B. AU NIVEAU INTERNATIONAL

1. La politique de l'Union européenne vis-à vis des pays tiers

a) Un motif de satisfaction : la signature de l'accord d'équivalence vétérinaire avec les Etats-Unis.

Après cinq ans de négociations , l'Union européenne et les Etats-Unis ont signé, le 20 juillet à Bruxelles, un accord d'équivalence vétérinaire et sanitaire. Le dernier obstacle a pu être levé après que Washington ait reconnu le principe de régionalisation, appliqué par l'Union européenne en cas d'épizootie du type de la peste porcine.

En prévoyant une reconnaissance réciproque des normes vétérinaires et sanitaires en vigueur de part et d'autre, cet accord devrait permettre d'éviter les doubles contrôles et faciliter les échanges commerciaux des produits agricoles et de leurs dérivés.

Il prévoit l'application du principe de régionalisation pour les principales maladies animales, ce qui signifie que l'éruption éventuelle d'une épizootie dans une région communautaire bien définie n'entraînera plus un embargo global sur le ou les Etats membres concernés.

Les produits pour lesquels l'équivalence est reconnue sont mentionnés dans l'accord. Pour les autres produits, les négociations sur la reconnaissance mutuelle seront poursuivies, un régime transitoire devant être appliqué dans l'intervalle.

En outre, des clauses de consultation, d'échange des informations, de notification des incidents vétérinaires et de vérification et d'audit sont également prévues dans le but de promouvoir la coopération et éviter les restrictions au commerce 22( * ) .

Près de 1.500 millions de dollars de produits européens et américains devraient être couverts par cet accord chaque année. Les produits laitiers (600 millions de dollars), les produits de la pêche (170 millions), ainsi que les viandes fraîches (122 millions dont 120 millions pour le porc) et leurs produits dérivés (122 millions) sont les principales exportations européennes concernées. En ce qui concerne les Etats-Unis, l'accord concernera avant tout les produits de la pêche (350 millions de dollars), l'alimentation pour les animaux domestiques (150 millions de dollars) et les viandes fraîches de cheval, de bovins et de volailles (150 millions). Rappelons que des accords similaires ont déjà été conclu par l'Union européenne avec la Nouvelle-Zélande, la République tchèque, et, en décembre dernier, avec le Canada. D'autres sont en négociation avec l'Australie, l'Argentine, l'Uruguay et le Chili.

b) Les différents partenariats menés par l'Union européenne

Les difficiles négociations avec les pays ACP

Partant du constat que la Convention de Lomé IV, qui régit depuis neuf ans les relations entre les deux entités, n'a pas réussi à intégrer les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) à l'économie mondiale , l'Union européenne voudrait donner à la future convention, qui entrera en vigueur l'an prochain, une dimension plus politique et plus libérale , en dépit des préférences commerciales dont bénéficient les produits des 71 pays ACP sur le marché des Quinze.

Soulignons que le niveau des importations de ces pays en Europe n'a fait que diminuer au fil des années, passant de 6,7 % en 1976 à 3,4 % en 1997.

Les 8 et 9 février dernier à Dakar, les ministres des Affaires étrangères et de la Coopération des Quinze ont fait le point avec leurs homologues du Sud des négociations pour le renouvellement de Lomé IV, entamées il y a quatre mois. Ils ont insisté sur la nécessité pour les pays ACP de mettre fin à certaines pratiques dans la gestion de l'argent public et de l'aide européenne.

Les participants n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur la période transitoire à instaurer pour que ceux-ci puissent adapter leurs économies à l'économie mondiale et aux règles de l'OMC. L'Union européenne propose cinq ans, les ACP en réclament dix. Pour permettre aux ACP de faire face à la mondialisation, les Quinze souhaitent remplacer progressivement les préférences commerciales par des accords de libre-échange entre l'Europe et des zones de coopération régionale au sein des ACP.

La conclusion de l'accord Union européenne - Afrique du Sud

Après trois ans et demi de négociations, les Quinze sont parvenus à l'unanimité
, à l'occasion du sommet européen de Berlin le 24 mars, à la conclusion de l'accord de commerce et de coopération entre l'Union européenne et l'Afrique du Sud. D'importantes concessions ont été faites par la Communauté dans le secteur agricole.

Cet accord devrait permettre la libéralisation de 91% des échanges bilatéraux d'ici 10 à 12 ans. Près de 61% des produits agricoles sud-africains pourront ainsi entrer librement sur le marché européen et 13% bénéficieront de conditions d'accès préférentielles. En revanche, quelque 300 produits dits " sensibles " tels que les fruits et les jus de fruits sont exclus de l'accord. C'est la première fois que l'Union européenne signe un accord de libre échange dans le domaine de l'agriculture.

Un compromis avait été trouvé, en début d'année, sur la question des échanges de vins et spiritueux, qui constituait l'un des principaux obstacles à la conclusion des négociations. L'Afrique du Sud et l'Union européenne décideront conjointement de nouvelles dénominations pour les vins sud-africains de Porto et Xérès, l'Afrique du Sud devant renoncer à utiliser ces appellations au terme de période de transition de respectivement, cinq ans sur les principaux marchés non-européens (essentiellement Etats-Unis et Australie), huit ans pour ses pays voisins (Mozambique, Botswana, etc...) et douze ans sur son marché intérieur. Les Sud-Africains ont, par ailleurs, fait des concessions dans le secteur des fruits transformés, acceptant notamment de renoncer à une réduction des taxes douanières sur les exportations de fraises surgelées vers l'Union européenne, en échange d'une augmentation de leur contingent.

L'accord, qui représente un volume de près de 300 pages, a été approuvé en mai après finalisation des derniers détails techniques par les experts 23( * ) .

Le récent accord Erwin-Nielson du mois dernier repousse à la fin de l'année la date limite des négociations relatives aux appellations et ouvre la voie à l'application, à partir du 1 er janvier 2000, de l'accord approuvé au printemps dernier.

