Avis n° 82 (1995-1996) de M. François BLAIZOT , fait au nom de la commission des lois, déposé le 27 novembre 1995

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N° 82

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1995.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 1996, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VII

DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER

Par M. François BLAIZOT,

Sénateur.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (l0ème législ.) : 2222, 2270 à 2275 et TA. 413

Sénat : 76 et 77 (annexe n°29) (1995-1996).

Lois de finances .

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi. vice-présidents ; Robert Pagès, Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest. secrétaires ; Guy Allouche. Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Claude Cornac, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck. Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Charles Jolibois, Lucien Lanier. Paul Masson, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Tùrk, Maurice Ulrich.

Mesdames, Messieurs,

L'examen des crédits des départements d'outre-mer, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon est l'occasion, pour le nouveau rapporteur pour avis de la commission des lois, de rendre hommage à notre excellent collègue, M. Pierre Lagourgue, qui rapportera désormais au nom de la commission des affaires sociales , les crédits qu'il examina jusqu'alors pour la commission des lois.

Les orientations générales retenues pour le budget 1996 accompagnent les principes d'action énoncés par M. Jean-Jacques de Peretti, ministre délégué à l'outre-mer, devant la commission des lois, lors de son audition le jeudi 16 novembre 1995 : le développement des interventions en matière d'emploi, le logement social, le respect des engagements contractuels de l'État et la préservation des moyens logistiques du ministère.

Les crédits consacrés par l'ensemble des ministères à l'outre-mer en 1996 croissent peu. En revanche, le projet de loi de finances traduit clairement les objectifs du ministre : il accroît le rôle du ministère de l'outre-mer en regroupant au sein de son budget, d'une part, en une ligne budgétaire unique (L.B.U.) les crédits consacrés au logement et, d'autre part, ceux de la créance de proratisation du RMI. Cette évolution confirme celle amorcée par la création du FEDOM (fonds pour l'emploi dans les DOM) en 1995 lequel montera en puissance en 1996.

Ainsi, alors que l'ensemble de l'effort de l'État n'augmente que de 1,36 % (contre 1,84 % pour l'ensemble du budget) passant de 35 874 millions de francs à 36 363 millions de francs, celui du ministère de l'outre-mer pour les seuls DOM, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon triple, passant de 1 078 à 3 479 millions pour les dépenses civiles (+ 222%) et de 1 415 à 3 832 millions pour l'ensemble des dépenses (+ 170 %).

L'effet de ces transferts est donc de faire passer la part gérée par le ministère de l'outre-mer de 3,94 % à 10,53 %.

L'examen du budget du ministère est en outre l'occasion pour la commission des Lois d'aborder, au-delà du rôle du ministère au sein du gouvernement (réglementation, action et impulsion interministérielle) et sur place (contribution aux affectations, déconcentration de la gestion ...), l'action du gouvernement outre-mer dans les domaines de la sécurité, de la justice et de la fonction publique.

En tout état de cause, l'évolution choisie confirme et traduit très concrètement la volonté de renforcer le rôle du ministère de l'outre-mer, a contrario des propositions de la mission Picq d'y substituer une direction au sein du ministère de l'Intérieur.

I. AU-DELÀ DES TRANSFERTS, UN ACCROISSEMENT DES CRÉDITS PROCHE DE LA MOYENNE

L'examen du « jaune » intitulé « État récapitulatif de l'effort budgétaire et financier consacré aux départements et collectivités territoriales d'outre-mer » permet de mettre en perspective les chiffres bruts et de donner son véritable sens à l'accroissement apparent des crédits.

Ainsi la politique des transferts se poursuit-elle pour accroître le rôle du ministère dont la dotation double, principalement au bénéfice des collectivités concernées par le présent rapport : Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. La première lecture à l'Assemblée nationale a un peu modifié le projet de loi.

Le tableau suivant traduit la place du budget examiné par le présent avis :

A. LA DOTATION DU MINISTÈRE DE L'OUTRE-MER DOUBLE PAR L EFFET DES TRANSFERTS

L'ensemble des crédits demandés par le ministère de l'outre-mer double (+ 95,94 % sur l'ensemble ; + 110 % pour les seules dépenses civiles) passant de 2 547 millions de francs à 4 992 millions de francs.

Cette évolution correspond pour l'essentiel aux transferts du ministère du logement et des charges communes effectués au bénéfice des actions en matière de logement (ligne budgétaire unique, chapitre 65-01, 631,9 millions de francs) et d'emploi (créance de proratisation du RMI imputée au chapitre 46-01 « actions d'insertion en faveur des bénéficiaires du RMI dans les DOM pour 871,6 millions de francs).

En revanche, les crédits consacrés par l'ensemble des ministères à l'outre-mer ne croissent que de 1,44 % passant de 46 166 millions à 46 833 millions de francs.

En conséquence, la part gérée par le ministère de l'outre-mer croît sensiblement de 5,5 % à 10,6 %.

