N° 78

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME IV

ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

Par M. Jean BERNADAUX, Sénateur.

Voir les numéros : Assemblée nationale (10ème législ.) : 2222, 2270 à 2275 et TA. 413. Sénat : 76 et 77 (annexe n°16) (1995-1996)

Lois de finances.

(1) Cette commission est composée de MM Adrien Gouteyron , président; Pierre Laffitte,Albert Vecten, Jean Delaneau, Jean-Louis Carrère, vice-présidents; André Egu, Alain Dufaut, André Maman, Ivan Renar, secrétaires ; François Autain, Honoré Bailet, Jean Bernadaux, Jean Bernard, James Bordas, Jean-Pierre Camoin, Jean-Claude Carle, Robert Castaing, Marcel Charmant, Philippe Darniche, Marcel Daunay, André Diligent, Ambroise Dupont, Daniel Eckenspieller, Alain Gérard, Jean-Paul Hugot, Pierre Jeambrun, Alain Joyandet, Philippe Labeyrie, Pierre Lacour, Henri Le Breton, Jacques Legendre, Guy Lemaire, François Lesein, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin, François Matthieu, Philippe Nachbar, Sosefo Makapé Papilio,MichelPelchat, Jean-Marie Poirier, Guy Poirieux, Mme Danièle Pourtaud. MM.Roger Quilliot,Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Claude Saunier, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Marcel Videl, Henri Weber.

Mesdames, Messieurs

Amputé d'environ 92 millions de francs à l'issue du débat à Assemblée nationale, le projet de budget de l'enseignement scolaire, qui regroupe enseignements primaire et secondaire, s'élève pour 1996 à un peu Plus de 273,3 milliards de francs.

Il représente environ 78,4 % de l'ensemble des crédits affectés au ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche qui atteignent 348,5 milliards de francs.

Comme l'ensemble de ce budget, il progresse, à structures constantes, de 4,3 % par rapport à 1995. Ce taux de progression doit être rapproché de celui du budget de l'État qui s'établit, si l'on compare le projet de loi de finances pour 1996 à la loi de finances rectificative pour 1995, à 1,8 %, taux Pour la première fois inférieur à celui de l'inflation (2 %).

Ce parallèle met en évidence la priorité accordée par le Gouvernement, dans un contexte de très grande rigueur budgétaire, au secteur de l'éducation.

Le fait que les arbitrages budgétaires lui ont été relativement favorables n'a cependant pas empêché le ministre chargé de l'éducation nationale de rechercher une meilleure utilisation des moyens existants. Le projet de budget de l'enseignement scolaire pour 1996 doit donc être également regardé comme un projet responsable.

Il est tentant, comme tous les sept ans, de laisser l'horizon se fixer, au-delà de l'exercice budgétaire, sur le moyen terme. Dans le champ des perspectives du nouveau septennat, quatre grands chantiers retiennent particulièrement l'attention : le référendum sur l'école, l'aménagement des rythmes scolaires, la sécurité des bâtiments et l'enseignement des langues étrangères.

I- UN PROJET DE BUDGET À LA FOIS PRIORITAIRE ET RESPONSABLE

Les moyens de l'éducation nationale vont progresser en 1996 alors même que les effectifs scolarisés vont continuer à baisser compte tenu de l'évolution défavorable de la démographie.

L'augmentation des ressources budgétaires, qui profite d'abord au « nouveau contrat pour l'école » -dont 1996 sera la deuxième année d'application- et vise, au-delà, à l'amélioration du fonctionnement général de l'éducation nationale, reçoit, dans la mise en oeuvre des orientations prioritaires, le renfort d'importants redéploiements.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DESTINÉS A L'ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

(Loi de finances initiale à loi de finances initiale)

A. DES MOYENS ACCRUS MALGRÉ LA BAISSE DÉMOGRAPHIQUE DU NOMBRE DES ÉLÈVES

Le projet de budget de l'enseignement scolaire pour 1996 enregistre, par rapport à 1995 (LFI), et après le débat budgétaire à l'Assemblée nationale, une augmentation brute d'environ 11,1 milliards de francs.

