Avis n° 79 (1995-1996) de Mme Josette DURRIEU , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 2 décembre 1995

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N° 79

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan(1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XV

URBANISME

Par Mme Josette DURRIEU,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Gérard Larcher, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, vice-présidents ; Gérard César, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Minetti, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Georges Berchet, Jean Besson, Claude Billard, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Jacques Dominati, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Philippe François, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Claude Haut, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Roger Husson, Bernard Joly, Edmond Lauret, Jean-François Le Grand, Félix Leyzour, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, René Rouquet, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Jacques Sourdille, André Vallet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ.) : 2222, 2270 à 2275 et T.A. 413.

Sénat : 76 et 77 (annexe n°4) (1995-1996).

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

Les crédits demandés au fascicule budgétaire de l'urbanisme et des services communs au sein du budget de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports atteignent 22,8 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement. Ces crédits sont stables en francs courants par rapport au budget voté 1995, ce qui correspond à une diminution de 2 points de pourcentage en francs constants, compte tenu de l'évolution attendue des prix. Si l'on examine ce budget à structure constante, en tenant compte du transfert des crédits liés à l'urbanisme au ministère de la culture, pour un montant estimé de 723 millions de francs en moyens de paiement et 743 millions de francs en engagements, les crédits de l'urbanisme augmentent de 1,1 % en francs courants, soit une baisse en volume de près de 1 % compte tenu de la hausse attendue des prix.

L'analyse de la structure du budget de l'urbanisme montre que des évolutions divergentes interviennent.

Les dépenses ordinaires (22,36 milliards de francs), qui représentent 97,9 % des crédits, restent stables (+ 0,3 %) en francs courants, et le montant des moyens des services (titre III) s'établit à 22,3 milliards de francs.

Les dépenses en capital connaissent, quant à elles, une évolution bien moins favorable puisque tout en ne représentant que 478 millions de francs en crédits de paiement, elles enregistrent une baisse de 15 % en francs courants.

Votre rapporteur pour avis a choisi de présenter tout d'abord les conditions dans lesquelles s'effectuera le transfert de certaines compétences en matière d'architecture du ministère de l'équipement au ministère de la culture avant de procéder à un examen des crédits consacrés à la politique de l'urbanisme.

I. LA RÉFORME DE LA POLITIQUE DE L'ARCHITECTURE

A. LES OBJECTIFS

L'année 1995 est marquée par le transfert au ministère de la Culture de la sous-direction de l'enseignement, des professions et de l'architecture de la direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU) du ministère de l'Équipement.

Cette réforme était prévisible puisque le décret n° 95-770 du 8 juin 1995 relatif aux attributions du ministre de la Culture prévoyait que :

- « le ministre de la culture conduit la politique de sauvegarde, de protection et de mise en valeur du patrimoine architectural et urbain et des abords des monuments historiques [...]

Il est notamment chargé de l'application de la section I relative aux secteurs sauvegardés du chapitre III du titre Ier du livre III du code de l'urbanisme et, en ce qui concerne les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager qui ne présentent pas un caractère exclusivement paysager [...]

Le ministre de la culture participe, en outre, à la politique de sauvegarde, de protection et de mise en valeur des sites.

Conjointement avec le ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports, il est responsable des actions d'amélioration et de promotion de la qualité architecturale aux niveaux national et international, de la recherche et de l'enseignement en architecture ainsi que de l'élaboration des règles relatives à l'organisation et à l'exercice des professions d'architecte et de géomètre-expert.

Il dispose du Conseil général des ponts et chaussées et des services de la direction de l'architecture et de l'urbanisme du ministère de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports ainsi que des directions régionales de l'environnement et des services départementaux de l'architecture.

Il peut faire appel à la mission de l'architecture et de l'art urbain et à la mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques. »

Quant au décret n° 95-768 du 8 juin 1995 relatif aux attributions du ministre de l'Aménagement du Territoire, de l'Équipement et des Transports, il précisait que ce ministre exercerait « Conjointement avec le ministre de la culture, les attributions relatives à l'architecture ...] ».

Après avoir envisagé les modalités de la promotion de l'architecture, votre rapporteur pour avis s'intéressera aux conditions dans lesquelles les deux ministres désormais compétents exerceront leur autorité.

1. La promotion de l'architecture

Le ministre de la culture a précisé 1 ( * ) que la politique conduite par son département aurait pour priorité absolue de promouvoir l'architecture.

À ce titre, il est prévu de mettre en place des cycles de formation à la maîtrise d'ouvrage.

Le second axe de la politique de l'architecture tendra à améliorer l'exemplarité des concours d'architecture, en particulier pour permettre au maître d'ouvrage de choisir le meilleur projet architectural. Une mission représentative et indépendante pourrait être, dans cette perspective, chargée de procéder à un audit de la procédure des concours et de présenter ses conclusions au Gouvernement.

Le troisième axe tend à la promotion de l'architecture française à l'exportation. L'objectif est, en la matière, de permettre à la France de disposer, hors de ses frontières, de relais aussi efficaces que ceux de ses concurrents, et de mettre en valeur l'architecture française, notamment par de grandes manifestations organisées tant en France qu'à l'étranger.

Le principal outil de la politique architecturale du ministère de la culture sera la délégation à l'architecture et à l'art urbain qui succédera le 1er janvier 1996, à l'actuelle sous-direction de l'enseignement, des professions et de l'architecture aujourd'hui rattachée à la direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU). Cette délégation relèvera de la direction du patrimoine qui prendra la dénomination de direction de l'architecture et du patrimoine.

Votre rapporteur pour avis considère que l'ordre des priorités doit en premier lieu tendre à améliorer la formation des architectes. Il estime que le second point fort de cette politique doit consister en une aide aux Conseils d'architecture d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) existants et aux architectes des bâtiments de France. Quant à la formation, elle doit, tout d'abord, tendre à développer les compétences des services techniques maîtres d'oeuvre, tels que les DDE et les DDAF. Elle doit ensuite être mise en oeuvre auprès des maîtres d'ouvrages, qu'il s'agisse des élus ou des particuliers, et elle implique qu'un architecte consultant soit mis à leur disposition dans toutes les subdivisions des DDE.

Au premier janvier 1994 la tutelle du ministère de la Culture s'exercera sur :

- 22 écoles d'architecture ;

- 100 services départementaux d'architecture ;

- l'Institut français d'architecture (IFA).

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, le commissariat à la réforme de l'État examine actuellement les questions liées au rattachement :

- de la mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques (MIQCP) ;

- du plan « construction et architecture » ;

- de l'inspection générale des espaces protégés.

On a en outre, d'ores et déjà, constitué un comité de pilotage qui associe le ministère de l'Aménagement du Territoire, de l'Équipement et des Transports, afin d'identifier les transformations que suscitera la réforme et de demander, le cas échéant, l'arbitrage du Premier ministre.

2. La coordination des politiques

Le ministre de la culture a indiqué, dans une allocution prononcée à l'occasion des journées européennes du patrimoine, que le transfert de l'architecture à la direction du patrimoine était de nature à assurer la coordination des différentes politiques de protection du patrimoine, afin d'obtenir « une meilleure insertion de l'art, sous toutes ses formes, dans la cité ».

Comme on l'a vu, le décret n° 95-768 du 8 juin 1995 relatif aux attributions du ministre de l'Équipement dispose que ce ministre exerce, « conjointement » avec le ministre de la Culture, les attributions relatives à l'architecture.

Votre rapporteur pour avis estime qu'il conviendra de veiller à ce que cet exercice conjoint des attributions relatives à l'architecture permette une réelle coordination entre les services de l'équipement qui suivent la législation relative à l'architecture, et ceux transférés à la Culture, en particulier les architectes des bâtiments de France, chargés de faire respecter les textes.

Il considère que le transfert de certaines compétences relatives à l'architecture au ministère de la Culture est en soi probablement une bonne chose, car l'art de construire est un art parmi les autres. Il note, au demeurant, que ce transfert a aussi pour premier résultat de permettre au ministère de la Culture d'atteindre le niveau symbolique de 1 % du budget.

Cependant, votre rapporteur pour avis relève que cette réforme se double d'une diminution importante de plusieurs lignes de crédits destinées au financement des écoles d'architecture. La conférence des présidents d'écoles d'architecture estime en effet que, si le projet de loi de finances pour 1996 est voté en l'état, « les conséquences sur le fonctionnement des écoles seraient désastreuses et imposeraient, compte tenu des frais fixes des écoles, une fermeture partielle de celles-ci en 1996 ».

