Avis n° 87 (1996-1997) de M. James BORDAS , fait au nom de la commission des affaires culturelles, déposé le 29 novembre 1996

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N° 87

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1996.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 1997, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XII

RELATIONS CULTURELLES, SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES

Par M. James BORDAS,

Sénateur.

1 Cette commission est composée de : MM. Adrien Gouteyron, président ; Pierre Laffitte, Albert Vecten, James Bordas, Jean-Louis Carrère, Jean-Paul Hugot, Ivan Renar, vice-présidents ; André Egu, Alain Dufaut, André Maman, Mme Danièle Pourtaud, secrétaires ; MM. Philippe Arnaud, Honoré Bailet, Jean Bernadaux, Jean Bernard, Jean-Pierre Camoin, Jean-Claude Carle, Robert Castaing, Marcel Charmant, Marcel Daunay, Jean Delaneau, André Diligent, Ambroise Dupont, Daniel Eckenspieller, Alain Gérard, Pierre Jeambrun, Alain Joyandet, Philippe Labeyrie, Jean-Pierre Lafond, Henri Le Breton, Jacques Legendre, Guy Lemaire, François Lesein, Mme Hélène Luc, MM. Pierre Martin, François Mathieu, Philippe Nachbar, Sosefo Makapé Papilio, Michel Pelchat, Louis Philibert, Jean-Marie Poirier, Guy Poirieux, Roger Quilliot, Jack Ralite, Victor Reux, Philippe Richert, Claude Saunier, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Jacques Valade, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10ème législ.) : 2993, 3030 à 3035 et T.A. 590.

Sénat : 85 et 86 (annexe n° 1) (1996-1997).

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

Devant les chefs d'État et de Gouvernements francophones réunis à Cotonou, en décembre dernier, le Président de la République avait pris l'engagement que les crédits de l'action francophone, à laquelle concourt pour une large part la coopération culturelle et éducative mise en oeuvre par la Direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques (DGRCST) du Quai d'Orsay, ne seraient plus amputés.

Force est cependant de constater que la DGRCST n'a pas été épargnée par la régulation budgétaire en 1996, même si les annulations de crédits qu'elle a été amenée à supporter ont été ramenées à des proportions plus acceptables.

En 1997, et compte tenu de la baisse pour la deuxième année consécutive des crédits des relations culturelles, scientifiques et techniques inscrits dans le projet de loi de finances, il importe que soit scrupuleusement respectée l'autorisation de dépenses votée par le Parlement.

À défaut, la récurrence des exercices de régulation budgétaire finirait par compromettre la définition même d'une politique de coopération culturelle, éducative et scientifique cohérente.

I. LES RELATIONS CULTURELLES, SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES À L'AUNE DE LA RIGUEUR BUDGÉTAIRE

A. UNE LENTE ÉROSION DES MOYENS DE L'ACTION CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE EXTÉRIEURE

1. Le budget de la Direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques pour 1997

Pour la deuxième année consécutive, les crédits affectés par le ministère des Affaires étrangères aux relations culturelles, scientifiques et techniques régressent dans le projet de loi de finances présenté au Parlement. En 1997, ces crédits devraient atteindre 5,082 milliards de francs, en diminution de 3,5 % par rapport aux crédits votés pour 1996.

La diminution du budget de la DGRCST devrait avoir pour principales conséquences :

- le rééchelonnement, sur une année supplémentaire, de l'exécution du plan quinquennal pour l'audiovisuel extérieur (1994-1998) ;

- l'accélération de la restructuration du réseau des établissements culturels à l'étranger par fusion, transformation ou fermeture de centres ou d'instituts culturels et de recherche en sciences sociales :

- la réduction de programmes spécifiques : bourses, recherche et échanges scientifiques, fouilles archéologiques, subventions aux associations, appui à la diffusion à l'étranger du cinéma français, coopération linguistique et éducative ;

- la diminution du soutien accordé aux programmes d'action artistique à l'étranger ;

- une « révision » à la baisse du programme de créations de classes bilingues et de filières universitaires francophones.


• Dans ce contexte de rigueur, l'on doit néanmoins se féliciter :

- de la progression de 1,8 % de la dotation accordée à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger. Cet effort devrait permettre de consolider l'enveloppe affectée au service de bourses de scolarité aux enfants français scolarisés dans le réseau ;

- de la reconstitution de la base budgétaire de Radio France Internationale, dont la subvention avait été réduite de plus de 14 % l'an passé.

Le tableau ci-après retrace l'évolution de la répartition fonctionnelle des crédits de la DGRCST entre 1995 et 1996.

ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DU BUDGET DE LA DGRCST ENTRE 1996 ET 1997

(en millions de francs)

2. La récurrence des exercices de régulation budgétaire

Depuis 1991, le budget des relations culturelles, scientifiques et techniques voté par le Parlement est systématiquement remis en cause, dans des proportions non négligeables.

Parce que la Direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques concentre une part importante des crédits d'intervention du ministère des Affaires étrangères, la tentation est grande de lui faire supporter l'essentiel des annulations de crédits imposées au Quai d'Orsay.

Le tableau ci-après rend compte de la portée des mesures de régulation qui ont affecté la DGRCST au cours des dernières années.

ANNULATIONS DE CRÉDITS SUPPORTÉES PAR LA DGRCST (1991-1996)

(1) soit 112 millions de francs annulés le 27 septembre et 8 millions de francs transférés au bénéfice de la célébration de l'année de la France au Japon

Dans ce contexte, votre rapporteur se félicite que les annulations de crédits aient été « limitées » à 120 millions de francs en 1996, alors qu'il avait été envisagé, dans un premier temps, qu'elles puissent porter sur 355 millions de francs.

Dans ce domaine d'intervention plus encore que dans tout autre, les exercices de régulation budgétaire revêtent des effets particulièrement pervers.

Parce que les révisions imposées en cours d'année portent prioritairement sur les moyens d'intervention, la récurrence des exercices de régulation budgétaire pourrait conduire la France à entretenir à l'étranger un réseau d'établissements culturels surdimensionné au regard des moyens d'intervention mis à sa disposition.

