Projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale. TOME I - Intérieur : décentralisation

HOEFFEL (Daniel)

AVIS 94-TOME I (1999-2000) - commission des lois

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Table des matières




N° 94

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000

Annexe au procès-verbal de la séance du 25 novembre 1999.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME I

INTÉRIEUR :

DÉCENTRALISATION


Par M. Daniel HOEFFEL,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Mme Dinah Derycke, MM. Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Georges Othily, Michel Duffour, vice-présidents ; Patrice Gélard, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, secrétaires ; Nicolas About, Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, Jean-Pierre Bel, Christian Bonnet, Robert Bret, Guy-Pierre Cabanel, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Gérard Deriot, Gaston Flosse, Yves Fréville, René Garrec, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Jean-François Humbert, Pierre Jarlier, Lucien Lanier, Simon Loueckhote, François Marc, Bernard Murat, Jacques Peyrat, Jean-Claude Peyronnet, Henri de Richemont, Simon Sutour, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 1805 , 1861 à 1866 et T.A. 370 .

Sénat : 88 et 89 (annexe n° 31 ) (1999-2000).

Lois de finances.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Après avoir entendu M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur et M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, la commission des Lois, réunie le mercredi 1 er décembre 1999, sous la présidence de M. Jacques Larché, président, a procédé, sur le rapport pour avis de M. Daniel Hoeffel, à l'examen des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.

La commission a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption de ces crédits sous le bénéfice des observations suivantes :

1/ si les abondements exceptionnels votés par l'Assemblée nationale sont appréciables, il mettent néanmoins en évidence que les règles d'indexation prévues dans le cadre du " contrat de croissance et de solidarité " ne permettent pas une évolution suffisante des concours de l'Etat faisant participer les collectivités locales aux fruits de la croissance à laquelle elles apportent pourtant une contribution majeure ;

2/ ces règles ne prennent pas en compte les charges subies par les collectivités locales, notamment sous l'effet de l'accord salarial du 10 février 1998 et des normes de sécurité qui leur sont imposées ;

3/ La pratique des abondements exceptionnels risque d'aboutir à un double mécanisme des concours de l'Etat aux collectivités locales : d'une part, une enveloppe " normée " au sein de laquelle la DGF ne progresserait que de 0,8%, selon ses règles d'indexation, d'autre part, des abondements ponctuels dont le maintien pour les exercices à venir ne serait en rien garanti aux collectivités locales ;

4/ les conditions d'évolution de la DGF subissent les effets des mécanismes de recalage de sa base de calcul et de régularisation négative, qui ne permettent plus à cette dotation de faire face aux nouvelles charges de fonctionnement supportées par les collectivités locales, notamment celles induites par le dernier recensement général de la population ;

5/ conjugués à la pratique des abondements exceptionnels " hors enveloppe " destinés à compenser l'insuffisante progression de la DGF, ces mécanismes mettent en cause les objectifs de prévisibilité et de lisibilité qui doivent en principe fonder une programmation pluriannuelle des concours de l'Etat ;

6/ aggravées par la réforme fiscale résultant de la loi de finances pour 1999, de fortes incertitudes affectent l'avenir du système de financement local, ce qui justifie une réflexion destinée à doter les collectivités locales de ressources fiscales évolutives ;

7/ dans un contexte marqué par une insécurité juridique croissante et une dégradation des conditions d'exercice des mandats locaux, la rénovation du cadre juridique de l'action publique locale et une adaptation du statut des élus locaux aux responsabilités qui leur sont confiées doivent constituer des priorités ;

8/ le processus d'adaptation des préfectures et des services déconcentrés de l'Etat doit être poursuivi et approfondi.

Mesdames, Messieurs,

Les concours de l'Etat aux collectivités locales s'élèvent à 292,86 milliards de francs en 2000, dont 22,8 milliards de francs destinés à compenser les effets de la suppression de l'assiette " salaires " de la taxe professionnelle, décidée par la loi de finances pour 1999. La fiscalité transférée atteindra 41,8 milliards de francs.

Cette année encore, les concours de l'Etat progressent selon les règles fixées par l'article 57 de la loi de finances pour 1999 dans le cadre du " contrat de croissance et de solidarité " qui, succédant au " pacte de stabilité financière ", doit régir les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales en 1999, 2000 et 2001.

Si ces règles permettent une augmentation en 2000 des concours de l'Etat inclus dans l'enveloppe normée selon une indexation qui prend en compte une fraction plus importante de la croissance économique (25 % contre 20 % en 1999), elles ne permettent pas de verser le juste bénéfice des fruits de la croissance aux collectivités locales, lesquelles lui apportent pourtant une importante contribution.

Plus profondément, l'ensemble du système de financement local semble désormais arrivé à épuisement. Les conséquences du recensement sur les équilibres internes de la dotation globale de fonctionnement mettent en lumière les limites des règles de calcul de cette dotation. Quant à la réforme fiscale voulue par le Gouvernement l'an passé, elle pose de manière cruciale la question de l'avenir de la fiscalité locale.

Ces interrogations majeures sur les finances locales s'inscrivent dans un contexte de fortes incertitudes pesant sur la décentralisation que traduit notamment l'insécurité juridique croissante à laquelle l'exercice des mandats locaux se trouve exposé.

I. L'ADMINISTRATION TERRITORIALE : UN PROCESSUS D'ADAPTATION TOUJOURS EN CHANTIER

Les crédits consacrés à l'administration territoriale s'élèvent à 6,5 milliards de francs en 2000, soit + 2,1 % par rapport à 1999.

L'expérimentation d'une globalisation des crédits au profit de quatre préfectures justifie la création d'un chapitre 37-20.

Les mesures catégorielles réservées au cadre national des préfectures s'élèvent globalement à 15 millions de francs. Elles concerneront notamment des agents de catégories B et C, afin de combler un retard subi par ces catégories. Les agents de catégorie A bénéficieront, pour leur part, d'une revalorisation de leurs primes. Enfin, le régime indemnitaire des agents d'Ile-de-France sera revalorisé pour tenir compte du coût plus élevé de la vie et de conditions de travail parfois plus difficiles.