Le tableau ci-dessous illustre ces difficultés :

Quelques exemples d'évolution des crédits des Écoles d'Architecture transférés

Cette diminution des crédits hypothèque donc gravement les moyens alloués à l'enseignement de l'architecture.

Votre rapporteur pour avis s'interroge également sur le sort fait aux crédits qui sont réduits, dans la mesure où ceux destinés à l'urbanisme n'augmentent pas.

B. LES MOYENS

Outre l'enseignement de l'architecture et l'action des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE), on s'intéressera ici à l'évolution du corps des architectes et urbanistes de l'État et au rôle de la mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques.

1. L'enseignement de l'architecture

Les vingt-deux écoles nationales d'architecture ont été érigées en établissements publics après avoir été successivement rattachées au ministère de la Culture puis au ministère de l'Équipement. À la suite de la réforme dont on a vu les implications pratiques, ces écoles seront désormais, de nouveau, placées sous la tutelle du ministère de la Culture.

La politique en faveur de renseignement de l'architecture a été mise en oeuvre, dans la continuité de janvier 1993 à 1994, comme l'a rappelé M. Jacques Bellanger dans son avis sur le projet de loi de finances pour 1995. Votre rapporteur pour avis estime que cet effort budgétaire, continu depuis plusieurs années, ne doit pas être interrompu, compte tenu de l'augmentation de l'effectif des étudiants.

En 1995, le nombre des étudiants en architecture est de 18.500 personnes, celui des enseignants à temps plein s'établit à 1.000 personnes tandis que les dépenses budgétaires atteignent 600 millions de francs. Ces trois chiffres montrent, à eux seuls, l'ampleur de l'enjeu que constitue la formation des architectes.

La Cour des comptes a consacré dans son rapport daté d'octobre 1995 d'importants développements à l'enseignement de l'architecture.

Selon la Cour, « l'administration ne dispose pas des éléments prospectifs de nature à l'éclairer sur les besoins de formation à moyen terme ». Ainsi, aucune étude n'a-t-elle été réalisée pour quantifier les besoins de la profession d'architecte lors de la préparation du plan « Écoles d'architecture 2000 ». En réponse à ces observations, l'administration a indiqué qu'il a été décidé de lancer une étude de faisabilité afin de créer d'ici à l'été 1996 un observatoire des débouchés. En outre, au cours de l'année qui vient, la majorité des écoles sera dotée d'un « annuaire des anciens élèves ». Enfin, l'administration prévoit de procéder à une observation socio-économique de l'ensemble des métiers de l'architecture.

La seconde observation de la Cour des comptes tient au manque de coordination et d'évaluation des enseignements. La Cour relève plusieurs indices de ce phénomène. Le taux de réussite des élèves (rapport entre nombre de diplômés et nombre de nouveaux étudiants inscrits en première année) ne dépasse pas un sur deux. En outre, la durée d'obtention du diplôme -qui est en principe de cinq ans- n'est respectée que par 3 % des étudiants, alors que 53 % d'entre eux obtiennent leur diplôme en 8 ans. De surcroît, la durée d'obtention du diplôme varie de façon assez considérable entre les divers établissements d'enseignement. Aussi la Cour conclut-elle à la nécessité, pour l'autorité de tutelle, de se doter des moyens d'évaluation qui assureront aussi bien la qualité de l'enseignement que l'égalité des étudiants devant celui-ci.

À cette observation de la Cour, l'administration de tutelle a répondu qu'une importante étude de définition des principes et des modalités d'évaluation nationale a été engagée par la Direction de l'architecture et de l'urbanisme au printemps 1995. En outre, un projet de décret portant réforme de l'enseignement de l'architecture devrait être soumis aux instances consultatives compétentes à l'automne 1995. Ce texte définit les principes généraux de l'évaluation et porte réforme du statut des établissements.

En matière de recherche, les magistrats de la Cour des comptes ont relevé l'absence de « priorités claires ». Or, les sommes versées par la Direction de l'architecture et de l'urbanisme au titre de la recherche aux vingt-deux écoles s'élèvent à 12 millions de francs. L'importance de ce montant justifie, selon la cour, que l'autorité de tutelle applique pleinement son pouvoir d'orientation et définisse « les secteurs et les thèmes auxquels les crédits mériteraient d'être consacrés en priorité ». La Cour note également que le suivi de certaines recherches pourrait être amélioré afin que soit mieux respecté le délai contractuel d'achèvement des travaux de recherches.

Sur ce point, l'administration a indiqué, en réponse, qu'elle avait pris des dispositions en 1995 pour réduire puis pour supprimer les retards, et qu'elle a résilié en 1995 dix-sept contrats de recherche atteints par la prescription quadriennale. Elle a, en outre, précisé dans sa réponse aux observations de la Cour qu'à l'avenir la rédaction des contrats, conventions et lettres de commandes serait établie dans un sens plus restrictif. Elle estime enfin que la création d'un conseil scientifique, dans chaque établissement, permettra une meilleure orientation et un suivi plus approprié des recherches.

Votre rapporteur pour avis prend acte des différentes réformes annoncées par l'administration en réponse aux observations de la Cour des Comptes.

2. Les CAUE (Conseils d'architecture d'urbanisme et de l'environnement)

La loi sur l'architecture du 3 janvier 1977 a défini les missions des CAUE, à savoir, le développement de l'information et de la participation du public, la formation des intervenants dans le domaine de la construction, le conseil aux candidats à la construction, l'aide aux collectivités locales et aux administrations publiques.

En 1995, 86 CAUE fonctionnent sous forme associative comme le prévoit la loi précitée. Ils emploient près de 1.000 personnes parmi lesquels on compte des architectes, des urbanistes et des paysagistes. Le financement des CAUE est assuré en partie par le produit de la taxe départementale dont l'article 14 de la loi de finances rectificative pour 1981 a permis la création. En 1995, la majeure partie des départements ont effectivement créé cette taxe. La plupart d'entre eux ont fixé son taux au maximum de 0,3 % prévu par la loi.

Le reste du financement provient de subventions et de la contrepartie d'études. L'État apporte de son côté un soutien au développement d'une architecture de qualité en finançant des postes d'architectes consultants (chapitre 31-95, article 32). Les crédits budgétaires affectés au paiement de ces architectes s'élèvent à 4,14 millions de francs en 1995, et seront de 4,23 millions de francs en 1996.

Actuellement, 34 départements bénéficient des services d'un architecte consultant. Sur ce total, 21 départements sont également dotés d'un CAUE, tandis que 13 de ces départements n'ont pas de CAUE. L'aide de l'État, qui consiste en des crédits de vacations délégués aux DDE (titre III, chapitre 31-95, article 32 précité), est donc intégralement répartie entre ces 34 départements.

La diminution du produit de la taxe de 1994 à 1995 pose le problème de la situation des départements défavorisés avec une plus grande acuité. Désormais, l'État n'attribue plus que des contrats d'études de 0,5 million de francs en moyenne annuelle, dans le cadre du protocole d'accord signé avec la fédération nationale des CAUE.

Le problème de la disparition des architectes consultants se trouve désormais posé.

Depuis plusieurs années, on observe un désengagement de l'État. Les crédits de vacation des architectes consultants ne sont affectés qu'aux seuls CAUE dotés des ressources minimales. Ailleurs, ces crédits ont été progressivement supprimés. Or, rien n'oblige les CAUE à reprendre à leur charge la mission des architectes consultants pour le compte de l'administration. On aboutit, ainsi, en 1995, à ce que certains départements dotés de CAUE, ne disposent plus d'architectes consultants, ni à la DDE, ni au CAUE.

Pour 1996, l'administration envisage cependant de maintenir le recentrage de l'aide de l'État en matière de postes d'architectes consultants.

Un audit récemment effectué par M. Vigouroux, conseiller d'État, a mis en lumière les points forts et les points faibles de l'organisation des CAUE.

Le statut des CAUE , organismes privés chargés d'un service public 1 ( * ) au terme des dispositions de la loi du 17 juillet, a vieilli. En effet, le CAUE est une association, ce qui lui confère une grande souplesse. Cependant, les relations des CAUE avec l'État devraient être redéfinies. À ce sujet, le rapport Vigouroux précité suggère de :

« - réorganiser les relations de l'État central avec les CAUE par un comité de pilotage de l'État vis-à-vis des CAUE dans lequel le ministère de l'environnement devrait jouer un rôle plus important qu'aujourd'hui ; »

« - réinventer la présence de l'État par une pratique renouvelée des conseils d'administration. Une circulaire ou une mention lors d'une réunion de préfets doit leur demander d'être présents dans les conseils d'administration et d'exercer leurs responsabilités au regard des missions générales du CAUE ».