Les dépenses de personnel constituent, comme d'ordinaire, quelque 96 % des crédits.

1.813 créations d'emploi -dont 268 par redéploiement- sont prévues dans l'enseignement public, 1.185 au titre du « nouveau contrat pour l'école ». L'intégration dans l'enseignement public de trois établissements privés augmentera ce chiffre de 30 emplois au 1er janvier prochain et de 97 autres à la rentrée 1996.

L'application du principe de parité public-privé entraîne l'ouverture de 195 contrats dans le cadre du « nouveau contrat pour l'école », auxquels viendront s'ajouter 100 contrats de stagiaires du second degré.

En outre, 50 contrats seront créés au 1er septembre 1996 afin de poursuivre la régularisation de la situation des personnels des établissements dispensant un enseignement en langues régionales.

L'évolution de l'emploi n'est pas la même pour les différents niveaux d'enseignement.

1. L'enseignement primaire

Aucune création de poste d'enseignant n'est prévue pour les écoles ; la décision n'est pas choquante, puisqu'on devrait constater l'année prochaine une diminution des effectifs du primaire de 30.000 enfants environ.

Il faut se féliciter, bien au contraire, qu'en dépit de cette baisse des effectifs, le nombre des enseignants du premier degré soit maintenu.

Ce maintien doit permettre, tout d'abord et en application de la mesure n° 13 du « nouveau contrat pour l'école », de faire porter l'effort, pour la deuxième année consécutive, sur l'abaissement à 25 élèves de l'effectif des classes de maternelle dans les zones d'éducation prioritaire (ZEP). Il convient de rappeler que cet objectif est fixé sur une période de trois ans.

LES EFFECTIFS DU PREMIER DEGRÉ (PUBLIC + PRIVÉ)

Dans l'enseignement pré-élémentaire, l'effectif moyen des classes suit une tendance régulière à la baisse : de 27,7 élèves par classe en 1989 et 27 en 1993, il est passé à 26,8 à la rentrée 1994-95.

Le nombre des classes chargées (30 élèves et plus) a fortement chuté puisqu'il s'établit à 9,4 % contre 16 % en 1990, 43,3 % en 1980 et 91,6 % en 1975.

La diminution des effectifs dans l'enseignement pré-élémentaire devrait, par ailleurs, profiter à la scolarisation des enfants de 2 à 3 ans.

Le taux de scolarisation des enfants de 2 ans progresse lentement, mais régulièrement : il a évolué de 1,3 point en cinq ans (1991-1995), ramené à 0,7 point pour le seul enseignement public.

La loi d'orientation sur l'éducation de 1989 prévoit, dans son article 2, que tout enfant doit pouvoir être accueilli à l'âge de trois ans dans une école maternelle. Le taux de scolarisation de cette classe d'âge atteignait, à la présente rentrée, 99,8 % (public + privé). On peut donc considérer que l'objectif fixé est quasiment atteint, même si le taux actuel doit encore progresser dans quelques départements ruraux où il reste inférieur à 95 %.

En application de la mesure n° 13 précitée du « nouveau contrat pour l'école », l'effort national entrepris en faveur des zones d'éducation prioritaire (ZEP), et concentré sur les écoles maternelles, doit favoriser l'accueil des enfants dès l'âge de deux ans.

A l'école élémentaire, 600 élèves de plus devraient être scolarisés en 1995-96, ce qui correspond à une hausse modeste si on la rapporte au chiffre total des effectifs -plus de 4,1 millions d'enfants.

En baisse au début des années quatre vingt, l'effectif moyen des classes s'était accru en raison de l'évolution démographique. Ces dernières années, il tend à se stabiliser autour de 22,8-22,9 élèves (avec 1,7% seulement de classes de plus de 30 élèves), malgré la diminution des effectifs scolaires : cette stabilisation est la conséquence des transferts de moyens opérés de l'enseignement élémentaire vers le pré-élémentaire. Les effectifs des classes primaires restent toutefois nettement inférieurs à ceux des classes maternelles.