A. LA MODERNISATION DES PRÉFECTURES

Plusieurs dispositifs gouvernementaux ont mis les préfectures à forte contribution, notamment l'opération de régularisation des étrangers en situation irrégulière et la délivrance gratuite des cartes nationales d'identité. Le projet de loi de finances prévoit un crédit de 7,8 millions de francs de vacation, soit l'équivalent de 80 " équivalents temps plein annuel " pour faire face à des exigences de ce type en 2000.

Une réforme du régime indemnitaire du corps préfectoral a été mise en oeuvre depuis le 1 er janvier 1999. Elle s'articule autour de la création d'une indemnité de responsabilité du corps préfectoral (décret n° 98-1167 du 21 décembre 1998) et de la majoration de l' indemnité forfaitaire pour frais de représentation. Pour 2000, ces mesures représentent un montant de 33,439 millions de francs. Au 1 er janvier 1999, on comptait 223 préfets dont 109 en poste territorial et 538 sous-préfets dont 428 en poste territorial.

Les préfectures ont, par ailleurs, fait l'objet entre 1988 et 1993 d'un plan de modernisation axé essentiellement autour de l'amélioration de l'accueil du public, notamment par la mise en oeuvre d'importants travaux immobiliers. Le plan, qui a été prolongé pendant deux ans, s'est achevé en 1995.

Depuis cette date, la modernisation des préfectures est néanmoins demeurée une priorité. En 1998-1999, l'accent a été plus particulièrement mis sur le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans le cadre du programme gouvernemental pour l'entrée de la France dans la société de l'information. Les préfectures ont ainsi consacré 114 millions de francs à leur équipement informatique en 1998, permettant d'atteindre 0,9 poste informatique par agent occupant un poste administratif dans les préfectures. La mise en réseau des locaux des préfectures pourrait être achevée au début 2000.

Les préfectures sont, en outre, le pivot de la mise en place des systèmes d'information territoriaux (SIT) qui recouvrent la mise en réseau informatique des services de l'Etat autour d'une messagerie et de bases de données à partir de thèmes de travail communs à plusieurs services. L'objectif est que tous les départements disposent d'un tel site à la fin 2000. Enfin, 25 départements ont mis en place des sites internets ouverts au public. Le ministère entend développer les téléprocédures afin d'éviter les déplacements inutiles aux guichets des préfectures, l'expérience la plus aboutie dans ce domaine ayant concerné la télécommunication des demandes de cartes grises par les professionnels aux préfectures. Les initiatives locales sont soutenues par le biais du fonds de modernisation des préfectures, constitué au chapitre 37-10 et abondé à hauteur de 13,9 millions de francs en 1999. Sur ce montant, 7 millions de francs ont été consacrés aux nouvelles technologies de l'information et de la communication.

Devant votre commission des Lois, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a indiqué que les crédits globalisés en matière d'informatique devraient permettre d'achever le câblage de toutes les préfectures en 2000 et donc de les mettre en réseau interne avec l'administration centrale et avec les autres services déconcentrés de l'Etat.

La mise en oeuvre d'outils méthodologiques d'appui aux préfectures a constitué un autre axe d'actions prioritaires. Cette procédure est menée à partir du recensement et de l'expertise des meilleures initiatives locales. En 1999, une étude a été diffusée sur les conditions de délivrance de certains titres (cartes grises et passeports).

Déjà annoncé l'an passé, l'audit du patrimoine immobilier reste d'actualité et devrait faire prochainement l'objet d'un cahier des charges s'appuyant sur des expériences locales. Pour 2000, les crédits consacrés à l'immobilier sont stables en autorisations de programmes et progressent de 20 % en crédits de paiement. Les actions prioritaires concerneront l'amélioration du travail du public et la sécurité, l'adaptation du réseau des sous-préfectures d'Ile-de-France aux évolutions démographiques et la " désimbrication " des locaux des préfectures de ceux des conseils généraux.

Enfin, une expérience de globalisation des moyens de fonctionnement des préfectures va être lancée au 1 er janvier prochain dans quatre préfectures (Doubs, Finistère, Isère, Seine-Maritime). Les préfets concernés bénéficieront d'une délégation globale de l'ensemble de leurs moyens de personnel et de fonctionnement dans une enveloppe globale fongible. Devant votre commission des Lois, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a indiqué que cette expérimentation devrait engager les quatre préfectures concernées à réaliser les réformes de structures et de procédures devenues indispensables. Elle pourrait être généralisée, en cas de succès.

B. LA DÉCONCENTRATION

Constituant un élément indissociable de la décentralisation, la déconcentration devrait traduire l' adaptation de l'organisation de l'Etat à la " nouvelle donne " issue de la décentralisation. Pourtant, les collectivités locales ont trop souvent le sentiment légitime que cette adaptation n'a en réalité pas été faite. La déconcentration doit donc constituer un objectif prioritaire de la réforme de l'Etat. Elle doit faire des services déconcentrés, sous l'autorité des préfets, de véritables interlocuteurs pleinement responsables des collectivités locales. Elle doit permettre de redéfinir leurs missions en fonction de la répartition des compétences issue des lois de décentralisation.

Sous la précédente législature, plusieurs mesures ont été arrêtées dans ce sens, à la suite des orientations fixées par la circulaire du Premier ministre du 26 juillet 1995 relative à la préparation et à la mise en oeuvre de la réforme de l'Etat et des services publics :

- création d'un fonds pour la réforme de l'Etat (circulaires du 9 juillet 1996 et du 7 mars 1997) ;

- accentuation de la déconcentration de la gestion des personnels, déconcentration de la procédure de mise à disposition des fonctionnaires (décret n° 97-695 du 31 mai 1997) ;

- approfondissement de la déconcentration des crédits d'intervention et engagement dans la voie de la globalisation des crédits par une réduction du nombre d'articles budgétaires et réforme du contrôle financier local (décret du 16 juillet 1996) ;

- renforcement de la capacité d'action du préfet dans le domaine immobilier, notamment par l'institution à son profit d'une procédure d'avis conforme pour les projets immobiliers des services de l'Etat dans son département (décret n° 97-142 du 13 février 1997) ;

- simplification des régimes d'autorisation et de déclaration administrative préalable (décret n° 97-503 du 21 mai 1997) ;

- reconnaissance du préfet comme autorité de droit commun pour prendre des décisions administratives individuelles, entrant dans le champ des compétences des administrations civiles de l'Etat (décret n° 97-34 du 15 janvier 1997). Ces dispositions ont été précisées sous la présente législature par plusieurs décrets en date des 19 et 24 décembre 1997.

