C. LE SOLDE POUR 2024 CONNAÎTRAIT UNE « DÉGRADATION PRÉVISIBLE » PAR RAPPORT À SON NIVEAU DE 2023, ALORS QUE LES CONDITIONS D'ENDETTEMENT SE SONT DÉTÉRIORÉES

1. Une dégradation de 11,2 milliards d'euros du solde des ROBSS et du FSV

Établie à 8,8 milliards d'euros pour 2023, la prévision de déficit de l'ensemble des régimes obligatoires de base et du FSV est portée à 11,1 milliards d'euros pour 2024 dans le texte initial et 11,2 milliards d'euros, après examen à l'Assemblée nationale. Cette dégradation du solde, qui avait été caractérisée de « prévisible » par la Cour des comptes11(*), n'est pas le fait de la branche maladie, dont le solde s'améliore passant de 9,6 à 9,2 milliards d'euros, mais résulte surtout de la branche vieillesse.

Évolution du solde des branches de la sécurité sociale
entre 2023 et 2024

(en milliard d'euros)

Branches

2023

2024

Évolution

Maladie

- 9,6

- 9,2

+ 0,4

Accidents du travail - maladies professionnelles (AT-MP)

+ 1,9

+ 1,1

- 0,8

Vieillesse

- 1,9

- 5,9

- 4,0

Famille

+ 1,0

+ 0,8

- 0,2

Autonomie

- 1,1

+ 1,3

+ 2,4

Toutes branches (hors transferts entre branches)

- 9,6

- 11,9

- 2,3

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

+ 0,8

+ 0,8

- 0,0

Toutes branches (hors transferts entre branches), y.c. FSV

- 8,8

- 11,1

- 2,3

Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet de loi de financement déposé à l'Assemblée nationale

Malgré les premiers effets de la réforme des retraites menée en 2023, le déficit de la branche vieillesse s'aggraverait par rapport à 2023, passant de 1,9 milliards d'euros à 5,9 milliards d'euros, avec au surplus une détérioration du déficit de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), qui atteindrait 3,7 milliards d'euros en 2024, soit 1,2 milliard d'euros de plus qu'en 2023.

2. L'augmentation des taux d'intérêt et la diminution des ressources de la Cades compliquent la gestion de la dette sociale
a) Des conditions de refinancements dégradées

Les reprises par la Cades de dettes des branches maladie et vieillesse du régime général et du FSV devraient contribuer à améliorer le solde de trésorerie du régime général.

Fin 2023, le solde net de l'Acoss devrait devenir excédentaire, pour un montant approchant 6 milliards d'euros. Selon la Cour des comptes, cet excédent s'explique par « l'évolution favorable du déficit du régime général en 2023, attendu proche de 8 milliards d'euros, et par l'importance des versements reçus de la Cades au titre des déficits antérieurs, à hauteur de 24,2 milliards d'euros. » Toujours selon la Cour, cette situation de trésorerie nette excédentaire est « temporaire mais bienvenue. » L'Acoss ne peut en effet légalement emprunter que sur des maturités inférieures à un an, devenues coûteuses avec la hausse des taux d'intérêt : les intérêts de ses émissions se sont déjà élevés à 113 millions d'euros du 1er janvier au 23 mars 2023.

Selon les informations communiquées au rapporteur pour avis, le taux de refinancement de la Cades, c'est-à-dire le taux moyen pondéré des emprunts en cours, a connu une hausse inquiétante au cours de l'année 2023 (passant de 0,62 % début 2022 à 1,93 % fin 2021). Les intérêts des taux révisables, qui représentent 20,66 % de l'endettement de la Cades, ont connu la plus forte hausse, leur taux s'établissant à 3,30 % fin 2023.

Évolution du taux de refinancement de la Cades
jusqu'au 31 août 2023

(en pourcentage)

Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) - septembre 2023

b) La diminution des ressources de la Cades engendre une baisse de sa capacité d'amortissement

En 2023, les ressources de la Cades représentent 21,1 milliards d'euros et sont constituées de la CRDS au taux de 0,5 % pour un montant net de 8,9 milliards d'euros, de la CSG au taux de 0,6 % pour un montant net de 10,1 milliards d'euros et d'un versement annuel du FRR pour un montant de 2,1 milliards d'euros.

Or, en vertu de la loi du 7 août 202012(*), les ressources attribuées à la Cades diminueront ainsi à partir de 2024 pour abonder les branches et renforcer la trajectoire d'équilibre de la sécurité sociale :

en 2024, la fraction de CSG affectée à la Cades passera de 0,6 à 0,45 point, notamment pour financer des dépenses nouvelles liées à la prise en charge de la perte d'autonomie par la CNSA ;

en 2025, le versement annuel du Fonds de réserve des retraites (FRR) passera de 2,1 milliards d'euros à 1,45 milliards d'euros, faute de réserves suffisantes.

Évolution des ressources de la Cades selon la loi du 7 août 2020

 

Jusqu'à 2023

2024

À partir de 2025

CSG (en point)

0,6

0,45

0,45

CRDS (en point)

0,5

0,5

0,5

FRR (en milliards d'euros)

2,1

2,1

1,45

Source : Cades

La diminution de ses ressources ralentit la marche vers l'extinction de la Cades. Pour la première fois depuis sa création, un transfert de dette s'est accompagné - non d'une augmentation - mais d'une diminution des ressources de la Caisse. Selon les calculs de votre rapporteur, le produit des ressources affectées à la Cades, malgré sa dynamique tendancielle, n'aurait pas retrouvé en 2025 son niveau de 2022.

Évolution du produit des ressources affectées à la Cades
en application de la loi du 7 août 2020

(en milliard d'euros)

Source : commission des finances du Sénat. Note : calculs avec hypothèse d'évolution tendancielle constante des recettes, sur la base de la tendance constatée entre 2022 et 2023


* 11 Rapport annuel sur les lois de financement de la sécurité sociale - mai 2023.

* 12 Loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie.

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