Votre rapporteur pour avis estime que le CAUE, qui ne dépend ni du préfet ni du président du conseil général, doit disposer d'une autonomie suffisante pour l'exercice de sa mission.

En ce qui concerne le financement des CAUE, il est souhaitable de maintenir le financement par la taxe départementale. Cependant, le produit de cette taxe est imprévisible dans la mesure où il est lié aux autorisations de construire dont la délivrance varie avec la conjoncture. La variabilité de cette ressource pose donc un véritable problème aux CAUE.

Le produit liquidé de la taxe départementale est très inégal selon les départements.

Les statistiques dont dispose la DAU montrent que sur les 80 départements qui ont institué la taxe, la différence entre le produit liquidé pour les départements les mieux dotés et les départements les moins pourvus est très importante :

En ce qui concerne le financement des CAUE, les conclusions de M. Vigouroux tendent à :

« - une forte action d'analyse dans quelques DDE des opérations de perception de la taxe ;

au « - lancement d'une inspection conjointe l'Équipement, IGF, IGA sur la liquidation et la perception de la taxe entre les DDE, les trésoreries et le conseil général ;

à « -1'inclusion de la réhabilitation dans l'assiette de la taxe ;

enfin, à « - l'étude des deux solutions alternatives de dotation spécifique prise sur la DGF ou au minimum une dotation du ministère de l'Équipement assurant un minimum de maintien des capacités des CAVE les plus financièrement démunis  ».

Votre rapporteur pour avis estime, en outre, qu'il est souhaitable d'améliorer la perception du produit de la taxe, afin de limiter les effets négatifs qu'implique le transit des fonds des services extérieurs de l'État, au département puis au CAUE. Il estime également que l'élargissement de l'assiette de la taxe aux opérations de réhabilitation, aux constructions publiques, aux grands projets concédés (autoroutes, SNCF, ports...) ou aux équipements touristiques et commerciaux est souhaitable, à hauteur de 8 -10 % des ressources issues de la taxe.

Afin d'accroître les moyens des CAUE, il serait nécessaire d'encourager le versement de cotisations des collectivités locales, ainsi que le recours, proposé par M. Vigouroux, au mécénat d'entreprise.

Compte tenu des disparités qui existent entre les départements du point de vue du produit de la taxe, votre rapporteur pour avis estime également qu'il serait nécessaire d'envisager une péréquation de la taxe à l'échelon régional.

L'activité des CAUE est entravée par des obstacles législatifs et réglementaires. En principe, les missions de service public dévolues aux CAUE le sont à titre gratuit.

Or, on observe que l'activité des CAUE tend à s'étendre lors de la phase de gestion des travaux et risque, de ce fait, de concurrencer l'exercice libéral de la profession d'architecte. Il est donc indispensable de distinguer clairement entre les « missions de service public », qui seules sont gratuites, et les « prestations complémentaires ». En la matière le rapport Vigouroux propose de :

« - mieux distinguer les missions gratuites de celles qui ne le sont pas parce qu'elles ont un caractère supplémentaire ;

« - et d'adapter le décret sur les statuts types pour reconnaître clairement l'existence de services d'assistance à la maîtrise d'ouvrage aux collectivités locales qui puissent être rémunérés. ».

Enfin, le statut des personnels doit également être mieux pris en compte : il importe, notamment, selon le rapport Vigouroux :

« - d'insérer dans les contrats de travail une clause de non confusion avec les activités privées ;

« - de stabiliser le personnel et lui offrir des perspectives par la négociation d'une convention collective propre ou du rattachement à une convention collective existante ;

« - de créer un système de mobilité des cadres des CAUE au moins entre les CAUE eux-mêmes ;

« - de veiller à préparer l'avenir en diversifiant les âges des personnels des CAUE ;

« - de contribuer vigoureusement à la définition professionnelle de l'urbaniste et de ses rapports avec les métiers proches (architecte, paysagiste)  ».

Deux autres propositions issues de l'audit effectué par M. Vigouroux mériteraient, selon votre rapporteur pour avis, d'être retenues. En premier lieu, il serait nécessaire de « développer l'action de formation y compris vers les élus locaux dans le cadre de leurs droits à formation  » ; en outre, une meilleure association des CAUE aux travaux d'inventaire du patrimoine départemental apparaît souhaitable. Sur ce point, le rapport Vigouroux précité suggère précisément que les CAUE devraient «  participer aux travaux d'inventaire du patrimoine départemental qui sont prescrits par l'article 30 de la loi du 2 février 1995 sur l'environnement [...], se doter des moyens de contrôler les résultats par rapport au programme, au besoin avec l'aide de partenaires extérieurs et tirer les conséquences de ces analyses par des redéploiements d'activités. ».

3. Le corps des architectes et urbanistes de l'État

Le statut des architectes et urbanistes de l'État (AUE) a récemment subi d'importantes modifications dont les effets se feront sentir jusqu'en 1996.

Le corps des architectes et urbanistes de l'État a été créé par décret n° 93-246 du 24 février 1993. Ce corps interministériel est classé dans la catégorie A.

Ses membres sont répartis entre deux spécialités :

- « urbanisme et aménagement » ;

- « patrimoine architectural, urbain et paysager ».

Les membres du corps ont vocation à exercer des fonctions dans l'architecture, l'urbanisme, la construction, l'aménagement du territoire, l'aménagement et le patrimoine.

Le corps des architectes et urbanistes de l'État a été créé afin de permettre l'intégration des urbanistes de l'État (UE) dans la spécialité « urbanisme-aménagement » et celle des architectes des bâtiments de France (ABF) dans la spécialité « patrimoine architectural, urbain et paysager ». Cette intégration s'effectue à la demande des intéressés, après avis d'une commission qui associe les représentants des ministères de l'Équipement et de la Culture. L'article 15 du décret n° 93-246 du 24 février 1993 précité prévoit en outre que cette intégration aura lieu, pour les architectes des bâtiments de France, dans un délai maximum de trois ans après sa publication. Selon l'article 20 du même texte, il ne sera plus procédé au recrutement dans le corps des architectes des bâtiments de France, à compter de sa publication.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, le nouveau corps, qui comporte trois grades, est composé comme suit :

La transformation d'emplois d'Architectes des Bâtiments de France (ABF) a été entamée en 1993 et s'est donc poursuivie aux budgets 1994 et 1995.

Ainsi, en 1993, 55 emplois d'ABF ont été transformés en 16 emplois d'AUE en chef, 11 emplois d'AUE de 1ère classe, et 28 emplois d'AUE de 2ème classe.

En 1994, 60 emplois d'ABF ont été transformés en 19 emplois d'AUE en chef, 13 emplois d'AUE de 1ère classe, et 28 emplois d'AUE de 2ème classe.

En 1995, 66 emplois d'ABF ont été transformés en 22 emplois d'AUE en chef, 14 emplois d'AUE de 1ère classe, et 30 emplois d'AUE de 2ème classe.

Il reste désormais à transformer 13 emplois d'architectes des bâtiments de France en emplois d'architectes urbanistes de l'État. En 1994, tous les emplois d'urbanistes de l'État ont été transformés en emplois d'architectes et urbanistes de l'État.

4. La mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques

Créée par décret n° 77-1167 du 20 octobre 1977, la mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques (MIQCP) a pour fonction :

« d'assurer une tâche de coordination d'impulsion et d'information, en liaison avec l'ensemble des administrations de l'État, des établissements publics de l'État et des sociétés nationales ;

de suivre les programmes expérimentaux dont la réalisation sera entreprise ;

de conduire directement ou indirectement des actions de formation de maîtres d'ouvrage publics. »

Comme le rappelle la circulaire du 20 octobre 1977, la mission n'exerce aucune responsabilité directe dans l'ouvrage des constructions publiques. Elle réunit et suit l'ensemble de l'information relative aux programmes de constructions, aux méthodes d'étude et de réalisation des projets, au choix des concepteurs et à la qualité des édifices. Elle étudie plus particulièrement les conditions de réalisation des mises en compétition de concepteurs, l'organisation de concours d'architecture et la composition des jurys et peut en tirer des recommandations d'ordre méthodologique.