B. LA DOTATION DES DOM, DE MAYOTTE ET DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON AU SEIN DU MINISTÈRE TRIPLE

Les transferts concernant au premier chef des actions menées dans les départements d'outre-mer, leur effet s'accentue lorsque l'on examine les seuls crédits auxquels sont consacrés le présent rapport. On constate un quasi-triplement de ces crédits qui passent de 1 415 millions de francs à 3 832 millions de francs (+ 170 % pour l'ensemble, + 222 % pour les seules dépenses civiles).

Dans le même temps, toutefois, les crédits consacrés par l'ensemble des ministères à ces six collectivités ne croissent que de 1,36 % passant de 35 874 à 36 363 millions de francs.

Ainsi la part gérée désormais par le ministère passe-t-elle de 3,94 % à 10,53 % (de 3 % à 9, 57 % pour les seules dépenses civiles).

Le budget est donc marqué par la poursuite de l'évolution initiée en 1995 avec la création du FEDOM (fonds d'emploi pour les DOM et à Saint-Pierre-et-Miquelon) doté de 1 060 millions de francs.

La dotation prévue pour le FIDOM (fonds d'investissement des départements d'outre-mer) poursuit également la tendance observée en 1995 :

- baisse des autorisations de programme pour toutes les sections (- 17,54 %) et achèvement du ciseau entre autorisations de programme et crédits de paiement pour les sections décentralisées ;

- accroissement de la part du FIDOM général au détriment des FIDOM régionaux et départementaux : les crédits de paiement de celle-ci représentent en effet 84 % de l'ensemble contre 82,6 % en 1995. Ils croissent de 0,94 % tandis que ceux des FIDOM régionaux et départementaux baissent de 11,81 %.

Dans le même temps, le gouvernement s'engage à honorer les contrats de plan qui représentent désormais 61 % de la dotation de la section générale (contre 21 % pour le Xème Plan) réduisant le rôle du comité directeur du FIDOM dont il importe néanmoins qu'il se réunisse régulièrement. Une réflexion est engagée sur sa modernisation. Délégués aux préfets, ces crédits font l'objet d'une consommation rapide.

S'agissant des sections décentralisées, la consommation des crédits de paiement est immédiate en raison du retard accumulé.

Lors de son audition par la commission des Lois, M. de Peretti a indiqué qu'une expertise contradictoire, demandée sur arbitrage du Premier ministre, devrait permettre d'établir le montant des un à deux milliards de crédits de paiement manquant depuis cinq à six ans dans le cadre du FIDOM.

D'une manière générale, il s'est déclaré attaché à réduire le blocage artificiel des procédures afin de fluidifier les crédits.

Il souhaite favoriser ainsi la consommation de l'ensemble des crédits inscrits pour permettre à terme 1' augmentation de l'ensemble des crédits inscrits, autorisations de programme incluses.

C. LES EFFETS POUR LE BUDGET DE L'OUTRE-MER DES ÉCONOMIES DÉCIDÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Répondant à l'appel du ministre de l'économie et des finances, M. Jean Arthuis, qui avait demandé aux parlementaires de joindre leurs efforts à ceux du gouvernement pour réduire les dépenses publiques, les députés ont décidé de réaliser deux milliards d'économie sur l'ensemble du budget.

S'agissant du ministère de l'outre-mer, ils ont tout d'abord adopté un amendement d'un montant qualifié de « symbolique » par le ministre qui s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée.

Après que M. de Rocca Serra eut recommandé dans son rapport à la commission des finances que les crédits de TANT (Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer) fussent augmentés de 9 millions de francs (suivant en cela une tradition établie depuis plusieurs années pour compenser la baisse constante des crédits qui lui sont affectés), la commission a émis un avis favorable à un amendement proposant de réduire ces crédits de 5 millions de francs, lequel fut adopté en séance publique.

Cette option ne récompense guère les efforts de gestion de cet organisme, pourtant signalés par le ministre et le rapporteur.

Mais surtout, lors de la deuxième délibération, ils ont adopté un amendement répartissant les économies non réalisées en cours d'examen des budgets des différents ministères et dont l'effet est de réduire de 48,2 millions de francs les crédits de paiement et dépenses ordinaires du ministère (dont 40 millions au détriment du FEDOM) et de 32,3 millions les autorisations de programme.

IL LE RENFORCEMENT DES MOYENS GÉRÉS PAR LE MINISTRE CONFIRME LE CHOIX D'UNE PRÉSENCE ACCRUE SUR PLACE

A. LES DIFFICULTÉS DES COLLECTIVITÉS LOCALES

1.- La situation administrative

- La décentralisation

S'agissant des DOM, le ministre de l'outre-mer a précisé lors de l'examen de son budget à l'Assemblée nationale (JO Assemblée nationale 2ème séance du 28 octobre 1995, p. 2730) que « même si l'on (pouvait) intellectuellement penser qu'une assemblée (unique) serait une bonne chose » les termes de la décision du Conseil constitutionnel du 2 décembre 1982 lui paraissait exclure de l'envisager dans le cadre institutionnel actuel.

