 % du plafond de l'AB à taux plein. Cette différence proportionnelle sera maintenue après réforme.

Source : annexe 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

L'harmonisation des plafonds proposée aura pour conséquence de resserrer les conditions d'accès à l'allocation de base et à la prime à la naissance ou à l'adoption pour les enfants nés ou adoptés après le 1 er avril 2018 : d'après l'étude d'impact annexée au projet de loi, 4 % des ménages qui auraient été éligibles avant réforme seront ainsi exclus de l'allocation de base, 6 % de la prime à la naissance ou à l'adoption . En outre, 6 % des ménages qui auraient été éligibles à l'allocation de base à taux plein ne seront désormais éligibles qu'à l'allocation de base à taux partiel, dont le montant est égal à la moitié de l'allocation de base à taux plein.

Plafonds de ressources applicables à l'allocation de base et à la prime à la naissance ou à l'adoption pour les enfants nés ou adoptés
à compter du 1 er avril 2018

Nombre d'enfants

AB à taux plein

AB à taux partiel et prime à la naissance ou à l'adoption

Couple monoactif

Couple biactif/parent isolé

Couple monoactif

Couple biactif/parent isolé

1 enfant

26 184 €

34 604 €

31 282 €

41 341 €

2 enfants

31 421 €

39 841 €

37 539 €

47 598 €

3 enfants

37 705 €

46 125 €

45 046 €

55 106 €

4 enfants

43 989 €

52 409 €

52 554 €

62 613 €

Source : commission des finances du Sénat, à partir de l'étude d'impact annexée au projet de loi et des plafonds actuellement applicables au complément familial (qui seront revalorisés au 1 er janvier 2018).

Compte tenu de la nouvelle structure du barème (cf. tableau supra ), le resserrement touchera plus particulièrement les ménages avec un seul revenu d'activité et un seul enfant , pour lesquels le plafond de ressources est abaissé de 13 %. À titre d'exemple, un couple monoactif avec un enfant sera concerné par la double perte d'éligibilité à la prime à la naissance et à l'allocation de base (soit une perte totale de prestations de 2 030 euros l'année suivant la naissance ou l'adoption de l'enfant 129 ( * ) ) dès 31 282 euros de revenus annuels, soit environ 2 600 euros de revenus par mois. Pour un couple biactif avec un enfant, cette même double perte d'éligibilité s'appliquera dès le seuil de 3 445 euros de revenus mensuels, soit l'équivalent de deux revenus de 1 722 euros.

D'après les données fournies par la CNAF à votre rapporteur, cette mesure devrait produire une économie de 500 millions d'euros par an à compter de 2022 , à l'issue de sa montée en charge. Au total, l'ensemble de cette mesure représentera entre 1 108 et 2 030 euros de perte de prestations par an pour les quelque 150 000 familles qui seront progressivement concernées à compter du 1 er avril 2018 130 ( * ) .

À terme, ce sont ainsi :

- 10 % des familles actuellement éligibles, soit environ 150 000 familles, qui perdront leur droit à l'allocation de base ou verront son montant divisé par deux ;

- 6 % qui perdront leur droit à la prime à la naissance ou à l'adoption ;

- tous les allocataires restants, soit environ 1,6 million de familles, qui verront le montant de l'allocation de base diminuer de 8,5 % par rapport au montant auquel ils auraient pu prétendre avant réforme.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre rapporteur pour avis propose la suppression de l'article 26, et demande également au Gouvernement de renoncer aux mesures réglementaires qui seront prises à l'encontre de l'intérêt des familles et qui fragilisent l'ensemble de notre système de protection sociale.

2. La majoration du complément de mode de garde pour les familles monoparentales (article 25)

Cet article propose de majorer le montant maximum du complément de libre choix du mode de garde (CMG) pour les familles monoparentales .

Cette mesure est complétée par la reconnaissance d'un droit à l'erreur en faveur des familles , qui leur permettra de percevoir de manière rétroactive leur droit au CMG dans la limite d'un mois suivant le premier mois de garde.

D'après les engagements pris par le Gouvernement, la majoration du montant maximal de CMG, qui doit être fixée par décret avant le 1 er octobre 2018, sera égale à 30 % , afin de correspondre à la majoration déjà appliquée aux parents bénéficiant de l'allocation aux adultes handicapés.

Le complément de libre choix du mode de garde (CMG)

Le complément de libre choix du mode de garde (CMG) est versé, sans plafond de ressources, aux familles qui font garder leur(s) enfant(s) de moins de six ans par un mode d'accueil individuel (assistant maternel ou garde à domicile). En 2016, il concernait 861 000 familles, dont 88 000 familles monoparentales, pour une dépense totale de 6,2 milliards d'euros par an.

Le CMG « emploi direct » est versé aux familles qui emploient directement un assistant maternel ou une garde à domicile. Il consiste en :

- une prise en charge des cotisations et contributions sociales liées à la rémunération de la personne : à hauteur de 100 % pour l'emploi d'un assistant maternel et de 50 % pour l'emploi d'une garde à domicile, dans la limite d'un montant plafond variable selon l'âge de l'enfant ;

- une prise en charge maximale de 85 % de la rémunération nette du salarié, dans la limite d'un montant plafond variable selon les ressources et la composition du foyer.

En 2016, la CNAF dénombrait 780 445 bénéficiaires du CMG « emploi direct », dont 69 730 familles monoparentales.

Le CMG « structure » est versé aux familles qui recourent à un tiers (association, entreprise ou micro-crèche) qui emploie, pour son compte, une personne (assistant maternel ou garde à domicile) chargée d'assurer la garde des enfants. Il consiste en une prise en charge globale qui ne peut excéder 85% du coût de la garde facturé par l'employeur, dans la limite d'un montant plafond variable selon les ressources et la composition du foyer.

En 2016, la CNAF dénombrait environ 66 000 bénéficiaires du CMG « structure ».

En plus du CMG, les parents qui font garder leur enfant bénéficient d'une aide fiscale, sous la forme d'un crédit d'impôt sur le revenu égal à 50 % des sommes versées, déduction faite des aides de la CAF ou de l'employeur.

Le tableau ci-dessous détaille, par tranche de revenus, les montants avant et après majoration qui s'appliquent aux familles monoparentales :

Impact de la mesure sur le barème du complément de libre choix du mode de garde (CMG) applicable aux familles monoparentales

Nombre d'enfants à charge

Revenus

Inférieurs à

Ne dépassant pas

Supérieurs à

1 enfant

28 713 €

63 805 €

63 805 €

2 enfants

32 788 €

72 862 €

72 862 €

3 enfants

35 663 €

81 918 €

81 918 €

Montant plafond du CMG "emploi direct"

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Enfant de moins de 3 ans

462,78 €

599,82 €

291,82 €

377,31 €

175,07 €

226,92 €

Enfant de 3 à 6 ans

231,39 €

299,91 €

145,91 €

189,14 €

87,54 €

113,46 €

Montant plafond du CMG "structure" (assistant maternel)

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Enfant de moins de 3 ans

700,31 €

907,66 €

583,60 €

756,39 €

466,88 €

605,14 €

Enfant de 3 à 6 ans

350,15 €

453,83 €

291,80 €

378,20 €

233,44 €

302,57 €

Montant plafond du CMG "structure" (garde à domicile ou micro-crèche)

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Avant majoration de 30 %

Après majoration de 30 %

Enfant de moins de 3 ans

846,22 €

1 096,80 €

729,49 €

945,48 €

612,77 €

796,60 €

Enfant de 3 à 6 ans

423,11 €

548,40 €

364,74 €

472,74 €

306,39 €

397,10 €

Source : commission des finances du Sénat, à partir de l'étude d'impact annexée au projet de loi, sur la base des montants de CMG en vigueur au 1 er avril 2017 (qui seront revalorisés le 1 er avril 2018)

Selon la configuration et le montant des revenus de la famille, le plafond du choix du mode de garde se verra ainsi rehaussé au minimum de 26 euros , la hausse pouvant atteindre 250 euros par mois dans certaines situations (cf. cases en gras dans le tableau ci-dessus).