Le rééquilibrage des moyens vers les zones à forte croissance démographique est, en ce qui concerne l'école élémentaire, un souci constant. Cependant, l'orientation actuelle qui consiste à tenir également compte de la nécessité de maintenir en l'état le réseau des écoles rurales doit être saluée.

Dès le printemps 1993, M. François Bayrou avait indiqué qu'il n'y aurait plus de fermeture d'école rurale à classe unique contre la volonté des élus. Par la suite, les écoles rurales ont bénéficié de la décision prise par M. Edouard Balladur, dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire, de suspendre les mesures de réduction des services publics en milieu rural.

Le Gouvernement de M. Juppé a maintenu ce moratoire à la rentrée 1995, la politique de sauvegarde des services publics en zone rurale permettant de conserver plus de 300 écoles à classe unique. M. François Bayrou a précisé devant votre commission, le 24 octobre dernier, que l'application du moratoire avait à ce jour mobilisé près de 700 postes d'enseignants. Il est utile de rappeler qu'en l'absence de disposition légale ou réglementaire fixant un effectif minimum pour le maintien d'un emploi d'instituteur dans une école à classe unique, il appartient en principe à l'administration de l'éducation nationale de décider s'il y a lieu ou non de maintenir un tel emploi, compte tenu du cas d'espèce et, notamment, de la population susceptible d'être scolarisée.

Même si les décisions de l'inspecteur d'académie sont précédées d'une phase de concertation avec les représentants des collectivités locales qui siègent au conseil départemental de l'éducation nationale et avec les communes intéressées, les fermetures sont toujours très mal ressenties, en particulier lorsqu'elles interviennent après que d'importants investissements ont été réalisés par les communes dans les bâtiments scolaires.

Les élus locaux devraient être à l'avenir mieux associés à l'élaboration de la carte scolaire. Dans une quinzaine de départements, l'État a en effet passé une convention avec les conseils généraux et les communes ou groupements de communes intéressés (au nombre actuel de 351) pour garantir, en contrepartie d'un soutien du conseil général, le maintien pendant trois ans des postes dans les écoles menacées de fermeture.

Le souci d'adopter une réflexion prospective au sujet du maintien ou de la fermeture des établissements- dans certains cas inéluctable, car au-dessous d'un certain seuil numérique la sauvegarde à tout prix d'une école n'est pas souhaitable pour les enfants- avait marqué en juillet dernier les débats au Sénat du projet de loi de programmation du « nouveau contrat pour l'école ». La mise en place d'observatoires départementaux des flux scolaires au sein des inspections académiques ayant été suggérée par plusieurs membres de votre commission, le ministre chargé de l'éducation nationale avait pris l'engagement de « créer dès la rentrée prochaine ces observatoires de flux, au moins à titre expérimental, dans plusieurs académies, pour voir de quelle manière ils peuvent fonctionner et quelles informations ils peuvent donner » 1 ( * ) Il a indiqué, lors de son audition du 24 octobre, aux membres de votre commission qui s'en sont félicités, que de telles structures avaient été mises en place dans une quinzaine de départements.

2. les collèges et les lycées

Le projet de loi de finances pour 1996 prévoit la création de 1 000 emplois de professeurs certifiés dans l'enseignement secondaire : 450 au 1er janvier et 550 au 1er septembre, dont 200 par transformation d'heures supplémentaires.

Ils seront affectés à la poursuite de la rénovation du collège et, notamment, à l'introduction de l'enseignement du latin en classe de 5ème.

En outre, 35 postes de direction supplémentaires sont prévus compte tenu de l'ouverture de nouveaux établissements et 35 emplois de personnels d'éducation permettront de renforcer la présence d'adultes dans certains établissements en application du « nouveau contrat pour l'école ».