Votre rapporteur pour avis estime, néanmoins, que l'attitude sud-africaine actuelle consistant à repousser l'application de l'accord sur les vins et spiritueux est de nature à remette en cause la mise en place au début 2000 de l'Accord général de libre échange.

L'ouverture des négociations avec le Mercosur

Le Conseil des ministres des Affaires étrangères du 21 juin dernier a confié un mandat à la Commission européenne pour négocier des accords d'association avec le Mercosur
(Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay) et le Chili, alors que les 28 et 29 juin se tenait à Rio de Janeiro le premier sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne, des pays d'Amérique latine et des Caraïbes.

L'accord politique intervenu entre les Quinze prévoit que le processus de négociation avec le Mercosur et le Chili sur les réductions tarifaires et les services s'engagera le 1 er juillet 2001, qu'il sera conduit en tenant dûment compte des résultats du prochain cycle de pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce et du calendrier prévu pour la zone de libre-échange des Amériques et qu'il sera conclu après les discussions de l'OMC.

Le Conseil des ministres de l'Union européenne et ses instances compétentes devraient être régulièrement tenus informés de l'évolution de la concertation et des pourparlers avec le Mercosur et le Chili, en particulier dans le domaine agricole.

L'objectif de ces discussions est une libéralisation progressive et réciproque de l'ensemble des échanges de biens et de services, dans l'optique d'instituer le libre-échange.

Rappelons que l'ouverture de ces négociations avait donné lieu à un différend au sein de l'Union européenne : la présidence allemande avait prévu d'inscrire la date du 1 er décembre 2000, alors que la France considérait que les pourparlers sur cette libéralisation des échanges ne pourraient pas débuter avant juillet 2003, une fois les prochaines négociations de l'Organisation mondiale du commerce largement engagées.

La poursuite des négociations avec le Mexique

Le septième round de négociations pour un accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Mexique
, qui s'est déroulé à Bruxelles dans la semaine du 19 juillet, a permis de trouver un compromis dans quatre nouveaux domaines : règlement des différends, mesures de sauvegarde, règles sanitaires et phytosanitaires (création d'un sous-comité chargé de ces questions) et coopération douanière.

Dans le domaine agricole, l'Union européenne et le Mexique ont échangé leurs listes d'" intérêt offensif ", c'est-à-dire les produits qu'ils souhaitent, chacun de leur côté, voir exemptés de droits tarifaires, sans toutefois apporter à ce stade de réponse aux demandes de l'autre partie. Les discussions devraient se poursuivre à l'automne.

2. L'Union européenne au sein de l'OMC

a) La multiplication des différends dans le domaine agricole

La nouvelle réforme de l'OCM " banane ".

Mise en place en juillet 1993, l'Organisation commune du marché de la banane (OCMB) est au coeur d'un conflit commercial qui oppose l'Union européenne aux Etats-Unis et quatre pays exportateurs de bananes d'Amérique latine (Equateur, Honduras, Mexique et Guatemala).

Votre rapporteur pour avis ne reviendra pas sur les détails de ce conflit fort bien analysé par notre collègue M. Jean Huchon dans son rapport de février 1998 sur la modification de l'OCMB. Le présent tableau permet de comprendre le fonctionnement de l'OCMB appliqué en 1997 24( * ) .

FONCTIONNEMENT DE L'OCMB APPLIQUÉ EN 1997

Sources d'approvisionnement

Limites quantitatives

Protection tarifaire

Bananes communautaires bénéficiant de l'aide compensatoire

854.000 tonnes

Aucune

Bananes ACP traditionnelles

857.700 tonnes réparties en quantités de référence individuelles par pays ACP TRADITIONNELS

Aucune

Bananes tiers et ACP non traditionnelles

Contingent tarifaire de 2,553millions de tonnes pour l'UE à 15, réparti en parts spécifiques :

Costa Rica (23,4 %)

Colombie (21 %)

Nicaragua (3%)

Venezuela (2%)

Autres pays dollar (46,5%)

Pays non traditionnels ACP (90.000 tonnes)

Aucune

A l'intérieur du contingent : 75 Ecus par tonne (fruits dollar)

0 Ecu par tonne (fruits ACP)

Hors du contingent (1) 850 Ecus par tonne (fruits dollar)

750 Ecus par tonne (fruits ACP)

A la suite des accords de l'Uruguay Round (1994), les droits de douane appliqués au-delà du contingent tarifaire doivent être réduits de 20 % sur six ans (communication personnelle, Commission des communautés européennes, DG VI).

Source : d'après les règlements communautaires n° 404/93, 1443/93, 3224/94 et 3290/94.

Le 25 septembre 1997, l'Organe de règlement des différends a, d'une part, confirmé les conclusions du panel du 22 mai 1997 affirmant que le régime d'importation de bananes de l'Union européenne, et en particulier les procédures d'allocation des licences d'importation, est incompatible avec le GATT, l'accord sur les licences, l'accord TRIMS et le GATS et, d'autre part, renversé le résultat du panel selon lequel l'incompatibilité à l'article XIII du GATT est couverte par les accords de Lomé.

En août 1998, la Commission européenne a publié les nouvelles modalités d'importation de bananes dans l'Union européenne ; les niveaux des contingents tarifaires étant maintenus, seule la répartition des licences d'importation a été modifiée.

Cette réforme étant jugée insuffisante par les pays plaignants, les Etats-Unis ont publié, le 21 décembre 1998 une liste de produits européens pouvant être frappés de droits de douane de 100%, à partir du 3 mars 1999, en l'absence d'un accord sur le régime communautaire d'importation de bananes.

RÉCAPITULATIF DES DIFFÉRENTS ÉVÉNEMENTS

1997

L'union européenne (UE) avec son organisation commune du marché de la banane (OCMB) est condamnée par l'Organisation mondiale du commerce -OCM). L'UE fait appel.