Parce que des économies significatives ne peuvent être réalisées en cours de gestion que sur les enveloppes richement dotées, les mesures de régulation budgétaire concourent à freiner le redéploiement nécessaire de l'action culturelle et scientifique vers les zones géographiques prioritaires.

Parce qu'elles perturbent le rythme d'exécution des projets de coopération arrêtés conjointement avec des partenaires étrangers, ces pratiques fort regrettables risquent enfin de porter atteinte au crédit de la France hors de ses frontières.

B. L'ACCÉLÉRATION DE LA RESTRUCTURATION DES RÉSEAUX DE COOPÉRATION CULTURELLE, SCIENTIFIQUE ET ÉDUCATIVE À L'ÉTRANGER

1. La réorganisation des services extérieurs

La fusion, opérée en 1994, des compétences exercées à l'échelon central en matière de coopération éducative et linguistique et de la tutelle sur les établissements culturels au sein d'une nouvelle direction de la coopération culturelle et linguistique, a trouvé son prolongement dans la restructuration des centres et des instituts culturels, services extérieurs de l'État.

Dès le 1er juillet 1995, 33 centres de coopération culturelle et linguistique ont été constitués à partir de la fusion d'établissements jusqu'alors indépendants : centres ou instituts culturels et bureaux de coopération linguistique et éducative. La création de ce nouveau type d'établissement répond au souci de rationaliser et d'unifier l'action conduite par la France en ces domaines, en élargissant les missions traditionnelles des centres culturels à la coopération linguistique et éducative. L'on notera que les centres de coopération linguistique et culturelle ont été dotés de l'autonomie financière, ce qui permet à la fois d'assouplir leur gestion et de faciliter la mobilisation des ressources extérieures.

Poursuivie en 1996 par la création de 19 centres de coopération culturelle et linguistique, la restructuration des services extérieurs se traduira encore le 1er janvier prochain par des regroupements dans 16 villes, portant à 68 au total le nombre de centres culturels aux compétences élargies ouverts en dix-huit mois.

Une expérience d'intégration plus poussée a par ailleurs été tentée au Caire, à Tunis et à Beyrouth où des centres culturels et de coopération réunissent, au sein d'une même structure, l'ensemble des champs d'intervention de la direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques.

Cette évolution présente incontestablement l'avantage de favoriser l'établissement de synergies entre la politique d'apprentissage de la langue française et la définition de la coopération culturelle.

2. La recherche d'une plus grande complémentarité entre le réseau des centres culturels et celui des alliances françaises

Pour éviter les redondances et présenter un visage unifié de la France à l'étranger, un effort de rapprochement entre le réseau des services extérieurs de la direction générale (centres et instituts culturels), d'une part, et celui des 1.056 comités locaux de l'Alliance française, associations de droit local, d'autre part, a été engagé voici une dizaine d'années.

La coordination entre ces deux réseaux repose, à Paris, sur les contacts réguliers établis entre la DGRCST et l'Alliance française. Elle est formalisée depuis 1990 par la signature d'une convention annuelle fixant le montant et la destination de la subvention dont bénéficie cet établissement.

Dans le prolongement de la modernisation des interventions de la DGRCST, les Ambassadeurs ont été invités depuis 1995 à signer des contrats d'objectifs avec les comités locaux appelés à participer à la mise en oeuvre de la politique culturelle extérieure de la France. Ces contrats tendent à doter les alliances locales, dans le respect de leur autonomie, de projets de développement qui s'insèrent dans la politique culturelle, éducative ou linguistique définie à l'échelon central. Une quinzaine de conventions de ce type ont d'ores et déjà été signées.

Dans certains pays, la coopération entre ces deux réseaux a pris la forme de la nomination d'un directeur commun au centre ou à l'institut culturel et à l'Alliance française. C'est le cas en particulier à Kiev, à Saint-Pétersbourg, à Glasgow, à Madrid, à Nairobi ou à Rabat. Enfin, pour mettre fin à des situations de concurrence préjudiciable à l'image de la France à l'étranger, les activités d'enseignement du français, langue étrangère, ont pu être placées sous la responsabilité exclusive d'un établissement culturel (institut français de Copenhague) ou d'alliances françaises (à Rome ou à Lisbonne).

Votre rapporteur se félicite de ces évolutions qui contribuent à accroître la cohérence des actions de coopération culturelle, linguistique et scientifique mises en oeuvre dans chaque pays.

Il importe toutefois que des critères précis, et indépendants des seules contingences budgétaires, président à la fermeture ou aux regroupements de centres ou d'instituts culturels.

C. UN REDÉPLOIEMENT INSUFFISANT DE LA COOPÉRATION CULTURELLE ET SCIENTIFIQUE VERS LES ZONES GÉOGRAPHIQUES PRIORITAIRES

Les évolutions géopolitiques qui ont marqué la dernière décennie ont conduit le ministère des Affaires étrangères à redéployer ses interventions culturelles, scientifiques et techniques au bénéfice, pour l'essentiel, des pays d'Europe centrale et orientale (PECO) et des pays de la péninsule Indochine.


• Dans les pays d'Europe centrale et orientale, la coopération et les échanges culturels ont été relancés dès 1990. Ils tendent prioritairement à assurer le rayonnement culturel de la France et la diffusion de la langue française ou à soutenir le passage à un État de droit et la transition vers une économie de marché.

Deux groupes de pays doivent cependant être distingués. Dans le premier, qui rassemble la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, la Slovénie, la Bulgarie, la Roumanie et les États baltes, l'intervention de la France se situe délibérément dans la perspective de leur adhésion future à l'Union européenne. Dans le second, c'est-à-dire en Russie et dans les nouveaux États indépendants, l'objectif primordial reste l'appui à la stabilisation.

Les moyens d'action de la DGRCST sont variés. L'ensemble de cette zone dispose désormais d'une bonne couverture radiophonique et télévisuelle. Dans les pays traditionnellement francophones ou francophiles (Roumanie, Moldavie, Bulgarie, Pologne, Arménie ou Albanie), l'accent est mis sur le développement de filières d'enseignement bilingues et le renforcement de la coopération interuniversitaire. Dans les autres pays, la coopération éducative et linguistique emprunte des voies moins onéreuses, privilégiant la formation initiale de professeurs de français ou la modernisation des manuels d'apprentissage de notre langue.

