TROISIEME CHAPITRE :
L'ABSENCE DE VÉRITABLES POLITIQUES SOCIALES CONDUIT À NE PRENDRE QUE DES DEMI-MESURES

I. LA MAÎTRISE DES DÉPENSES D'ASSURANCE MALADIE N'EST TOUJOURS PAS RÉALISÉE

Avec un objectif de dépenses de 735 milliards de francs pour 2000, en augmentation de 5,33 % par rapport à l'objectif prévu par la loi de financement pour 1999, la branche maladie/maternité/invalidité/décès constitue le deuxième poste du projet de loi, mais aussi celui ayant connu la plus forte hausse depuis 1997 : 72,9 milliards de francs de dépenses supplémentaires (en progression de plus de 11 %).

La CNAMTS reste quant à elle le point noir du régime général avec un déficit persistant qui ne se résorbe que grâce à des recettes plus dynamiques que des dépenses qui le sont déjà (pour 2000, dépenses en hausse de 3,3 % et recettes de 5 %). Le déficit de la CNAMTS s'élèvera ainsi à 12,1 milliards de francs en 1999 contre une prévision de retour à l'équilibre.

Votre rapporteur pour avis estime plus que jamais nécessaire un effort de maîtrise des dépenses permettant de les adapter à un rythme moins élevé de recettes et aux besoins nouveaux de la population. Ce projet de loi de financement ne propose aucune mesure s'inscrivant dans cette perspective.

A. LA POURSUITE DES TRANSFERTS DE DÉPENSES DE L'ETAT VERS LA CNAMTS

1. 100 millions de francs de dépenses en plus pour l'assurance maladie (articles 14 et 15)

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 avait transféré de l'Etat vers la CNAMTS la charge du financement des centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie que la loi contre les exclusions avait intégré au champ des institutions sociales ou médico-sociales, pour un coût estimé à 120 millions de francs. Le projet de loi de financement pour 2000 comporte trois mesures similaires qui ont un coût total de 102,7 millions de francs :

Coût des transferts de l'Etat à la CNAMTS

Mesure

Coût annuel pour la CNAMTS

Dépenses liées aux cures de désintoxication des personnes toxicomanes

73 millions de francs

Dépenses relatives au dépistage et au traitement de certaines maladies réalisés par les consultations de dépistage anonyme et gratuit (CDAG)

27 millions de francs

Dépenses relatives au dépistage et au traitement de certaines maladies réalisés par les centres de planification ou d'éducation familiale (CDEF)

2,7 millions de francs

Total

102,7 millions de francs

Ces transferts donnent lieu à versement d'une subvention de l'Etat imputée sur le budget de la santé de 1999 :

• articles 20 et 30 du chapitre 47-18 pour le dépistage et le traitement du sida et des maladies transmissibles ;

• article 10 du chapitre 47-15 pour les frais de sevrage.

Toutes ces dépenses se retrouvent incluses dans la dotation globale annuelle des établissements de santé. Cela passe par la dotation globale pour les centres qui en relèvent, et par une dotation forfaitaire annuelle pour les autres.

Ces transferts sont motivés par un souci de cohérence et de simplicité. Votre rapporteur pour avis s'interroge cependant sur l'absence de la subvention annuelle de l'Etat puisque le projet de loi de finances pour 2000 ne fait plus figurer ces dépenses. Si cela devait s'avérer, il faudrait que cette charge nouvelle pour la CNAMTS se retrouve dans le tableau récapitulant les conséquences financières du projet de loi de financement sur les comptes du régime général.

Par ailleurs, très attaché à la cohérence de la lutte contre le cancer, votre rapporteur pour avis ne peut que déplorer qu'un an après l'examen de la loi de financement pour 1999 les décrets d'application de son article 20 qui prévoyait une prise en charge et une réorganisation du dépistage de certaines maladies évitables dont certains cancers ne soient pas parus, rendant inopérante cette disposition. Ce retard anormal, préjudiciable à la santé de nos concitoyens, montre le degré d'impréparation de mesures figurant dans les projets de loi et laisse rêveur sur le devenir de celles qui sont soumises eu Parlement dans ce projet de loi de financement.

2. Le cavalier social des centres de santé (article 16)

L'article 16 intègre les centres de santé dans le code de la santé publique. Il précise donc le statut, les missions et le dispositif conventionnel applicable à ces centres. Ce dernier repose sur un accord national. Aujourd'hui, la France compte près de 1500 centres de santé, employant plus de 20 000 personnes.

Ils sont gérés selon des statuts extrêmement variés : associations, mutuelles, congrégations religieuses, collectivités locales, caisses de sécurité sociale, organismes divers (sociétés commerciales, fondations, comités d'entreprise, etc.).

Le nouvel article 16 a notamment pour conséquence d'empêcher toute création de centre de santé à but lucratif. Ceux qui subsistent ne pourront être conventionnés et leurs tarifs dépendront donc de ceux de l'ensemble des professions de santé. De même, les structures dépendantes des établissements hospitaliers devront disparaître ou voir leur financement intégré dans la dotation globale de l'établissement hospitalier.

Cet article présente d'autres imprécisions et difficultés comme par exemple l'obligation de signer la convention avec une " organisation représentative des centres de santé. "

Surtout, il ne prévoit aucun mécanisme de régulation des dépenses alors que les centres de santé représentaient quand même plus de 2,3 milliards de francs de dépenses remboursées en soin de ville .

L'accord national signé entre les centres de santé et les caisses (prévu à l'article 17) ne prévoit en effet aucune modalité particulière de régulation : l'accord ne peut modifier les tarifs des honoraires, rémunération et frais accessoires déterminés par les conventions passées avec les particuliers et auxiliaires médicaux. Il aurait été envisageable de lier le versement de la subvention annuelle par les caisses aux centres (égale à une partie des cotisations sociales de leurs praticiens et auxiliaires médicaux) à leur adhésion à cet accord national et de prévoir au sein de celui-ci les conditions d'une régulation financière, mais aussi de la participation aux réseaux de sciences et efforts de prévention.

Il est ainsi possible de se demander si cet article respecte bien les conditions de recevabilité posées par l'article L.O. 111-13 du code de la sécurité sociale en vertu duquel ne peuvent figurer en loi de financement de la sécurité sociale que les dispositions qui affectent directement l'équilibre financier des régimes de base ou qui contribuent à améliorer l'information du Parlement sur l'application des lois de financement.

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