Le reste à charge de 15 % du coût de la garde demeurant inchangé, cette majoration ne concernerait, d'après les estimations de la CNAF, que 53 % des familles monoparentales ayant recours au CMG 131 ( * ) , soit environ 44 000 bénéficiaires répartis de la manière suivante.

Type de CMG

Nombre de familles monoparentales bénéficiant d'une majoration

CMG emploi direct (assistant maternel)

35 965

CMG emploi direct (garde à domicile)

3 607

CMG structure

4 227

Total

43 799

Source : CNAF

Parmi les 44 000 bénéficiaires de la majoration, seuls 49,1 % (soit environ 21 500 familles) verront le montant de leur CMG majoré de 30 %, les 50,9 % restants bénéficiant d'une majoration inférieure (estimée par la CNAF à 13 % en moyenne), de manière à conserver un reste à charge de 15 %.

Compte tenu des délais nécessaires à sa mise en oeuvre, cette mesure entrerait en vigueur le 1 er octobre 2018 , limitant son coût à 10 millions d'euros pour l'exercice 2018 . La mesure aurait ensuite un coût annuel de 40 millions d'euros en année pleine .

AMENDEMENTS PRÉSENTÉS PAR LA COMMISSION DES FINANCES

ARTICLE 7

N° 1

I. - Alinéa 8

Supprimer cet alinéa

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi

rédigé :

« ... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

ARTICLE 26

N° 2

Supprimer cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 7 novembre 2017, sous la présidence de M. Vincent Eblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Alain Joyandet, rapporteur, sur le projet de loi n° 63 (2017-2018) de financement de la sécurité sociale pour 2018.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale constitue une pièce importante du dispositif mis en place par le Gouvernement pour ramener le déficit effectif à 0,2 % du PIB en 2022, contre 3,4 % du PIB en 2016, conformément à la trajectoire qui a été prévue par la loi de programmation des finances publiques.

Compte tenu de la baisse des prélèvements obligatoires prévue au cours de la période, l'effort de redressement des comptes publics reposerait exclusivement sur la maîtrise active de la dépense publique.

Or les administrations de sécurité sociale (ASSO) représentent environ la moitié des dépenses publiques. La trajectoire des administrations de sécurité sociale revêt donc une importance capitale.

Alors que le respect de la trajectoire de dépense du Gouvernement implique la mise en oeuvre d'un plan d'économies d'environ 80 milliards d'euros au cours du quinquennat, 36 milliards d'euros devraient être portés par les administrations de sécurité sociale. La part très importante des économies portée par les ASSO serait donc en ligne avec leur poids dans la dépense publique.

Dans le champ des organismes de sécurité sociale, un effort de consolidation important est prévu en 2018, conditionnant le retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale à l'horizon 2020.

Le régime général retrouverait un solde excédentaire en 2018 de 1,2 milliard d'euros. Toutefois, il convient d'intégrer les comptes du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) pour disposer d'une image plus fidèle des comptes sociaux. Or celui-ci est toujours déficitaire, malgré le transfert du minimum contributif à la branche vieillesse réalisé en 2017. Ainsi, le déficit du régime général et du FSV s'élèverait à 2,2 milliards d'euros en 2018, soit une réduction du déficit de 2,7 milliards d'euros par rapport au solde de 2017. Il s'agit d'une consolidation du même ordre de grandeur que les années précédentes.

De façon rétrospective, l'amélioration des soldes à l'intérieur de cette courbe assez linéaire est très hétérogène entre les branches : elle a principalement porté sur les branches famille, au prix d'une mise en cause de la politique familiale, et vieillesse, grâce à la réforme des retraites de 2010. Le déficit de la branche maladie enregistré en 2016 par le présent projet de loi de financement ne s'améliore que de 1 milliard d'euros et de 700 millions d'euros en 2017. L'amélioration précaire des comptes sociaux n'a donc pas permis comme annoncé le retour à l'équilibre du régime général en 2017, dont le solde est toujours déficitaire de 1,6 milliard d'euros.

De façon prospective, la réduction prévue des déficits repose notamment sur le dynamisme des recettes, portées par des hypothèses d'une forte dynamique de la masse salariale du secteur privé, notamment par la réduction du chômage.

Le fait que près de la moitié des économies attendues sur le quinquennat relèvent de la sphère sociale est plutôt inquiétant. S'agissant des organismes de sécurité sociale, les économies attendues pour 2018 reposent sur des leviers traditionnels déjà largement exploités, comme les mesures du plan ONDAM 2015-2017, aux effets inégaux et limités, qui ressortent dans le graphique n°6. Ces prévisions de réduction des dépenses ne sont pas réellement pérennes, mais plutôt liées à des opérations one shot . De plus, ces prévisions intègrent des mesures de gestion non reconductibles comme la maîtrise des dépenses de gestion courante ou le décalage de la date de revalorisation des pensions.

Dans un contexte de relèvement de l'ONDAM à 2,3 % jusqu'en 2020 - il était à 2,1 % l'an dernier - et de dynamisme à venir des prestations de retraite et des dépenses d'assurance maladie, la perspective d'un retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale d'ici 2020 paraît optimiste. Les chiffres annoncés pour les années à venir prévoient un retour à l'équilibre très rapide, voire des excédents et l'apurement total de la dette en 2024. Un tel optimisme nous laisse quelque peu songeurs compte tenu des besoins en termes de santé, d'autant que la réforme du régime des retraites n'est pas encore à l'ordre du jour.

Pourtant, c'est sur cette trajectoire de redressement que compte le Gouvernement pour apurer les déficits portés par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), c'est-à-dire les 20 milliards d'euros de « dette » du régime cumulés en 2017 qui n'ont pas été transférés à la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades).

S'agissant de la dette sociale portée par la Cades, l'amortissement qu'elle réalise est plutôt efficace, dans un contexte de faibles taux de refinancement, ce qui rend « probable » la perspective de son apurement d'ici à 2024 si le différentiel de taux d'intérêt entre les emprunts remboursés et les emprunts nouvellement contractés se maintient dans les années à venir. Il reste encore 121 milliards d'euros à amortir, sachant que la Cades en a déjà amorti 140 milliards, conformément aux prévisions réalisées voilà plusieurs années.

Les recettes font l'objet de plusieurs mesures significatives : deux d'entre elles sont examinées avec une attention plus particulière par la commission des finances.

La première traduit l'engagement du Président de la République de modifier structurellement le financement de la sécurité sociale, en élargissant son mode de financement, qui repose à l'heure actuelle majoritairement sur les revenus du travail. Nous approuvons cette orientation, même si nos propositions sont différentes de celles du Gouvernement.