Dans le cadre des décisions arrêtées lors du comité interministériel de la réforme de l'Etat du 26 février 1998 , plusieurs mesures ont été préparées afin d'améliorer l'efficacité des services déconcentrés et la qualité des services rendus. Des groupes de travail ont été mis en place dans différents domaines (jeunesse, éducation et formation, lutte contre les exclusions, santé publique, emploi et développement économique, aménagement durable du territoire). Deux groupes transversaux ont par ailleurs été consacrés respectivement au renforcement de la coordination interministérielle de l'Etat et au fonctionnement des services déconcentrés.

Un bilan des réflexions menées par ces groupes de travail a été établi, en octobre 1998, par le délégué interministériel à la réforme de l'Etat qui a formulé à cette occasion plusieurs propositions : projet territorial, délégation inter-services, développement de l'évaluation interministérielle des politiques publiques, élaboration des programmes pluri-annuels de modernisation, simplification et globalisation des crédits, généralisation des systèmes d'information territoriaux.

Le comité interministériel à la réforme de l'Etat du 13 juillet 1999 , estimant qu'une démarche tendant à une recomposition fonctionnelle des services se heurtait à des rigidités statutaires  et rencontrait  de nombreux obstacles sur le plan structurel , a préféré explorer d'autres voies. Ainsi, a été expérimentée la formule du projet territorial de l'Etat dans le département qui doit constituer " une démarche collective associant tous les services déconcentrés de l'Etat dans le but d'élaborer une stratégie commune et de définir une organisation optimale ". En outre, les systèmes d'information territoriaux qui permettent l'échange d'informations et l'utilisation partagée de bases de données seront généralisés. Les décrets n° 99-895 et n°99-896 du 20 octobre 1999 ont par ailleurs confié aux préfets la compétence pour fixer l'organisation des services déconcentrés placés sous leur autorité. Enfin, les modes de coopération entre les services de l'Etat seront développés afin d'accroître leur efficacité. Les mesures devraient être complétées par une amélioration des procédures budgétaires. Un bilan d'étape sera présenté par la délégation interministérielle à la réforme de l'Etat en février 2000.

Notons, enfin, qu'au titre de la déconcentration, 88 emplois ont été supprimés en administration centrale au profit de l'administration territoriale depuis 1994.

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2000

Effort financier de l'Etat en faveur des collectivités locales

 

1999 LFI révisée

2000 PLF

Évolution
en %
2000/1999 rév.

I. DOTATIONS SOUS ENVELOPPE

1-1 Dotation globale de fonctionnement

dont : Majoration exceptionnelle de la dotation de solidarité urbaine (1)

Majoration exceptionnelle de la dotation d'intercommunalité (1)

Majoration exceptionnelle pour le recensement de la population (1)

1-2 Dotation spéciale instituteurs

1-3 Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle

1-4 Fonds national de péréquation (2)

1-5 Dotation élu local

1-6 DGE des départements (AP)

1-7 DGE des communes (AP)

1-8 Dotation régionale d'équipement scolaire (AP)

1-9 Dotation départementale d'équipement des collèges (AP)

1-10 Dotation générale de décentralisation (3)

1-11 Dotation générale de décentralisation Corse (4)

1-12 Dotation de décentralisation formation professionnelle

1-13 Dotation de compensation de la taxe professionnelle (hors R.E.I)

108.882

500

0

0


2.602

3.383

827

273

2.741

2.558

3.443

1.710

18.971

1.340

7.899

12.278

111.386

500

500

200


2.353

3.721

825

276

2.840

2.650

3.567

1.771

10.013

1.351

7.964

11.856

2,30

-

-

-

- 9,56

9 ,98

- 0,26

0 ,82

3,60

3,60

3,60

3,60

-47,22

0,82

0,82

- 3,44

TOTAL I AVANT RÉFORME DE LA CMU

166.907

169.699

1,67

TOTAL I

166.907

169.699

- 3,80

II. COMPENSATION DE LA RÉFORME FISCALE

2-1 Compensation de la perte de produit due à la suppression de la part salaires des bases de la taxe professionnelle

2-2 Compensation de la perte de produit due à la suppression de la part régionale des DMDO

2-3 Compensation de la perte de produit due à la nouvelle diminution de la part départementale des DMDO (3)

13.119

5.092

1.200

22.600

5.134

4.604

72,27

0,82

-

TOTAL II

19.410

32.338

66,60

III. DOTATIONS HORS ENVELOPPE

3-1 FCTVA

3-2 Prélèvement au titre des amendes forfaitaires de la police de circulation

3-3 Subventions et comptes spéciaux du Trésor

dont - Subventions de fonctionnement (divers ministères )

- Subventions d'équipement de divers ministères (AP)

- Comptes spéciaux du Trésor (AP)

3-4 Compensations d'exonérations et de dégrèvements législatifs :

dont - Réduction pour embauche et investissement (DCTP)

- Contrepartie de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties

- Compensations de diverses exonérations relatives à la fiscalité locale

- Contrepartie de divers dégrèvements législatifs

20.512

2.000

7.070

3.855

1.288

1.233

320

(5) 11.851

49.128

21.820

2.040

7.466

3.741

1.143

50

225

(6) 12.263

49.484

6,38

2,00

5,61

- 2,96

- 11,21

-

- 29,69

3,48

0,72

TOTAL III

97.256

98.233

1,00

TOTAL GÉNÉRAL

283.573

291.143

2,67

IV - FISCALITE TRANSFEREE (POUR MÉMOIRE)

43.572

41.773

- 4,13

(1) hors enveloppe normée ; (2) dont 150 MF hors enveloppe normée en 1999, 2000 et 2001 ; (3) dont crédits Culture et compensation 1999 DMTO des départements intégrée dans la DGD au sein de l'enveloppe normée (base 1999 pour 2000) ; (4) dont crédits Culture ; (5) dont 255 MF en 1999 à transférer en gestion au FNPTP, au titre de la part à la charge de l'Etat dans le cadre de la loi relative au pacte de relance pour la ville ; (6) dont 310 MF en 2000 à transférer en gestion au FNPTP, au titre de la part à la charge de l'Etat dans le cadre de la loi relative au pacte de relance pour la ville.