Rappelons les termes de cette décision : « en confiant la gestion des départements d'outre-mer à une assemblée qui, contrairement au conseil général des départements métropolitains en l'état actuel de la législation, n'assure pas la représentation des composantes territoriales du département, la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel confère à cette assemblée une nature différente de celles des conseils généraux ; (...) ces dispositions vont au-delà des mesures d'adaptation que l'article 73 de la Constitution autorise en ce qui concerne l'organisation des DOM. »

Ainsi les deux collectivités territoriales qui cohabitent sur le même territoire dans les quatre DOM ne peuvent-elles s'attacher qu'à coordonner leurs interventions en matière économique pour laquelle elles ont toutes deux compétences aux termes de la loi du 2 mars 1982.

Les contrats de plans et la mise en oeuvre des programmes communautaires incitent à ce partenariat dans les DOM. Il est particulièrement développé à la Réunion.

Votre rapporteur a néanmoins interrogé le ministre lors de son audition sur la possibilité d'élaborer, sur des bases différentes de celle sanctionnée par le Conseil constitutionnel, et dans le cadre d'une réflexion plus large sur l'articulation région-département, une formule de décentralisation plus satisfaisante et moins coûteuse que la coexistence sur le même territoire géographique de deux structures administratives dotées d'une assemblée.

M. de Peretti a confirmé à la commission des lois que, compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel, il ne se hasarderait pas à proposer une assemblée unique mais que dans le cadre, par exemple, de la réforme de l'État, il souhaiterait voir clarifier la répartition des compétences entre ces deux collectivités territoriales et permettre au représentant de l'État de faire respecter la ligne de démarcation.

S'agissant de la Réunion, il a indiqué sa préférence pour une réorientation des services vers le sud plutôt que pour l'installation de nouvelles instances.

A Mayotte, la modernisation de la législation se poursuit notamment avec le dépôt de projets de loi d'habilitation qui permettront d'y adapter le nouveau code pénal, les récentes réformes de procédure pénale (en vue d'une entrée en vigueur le 1er mai 1996) et d'y instaurer un statut général des fonctionnaires des collectivités locales de Mayotte. De même, un projet de loi portant diverses dispositions relatives aux TOM, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon contient des dispositions relatives aux étrangers, aux débits de boisson, aux offices notariés.

Deux décrets d'application sont en cours d'élaboration pour l'extension du code des marchés de l'État et de ses établissements et l'adaptation des dispositions réglementaires du code du domaine de l'État et des collectivités publiques.

Outre le contrat de plan, Mayotte bénéficie d'une convention de développement signée le 5 avril 1995 avec l'État, en application de l'article 34 de la loi du 25 juillet 1994.

Les 1,8 milliards de francs prévus pour la période 1995-1999 seront consacrés à la rémunération des personnels de l'éducation et aux bâtiments scolaires, à l'hôpital de Mamoudzou, au logement et à l'eau.

Ils complètent ainsi le milliard de francs du contrat de plan signé en octobre 1994. Lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, le ministre a pris l'engagement que Mayotte serait amenée à déterminer son statut avant l'an 2 000.

Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, l'accord entre la France et le Canada signé et entré en vigueur le 2 décembre 1994 relatif au développement de la coopération régionale entre la collectivité territoriale française de Saint-Pierre-et-Miquelon et les Provinces atlantiques canadiennes a été publié au Journal officiel du 21 septembre 1995.

Il a mis un terme à des années de négociations sans régler dans l'immédiat les graves difficultés économiques des 6 000 habitants de l'archipel.

Du côté des institutions, l'arrêté du 20 février 1995 a mis en place le centre de gestion de la fonction publique territoriale dont les six représentants des collectivités territoriales au conseil d'administration ont été désignés.

D'autre part, en application de l'article 33 de la loi du 11 juin 1985, des négociations ont été engagées entre le préfet et le président du conseil général pour l'établissement d'une convention de mise à disposition du conseil général de la section du service des finances et de la comptabilité de la préfecture qui traite les affaires de la collectivité territoriale.

- L'aménagement du territoire

La loi du 4 février 1995, d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire s'applique aux DOM, à Saint-Pierre-et-Miquelon, avec quelques aménagements, ainsi que, pour certains articles, à Mayotte.

Plusieurs mesures spécifiques ont été prévues sur les DOM et Saint-Pierre-et-Miquelon :

- l'introduction des directives territoriales d'aménagement (article 5 B) dans la loi relative aux compétences des régions de Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion, ainsi que la prorogation de 6 mois (jusqu'au 30 juin 1995) du délai d'élaboration des schémas d'aménagement régionaux, qui tiennent lieu (article 6) de schémas régionaux d'aménagement et de développement du territoire créés par la loi lesquels seront intégrés au schéma national ;

- le maintien, pour la répartition entre les communes du Fonds national de péréquation (article 70), d'une quote-part destinée aux communes des départements d'outre-mer ;

- les DOM seront représentés au Conseil national d'aménagement du territoire par deux élus.