En contrepartie d'une hausse de 1,7 point du taux de CSG, comme le propose le Gouvernement, la mesure proposée consiste à supprimer les cotisations salariales d'assurance maladie et de chômage pour les salariés du secteur privé en deux temps en 2018. Je vous renvoie au rapport pour le détail des mesures de compensation prévues pour les autres catégories d'actifs, mais concrètement, nous allons supprimer l'équivalent de 3,15 % de charges patronales sur le montant brut du salaire d'un salarié du secteur privé, soit 2,2 % au mois de janvier, dont la totalité des retenues pour l'assurance maladie et une partie des cotisations chômage, la suppression de ces dernières étant prévue en octobre 2018.

Je suis favorable à la hausse de la CSG, qui est un impôt universel. Cette mesure me semble satisfaisante, à l'exception des retraités qui ne bénéficient d'aucune mesure de compensation contrairement aux salariés. En outre, elle s'ajoutera au gel des pensions de retraite, à savoir une année blanche qui résultera du report de la revalorisation des pensions.

Les retraités concernés sont ceux qui sont assujettis au taux plein de CSG. Cela équivaut à une pension mensuelle de 1 286 euros pour les moins de 65 ans, et 1 392 euros pour les plus de 65 ans. On peut difficilement qualifier ces personnes de retraités « riches ». Or ils prennent de plein fouet la hausse de 1,7 point du taux de CSG, et ce sans aucune compensation. Pour une personne seule de plus de 65 ans percevant 1 440 euros de pension mensuelle, cette augmentation représente une perte de revenus de 27 euros par mois, soit 324 euros par an. Ce sont 60 % des retraités, soit 8,2 millions de personnes qui se verront appliquer dès le 1 er janvier 2018 une augmentation de la CSG.

Je vous propose donc la suppression de la hausse de la CSG sur les retraités concernés.

La deuxième mesure prévoit, pour 2019, d'instaurer un allégement permanent de cotisation patronale maladie de 6 points, en contrepartie de la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) prévue pour 2019, et ramené à 6 % pour les revenus de 2018. Un renforcement du dispositif des allégements généraux est également prévu.

Je suis également favorable à la transformation proposée du CICE en baisse de cotisations patronales. La réduction pérenne des charges me semble une bonne mesure, quand le CICE s'apparentait à une subvention aléatoire. L'État a récupéré 1 % au passage, puisque la compensation sera effectuée sur la base de 6 %, et non de 7 %. Je ne propose pas à la commission de revenir sur ce dispositif, car le principe même de la compensation nous paraît satisfaisant.

De plus, le renforcement des allégements généraux est plutôt bienvenu. Je rappelle que les cotisations patronales expliquent en partie, vous en conviendrez tous, les différences de coûts horaires moyens de la main-d'oeuvre entre pays européens. Cette mesure devrait favoriser notre compétitivité.

J'en viens à la présentation de la situation financière de chaque branche.

La branche maladie concentre les déficits et les inquiétudes. Son solde serait de - 4,1 milliards d'euros en 2017, mais de - 0,8 milliard d'euros en 2018. Elle serait de nouveau la seule branche déficitaire en 2018. L'ONDAM est relevé à 2,3 % en 2018, ce qui nécessite 4,2 milliards d'euros d'économies. Je regrette toutefois que les économies attendues proviennent non pas de nouvelles mesures, mais de la poursuite des axes déjà mis en oeuvre entre 2015 et 2017, pour des résultats limités.

La branche vieillesse enregistrerait un solde positif de 200 millions d'euros en 2018. Ce retour à l'équilibre ne serait que temporaire, et traduit les derniers effets de la réforme engagée en 2010. Néanmoins, les dépenses de la branche vont repartir à la hausse. Il serait utile de remettre ce sujet sur la table. Sinon, le déficit de la branche va remonter à 3 milliards d'euros en 2022.

Excédentaire depuis 2013, la branche accidents du travail-maladies professionnelles (AT-MP) devrait présenter un excédent de 500 millions d'euros en 2018.

Enfin, après un déficit record de 3,2 milliards d'euros en 2013, le solde de la branche famille serait excédentaire de 1,3 milliard d'euros en 2018. Ce retour à l'équilibre s'explique essentiellement par le biais de modifications des conditions d'attribution des prestations familiales.

Je souhaite mettre en évidence le trait commun des mesures proposées en dépenses sur les branches famille et vieillesse de ce projet de loi de financement. Sur ces deux branches, des mesures nouvelles en dépenses sont annoncées par le Gouvernement, mais sont en réalité plus que compensées par de nouvelles mesures d'économies, prises au détriment des familles et des pensionnés.

Le Gouvernement propose ainsi une revalorisation du minimum vieillesse, financé par le FSV. Le montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées, l'ASPA, sera progressivement porté de 803 à 903 euros par mois d'ici à 2020. Cette mesure coûtera 115 millions d'euros en 2018. En même temps, sous prétexte d'une volonté « d'unifier » les dates de revalorisation de versement des pensions et du minimum vieillesse, l'alignement de ces revalorisations au 1 er janvier conduit à repousser de trois mois la date de revalorisation des pensions de retraite et donc à une année blanche en 2018. Cette mesure représente une économie de 380 millions d'euros pour la branche vieillesse en 2018.

De même, l'augmentation de 30 % du complément de libre choix du mode de garde pour les 44 000 familles concernées coûterait 40 millions d'euros d'ici à 2022. En même temps, le montant et les plafonds d'éligibilité de la prestation d'accueil du jeune enfant, la Paje, sont alignés par le bas sur ceux du complément familial. À titre d'exemple, un jeune couple d'instituteurs perdrait ainsi le droit à près de 2 000 euros d'allocations l'année suivant la naissance de son premier enfant. Cette mesure devrait permettre d'économiser 500 millions d'euros par an à compter de 2022.

Tels sont les quelques éléments sur lesquels nous opposons notre désaccord. Je vous propose donc la suppression de l'abaissement du montant et des plafonds de la Paje.

En conclusion, mes chers collègues et sous réserve de l'adoption des deux amendements annoncés, je vous propose de donner un avis favorable aux articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 dont la commission des finances s'est saisie.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je remercie le rapporteur pour avis d'avoir établi la synthèse du budget de la sécurité sociale, dont le poids, parmi les budgets publics, est très important. Il en est du projet de loi de financement de la sécurité comme du projet de loi de finances : concrètement, le Gouvernement compte plus sur la spontanéité des cotisations que sur les réformes de structure pour améliorer les soldes.

Je me concentrerai sur la question de la CSG et de la baisse des charges.

À l'instar du rapporteur pour avis, je suis très favorable à la baisse des charges. Je considère que le CICE était une erreur, car il n'était pas affecté. En outre, d'après les comparatifs internationaux et les études des cabinets d'audit, le coût du travail et le poids des cotisations sont les plus élevés en France. La priorité était donc à la baisse de charges. Cette mesure va dans le bon sens. En revanche, j'ai un peu plus de mal à comprendre les moyens prévus pour financer cette baisse de charges. Appartenant à une majorité qui avait voté la TVA compétitivité dont le corollaire était la baisse des charges, je persiste à croire que la TVA est une piste bien meilleure. En effet, l'impact de cette taxe frappe largement les produits importés. De plus, la France se situe plutôt dans la moyenne basse des taux européens. Son augmentation est envisageable dans les périodes de faible inflation, lorsque la concurrence va absorber une partie des hausses de TVA. De nombreux pays y ont eu recours. C'est sans doute le seul moyen, dans une économie ouverte, de taxer les importations.