Hypothèses retenues : - Prix : 1998 : + 0,6 % ; 1999 : + 0,5 % ; 2000 : 0,9 %

- Pib vol : 1998 : + 3,2 %. 1999 : + 2,3 % ; 2000 : + 2,8 %

II. LES FINANCES LOCALES : UN ESSOUFFLEMENT DES MÉCANISMES DES CONCOURS DE L'ÉTAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES DANS UN CONTEXTE PRÉOCCUPANT POUR L'AVENIR DU SYSTÈME DE FINANCEMENT LOCAL

A. L'ÉVOLUTION DES CONCOURS DE L'ÉTAT ; LA DEUXIÈME ANNÉE D'APPLICATION DU " CONTRAT DE CROISSANCE ET DE SOLIDARITÉ "

Les concours de l'Etat aux collectivités locales évolueront, pour la deuxième année consécutive, conformément aux règles fixées par l' article 57 de la loi de finances pour 1999 au titre du " contrat de croissance et de solidarité ".

Succédant au " pacte de stabilité " appliqué pour la période 1996-1998 ( article 32 de la loi de finances pour 1996), ce " contrat " -improprement qualifié comme tel puisqu'il désigne en réalité une décision unilatérale de l'Etat- doit régir les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales en 1999, 2000 et 2001. A l'instar du précédent pacte, le nouveau " contrat de croissance et de solidarité " retient donc la pratique d'une programmation pluri-annuelle de l'évolution des concours de l'Etat.

Les principales dotations de l'Etat sont regroupées au sein d'une enveloppe dite " normée " dont le montant évolue en fonction d'un indice composé des prix de l'année à venir et -innovation par rapport au pacte- d'une fraction du taux de croissance du PIB de l'année en cours. La croissance du PIB prise en compte qui atteint 20 % en 1999, s'élèvera 25 % en 2000 et 33 % en 2001. Les dotations concernées sont les dotations dites " actives " : la dotation globale de fonctionnement (DGF), la dotation spéciale instituteurs (DSI), la dotation particulière élu local, la dotation de l'Etat au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP), et au fonds national de péréquation (FNP), la dotation globale d'équipement (DGE), les dotations générales de décentralisation (DGD, DGD Corse, DGD formation professionnelle) ainsi que les dotations d'équipement scolaire des départements et des régions (DDEC, DRES).

Au sein de l'enveloppe " normée ", les dotations évoluent selon leur propre règle d'indexation, à l'exception de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) qui constitue la " variable d'ajustement ". En conséquence, le montant de cette dernière dotation est déterminé, en fonction de l'évolution des autres dotations incluses dans l'enveloppe " normée " de manière à respecter la règle d'indexation.

Dans le but de maintenir la péréquation, l'article 57 III de la loi de finances pour 1999 a par ailleurs prévu que la diminution de la DCTP serait opérée de manière différenciée selon les collectivités.

En conséquence, les communes éligibles l'année précédente à la dotation de solidarité urbaine (DSU), les communes bénéficiaires de la première fraction (bourgs-centre) de la dotation de solidarité (DSR), les départements éligibles à la dotation de fonctionnement minimale ainsi que les régions bénéficiaires du fonds de correction des déséquilibres régionaux au titre de l'année précédente, ne supporteront entre 1999 et 2001 qu'une diminution de leur DCTP égale à la moitié de celle qu'elles auraient dû subir normalement.

L'article 58 de la loi de finances pour 1999 a, pour sa part, prévu une compensation par le FNPTP des pertes subies sur leur DCTP par les communes éligibles à certaines dotations de solidarité.

En outre, La DSU a bénéficié en 1999 d'un abondement, hors " contrat de croissance et de la solidarité ", de 500 millions de francs. Enfin, la FNP a bénéficié d'un abondement de 150 millions de francs destiné à compenser la baisse du solde du FNPTP -qui permet de financer ce fonds- liée à la compensation des pertes de DCTP.

1. L'évolution des dotations incluses dans l'" enveloppe normée " du " contrat de croissance et de solidarité "

Calculée dans les conditions rappelées ci-dessus, l'" enveloppe normée " connaît une progression limitée à 1,475 % . Elle devrait donc en principe s'établir à 166,957 milliards de francs . Mais elle fait en outre l'objet de plusieurs ajustements qui affectent son montant : plusieurs abondements exceptionnels bénéficient à la DGF à hauteur de 1,850 milliard de francs ; le montant de la DSI est réduit de 269 millions de francs en raison de l'intégration progressive des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles ; le montant de la DGD est réduit de 9,1 milliards de francs en raison du transfert à l'Etat de la compétence départementale relative à l'aide médicale.

a) La dotation globale de fonctionnement (DGF)

La DGF s'élève à 112,036 milliards de francs en 2000, soit une progression limitée à 2,04 % par rapport au montant inscrit dans la loi de finances pour 1999. Mais ce montant n'est obtenu que grâce à plusieurs abondements exceptionnels " hors enveloppe normée ".

Conformément à l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales, la DGF doit progresser comme le taux d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement, estimé à 0,9 % pour 2000, majoré de la moitié du taux d'évolution du PIB en volume de l'année précédente, estimé pour sa part à 2,3 % pour 1999, soit un taux qui devrait atteindre 2,05 % pour 2000.