Mayotte bénéficie (article 88) de :

- l'éligibilité au Fonds de péréquation des transports aériens, au Fonds d'investissement des transports terrestres, au Fonds de gestion de l'espace rural et au Fonds national de développement des entreprises ;

- la mise en place d'un schéma régional d'aménagement et de développement du territoire.

- les relations avec l'Union européenne

Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon en tant que « PTOM » (pays et territoires d'outre-mer) sont associés et non intégrés à l'Union européenne ce qui leur permet notamment de garder des droits de douane particuliers ou d'appliquer des restrictions à l'importation des produits en provenance de la communauté ou d'un autre PTOM.

En revanche, le paragraphe 2 de l'article 227 du Traité de Rome constitue actuellement la base des relations des départements d'outre-mer avec l'Union européenne.

Il est actuellement ainsi rédigé :

« En ce qui concerne les départements français d'outre-mer, les dispositions particulières et générales du présent traité relatives : à la libre circulation des marchandises, à l'agriculture, à l'exception de l'article 40, paragraphe 4, à la libération des services, aux règles de concurrence, aux mesures de sauvegarde prévues aux articles 105H, 1091 et 226, aux institutions sont applicables dès l'entrée en vigueur du présent traité.

» Les conditions d'application des autres dispositions du présent traité seront déterminées au plus tard deux ans après son entrée en vigueur, par des décisions du Conseil statuant à I unanimité sur proposition de la Commission.

« Les institutions de la Communauté veilleront, dans le cadre des procédures prévues par le présent traité et notamment de l'article 226, à permettre le développement économique et social de ces régions. »

L'évolution jurisprudentielle récente de la Cour de justice (arrêts Legros de 1992 et Lancry de 1994) ainsi qu'une approche politique moins favorable de la part de certains de nos partenaires (difficultés de négociation du règlement cadre agricole révisé du POSEIDOM) traduisent le développement de réticences à l'égard de la démarche en faveur des régions ultrapériphériques.

En préparation de la renégociation du Traité de l'Union européenne en 1996, le ministère de l'outre-mer a pris l'initiative d'organiser à Strasbourg, en mars 1995, des journées d'études sur la situation des régions ultrapériphériques. A cette occasion, les exécutifs des 7 régions concernées ont adopté une motion proposant une rédaction nouvelle de cet article et ont confirmé cette intention lors des journées de Pointe-à-Pitre à la fin mars 1995.

Le projet de texte qui fournit la base de travail actuelle reprend la motion de Strasbourg et de Pointe-à-Pitre :

« Les dispositions du traité instituant la Communauté européenne et du droit dérivé s'appliquent aux régions ultrapériphériques (départements français d'outre-mer, Açores et Madère et Iles Canaries) ; toutefois, pour tenir compte des réalités et des spécificités de ces régions, le Conseil adopte des mesures particulières en leur faveur, sur proposition de la Commission et selon la procédure prévue à l'article 189B, dans la mesure et aussi longtemps qu'il existe un besoin objectif de prendre de telles dispositions. Celles-ci doivent viser, notamment, à permettre à ces régions de rattraper le niveau économique et social moyen de la Communauté. Les dispositions du droit dérivé, relatives aux régions ultrapériphériques, actuellement en vigueur, restent d'application. »

Le ministre a indiqué à la commission des lois que la France, en liaison active avec la présidence espagnole, recherchait la reconnaissance, à l'intérieur même du nouveau traité, de l'ultra-périphéricité. Il a précisé qu'il espérait régler ainsi la situation des DOM et que s'agissant des PTOM, il souhaiterait les insérer dans l'annexe, comme l'étaient les DOM jusqu'à présent, afin que leur régime ne soit plus aligné sur celui des pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique). Il a annoncé qu'en concertation avec les territoires, un mémorandum pour les PTOM serait déposé.

Celui-ci paraît mériter réflexion. Certes, pour Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte le régime actuel implique qu'ils ne peuvent bénéficier des aides communautaires au même titre que les DOM : le ministre a indiqué que pour 1 000 F versés à la Réunion, Mayotte recevait 80 F ; le rapport de notre excellent collègue, Daniel Millaud, sénateur de la Polynésie française, au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, était également très éclairant sur ce point.

En revanche, ce régime leur permet de conserver des dispositions fiscales et douanières protectrices qui ont été contestées aux DOM, précisément dans le régime auquel semble s'être référé le ministre.

2.- Les comptes des collectivités locales

La Cour des comptes n'a pas consacré cette année une étude particulière aux DOM. Son rapport confirme en revanche qu'en 1994 la Chambre régionale des comptes de Guadeloupe-Guyane-Martinique a reçu le quart du total des saisines enregistrées dans l'ensemble des chambres au titre des demandes d'inscription des crédits nécessaires au règlement de dépenses obligatoires. Il rappelle également que « la généralisation et l'ampleur de la dégradation des finances locales dans ces départements pose des problèmes spécifiques, notamment aux Antilles et en Guyane ».