La mission était dotée, en 1994, de 1.341.573 francs de crédits.

On notera que la rémunération des onze personnes qui collaborent à la mission n'est pas comprise dans ce total, le personnel de la mission étant rémunéré sur des crédits du ministère de l'Équipement.

La mission exerce son activité dans quatre directions principales.

Elle s'attache, en premier lieu, à promouvoir le conseil et l'assistance à la maîtrise d'ouvrage.

En ce qui concerne la programmation des études préopérationnelles et opérationnelles en amont de la commande de maîtrise d'oeuvre, la MIQCP a réalisé plusieurs documents de synthèse.

La mission exerce une action en matière réglementaire. Après la publication, fin 1993, des trois décrets et de l'arrêté d'application de la loi MOP, la MIQCP a contribué, avec la direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU) et la direction des affaires économiques internationales (DAEI) du ministère de l'Industrie, à la rédaction d'un projet de circulaire d'application.

La mission joue également un rôle en matière de formation et s'adresse principalement aux maîtres d'ouvrage, afin d'améliorer la sensibilisation à l'architecture dans le cadre des constructions publiques, l'exercice des fonctions amont de la maîtrise d'ouvrage (la programmation et la désignation des maîtres d'oeuvre), l'application de la loi et des décrets MOP.

II. LA POLITIQUE DE L'URBANISME

L'agrégat 06 du fascicule budgétaire consacré à l'urbanisme et aux services communs intitulé « Urbanisme et espaces protégés » fait la synthèse des crédits consacrés à la politique de l'urbanisme.

Cet agrégat, qui ne comprend que des dépenses en capital, se décompose comme suit :

Les plus fortes baisses de crédits affectent les investissements exécutés par l'État (titre V) qui diminuent de 34 % en crédits de paiement et de 25 % en autorisations de programme. La baisse est plus modérée pour les subventions d'investissement exécutées par l'État (titre VI) (respectivement -3,7 % en crédits de paiement et - 6,5 % en autorisations de programme).

L'examen des crédits de fonctionnement des services sur quatre ans montre, quant à lui, une diminution régulière, à l'exception de l'année 1993.

Votre rapporteur pour avis constate et regrette la diminution très importante des crédits et s'interroge sur les effets qu'elle pourra occasionner sur la politique de l'urbanisme qu'entend conduire le Gouvernement.

A. LES OBJECTIFS DU GOUVERNEMENT

La principale nouveauté du budget 1996 tient à la réforme de la Direction de l'Architecture et de l'urbanisme (DAU) dont les compétences, en matière d'architecture, seront à l'avenir rattachées au ministère de la Culture, sous l'égide de la direction du patrimoine, qui prendra le nom de direction de l'architecture et du patrimoine.

En 1996, les services du ministère de l'Équipement, compétents en matière d'urbanisme auront pour mission de relancer la planification territoriale et de porter à la connaissance des autorités communales qui établiront les documents d'urbanisme le souci de voir appliquer les politiques nationales.

L'administration souhaite également assurer la cohérence des grands choix d'aménagement, notamment en ce qui concerne les projets de transport, le logement social, la solidarité, les grands équipements, la préservation de l'environnement et la protection contre les risques majeurs. Afin de coordonner les diverses politiques sectorielles d'aménagement, un comité des directeurs pour l'aménagement a été créé. Il regroupe les directions centrales concernées : DATAR, urbanisme, routes, transports terrestres, ports, aviation civile.

Le Gouvernement entend également conduire une politique de renouveau des grandes opérations d'aménagement. Trois opérations sont principalement concernées, comme on le verra ci-dessous.

La simplification et la « stabilisation » du droit de l'urbanisme restent un objectif essentiel pour les pouvoirs publics.

On sait que, dans notre pays, un tiers des plans d'occupation des sols approuvés étaient en cours de révision au début 1994. Cette modification systématique de documents, qui devraient bénéficier d'un minimum de permanence, est préjudiciable aussi bien aux usagers qu'aux services instructeurs des demandes, lesquels rencontrent des difficultés pour appliquer les documents réellement en vigueur.

L'administration a indiqué à votre rapporteur que la réflexion engagée sur la réforme du droit de l'urbanisme pour remédier à cette situation avait fait apparaître que de nombreuses améliorations ne relevaient pas du domaine de la loi. Aussi a-t-on ouvert un « chantier réglementaire » qui devrait permettre la réalisation de réformes de fond tendant à améliorer la lisibilité du droit de l'urbanisme. En ce qui concerne les règles de droit applicables au niveau local, l'administration cherche à en garantir la clarté, la stabilité et la sécurité juridique. Enfin, en matière de planification urbaine, on envisage la publication à brève échéance d'un projet de décret qui supprimerait du code de l'urbanisme un certain nombre de dispositions devenues obsolètes.

Votre rapporteur pour avis observe que les responsables de l'établissement des documents d'urbanisme sont accablés par une législation toujours plus dense et parfois impénétrable : POS, SDAU, schémas directeurs ou de secteur, zonages divers et, bientôt, directives territoriales d'aménagement (DTA) s'empilent sans qu'il soit possible d'envisager la fin de ce mouvement d'inflation législatif et réglementaire. La complexité de cet édifice normatif explique que près d'un tiers des POS soit actuellement en cours de révision, et que l'on ait du recourir à une loi pour définir la notion de « hameau », après les péripéties contentieuses survenues dans l'affaire de Fabrèges.

Il estime que les recommandations émises par le Conseil d'État en 1992 dans son rapport « L'urbanisme pour un droit plus efficace » restent toujours d'actualité. Le Conseil concluait son propos en estimant que :

« Un fois la règle d'urbanisme clairement édictée et connue, elle doit être appliquée et respectée. Les autorités administratives, en particulier maires et préfets, détiennent un rôle essentiel qu'elles ne doivent plus hésiter à remplir, pour veiller à l'intérêt général dont elles ont la garde. L'intervention des juges, et notamment du juge administratif n'est efficace que si elle est rapide. Il convient donc de leur donner les moyens d'intervenir plus efficacement ; ils contribueront ainsi à rendre plus effective la règle d'urbanisme, en sanctionnant les actes et les comportements illégaux.

Il y va de la légitimité du droit de l'urbanisme, à l'application duquel les citoyens sont très sensibles, et de la crédibilité des acteurs de ce droit -maires, préfets et juges - dont l'autorité pourrait souffrir d'un droit de l'urbanisme discrédité par une pratique désordonnée et contestée. »

B. L'URBANISME ET L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE

La loi n° 95-115 d'orientation relative à l'aménagement et au développement du territoire a une incidence importante sur le droit de l'urbanisme. Elle institue, en effet, une nouvelle catégorie de normes, les directives territoriales d'aménagement et elle prévoit l'établissement de divers zonages.

La création de la catégorie juridique dénommée « directive territoriale d'aménagement » par l'article 4 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire constitue sans doute l'innovation la plus importante de ce texte en matière d'urbanisme.

Aux termes de la loi, les directives :

« peuvent fixer, sur certaines parties du territoire les orientations fondamentales de l'État en matière d'aménagement et d'équilibre entre les perspectives de développement, de protection et de mise en valeur des territoires.

Elles fixent les principaux objectifs de l'État en matière de localisation des grandes infrastructures de transport [...] ainsi qu'en matière de préservation des sites et des paysages ».

La parution de ces directives qui sont élaborées sous la responsabilité de l'État sera postérieure à celle du schéma national d'aménagement et de développement du territoire dont elles doivent prendre en compte les « orientations générales ».

On notera que les DTA n'ont pas vocation à couvrir tout le territoire mais qu'elles seront réservées aux parties du territoire qui présentent des « enjeux particulièrement importants en matière d'aménagement, de développement, de protection et de mise en valeur » 1 ( * ) . Les directives pourront en outre s'appliquer à des territoires différents de ceux des circonscriptions administratives, et notamment des « espaces interrégionaux ».

Chacune des directives territoriales d'aménagement fera l'objet d'un décret en Conseil d'État qui sera élaboré à l'issue d'une étude préalable. Cette étude déterminera la délimitation du territoire à laquelle s'applique la directive et le contenu de la directive. Le ministère de l'Aménagement du Territoire, de l'Équipement et des transports, la DATAR et le ministère de l'Environnement s'emploient actuellement à rédiger les propositions qui seront ensuite soumises au comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) avant que les premières directives ne soient approuvées par décret en Conseil d'État.