Ces créations de postes doivent être rapportées à l'évolution des effectifs scolarisés. La diminution du nombre des élèves dans les collèges permet de dégager des moyens pour faire face aux besoins dans les lycées et les classes post-baccalauréat et améliorer les conditions d'encadrement dans les établissements situés dans les zones défavorisées.

Les effectifs du second degré, après avoir diminué de 28.000 collégiens et lycéens en 1993 et de 32.000 en 1994, enregistrent une nouvelle baisse d'environ 31.000 élèves à la rentrée 1995.

Après cinq années de forte décroissance, les effectifs des collèges ont connu, à partir de la rentrée 1991, une progression rapide qui s'est nettement ralentie à la rentrée 1993 puis a fait place à une nouvelle baisse (de l'ordre de - 28.000 en métropole en 1994 et de - 33.000 à cette rentrée pour les classes de sixième à troisième générale, hors classes technologiques).

La cause essentielle de ces variations est démographique : les générations nées en 1983 et 1984, qui sont scolarisées en 6ème et 5ème en 1995 et seront en 5ème et 4ème en 1996, sont des générations d'effectifs faibles ; les effectifs de 6ème devraient commencer à se redresser sous l'effet d'une démographie plus favorable lors de la rentrée 1996.

Les effectifs des lycées généraux et technologiques, dont la baisse s'était amplifiée en 1993-1994 (-30 000 élèves en métropole), ont vu leur diminution ralentie à la rentrée 1994 (- 16 000) et sont en voie de stabilisation.

Cette évolution s'explique elle-même par la démographie, des générations d'effectifs plus nombreux (1979, 1980, 1981) étant scolarisées en classes de seconde et première. Toutefois, il faut tenir compte des répercussions de la mise en place du cycle terminal au lycée qui a fait chuter en 1994 le taux des redoublements en première et, par voie de conséquence, fait entrer 27 000 élèves supplémentaires en terminale. Ces élèves, du moins une grande partie d'entre eux, auront quitté le lycée non en 1996 mais dès 1995.

En ce qui concerne l'effectif moyen des classes dans le second degré, on notait à la rentrée 1994-1995, une stabilité globale des divisions en collège (avec une baisse sensible de la sixième à la quatrième et une légère augmentation en troisième) et un nombre négligeable de classes de plus de 30 élèves (de l'ordre de 1 %).

En second cycle général et technologique, le nombre moyen d'élèves par classe a été ramené de 31,4 à 29,7 de 1989 à 1992. Ces effectifs se stabilisent depuis deux ans. Les classes de seconde restent les plus chargées avec une moyenne de 32,1 élèves à la rentrée 1994-1995.

ÉVOLUTION DU NOMBRE MOYEN D'ÉLÈVES PAR CLASSE OU DIVISION

PROPORTION DE CLASSES OU DE DIVISIONS DE PLUS DE 30 ÉLÈVES FRANCE MÉTROPOLITAINE - PUBLIC

3. les services administratifs

550 emplois d'ATOS (personnels administratifs, ouvriers et de service) et de santé seront ouverts au 1er janvier 1996 dans les services académiques et les établissements de métropole et 43 dans les territoires d'outre-mer qui sont confrontés à une forte progression démographique.

Il est prévu de créer, au titre de la deuxième année d'application du « nouveau contrat pour l'école », 10 postes de médecins scolaires, auxquels s'ajoutera le recrutement de 102 infirmières scolaires et 38 assistantes sociales.

Les effectifs des personnels administratifs affectés dans les services académiques seront, en revanche, diminués de 119 emplois au titre des économies budgétaires, cependant qu'un regroupement de structures ministérielles doit permettre de réaliser une économie de 80 autres emplois en administration centrale.