En Guadeloupe, la Chambre régionale des comptes dans son avis du 18 avril 1995 sur le budget primitif 1995 de la région a estimé qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre la procédure de redressement. Le budget primitif du département est en équilibre : l'épargne reste inférieure à la moyenne nationale tandis que les ratios de la dette sont supérieurs à la moyenne.

En Guyane, on constate une chute des dépenses d'investissement. Le budget de la région traduit la poursuite des efforts d'assainissement. Celui du département, voté en équilibre, comprend une part de dépenses en personnel très élevée : 44 % des dépenses de fonctionnement contre 26 % dans les Antilles et 15,6 % à La Réunion, soit à peu près la moyenne nationale.

La région Martinique a pleinement utilisé les possibilités fiscales qui lui ont été offertes par la loi de finances initiale pour 1994. Elle poursuit actuellement son redressement financier, au prix d'une réduction drastique de ses investissements. Le département connaît lui un ratio de la dette inférieur à la moyenne.

Contrairement aux autres conseils régionaux des DOM, le conseil régional de la Réunion n'a pas eu besoin de recourir aux possibilités d'augmentation du droit additionnel à l'octroi de mer et de création d'une taxe sur les billets ouvertes par la loi de finances initiale pour 1994. La région augmente ses investissements en 1995 : 4 nouveaux lycées sont engagés. Le budget du département est en équilibre avec toutefois un taux d'épargne très faible.

B. LE RÔLE DES SERVICES DE L'ÉTAT

L'évolution amorcée par le précédent gouvernement est accentuée : à institutions inchangées, le ministre entend accompagner la décentralisation, les importants crédits dont l'outre-mer bénéficie et la confirmation des mesures fiscales, par une amélioration des procédures de gestion des administrations centrales, des services déconcentrés et des fonctionnaires.

Ses attributions fixées par les décrets des 8 juin, 15 et 17 novembre 1995 sont celles du décret du 3 juin 1991.

1.- Les administrations centrales

Ainsi qu'a pu l'indiquer le ministre à la commission des lois, son rattachement au Premier ministre depuis le 7 novembre 1995 devrait lui permettre de mieux contribuer à la coordination de l'action du gouvernement outre-mer grâce à des arbitrages interministériels rendus au nom du Premier ministre à Matignon.

Plus significatifs sont les transferts de crédits qui en triplant ceux qu'il gère au bénéfice des DOM, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon lui permettront d'agir plus rapidement dans les domaines essentiels du logement et de l'emploi.

Le ministre a confirmé à la commission des lois que les personnels et moyens de gestion nécessaires lui seraient transférés et qu'un service du ministère et un nouveau membre de son cabinet (nomination supplémentaire autorisée à l'occasion du remaniement) seraient chargés du logement.

La commission présidée par M. Limodin, inspecteur général de l'administration, que le ministre avait chargée de lui faire des propositions sur la modernisation de l'action publique outre-mer, dans le cadre de la circulaire sur la réforme de l'État du Premier ministre en date du 24 juillet 1995, lui a rendu ses conclusions en octobre.

M. de Peretti a indiqué à la commission des lois qu'il les transmettrait prochainement au Premier ministre et au nouveau ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, M. Dominique Perben.

Il a précisé que les principales directions qu'il en retenait étaient de rapprocher l'administration de l'usager, notamment par la voie du guichet unique et de la meilleure gestion des catastrophes naturelles. Il a également souhaité une meilleure organisation du ministère, par exemple au travers de commissions mobiles pour les investissements qui pourraient contribuer au renforcement des services de l'État sur place, autour du préfet. Il a indiqué que la déconcentration était l'un de ses objectifs et qu'elle nécessiterait un examen interministériel.

Ainsi le décret du 6 novembre 1995 portant déconcentration en matière de gestion des personnels de la police nationale est-il applicable dans les départements d'outre-mer.

2.- La gestion par la déconcentration

Trois exemples illustrent le mode de gestion privilégié par l'État.

En matière d'emploi, les agences d'insertion prévues par la loi du 25 juillet 1994 se sont substituées depuis le 1er octobre 1995 aux conseils départementaux d'insertion des départements d'outre-mer. Leurs directeurs ont été nommés par un décret du 21 septembre 1995.

Les agences seront opérationnelles au début de l'année 1996.

Établissement public national à caractère administratif placé sous la tutelle du ministre chargé des DOM (art. premier du décret n° 95-710 du 9 mai 1995), cette agence est présidée conjointement par le préfet et le président du Conseil général. Son conseil d'administration comprend en nombre égal des représentants des services de l'État dans le département, des représentants de la région, du département et des communes et des personnalités qualifiées. Le décret a prévu six représentants es qualités des services de l'État dans le département, six représentants de la région (1), du département (2) et des communes (3) et six personnalités qualifiées nommées par moitié par le préfet et le président du Conseil général.