Mais cet indice s'applique à une DGF de 1999 " recalée ", c'est-à-dire recalculée en fonction des derniers indices économiques connus. Or, l'indice des prix s'est élevé à 0,5 % (contre 1,2 % estimé en loi de finances initiale) et le PIB en volume au titre de 1998 a été de 3,2 % (contre 3,1 % prévu en loi de finances pour 1999). Le taux de progression de la DGF 1999 s'élève en conséquence à 2,1 % et non à 2,75 % initialement prévus. En conséquence, le montant de la DGF 1999 " recalée " est de 108,638 milliards de francs (contre 109,545 milliards de francs inscrits en loi de finances initiale).

Compte tenu de ce " recalage " à la baisse , la DGF pour 2000 devrait s'élever à 110,865 milliards de francs .

Elle doit en outre subir les effets d'une régularisation négative de la DGF pour 1998, qui s'élève à 679,731 millions de francs . Dans ces conditions, la DGF pour 2000 atteint 110,186 milliards de francs , soit une progression de 0,821 % par rapport au montant révisé de 1999. C'est ce taux que le Gouvernement retient pour indexer les dotations qui doivent évoluer " comme la DGF ".

Mais la DGF bénéficie par ailleurs en 2000 de plusieurs abondements extérieurs : 500 millions de francs en faveur de la DSU (soit un montant identique à celui prévu l'an passé), 500 millions de francs prévus par l'article 105 de la loi du 12 juillet 1999 pour financer la création des nouvelles communautés d'agglomération ; 200 millions de francs destinés à prendre en compte les résultats du recensement dans la DGF (un projet de loi prévoyant par ailleurs un " lissage " sur trois ans des hausses et des baisses de population constatées en 1999) ; 150 millions de francs affectés à la fraction " bourgs centre " de la dotation de solidarité rurale ; 500 millions de francs affectés l'an passé à la dotation de solidarité urbaine qui sont consolidés.

Au total, compte tenu de ces abondements exceptionnels qui s'élèvent à 1,850 milliard de francs , la DGF s'élève à 112,036 milliards de francs et progresse de 2,04 % par rapport au montant révisé de 1999.

Bilan de la répartition de la DGF en 1999

La DGF à répartir s'est élevée à 109,289 milliards de francs en 1999 (+ 2,779 % par rapport à 1998), soit 90,794 milliards de francs pour les communes et leurs groupements et 18,462 milliards de francs pour les départements.

En application de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, le comité des finances locales a décidé de fixer à 54 % du taux de croissance des ressources totales de la DGF le taux de progression de la dotation forfaitaire (après 53 % en 1998, 52 % en 1997 et 55 % en 1996). La dotation forfaitaire a par conséquent, atteint 80,658 milliards de francs , soit une progression de 1,5 %.

La dotation d'aménagement s'est, pour sa part, élevée à 10,135 milliards de francs répartis entre la DGF des groupements, la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation de solidarité rurale (DSR).

La DGF des groupements s'est établie à 5,604 milliards de francs (+ 6,53 %). Le comité des finances locales a fixé les crédits mis en répartition de telle sorte que la dotation moyenne par habitant hors garantie progresse, pour chaque catégorie de groupements, de 1,5 % par rapport à 1998, soit un taux équivalent à celui de le dotation forfaitaire des communes.

Même si elle a été légèrement inférieure à celle des années précédentes, la croissance du nombre de groupements à fiscalité propre reste forte (+ 6,53 %). Au 1 er janvier 1999, on dénombrait 1.680 établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, regroupant 19.065 communes, soit une population totale de 34,4 millions d'habitants, dont 12 communautés urbaines, 1.654 communautés de communes et districts, 5 communautés de villes et 9 syndicats d'agglomération nouvelle.

Les crédits consacrés aux communautés de communes et aux districts se sont élevés à 2,625 milliards de francs, hors garantie (laquelle atteint 30 millions de francs). En 1999, sur les 1.461 groupements de cette catégorie ayant deux ans d'existence ou plus, 629 groupements ont vu leur dotation stagner ou augmenter et 769 ont subi une diminution de leur dotation. 95 groupements bénéficient de la garantie de progression minimale (contre 75 en 1998). 194 groupements ont été soumis à un écrêtement de leur dotation (contre 192) en 1998.

Groupements les plus intégrés et ayant un coefficient d'intégration fiscale moyen qui s'élève à 43,7447 % , les communautés urbaines ont bénéficié de 2,2 milliards de francs hors garantie (laquelle s'élève à 10 millions de francs). Ils ont l'attribution moyenne par habitant la plus élevée.

Les communautés de villes et groupements assimilés -soit 99 groupements- se sont partagés 428,979 millions de francs hors garantie (12 millions de francs). Le nombre de groupements ayant opté pour le régime fiscal des communautés de villes, à savoir la taxe professionnelle unique, a fortement augmenté ces dernières années, passant de 68 en 1997 à 84 en 1998 et 99 en 1999. 53 groupements perçoivent une garantie minimale d'attribution.

Enfin, les syndicats d'agglomération nouvelle ont perçu 198,063 millions de francs hors garantie, laquelle a représenté 10 millions de francs.

Cette répartition de la DGF des groupements met donc à nouveau en évidence l'impact croissant du financement de l'intercommunalité sur la masse globale de la DGF, sous l'effet de la monté en puissance de l'intercommunalité à fiscalité propre. Ces données doivent retenir l'attention au moment où la réforme opérée par la loi du 12 juillet 1999, sur laquelle votre rapporteur pour avis reviendra, entre en application.

Les crédits alloués à la dotation de solidarité urbaine (DSU) ont atteint 3,297 milliards de francs en 1999, soit une progression significative de 45 %. Le montant prend en compte 40 millions de francs prélevés sur la DGF de la région d'Ile-de-France en application de l' article L. 4414-6 du code général des collectivités territoriales et, d'autre part, une majoration de 500 millions de francs prévue par l'article 59 de la loi de finances pour 1999 (qui sera reconduite en 2000). Conformément à la faculté qui lui est ouverte par l'article L. 2334-13 du code général des collectivités territoriales, le comité des finances locales a fixé la part de la croissance de la dotation d'aménagement -hors dotation des groupements- réservée à la DSU à 55 %.