L'entrée en vigueur des directives aura une incidence directe sur les collectivités locales. Aussi votre rapporteur pour avis souhaite-t-il que les directives n'accroissent pas la complexité d'un droit déjà très ardu. Il croit de son devoir de se faire l'écho de la préoccupation des élus locaux quant aux incidences pratiques de ces DTA.

En effet, la loi prévoit que les schémas directeurs, les schémas de secteur ou, à défaut, les plans d'occupation des sols (POS) ou les documents d'urbanisme qui en tiennent lieu, devront être compatibles avec les DTA.

Il sera donc nécessaire que les communes et les établissements publics de coopération intercommunale concernés engagent la procédure de mise en conformité de leurs schémas directeurs, schémas de secteurs et POS. Ce nouveau mouvement de « mise en conformité » entraînera vraisemblablement un coût non négligeable pour les communes.

S'agissant de la politique de l'urbanisme en zone de montagne, votre rapporteur pour avis considère que la diminution des crédits de l'ancien FIDAR et de l'ex FIAM, qui sont désormais intégrés au Fonds national d'aménagement et de développement du territoire, est très préoccupante. La baisse de ces crédits empêche souvent le financement d'opérations d'urbanisme dans les communes situées en zone de montagne.

En outre, la parution des zonages de massifs consécutifs à l'établissement des DTA est attendue avec beaucoup d'intérêt dans les zones de montagne. Votre rapporteur pour avis souhaite, en conséquence, que les DTA relatives aux massifs voient le jour aussi rapidement que possible.

C. LES GRANDES OPÉRATIONS D'AMÉNAGEMENT


Le désenclavement du Mont Saint-Michel

Après un accord entre l'État et les collectivités locales, une phase d'études préalables aux travaux est en cours en 1995-1996. Afin de lutter contre l'ensablement, il est prévu de construire un pont, de réaliser des travaux hydrauliques pour favoriser l'évacuation des sédiments, de créer des parcs de stationnement éloignés du site lui-même. Une opération de valorisation et de développement de la baie du Mont Saint-Michel sera également lancée.

Le coût total -550 millions de francs- sera couvert pour 300 millions de francs par l'État, pour 200 millions de francs pour les collectivités locales et pour 50 millions de francs par un emprunt gagé sur les redevances payées par les visiteurs.


Le Grand Stade de Saint-Denis

La construction du grand stade permettra d'accroître le renom de notre pays dans le domaine sportif, de requalifier l'espace urbain au nord de Paris, et d'offrir un meilleur service aux habitants.


L'établissement public Euroméditerranée à Marseille

Cette opération concerne la zone qui s'étend entre le port de Marseille et la gare TGV Saint-Charles.

Après la parution du décret n° 95-1102 du 13 octobre 1995 portant création de cet établissement public, on réalisera dans la cité phocéenne un projet de grande ampleur tendant d'une part à obtenir un urbanisme de qualité, et d'autre part, à développer des activités tertiaires de dimension internationale. Cette opération permettra de renforcer le rayonnement européen de Marseille par rapport à Barcelone et à Gênes, et de rééquilibrer l'influence de la France dans la zone méditerranéenne.

Outre les subventions de fonctionnement accordées au futur établissement public, l'État réalisera des investissements à hauteur de 29 millions de francs (hors DATAR), au titre de l'action foncière et de l'aménagement urbain, et de 23 millions de francs pour les voies primaires.

D. ÉVOLUTION DES RÈGLES D'URBANISME : BILAN LÉGISLATIF DE L'ANNÉE ÉCOULÉE

Au cours de l'année écoulée, six lois ont été promulguées qui ont apporté des innovations importantes au droit de l'urbanisme.

En matière de sécurité, la loi d'orientation et de programmation n° 95-73 du 21 janvier 1995 a inséré un article L.III- 3-1 nouveau dans le code de l'urbanisme. Le texte institue l'obligation d'effectuer une étude de sécurité publique lors des études préalables à la réalisation des projets d'aménagement des équipements collectifs et des programmes de construction.

La loi n° 95-74 du 21 janvier 1995 relative à la diversité de l'habitat a prorogé le délai de validité du permis de construire et des autorisations de bâtir que l'article 11 de la loi n° 94-112 du 9 février 1994 avait déjà prorogé d'un an. Cette mesure qui émane d'un amendement voté par le Sénat et repris par l'Assemblée nationale a permis de contrebalancer le repli des ventes de logement observé en 1994, en permettant le lancement de nouvelles opérations de construction.

La loi précitée a également permis de favoriser la construction de logements locatifs sociaux en autorisant les communes à accorder un dépassement de 20 % du coefficient d'occupation des sols (COS) sans contrepartie financière, sous réserve du respect des dispositions du plan d'occupation des sols.

La loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement a également prévu d'importantes dispositions telles que celles relatives à :

- la consultation du public et des associations en amont des décisions d'aménagement ;

- la prévention des risques naturels ;

- l'aménagement des zones à risques et l'institution, au profit de l'État, d'un droit d'expropriation pour des motifs de sécurité publique liés à un risque naturel menaçant gravement des vies humaines ;

- la connaissance, la protection et la gestion des espaces naturels.

- la consultation, à leur demande, des organismes de gestion des parcs naturels régionaux pour l'élaboration des schémas directeurs et des plans d'occupation des sols ;

- l'interdiction, aux entrées des villes de construire dans une bande de 100 mètres située de part et d'autre des grands axes routiers (cette interdiction qui n'entrera en vigueur que le 1er janvier 1997 ne s'applique pas si les plans d'occupation des sols ou les documents d'urbanisme qui en tiennent lieu édictent des règles appropriées) ;

- l'institution d'une obligation de déclaration préalable à l'installation de nouveaux dispositifs publicitaires en matière d'enseignes et de pré-enseignes.

- l'obligation pour le représentant de l'État de mettre en demeure les autorités locales d'annexer les servitudes d'utilité publique affectant l'utilisation du sol.

La loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a, comme on le verra ci-dessous, créé la catégorie des directives territoriales d'aménagement. Elle a en outre permis l'urbanisation en continuité des bourgs, villages et hameaux en zone de montagne.

En ce qui concerne le sursis à exécution, en matière d'urbanisme, l'article 27 de la loi précitée a précisé que la demande formulée par le représentant de l'État entraînait suspension de l'acte. Enfin, l'article 85 du même texte a institué le droit pour l/5ème des électeurs d'une commune de saisir le conseil municipal d'une demande, en vue de l'organisation d'une consultation sur une opération d'aménagement relevant de la décision des autorités municipales.

L'article 65 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile a permis au Président du tribunal administratif de prononcer pour une durée maximum de 3 mois, la suspension de l'exécution d'une décision administrative faisant l'objet d'une demande de sursis à exécution, si l'exécution risque d'entraîner des conséquences irréversibles et si la requête comporte un moyen sérieux.

Votre rapporteur pour avis regrette que la loi ne prenne pas mieux en compte les problèmes posés par la multiplication des sursis « en cascade » et des possibilités de faire obstacle au développement d'un projet d'urbanisme. En effet, les dernières dispositions entrées en vigueur renforcent un dispositif déjà imposant dans lequel les particuliers, le représentant de l'État et le juge administratif peuvent intervenir simultanément.

Enfin, la loi n° 95-127 du 8 février 1995 relative aux marchés publics et aux délégations de services publics a institué des dispositions tendant à une meilleure connaissance des mutations immobilières réalisées par les collectivités locales et leurs établissements publics.

Votre rapporteur pour avis estime, en conséquence, qu'il importe de trouver un juste équilibre entre la volonté de réaliser des projets d'urbanisme et la multiplication des précautions et des verrous qui constituent autant de raisons pour ne rien faire. Il considère que les élus sont bel et bien responsables devant leurs administrés et que, de ce fait, on ne peut pas simultanément leur demander de prendre des initiatives, d'engager parfois leur responsabilité individuelle et multiplier les entraves à la gestion des projets dans leur phase initiale.

E. LA POLITIQUE DE PROTECTION DU PATRIMOINE ET DU PAYSAGE

Les crédits consacrés aux études dans les sites, abords et paysages (titre V, chapitre 55-21-article 21) diminuent de 13,9% en autorisations de programme et de 32,7 % en crédits de paiement.