1998

 

8 janvier

Le médiateur de l'OMC donne à l'UE jusqu'au 1 er janvier 1999 pour se conformer aux conditions du jugement de l'OMC

5 février

Un premier plan de l'UE est jugé négativement par les Etats-Unis, le Honduras, le Mexique, l'Equateur, le Guatemala et la Panama

20 mai

Les Etats-Unis demandent des modifications du plan européen ; l'UE rejette la demande

26 juin

Le Conseil européen de l'agriculture adopte finalement le plan qui modifie l'OCMB ; l'UE se déclare ainsi conforme au règlement de l'OMC.

25 septembre

Les pays plaignants considèrent que l'UE ne satisfait toujours pas au jugement de l'OMC

21 octobre

L'UE conteste.

21 décembre

Les Etats-Unis publient une liste de produits européens susceptibles de subir des mesures de rétorsions.

1999

 

1 er janvier

L'UE met en place une version révisée de l'OCMB, dont les changements ne vont toujours pas suffisamment loin pour les Américains. Ainsi, fin janvier, un panel (commission d'arbitrage à l'OMC) est mis en place.

février

L'UE fait appel auprès de l'OMC après la menace de sanctions américaines.

3 mars

Les Etats-Unis -en anticipant la proposition du panel d'arbitrage- décident de " punir " l'UE qui refuse d'ouvrir davantage son marché aux " bananes dollars " et imposent une augmentation des taxes de 100 % sur une série de produits européens (notamment les plastiques, les pulls cashmere, les sacs à main, etc).

19 avril

Le panel de l'OMC rend sa décision finale et suit largement l'argumentation américaine selon laquelle le nouveau règlement de l'UE pénalise toujours les exportateurs américains. L'OMC engage l'UE à réviser de nouveau l'OCMB (notamment le système de licences pour l'importation de bananes dollars) et accorde aux Etats-Unis le droit d'appliquer des mesures de rétorsions d'un volume de 191,4 millions de dollars (les Etats-Unis avaient chiffré leurs pertes à un montant de 520 millions de dollars) Il semblerait que l'Europe accepte finalement la décision de l'OMC.

Condamnés officiellement le 6 mai par l'OMC, les Quinze ont décidé de modifier à nouveau leur système d'importations de bananes plutôt que d'utiliser leur possibilité d'appel.

Cette " réforme " bis doit néanmoins prendre un certain temps
puisqu'il exige de renégocier le protocole " bananes " annexé à la Convention de Lomé.

La Commission européenne a d'ailleurs proposé, dès le 26 mai, trois options :

- l'option " tariff only " envisage la suppression des contingents et la fixation d'un seul droit de douane à un niveau supérieur à 75 euros/tonne ; l'Association européenne des producteurs de bananes est opposée à cette option ;

- l'option mixte propose le maintien de deux contingents tarifaires (2.200.000 tonnes et 353.000 tonnes) et octroie aux pays ACP une préférence tarifaire ou un droit nul pour un volume illimité. Cette solution nécessiterait une dérogation de l'OMC couvrant la préférence tarifaire en faveur des bananes ACP, ainsi qu'un système de licences ;

- l'option " tout quota " préconise l'introduction d'un nouveau contingent tarifaire (s'ajoutant au contingent actuel de 2.553.000 tonnes) d'un volume supérieur aux exportations actuelles des ACP et sur lequel serait appliqué un droit de douane variant entre 75 euros/tonne (niveau pour les bananes Etats-tiers) et 737 euros-tonne (niveau pour les bananes hors contingent des Etats tiers).

En juillet dernier, une délégation centraméricaine est venue remettre à Bruxelles une position commune sur cette réforme et a précisé qu'aucune de ces trois options ne lui convenait . Néanmoins, à défaut d'avoir pu concilier les intérêts des différentes parties concernées par la réforme du dispositif actuel (combinant quotas, droits de douane et mécanisme complexe d'attribution des licences d'importation), la Commission européenne semble explorer la voie d'une solution tarifaire, la plus à même d'être acceptée par l'OMC.

Un droit de douane unique serait ainsi fixé pour les pays producteurs latino-américains, à un " niveau approprié " vraisemblablement supérieur au tarif actuel de 75 euros par tonne. La commission note que cette hausse devra être négociée avec les pays producteurs, tout en soulignant qu'un niveau de taxation insuffisant serait de toute façon contraire aux engagements de l'Union européenne envers les ACP au titre de la Convention de Lomé et impliquerait une charge budgétaire supplémentaire pour la Communauté, sous forme d'aides compensatoires à ses producteurs.

Pour leur part, les pays ACP devraient bien entendu continuer à bénéficier d'un accès à droit nul , avec quelques réserves : il sera probablement nécessaire à un certain moment de faire une différenciation tarifaire au sein même du groupe ACP et ce d'autant plus que la dérogation du GATT sur les préférences ACP expire en 2000 et devra être renégociée.

Votre rapporteur pour avis rappelle qu'outre les ACP, les producteurs des Canaries et des départements d'outre-mer, soutenus par la France, l'Espagne, le Portugal et dans une moindre mesure l'Irlande, ont jusqu'à présent toujours rejeté une telle option.

De son côté, l'Union européenne, au début de l'année, a demandé à l'OMC de condamner la mise en vigueur de mesures unilatérales de rétorsion conformément à la législation américaine (section 301). Les Etats-Unis avaient, en effet, souhaité appliquer des sanctions à hauteur de plus de 500 millions d'euros.

L'OMC a d'ailleurs constitué le 16 juin une commission d'arbitrage chargée de définir la date d'imposition des sanctions commerciales d'une valeur de 178 millions d'euros que les Etats-Unis comptent infliger à l'Union européenne.

