CHAPITRE III -

LA POLITIQUE DE LA VILLE EN 1999

La politique de la ville a un caractère foncièrement interministériel puisqu'elle touche aussi bien aux problèmes de sécurité et de justice qu'aux questions foncières et urbanistiques et à l'éducation.

I. LA LUTTE CONTRE LA VIOLENCE ET L'INSÉCURITÉ

Tous les observateurs s'accordent à le penser, aussi bien en France qu'à l'étranger : la lutte contre le sentiment d'insécurité qui résulte de la violence et de la multiplication des incivilités est un pré-requis pour la réussite de la politique de la ville. Dans cette perspective, le Gouvernement a, à juste titre, mis en oeuvre un dispositif tendant à renforcer l'implication des collectivités locales grâce à la conclusion de contrats locaux de sécurité. Beaucoup reste cependant à faire, notamment afin de lutter contre la violence des mineurs, qui semble se développer de façon inexorable.

A. L'ACTION DE LA POLICE

Les contrats locaux de sécurité signés à la suite de la publication de la circulaire interministérielle du 28 octobre 1997 tendent, grâce à une action de proximité, à renforcer l'efficacité et la visibilité de l'action quotidienne de la police. En août 1999, 289 CLS étaient signés.

Sur ce total, 89 contrats avaient une portée intercommunale, et 8 étaient consacrés, de façon spécifique, aux questions de sécurité dans les transports urbains. Les CLS tendent notamment à :

- accroître les effectifs d'îlotiers ;

- améliorer l'accueil du public ;

- créer des permanences juridiques et sociales dans les services de police ;

- délivrer une meilleure information aux plaignants sur la suite judiciaire donnée à leur plainte pour lutter contre le sentiment d'immunité souvent ressenti par les coupables du fait de la carence de la justice ;

- renforcer la nécessaire action de la justice.

Afin de lutter contre les violences urbaines , sept brigades anti-criminalité départementales sont actuellement en activité. Elles regroupent 429 agents. S'y ajoutent 310 brigades anti-criminalités locales dont l'effectif total est de 34.000 fonctionnaires environ.

La réforme de la carte des services de police et de gendarmerie n'est toujours pas achevée . A la suite du rapport Carrez-Hyest, il a été envisagé de transférer 94 circonscriptions de sécurité publique à la gendarmerie et de faire passer 38 communes relevant de la gendarmerie en zone de police d'Etat. En 1998, les préfets ont été chargés de mettre en oeuvre une phase de concertation avec les élus pour envisager les modalités pratiques de ces transferts. Un membre du Conseil d'Etat a présenté, le 31 décembre 1998, un rapport destiné à approfondir la consultation des élus et des autorités locales. A la suite d'une décision du Premier Ministre du 19 janvier 1999, " un examen au cas par cas de chacun des dossiers de transfert de compétences est substitué à la démarche de gestion globale du dispositif ".

Votre Commission des Affaires économiques souhaite que le renforcement des effectifs de police dans les communes situées en zone urbaine sensible se double d'une pérennisation du volume des effectifs qui s'y trouve affecté. Elle considère que les créations d'emplois dans la police récemment annoncées par le Premier ministre relèvent davantage de l'effet d'annonce que d'une politique de longue haleine, puisque le gouvernement ne s'est pas avéré capable de conserver le cap de la politique de renforcement des effectifs lancée en 1996.

B. LE RÔLE DE LA JUSTICE

Le développement du nombre de maisons de justice et du droit se poursuit lentement . 15 d'entre elles existaient en 1997, 23 ont été créées en 1998 et 14 en 1999. Leur nombre s'élève donc désormais à 52. A ce rythme, il faudra entre huit et dix ans pour ouvrir les deux cents maisons de justice que le rapport Sueur proposait de créer en deux ans ! Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, une soixantaine d'autres créations seraient en cours d'examen dont une dizaine pourrait intervenir d'ici à la fin 1999.

Votre Commission des affaires économiques souhaite que le nombre des maisons de justice soit rapidement accru.

Les maisons de justice traitent de petits litiges civils et de délinquance, viennent en aide aux victimes, facilitent l'accès au droit et concourent à la prévention de la délinquance.

Votre rapporteur pour avis souhaite que les moyens matériels destinés aux maisons de justice soient renforcés afin que nos concitoyens n'aient pas l'image d'une " justice du pauvre " en s'y rendant. Encore que nombre de tribunaux d'instance pourraient accueillir cette activité.

Votre rapporteur pour avis estime, en outre, indispensable de sanctionner les délits qui, même s'ils sont en apparence de faible gravité, ont une incidence certaine dans le développement du sentiment d'insécurité tels que les injures publiques ou non publiques, tapages, jets d'immondices sur la voie publique.