Elles regrouperont les crédits destinés à l'insertion au niveau du département et seront les employeurs des bénéficiaires du RMI sous contrat d'insertion par l'activité.

Le directeur de l'agence est nommé pour trois ans par décret pris sur le rapport du ministre de l'outre-mer, après consultation du ministre chargé de l'action sociale et après avis du président du conseil général.

En matière de logement, en réponse à une question écrite de M. Rodolphe Désiré, sénateur de la Martinique (JO Questions Sénat, 27 juillet 1995, p. 1505) qui l'interrogeait sur le transfert au Conseil général de la responsabilité de la définition de la politique du logement social, M. de Peretti a écarté cette solution et indiqué que l'État apporte l'essentiel des financements et que la politique est « très largement déconcentrée puisque la programmation de l'aide à la pierre s'effectue au niveau local (et qu') il s'agit d'une politique concertée.

Il a estimé que « même si la situation des DOM présente des caractères spécifiques très forts, qui justifient des solutions adaptées, il paraît nécessaire de maintenir la cohérence » de cette politique au niveau national.

Enfin sur les agréments en matière de défiscalisation des investissements (désormais étendue aux investissements des services publics affermés ou concédés), le ministre a indiqué lors de l'examen de son budget à l'Assemblée nationale qu'il souhaitait (qu'un certain nombre d'agréments soient déconcentrés au niveau local ». Lors du débat sur l'article 55 du projet de loi de finances un amendement de l'Assemblée nationale a prévu que, dans certains cas, l'agrément serait tacitement accordé à l'expiration d'un délai de deux mois.

3.- La fonction publique

Questionné à plusieurs reprises sur les bonifications dont bénéficient les fonctionnaires affectés outre-mer, M. de Peretti a indiqué à la commission des lois qu'il avait constaté que les responsables politiques et professionnels posaient le problème et que les textes dataient des années 50 et pouvaient mériter à tout le moins d'être mis à jour.

Il a ajouté que les bonifications dont bénéficient les titulaires de la fonction publique territoriale étant alignées sur le régime de l'État, les collectivités locales recourent pour 68 % à des agents contractuels.

Il a souhaité qu'une solution vienne des principaux intéressés au travers d'une discussion ouverte avec les représentants socioprofessionnels, les syndicats et les acteurs économiques. Il avait indiqué à l'Assemblée nationale que les assises de l'égalité sociale et du développement pouvaient fournir un cadre d'ouverture de ce débat.

Il a indiqué s'intéresser tant aux propositions des parlementaires qu'à celles du rapport Ripert de 1990.

A l'heure actuelle, le régime de ces bonifications est le suivant :

En ce qui concerne les retraites, le décret du 10 septembre 1952 majore les pensions servies aux fonctionnaires civils et militaires retraités et résidant effectivement dans le département de la Réunion (+35 %) ou à Saint-Pierre-et-Miquelon (+ 40 %).

S'agissant de la déconcentration, bien que le nombre ne soit pas l'unique critère à prendre en compte, il est important de mesurer à l'aune des effectifs du ministère présents sur place, la réalité des engagements en la matière.

Or si deux nouveaux sous-préfets (Martinique et Mayotte) sont prévus au budget 1996 et si les effectifs du ministère en administration centrale passent de 284 à 316 en 1996, en revanche les effectifs présents dans les collectivités territoriales baissent de 1299 à 1294. En outre, on constate un déséquilibre de l'encadrement, séquelle du droit d'option entre les collectivités territoriales et l'État.

III. DES MOYENS INÉGALEMENT ACCRUS EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ET DE JUSTICE

A. LES PROBLÈMES DEMEURENT

1.- L'accroissement de la délinquance se poursuit mais à rythme ralenti

L'avis budgétaire de la commission des lois sur le projet de budget 1995 (n° 84, Tome VII, départements d'outre-mer, M. Pierre Lagourgue) faisait le bilan de l'évolution du taux de criminalité et des crimes et délits constatés entre 1990 et 1993. Il soulignait que pour la première fois en 1993, le taux de criminalité moyen des DOM dépassait celui de la métropole avec 68,35 °/oo contre 67,48 °/oo. L'évolution se poursuit en 1994 puisque le taux de criminalité des DOM croît de 7,05 % et passe à 73,17 °/oo.

De même, les crimes et délits constatés croissent de 7,10% tandis qu'en métropole l'accroissement n'est que de 0,87 %.

On constate néanmoins un certain tassement de cette croissance puisqu'en 1994 le taux de criminalité des DOM avait crû de 23,3 % et les crimes et délits constatés de 23,31 %.

Comme l'an passé, ces chiffres globaux recouvrent de grandes disparités entre la quasi-stabilité de la Réunion (+ 0,08 %) et la Guadeloupe (+ 1,85 %), la croissance de la Guyane (+ 4,72%) et l'explosion de la Martinique (+ 22,52 %) qui repose toutefois en partie sur 8 554 infractions à la santé publique concernant une même procédure (exercice illégal de la médecine par un guérisseur).