Si l'Union européenne ne conteste pas les sanctions elles-mêmes, elle met en cause la décision américaine d'appliquer ces sanctions avant que l'OMC ne les ait approuvées.

Le conflit de " la viande aux hormones "


Le comité scientifique européen pour les mesures vétérinaires liées à la santé publique a considéré que les hormones de croissance utilisées dans l'élevage, surtout l'oestradial, constituaient un risque pour la santé humaine, même celui-ci n'est pas quantifiable . Cet avis , fondé sur les résultats préliminaires de dix-sept études commandées par Bruxelles à la fin 1998, ne constitue pas néanmoins la preuve scientifique exigée par l'OMC dans le conflit de la viande aux hormones.

A la suite de la décision de l'OMC de 1997, qui condamnait l'embargo européen, l'Union européenne avait jusqu'au 13 mai 1999 pour démontrer scientifiquement la nocivité des hormones en cause. En l'absence de preuves scientifiquement démontrées, l'Union européenne avait jusqu'au 2 juin pour négocier des compensations avec les Etats-Unis et le Canada. Or, si les Etats-Unis ont estimé leur préjudice à 202 millions de dollars, l'Union européenne a considéré que ce chiffre ne pouvait dépasser 100 millions de dollars. En l'absence de compromis, les Etats-Unis ont demandé d'appliquer à l'Union européenne des droits de douane de 100%. L'OMC s'est prononcée favorablement le 26 juillet dernier pour une taxation à hauteur de 128,1 millions de dollars (815 millions de francs), dont 116,8 millions de dollars pour les Etats-Unis et 11,3 millions de dollars pour le Canada.

Votre rapporteur pour avis ne remet pas en cause le fondement juridique de ces sanctions : il constate néanmoins que les Etats-Unis, favorables au développement du commerce international, emploient des procédés qui, au contraire, le restreignent . Ainsi, pour le bien du commerce international, les Etats-Unis auraient dû accepter les propositions européennes de " compensations " avec l'augmentation des quotas ou la diminution de droits de douane pour certains produits américains sur le marché communautaire.

On peut noter avec une certaine ironie la présence parmi les produits visés par les sanctions, de produits dérivés du porc, directement concurrents des équivalents américains .

En outre, votre rapporteur pour avis s'interroge sur le lien entre le problème de la viande aux hormones et les sanctions qui frappent le roquefort, les échalotes, la moutarde, le foie gras...

Enfin, il paraît quelque peu choquant de subir des surtaxes à l'occasion d'un différend intéressant la santé des consommateurs.

Par ailleurs, le 28 avril dernier, le Comité vétérinaire s'est prononcé pour le maintien de l'interdiction d'importer sur le territoire communautaire la viande de boeuf américaine certifiée sans hormones , après qu'une étude scientifique ait révélé la présence de résidus de produits anabolisants dans certains échantillons prélevés sur ces livraisons. En conséquence, la Commission a reporté du 15 juin au 15 décembre, la date à laquelle elle pourrait interdire l'importation dans l'Union européenne de viande bovine américaine certifiée sans hormones.

Votre rapporteur pour avis souhaite que l'Europe maintienne l'embargo sur les importations de viande américaine aux hormones dans l'attente des résultats scientifiquement sûrs.

La querelle du beurre néo-zélandais

Un panel d'experts de l'OMC a récemment considéré que les restrictions tarifaires imposées par l'Union européenne aux importations de beurre à tartiner de provenance néo-zélandaise portaient atteinte aux règles du commerce international
. Ce panel s'est plus particulièrement intéressé à la transformation du beurre à tartiner d'origine néo-zélandaise que la Commission européenne a considéré comme " trop élaboré " pour répondre aux critères du règlement sur les importations de ce produit. En conséquence la Commission a refusé d'inclure ce produit spécifique dans les contingents tarifaires préférentiels institués par l'Union européenne sur le beurre.

Le beurre à tartiner est fabriqué selon un procédé spécial qui permet de l'étendre facilement, à peine sorti du réfrigérateur. Cependant, pour tomber sous le coup du contingent spécial de l'Union européenne, le beurre doit répondre à certains critères de transformation, et être directement " dérivé " du lait ou de la crème. Or, selon la Commission, les produits néo-zélandais reposent sur des méthodes de fabrication à ce point complexes qu'ils ne constituent plus du " beurre " au sens strict du règlement. La Nouvelle-Zélande estime, elle, que ses produits sont compatibles avec ledit règlement.

La Nouvelle-Zélande s'est étonnée que l'Union européenne ait décidé seulement récemment de bloquer les importations, alors qu'elle exporte son beurre à tartiner vers l'Europe depuis 1991. Les Européens n'ont en effet réagi qu'en 1996, période à laquelle ils ont précisé que le beurre n'était pas fabriqué directement à partir du lait ou de la crème, tel que défini dans l'accord sur l'accès préférentiel de la Nouvelle-Zélande. L'Union européenne a imposé un droit de douane d'environ 3.500 euros/tonne sur le beurre tartinable néo-zélandais assorti d'un quota annuel spécial de 76.000 tonnes. Les ventes de beurre à tartiner atteignaient 5.000 tonnes par an lorsque la Commission a pris cette décision et ont doublé en l'espace de trois ans selon les estimations.

Le principal marché du beurre tartinable en Europe est le Royaume-Uni ; les services douaniers britanniques ont été conviés à ne pas inclure ce type de beurre dans le quota préférentiel. Le beurre à tartiner accapare de plus en plus de parts de marché et pourrait remplacer à terme le beurre traditionnel.

La Nouvelle-Zélande a signé une déclaration politique avec l'Union européenne, en mai dernier, qui fixe une série d'objectifs communs sur ce sujet. Le document énumère également les domaines de coopération politique et économique entre les deux partenaires commerciaux.

