III. LES PARCS NATIONAUX

A. ASPECTS GÉNÉRAUX

Les parcs nationaux trouvent leur origine dans une loi du 22 juillet 1960 qui définit leurs objectifs :

- protéger le patrimoine naturel ;

- mettre à la disposition de tous, et plus particulièrement des citadins, les richesses ainsi préservées ;

- contribuer au développement économique, social et culturel des territoires où ils sont implantés.

Il en existe sept actuellement :

- le parc national de la Vanoise créé en 1963 (superficie : 52.839 hectares en zone parc, 145.000 hectares en zone périphérique) ;

- le parc national de Port-Cros créé en 1963 (superficie : 694 hectares de zones terrestres, 1.800 hectares de superficie marine) ;

- le parc national des Pyrénées créé en 1967 (superficie : 47.600 hectares en zone parc, 206.000 hectares en zone périphérique) ;

- le parc national des Cévennes créé en 1970 (superficie : 91.416 hectares en zone parc, 228.000 hectares en zone périphérique) ;

- le parc national des Écrins créé en 1973 (superficie : 91.800 hectares en zone parc, 178.000 hectares en zone périphérique) ;

- le parc national du Mercantour créé en 1979 (superficie : 68.500 hectares en zone parc, 140.000 hectares en zone périphérique) ;

- le parc national de la Guadeloupe créé en 1989 (superficie : 16.500 hectares en zone parc, 800 hectares en zone périphérique).

La superficie totale des 7 parcs nationaux est de 369.349 hectares en zone centrale.

La distinction des zones centrales et des zones périphériques correspond au double objectif de protection et de contribution au développement économique, social et culturel, assuré dans les parcs nationaux d'une façon très différente de celle des parcs naturels régionaux. Si ces derniers reposent comme on l'a vu sur le volontariat et le pragmatisme des parties prenantes, les parcs nationaux, institutions de l'État, apparaissent, selon l'expression fort significative employée par un interlocuteur de votre rapporteur, comme des produits de la culture forestière, créés à l'image de l'Office national des forêts, à la différence près qu'ils ne sont pas propriétaires de leur territoire.

B. L'ACTION DES PARCS

Le législateur, afin de concilier la protection des espaces naturels et le maintien des populations rurales, a prévu une zone centrale de protection, le parc proprement dit, destinée à préserver la faune et la flore contre toute dégradation naturelle et à les soustraire aux interventions artificielles susceptibles d'en altérer l'aspect, la composition et l'évolution. Autour du parc, dans une zone périphérique, doit être mise en oeuvre une politique d'aide au maintien des populations rurales dans les milieux fragiles, notamment en montagne, grâce à un tourisme non industriel, préservant le caractère des régions concernées. Une protection graduelle doit favoriser la transition avec le milieu naturel.

1. Les zones centrales

La politique des parcs nationaux a eu de nombreux effets positifs dans les zones centrales. Les projets d'aménagement de stations de sports d'hiver en zone centrale ont été en général écartés encore que des solutions restent à trouver, notamment dans les Pyrénées, pour de nouvelles pratiques de sport en montagne. Des espèces animales menacées ont été sauvegardées, et se sont multipliées tels les chamois, les bouquetins, les aigles royaux dans les parcs alpins, les isards dans les Pyrénées et les vautours dans les Cévennes. Le seul insuccès relatif a concerné les ours des Pyrénées.

Les parcs ont amélioré leurs structures d'accueil : sentiers balisés, construction de refuges, aides à la réalisation de gîtes ruraux accordés au paysage et procurant des emplois aux populations locales ont contribué à augmenter le nombre annuel des visiteurs.

Enfin, les parcs ont développé une politique de communication au moyen de centres d'information, d'activités de plein air organisées par les gardes-moniteurs, de diffusion de guides, itinéraires, publications diverses, objets souvenirs, etc.

Telles sont les actions lancées par les parcs, et leurs réussites. Leur principale difficulté, inhérente à la mission définie par les textes fondateurs, est de protéger la nature tout en favorisant le développement de la zone périphérique. Dans les parcs de montagne, la conservation des alpages passe par le maintien des bergers, soumis par ailleurs à des normes européennes strictes. Les professionnels souhaitent exercer leur activité dans des conditions de vie relativement confortables. Cela suscite des demandes de travaux de génie civil difficilement conciliables avec une protection totale de la nature.