Toutefois, alors qu'en métropole la croissance est forte pour les violences contre les personnes, celle-ci ne croît qu'à la Réunion tandis que dans les autres DOM ce sont les vols qui progressent le plus.

2.- La surpopulation carcérale reste marquée :

Déjà en 1994, la commission des lois avait constaté que malgré les constructions en cours, les taux de surpopulation carcérale atteignaient des niveaux records.

En 1995, les chiffres s'établissent ainsi :

Si l'on constate une légère baisse des taux en Guadeloupe (grâce à l'augmentation de la capacité) et en Martinique (grâce à la baisse du nombre de détenus), en revanche le taux de Guyane reste, malgré l'ouverture de places supplémentaires et la baisse du nombre de détenus, inconcevable. La Réunion voit son taux croître.

En métropole, le taux d'occupation au 1er janvier 1995 était de 104%.

La loi n°95-884 du 3 août 1995 portant amnistie n'a eu que peu d'effets sur les effectifs de détenus :

- en Martinique : 7 détenus ont été libérés

- à la Réunion : 13 détenus ont été libérés

- en Guadeloupe : 2 détenus ont été libérés

Aucune libération n'est intervenue en Guyane, à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.

3.- Les développements de la situation de l'immigration

En Guyane, le nombre des expulsions et reconduites à la frontière continue à croître : 11 168 en 1994 contre 10 565 en 1993 soit + 5,7 %. Les refoulements et non-admissions ont crû de 41 %, passant de 3215 à 4543.

Au total, ces deux types d'actions croissent de 14 % et correspondent à 34 % des expulsions et refoulements prononcés en métropole.

A Mayotte, le solde des entrées et départs des comoriens a doublé entre 1993 et 1994, passant de + 1 169 à + 2 241.

Le rétablissement des visas à leur égard à compter du 20 janvier 1995 a conduit les autorités comoriennes à suspendre les liaisons maritimes et aériennes entre les deux pays.

En outre, le représentant de l'État a fait relever le droit de port pour les boutres touchant Mayotte et exigé le dépôt par les passagers à l'arrivée d'une caution équivalent au prix du billet de retour aux Comores.

Ces mesures ont réduit le nombre des comoriens venants à Mayotte pour se faire soigner. Auparavant, près de la moitié des parturientes de l'hôpital étaient anjouanaises bien que depuis fin 1993, seuls les résidents mahorais bénéficient de la gratuité des soins.

En revanche, le rapatriement des clandestins est devenu très problématique compte tenu de l'obligation de passer par Madagascar pour joindre les Comores à partir de Mayotte.

S'agissant de Saint-Martin (Guadeloupe), le président de la commission des lois avait été saisi du problème des immigrés sinistrés après le passage du cyclone Luis.

Interrogé par votre rapporteur, M. le ministre de l'outre-mer a indiqué qu'il avait personnellement veillé à ce qu'aucune action critiquable ne soit menée à Saint-Martin à cette occasion. Il a précisé qu'à son initiative, prise en réponse à une demande d'immigrés rencontrés sur place, et sur la base d'un total volontariat, avait été mise en place une aide au retour et au déménagement pour les immigrés sinistrés qui choisissaient de retourner dans leur pays d'origine.

Il a indiqué que cette faculté, organisée en liaison avec La Dominique, Haïti et le commissariat aux réfugiés, avait finalement été utilisée par 600 à 700 personnes toutes volontaires. Il a en outre rappelé les mesures prises en matière de logements d'urgence et de régularisation à l'occasion du cyclone et indiqué que le maire de Saint-Martin avait pris des mesures interdisant la reconstruction des logements précaires afin de reloger décemment les habitants sinistrés.

Plus généralement, il a précisé qu'il avait demandé aux Pays-Bas d'accélérer le processus de consultation et de ratification afin que l'accord franco-néerlandais sur le contrôle des personnes dans les aéroports de Saint-Martin, signé le 17 mai 1994 et ratifié par la France au cours de la présente session, puisse entrer en vigueur et faciliter la lutte contre les trafics de drogue.

Cet accord permettra aux agents locaux de la direction du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins d'intervenir dans les limites de leurs compétences et selon notre droit national en territoire néerlandais.

Il facilitera l'éloignement des étrangers non admis ou trouvés en situation irrégulière et permettra à chacune des deux parties de demander à l'autre l'arrestation provisoire aux fins d'extradition de toute personne qui aurait été appréhendée à l'issue du contrôle.

B. LE BUDGET DE PLUSIEURS MINISTÈRES COMPORTE DES ÉLÉMENTS DE RÉPONSE

1.- La construction des établissements pénitentiaires se poursuit mais la situation des magistrats est préoccupante

- l'administration pénitentiaire :

M. Jacques Toubon, ministre de la justice, a indiqué à la commission des lois, lors de son audition le 14 novembre 1995, que les centres pénitentiaires de Ducos (Martinique) et Baie-Mahault (Guadeloupe), dont la construction a débuté en mars 1994 et devait durer 24 mois, devraient être achevés en décembre 1995 et que les personnels nécessaires étaient prévus.