680 communes de plus de 10.000 habitants (679 en 1998), représentant 23,311 millions d'habitants, se sont partagées 3,07 milliards de francs. La dotation par habitant s'est élevée à 137,65 francs (contre 95,22 francs en 1998). Parmi ces communes, 6 ont été éligibles pour la première fois, 5 communes perdant le bénéfice de la DSU mais pouvant prétendre à une garantie d'attribution égale à 50 % de la dotation 1998.

L'indice synthétique des ressources et des charges -issu de la loi du 26 mars 1996- semble avoir joué son rôle de manière satisfaisante. Pour une dotation moyenne par habitant qui s'élève à 137,65 francs , la dotation la plus forte s'établit à 561,23 francs et la plus faible à 24,11 francs . On notera que le montant attribué à 548 communes sur les 680 éligibles varie entre 35 % et 55 % par rapport à l'exercice 1998.

Parmi les communes de 5.000 à 9.929 habitants , 102 sont éligibles à la DSU pour un montant de 98,328 millions de francs. 4 d'entre elles sont éligibles pour la première fois. En revanche, 4 communes appartenant à cette strate démographique ne sont plus éligibles à la DSU et perçoivent la garantie d'attribution égale à 50 % de leur dotation en 1998.

La dotation de solidarité rurale s'est élevée à 2,204 milliards de francs , dont 2,123 milliards de francs pour la métropole.

Le comité des finances locales a décidé -comme en 1996, 1997 et 1998- de faire évoluer la fraction bourgs-centre de 20 % de la croissance de la DSR par rapport à 1998.

592,931 millions de francs , y compris la garantie, ont, en conséquence, été mis en répartition en métropole en 1999 (soit une progression de + 16,42 %) au titre de la fraction bourgs-centre.

4.077 communes (contre 4.067 en 1998) ont bénéficié de cette fraction, représentant une population de 10,459 millions d'habitants. L'attribution moyenne par habitant, hors garantie, s'est élevée à 58,67 francs (+ 16,38 %). 21 communes sont devenues éligibles en 1999 tandis que 31 communes, n'étant plus éligibles, ont bénéficié d'une attribution au titre de la garantie, égale à la moitié de la dotation perçue l'année précédente. Le plus grand nombre de communes éligibles appartient à la strate des communes entre 1.000 et 2.000 habitants (1.221 communes, soit près de 34 % des communes éligibles).

Le montant des crédits mis en répartition, au titre de la fraction de péréquation , a atteint 1,528 milliard de francs en 1999 pour les communes de métropole (+ 28,03 %), après prélèvement de 60,623 millions de francs pour les communes d'outre-mer.

33.653 communes bénéficient d'une attribution au titre de la fraction de péréquation en 1999 (contre 33.639 en 1998), représentant 29,3 millions d'habitants (+ 0,26 %). La dotation moyenne par habitant s'est élevée à 52,07 francs (contre 40,78 francs en 1998, soit + 27,68 %). 119 communes ont bénéficié pour la première fois de cette fraction de péréquation. 105 commune ont cessé d'en bénéficier.

En 1999, 3.975 communes ont cumulé des attributions au titre des deux fractions de la DSR (contre 3.971 en 1998).

La DGF des départements a progressé de 2,7808 % (contre 1,3821 % en 1998) pour s'établir à 18,462 milliards de francs .

24 départements ont bénéficié de la dotation de fonctionnement minimale en 1999. Il s'agit des mêmes départements qu'en 1998. En revanche, le département de Seine-et-Marne est redevenu contributeur en 1999. En conséquence, afin d'éviter que l'enveloppe affectée à la dotation du fonctionnement minimale ne soit surévaluée, le comité des finances locales a décidé de diminuer de 40 millions de francs le prélèvement sur la DGF des départements. Au total, l'enveloppe de la dotation de fonctionnement minimale s'est donc élevée à 574,026 millions de francs.

b) La dotation spéciale instituteurs (DSI)

Destinée à compenser les charges supportées par les communes dans le cadre du droit au logement des instituteurs, la DSI doit évoluer comme la DGF (soit 0,821 % par rapport à 1999).

Toutefois, elle s'établit en 2000 à 2,353 milliards de francs contre 2,602 milliards de francs en 1999, soit une baisse de 9,56 % imputable à la réduction du nombre d'ayants-droit par suite de l'intégration progressive des instituteurs dans le corps des professeurs des écoles.

c) Le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) et de fonds national de péréquation (FNP)

Comme en 1999, le FNPTP devrait être alimenté en 2000 par quatre ressources : les deux dotations de l'Etat qui évoluent comme les recettes fiscales nettes de celui-ci (soit +0,36991 %) ; le produit de la cotisation nationale de péréquation de la taxe professionnelle (dont le montant n'est pas encore connu) ; les excédents de fiscalité de la Poste et de France Télécom qui atteindront 2,076 milliards de francs (après 1,733 milliard de francs en 1999 et 1,336 milliard de francs en 1998).

Hors cotisation de péréquation, les ressources du FNPTP atteindront 3,721 milliards de francs (+9,98 %). Toutefois, le FNPTP devra supporter la compensation des exonérations de taxe professionnelle des entreprises implantées dans les zones franches urbaines prévues par la loi du 24 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville. Conformément au souhait du Sénat, cette compensation par le FNPTP est néanmoins limitée à la croissance annuelle du produit de fiscalité de la Poste et de France Télécom, soit 342,9 millions de francs en 2000. En conséquence, le FNPTP percevra au titre de ces excédents de fiscalité 1,733 milliard de francs (2,076 milliards de francs - 342,9 millions de francs).

Bilan de la répartition du FNPTP en 1999

Première fraction du FNPTP, la dotation de développement rural (DPR) s'est élevé à 735,283 millions de francs pour les collectivités éligibles de métropole.