Néanmoins, l'augmentation de la CSG alimentant une baisse des charges ne doit pas déclencher de fortes critiques, dans la mesure où ce dispositif est neutre, voire positif pour les salariés. En revanche, la question reste ouverte pour les retraités, qui ne bénéficient pas de baisse de cotisations, ne sont pas forcément éligibles à la baisse de la taxe d'habitation, donc, en clair, sont victimes purement et simplement de la hausse de la CSG.

C'est la raison pour laquelle je soutiendrai pleinement l'amendement à l'article 7 déposé par le rapporteur pour avis. Autant on peut porter un regard différent sur la délocalisation, qui va dans le sens de la compétitivité des entreprises, autant on peut regretter que cela soit mis en oeuvre par la voie de la CSG.

M. Vincent Delahaye . -Je souhaiterais poser trois questions.

La première porte sur les économies qui sont demandées sur la période. À priori , les 36 milliards d'euros sur les 80 milliards d'euros sont calculés en tendanciel. De quoi s'agit-il exactement ? Comment les retrouve-t-on sur la période ? Le tendanciel qu'il est demandé aux collectivités représente 1,2 %. Qu'en est-il de l'État ? Il serait souhaitable que la commission des finances clarifie ces points avant les discussions en séance publique.

La deuxième question porte sur l'apurement de la dette. Le rapporteur pour avis a l'air optimiste, et j'aimerais partager ce sentiment. Le Gouvernement souhaiterait, à partir de 2019, profiter des excédents de la sécurité sociale pour abonder le budget de l'État. Cet éventuel prélèvement ne remettrait-il pas en question l'apurement de la dette sociale ?

Ma troisième question a trait à la CSG. Son augmentation s'appliquerait aux retraités percevant 1 400 euros par mois. Quant au dégrèvement de la taxe d'habitation, jusqu'à quel seuil de revenu s'appliquerait-il ?

M. Julien Bargeton . - Je remercie le rapporteur pour avis d'avoir présenté ces points d'accord avec ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je note que, comme souvent, on se dit favorable à la maîtrise de la dépense publique, mais qu'ensuite très peu de mesures d'économies trouvent un écho favorable. Or s'il faut faire des économies en général, il faut bien en faire aussi en particulier.

Le financement est un rééquilibrage entre les actifs et les inactifs, et aussi entre le travail et le capital via la CSG, taux le plus élevé s'appliquant aux revenus du capital. Les retraités vont tout de même bénéficier de la baisse de la taxe d'habitation, pour 35 % d'entre eux - je le dis de mémoire -, si l'on compte la hausse de la CSG et la réduction de la taxe d'habitation pour 80 % des ménages.

Enfin, sur l'universalité et la dévitalisation de la branche famille, la politique n'est pas nouvelle, puisque la volonté de concentrer les efforts sur ceux qui en ont le plus besoin s'était déjà manifestée. Je souligne notamment le renforcement des aides en faveur des familles monoparentales. Il est très important d'aider ces familles, notamment pour retrouver un emploi.

M. Jean-François Rapin . - Ma question est simple et pratique : existe-t-il un dispositif qui exonère les retraités vivant en maison de retraite de l'augmentation de la CSG ?

M. Philippe Dallier . - Ma question concerne également l'application de la CSG aux retraités. Dans le document que vous nous présentez, une colonne comprend le revenu fiscal de référence et les deux autres le niveau de pension au-delà ou en deçà de 65 ans.

Qu'entend-on par niveau de pension ? L'ensemble de ce qui est perçu au régime général et aux régimes complémentaires : c'est en agrégeant le tout que l'on pourrait savoir si le seuil est dépassé en fonction de l'âge.

Pour ce qui est de la référence au revenu fiscal de référence, deux seuils différents seraient pris en compte pour l'application de la mesure. Tout cela n'est pas très clair. De nombreux retraités m'interrogent pour savoir s'ils vont être concernés par la hausse de 1,7 %. Honnêtement, j'ai du mal à leur répondre. Pourriez-vous nous éclairer sur la façon dont les deux colonnes doivent être interprétées ?

M. Bernard Delcros . - Le rapporteur pour avis a-t-il évalué le coût de la mesure proposée dans l'amendement, à savoir la suppression de la hausse de la CSG pour les retraités ?

M. Pascal Savoldelli . - Mon intervention sera plus une explication de vote qu'un questionnement.

La CSG rapportera 122 milliards d'euros en 2018, les exonérations de cotisations sociales 45 milliards d'euros, à quoi s'ajoutent 21 milliards d'euros du fait de la transformation du CICE.

Nous sommes contre la hausse de la CSG, ce n'est pas une révélation, au-delà du principe même de la CSG que nous réfutons. C'est pourquoi nous allons voter un amendement sur lequel nous ne raisonnons pas du tout de la même manière. Mais l'essentiel est que chacun puisse s'exprimer. Je comprends l'intention qui sous-tend la hausse de la CSG, mais quelle sera son incidence sur la pension mensuelle d'un retraité ? En moyenne, si l'on tient compte du régime général et des complémentaires, un retraité paiera 440 euros. On pourrait se rassembler sur ce point, si l'on omettait les 11 vaccins obligatoires, qui coûteront 360 euros à nos concitoyens.

Quant à l'hôpital, il bénéficiera de 1,2 milliard d'euros en moins. Comment allons-nous expliquer que notre vote a entraîné une réduction des moyens alloués aux hôpitaux ? Ce n'est pas un projet idéologique, en fonction du lieu d'implantation de l'hôpital. En l'espèce, il existe des passerelles entre le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances.

Cette explication de vote est destinée à éviter toute confusion des genres. Le débat en séance publique sera l'occasion de débattre ensemble de ces sujets.

M. Marc Laménie . - Je m'interroge sur la lutte contre la fraude, par branche. Ce phénomène est très difficile à quantifier. Le rapporteur pour avis a-t-il un avis circonstancié en la matière ?

M. Jean-Marc Gabouty . - Je m'interroge sur le lien entre le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances. Dans le projet de loi de programmation des finances publiques, nous avons constaté une période difficile entre 2018 et 2019 qui provient de la transformation du CICE en baisse de charges. Je suis totalement favorable à cette mesure structurelle, contrairement au crédit d'impôt qui était conjoncturel et pouvait de ce fait être remis en cause beaucoup plus facilement. Néanmoins, cela va entraîner une modification des bases imposables, donc un surplus, avec un an de décalage, de l'impôt sur les sociétés. Ces liens ont-ils bien été chiffrés dans le processus de transformation du CICE en baisse de charges ? Certes, des abus ont été commis. Certains responsables politiques et patronaux ont même déclaré que cette transformation contribuait à l'augmentation du coût horaire du travail, ce qui est totalement aberrant !

M. Claude Raynal . - Les tableaux qui nous sont présentés montrent un redressement très significatif, durant les cinq dernières années, des comptes de la sécurité sociale, jusqu'à des résultats jamais atteints par le passé. Il convient également de rappeler que ce redressement a été réalisé sans retentissement sur la qualité du service ni déremboursement de médicaments, comme cela avait cours fréquemment au cours des périodes antérieures. Une telle amélioration était pourtant considérée comme quasiment impossible.