En 1996, la DGRCST aura consacré, après régulation budgétaire, 400 millions de francs (soit 300 millions de francs en titre IV et 100 millions de francs en titre III) aux actions de coopération définies dans les 27 pays de cette zone géographique. Il est prévu de reconduire cet effort en 1997 à son niveau régulé en 1996.

Comme l'a très justement fait observer M. Xavier Deniau, rapporteur pour avis du budget des relations culturelles internationales et de la francophonie au nom de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, l'aide affectée directement par la France à la coopération culturelle et scientifique avec les pays d'Europe centrale et orientale reste très inférieure à la contribution française aux programmes PHARE et TACIS par la commission européenne.

Pour les années 1996 et 1997, la part de l'aide française transitant par les programmes communautaires atteint en effet près de 2 milliards de francs par an. Or, comme ne cesse de le dénoncer à juste titre notre collègue M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis des crédits de la francophonie au nom de la commission des Affaires culturelles, les promoteurs de ces programmes européens continuent de s'adresser aux bénéficiaires exclusivement en anglais, contribuant ainsi à ruiner les efforts entrepris par la DGRCST, dans le cadre de la coopération bilatérale, pour accroître la diffusion du français dans ces pays.


• La coopération culturelle, scientifique et technique avec le Cambodge, le Laos et le Vietnam a été relancée dès 1989 à la faveur des processus de réforme engagés dans ces trois pays.

Après avoir connu une forte croissance, les crédits affectés par la DGRCST à ces pays se sont stabilisés au niveau atteint en 1994.

Au Vietnam, où votre rapporteur s'est rendu en septembre dernier dans le cadre d'une mission d'information déléguée par la commission, les crédits budgétaires affectés à la coopération culturelle, scientifique et technique ont été multipliés par 3,75 entre 1989 et 1994, passant de 20 millions de francs à 75 millions de francs en loi de finances. Depuis lors, cette enveloppe est simplement reconduite au niveau atteint après la régulation budgétaire de 1994, c'est-à-dire 72,5 millions de francs.

Compte tenu des transferts de charges intervenus au cours de cette période, la stagnation de l'effort consenti masque une diminution des moyens affectés à la coopération culturelle et scientifique dans ce pays, évaluée à près de 10 %.

Imposé par les contraintes budgétaires rencontrées à l'échelon national, le plafonnement de l'aide affectée au Vietnam nécessite un effort permanent d'explication auprès de nos partenaires. Le budget de la coopération au Vietnam, qui reste largement préservé au regard de celui d'autres pays, continue cependant de traduire une priorité française, comme l'illustre aussi l'effort consenti par la France dans la perspective de la tenue du prochain sommet des chefs d'État et de Gouvernements francophones à Hanoï, en 1997.

Bénéficiaire de 35,1 millions de francs, le Cambodge se situe au deuxième rang des pays d'Asie soutenus par la direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques. Il bénéficie cependant également d'aides du ministère de la coopération. Le Laos reçoit quant à lui 22,4 millions de francs du ministère des Affaires étrangères.

Ces trois pays reçoivent par ailleurs des concours de la Caisse Française de développement et du Trésor. Les réponses aux questionnaires budgétaires adressées à votre rapporteur se félicitent de la multiplicité des acteurs de la coopération culturelle et scientifique dans ces pays. Elles font valoir que « cet ensemble d'intervenants constitue le dispositif de coopération le plus complet si on le compare à ceux mis en place par la France dans d'autres régions du monde ». Votre rapporteur serait plutôt tenté de craindre que la multiplication des centres de décision ne constitue un facteur nuisible à la cohérence et à l'efficacité des actions entreprises...

Parmi les principales actions mises en oeuvre dans cette région du monde, le soutien à la francophonie, à l'enseignement du français et l'aide à la réforme des systèmes éducatifs locaux occupent une place privilégiée.

Au Vietnam, la France apporte un soutien financier et pédagogique au programme de classes bilingues fondé sur l'offre d'un enseignement de qualité délivré en français au sein du système éducatif vietnamien. À la rentrée de 1996, 369 classes bilingues étaient ouvertes dans 68 établissements, répartis dans 17 provinces. À l'issue de ce programme qui couvrira en 2006 l'ensemble du cursus scolaire, du CP à la terminale, le nombre de classes bilingues devrait atteindre 1 230 unités et toucher environ 2 % des bacheliers. 41 filières universitaires francophones offrent enfin la possibilité aux étudiants vietnamiens de recevoir un enseignement supérieur en français. L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger finance par ailleurs l'école française internationale de Hanoï, qui scolarise 293 élèves parmi lesquels 30 % de vietnamiens.

Sans anticiper sur les conclusions de la mission d'information de la commission qui seront rendues prochainement, votre rapporteur souhaite insister ici sur l'action de sensibilisation des entreprises françaises implantées au Vietnam qui doit nécessairement accompagner cet effort : il serait vain d'inciter les jeunes vietnamiens à apprendre le français si ces entreprises devaient continuer à donner la préférence à l'embauche de diplômés maîtrisant exclusivement l'anglais.

La France accorde par ailleurs son soutien aux réformes des structures administratives, juridiques et économiques tendant à favoriser la mise en place d'un État de droit et la transition vers l'économie de marché. C'est dans cette perspective que s'inscrivent l'ouverture d'un centre Franco-Vietnamien de formation à la gestion, pilotée par la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, ou la création d'une maison du droit franco-vietnamienne à Hanoï, le soutien accordé à l'école royale d'administration de Phnom Penh et à l'école nationale d'administration et de gestion à Vientiane.

La coopération scientifique et technique prend encore la forme d'un concours à la réhabilitation de structures hospitalières (Hôpital Grall à Ho Chi Minh Ville, Hôpital Calmette au Cambodge, Hôpital Mahosot au Laos) et à la formation de personnels médicaux, d'une contribution aux programmes de développement agricole et de formation agronomique (hévéaculture, coton et café au Laos, systèmes agraires au Vietnam) et d'une participation à la préservation des patrimoines archéologiques et culturels et notamment du site historique d'Angkor.