Les exportations de l'Union européenne vers la Nouvelle-Zélande ont totalisé 1,96 milliard d'euros en 1997, et les importations originaires de ce pays près de 2,06 milliards d'euros. L'UE est le troisième partenaire commercial de la Nouvelle-Zélande ; elle absorbe plus de 16 % des exportations néo-zélandais, derrière l'Australie (20 %) et le Japon (17%). En revanche, la Nouvelle-Zélande n'est que le 43 ème importateur de produits originaires de l'UE, derrière des pays comme l'Iran et la Syrie. L'Union européenne est de loin le principal consommateur de produits néo-zélandais tels que la viande ovine, le beurre, les pommes, les kiwis, la venaison et le vin 25( * ) .

La baisse régulière du contingent d'importation de gluten de blé

Pour la deuxième année consécutive, les autorités américaines ont réduit de 5.402 tonnes le quota alloué à l'Union européenne pour la période du 1 er juin 1999 au 31 mai 2000 en matière de gluten de blé
. Cette mesure, discriminatoire, imposée unilatéralement, ne touche pas les autres pays tiers fournisseurs.

Selon la Commission, le dépassement du quota -qui est de 5.204 tonnes alors que la réduction du quota imposé par les Américains est de 5.402- est dû à " l'incapacité des autorités douanières américaines à enregistrer les volumes importés dans le cadre du contingent ".

L'année passée, les Etats-Unis avaient décidé d'imposer pendant trois ans un quota annuel de 25.983 tonnes sur les importations de gluten de blé d'origine européenne pour protéger leur industrie. Les Américains avaient justifié cette mesure par le fait que les Européens, grâce aux subventions de l'Union, parvenaient à vendre leurs excédents de gluten sur le marché américain à des prix de dumping.

La Commission estime que les problèmes du gluten de blé américain ne sont en rien imputables à l'Union européenne. Ils sont dus, selon elle, à l'incapacité de l'industrie de l'amidon de blé à faire face à la concurrence de l'industrie de l'amidon de maïs, bien plus efficace outre-Atlantique.

Le régime fiscal consenti aux exportateurs américains

Un panel de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), constitué à la demande de l'Union européenne, a condamné, le 26 juillet dernier, dans un rapport intérimaire le système fiscal américain qui donne aux entreprises exportatrices -notamment dans les secteurs des céréales et du soja- des avantages contraires aux règles de la concurrence, assimilables à des subventions.


L'Union européenne avait demandé la constitution d'une instance d'arbitrage sur ces pratiques, considérées comme contraires aux règles du commerce international. Selon la Commission européenne, ces pratiques fiscales déloyales rapportent chaque année une aide directe de 2 milliards de dollars aux exportateurs américains.

Les sociétés exportatrices américaines peuvent utiliser le système des " Foreign Sales Corporation " (FSC) pour créer des filiales dans les paradis fiscaux comme les Iles Vierges ou la Barbade, qui échappent en grande partie aux taxes américaines. Selon les experts européens, 64 % de ces FSC échappent totalement à l'impôt et les bénéfices ristournés par ces sociétés à leur compagnie-mère ne sont pas non plus taxables. Un grand nombre de grands groupes américains, dont Boeing, Microsoft, General Motors, Chrysler, Motorola et Kodak bénéficient de ce système qui porte sur un chiffre d'affaires global de 150 milliards de dollars. Les principaux secteurs concernés sont les transports, les produits électroniques, les produits chimiques, les céréales et le soja.

En 1976, un système analogue de subventions déguisées aux entreprises exportatrices américaines, le " Domestic International Sales Corporation ", avait été déclaré illégal par le GATT.

Les Etat-Unis ont fait appel de la décision finale.

b) L'agriculture au coeur des négociations du millénaire de l'OMC

La conférence ministérielle de Seattle doit définir le calendrier et le contenu de la future négociation . L'article 20 de l'accord de Marrakech, dont l'objectif est la poursuite du processus de réforme, fournit d'ores et déjà le cadre de la prochain négociation agricole.

Les priorités des Etats-Unis pour les futures négociations à l'OMC en matière agricole sont l'élimination des subventions à l'exportation, le démantèlement des monopoles d'Etat, la diminution des aides publiques, la réduction des tarifs douaniers, une plus grande discipline en matière de quotas tarifaires et une plus grande ouverture sur les biotechnologies . Les Etats-Unis souhaitent, de plus, une réforme des institutions de l'OMC, et plus précisément du mode de règlement des différends. Cette procédure doit, pour les Américains, devenir plus transparente, notamment à travers une ouverture au public des auditions et une publication plus rapide des rapports.

Dès à présent, chaque camp cherche ses alliés.

La Commission européenne a approuvé, le 8 juillet, et transmis au Conseil des ministres, ses propositions en vue de la réunion ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Celles-ci détaillent les chapitres de négociation dont la Commission souhaite l'ouverture avec l'aval de ses partenaires commerciaux.

La communication de la Commission s'inspire fortement du document de Berlin, mais demande un mandat du Conseil des ministres de l'Union européenne pour la poursuite des négociations . Ce document est comparable à celui du Conseil qui a fixé ses propres exigences visant à mettre les investissements, la concurrence et l'environnement à l'ordre du jour des négociations multilatérales, à intégrer davantage les pays en développement dans le système commercial mondial, ainsi qu'à promouvoir le dialogue avec la société civile dans le but de sensibiliser davantage l'opinion aux bienfaits du système multilatéral.

Lors des négociations internationales, la politique agricole commune (PAC) de l'Union européenne sera attaquée fortement par les Etats-Unis et le groupe de Cairns, opposés aux subventions. La Commission européenne défendra, quant à elle, la PAC, d'une part en arguant des réformes déjà adoptées dans le cadre de l'Agenda 2000, et d'autre part en contestant les crédits à l'exportation - d'un montant allant jusqu'à 5,5 milliards d'euros- accordés chaque année aux agriculteurs américains.