Votre rapporteur croit utile de relater, à titre d'illustration, l'expérience particulière de réponse à ces problèmes dont il a pris connaissance au cours d'une visite effectuée au parc de Port-Cros dans le cadre de la préparation du présent rapport.

Le développement local dans le parc national de Port-Cros

Le développement local tient une large place dans les préoccupations du parc national de Port-Cros. Peuvent être cités à titre d'exemples :

- les activités agricoles dont le parc a impulsé et encouragé l'essor. Celles-ci occupent aujourd'hui, avec trois domaines qui produisent un vin dont la qualité devrait bientôt être consacrée par une appellation particulière, près de 150 hectares dont une centaine est louée, par bail emphytéotique, par le parc national.

Le parc national s'emploie depuis plusieurs années à concrétiser ce projet qui augmentera le chiffre d'affaires des exploitants et leur permettra d'étoffer ainsi leur personnel, notamment en commerciaux (5 à 6 emplois) :

- cette activité, qui n'aurait très probablement pas pu naître ou se développer sans le parc en raison de la pression foncière dans les îles de Méditerranée, est à l'origine de la création, dans le secteur privé, de plus de vingt emplois directs (ouvriers agricoles, cavistes, commerciaux, chefs de chais) sans compter les emplois induits ;

- les activités de découverte du monde sous-marin qui concernent aujourd'hui près de 20 clubs professionnels de plongée pour l'île de Port-Cros, s'appuient sur la protection de la zone marine du parc national qui constitue l'une des originalités de l'établissement public. Cette vingtaine d'établissements d'activités sub-aquatiques de loisirs (plongée sous-marine) sont signataires d'une charte de plongée avec le parc, et emploient chacun, en moyenne, trois employés ou moniteurs.

Ces entreprises commercialisent au total près de 12.000 plongées par an, dont 70% dans l'îlot de la Gabinière considéré par les professionnels comme l'un des 100 plus belles plongées du monde. Ces lieux de plongée perdraient une grande partie de leur attractivité s'ils n'étaient pas protégés efficacement par les équipes du parc ;

- les activités de découverte vélocipédique sur l'île de Porquerolles où le parc national a aménagé et entretient plus de 50 kilomètres de pistes sur lesquelles la circulation automobile est strictement réglementée. Cette politique a permis le développement de douze entreprises artisanales de location de vélos (1.500 vélos au total) qui emploient douze personnes en permanence et trente saisonniers supplémentaires en été ;

- il faut enfin citer les hôtels et restaurants des îles, dont l'activité est directement liée aux caractéristiques biologiques et paysagères des îles, avec lesquels le parc national de Port-Cros souhaite développer des actions de partenariat dans le domaine de l'information et de la sensibilisation du public.

La seconde difficulté importante provient du succès touristique des parcs, qui reçoivent plus de 5 millions de visiteurs par an. Une telle pression humaine sur des territoires relativement restreints entraîne la nécessité de gérer les flux touristiques.

Là encore, il est intéressant de retenir le cas du parc de Port-Cros à titre d'illustration des difficultés rencontrées.

La fréquentation touristique dans le parc naturel de Port-Cros

* Dans l'île de Port-Cros

La tendance générale pour 1995 est à une baisse de volume global de la fréquentation et à un étalement de la période de fréquentation maximale qui s'étend désormais du 25 avril au 15 octobre.

En 1995, la fréquentation pouvait être estimée à un total de 200.000 personnes se décomposant ainsi :

- 100.000 passagers transportés par les compagnies de transports ;

- 90.000 personnes environ recensées dans les bateaux mouillant tout autour de l'île et fréquentant les rades aménagées ou non ;

- 10.000 résidents permanents et secondaires (en journées cumulées) à l'année.

* Dans l'île de Porquerolles

La fréquentation annuelle de l'île de Porquerolles peut être estimée à 1.002.246 personnes, chiffre considérable sur un territoire de 12 km".