Lors d'une analyse prospective, il faut d'abord revenir sur quelques éléments qui permettent de comprendre notre orientation. Nous constatons un certain nombre de reculs parmi les propositions du Gouvernement afin de trouver des recettes nouvelles, et nous le regrettons. Je pense en particulier à l'alignement du plafond et du montant de la Paje, de la modération de la progression du Fonds national d'action sanitaire et social (FNASS).

Concernant la CSG, nous vous suivrons, monsieur le rapporteur pour avis, car le seuil retenu pour considérer qu'un retraité est suffisamment riche nous paraît extrêmement faible. L'inquiétude des retraités est légitime, car ils ont apporté une large contribution financière et connaissent une situation très difficile par rapport à leurs aînés et leurs enfants. La solidarité familiale doit jouer. Demander un nouvel effort aux retraités nous paraît disproportionné.

Par ailleurs, on ne peut pas décider la baisse de la taxe d'habitation pour certains et pas pour d'autres, annulant l'effet de la CSG.

Pour toutes ces raisons, nous voterons cet amendement.

Mme Sophie Taillé-Polian . - Je souhaiterais poser une question sur les recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Un article du journal Le Monde écrit par un chercheur économiste de Berkeley s'attache aux conséquences de la mise en place de la flat tax , avec un transfert potentiel d'une part de la rémunération des dirigeants vers des revenus de type dividendes, en vue d'une forme d'optimisation fiscale. Or cela aboutirait à une baisse des cotisations, estimée à environ 10 milliards d'euros par an, et donc potentiellement à de moindres recettes inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette question est préoccupante au regard de l'équilibre proposé. Sur le reste, je rejoins la position de Claude Raynal.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Je souhaiterais au préalable formuler quelques considérations générales.

Des interactions toujours plus nombreuses apparaissent entre le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Aujourd'hui, de plus en plus de décisions prises dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale trouvent leur conclusion dans le projet de loi de finances. Ce phénomène s'amplifie, ce qui correspond notamment à un refinancement par l'État d'un certain nombre de dépenses de santé qui étaient auparavant exclusivement financées par un système contributif fermé.

Je ne répondrai pas directement à la question portant sur la flat tax , car ce sujet relève du projet de loi de finances.

Pour ce qui est de la CSG et de la TVA, j'étais personnellement plutôt favorable à la TVA, mais nous n'avons pas les moyens de tout réécrire. Il convient donc d'accepter le principe de la CSG, tout en essayant d'en diminuer les effets néfastes, notamment concernant les retraités. La TVA est un outil de compétitivité, un impôt beaucoup plus juste et proportionnel qu'on ne veut le dire.

Claude Raynal a souligné la façon dont nous avons travaillé. Il a reconnu que mon analyse était plutôt équilibrée, je lui donne aussi acte d'avoir constaté une réduction du déficit global de notre modèle social au cours des cinq dernières années. C'est d'ailleurs ce qui me conduit à être relativement modéré dans la contestation des prévisions, même si elles me paraissent très optimistes, dans la mesure où la trajectoire est quasiment identique sans recettes nouvelles ! Ma crainte est que les anciennes recettes soient à bout de souffle pour les cinq années à venir, et que l'on soit « à l'os » sur des mesures qui ne produiront pas les mêmes effets.

Nous devons donc être attentifs par rapport à ces prévisions. Dans le même temps, celles-ci se fondent sur les cinq années précédentes qui viennent de s'écouler à un rythme presque identique : là où la réduction du déficit était de l'ordre de 2 milliards d'euros de déficit par an, on se situe plutôt entre 3 milliards et 4 milliards d'euros.

Comment retrouve-t-on les 36 milliards d'euros ? Sur la base de quels critères ? Le Gouvernement ne nous a pas transmis les prévisions d'évolution tendancielle des dépenses. Il s'agit d'un quantum d'économies calculé par la commission des finances à partir des prévisions d'évolution tendancielle des dépenses de la Cour des comptes.

Mes prévisions optimistes sur l'apurement de la dette concernaient la Cades. Sous réserve de maintenir la dette de la Cades à périmètre constant et si les taux d'intérêt ne se mettent pas à flamber, la réduction de la dette devrait être effective d'ici 2024.

Quant à l'exonération de la taxe d'habitation, elle ne concernera que les retraités qui ont moins de 2 500 euros de revenus.

M. Vincent Delahaye . - La hausse de la CSG sera donc couverte pour les retraités jusqu'à 2 500 euros de revenus ?

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Oui.

Julien Bargeton, il y a économies et économies. Nous réclamons des économies structurelles dans la mécanique du fonctionnement de l'État, pas des économies qui consisteraient en une réduction de prestations. Voilà pourquoi je ne suis pas d'accord. En ce qui concerne la politique familiale, je reste attaché à l'universalité des prestations.

Je dirai à Jean-François Rapin que le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne comporte aucun dispositif qui concernerait spécifiquement les retraités en maison de retraite. En revanche, il y a des éléments sur ce sujet dans le projet de loi de finances.

Je précise à Philippe Dallier que les 1 200 euros intègrent les revenus complémentaires.

Pascal Savoldelli, on évalue à 4,5 milliards d'euros le coût de la suppression de l'augmentation du taux de la CSG pour les retraités. Compte tenu de l'interpénétration du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances, il faudra trouver ce même montant d'économies dans le projet de loi de finances. Pour l'instant, nous gageons sur le tabac. Nous verrons au fur et à mesure.

Je confirme à Marc Laménie que la fraude mérite effectivement qu'on s'y intéresse. Les mesures qui sont mises en place sont assez peu pertinentes.

M. Vincent Éblé , président . - Le gage tabac est pertinent quand il s'agit de gager quelques centaines de millions d'euros. C'est beaucoup plus compliqué quand on parle de 4,5 milliards d'euros.

Gérald Darmanin a récemment mentionné la possibilité d'un examen concomitant de la première partie du projet de loi de finances et des recettes du projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce qui permettrait de prendre en compte les excédents à réinjecter dans le budget général de l'État. Une réforme par amendements au projet de loi de financement de la sécurité sociale alors qu'il est aussi mal bouclé en termes de recettes n'est pas une méthode qui convient à notre commission. Pour l'instant, nous restons contraints par la différenciation des deux textes.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Je suis d'accord. Sans cette contrainte, nous aurions pu mettre en oeuvre une stratégie budgétaire efficace pour l'État, en la reconstruisant toute entière à partir des deux textes. La Constitution nous en empêche et nous ne disposons d'aucune solution technique pour résoudre la difficulté.

M. Vincent Delahaye . - Présenter un amendement non gagé par une vraie recette, ce n'est pas très responsable. Combien rapporte la taxe sur le tabac ? Est-ce plus ou moins que 4,5 milliards d'euros ?

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Toute la difficulté vient des transferts entre le projet de loi de financement de la sécurité sociale et le projet de loi de finances. En supprimant l'augmentation du taux de la CSG pour les retraités, on alourdit le montant des dépenses de manière importante et on devra le compenser par des économies sur le budget de l'État. Or, nous ne sommes pas dans l'examen du projet de loi de finances. Le gage tabac est un gage d'attente.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Pour que nous soyons à moitié pardonnés de présenter un tel amendement, peut-être pourrions-nous préciser dans son objet qu'il prévoit une hausse des taxes sur le tabac en raison de l'examen séparé du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances ?