Ceux consacrés aux interventions spécifiques dans les sites, abords, paysages et secteurs sauvegardés (titre VI, chapitre 65-23-40) diminuent de 26 % en autorisations de programme et de 17,4 % en crédits de paiements.

1. Les espaces naturels sensibles

La réglementation des espaces naturels sensibles résulte notamment de la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en oeuvre des principes d'aménagement et du décret n° 87-284 du 22 avril 1987, modifiant le décret n° 86-516 du 14 mars 1986 relatif au droit de préemption urbain, aux zones d'aménagement différé, aux espaces naturels sensibles des départements et au contrôle de certaines divisions foncières.

Trois principes ont inspiré le législateur :

- le département définit et conduit la politique des espaces naturels sensibles ;

- la législation est susceptible d'être mise en oeuvre par tout département sur simple décision du Conseil général. Les dispositions s'appliquent à la totalité du territoire du département et non plus à l'intérieur de périmètres délimités à cet effet ;

- les objectifs de protection, de gestion et d'ouverture au public d'espaces naturels de qualité sont clairement énoncés et encadrés dans des règles propres à assurer la sauvegarde des milieux naturels.

Afin de donner aux départements les moyens de leur politique, le législateur a institué à leur profit la possibilité de percevoir la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles.

La taxe est due sur la construction, la reconstruction, et d'agrandissement des bâtiments de toute nature. L'assiette de la taxe est constituée par la valeur des ensembles immobiliers ayant fait l'objet d'une autorisation de construire, valeur déterminée forfaitairement et réévaluée chaque année en fonction de l'évolution de l'indice INSEE du coût de la construction. Le taux de la taxe sur les espaces naturels sensibles est déterminé par les départements dans la limite d'un plafond de 2 %.

On notera que le taux de la taxe varie de 0,2 à deux points de pourcentage, et qu'il est de 1 % dans 30 des 61 départements qui ont institué la taxe.

Le produit de la taxe départementale est affecté :

- à l'acquisition de terrains, à l'aménagement et l'entretien de tous les espaces verts appartenant au département et ouverts au public ;

- à la participation du département en vue de l'acquisition de terrains par le Conservatoire du Littoral et des rivages lacustres, ou par une commune ou un groupement de communes compétent, et à l'entretien de ces terrains par des personnes publiques ou par l'agence des espaces verts de la région Île-de-France ;

- à l'aménagement et l'entretien d'espaces naturels publics ou privés ouverts au public ;

- à l'acquisition, l'aménagement et la gestion des sentiers figurant sur un plan départemental d'itinéraires de promenades ou de randonnées.

L'article 32 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau a étendu l'usage de la taxe aux acquisitions, aménagement et gestion des chemins le long de l'ensemble des cours et plans d'eau.

L'article 39 § II de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement a modifié l'article L. 142-2 du code de l'urbanisme et élargi le champ d'application de la taxe aux installations et travaux divers, ce qui vise notamment les parkings. Selon l'administration, les effets de cette réforme ne pourront être appréciés qu'au cours des prochaines années. Fin juillet 1995, une enquête a été lancée auprès des préfets afin d'obtenir des présidents de conseils généraux un état des emplois, en recettes et en dépenses, de la taxe.

Au total, le produit liquidé au titre de la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles s'accroît et s'est élevé en 1993 à plus de 723 millions de francs, ainsi que le montre le graphique ci-après.

TAXE DÉPARTEMENTALE SUR LES ESPACES NATURELS SENSIBLES ÉVOLUTION INDICATIVE DES PRODUITS LIQUIDÉS SUR LA BASE DES RÉPONSES OBTENUES - ANNÉES 1985-1993

Source Ministère de l'Aménagement du Territoire, de l'Équipement et des Transports, DAU.

Selon l'administration, plus de la moitié des départements poursuit actuellement une politique de protection des espaces naturels. Aux 28 départements soumis à la législation antérieure sur les périmètres sensibles viennent en effet s'ajouter 33 départements ayant décidé d'agir dans les conditions fixées par le nouveau cadre législatif.

2. La politique des paysages

La législation relative aux paysages résulte de la loi du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages modifiée par la loi du 9 février 1994, qui a créé les directives paysagères et renforcé l'obligation de prendre en compte le paysage dans l'établissement des documents d'urbanisme (POS, permis de construire, notamment).

La politique en faveur de la protection et du respect du paysage s'articule autour de trois axes principaux :


Identifier les paysages

Le ministère de l'Équipement a élaboré une méthodologie pour identifier les paysages (intitulée « Méthode pour des atlas de paysages »), à l'usage des collectivités locales et des services déconcentrés.

Dès 1993, on a en outre mis en place un réseau de paysagistes-conseils à disposition des préfets, auprès des DDE, qui participent de manière déterminante à la création ou à la transformation des paysages, en tant que maîtres d'ouvrage de grandes infrastructures, comme conducteurs d'opérations ou dans le cadre de l'élaboration des documents d'urbanisme (SDAU, POS, DTA). En 1995, 55 DDE sont dotées d'un paysagiste-conseil et l'objectif que s'assigne l'administration est de pourvoir toutes les DDE d'ici à 1999.


Renforcer les instruments réglementaires pour une meilleure prise en compte du paysage

Depuis la publication de la loi n° 94-112 du 9 février 1994 précitée, les plans d'occupation des sols (POS) doivent être élaborés en prenant en compte la préservation de la qualité des paysages et la maîtrise de leur évolution.

Les POS peuvent :

- identifier et localiser les éléments de paysage à protéger ou à mettre en valeur et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur protection ;

- classer comme espaces boisés des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ainsi que des plantations d'alignement au même titre que les bois, forêts et parcs.

Les demandes de permis de construire doivent désormais comporter un volet paysager qui a un objet pédagogique (le pétitionnaire doit apprécier l'impact visuel de son projet et la qualité de son insertion).

Par ailleurs, la création de directives paysagères tend à la protection des territoires les plus remarquables par leur intérêt paysager. Quatre sites ont été, à ce jour, retenus pour faire l'objet, à titre pilote, de directives paysagères : les côtes de Meuse, les Vues sur Chartres, la Vallée de l'Yerres et les Alpilles.

Un décret en Conseil d'État, en cours de signature, va compléter les articles R.442-2 et 3 du code de l'urbanisme en soumettant à autorisation, au titre des installations et travaux divers (ITD), les travaux ayant pour effet de détruire un élément de paysage identifié par un plan d'occupation des sols (POS) et non soumis à un régime d'autorisation.

Les réseaux électriques ou téléphoniques nouvellement créés sur le territoire, notamment d'un site classé, devront désormais être enfouis. Quant à la pose de nouvelles lignes électriques aériennes, basse et moyenne tension, elle sera interdite dans les zones d'habitat dense à partir de l'an 2000.

Votre rapporteur pour avis estime qu'il serait nécessaire de procéder à l'enfouissement de toutes les lignes nouvelles dans les zones d'habitat dense dès à présent en particulier dans les zones touristiques. On réaliserait, de la sorte, des économies substantielles en n'étant pas contraints à effectuer ces travaux d'enfouissement ultérieurement comme prévu après l'an 2000.


Développer une démarche partenariale

La création de plans de paysage, documents de référence communs à l'État et aux collectivités locales concernées, est destinée à guider les décisions et les projets d'aménagement. Cette démarche opérationnelle, portant sur une unité paysagère culturellement et économiquement pertinente, permet d'envisager les actions concrètes à engager et les moyens nécessaires à leur gestion.

La réalisation des projets peut donner lieu à un contrat de paysage signé entre l'État et une ou plusieurs collectivités territoriales.

De plus, une politique de protection et de mise en valeur des paysages les plus prestigieux est conduite au moyen des opérations grands sites.

F. L'URBANISME ET LES COLLECTIVITÉS LOCALES

1. Bilan du transfert des compétences


• Les plans d'occupation des sols (POS)

L'état d'avancement des plans d'occupation des sols montre un ralentissement du mouvement de planification urbaine entamé depuis 1983, date à laquelle les transferts de compétence ont été décidés.

Cette tendance au ralentissement du mouvement de planification à l'échelon communal s'explique par le fait que les communes où il était nécessaire de disposer d'un POS en sont actuellement dotées. Un nombre relativement élevé de modifications et de révisions de POS est aussi déjà achevé.

Le nombre de ces révisions est évalué à environ 30 % des POS approuvés, taux qui est plus élevé dans les espaces les plus sensibles. En revanche, le recours à la révision est peu fréquent dans les zones rurales.