B. LES RESSOURCES BUDGÉTAIRES DU « NOUVEAU CONTRAT POUR L'ÉCOLE »

Pour la première fois dans l'histoire de l'éducation nationale, la loi n° 95-836 du 13 juillet 1995 a institué une programmation des dépenses sur cinq ans. Cette programmation concerne la trentaine de mesures -sur un total de 158- du « nouveau contrat pour l'école » qui ont une incidence financière.

Certaines d'entre elles sont entrées en application dès la rentrée de 1995 -voire celle de 1994- et ont déjà bénéficié, l'an passé, d'une inscription de crédits budgétaires.

Le projet de loi de finances pour 1996 constitue donc le deuxième exercice de traduction budgétaire du « nouveau contrat pour l'école ».

1. Les crédits et les postes


• La traduction budgétaire du « nouveau contrat pour l'école » appelle une observation de méthode.

L'article premier de la loi de programmation et son annexe ont fixé, pour la période 1995-1999, les moyens à inscrire chaque année au budget de l'éducation nationale pour assurer le financement des mesures ayant une incidence financière.

Pour chacune des cinq années, figurent sous forme d'un tableau, deux chiffres : le montant annuel des crédits et le nombre annuel des créations de postes qui doivent concourir à la réalisation progressive du contrat.

Le contrôle parlementaire qui s'exerce à l'occasion des discussions budgétaires devrait être aisé, la simple logique commandant de comparer, pour une même année, les chiffres des tableaux de la loi de programmation et ceux du fascicule budgétaire « enseignement scolaire » et de vérifier s'ils correspondent.

La réalité est assez différente car il est difficile d'identifier dans le « bleu budgétaire » la totalité des postes et crédits annuels affectés aux mesures du « nouveau contrat pour l'école ».

Le constat en avait été fait d'ailleurs, à l'automne dernier, dès le stade des travaux préparatoires de la loi de programmation, par le Conseil économique et social 1 ( * ) qui avait tenté de vérifier, dans la perspective de l'entrée en application de la loi dès 1995, sa traduction effective dans le projet de loi de finances. Il avait montré qu'il n'était guère possible de s'assurer, à partir de la lecture du « bleu », que les mesures du « nouveau contrat pour l'école » étaient financièrement couvertes comme annoncé dans le texte de programmation et souligné le caractère « illisible » du document budgétaire.

Une meilleure information s'impose. L'opacité actuelle rend malaisé le contrôle parlementaire ; en outre, comme l'a relevé le Conseil économique et social, elle « peut laisser place à beaucoup d'interprétations » ; certaines peuvent apparaître comme injustement malveillantes à l'égard de la capacité du Gouvernement à tenir ses engagements.

Ajoutons qu'il est difficile de distinguer, dans la mise en oeuvre du « nouveau contrat pour l'école », les parts respectives des mesures nouvelles et des redéploiements de moyens existants.

Votre rapporteur sait que la responsabilité du ministre chargé de l'éducation nationale doit être dégagée car il est en réalité prisonnier du cadre défini par les services du budget, mais il souhaiterait que ces remarques, qui sont importantes, soient prises en compte par le Gouvernement. Il lui fait, à cet égard, une suggestion : l'article 6 de la loi de programmation obligeant à déposer dès 1996 devant le Parlement un rapport d'exécution, ne pourrait-il pas mettre à profit ce rendez-vous pour étudier de quelle manière il serait possible d'apporter à l'avenir à la représentation nationale les éclaircissements qu'elle est en droit d'attendre ?


• Le « nouveau contrat pour l'école » doit mobiliser en 1996, si l'on se reporte à la loi de programmation du 13 juillet 1995, 1.149,11 millions de francs de crédits et 2.716 postes.

Illustrant la remarque qui vient d'être faite, la lecture du « bleu » budgétaire « enseignement scolaire » ne permet de repérer que 334,89 millions de francs de crédits et 1.185 postes nouveaux. S'agissant des crédits, l'extension en année pleine de mesures nouvelles décidées en tiers d'année en 1995 conduit à une majoration de 516,04 millions de francs et à un total de 850,93 millions de francs.