M. Vincent Éblé , président . - Vous pouvez bien sûr modifier l'objet de votre amendement. Cependant le compte rendu de notre réunion sera parfaitement explicite.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - On évalue les droits de tabac totaux à 14 milliards d'euros. On ne peut pas les rehausser de 4,5 milliards d'euros sans explication. Mieux vaut préciser que c'est temporaire.

M. Claude Raynal . - Il est clair que cet amendement est une affirmation politique plus qu'un amendement technique. C'est du moins la lecture que nous en faisons. Pour autant, Monsieur Joyandet, ne croyez pas que nous approuvons l'ensemble de votre rapport.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Ne croyez pas non plus que je suis d'accord avec tout ce que vous avez fait pendant cinq ans.

M. Claude Raynal . - De quelle réforme structurelle parlez-vous dans votre rapport ? La formule ne cache-t-elle pas un vide des idées ? Pour vous être agréable et compte tenu des amendements que vous présentez, nous irons jusqu'à l'abstention.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Mais vous voterez l'amendement ?

M. Claude Raynal . - Oui.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Je rappelle que mon amendement n° 1 supprime l'augmentation du taux de la CSG proposée par le Gouvernement pour les retraités.

La commission adopte l'amendement n° 1.

Article 26

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Mon amendement n° 2 supprime l'article 26 qui prévoit la révision à la baisse de la Paje.

M. Michel Canevet . - Notre groupe a voté contre l'amendement précédent, car on ne peut pas transférer une telle mesure sur une recette non atteignable. Nous tenons le même raisonnement sur l'amendement n° 2. Les comptes de la Sécurité sociale doivent revenir rapidement à l'équilibre et même être excédentaires pour financer la dette. Dans cette logique, nous sommes contre l'amendement que vous présentez.

M. Alain Joyandet , rapporteur pour avis . - Nous sommes favorables aux économies quand il s'agit de la mécanique interne des organismes de sécurité sociale. Je rappelle que le projet de loi de finances prévoit la suppression de 1 600 postes en 2018 sur 120 000 suppressions annoncées dans les cinq ans, ce qui revient à reporter 95 % de l'effort de réforme sur les quatre ans qui restent. Voilà ce que j'appelle faire des économies.

Dans cet article, il s'agit de réduire de 8,5 % le montant de l'allocation de base pour 1,6 million de familles. L'alignement des plafonds sur ceux du complément familial aura pour conséquence de resserrer les conditions d'accès à l'allocation de base et à la prime à la naissance pour près de 150 000 familles, soit environ 10 % des allocataires. En définitive, selon les revenus et la configuration des familles, cette mesure représentera entre 1 108 et 2 030 euros de perte de prestations par an pour 150 000 familles, souvent jeunes, concernées par l'abaissement des plafonds et entre 94 et 187 euros en moins chaque année pour les 1,6 million de familles concernées par la baisse des montants. Ces baisses de prestation sont importantes et il ne s'agit pas pour nous d'économies. Nous n'y sommes pas favorables.

La commission adopte l'amendement n° 2.

M. Vincent Éblé , président . - Nous devons à présent nous prononcer sur l'ensemble des articles dont nous nous sommes saisis pour avis.

M. Bernard Delcros . - Nous nous abstiendrons.

Sous réserve de l'adoption de ses amendements, la commission a émis un avis favorable aux articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 dont elle s'est saisie.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction de la sécurité sociale

- Mme Marie DAUDÉ, cheffe de service adjointe à la directrice de la sécurité sociale (DSS) ;

- M. David HOYRUP, adjoint au sous-directeur du financement de la sécurité sociale ;

- M. Hugo GILARDI, adjoint au sous-directeur du financement du système de soins.

Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES)

- Mme Geneviève GAUTHEY, responsable du budget et de la communication

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

- M. Frédéric FAVIÉ, directeur adjoint du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).


* 1 La commission des finances s'est saisie pour avis des articles suivants : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 8 ter , 9, 13, 14, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 35, 39, 48, 52, 53, 54, 55 et 57.

* 2 La Cour des comptes estime que les dépenses publiques augmenteraient tendanciellement au cours du quinquennat de 3,3 % en valeur par an, dont 3,2 % pour l'État et les ODAC, 3,5 % pour les APUL et 3,4 % pour les ASSO, avec une hypothèse d'inflation de 1,7 %. Cf. Cour des comptes, « La situation et les perspectives des finances publiques », juin 2017, pp. 121-124.

* 3 La décomposition suivante avait été demandée : r égime général, fonds de réserve pour les retraites, Caisse d'amortissement de la dette sociale, assurance chômage, régimes de retraite complémentaires, autres régimes de sécurité sociale, hôpitaux et autres organismes dépendant des assurances sociales.

* 4 Voir sur ce point : « La dette publique de la France : un poids du passé, un défi pour l'avenir », rapport d'information n° 566 (2016-2017) d'Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances, 31 mai 2017.

* 5 Le déficit des régimes obligatoires de base et du FSV s'élevait en 2008 à 8,2 milliards d'euros.

* 6 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

* 7 Loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.

* 8 Cour des comptes, certification des comptes du régime général de sécurité sociale, exercice 2016, juin 2017 : ce produit « contrevient aux normes et principes comptables, ce qui constitue un désaccord sur les comptes de la CNAMTS et de la branche maladie ».

* 9 La mise en place de la PUMa a conduit à une modification des règles d'attribution de la CSG aux autres régimes maladie se traduisant par la perception d'un produit exceptionnel de CSG en 2016, non prévu par la loi de financement pour 2016.

* 10 Il s'agit de la section comptable créée dans le cadre de la réforme des retraites de 2010 et spécifiquement dédiée à la mise en réserve des recettes affectées au financement du maintien à 65 ans du départ à la retraite pour les parents de trois enfants ou d'un enfant handicapés nés entre le 1 er juillet 1951 et le 31 décembre 1955.

* 11 Loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 12 Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2017.

* 13 Rapport général fait au nom de la commission des finances par M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général, Tome II, fascicule 1, volume 1 : les conditions générales de l'équilibre financier (article liminaire et première partie de la loi de finances).

* 14 Avis n° 2017-4 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2018.

* 15 Annexe 9 « Impact du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 sur les comptes et les besoins de trésorerie » au présent projet de loi de financement.

* 16 Avis n° 108 (2016-2017) de M. Francis Delattre fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2016.

* 17 Annexe 4 au présent projet de loi de financement.

* 18 Évolution et perspectives des retraites en France, Rapport annuel du Conseil d'orientation des retraites, juin 2017.

* 19 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 20 Annexe 8 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

* 21 Rapport sur les perspectives de financement à moyen- long terme des régimes de protection sociale, Haut conseil du financement de la protection sociale, juin 2017.

* 22 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 23 Le taux moyen de financement de l'ACOSS en 2016 s'est établi à -0,458  %.

* 24 Compte-rendu de la commission des affaires sociales du Sénat, 25 octobre 2017.

* 25 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 26 Le taux de la cotisation des assurances sociales affectée aux risques maladie, maternité, invalidité et décès dû par l'employeur et par le salarié est fixé par voie réglementaire et codifié à l'article D. 242-3 du code de la sécurité sociale.

* 27 Au 1 er novembre 2017, le PASS est de 39 228 euros. Il sera porté à 39 852 euros au 1 er janvier 2018.

* 28 Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de juillet 2017.