Votre rapporteur pour avis souhaite que l'Union européenne marque sa détermination dans les négociations multilatérales, en faisant reconnaître par ses partenaires la spécificité de ses choix alimentaires. L'Union européenne doit ainsi :

- faire valoir ses intérêts dans tous les aspects de la négociation ;

- préserver la nécessaire cohérence entre sa politique agricole et l'exercice de libéralisation des marchés. Le choix politique de la Politique Agricole Commune (PAC) a été reconduit par l'adoption de l'Agenda 2000, qui offre des garanties au secteur agricole en matière de prix et de revenu. Cette situation implique de facto la nécessité de préserver les mécanismes correspondants de compensation des écarts de prix à la frontière -droits de douane et restitutions à l'exportation efficaces- ;

- rechercher, dans le cadre multilatéral, à établir des règles équitables et transparentes pour le commerce des produits agricoles de base et transformés.

Compte tenu des exigences légitimes des citoyens européens en matière sociale et environnementale, il est impératif, pour élaborer des règles de commerce plus équitables, d'intégrer les normes sociales et environnementales dans les négociations, oubliées par l'Uruguay round alors que ces critères modifient la compétitivité et les termes de l'échange.

Enfin, l'exercice multilatéral ne doit pas être affaibli par la multiplication de concessions bilatérales accordées en vertu de considérations politiques.

A la réunion informelle de Tampere (Finlande), en septembre dernier, les ministres européens de l'agriculture sont apparus " relativement unanimes " sur les priorités de l'Union européenne dans les négociations de l'OMC, et notamment la prise en compte de la multifonctionnalité de l'agriculture, le maintien des subventions dites de la " boite bleue "...

Certaines nuances -notamment du groupe de Londres- sont néanmoins apparus sur l'attitude que devait adopter la Communauté durant la négociation et la question du bien être animal. Le document signé au Conseil agricole du 27-28 septembre dernier a été adopté à l'unanimité.

Votre rapporteur pour avis approuve sans réserves la proposition de résolution adoptée par la Commission des Affaires économiques, il y a quelques jours, sur les prochaines négociations internationale qui s'ouvriront à la fin du mois à Seattle.




27-28 septembre


10 octobre

11 octobre



29 novembre -3 décembre

De Tampere à Seattle

Conseil agricole, élaboration de conclusions qui seront transmises aux ministres des affaires étrangères.

Réunion informelle des ministres du commerce à Florence.

Conseil Affaires Générales, conclusions des ministères des affaires étrangères sur la position de négociation de l'Union européenne.

Conférence ministérielle de Seattle, rédaction de la " Déclaration de Seattle qui fixera l'ordre du jour des négociations multilatérales 26( * ) .

Votre rapporteur pour avis se félicite de ce que la France ait entamé, il y a quelques mois, les premières discussions avec les professionnels en vue de préparer les négociations de l'OMC.

Il juge essentiel que la Commission des Affaires économiques suive avec la plus grande vigilance l'évolution de ce dossier.

c) L'avenir de l'OMC

Quatre ans après sa fondation au lendemain de l'Uruguay Round, l'OMC a de plus en plus de difficultés à remplir son mandat d'arbitre dans le domaine des échanges internationaux . Alors qu'elle devait incarner le principe du " multilatéralisme ouvert ", l'OMC se trouve souvent paralysée par d'âpres conflits commerciaux entre les Etats-Unis et l'Union européenne (banane, boeuf aux hormones, OGM) et la lutte entre l'Asie et les Etats-Unis pour la succession du poste de directeur général à la tête de l'institution. L'effritement du consensus fragile qui s'était établi depuis des années en faveur du multilatérisme dans la gestion des relations commerciales mondiales laisse planer un doute sur l'avenir de l'OMC à l'aube du " round du millénaire ".

Autrefois, les rivalités entre les trois grands ensembles commerciaux de la planète (Etats-Unis, Union européenne et Asie) étaient aplanies à la fois par la guerre froide et par le formidable essor du commerce international dans les premières années de la mondialisation (1985-1995).

Aujourd'hui, deux problèmes de fond se posent :

- l'inadéquation entre la logique économique et commerciale proprement dite et les logiques des autres sphères de la société (sociale, écologique, biologique...) ;

- la tension entre le souveraineté des Etats et le principe du multilatéralisme dans la gestion de la société internationale 27( * ) : le duel entre MM. Supachaï et Moore pour la direction générale de l'OMC ne doit pas ainsi faire oublier que l'affrontement a pour arrière plan les délicates négociations sur la candidature de la Chine à l'OMC : les Américains estiment que l'entrée de la Chine compliquerait considérablement la gestion institutionnelle de l'organisation.

Ces crises, à la veille du sommet de Seattle sont révélatrices des questions déjà pendantes dès l'ouverture de ces négociations ;

- qu'adviendra-t-il de la " clause de paix " des accords du GATT relative aux aides contenues dans la boîte bleue dont l'expiration est prévue en 2003 ? Si aucun accord n'est signé avant cette date, toutes règles particulières liées à l'agriculture seront supprimées et les marchés agricoles soumis aux accords généraux des subventions établis par le GATT ;

- si tous les participants souhaitent un nouveau cycle de négociations d'une durée de trois ans, les européens veulent que ce cycle soit un tout faisant l'objet d'un engagement unique, sans exclure pour autant de parvenir à des résultats partiels au cours de la négociation. Les Américains sont, au contraire, favorables à la possibilité d'aboutir à des accords sectoriels - notamment dans le domaine agricole- avant la fin de ce prochain cycle de pourparlers ;

- Européens et Américains sont favorables à l'inclusion de l'environnement dans la session de négociations commerciales multilatérales. Mais comme dans d'autres domaines, les intérêts de l'Union européenne et des Etats-Unis apparaissent divergents, Bruxelles prônant la définition de normes internationales tandis que Washington insiste sur la réduction des subventions qui " nuisent à l'environnement " ;