La recherche d'une meilleure utilisation des moyens existants, dont il convient de se féliciter dans le contexte budgétaire particulièrement contraint que nous connaissons, conduit à recourir aux redéploiements -à hauteur de près de 40 %- pour assurer une traduction budgétaire du « nouveau contrat pour l'école » conforme à la loi de programmation. Soulignons que ces redéploiements, qui s'opéreront au sein des différents niveaux d'enseignement et par nature de charges, ne devant être connus que dans les semaines à venir lorsque la préparation de la rentrée 1996 avec les rectorats sera bien avancée, les parlementaires ne peuvent en juger l'opportunité au cas par cas, ce qui peut être dommage.

2. Les orientations

Mesures nouvelles et redéploiements permettront de réaliser la tranche 1996 de la loi de programmation du « nouveau contrat pour l'école » dans les conditions suivantes :

- l'effort de passage des effectifs de maternelle à 25 élèves par classe dans les zones d'éducation prioritaire et l'accueil, dans ces zones, des enfants de deux ans (mesure n° 13 du « nouveau contrat pour l'école ») se poursuit par simple réallocation de moyens (500 postes, 75 millions de francs de crédits). Il a déjà été indiqué que cette politique bénéficiait, par redéploiement, du maintien du nombre des enseignants du primaire malgré la baisse démographique des effectifs ;

- les crédits mobilisés pour la poursuite de la mise en place du dispositif de consolidation en sixième (mesure n° 27) -165,96 millions de francs- correspondent à l'extension en année pleine de mesures nouvelles décidées en 1995. Ce dispositif a pour vocation de permettre aux élèves en difficulté de bénéficier d'une remise à niveau individualisée ;

- une mesure nouvelle de 50 millions de francs abonde les moyens du fonds social collégien, destiné, sur le modèle du fonds social lycéen à donner aux chefs d'établissement les moyens d'aider financièrement certains élèves (mesure n° 35) ;

- les nouvelles options en collège (mesure n° 43) bénéficient, pour la rénovation de la classe de 5ème et, notamment, l'enseignement en option du latin, d'une création de 1.000 postes et d'un crédit de 155,79 millions de francs. Ce crédit est une somme obtenue en ajoutant : les créations de postes dans l'enseignement public (pour un peu plus de 112,522 millions de francs) les contrats (195) qui seront ouverts dans l'enseignement privé en application du principe de parité (pour un peu plus de 32,272 millions de francs) et une économie sur les heures supplémentaires qui assureront, par transformation un contingent de 200 postes sur les 1.000 ouverts. Le complément qu'apporte cette économie n'est pas identifié dans le « bleu » budgétaire -ce qu'on peut encore une fois regretter-. Il correspond à 10,993 millions de francs ;

- le développement des centres de documentation et d'information des collèges (CDI-mesure n° 50) se voit octroyer 4,48 millions de francs d'extension en année pleine de mesures nouvelles 1995. Les 140 postes prévus pour 1996 seront occupés par des documentalistes qui sont d'ores et déjà dans l'enseignement mais sur des affectations qui ne correspondent pas à leur spécialité ;

- les options rares et langues vivantes (mesures 59 et 60) sont destinataires, d'une part, d'une mesure nouvelle de 22 millions de francs de dépenses en capital -il s'agit de crédits d'équipement en support audiovisuels- et, d'autre part, d'une enveloppe de fonctionnement de 10 millions de francs, soit un total de 32 millions de francs à rapprocher des 48 millions de francs qui figurent dans la loi de programmation. Le complément proviendra, là encore, d'une réallocation de moyens existants ;

- les crédits destinés à la formation professionnelle (créations de postes et frais de stage -mesure n° 72) sont financés par simple redéploiement (360 postes et 49,02 millions de francs de crédits sur lesquels 16,68 millions de francs correspondent à l'extension en année pleine de mesures nouvelles 1995) ;

- dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi quinquennale sur l'emploi et la formation professionnelle, les centres de validation et de bilan (mesure n° s 80 et 81) destinés à intervenir aux différents stades du parcours des jeunes et à les aider à mieux définir leur projet professionnel se voient appliquer la même procédure pour les deux tiers de leurs crédits supplémentaires (mesure nouvelle de 10 millions de francs sur un total prévu de 31,84 millions de francs) ;

- il en est de même des observatoires et instituts (dont l'Observatoire national de la lecture et l'Observatoire national de la sécurité des bâtiments scolaires -mesures n° s 5, 95, 96 et 136) prévus au « nouveau contrat pour l'école » qui, au-delà d'une mesure nouvelle d'1 million de francs (+ 0,28 million de francs de crédits d'extension en année pleine de mesures 1995), obtiennent leur postes et leurs crédits par redéploiement, en particulier à partir des suppressions de postes en administration centrale (total inscrit : 6 postes et 14,35 millions de francs) ;

- le renforcement de la présence d'adultes dans les établissements scolaires bénéficie (mesure n° 118) :

• de la création de 35 postes supplémentaires de conseillers principaux d'éducation (65 autres seront obtenus par redéploiement) et de l'allocation de 7,87 millions de francs de crédits (mesures nouvelles + extension en année pleine de mesures 1995), le reliquat -3,76 millions de francs- provenant de redéploiements ;

• de la mise en place des « contrats d'association à l'école », destinataire d'une mesure nouvelle de 20 millions de francs, d'une extension en année pleine de mesures 1995 de 60 millions de francs et d'un redéploiement de 18 millions de francs.

Il convient de rappeler que ces contrats, qui ont fait l'objet de l'article 4 de la loi de programmation, doivent permettre de renforcer la présence d'adultes en milieu scolaire (établissements publics) en faisant appel à des chômeurs ayant des références appropriées, la formule ayant comme autre avantage de replacer les personnes ainsi mobilisées dans un circuit d'activité et d'utilité sociale. L'article 4 précité a prévu que ces contrats, à durée limitée et non renouvelables, seraient passés en priorité avec des personnes ayant déjà exercé des fonctions éducatives dans des écoles ou autres établissements d'enseignement, que leur rémunération serait assurée par l'État (sur le budget de l'éducation nationale) et intégralement cumulable avec le revenu de remplacement prévu au bénéfice des travailleurs privés d'emploi par l'article L. 351-2 du code du travail. Il a renvoyé à un décret en Conseil d'État le soin de fixer les modalités d'application du dispositif contractuel ainsi défini.

Ce décret est en cours d'élaboration. D'après les informations obtenues par votre rapporteur, il devrait limiter les contrats à une durée maximale de dix mois et les plafonner mensuellement à un maximum de 78 heures ouvrées -non cumulables avec toute autre activité rémunérée, pour garder aux bénéficiaires leur qualité de demandeur d'emploi.

Il pourrait ouvrir à l'une et à l'autre des parties en présence une possibilité constante d'interruption du contrat, sans préavis, cette faculté de dénonciation devant permettre aux bénéficiaires de répondre à une éventuelle offre d'emploi.

Les chefs d'établissement seraient chargés de la conclusion et de la gestion des contrats d'association à l'école, sur autorisation donnée par le conseil d'administration du collège ou du lycée, les crédits disponibles étant annuellement mis en place auprès des recteurs d'académie, dans le cadre d'une répartition effectuée entre rectorats sur le plan national.

Les activités que les titulaires de contrats se verraient confier porteraient sur des fonctions d'aide et d'écoute des élèves, à l'exclusion des fonctions d'enseignement.