* 29 « Les exonérations générales de cotisations », Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements (COSAPE), France Stratégie, juillet 2017.

* 30 Article 127 à 135.

* 31 Cour des comptes, Rapport d'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2013.

* 32 L'assiette de la CSG sur les revenus d'activité est diminuée d'un abattement représentatif des frais professionnels de 1,75 %, dans la limite de quatre fois le plafond annuel de la sécurité sociale. Le même abattement s'applique sur l'assiette de la CSG sur les allocations de chômage.

* 33 Article L. 136-8 du code de la sécurité sociale.

* 34 Article L. 136-2 du code de la sécurité sociale.

* 35 Ces conditions de ressources sont celles qui sont applicables pour l'attribution de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), soit un montant de ressources inférieur à 9 609,20 euros par an pour une personne seule et 14 918,90 euros pour un ménage.

* 36 CJUE, 26 février 2015, aff. 623/13, ministre de l'économie et des finances c/ Gérard de Ruyter.

* 37 Règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté.

* 38 L'article 29 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 a, en effet, étendu le champ d'application de la CSG et de la CRDS aux revenus fonciers et aux plus-values immobilières de source française perçus par les personnes physiques fiscalement domiciliées hors de France (communément appelée « CSG des non-résidents »).

* 39 Ces prestations sont régies par des dispositions spécifiques du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale.

* 40 Toutefois, il s'agit d'un excédent provisoire, celui-ci devant être revu à la baisse en 2019 au regard de l'impact financier en année pleine de la suppression de la cotisation salariale chômage.

* 41 Les agents publics dont la rémunération mensuelle nette est inférieure au traitement mensuel brut afférent à l'indice majoré 313 de la fonction publique, soit 1 466,73 euros, sont exonérés de CES.

* 42 Ou remplissant l'une des conditions d'invalidité mentionnées à l'article 195 du code général des impôts.

* 43 En outre, d'après le tome II de l'évaluation des voies et moyens annexé au projet de loi de finances, 6,1 millions de ménages bénéficient actuellement de l'abattement prévu à l'article 157 bis du code général des impôts, mais les personnes âgées de plus de 65 ans ne sont pas les seules à en bénéficier (les personnes invalides de condition modeste sont ainsi comprises dans ce total).

* 44 Rapport général fait au nom de la commission des finances par M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, rapporteur général, Tome II, fascicule 1, volume 1 : Les conditions générales de l'équilibre financier (article liminaire et première partie de la loi de finances).

* 45 Compte-rendu de la commission des affaires sociales du Sénat, 25 octobre 2017.

* 46 En effet, la mission principale du FSV consistant à financer la prise en charge des cotisations des chômeurs, son solde est très sensible au niveau de l'emploi.

* 47 Loi n° 70-13 du 3 janvier 1970 portant création d'une contribution sociale de solidarité au profit de certains régimes de protection sociale des travailleurs non-salariés.

* 48 Par dérogation, le produit de la contribution supplémentaire introduite en loi de finances rectificative pour 2016 est affecté à la branche maladie en 2017.

* 49 Bien que partageant les mêmes modalités d'assiette, de recouvrement, de contrôle et d'affectation, ces deux contributions sont actuellement distinctes.

* 50 Le renforcement des baisses de cotisations au niveau du SMIC s'accompagnera d'une modification des conditions de cumul entre ce dispositif et la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels (DFS), afin de ne pas accroître les distorsions déjà existantes entre secteurs économiques en fonction des règles applicables. Cette DFS prenait la forme d'un abattement d'assiette de cotisations patronales et salariales, dont le taux varie selon les professions.

* 51 « Pacte pour la compétitivité de l'industrie française », rapport au Premier ministre, Louis Gallois, commissaire général à l'investissement, 5 novembre 2012.

* 52 Article 66 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 53 Les éléments de rémunération pris en compte dans le calcul sont ceux retenus pour le calcul des cotisations de sécurité sociale aux termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.

* 54 Les entreprises qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014.

* 55 Voir en particulier les rapports du comité de suivi du CICE ainsi que les études de l'Organisme français des conjonctures économiques.

* 56 Voir « CICE, le rendez-vous manqué de la compétitivité ? », Rapport d'information n° 789 (2015-2016) de Marie-France Beaufils, fait au nom de la commission des finances, déposé le 13 juillet 2016.

* 57 Article L. 5422-9 du code du travail .

* 58 « Les exonérations générales de cotisations », Comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements (COSAPE), France Stratégie, juillet 2017

* 59 .

* 60 Article 83 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005.

* 61 Article 135 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

* 62 Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

* 63 Les PME qui n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création sont ainsi exonérées de cette contribution dans la limite, par salarié, du plafond annuel de la sécurité sociale.

* 64 Rapport général fait au nom de la commission des finances par M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général, rapporteur général, Tome II, fascicule 1, volume 1 : Les conditions générales de l'équilibre financier (article liminaire et première partie de la loi de finances).

* 65 Assemblée nationale, XV e législature, Session ordinaire de 2017-2018, Compte rendu intégral, Deuxième séance du jeudi 26 octobre 2017.

* 66 Si l'aide était initialement destinée aux seuls demandeurs d'emploi, la liste de ses bénéficiaires a peu à peu été élargie. La liste des bénéficiaires potentiels figure à l'article L. 5141-1 du code du travail.

* 67 Article L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale.

* 68 L'article R. 5141-2 du code du travail fixe plusieurs critères permettant de vérifier cette condition.

* 69 Conseil des prélèvements obligatoires, Entreprises et « niches » fiscales et sociales, des dispositifs dérogatoires nombreux, octobre 2010.

* 70 Inspection générale des finances et inspection générale des affaires sociales, revue de dépenses sur les exonérations et exemptions de charges sociales spécifiques, juin 2015.

* 71 Loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017.

* 72 Sont considérés comme véhicules de tourisme les voitures particulières au sens du 1 du C de l'annexe II à la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007, ainsi que les véhicules à usages multiples qui, tout en étant classés en catégorie N1 au sens de cette même annexe, sont destinés au transport de voyageurs et de leurs bagages ou de leurs biens.

* 73 « Lutter contre la fraude sociale, un impératif pour le juste droit », rapport d'information n° 599 d'Agnès Canayer et Anne Emery-Dumas fait au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat, 2016-2017.

* 74 Actes réalisés en méconnaissance des règles fixant les modalités de prise en charge ou de remboursement par l'assurance maladie (article L. 162-1-7 du CSS). Il peut, par exemple, s'agir du non-respect de la classification commune des actes médicaux (CCAM) ou des conditions particulières de prescription, d'utilisation ou de réalisation de l'acte ou de la prestation.

* 75 Aux termes de l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale.

* 76 Aux termes de l'article L. 114-17 du code de la sécurité sociale

* 77 Dans les conditions fixées par le décret n° 2017-859 du 9 mai 2017 relatif aux conditions d'exercice du droit de communication mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 114-19 du code de sécurité sociale en Conseil d'État pris après l'avis de la CNIL du 9 mai 2017.

* 78 Avis n° 108 (2016-2017) de M. Francis Delattre fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2016.

* 79 Cour des comptes, rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 80 Ce solde tendanciel pour la branche maladie, qui figure au tableau d'équilibre financier à l'annexe 9 du présent projet de loi de financement comprend toutefois la compensation pour 2018 des mesures ayant permis la compensation du pacte de responsabilité et de solidarité en lois de finances et de financement pour 2017, en relais de l'extinction des mesures non pérennes prises uniquement pour 2017.