*

* *

Le tableau ci-après retrace l'évolution de la répartition géographique des crédits d'intervention de la direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques depuis 1989. Il en ressort très clairement que le redéploiement des moyens de la coopération française vers les zones géographiques prioritaires d'Asie ou d'Europe centrale et orientale reste insuffisant au regard des enjeux.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES CRÉDITS D'INTERVENTION DE LA DGRCST (1989-1996)

II. LA POLITIQUE AUDIOVISUELLE EXTÉRIEURE

Dans le prolongement des orientations dessinées en 1994, le conseil pour l'audiovisuel extérieur de la France (CAEF) qui s'est réuni le 23 novembre 1995 a décidé d'ordonner l'intervention des différents opérateurs par la création de deux pôles, radiophonique d'une part, télévisuel de l'autre.

Si la constitution du pôle radiophonique autour de Radio France Internationale est aujourd'hui quasiment achevée, celle d'un pôle télévisuel extérieur, réunissant au sein d'une même société holding Canal France International et TV5-Europe, reste actuellement suspendue à une clarification de la politique Gouvernementale qui se fait attendre.

A. LA MODERNISATION DE RFI, CHEF DE FILE DU PÔLE RADIOPHONIQUE EXTÉRIEUR

1. La réorganisation de RFI privilégie l'information en continu

Nommé président-directeur-général de RFI le 1er décembre 1995, M. Jean-Paul Cluzel a entrepris de réformer en profondeur l'organisation de cette radio et le « format » de ses émissions.

La redéfinition des émissions de RFI tend à adapter l'offre de programmes aux évolutions géopolitiques et aux changements intervenus dans les habitudes d'écoute.

Depuis la libéralisation des régimes politiques à l'Est et au Sud, les radios internationales ont perdu une de leur vocation, qui était de faire connaître aux auditeurs des événements ou des faits qui pouvaient leur être dissimulés par des médias nationaux soumis à la censure. Aujourd'hui, les radios et les télévisions locales, qui assurent la couverture de tous les événements, retrouvent sur RFI et ses principales concurrentes, l'avantage de la proximité.

Par ailleurs, la réception directe par satellite des chaînes de télévision permet aux télévisions internationales d'être reçues dans de meilleures conditions techniques, et à moindre coût pour le diffuseur, que la radio en ondes courtes. De plus, l'émergence des télévisions comme organe d'information crédible a contribué à modifier les habitudes d'écoute radiophonique, qui privilégient désormais la radio le matin, mais aussi au cours des déplacements.

Pour conserver sa raison d'être, la radio internationale se doit donc d'évoluer, afin de coller davantage aux nouvelles habitudes d'écoute et d'apporter un « plus » par rapport aux médias nationaux et aux télévisions internationales, « plus » qui tient, selon son président, « dans le traitement en profondeur et la mise en perspective de l'actualité (...) on exige plus d'une radio internationale en matière d'exhaustivité, d'honnêteté, de diversité et d'explications que l'on n'exige des autres médias ».

Pour répondre aux objectifs ainsi définis, l'offre de RFI a été redéfinie. Lancée au début de l'automne, RFI 1, « chaîne d'actualité internationale, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 en français » est organisée autour de nouveaux concepts. La priorité est accordée à l'information : dix minutes d'information constamment renouvelée sont proposées toutes les demi-heures, des tranches « tout info » venant compléter ces bulletins le matin, à midi et le soir. Les nouveaux programmes de RFI 1 réservent une place plus importante que par le passé à la présentation de la société française, déclinée sous ses aspects les plus traditionnels comme les plus novateurs, l'accent étant mis plus particulièrement sur l'actualité des médias et des nouveaux moyens de communication. De nouveaux magazines réservant une place accrue à l'Afrique, terre d'élection de RFI, aux voyages et aux reportages de société, aux appels d'auditeurs dans le monde et présentant la complexité des phénomènes religieux ont par ailleurs été conçus.

Les émissions en langue étrangère, regroupées sous le générique de RFI 2, connaîtront progressivement les mêmes évolutions. Elles ne seront toutefois pas disponibles 24 heures sur 24 pour des raisons évidentes de coût budgétaire. Une attention toujours croissante sera réservée à la prise en compte des particularismes nationaux et des attentes des différents publics d'auditeurs.

La diffusion, depuis le 16 septembre dernier, d'un « fil musical » à destination des radios partenaires de RFI constitue la préfiguration d'un troisième service, « RFI 3 », proposant, aux côtés d'un programme musical, 900 heures de programmes enregistrées qui pourront être repris par les 700 radios avec lesquelles un accord a été signé.

RFI a poursuivi dans le même temps l'extension et la diversification de son réseau de diffusion. Cette politique se traduit par l'ouverture de nouveaux relais en modulation de fréquence (FM) en Afrique, mais aussi en Europe (Budapest, Moldavie), aux États-Unis (à Boston), ou en Amérique Latine. RFI est désormais diffusée sur le satellite ASTRA et devrait l'être sous peu dans le cadre du bouquet de radios de Canal satellite. À noter que RFI a ouvert le 15 octobre dernier un site sur Internet, disposant d'une version « audio », qui permet d'accéder, à la demande, aux journaux en écoute différée, et présente par ailleurs l'indéniable avantage d'améliorer la couverture de RFI en Amérique du Nord, en Australie ou en Nouvelle-Zélande.

Ces évolutions contribueront à n'en point douter, à améliorer encore l'audience de RFI à l'étranger.

Dans ce contexte, votre rapporteur se félicite que 60 millions de francs de mesures nouvelles aient pu être dégagées, en dépit de l'extrême rigueur budgétaire, au bénéfice de RFI. Il rappelle cependant que ces mesures nouvelles n'auront pas d'autre effet que de reconduire à leur niveau de 1996 les moyens affectés à cette radio puisqu'elles visent à compenser le prélèvement opéré l'an passé sur le fonds de roulement de cette société.