- si l'on constate un certain nombre d'avancées sur les règles vétérinaires internationales dans le cadre de l'Office international des épizooties en 1999, les normes sanitaires et techniques s'avèrent un enjeu déterminant dans le commerce international et notamment lors du round du millénaire : les Etats-Unis et l'Europe affichent en la matière de réelles divergences. Ainsi, les Etats-Unis ont récemment mis en garde les Européens contre une interdiction " irréfléchie " des antibiotiques dans l'élevage. Les réglementations sanitaires et techniques sont devenues la principale source d'entrave aux échanges et deviennent des outils de protectionnisme. Le Codex alimentarius, organisme international dont la mission est de " guider et promouvoir l'élaboration et l'harmonisation de définitions relatives aux produits alimentaires " se trouve ainsi au centre d'un nouvel enjeu.

3. L'enjeu agricole pour les Etats-Unis d'Amérique

a) La question du déficit commercial américain

Alors que le taux de croissance du produit intérieur en rythme annuel brut américain a augmenté de près de 4 % en 1998, le déficit commercial des Etats-Unis ne cesse de se creuser et a atteint 260 milliards de dollars l'année dernière. Dans le domaine agro-alimentaire, l'excédent commercial américain recule depuis deux ans 28( * ) .

En effet, l'évolution du commerce extérieur américain, depuis le milieu de la décennie 70, montre une réelle et constante dégradation. De 1993 à 1998, le déficit commercial non agricole est passé de 180 milliards de dollars à 276 en 1998.

Les prévisions pour 1999 ne sont guère optimistes puisque l'USDA s'attend à une nouvelle dégradation des comptes extérieurs -environ 290 à 300 milliards de déficit-. Parallèlement, l'excédent agro-alimentaire a été de près de 17 milliards de dollars en 1998.

Dans un tel contexte, on comprend aisément, que, depuis la signature des accords de Marrakech, les Etats-Unis n'aient jamais relâché leur pression sur les Européens, en particulier dans le domaine agricole
. Outre le fait que l'excédent agricole et alimentaire compense partiellement le déficit touchant les biens non agricoles, il convient de rappeler que l'économie américaine est dotée de forts avantages comparatifs sur l'agro-alimentaire et que les Américains entendent bien consolider et accroître ces avantages. Toutefois, la crise des économies asiatiques a provoqué, depuis deux années, une contraction des exportations américaines de produits agricoles et alimentaires, amputant l'excédent de plusieurs milliers de dollars.

Dans ce contexte, l'agressivité des autorités américaines en matière de flux commerciaux est de plus en plus tournée vers l'Union européenne , d'autant que les exportations américaines de produits agricoles et alimentaires se heurtent à la contrainte de débouchés constitutive de la crise asiatique. L'excédent agricole pour l'année 1998 a, en effet, chuté de six milliards de dollars par rapport à 1997, s'établissant à 16,6 milliards de dollars, soit un recul de 29 %. Le record de l'année 1995, plus de 27 milliards de dollars, est loin.

Par ailleurs, on assiste à un arrêt de la croissance des exportations américaines vers l'ALENA. La bonne tenue des récoltes mexicaines et la baisse de la production américaine de coton sont à l'origine de ces médiocres résultats.

EXPORTATIONS AGRICOLES AMÉRICAINES PAR PRODUIT

(EN MILLIARDS DE DOLLARS)

Année fiscale
(1 er oct.-30 septembre)

1996

1998

1999
(prov.)

Grains et aliments du bétail

21,5

14,1

13,9

Oléagineux et produits dérivés

9,7

11,1

9,3

Viandes :
- boeuf, porc, abats
- volaille

6,7
4,3
2,3

6,4
4,0
2,3

6,3
4,5
1,8

Produits laitiers

0,7

0,9

0,9

Tabacs bruts

1,4

1,4

1,4

Cotons et linters

3,0

2,5

1,6

Semences

0,7

0,8

0,9

Produits horticoles

10,0

10,3

10,1

Autres produits

6,0

6,0

6,1

Total

59,8

53,6

50,5

Source : Agri US Analyse, d'après USDA.

Les grains et aliments du bétail, les oléagineux, la viande volaille, le coton, enregistrent les plus fortes baisses. Il est intéressant de noter que, pour la première fois depuis 1990, les exportations de viande de volaille sont en baisse, en raison de la chute des achats russes (-27 % en 97/98 en volume).


La décroissance des exportations américaines constitue un signe préoccupant pour les Européens, qui vont être une cible privilégiée pour les négociations américaines à la fin de cette année.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner qu'en l'absence de la procédure dite de " fast track " accordée par le Congrès à l'administration américaine, il est impératif que l'Union européenne se montre très prudente lors des négociations de l'OMC.

b) L'évolution de la politique agricole américaine

Alors que les Etats-Unis avaient annoncé en 1996 la mise en place, avec le Fair Act, d'une politique agricole libérale ayant pour ambition la réduction des aides à l'agriculture, on peut s'étonner du fait que les " chantres du libéralisme " aient autant de mal à résister à une poussée protectionniste grandissante.

L'instauration, en 1998, d'une enveloppe de près de 6 milliards de dollars pour soutenir l'agriculture est un indice particulièrement fort
de cette nouvelle tendance outre-Atlantique. Faut-il, d'ailleurs, parler en l'espèce de nouvelle tendance ?

En 1999, un nouveau plan d'aides aux agriculteurs d'un montant d'un milliard de dollars consistant en prêts à des aides destinées à surmonter les périodes de crise a été décidé par le Gouvernement. De plus, des mesures de report d'impôt pour les agriculteurs les plus en difficulté ont été mis en place.