Si les mois d'hiver montrent une activité relativement faible alimentée principalement par les randonneurs, la reprise de la fréquentation a tendance progressivement à s'accroître dès Pâques, et les longs week-ends du mois de mai marquent le départ de la saison.

L'été 1995, la fréquentation du domaine a atteint le chiffre record de 239.105 personnes pour les quatre mois (juin, juillet, août, septembre). Au cours du mois d'août la fréquentation a été de 1.414 personnes par jour.

Les enquêtes de fréquentation réalisées sur les deux îles montrent le souci des usagers d'être accueillis dans de meilleures conditions d'information et d'hygiène.

Il est indispensable et techniquement possible, estime la direction du parc, d'organiser la fréquentation pour autant qu'elle reste dans les limites actuelles, de manière à limiter ses effets négatifs sur les paysages et le milieu naturel. Cette fréquentation entraîne au demeurant des charges accrues pour le parc, notamment en ce qui concerne le ramassage des déchets et la restauration des espaces dégradés dont les effets cumulatifs se voient plus particulièrement aujourd'hui. Elle exige de plus une surveillance renforcée.

Ces problèmes de fréquentation sont aussi sensibles sur la mer où des conflits d'usagers, notamment entre pêcheurs professionnels, plaisanciers et plongeurs, se manifestent autour des deux îles. A l'avenir, la mise en place d'un zonage individualisant des territoires propres à chaque type d'activités, sera sans doute nécessaire.

La mise en place de la taxe sur les passagers maritimes prévue par la loi du 2 février 1995 devrait donner au parc des moyens supplémentaires pour assurer ces tâches.

En 1997, une étude juridique sera réalisée pour mieux préciser les conditions dans lesquelles la circulation des vélos tout-terrain pourra être maîtrisée et organisée.

2. Les zones périphériques

Les zones périphériques des parcs nationaux sont des zones habitées jouant un rôle tampon entre les zones centrales, soumises à une réglementation très stricte, et le reste du territoire. Ces zones périphériques ne sont soumises à aucune contrainte réglementaire particulière, bien qu'elles disposent sur leurs territoires de milieux biologiques de grande qualité.

La loi de 1960 avait prévu, en ce qui les concerne, l'obligation pour les diverses administrations publiques de prendre « suivant un programme défini en liaison avec l'organisme de gestion du parc... toutes mesures pour permettre un ensemble de réalisations et d'améliorations d'ordre social, économique et culturel tout en rendant plus efficace la protection de la nature dans le parc ». En fait, il n'existe aucune politique globale d'intervention et la situation actuelle se caractérise plutôt par la dispersion des efforts, comme plusieurs rapports administratifs l'ont relevé ces dernières années.

Les moyens d'agir ne font pourtant pas totalement défaut : le ministère de l'environnement met chaque année à la disposition de l'ensemble des zones périphériques une quinzaine de millions de francs dont la majeure partie est contractualisée dans les contrats de plan État-région. Ces crédits servent à des actions très diverses comme par exemple :

- la réhabilitation du petit patrimoine rural : fontaines, chapelles, moulins, financement des surcoûts, réhabilitation de hameaux auxquels sont imposés des prescriptions architecturales ;

- des actions de communication-pédagogie : centres d'information, expositions, équipements vidéo ;

- la gestion et l'entretien de l'espace montagnard : améliorations pastorales ;

- l'aménagement de grands sites (Pré de Mme Carie, Pont d'Espagne, Gavarnie).

A la suite d'une mission confiée récemment au préfet Hélène Blanc, des propositions tendant, d'une part, à renforcer le rôle de coordination des préfets concernés et, d'autre part, à la mise en place par les parcs de programmes d'actions concertées avec les acteurs intéressés en privilégiant les démarches contractuelles, sont étudiées par le ministère de l'environnement.

Il semble que les chances d'une relance de la politique des parcs nationaux, qui se dessine actuellement, comme on va le voir, avec le projet de créer plusieurs nouveaux parcs, soient liées à la réussite d'une démarche plus dynamique, et contractuelle, dans les zones périphériques.

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