2. La constitution en bonne voie du pôle radiophonique extérieur

La constitution du pôle radiophonique extérieur repose sur la reprise par RFI de certaines radios du groupe SOFIRAD (radio Paris Lisbonne et la SOMERA) et l'établissement de synergies avec Radio France.

RFI a repris le 1er juillet dernier, pour un franc symbolique, les parts de Radio Paris Lisbonne précédemment détenues par France Europe FM, filiale à 100 % de la SOFIRAD.

Les négociations portant sur les modalités de rachat de la SOMERA (radio Monte-Carlo-Moyen-Orient) par RFI sont aujourd'hui très engagées. Cette radio de grande qualité, qui diffuse en ondes moyennes un programme en arabe et en français, traverse aujourd'hui de grandes difficultés financières.

Le rattachement de la SOMERA, dont l'autonomie et la nationalité monégasque seraient préservées, à RFI conduira à orienter prioritairement les émissions en langue arabe de RFI vers le Maghreb, en laissant à la SOMERA la couverture du Maghreb et du Moyen-Orient. Une coordination étroite devra donc être réalisée entre les deux rédactions arabes, afin d'assurer l'unité de la ligne éditoriale, et mettre en commun leur réseau de correspondants.

RFI et Radio-France ont par ailleurs signé en janvier 1996 un protocole d'accord prévoyant des échanges de programmes, sous la forme d'une reprise, par Radio-France, d'une émission de RFI. Par ailleurs RFI a proposé à Radio-France d'incorporer certains des programmes de Radio-France (notamment Hector et France Culture Europe) dans sa future banque de programme internationale.

B. LA CONSTITUTION DE TÉLÉVISION FRANCE INTERNATIONALE : UNE CLARIFICATION NÉCESSAIRE

1. Des hésitations retardent la constitution du pôle télévisuel extérieur

Après que le ministre de la culture a annoncé cet été à l'université d'Hourtin que France Télévision serait « le pivot » du remaniement de l'audiovisuel extérieur et qu'elle détiendrait « la majorité de la holding contrôlant TV5 et Canal France International (CFI) », des rumeurs insistantes laissent entendre que la préférence du Premier ministre irait à la constitution d'une société au sein de laquelle l'État serait majoritaire et dont la présidence pourrait être confiée à M. Jean-Claude Cluzel, président-directeur général de Radio France Internationale.

La querelle entre les tenants de la « logique des métiers » -qui a prévalu au dernier CAEF- et les partisans de la création d'une « BBC à la française » (réalisant la fusion en un pôle unique des activités radiophoniques et télévisuelles) ne semble donc pas définitivement tranchée. Reste aussi à préciser le rôle que jouera France Télévision au sein du futur pôle télévisuel : les uns font valoir qu'une participation majoritaire des chaînes publiques au capital de la nouvelle société serait de nature à faciliter l'accès de Canal France International aux programmes ; les autres soutiennent que l'État ne peut rester minoritaire au sein d'une société chargée de véhiculer « l'image et la voix de la France » à l'étranger.

Quelle que soit la solution qui sera appelée à prévaloir, il importe qu'une décision soit prise dans les plus brefs délais. Les atermoiements qui caractérisent aujourd'hui la conduite de la politique audiovisuelle extérieure, et que ne contribue pas à simplifier la multiplicité des interlocuteurs ministériels compétents, ont des conséquences regrettables sur l'action des deux principaux opérateurs télévisuels que sont CFI et TV5.

2. Un climat peu propice à l'action des deux principaux opérateurs

a) Rappel : présentation de TV5 et de CFI


• Créée en janvier 1984, TV5 Europe, télévision francophone par satellite, regroupe un ensemble de chaînes nationales francophones, françaises (TF1, France 2 et France 3), suisse (SSR) et belge (RTBF). En 1986, TV5 s'est élargie au consortium de télévision Québec-Canada (CTQC) devenue chaîne francophone, sous le nom de TV5 Québec-Canada, et diffusée depuis 1988 en Amérique du Nord.

TV5 Europe et TV5 Québec-Canada, bien qu'autonomes, fonctionnent selon un principe commun et sont financées par les chaînes et les Gouvernements.

Le programme de TV5 est constitué d'une sélection d'émissions déjà diffusées par les partenaires de la chaîne, parmi lesquelles leurs journaux télévisés qui sont retransmis en léger différé. Il est complété par des émissions acquises notamment auprès de TF1 et par des films. Les accords passés en 1994 par TV5 avec UGC d'une part, l'USPA de l'autre, permettent désormais à la chaîne de programmer davantage de films et d'émissions de fiction ce qui renforce considérablement son attractivité. TV5 assure également la production de magazines et d'émissions d'information qui représentent désormais près de 15 % de son temps d'antenne. La grille de programmes inclut enfin des émissions didactiques d'apprentissage du français.

L'année 1996 a été marquée, pour TV5, par l'accélération du développement de la chaîne en Amérique latine, où elle est diffusée maintenant 24h sur 24, avec une nouvelle grille adaptée aux différents horaires, des émissions sous-titrées en espagnol, et une promotion des programmes en espagnol.

En Asie, TV5 est disponible en compression numérique, depuis mai 1996, sur Asiasat 2 qui accueille un bouquet de chaînes européennes, composé, outre de TV5, de la chaîne musicale française MCM Internationale, de la Deutsche Welle (Allemagne), de TVE International (Espagne), de la RAI International (Italie), ainsi que de stations de radio.

La couverture mondiale de TV5 est désormais assurée, grâce à sa présence sur six satellites.

En 1996, TV5 aura bénéficié d'une subvention budgétaire de 186,5 millions de francs (dont 173 millions de francs correspondant à la dotation du ministère des Affaires étrangères et 13,5 millions de francs à celle du ministère de la coopération) correspondant à 67 % du budget de cette chaîne, au financement de laquelle les partenaires étrangers de la France contribuent à hauteur de 15,6 %.


• Créée en 1989 à l'initiative du ministère de la coopération, la banque de programmes audiovisuels Canal France International répondait à l'origine au souci de moderniser la coopération culturelle internationale. Il s'agissait en effet de substituer la fourniture de programmes diffusés par satellite à l'envoi traditionnel d'émissions enregistrées sur cassettes vidéo aux pays situés dans le champ de la coopération.