Confirmant le mouvement observé depuis 1992, le nombre de groupements éligibles continue à progresser de manière très dynamique (+ 7,41 % entre 1998 et 1999 ; 939 en 1995, 1.478 en 1999), principalement en raison de l'augmentation du nombre de communautés de communes.

Les 1.478 établissements publics de coopération intercommunale éligibles à la DDR représentent une population de 13,6 millions d'habitants et regroupent 16.563 communes. Cependant, comme les années passées, il existe une forte dispersion de ces groupements sur le territoire. 26 départements comportent plus de 20 groupements éligibles alors que 25 d'entre eux en ont moins de 10 . En outre, 23 départements n'ont pas été concernés par la répartition de la fraction réservée aux groupements.

31.535 communes ont, par ailleurs, été éligibles à la DDR (soit un nombre stable par rapport à 1998). Comme en 1998, une grande disparité peut être constatée : 4 départements comptent moins de 100 communes éligibles mais 17 départements en comptent plus de 500.

En application de l'article 108 de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, les communes ne seront plus éligibles . En effet, seuls seront désormais éligibles les groupements de communes à fiscalité propre exerçant une compétence en matière d'aménagement de l'espace et de développement économique dont la population regroupée n'excède pas 60.000 habitants et qui ne satisfont pas aux seuils nécessaires pour une transformation en communauté d'agglomération, si les deux tiers au moins des communes du groupement comptent moins de 5.000 habitants .

Pour ce qui est de la seconde fraction du FNPTP , sa première part -qui est destinée à compenser les pertes de bases de taxe professionnelle et qui, depuis la loi de finances rectificative n° 97-1239 du 29 décembre 1997, ne peut excéder 27 % des ressources de la seconde fraction (contre 25 % les années précédentes)- a atteint 948,854 millions de francs.

Les modalités de versement de la compensation financière ont par ailleurs été modifiées par la loi du 29 décembre 1997 qui a prévue une compensation dégressive sur trois ans (et non plus sur quatre ans).

3.488 collectivités ont enregistré, entre 1998 et 1999, une perte de produit de taxe professionnelle pour un montant de 380,165 millions de francs, compensée à 90 %.

L'article 58 de la loi de finances pour 1999 a, par ailleurs, institué une seconde part , afin de compenser pendant les trois années du " contrat de croissance et de solidarité " la diminution de dotation de compensation de la taxe professionnelle (hors réduction pour embauche ou investissement) subie par des communes éligibles à certaines dotations de solidarité. Ces communes ne doivent supporter que la moitié des pertes de DCTP qu'elles auraient normalement dû enregistrer (soit - 6,13 % en 1999). Au total, la compensation des diminutions de DCTP assurée par le FNPTP a représenté un coût de 569,913 millions de francs.

Enfin, la dernière part dite " part résiduelle ", qui est attribuée aux communes qui connaissent des difficultés financières et dont le budget en déséquilibre a été transmis à la chambre régionale des comptes (son montant ne peut excéder 5 % des ressources de la seconde fraction) a été fixée à 3 millions de francs par le comité des finances locales, montant faible qui s'explique par les très faibles taux de consommation constatés les années précédentes.

Quant au Fonds national de péréquation (FNP), sa part principale -destinée à assurer une péréquation de la richesse fiscale entre les communes en fonction de leur potentiel fiscal et de leur effort fiscal et qui est alimentée par le solde de la seconde fraction du FNPTP- s'est élevée à 2,820 milliards de francs .

18.122 communes ont bénéficié de la part principale (soit le même nombre qu'en 1998).

La seconde part dite " majoration " -réservée aux communes de moins de 200.000 habitants éligibles à la part principale et ayant un potentiel fiscal, calculé à partir de la seule taxe professionnelle, inférieure à 20 % de la moyenne de la strate démographique correspondante-s'est élevée à 756,6 millions de francs . Elle a bénéficié à 15.795 communes (15.506 communes en 1998), soit une attribution moyenne de 35,67 francs par habitant (27,62 %).

15.697 communes ont bénéficié des deux parts du FNP, soit une dotation moyenne par habitant de 138,73 francs (contre 127,27 francs en 1998).

d) La dotation élu local

Evoluant comme la DGF, la dotation élu local a pour objet d'aider les petites communes rurales à faire face aux charges résultant des dispositions relatives aux conditions d'exercice des mandats locaux. Elle s'élève à 276 millions de francs en 2000 (contre 273 millions de francs en 1999, soit + 0,82 %).

e) La dotation globale d'équipement (DGE)

La DGE des communes -qui est indexée sur la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques- atteint 2,65 milliards de francs , soit + 3,6 %.

La réforme opérée en 1996 a eu pour effet de supprimer la première part de la DGE communale. Les bilans chiffrés d'application portant sur les crédits délégués en 1996, 1997 et 1998 font ressortir que 70 % des dossiers présentés ont été pris en compte et que le taux moyen de subvention s'élève à 29 %. On constate également une augmentation du montant des investissements pour lesquels une participation de la DGE est sollicitée.

La DGE des départements -également indexée sur la FBCF des administrations publiques- s'élève à 2,84 milliards de francs .

f) Les dotations de compensation financière des transferts de compétences

- La dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) et la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC) doivent progresser comme le taux prévisionnel d'évolution de la FBCF des administrations publiques (soit + 3,6 %). La DRES s'élève ainsi à 3,567 milliards de francs et la DDEC à 1,771 milliard de francs.

- La dotation générale de décentralisation (DGD), inscrite au chapitre 41-56 du ministère de l'intérieur, assure la couverture des charges résultant des transferts de compétences, qui ne sont pas compensées par la fiscalité transférée. Elle doit en principe évoluer comme la DGF. Son montant s'élèvera en réalité à 10,013 milliards de francs , soit une diminution de 47,22 %. Cette évolution s'explique essentiellement par plusieurs mouvements affectant la DGD des départements, notamment une réduction de 9,1 milliards de francs en application de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle qui a recentralisé l'aide médicale générale.