D'autre part, on observe que les communes ne souhaitent pas se doter de POS, tout en n'étant pas soumises à la règle de constructibilité limitée, et peuvent, en application de l'article L.111-1-3 du code de l'urbanisme, procéder, conjointement avec le préfet, à l'élaboration d'une carte communale, qui précise les modalités d'application des règles générales d'urbanisme, sans être tenues d'élaborer au préalable un plan d'occupation des sols.

Votre rapporteur pour avis considère que la gestion des plans d'occupation des sols (POS) est difficile dans la durée, en particulier pour les communes rurales. Les terres agricoles non constructibles sont désormais souvent mises en jachère. Or, il n'est pas possible de délivrer des autorisations de construire sur ces terrains, sans effectuer, au préalable, une révision du POS, souvent coûteuse pour la collectivité. Il serait donc utile de faciliter l'adaptation des POS aux évolutions économiques, en particulier dans les zones rurales précitées.


Les schémas directeurs

Au 1er juillet 1995, le nombre de schémas directeurs approuvés s'élève à 198, dont 98 sont en cours de modification. Ces documents concernent plus de 40 % de la population française et 16 % des communes représentant 12 % de la superficie du territoire national (DOM compris) et 14 % du territoire métropolitain.

À la même date :

98 schémas directeurs sur les 198 approuvés sont en cours de modification.

25 schémas directeurs approuvés ont fait l'objet d'une modification approuvée.

Environ 6.800 communes sont concernées par un schéma directeur délimité, arrêté ou approuvé.

Après une période de faible augmentation du nombre de schémas directeurs approuvés, consécutive à l'entrée en vigueur de la décentralisation le 1er octobre 1983, l'effort de planification intercommunale paraît à nouveau s'accentuer. L'établissement de nouveaux schémas directeurs permet en effet de trouver une solution au niveau intercommunal pour la réalisation de projets d'implantation de grands équipements ou d'aménagement, notamment à des fins touristiques ou de loisirs.

Enfin, la gestion et l'adaptation des schémas directeurs existants se poursuivent. Elles concernent principalement des aires urbaines pour lesquelles une prise en compte de l'évolution du contexte socio-économique et de récents projets d'équipement s'impose.

Le contenu des schémas directeurs élaborés ou modifiés récemment correspond à des préoccupations nouvelles de planification stratégique traduisant de véritables projets d'améliorations.


• Les autorisations d'occupation du sol

Lorsqu'une commune dispose d'un plan d'occupation des sols approuvé depuis au moins six mois, le maire délivre les autorisations d'occuper le sol en son nom, sauf si la commune a délégué cette compétence à un établissement public de coopération intercommunale.

Si une commune ne dispose pas d'un POS approuvé, les décisions sont prises au nom de l'État soit par le maire, soit par le préfet.

Désormais, les 4/5ème des permis de construire sont délivrés par les maires, ainsi que le montre le tableau ci-dessous :


La contribution de l'État à l'élaboration et l'adaptation des documents d'urbanisme

Depuis le 1er janvier 1984, deux dotations budgétaires contribuent à l'élaboration et l'adaptation des documents d'urbanisme.

La première dotation compense les dépenses prises en charge par les communes compétentes en matière d'urbanisme. Elle est attribuée sous forme d'un concours particulier au sein de la dotation générale de décentralisation. Ces crédits sont inscrits au chapitre 41-56-10 des crédits du ministère de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la citoyenneté.

Le montant de la dotation est en augmentation régulière comme le montre le tableau ci-dessous :

En effet, la dotation varie en fonction du taux de progression de la dotation globale de fonctionnement.

Une deuxième dotation inscrite au chapitre 55-21-10 des crédits de l'équipement est destinée à assurer l'exercice par l'État de ses responsabilités dans la planification et les politiques urbaines notamment à l'occasion de l'établissement et de la révision des documents d'urbanisme communaux ou intercommunaux, mais également en matière de protection de territoires sensibles (littoral, montagne), de prise en compte des risques naturels et des études paysagères. Elle s'élève à 41,4 millions de francs en autorisations de programme et à 30 millions de francs en crédits de paiement pour 1996.

2. L'orientation des politiques foncières locales

Votre rapporteur pour avis constate que les moyens alloués aux acquisitions foncières diminuent, comme le montre le tableau ci-après :

Au plan local, l'analyse permet de mettre en évidence les constantes suivantes :

- la grande difficulté, en dehors d'actions durables, d'une régulation des prix des biens immobiliers et fonciers a conduit à étendre le champ d'application des zones d'aménagement différé (ZAD) et à remettre en vigueur le dispositif des pré-ZAD dans la loi d'orientation pour la ville ;

- l'efficacité de moyens propres aux acquisitions foncières préopérationnelles ou à caractère de réserves de moyen ou long terme ;

- un recours relativement faible à l'usage effectif du droit de préemption ;

- une appréciation assez largement positive par les communes et leurs groupements du droit de préemption urbain utilisé pour disposer d'une information immédiate sur le marché foncier local, saisir les opportunités foncières (acquisitions) ou pour amorcer une réflexion sur l'opération projetée ;

- le recours largement utilisé à des opérateurs fonciers publics ou semi-publics.

Votre rapporteur pour avis regrette que les crédits consacrés à la politique du logement dans les zones urbaines à marché tendu ne permettent pas d'effectuer les opérations nécessaires, dans la mesure où la maîtrise du foncier est primordiale. Dans cette perspective la réduction des crédits consacrés aux acquisitions foncières soit 45 % en autorisations de programme et 50 % en crédits de paiement (Titre V chapitre 55-21-90) est très dommageable à la maîtrise du foncier.

La mesure des difficultés rencontrée en matière foncière est donnée par les résultats de plusieurs initiatives, ainsi une soixantaine de petites équipes qui constituent les observatoires fonciers locaux travaillent à travers la France sur des thèmes liés à l'observation foncière : attitude des propriétaires, utilisation des procédures d'aménagement, évaluation des disponibilités foncières, modifications prévisibles de la demande. Ces équipes sont placées tantôt auprès des collectivités locales (communes, départements, régions), tantôt au sein d'administrations (Équipement, Agriculture, Finances, Environnement), tantôt dans le cadre de bureaux d'études ou d'universités.

En Île-de-France, un observatoire foncier régional a été créé en 1987.

La Direction de l'Architecture et de l'Urbanisme a récemment procédé à une évaluation des études réalisées par ces observatoires et à une analyse de la structure de chacun d'entre eux (statut, moyens financiers, moyens humains).

Les objectifs de cette évaluation sont double :

- d'une part de cerner les contours d'un observatoire « modèle » dont pourraient, localement, s'inspirer les organismes ou collectivités soucieux de créer une telle structure ;

- d'autre part, en l'absence de source d'information nationale spécifique, analyser le degré de pertinence (scientifique et géographique) de l'élaboration d'une base statistique à valeur nationale à partir des données produites localement.

Les travaux du groupe de travail interministériel sur l'action foncière de l'État doivent également permettre d'envisager les voies et moyens de l'harmonisation, voire de l'unification, des méthodologies d'observation.

Contrairement à l'avis de son rapporteur, la commission des affaires économiques et du plan a adopté les crédits de l'urbanisme dans le projet de loi de finances pour 1996.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Josette Durrieu sur le budget de l'urbanisme pour 1996.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a tout d'abord indiqué que les crédits demandés au titre du fascicule budgétaire de l'urbanisme et des services communs atteignaient 22,8 milliards de francs et qu'ils étaient stables en francs courants par rapport à 1995, mais qu'ils enregistraient une baisse de deux points de pourcentage en francs constants, et que sur ce total, les dépenses en capital diminuaient de 15 % et atteignaient 478 millions de francs.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a estimé que le projet de loi de finances proposait un « budget de rigueur ». Puis elle a évoqué les conditions du transfert de la sous-direction de l'architecture et de l'enseignement de la Direction de l'architecture et de l'urbanisme (DAU) au ministère de la culture.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a tout d'abord rappelé que l'enseignement et la formation qui concernaient 722 écoles, 18.800 élèves et 1.000 professeurs en 1995, relèveraient à compter du 1er janvier 1996 de la compétence du ministère de la culture, précisément de la direction du patrimoine.