Très vite, le concept de la banque d'images a rencontré un large succès, tant auprès des pays destinataires auxquels elle permettait d'accéder à des programmes plus récents, qu'auprès du ministère des Affaires étrangères.

En sa qualité de banque d'images, CFI met à la disposition des télévisions des pays ayant signé un accord de coopération avec la France des programmes libres de droits qui peuvent être repris sur les réseaux nationaux.

Ces programmes sont constitués, pour les deux tiers, de reprises des chaînes françaises. Ils sont complétés de films ou de fictions produits par les télévisions partenaires, et notamment celles d'Afrique avec lesquelles ont été passés plusieurs accords de production. La banque d'images reprend également en direct, chaque fois qu'elle en obtient les droits, les événements culturels et sportifs. Elle a ainsi retransmis les jeux olympiques d'Atlanta, durant neuf heures quotidiennes sur l'Afrique.

Canal France International a connu un développement extrêmement rapide : alors qu'elle relayait quotidiennement 4 heures de programmes à destination de l'Afrique francophone à la fin de l'année 1989, elle diffuse aujourd'hui, 24 heures sur 24, 30.000 heures de programmes par an sur tous les continents grâce à un réseau de cinq canaux satellitaires.

En tant que banque de programmes, elle a conclu des accords avec plus de 45 chaînes de télévision étrangères. En échange de l'engagement de reprendre sur leur antenne un certain volume de programmes, ces accords prévoient la fourniture aux chaînes partenaires de matériels de réception, d'enregistrement, et le cas échéant, de sous-titrage. Ces accords peuvent, dans certains cas, servir de fondement à une coopération plus poussée : un programme d'aide à la formation a été défini au bénéfice de journalistes cambodgiens et vietnamiens pour la production d'un journal et d'un magazine en langue française.

Force est cependant de constater que Canal France International est parfois sortie du cadre étroit de banque de programmes qui lui a été assigné lors de sa création. Conséquence d'un recours accru aux satellites et de l'absence de cryptage des émissions, ses programmes sont souvent captés directement par les téléspectateurs.

Le budget de Canal France International a connu une croissance proportionnelle à l'accroissement de ses activités : il est passé de 54,6 millions de francs en 1989 à 182,3 millions de francs en 1996. Dans ce total, la subvention du ministère des Affaires étrangères s'établit à 123,1 millions de francs et celle du ministère de la coopération à 52,4 millions de francs.

Il est particulièrement regrettable pour le fonctionnement de cette entreprise qu'au 22 octobre 1996, date à laquelle votre rapporteur a reçu son président, 40 % de la subvention inscrite en loi de finances, ne lui avait toujours pas été attribuée, les premiers crédits ayant été versés par le ministère de la coopération, après une intervention des responsables, à la fin du mois de septembre.

Il n'est pas admissible qu'en plus des effets de la régulation budgétaire, l'État reporte sur des entreprises soumises aux lois du marché ses problèmes de trésorerie.

b) Un impératif : accroître la complémentarité des deux chaînes

Les derniers CAEF ont réaffirmé la spécificité des deux principaux opérateurs : la vocation de CFI est d'être une banque de programmes libres de droit et de véhiculer l'image de la France dans le monde, en recourant éventuellement aux langues étrangères pour accroître sa pénétration ; TV5, télévision multilatérale francophone, doit assurer la présence de la langue française dans le monde.

Si cette répartition des tâches paraît séduisante sur le papier, ces deux chaînes apparaissent encore trop souvent concurrentes sur le terrain. L'on peut espérer que leur installation commune dans les locaux de la rue Cognac-Jay et l'entente de leurs deux présidents contribueront à faire progresser le dossier de la complémentarité.

Il est intéressant d'observer qu'un projet commun pour l'audiovisuel extérieur a été élaboré par les deux chaînes et soumis aux autorités de tutelle.

c) Adapter l'offre de programme aux différents publics

Après avoir visé à étendre la couverture géographique et à accroître l'offre quantitative de programmes, les efforts doivent désormais converger, en matière télévisuelle, et conformément aux décisions arrêtées lors des derniers CAEF, vers l'adaptation de l'offre de programmes aux attentes des différents publics.

La régionalisation des programmes de Canal France International, qui distingue désormais cinq grilles de programmes, et les décrochages spécifiques de TV5 Europe sur l'Afrique et prochainement sur l'Asie constituent un début de réponse encourageant.

Cet effort sera poursuivi l'an prochain, grâce notamment au dédoublement du signal émis par TV5 sur l'Europe, afin de distinguer une programmation destinée aux pays francophones d'une offre télévisuelle conçue pour les pays non francophones, ou encore par le lancement par CFI d'une chaîne s'adressant aux populations arabophones du Moyen-Orient.

La diversification de l'offre de programmes, rendue possible par la participation de la France aux bouquets satellitaires, concourt à la réalisation du même objectif. Cet effort se traduira en 1997 par la constitution d'un bouquet de chaînes francophones destiné à l'Afrique autour de MCMI.

Des progrès importants restent à accomplir dans le domaine de l'information télévisée. La France ne pourra continuer longtemps de se satisfaire de la diffusion en léger différé de ses journaux télévisés, dont la vision par trop hexagonale peut parfois fournir une image désastreuse de la France à l'étranger. Il importe qu'un journal télévisé présentant une information mondiale « vue de Paris » puisse être conçu rapidement.

3. Des efforts qui devront être réalisés à ressources budgétaires constantes

L'étalement sur une année supplémentaire de l'exécution du plan quinquennal (1994-1998) pour l'audiovisuel extérieur et l'affectation à Radio France Internationale de l'intégralité des mesures nouvelles (60 millions de francs) ouvertes par le projet de loi de finances dans ce secteur auront pour conséquence la simple reconduction en 1997 des subventions versées en 1996 aux autres opérateurs.

Il en résulte que la poursuite des efforts engagés dans le prolongement des décisions arrêtées par les derniers CAEF s'effectuera, au mieux, à ressources budgétaires constantes.