Obligatoirement demandeurs d'emploi, les intéressés devraient posséder l'un des diplômes exigés des personnels titulaires ou non titulaires exerçant des activités comparables à celles qui leur seraient confiées, ou justifier d'au moins trois ans d'expérience professionnelle. Les maîtres auxiliaires qui n'auront pas trouvé d'emploi, le ministre chargé de l'éducation a plusieurs fois insisté sur ce point, seraient prioritaires parmi les candidats eux-mêmes prioritaires qui auront assumé des fonctions éducatives dans des écoles ou établissements d'enseignement.

Enfin, ces contrats seraient assortis d'une rémunération mensuelle proportionnelle au nombre d'heures de travail effectuées et calculée sur la base d'un montant fixé par arrêté interministériel.

Pour renforcer la présence d'adultes dans les établissements, le projet de loi de finances prévoit, en outre, la création de 1.000 postes supplémentaires d'appelés du contingent qui effectuent leur service dans le cadre de l'éducation nationale. Cette mesure intervient en application du protocole d'accord signé en juillet 1992 par les ministres chargés de la défense, de la ville et de l'éducation nationale qui a décidé d'affecter des appelés du contingent au développement d'actions en faveur des quartiers urbains défavorisés ou des établissements scolaires les plus sensibles, notamment ceux des zones d'éducation prioritaire. Les appelés sont chargés de seconder l'équipe enseignante principalement dans les tâches d'accueil, de surveillance, d'aide au travail en études ou d'animation. Selon les informations communiquées par les services académiques et les chefs d'établissement, la formule aurait des résultats positifs.

- le nombre des personnels médico-sociaux est renforcé (mesures n oS 119, 120 et 121) par la création de 150 postes (24,99 millions de francs de crédits) ;

- le développement des techniques audiovisuelles et du multimédia dans l'enseignement (mesure n oS 127 à 130) se fait par redéploiement (35 millions de francs de crédits) ;

- la diffusion des programmes aux enseignants (mesure n° 137) bénéficie d'une mesure nouvelle de 2 millions de francs à laquelle s'ajoute 1 million de francs de crédits par redéploiement ;

- la formation continue des enseignants (mesure n° 149) obtient une mesure nouvelle de 30 millions de francs, répartie en : 7,02 millions de francs pour le primaire, 17,10 millions de francs pour l'enseignement public et 5,88 millions de francs pour le privé. S'ajouteront, en principe, 3,70 millions de francs par redéploiement.

La tranche 1996 de la loi de programmation du « nouveau contrat pour l'école » devrait être ainsi réalisée. On relève cependant deux exceptions qui concernent, d'une part, les études dirigées et surveillées au collège (mesure n°31) et, d'autre part, les dons d'ouvrages fondamentaux (mesure n° 51).

La loi de programmation prévoyait 361,25 millions de francs pour les études dirigées en 1996. L'enveloppe sera limitée à 219,88 millions de francs dont 24,88 millions de francs seulement de mesures nouvelles. C'est l'extension à la classe de 5ème de la politique d'encadrement complémentaire offert à la totalité des élèves de 6ème à la rentrée 1995 qui est ainsi pénalisée.

Cependant, M. François Bayrou -lorsqu'il a été interrogé sur ce point par votre rapporteur lors de son audition du 24 octobre- a expliqué que les crédits destinés aux études dirigées en 5ème avaient été recalibrés parce qu'il était apparu que l'on pouvait réserver en 5ème ce type d'aide aux élèves en difficulté, les autres sachant « se débrouiller seuls » après la 6ème où ils ont bénéficié de la formule.

Les dons qui devraient, pour certains ouvrages de référence, remplacer les prêts sont reportés. Il faut voir dans ce report la conséquence, dans un contexte budgétaire particulièrement tendu, du coût en manuels du renouvellement des programmes au collège.

LE FINANCEMENT DES MESURES DU
NOUVEAU CONTRAT POUR L'ÉCOLE EN 1996

NOUVEAU CONTRAT POUR L'ÉCOLE
PUBLIC + PRIVÉ

* 1 JO débats Sénat - Séance du 5 juillet 1995 -p. 916.

* 1 avis des 22 et 23 novembre 1994.

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