M. Dan Glickman, secrétaire d'Etat à l'agriculture, a constaté que si la réforme de 1996 était bien adaptée à une période faste, elle se révélait catastrophique lorsque la crise survenait. Il a indiqué que " l'une des priorités allait être de concevoir un filet de sécurité efficace pour les agriculteurs ". Une série de mesures a été décidée. Tout d'abord, le délai pour demander à bénéficier de l'aide d'urgence de 1998 a été reporté du 12 mars au 9 avril ; de plus, un programme de 200 millions de dollars destiné aux producteurs de lait a été annoncé ; en ce qui concerne les prêts d'urgence, les volumes attribués sont supérieurs de deux tiers à ceux qui avaient été accordés à la même époque en 1998 ; les crédits pour l'exportation porteront sur 10 millions de tonnes cette année contre 3 millions l'an dernier ; en outre, le programme d'aide rurale est augmenté de 800 millions de dollars ; le Gouvernement a, enfin, dépensé 50 millions de dollars pour dégager le marché porcin.

Au total, les aides devraient représenter 18 milliards de dollars en 1999, soit la somme la plus élevée accordé depuis dix ans, selon les dires même de M. Dan Glickman.

Par ailleurs, l'assurance-récolte connaît d'importantes difficultés aux Etats-Unis
. Depuis qu'elle n'est plus obligatoire, force est de reconnaître que son succès est plus limité. Environ la moitié des surfaces assurables sont aujourd'hui couvertes. Quant à l'assurance revenu, elle en est encore au stade de l'expérimentation.

Ce constat n'est pas celui d'un expert européen mais celui de M. Sam Coleman Dunlap, spécialiste des assurances agricoles auprès de l'USDA. Selon lui, le système d'assurance des récoltes et des revenus agricoles doit être réformé. Compte tenu des aides exceptionnelles distribuées par le Congrès, les " farmers " ne sont pas motivés pour s'assurer.

Pour l'heure, il existe un système d'assurance couvrant près de quatre-vingt-dix productions, un fonds de garantie qui rembourse une part des dommages dus pour catastrophes naturelles, dont beaucoup d'agriculteurs se contentent et un dernier fonds pour les cultures non assurables.

4. Les prévisions de l'OCDE

Le 20 avril dernier, l'OCDE a rendu public son rapport sur les perspectives agricoles pour les cinq prochaines années (1999-2004).

Ce rapport examine certains éléments de la stratégie de réforme des échanges dans le cadre du prochain cycle de négociations multilatérales sur l'agriculture. L'OCDE prévoit :

- la reprise des échanges à partir de 2000 : la plus forte croissance est prévue pour la viande (porc et volaille) ;

- la poursuite de la réduction progressive des obstacles commerciaux, pourrait avoir, après 2000, un impact positif sur les marchés des produits bénéficiant de subventions à l'exportation . Par contre, un abaissement des droits de douane selon les modalités en vigueur n'auront qu'un effet limité sur les échanges et les prix ;

- actuellement au plus bas, les prix des denrées alimentaires comme le blé, le maïs, les produits laitiers, la viande de porc et les oléagineux devraient augmenter après 2000. Les prix des céréales devraient chuter à un niveau historique en 1999, en raison de l'augmentation de l'offre globale et de la faible demande due à la crise asiatique. Les prix mondiaux du maïs et du blé devraient remonter respectivement à 112,7 à 143,7 euros la tonne d'ici 2004, en léger retrait par rapport aux moyennes observées sur la période 1993-1997. Par ailleurs, la production mondiale de céréales devrait croître de 11 % entre 1998 et 2004. Après un fléchissement en liaison avec la chute des prix, la production devrait augmenter, après 2000, en moyenne de 15 millions de tonnes par an. La part de l'OCDE dans la production mondiale de céréales devrait rester stable autour de 40 % ;

- le montant des subventions versées à l'agriculture des 29 pays de l'OCDE a été en hausse en 1998 ; en effet, les subventions à l'agriculture sont passées de 331 milliards de dollars en 1997 à 362 milliards (+9,4 %) en 1998 dans les pays membres de l'OCDE. Les montants alloués aux exploitants représentaient en 1998 1,4 % du produit national brut (PNB) de l'OCDE, contre 1,3 % en 1997. L'an dernier, le niveau de soutien aux producteurs, qui a augmenté dans tous les pays, sauf en Corée et en Nouvelle-Zélande, est passé de 32 à 37 % de la valeur des recettes agricoles brutes. Très variables, les niveaux de soutien vont de moins 1.000 dollars à plus de 35.000 dollars par exploitant selon les pays, la moyenne de l'OCDE tournant autour de 11.000 dollars.

Cette hausse des soutiens est " essentiellement imputable à la baisse des prix mondiaux, qui n'a pas été suivie d'un recul similaire des prix nationaux " en raison des droits de douane. " Pour de nombreux pays, les droits de douane continuent à empêcher les variations de prix mondiaux de se répercuter pleinement sur les économies nationales ", note l'Organisation.

L'augmentation des subventions à l'agriculture reste dans les limites permises par les règles internationales du commerce, reconnaît l'OCDE, qui pointe néanmoins du doigt la distorsion entre les droits de douane imposés aux produits agricoles, qui culminent à un " haut niveau ", et ceux appliqués aux produits manufacturés, qui sont plus " modestes ". Les droits de douane agricoles peuvent dépasser les 40 % tandis que ceux des produits manufacturés sont compris entre 5 et 10 % , selon l'OCDE.

Malgré la poussée des subventions, les revenus nets des exploitants agricoles ont décliné " dans la plupart des pays de l'OCDE ". Ils ont reculé de 4 % dans l'Union européenne en 1997-98, de 16 % aux Etats-Unis et de 21 % en Australie.

Sur le long terme, les subventions agricoles marquent cependant une tendance à la baisse : sur les dix dernières années, elles sont ainsi passées de 2,1 % du PNB de l'OCDE en 1986-88 à 1,3 % en 1996-98.

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