Dans ces conditions, votre rapporteur attire tout particulièrement l'attention du Gouvernement sur la nécessité absolue de préserver intégralement l'enveloppe budgétaire affectée à la conduite de la politique audiovisuelle extérieure en cours de gestion. Il importe, en effet, que ces crédits puissent être « sanctuarisés » durant l'exercice 1997.

III. L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER

Depuis le 1er janvier 1991, les moyens affectés par l'État à cette action 1 ( * ) sont centralisés au sein de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), établissement public national créé par la loi n° 90-588 du 6 juillet 1990.

L'Agence fédère plusieurs types d'établissements d'enseignement français à l'étranger : d'une part, les établissements gérés directement et relevant de la tutelle du ministère des Affaires étrangères ou de la coopération (68 établissements) ; d'autre part, des établissements privés de droit local, associés au service public de scolarisation des enfants français à l'étranger, qui sont liés à l'Agence par une convention (soit 219 établissements répartis dans 125 pays).

Au cours de l'année scolaire 1995-1996, le réseau des établissements français à l'étranger a scolarisé 155.636 élèves, parmi lesquels 62.174 jeunes Français, 72.033 élèves ressortissants des pays d'accueil des établissements et 21.429 enfants originaires de pays-tiers.

A. LA CONSOLIDATION DES MOYENS BUDGÉTAIRES AFFECTÉS À L'AGENCE POUR L'ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L'ÉTRANGER

Dans un contexte de forte rigueur budgétaire, la préservation des ressources budgétaires affectées à l'enseignement français à l'étranger constitue un réel motif de satisfaction.

Epargnée par la régulation budgétaire en 1996, l'Agence bénéficiera en 1997 d'un accroissement de 1,8 % de la subvention budgétaire qui lui est accordée par le ministère des Affaires étrangères (1,442 million de francs), celle qui lui est allouée par le ministère de la coopération étant reconduite à 368 millions de francs.

La centralisation des moyens affectés par l'État à cette action sur le budget de l'Agence, qui a rendu cet effort plus visible et l'amputation des crédits correspondants politiquement plus délicate, a très certainement contribué à cette préservation.

L'on doit particulièrement s'en féliciter dans la mesure où le budget de l'Agence est consacré presque exclusivement à la rémunération des personnels enseignants (85 %) et au service de bourses de scolarité aux enfants français scolarisés dans ce réseau (8 %). L'Agence ne dispose en revanche toujours pas des moyens budgétaires nécessaires pour assurer son propre fonctionnement, qui continue de l'être, pour l'essentiel, par des agents mis à disposition par d'autres administrations (c'est le cas de 52 des 90 agents que comptent ses services centraux).

Après avoir été sensiblement revalorisée en 1995 (+ 50 millions de francs), l'enveloppe consacrée au service des bourses scolaires a été reconduite à 185 millions de francs en 1996. Elle devrait l'être à nouveau en 1997, la progression de 1,8 % de la subvention du ministère des Affaires étrangères, qui correspond en réalité à la reconstitution de la base budgétaire de l'Agence consécutive à un prélèvement effectué par l'administration sur son fonds de roulement, devant toutefois permettre de consolider l'effort consenti en ce domaine.

Il est à cet égard particulièrement satisfaisant de constater que l'accroissement des crédits correspondants en 1995, et qui s'est accompagné d'une réforme des modalités d'attribution des bourses destinée à mieux prendre en considération la diversité des situations familiales et locales, a eu une incidence directe sur les effectifs de jeunes Français scolarisés dans le réseau de l'Agence.

À la rentrée scolaire de 1995-1996, la progression des effectifs d'élèves scolarisés dans ces établissements a été presque exclusivement le fait de l'inscription de nouveaux élèves français (2.969 sur 3.671).

Comme l'a toujours souligné votre commission, il importe en effet qu'aucun enfant de nos compatriotes expatriés ne soit exclu, pour des raisons financières, de l'enseignement français à l'étranger. L'on doit en ce sens se féliciter que le nouveau barème d'attribution des bourses permette désormais d'assurer la gratuité de la fréquentation de ces établissements pour les enfants dont les familles disposent de revenus insuffisants.

On rappellera qu'à la différence de l'enseignement public délivré dans l'hexagone, le coût de l'enseignement français à l'étranger est supporté pour moitié par les parents d'élèves.

Or, contrairement aux engagements pris lors de la création de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, les frais de scolarité réclamés aux parents d'élèves français ont continué de croître à un rythme bien supérieur à la progression de l'inflation locale constatée. La réforme des modalités de rémunération des personnels enseignants qui a accompagné la création de l'Agence n'est d'ailleurs pas étrangère à cette évolution.

B. LES RIGIDITÉS ISSUES DE LA RÉFORME DES MODALITÉS DE RECR UTEMENT ET DE RÉMUNÉRATION DES ENSEIGNANTS

Pour mettre un terme aux disparités de rémunérations servies aux enseignants titulaires de l'éducation nationale en poste à l'étranger, le décret du 31 mai 1990 pose le principe de la « prise en charge » par l'État du traitement versé à l'ensemble des titulaires, qu'ils soient recrutés hors du pays d'affectation (« expatriés » 2 ( * ) ) ou dans celui-ci (« résidents »). Dans les faits, cette prise en charge reste toutefois partiellement fictive puisque les établissements scolaires reversent à l'Agence les sommes qu'ils affectaient jusqu'alors à la rétribution des enseignants résidents.

La réforme des modalités de rémunération des enseignants titulaires, qui visait à garantir aux personnels « résidents » le versement d'un salaire au moins équivalent au traitement indiciaire qu'ils percevraient en France, s'est accompagnée d'une centralisation du recrutement de cette catégorie d'enseignants.

L'affectation des enseignants titulaires de l'éducation nationale, qu'ils soient expatriés ou résidents, est désormais décidée par l'Agence, en fonction des vacances de postes ou des supports budgétaires nouvellement disponibles sur ses cadres d'emplois.

Or, le tableau des emplois correspondants est resté stable depuis la création de l'Agence en 1991, ce qui condamne cet établissement public à tenter de faire face aux besoins nouveaux à effectifs constants.

