II. CONTRÔLE DES ANTÉCÉDENTS JUDICIAIRES : ACCEPTER UN ÉLARGISSEMENT DE LA CONSULTATION DU FIJAIS POUR MIEUX PROTÉGER LES MAJEURS VULNÉRABLES ET MIEUX ENCADRER LA SUSPENSION PROVISOIRE EN CAS DE CONDAMNATION NON DÉFINITIVE OU DE MISE EN EXAMEN

L'article 5 bis A, introduit par amendements de séance à l'Assemblée nationale, modifie l'article L. 133-6 du CASF qui a pour objet d'interdire l'exercice de fonctions - permanentes ou occasionnelles, à quelque titre que ce soit, y compris bénévole - dans les établissements, services ou lieux de vie et d'accueil du secteur social et médico-social en cas de condamnations judiciaires pour certaines infractions portant atteinte à la personne ou aux biens. Depuis la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants, ce contrôle des antécédents judiciaires est assuré, avant l'exercice des fonctions de la personne et à intervalles réguliers lors de leur exercice, par la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire et par l'accès aux informations contenues dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (Fijais). Ce fichier est toutefois réservé aux vérifications de la situation des personnes exerçant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs, ce qui ne couvre pas tout le champ des établissements visés par l'article L. 133-6 du CASF qui peuvent en effet accueillir des personnes âgées ou encore des adultes en situation de handicap ou d'insertion.

L'article 5 bis A vise à : étendre le champ des professionnels concernés par les interdictions d'exercice en intégrant les services de gardes d'enfants ou d'assistance aux personnes âgées et handicapées, y compris auprès d'employeurs particuliers ; permettre les interrogations du Fijais pour procéder à des vérifications concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des majeurs vulnérables ; autoriser la création d'un système d'information automatisant la consultation du bulletin n° 2 et du Fijais et permettant de délivrer à la personne concernée un « certificat d'honorabilité » attestant qu'il n'existe pas d'inscription entraînant une incapacité professionnelle.

La commission des lois a relevé que ces dispositions allaient considérablement augmenter le nombre de personnes pouvant faire l'objet de contrôle des antécédents judiciaires et d'une consultation du Fijais, tout en changeant substantiellement la nature de ce fichier conçu pour la protection des mineurs, ce qui pourrait également, à terme, entrainer un allongement de la liste des infractions concernées.

Elle a toutefois accepté ces dispositions, considérant que l'objectif de protection de personnes en état de vulnérabilité du fait de leur âge ou de leur handicap pouvait justifier une atteinte, qui reste proportionnée, au « droit pour chacun d'obtenir un emploi » reconnu par le préambule de la Constitution de 1946 ou à la liberté d'entreprendre ainsi qu'au respect du droit à la vie privée.

La commission des lois a adopté deux amendements de la rapporteure, élaborés en concertation avec les rapporteurs de la commission des affaires sociales. Ils permettent, d'une part, de supprimer les termes « certificat d'honorabilité » qui ne recouvrent aucune réalité s'agissant seulement d'un document attestant à un instant donné de l'absence d'inscription au casier judiciaire et au Fijais, et, d'autre part, de clarifier le fait que seraient concernées par les interrogations du Fijais les personnes exerçant des fonctions auprès de majeurs vulnérables en raison de leur âge ou de leur handicap.

S'agissant de la suspension temporaire d'activité ou d'agrément jusqu'à la décision définitive de la juridiction compétente en cas d'inscription au Fijais pour une condamnation non définitive ou en raison d'une mise en examen, la commission des lois a souhaité préciser les conditions dans lesquelles le directeur d'un établissement, d'un service ou d'un lieu de vie et d'accueil peut être informé d'une condamnation non définitive ou d'une mise en examen d'un intervenant. La rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, qui fait seulement état de l'inscription au Fijais, est ambiguë car elle laisse penser que l'information lui serait directement accessible, ce qui semble problématique s'il s'agit de structures privées. Faute de précision sur la manière dont cette information extraite du Fijais serait transmise, la commission des lois a préféré se référer aux transmissions d'informations par le Parquet déjà prévues par le code de procédure pénale.

Enfin, afin de cantonner les mesures de suspension provisoire aux cas les plus graves, il lui a paru nécessaire d'imposer une analyse in concreto établissant l'existence de risques pour la santé ou la sécurité des mineurs ou majeurs en situation de vulnérabilité avec lesquels la personne est en contact.

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