B. LA LUTTE CONTRE LE SIDA : DES MOYENS BUDGÉTAIRES EN AUGMENTATION, MAIS PEU DE LIGNES DIRECTRICES

1. La situation sanitaire

Depuis le début de l'épidémie et de la surveillance épidémiologique, e n 1982, près de 37.000 cas de Sida ont été déclarés, et le ministère estime (compte tenu des non-déclarations ou du délai séparant diagnostic et déclaration) à environ 43.000 à 46.000 le nombre total de personnes ayant développé la maladie.

Parmi eux, entre 27.000 et 29.000 personnes sont déjà décédées.

Le rapport transmis au Parlement en application de l'article 26 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 indique que l'origine de la contamination des Malades et la suivante :

- personnes transfusées et hémophiles : 3 %

- personnes homosexuelles et bisexuelles : 40 %

- personnes usagers de drogue par voie injectable : 25 %

En proportion des populations concernées, ce sont les usagers de drogue qui sont les plus vulnérables : la proportion d'usagers de drogue contaminés par rapport au nombre de toxicomanes est cinq fois plus importante que la population homosexuelle ou bisexuelle malade du Sida par rapport à la population homosexuelle ou bisexuelle totale.

Ce rapport population malade/population concernée est 500 fois plus élevé chez les toxicomanes que pour ce qui concerne la population hétérosexuelle.

Il semble que la progression du nombre de cas de Sida déclarés soit stabilisée depuis 1993. Alors que ce nombre était passé de 3.784 en 1989 à 4.286 en 1990 et à 5.338 en 1993, il est resté à peu près stable depuis cette date. En effet, le nombre de cas de Sida déclarés s'est établi à 5.631 en 1994 et à 2.711 pour le premier semestre 1995.

Il ne faut pas nécessairement en conclure que le nombre de contaminations ne progresse plus : il est possible que, pour une part, la stabilisation du nombre de personnes malades résulte de l'allongement de la période d'incubation en conséquence de l'amélioration de la prise en charge médicale des personnes séropositives.

Il est difficile d'évaluer avec précision l'influence respective de l'évolution des contaminations et celles des thérapeutiques. En effet, le diagnostic de séropositivité ne donne pas lieu à déclaration obligatoire.

La dernière estimation réalisée par le ministère chargé de la santé date de la fin de l'année 1992. Elle indique que le nombre de personnes séropositives en France serait compris entre 77.000 et 145.000 ; l'on peut donc retenir une hypothèse médiane de 110.000 personnes.

2. Quel avenir pour le plan quinquennal de lutte contre le Sida annoncé en février 1995 ?

A la suite d'une réunion du comité interministériel de lutte contre le Sida qui s'est déroulée le 13 février 1995, Mme Simone Veil, ministre d'Etat, ministre des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville dans le Gouvernement dirigé par M. Edouard Balladur a présenté un plan d'action quinquennal pour les années 1995 à 1999 qui a été adopté par le Conseil des ministres le 15 février 1995.

L'intérêt de ce plan était qu'il fixait, non seulement des objectifs à atteindre, mais aussi des moyens d'évaluer leur mise en oeuvre ainsi que le développement d'une politique de conventionnement avec les associations.

Quatre objectifs ont été fixés :

- amélioration de la politique de prévention, y compris en milieu carcéral, afin de réduire les risques de contamination ;

- mise en place d'une politique d'éducation à la santé et à la sexualité en milieu scolaire ;

- amélioration de la prise en charge sanitaire et sociale des personnes séropositives ou malades du Sida ;

- développement de la recherche et utilisation sans retard de ses résultats.

La réalisation de ces objectifs devait être mesurée grâce à un tableau de bord élaboré dans chaque département et dans chaque région ainsi que par des indicateurs quantitatifs et qualitatifs.

L'avenir de ce plan d'action est cependant incertain. En effet, le 23 mai 1995, lors de son discours de politique générale devant l'Assemblée nationale, le Premier ministre annonçait : « la politique de lutte contre le Sida devra être globale :

- grâce à l'information d'abord, qu'il faut amplifier car trop souvent encore, le Sida est la maladie de l'ignorance, surtout chez les jeunes et les toxicomanes ;

- grâce à l'assistance aux malades, tant sur le plan matériel que sur le Plan humain, en favorisant le maintien à domicile sous forme d'aide au logement et d'aide ménagère ;

- grâce à la recherche contre le Sida qui doit bénéficier des moyens nécessaires et être parfaitement coordonnée ».

Il concluait par l'annonce de la préparation, par le ministère chargé de la santé publique, d'un « programme de mobilisation nationale sur le Sida ».

Ce programme remettra-t-il en question le plan quinquennal annoncé au mois de février 1995 ?

3. Quels moyens d'action ?

Les crédits de la lutte contre le Sida s'élèvent, pour 1995, à 448 millions de francs, soit une augmentation de 53 % par rapport aux crédits votés dans le cadre de la loi de finances initiale pour 1995.

Si l'on prend pour référence les crédits ouverts sur la totalité de l'année 1995, soit ceux ouverts en loi de finances initiale plus 100 millions de francs résultant de la loi de finances rectificative, la lutte contre le Sida sera dotée en 1996 de 56 millions de francs supplémentaires par rapport à l'année 1995. Ils permettront, selon le ministère, de renforcer les dispositifs sanitaires et les réseaux ville-hôpital, de développer les moyens de prévention, l'aide à la vie quotidienne des malades, les consultations de dépistage anonyme et gratuit ainsi que les actions de communication.

C'est, depuis l'année 1994, la Direction générale de la Santé qui a été chargée des fonctions précédemment confiées à l'Agence française de lutte contre le Sida. Sa division Sida comprend aujourd'hui 48 agents.

Les actions menées par la Direction générale de la Santé sont menées en lien avec les services déconcentrés de l'Etat, les collectivités locales, des structures professionnelles des secteurs éducatif, social et sanitaire ainsi qu'avec les associations.

La multiplicité des acteurs de la lutte contre le Sida constitue une grande richesse. Elle est également de nature à induire des difficultés d'organisation et de coordination.

Les associations, en particulier, rencontrent de ce fait des difficultés financières importantes. Celles-ci reçoivent principalement des financements pour une action donnée et très peu de subventions de fonctionnement, alors que le fonctionnement n'est pas, dans les faits, toujours indépendant des actions menées. Ces subventions sont accordées avec un retard important par rapport au moment où commence réellement l'action faisant l'objet d'un financement public. Selon ces associations, il faut en pratique compter un délai d'au moins sept mois entre le moment où est signé la convention et celui où elle reçoit un premier versement.

Enfin, l'existence de cofinancements multiples n'est pas de nature à faciliter la tâche des associations, dont une grande partie de l'énergie de leurs responsables est consacrée par la force des choses à la recherche de financements, au détriment des actions sur le terrain.

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