Cette situation se trouve aggravée par l'incapacité dans laquelle sont désormais juridiquement placés les établissements de recruter, fût-ce à coût nul pour l'Agence, des enseignants titulaires de l'éducation nationale dont ils assumeraient la rémunération.

Le ministère des finances continue en effet de s'opposer à la signature de conventions de coopération éducative qui permettraient à certains établissements de recruter, en France et à leurs frais, des personnels titulaires de l'éducation nationale bénéficiant d'un détachement administratif.

Dans ces conditions, les établissements scolaires qui n'ont pu bénéficier de l'affectation d'un nombre suffisant d'enseignants expatriés ou résidents sur les cadres d'emplois de l'Agence, sont contraints de se tourner, pour satisfaire leurs besoins, vers le recrutement de titulaires de l'éducation nationale acceptant (moyennant une contrepartie financière qui contribue à accroître la dérive des coûts de scolarité) de se mettre en disponibilité ou, de façon plus préoccupante, vers le recrutement local de personnels non titulaires.

Si elle devait se poursuivre, cette évolution nuirait inévitablement à la qualité de l'enseignement dispensé dans ces établissements.

Dans ce contexte, la souplesse introduite par les quelques 420 volontaires du service national exerçant dans le réseau des établissements scolaires à l'étranger est essentielle. Votre rapporteur souhaite que cette contribution généralement très appréciée en raison de la jeunesse, du dynamisme et des compétences des intéressés ne soit pas remise en cause lors de la définition des modalités d'exercice du nouveau service civil.

C. LE REDÉPLOIEMENT DE LA CARTE SCOLAIRE EST ENGAGÉ MAIS RESTE LIMITÉ

L'on attendait de la centralisation des moyens affectés à l'enseignement français à l'étranger au sein de l'Agence qu'elle favorise un redéploiement de la carte des établissements vers les zones géographiques prioritaires.

Six ans après la création de l'Agence, cette réaffectation des moyens est engagée mais reste relativement limitée.

Outre les difficultés réelles de revenir sur les acquis sans froisser les autorités politiques du pays d'accueil, deux phénomènes se conjuguent pour ralentir cette évolution.


• La première tient au « schéma d'adaptation des effectifs » imposé à l'Agence par le ministère du budget et qui prévoit la transformation sur cinq ans d'un certain nombre de postes « d'expatriés » en postes de « résidents », moins coûteux pour les finances publiques. En 1995 et en 1996, cette substitution a porté sur 120 emplois ; elle sera poursuivie en 1997 par la suppression de 34 postes supplémentaires d'expatriés.

Ainsi, si, entre la rentrée de 1994 et celle de 1996, 151 postes d'expatriés ont été supprimés (29 en Afrique, 40 en Europe occidentale, 57 au Maghreb, 25 en Amérique latine), ils ont été au moins partiellement compensés par la création de postes de résidents (27 en Afrique, 53 en Europe occidentale, 45 au Maghreb, 10 en Amérique latine). Au total, seules les régions de l'Asie et de l'Océanie (+ 19 postes), d'une part, du Moyen-Orient (+ 11 postes) de l'autre auront bénéficié de créations de postes de résidents sans avoir subi de déflation d'expatriés.


• Le second résulte de la faiblesse des crédits d'investissement dont bénéficie l'Agence pour faire face à des besoins nouveaux.

Pour la satisfaction des besoins immobiliers recensés par les 219 établissements conventionnés 3 ( * ) , l'Agence a bénéficié, en tout et pour tout, d'une subvention de 17,7 millions de francs en 1995 et de 23,7 millions de francs en 1996. Cet effort, qui est notoirement insuffisant pour faire face aux gros travaux de restauration ou pour permettre d'engager les travaux destinés à assurer la conformité des établissements anciens aux normes de sécurité, ne permet pas, de toute évidence, à l'Agence d'apporter son soutien à toutes les demandes de création formulées.

L'Agence s'est néanmoins engagée dans un processus de redéploiement géographique des moyens de l'enseignement français à l'étranger, prenant appui sur les principes suivants. Les établissements dans lesquels seule une très faible proportion d'élèves français est scolarisée 4 ( * ) , ne pourront plus, dans le contexte budgétaire actuel, compter sur le soutien indéfectible de l'Agence. La réorientation des moyens doit bénéficier prioritairement aux pays de l'Union européenne et aux pays d'Europe centrale et orientale qui ont vocation à y adhérer, aux zones géographiques dans lesquelles doit être assuré le maintien d'une présence francophone (Liban, par exemple), aux pays dans lesquels s'installent les entreprises françaises (Asie du Sud-est, Chine, Afrique du Sud).

Le tableau ci-après retrace cette évolution qui reste encore relativement limitée.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une réunion tenue le mercredi 20 novembre 1996 sous la présidence de M. Adrien Gouteyron, président, la commission a examiné, sur le rapport de M. James Bordas, rapporteur pour avis, les crédits des relations culturelles, scientifiques et techniques inscrits au projet de loi de finances pour 1997.

À l'issue de sa présentation, le rapporteur pour avis a précisé, à l'intention de M. Franck Sérusclat qui l'interrogeait sur la nature des relations techniques entretenues par le ministère des Affaires étrangères, que la direction générale des relations culturelles, scientifiques et techniques accordait son soutien aux opérations de coopération scientifique et technique mises en oeuvre dans les pays situés hors du champ de compétence du ministère de la coopération, dans les domaines dans lesquels la France peut se prévaloir d'une compétence ou d'un savoir-faire particulier (archéologie, environnement, santé publique, formation, ...).

Suivant les propositions de son rapporteur, la commission a alors décidé de donner un avis favorable à l'adoption des crédits des relations culturelles, scientifiques et techniques inscrits au projet de loi de finances pour 1997.

* 1 À l'exception des moyens affectés à l'enseignement français en Algérie qui continuent de relever de l'office universitaire et culturel français en Algérie (OUCFA).

* 2 Les personnels « expatriés », anciens « détachés au barème » étaient déjà rémunérés par l'État, à la différence des personnels « résidents ».

* 3 Les crédits d'investissement bénéficiant aux établissements en gestion directe continuent de relever directement du budget de l'État.

* 4 La moyenne est de 40 % d'élèves français sur le réseau.

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