N° 240

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 janvier 2024

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France,

Par Mme Elsa SCHALCK,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet, président ; M. Christophe-André Frassa, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Marc-Philippe Daubresse, Jérôme Durain, Philippe Bonnecarrère, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, MM. Dany Wattebled, Guy Benarroche, Mme Nathalie Delattre, vice-présidents ; Mmes Agnès Canayer, Muriel Jourda, M. André Reichardt, Mme Isabelle Florennes, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Philippe Bas, Mme Nadine Bellurot, MM. Olivier Bitz, François Bonhomme, Hussein Bourgi, Ian Brossat, Christophe Chaillou, Mathieu Darnaud, Mmes Catherine Di Folco, Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, Françoise Gatel, Laurence Harribey, Lauriane Josende, MM. Éric Kerrouche, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Audrey Linkenheld, MM. Alain Marc, Hervé Marseille, Michel Masset, Mmes Marie Mercier, Corinne Narassiguin, M. Paul Toussaint Parigi, Mme Olivia Richard, M. Pierre-Alain Roiron, Mmes Elsa Schalck, Patricia Schillinger, M. Francis Szpiner, Mmes Lana Tetuanui, Dominique Vérien, M. Louis Vogel, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

643, 1070 et T.A. 193

Sénat :

147 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

La proposition de loi présentée par les députés Aurore Bergé, Laurent Marcangeli, Fadila Khattabi et plusieurs de leurs collègues portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir en France est examinée au Sénat après une discussion en deux temps - en avril puis novembre 2023 - à l'Assemblée nationale1(*). Ce texte d'initiative parlementaire fait écho à une promesse ancienne du Président de la République qui avait annoncé en 2018 une grande loi pour répondre aux « défis du vieillissement ». Cependant, l'adoption d'une loi de programmation avant la fin de l'année 2024 a d'ores et déjà été promise par Élisabeth Borne, alors Première ministre, le 22 novembre dernier pour répondre aux « enjeux centraux [que sont] pour l'avenir de notre société » l'autonomie et le grand âge2(*). Composée d'une quinzaine d'articles lors de son dépôt en décembre 2022, la proposition de loi a plus que quadruplé : les députés y ont intégré une cinquantaine d'articles additionnels s'inspirant de divers travaux, notamment des conclusions du Conseil national de la refondation (CNR) « Bien Vieillir » présentées le 29 mars 2023 ou des États généraux de la maltraitance en juillet 2023.

Saisie pour avis des dispositions de ce texte relatives à la protection des majeurs, la commission des lois a adopté des amendements rédigés en concertation avec les rapporteurs de la commission des affaires sociales compétente au fond. Elle a précisé les missions des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et clarifié les conditions du contrôle des antécédents judiciaires des personnes en contact avec des majeurs vulnérables.

S'agissant des mesures de protection juridique, Elsa Schalck, rapporteure pour avis au nom de la commission des lois, a considéré que la méthode consistant à rajouter au fil de la discussion, sans étude d'impact et sans vision d'ensemble, des mesures ponctuelles souvent inabouties, n'était pas à la hauteur des enjeux et allait créer une complexité normative inutile pour les professionnels concernés. À son initiative, la commission des lois a donc décidé de supprimer les articles relatifs au fonctionnement de la curatelle, de la tutelle et de l'habilitation familiale et à l'élargissement du mandat de protection future aux missions d'assistance, ainsi que celui relatif au régime de responsabilité des personnes en charge des mesures de protection3(*).

Elle a en revanche souhaité mettre le Gouvernement face à ses responsabilités en maintenant le registre spécial des mandats de protection future attendu depuis plus de huit ans et en créant en parallèle un registre général des mesures de protection juridique en cours d'exécution, qu'elles soient judiciaires ou juridiques, pour permettre le respect du principe de subsidiarité.

I. MANDATAIRES JUDICIAIRES À LA PROTECTION DES MAJEURS : MIEUX DÉFINIR LEURS MISSIONS DANS LE CODE DE L'ACTION SOCIALE ET DES FAMILLES

L'article 5 tend à ajouter une définition des missions des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) dans le code de l'action sociale et des familles (CASF), répondant ainsi à une attente de la profession qui souhaite être mieux connue et considérée.

La commission des lois, en concertation avec la commission des affaires sociales compétente au fond, a souhaité définir les principes régissant leur action par renvoi à l'article 415 du code civil4(*) et supprimer la référence à une charte éthique définie par arrêté ministériel puisqu'un document rédigé en concertation avec la profession existe déjà et semble satisfaisant en l'état, étant rappelé que la profession de MJPM n'est pas structurée autour d'un ordre professionnel disposant d'un pouvoir disciplinaire.

Elle a également supprimé la disposition créant des obligations de signalement spécifiquement mises à la charge des MJPM, afin de conserver les obligations de droit commun qui semblent suffisantes. En l'état du droit, les MJPM ont l'obligation de signaler les actes de maltraitance à l'autorité judiciaire, en application de l'article 434-3 du code pénal5(*). S'agissant des autres infractions, il entre dans leurs missions de protéger la personne et ses biens, et, à ce titre, de signaler au juge des tutelles et au procureur tout fait qui pourrait recevoir une qualification pénale, sachant qu'ils n'y sont pas empêchés par un secret professionnel au sens de l'article 226-13 du code pénal. Enfin, l'article 4 de la proposition de loi qui crée l'obligation générale de signalement de maltraitance sur des personnes vulnérables à une instance départementale de recueil et de suivi ad hoc concerne déjà les MJPM, sans qu'il soit nécessaire de reproduire cette obligation dans un article dédié.


* 1 Après avoir été déposée le 15 décembre 2022, elle a été examinée par la commission des affaires sociales le 5 avril 2023. Son examen en séance, débuté le 11 avril, a été interrompu le 13 pour reprendre le 20 novembre et finalement aboutir à une adoption le 23 novembre dernier.

* 2 https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/comptes-rendus/seance/session-ordinaire-de-2023-2024/premiere-seance-du-mercredi-22-novembre-2023#3298210

* 3 Articles 5 quater, 5 quinquies, 5 sexies, 5 octies et 5 nonies de la proposition de loi.

* 4 Respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne, finalité dans l'intérêt de la personne protégée et autonomie.

* 5 Le fait, pour quiconque ayant connaissance de privations, de mauvais traitements ou d'agressions ou atteintes sexuelles infligés à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives ou de continuer à ne pas informer ces autorités tant que ces infractions n'ont pas cessé est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.

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