II. LES AIDES DIRECTES

A. DES ATERMOIEMENTS REGRETTABLES AU NIVEAU EUROPÉEN

La mise en oeuvre de l'accord conclu le 21 décembre 1994, dans le cadre de l'OCDE entre l'Union européenne et les principaux États concernés par la construction navale a été à nouveau repoussée.

Cet accord, rappelons-le, instaure des règles strictes pour l'octroi d'aides dans la construction navale et devait constituer une étape vers l'harmonisation des conditions de la concurrence internationale dans ce secteur. Le congrès américain opposant, avec l'amendement « Bateman » en juin 1996, des obstacles à sa ratification, l'accord -dont l'entrée en vigueur est subordonnée à la ratification de l'ensemble des parties- semble fragilisé.

L'Union européenne a, pour sa part, décidé, au début de 1996, de maintenir en vigueur, jusqu'à la date d'applicabilité de l'accord, sa réglementation actuelle en matière d'aides à la construction navale (VII e Directive) permettant une subvention étatique à hauteur de 9 % du coût de la construction pour les gros navires.

Enfin, le 20 septembre 1996, elle a décidé de prolonger le régime européen d'aides Publiques (aux armateurs, à la production, à la restructuration et à la recherche) jusqu'au 31 décembre 1997.

Votre commission renouvelle les mises en garde qu'elle a énoncées s'agissant de l'application non réciproque d'un tel accord au profit de concurrents aussi redoutables que la Corée, le Japon ou les États-Unis. L'accord OCDE ne doit pas être un marché de dupes.

Quelques chiffres permettent de mesurer le risque encouru par les constructeurs européens.

Ainsi, alors qu'en 1970 les navires battant pavillon d'un État membre de l'Union européenne représentaient 32 % de la flotte mondiale, ils n'en représentent plus que 14 % en 1996. Depuis 1976, 200.000 emplois ont été perdus dans le secteur de la construction navale en Europe. En France, les effectifs qui atteignaient 35.000 salariés en 1975 sont tombés à 6.000 aujourd'hui. Quant à la Corée du Sud, elle a vu l'effectif de ses chantiers navals passer de 36.000 à 45.000 employés en quatre ans.

Votre commission accueille donc avec soulagement le maintien de l'aide directe de l'État à la construction navale.

B. LA POURSUITE DES AIDES

S'agissant des mesures prises par les pouvoirs publics en vue de conforter la situation du pavillon, il convient de noter la prolongation du plan pluriannuel 1990-1996 qui avait entraîné un ralentissement sensible du dépavillonnement. Il a donc été décidé de poursuivre les aides à l'investissement, l'aide à la consolidation et la modernisation (ACOMO) et le remboursement de la part maritime de la taxe professionnelle pendant la période 1995-1997.

- Aide à l'investissement

Le plafond des aides susceptibles d'être versées lors de l'acquisition d'une première immatriculation sous pavillon français de navires neufs est porté de 40 à 50 millions de francs, améliorant sensiblement les possibilités d'aide publique pour les unités neuves les plus importantes.

En outre, l'âge maximum auquel un navire d'occasion peut être subventionné a été porté de 10 à 15 ans. En corollaire, le taux maximum de subvention a été porté de 10 à 15 % pour un navire d'un coût compris entre 80 et 120 millions de francs.

En 1995, compte tenu des délais nécessaires à la mise au point de ces modifications, il n'a été ouvert que deux autorisations de programme pour des navires livrés avant le 31 décembre 1994, soit un total de 49 millions de francs.

En 1996, il est prévu de consacrer 82 millions de francs à cette action et 103 millions de francs en 1997.

- Aide à la consolidation et à la modernisation

Son attribution est élargie à toutes les entreprises de transport maritime exposées à la concurrence internationale. Ses critères de répartition sont diversifiés pour prendre en compte, à côté des investissements non maritimes, le niveau des emplois maritimes et sédentaires, notamment celui des officiers affectés à un emploi de lieutenant. Cette adaptation permet de renforcer la contribution de l'ACOMO à la sauvegarde du savoir-faire maritime français, en permettant l'emploi déjeunes gens ayant cette formation comme navigants.

En 1995, 102 millions de francs ont été consacrés à cette action, montant qui sera reconduit en 1996. Il est prévu de doter ce type d'opérations de 90 millions de francs en 1997.

En outre, pour permettre une gestion de l'aide à l'investissement et de l'ACOMO, leurs crédits respectifs ont été réunis au sein d'un même article budgétaire.

- Remboursement de la part maritime de la taxe professionnelle

Il est reconduit également jusqu'en 1997, où sera remboursée la taxe professionnelle de 1996. Les crédits inscrits en loi de finances rectificative pour 1995 et reportés en 1996, soit 85,8 millions de francs, permettront de verser le reliquat de subvention dû au titre de la TP 1994 puis de procéder au remboursement d'une première tranche de la TP 1995, le solde devant être versé en 1997.

Ces dispositions d'aide directe se cumulent avec les allégements de cotisation armatoriale à l'ENIM mis en oeuvre depuis août 1993 pour les navires immatriculés aux Terres australes et Antarctiques françaises, réduction s'appliquant aussi, depuis le 1 er janvier 1994, aux navires immatriculés en Métropole effectuant des liaisons internationales (réduction de plus de la moitié du taux de cotisation).

Cette mesure a dorénavant un effet annuel intégral. Son coût budgétaire ne connaîtra Pas, dans l'hypothèse du maintien de la réglementation en l'état, de modification significative. Il devra atteindre en 1996 comme en 1997, 58 millions de francs pour les navires immatriculés aux TAAF et 80 millions de francs pour les navires immatriculés en métropole qui effectuent des liaisons internationales.

L'ensemble de ces mesures a -il faut en convenir- permis de maintenir sous pavillon national la plus grande partie des navigants français dans ce secteur d'activité, d'éviter certains dépavillonnements et de sauvegarder l'essentiel du savoir faire maritime français.

Il faut souhaiter que la mise en place du nouveau régime fiscal des quirats ne soit pas assorti, à terme, d'un fléchissement de ces aides.

C. LES QUIRATS

La loi du 5 juillet 1996 relative à l'encouragement fiscal en faveur de la souscription de parts de copropriété de navires de commerce devrait attirer l'épargne vers l'investissement dans la flotte maritime française.

Le dispositif permet aux personnes physiques de déduire, au titre de l'impôt sur le revenu, afférent à l'année de versement, les sommes investies jusqu'au 31 décembre 2000 dans la limite annuelle de 500.000 francs pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés et de 1.000.000 francs par couple ;

En matière d'impôt sur les sociétés l'intégralité des sommes investies sont déductibles du bénéfice imposable de l'exercice de versement.

On attend de cette incitation qu'elle attire vers l'investissement maritime environ la moitié des sommes nécessaires au renouvellement annuel de la flotte, soit 1 milliard de francs. Au total, c'est de huit à dix navires par an qui devraient passer sous pavillon français dans le cadre de ces dispositions.

Cette augmentation du nombre de navires français ne sera pas seulement génératrice d'emploi à bord, mais également à terre, au sein des compagnies de navigation, des services portuaires et, de façon générale, dans le secteur des transports.

Il conviendrait que la mise en place de ce nouveau texte s'opère, outre le décret évoqué dans l'avant-propos du présent rapport, dans les meilleurs délais, s'agissant notamment de la circulaire sur les fonds de placements quirataires et celle relative aux navires d'occasion. Il faut souhaiter que les délais de réaction des services administratifs permettent un bon fonctionnement de l'activité commerciale.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page