Elle a estimé que ce transfert en lui-même pouvait être une bonne chose mais qu'il s'accompagnait d'une diminution très importante des crédits, susceptible d'entraîner, au dire des présidents d'écoles d'architecture, la fermeture partielle de ces établissements.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a estimé qu'une réelle politique de l'architecture axée sur l'art et la qualité devrait se fixer quatre objectifs, quel que soit le ministère de tutelle, à savoir :

- la formation des architectes,

- l'aide aux Conseils d'architecture d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) et aux Architectes des bâtiments de Francs (ABF) ;

- la formation des services techniques maîtres d'oeuvres tels que les Directions départementales de l'équipement (DDE) et les Directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) ;

- la formation des maîtres d'ouvrages, tant élus que particuliers.

Puis Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a insisté sur le partage des compétences résultant du décret n° 95-768, car selon ce texte, deux ministères généraient « conjointement  » les attributions relatives à l'architecture sur le terrain. Elle a ajouté qu'il sera nécessaire de veiller à une bonne coordination des différentes politiques de protection du patrimoine entre les deux ministères désormais concernés.

Poursuivant son propos, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a abordé la question des CAUE qui ont été créés par la loi de 1977, afin d'améliorer l'information, la formation des intervenants et le conseil aux collectivités locales et aux particuliers. Elle a estimé que la situation de ces associations était particulièrement délicate, car les moyens qui leur étaient alloués ne correspondaient pas aux missions qui leur incombaient. En 1995, 87 départementaux étaient dotés d'un CAUE, 13 en étaient dépourvus et seuls 34 disposaient d'un architecte consultant. Elle a déclaré que cette situation traduisait un désengagement progressif de l'État et qu'il serait nécessaire de travailler à la réforme des CAUE, afin que ceux-ci puissent fonctionner davantage en réseaux. Elle a ajouté qu'il serait utile de coordonner leur activité avec celle des architectes conseils des DDE et des architectes paysagistes.

S'agissant des moyens financiers consacrés aux CAUE, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a rappelé que son prédécesseur, M. Jacques Bellanger, avait déjà relevé, dans son avis relatif au budget 1994, les problèmes posés par la taxe sur les permis de construire. Elle a jugé que cette taxe, plafonnée à hauteur de 0,3 %, ne permettait pas aux départements les moins pourvus en constructions neuves de faire face à leurs missions. Puis elle a constaté la différence qui existait entre le Rhône dont la taxe dépasse cinquante millions de francs et l'Allier où son produit est inférieur à 300.000 francs.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a indiqué qu'un audit avait été effectué récemment par M. Vigouroux, membre du Conseil d'État. Parmi les conclusions très intéressantes de ce travail, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a retenu l'idée d'inclure les opérations de réhabilitation ainsi que la construction des bâtiments publics dans l'assiette de la taxe.

Elle a indiqué que M. Vigouroux avait recommandé d'améliorer les conditions de perception de la taxe, d'envisager une péréquation de cette ressource au niveau régional ou de doubler la taxe départementale versée aux CAUE, afin de créer un fonds national de péréquation.

En outre, s'agissant des missions des CAUE, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a estimé qu'il serait nécessaire de les clarifier, afin de distinguer les missions gratuites de celles qui pourraient être rémunérées. Ceci supposerait une modification du décret relatif aux statuts-type, permettant de reconnaître l'existence des services rémunérés d'assistance à la maîtrise de l'ouvrage et aux collectivités locales.

Enfin, abordant le statut des personnels, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a considéré que plusieurs réformes s'imposaient, notamment la rédaction d'une convention collective et l'instauration d'un système de mobilité des cadres.

Puis, le rapporteur a abordé la question de la politique de l'urbanisme.

Il a estimé tout d'abord que les crédits étaient affectés par une évolution préoccupante, car les investissements exécutés par l'État diminuaient de près de 34 % en crédits de paiement et de 25 % en autorisations de programme. Quant aux subventions d'investissement accordées par l'État, le rapporteur a ajouté qu'elles baissaient de 3,7 % en crédits de paiement et 6,5 % en autorisations de programme. S'agissant de l'examen des crédits de fonctionnement, le rapporteur a déclaré qu'ils subissaient une diminution, régulière depuis 1991 à l'exception de 1993.

Passant aux objectifs annoncés par le Gouvernement, le rapporteur a déclaré qu'en 1996 l'administration mettait en avant sa volonté de relancer la planification territoriale, notamment par la mise en oeuvre des Directives territoriales d'aménagement (DTA), et d'assurer la cohérence des grands choix d'aménagement en clarifiant ou en codifiant les différents textes en vigueur en matière d'urbanisme.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a estimé qu'il était urgent de simplifier et de stabiliser le droit de l'urbanisme dans la mesure où un tiers des Plans d'occupation des sols (POS) étaient actuellement en cours de révision. Elle a ajouté que plusieurs dispositions récemment votées accroissaient encore les possibilités d'obtenir le sursis à exécution des autorisations de construire, et qu'il était, par conséquent, souhaitable de limiter ce mouvement, car ces dispositions complexes entravaient les initiatives des élus et l'avancement des projets.

Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a jugé en outre que la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire aurait des incidences importantes sur le droit de l'urbanisme. Ce texte prévoit en effet la création, le cas échéant, de directives territoriales d'aménagement pour certaines parties du territoire. En ce qui concerne les financements accompagnant la loi d'orientation, le rapporteur pour avis a jugé préoccupante l'évolution des crédits consacrés au Fonds national pour l'aménagement et le développement du territoire (FNADT). Il a ajouté que cette baisse touchait les départements de montagne où le potentiel touristique était important et où toutes les collectivités même les plus petites effectuaient des investissements.

S'agissant de la baisse des crédits de l'urbanisme, le rapporteur pour avis a précisé qu'elle touchait non seulement les lignes « urbanisme » en tant que telles, le budget des écoles d'architecture, la politique de protection du patrimoine et du paysage, mais également les moyens alloués aux acquisitions foncières -diminuées de moitié-, bien que ces crédits soient nécessaires à toutes les interventions dans les zones où le marché foncier est tendu.

En conclusion, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a proposé d'émettre un avis défavorable sur les crédits inscrits au budget de l'urbanisme pour 1996.

Répondant aux propos du rapporteur pour avis, M. Alain Pluchet a estimé que les crédits du ministère de l'équipement, au titre de l'urbanisme, étaient globalement maintenus ; quant à la diminution des aides aux CAUE, il a jugé qu'elle n'entamait pas leur stabilité financière. Il a, en outre, considéré que la diminution du taux de la taxe destinée au financement des CAUE permettrait de réaliser une économie, au bénéfice des constructeurs.

M. Rémi Herment a déclaré que, dans de nombreux domaines, les conseils généraux avaient pallié la diminution des crédits de l'État, en accroissant leurs concours aux CAUE qui étaient les interlocuteurs privilégiés des petites communes.

Répondant à une question de M. Rémi Herment, Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a précisé que les CAUE étaient constitués sous forme d'associations et qu'elle ne souhaitait pas voir accroître la tutelle de l'État vis-à-vis d'eux, mais qu'il serait très utile de mettre en oeuvre les mesures proposées par M. Christian Vigouroux.

À la question de M. Francis Grignon qui l'interrogeait sur l'adéquation de la formation des architectes aux besoins et sur les perspectives de développement dune formation d'urbanistes-sociologues, en particulier. Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a répondu que la Cour des comptes avait abordé la question des dysfonctionnements de la formation des architectes et qu'elle était, pour sa part, favorable à l'amélioration de la formation des urbanistes.

À une question de M. Charles Ginesy relative à la mise en oeuvre des lois d'aménagement et d'urbanisme dans le département des Alpes-Maritimes, le rapporteur pour avis a répondu que l'administration envisageait d'élaborer une directive territoriale d'aménagement, mais qu'elle n'avait pas annoncé le délai dans lequel ce document serait publié.

Interrogée par M. Bernard Joly sur la politique relative aux Zones de protection du patrimoine et de l'urbanisme (ZPPAU). Mme Josette Durrieu, rapporteur pour avis, a indiqué qu'à sa connaissance le Gouvernement n'avait pas manifesté d'intentions particulières à leur sujet.

Contrairement aux conclusions de son rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits inscrits au titre de l'urbanisme dans le projet de loi de finances pour 1996.

* 1 Le Moniteur, 6 octobre 1995, page 8.

* 1 La question a été tranchée, en droit, par le Conseil d'État dans un arrêt du 30 octobre 1992, CAUE de la Haute-Savoie.

* 1 Note d'information aux préfets du 9 mai 1995.

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