Il a en outre indiqué que le centre pénitentiaire de Remire-Montjoly (Guyane) serait prêt et doté du personnel nécessaire en décembre 1996.

Notre excellent collègue, M. Georges Othily, sénateur de la Guyane, lui ayant fait part de son scepticisme sur ce point pour avoir personnellement constaté sur les lieux un retard dans l'exécution des travaux, le garde des sceaux l'a assuré de sa vigilance pour que le calendrier prévu soit respecté.

Il a par ailleurs indiqué que la loi de finances consolidait les 230 emplois en surnombre du protocole Méhaignerie du 10 janvier 1995 qui ne s'imputeraient pas sur l'ensemble des effectifs prévus par la loi quinquennale.

A l'issue de ces travaux, les capacités d'hébergement à Cayenne devraient être suffisantes : 420 places pour 310 détenus actuellement.

En Martinique, en revanche, le nouveau centre de 400 places remplacera l'ancien de 215 places mais le nombre actuel de détenus (en baisse) est de 441.

- les effectifs de magistrats :

A la suite du décret de localisation du 6 mai 1995, les 151 magistrats des DOM se répartissent ainsi : 47 à la Guadeloupe, 38 à la Martinique, 11 en Guyane (les appels sont traités par la chambre détachée de la Cour d'appel de Fort-de-France à Cayenne) et 55 à la Réunion.

Ces effectifs ont bénéficié entre 1990 et 1995 d'une progression de 5,59 % (contre 2,92 % en métropole).

Sur une question de votre rapporteur, le garde des sceaux a néanmoins estimé devant la commission des Lois que la situation des juridictions était inégale et préoccupante dans ces départements, que les services judiciaires et le Conseil supérieur de la magistrature y étaient attentifs et que s'agissant d'une situation qu'il a qualifié d'une des plus déficitaires, il s'attacherait à y remédier.

Rappelons que si les crédits du ministère de la justice pour l'outremer baissent de 1,37% en 1996, ce chiffre recouvre de grandes disparités liées aux tranches de travaux pour les centres pénitentiaires (+ 78 % pour la Guyane par exemple et - 30 % pour la Martinique) et que les effectifs croissent de 16% sans qu'il soit possible de distinguer pénitentiaire et judiciaire au travers du jaune budgétaire.

Les élus guyanais se sont notamment préoccupés du greffier du deuxième juge d'instruction installé récemment en Guyane.

2.- Les personnels de police et de gendarmerie restent stables, mais à Mayotte, l'État prend plus à sa charge

Le budget consacré par le ministère de l'intérieur aux DOM, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon croît de 2,94 % en 1996 à peu près uniformément dans les six collectivités et celui de la défense est à peu près stable.

En revanche, les effectifs du ministère de l'intérieur présents dans ces six collectivités sont stables (2 132 contre 2 130 en 1995) tandis que ceux de la défense baissent de 7 354 en 1995 à 7 312 en 1996 (- 0,57 %).

Néanmoins, l'État prendra à sa charge en 1996 les dépenses de la police mahoraise à hauteur de 7,2 millions de francs et M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur a indiqué, lors de son audition par la commission des lois le 21 novembre 1995, son intention de dépêcher 120 fonctionnaires de police de plus outre-mer.

En matière de lutte contre l'immigration clandestine, un centre de rétention devrait être terminé en Guyane près de l'aéroport de Rochambeau.

L'arrêté du 25 septembre 1995 a en outre créé un service de contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins de la collectivité territoriale de Mayotte et le commissariat de Dzaoudzi a été doté de moyens d'accueil pour les personnes en attente d'expulsion.

3.- L'ensemble des politiques publiques peut contribuer à la prévention de la délinquance

En ce sens, apparaît primordial le renforcement du rôle de coordination et d'impulsion du ministère de l'outre-mer en matière d'emploi et de logement ainsi que son engagement en matière d'éducation pour obtenir le rattrapage, notamment à la Réunion, des sous-effectifs d'enseignants.

L'action sociale, que l'on parle d'adapter les solutions aux réalités du terrain plutôt que de rechercher une égalité de principe comme le faisait le précédent gouvernement, ou que l'on se donne pour objectif l'égalité sociale comme le fait l'actuel, tout en n'entrant pas dans les compétences directes du présent rapport, apparaît ainsi à la commission des lois comme l'un des facteurs de la cohésion de la société. De même, les mesures d'encouragement aux investissements outre-mer en tant que facteurs de maintien ou de développement de l'emploi.

C'est donc avec raison que le ministre, interrogé lors du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, a pu dépasser l'alternative ministère de gestion - ministère de mission pour décrire le ministère de l'outre-mer comme « un ministère de l'action cohérente quelle que soit la voie par laquelle on y parvient ».

En conclusion, la commission des lois vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits des départements d'outre-mer et des collectivités territoriales de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.

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