Il souhaite que les services du ministère de l'Intérieur soient davantage sensibilisés à la nécessité d'opposer une " tolérance zéro " à ces comportements. Rien n'interdit, en effet, aux commissaires de polices de tenir plus souvent le siège du procureur de la République devant le tribunal de police afin de réclamer la sanction des comportements faisant l'objet des contraventions de la première à la quatrième classe qui visent l'ensemble des " incivilités " précitées.

C. LA LUTTE CONTRE LA DÉLINQUANCE DES MINEURS

Souligné par de nombreuses études, l'accroissement de la délinquance des mineurs constitue un phénomène particulièrement préoccupant. Selon le groupe d'études et de réflexion interrégional, 30 % des faits de délinquance de proximité (coups et blessures, vols avec violence, destructions et dégradations) impliquent des mineurs. Face à cette question, le Gouvernement a pris plusieurs décisions pragmatiques et utiles qu'approuve votre rapporteur pour avis.

Parallèlement aux actions de prévention menées par les services de la protection judiciaire de la jeunesse, une circulaire de politique pénale du 15 juillet 1998 indique que tout fait délictueux sera signalé aux parquets afin de faire l'objet d'un avertissement, d'une convocation pour rappel à la loi ou d'un classement sous conditions et, enfin, d'une mesure de réparation.

Le Premier ministre a également décidé, lors du Conseil de sécurité du 27 janvier 1999, de créer 15 centres de placement immédiat au cours de cette année et d'accroître leur nombre total à 35 unités en 2001. Il est également prévu d'ouvrir dix centres éducatifs renforcés pour les mineurs fortement engagés dans la délinquance. Compte tenu du fait que la capacité d'accueil de chacun de ces centres serait de quatre à cinq places, votre Commission des Affaires économiques souhaiterait connaître le nombre de ces institutions que le Gouvernement entend créer à terme.

L'ouverture d'une centaine de classes relais destinées à accueillir les élèves en voie de marginalisation scolaire, exclus des établissements d'enseignement en raison de troubles de comportement est également encouragée par votre Commission des Affaires économiques. A terme, l'objectif du Gouvernement serait d'ouvrir 250 de ces classes.

Votre Commission des affaires économiques souhaite que le Gouvernement persévère dans sa politique de lutte contre la délinquance des mineurs.

D. L'APPLICATION DE LA LOI DU 6 JANVIER 1999 RELATIVE AUX ANIMAUX DANGEREUX ET ERRANTS

Devant la multiplication du nombre des chiens de type " molossoïde " et la part prise par certains de leurs propriétaires à des activités illicites, le Parlement a adopté la loi n°99-5 du 6 janvier 1999 relative aux animaux dangereux et errants et à la protection des animaux, dont notre collègue Dominique Braye fut le rapporteur devant le Sénat.

Ce texte classe les chiens en deux catégories respectivement composées des chiens d'attaque, d'une part, et des chiens de garde et de défense, d'autre part. Il interdit notamment aux mineurs la détention de chiens potentiellement dangereux, et soumet les détenteurs de ces chiens à diverses formalités et, en particulier, à l'obligation de déclarer leur animal.

Il prohibe l'accès des chiens dangereux aux transports en commun et régit les modalités de dressage de ces animaux. Il prévoit enfin la stérilisation des chiens d'attaque qui devrait conduire, à terme, à leur extinction.

La mise en oeuvre de la loi est urgente car on a pu noter, au cours de ces derniers mois, des vols sous la menace d'un chien, des combats de chiens avec pari voire même le transport de drogue sous des pansements portés par des chiens. Dans de nombreux quartiers en difficulté, la préparation, la discussion et l'adoption de la loi ont suscité un réel intérêt de la part des citoyens qui réclamaient que des mesures soient prises pour limiter la recrudescence des chiens tels que les pittbulls, les american staffordshire terriers, les rottweilers ou les beaucerons. Au quartier de la Grande Borne, à Grigny, où vivent 12.000 personnes, on estime le nombre de chiens entre 250 et 280 !

Concrètement, la police ne dispose pas des moyens de déterminer la catégorie à laquelle appartiennent les chiens que ses agents sont amenés à contrôler, pas plus que des compétences techniques pour contrôler la stérilisation des animaux. Il convient donc de préciser rapidement, par le moyen de décrets d'application, dont la publication n'a que trop tardé, les modalités de mise en oeuvre de la loi n° 99-5 précitée. En effet, jusqu'à présent, seul l'arrêté du 27 avril 1999 pris pour l'application de l'article L-211-1 du code rural qui dresse la liste des types de chiens susceptibles d'être dangereux a été publié.

Votre commission des Affaires économiques souhaite que le Gouvernement procède rapidement à l'édiction des dispositions réglementaires nécessaires à l'entrée en vigueur de la loi.

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