* 81 En 2016 et 2017, le financement du FMESPP mobilisait en effet le financement du Fonds pour l'emploi hospitalier (FEH) et de l'Association nationale pour la formation permanente du personnel hospitalier.

* 82 Avis n° 2017-4 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2018.

* 83 Gouverner la protection sociale, transparence et efficacité, note du Conseil d'analyse économique n° 28, Antoine Bozio et Brigitte Dormont, janvier 2016.

* 84 Parmi ces mesures, on peut noter la poursuite de l'application de la convention médicale, pour 500 millions d'euros en 2018, et pour les années suivantes, les conventions négociées avec d'autres professions (pharmaciens, orthophonistes, orthoptistes, sages-femmes), ou en cours de négociation (masseurs-kinésithérapeutes, infirmiers).

* 85 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 86 Idem.

* 87 « Améliorer la qualité du système de santé et maîtriser les dépenses, propositions de l'Assurance maladie pour 2018 », rapport au ministre chargé de la Sécurité sociale et au Parlement sur l'évolution des charges et des produits de l'Assurance maladie au titre de 2018, 7 juillet 2017.

* 88 Parmi ces expérimentations figurent le dispositif Paerpa (Personnes âgées en risque de perte d'autonomie), prévue à l'article 48 de la loi de financement pour 2013, l'expérimentation relative à l'insuffisance rénale chronique, issue de l'article 43 de la même loi de financement, ou plus récemment, l'expérimentation visant à autoriser les pharmaciens à administrer le vaccin contre la grippe, instaurée pour trois ans par l'article 66 de la loi de financement pour 2017.

* 89 Évaluation préalable du présent article.

* 90 Décret n° 2017-584 du 20 avril 2017 fixant les modalités d'application du contrat d'amélioration de la qualité et de l'efficience des soins.

* 91 Article R. 6123-118 du code de la santé publique.

* 92 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

* 93 Cour des comptes, Rapport d'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 94 Rapport économique, social et financier 2018, p. 25.

* 95 Programme présidentiel d'Emmanuel Macron, p. 13.

* 96 COR, « Évolutions et perspectives des retraites en France », rapport annuel, juin 2017.

* 97 Cour des comptes, Rapport d'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2017.

* 98 Avis n° 108 (2016-2017) de M. Francis Delattre fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2016.

* 99 En effet, la mission principale du FSV consistant à financer la prise en charge des cotisations des chômeurs, son solde est très sensible au niveau de l'emploi.

* 100 Données communiquées par le FSV.

* 101 Avec l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004.

* 102 Ou à partir de l'âge minimum légal de départ à la retraite en cas d'invalidité ou d'inaptitude, soit 62 ans à compter de la génération née en 1955.

* 103 Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2017.

* 104 Aux termes de l'article L. 161-25, ce coefficient est égal à l'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques l'avant-dernier mois qui précède la date de revalorisation des prestations concernées. Le coefficient ne peut être inférieur à 1.

* 105 Ces chiffrages n'incluent pas les effets de l'avancement de la date de revalorisation de l'ASPA au 1 er janvier à compter de 2019.

* 106 Rapport à la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2017.

* 107 Compte-rendu de la commission des affaires sociales du Sénat, 18 octobre 2017.

* 108 Évaluation préalable du présent article.

* 109 Ces chiffrages n'incluent pas les effets de la revalorisation de l'ASPA.

* 110 Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, Cour des comptes, septembre 2017 : « Les taux de cotisation AT-MP restent néanmoins trop élevés au regard des charges prévisibles de la branche. Un ajustement à la baisse des taux moyens de cotisation AT-MP devrait ainsi s'imposer dès 2018, indépendamment de toute évolution des taux maladie ».

* 111 Le directeur financier de l'ACOSS, Alain Gubian, a confirmé cette analyse lors de son audition le 25 octobre 2017 par la commission des affaires sociales du Sénat : « Certaines mesures, comme par exemple la diminution de la cotisation AT-MP, finançant cette branche excédentaire depuis plusieurs années, pour augmenter à due concurrence les recettes de la branche maladie, permettent de financer indirectement le déficit porté par l'ACOSS ».

* 112 Le FIVA a été créé en 2001 pour procéder à la réparation des préjudices causés par les maladies liées à l'amiante, qu'elles soient ou non d'origine professionnelle. La branche AT-MP est le principal contributeur du fonds, puisqu'elle lui a versé 91 % des dotations qu'il a reçues depuis sa création.

* 113 Dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, créé en 1999.

* 114 Cette dotation n'était pas prévue par la loi de financement pour 2016 ; elle résulte des dispositions rectificatives au titre de l'exercice 2016 introduites par l'article 3 du présent projet de loi de financement.

* 115 FIVA + FCAATA + versement de compensation de la sous-déclaration des AT-MP.

* 116 L'archivage des prescriptions médicales à la CNAMTS étant de 33 mois, toute vérification visant à certifier le lien entre les arrêts prescrits et la maladie professionnelle reconnue a posteriori ne pourrait remonter au-delà de cette date.

* 117 Rapports de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2015 et septembre 2017.

* 118 Transfert de l'ensemble des charges liées aux allocations de logement à caractère familial (ALF), qui représente pour la CNAF une moindre dépense de 4,7 milliards d'euros en 2016 par rapport à 2015, auquel s'ajoute le transfert du financement de la protection juridique des majeurs, à hauteur de 0,4 milliard d'euros.

* 119 Notamment le gel des montants de l'allocation de base et de la prime de naissance, la suppression du complément de libre choix d'activité majoré, la modulation des allocations familiales et le décalage du versement de la prime de naissance.

* 120 Voir le rapport pour avis n° 108 (2016-2017) de Francis Delattre, fait au nom de la commission des finances.

* 121 Cour des comptes, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale , septembre 2017.

* 122 La masse salariale a progressé de 1,6 % en 2014, 1,7 % en 2015, 2,4 % en 2016 et 3,3 % en 2017.

* 123 L'inflation a été de 0,5 % en 2014, 0 % en 2015 et 0,2 % en 2016, entraînant une revalorisation annuelle des prestations légales de 0,2 % en 2015, 0,1 % en 2016 et 0,3 % en 2017.

* 124 Avis du Haut Conseil des finances publiques sur le projet de loi de finances pour 2018 et le projet de loi de financement de la sécurité pour 2018.

* 125 Source : Insee

* 126 Source : OCDE et Banque de France.

* 127 Loi de programmation des finances publiques pour 2018 à 2022.

* 128 90 millions d'euros s'agissant de la PAJE, 200 millions d'euros s'agissant du FNAS.

* 129 923,08€ de prime à la naissance et 12x92,31€ d'allocation de base à taux partiel.

* 130 12x92,31€ pour les familles exclues des nouveaux plafonds de l'allocation de base à taux partiel ainsi que pour les familles qui passeront de l'allocation de base à taux plein à l'allocation à taux partiel, auxquels s'ajoutent, pour les familles qui seront exclues de la prime à la naissance, 923,08€ de moindre prestation l'année de naissance de l'enfant (sur la base des montants au 1 er avril 2017).

* 131 Pour les 47 % de familles monoparentales restantes, la majoration du CMG conduirait à un reste à charge inférieur au seuil de 15 %. Le montant de CMG qui leur est versé n'évoluera donc pas.

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