- La DGD spécifique à la collectivité territoriale de Corse -qui évolue comme la DGF (soit + 0,8 %)- atteint 1,35 milliard de francs .

- La DGD formation professionnelle -évoluant dans les mêmes conditions- passe de 7,899 à 7,964 milliards de francs .

g) La dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP)

Variable d'ajustement de l'enveloppe normée, la DCTP doit évoluer de manière à assurer le respect de la norme d'évolution de l'enveloppe, qui prend en compte 25 % de la croissance du PIB. En 2000, elle s'établira à 11,8 milliards de francs , soit une baisse de 3,4 % (après - 12,% en 1999).

Le dispositif prévu en loi de finances pour 1999 ayant été reconduit, les collectivités éligibles aux dotations de solidarité ne supporteront que la moitié de cette réduction du montant de la DCTP.

2. L'évolution des dotations exclues de l' " enveloppe normée " du " contrat de croissance et de solidarité "

Ces dotations qui évoluent de manière autonome devraient s'élever à 98,233 milliards de francs en 2000 (contre 96,818 milliards de francs en 1999).

a) Le fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)

Le montant prévisionnel du FCTVA inscrit dans le projet de loi de finances s'élève à 21,8 milliards de francs (contre 20,5 milliards de francs en 1999), soit une hausse de 6,3 %.

Au cours des dernières années, les règles applicables au FCTVA ont connu plusieurs modifications, notamment grâce à des initiatives du Sénat qui a jugé nécessaire de mieux adapter ces règles aux réalités locales.

L' article 30 de la loi de finances pour 1998 a permis de verser directement les attributions du FCTVA aux établissements publics de coopération intercommunale pour les investissements qu'ils réalisent dans l'exercice de leurs compétences sur le territoire des communes membres.

L' article 83 de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier a autorisé les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) à percevoir directement ces mêmes attributions au titre des dépenses qu'ils réalisent sur les biens qui ont été mis à leur disposition. La même loi ( article 94 ) a habilité les établissements publics de coopération intercommunale à exercer les compétences en matière d'édifices cultuels, leur ouvrant ainsi la faculté d'engager les dépenses nécessaires pour l'entretien et la conservation des édifices du culte. Enfin, la loi du 2 juillet 1998 a permis, notamment pour liquider le FCTVA, d'utiliser le projet de compte administratif rejeté par l'assemblée délibérante, s'il est conforme au compte de gestion et après avis de la chambre régionale des comptes ( article 109 ).

L' article 61 de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 portant loi de finances pour 1998 a accordé aux syndicats mixtes composés exclusivement de membres éligibles au fonds, le bénéfice des attributions du FCTVA pour les travaux qu'ils effectuent sur le patrimoine de leurs membres.

De nouvelles précisions ont été apportées par la loi de finances pour 1999 et par la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 portant loi de finances rectificative pour 1998. Il est ainsi désormais possible d'attribuer le FCTVA au titre des dépenses réalisées par les collectivités locales et leurs groupements sur le patrimoine de tiers à l'occasion de travaux d'urgence en matière de lutte contre les avalanches, glissements de terrain, inondations et défense contre la mer. En outre, peuvent être éligibles au Fonds des dépenses réalisées par les collectivités locales ou leurs groupements sur des biens des sections de communes.

La loi de finances rectificative pour 1998 a par ailleurs donné compétence à l'assemblée délibérante des collectivités et groupements pour l'imputation en section d'investissement des dépenses d'équipement relatives aux biens meubles de faible valeur, lesquelles peuvent ouvrir droit à une attribution au titre du FCTVA.

Enfin, la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale a prévu certaines adaptations du régime du FCTVA, afin de prendre en compte la transformation des districts, des communautés de villes et des syndicats d'agglomération nouvelle.

b) Le prélèvement au titre des amendes de police relatives à la circulation routière

Le produit des amendes de police devrait atteindre 2,040 milliards de francs en 2000, soit une hausse de 2 %.

c) Les subventions et comptes spéciaux du Trésor

Les subventions de fonctionnement des ministères s'élèvent à 7,466 milliards de francs en 2000, contre 7,069 milliards de francs en 1999, soit une progression de 5,61 %.

Les comptes spéciaux du Trésor s'établissent à 1,143 milliard de francs , soit une baisse de 11,21 %.

d) La compensation d'exonération et de divers dégrèvements législatifs

- La réduction pour embauche ou investissement (REI) de la DCTP est en voie d'extinction en application des dispositions votées l'an passé qui ont prévu sa suppression progressive en contrepartie de la suppression de la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle. Elle s'établit, en conséquence à 50 millions de francs .

- La contrepartie de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties s'élèvera à 225 millions de francs en 2000, soit une baisse de 29,7 % qui s'expliquerait par une diminution du nombre de bénéficiaires de l'exonération.

- La compensation des exonérations relatives à la fiscalité locale atteindra 12,263 milliards de francs (soit + 3,48 %).

- La compensation de divers dégrèvements législatifs atteindrait 49,48 milliards de francs (+ 0,72 %). Le dégrèvement qui résulte du plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée occupe une place prépondérante (39 milliards de francs). Deux mesures adoptées en première lecture par l'Assemblée nationale vont en outre accroître le coût des dégrèvements : le dégrèvement de taxe d'habitation pour les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion (RMI) l'année suivant celle où ils retrouvent un emploi (400 millions de francs) ; l'abaissement à 1.200 francs (contre 1.500 francs) du montant maximal de taxe d'habitation supporté par les contribuables modestes (500 millions de francs).

3. La compensation de la réforme fiscale

Faisant l'objet d'une présentation spécifique dans le tableau retraçant l'effort financier de l'Etat aux collectivités locales, cette compensation s'élève à 32,338 milliards de francs .

Elle correspond, d'une part, à la suppression de la part salariale dans les bases de la taxe professionnelle, pour un montant de 22,6 milliards de francs , à la suppression de la part régionale des droits de mutation à titre onéreux ( 5,134 milliards de francs ) et, enfin, à une nouvelle diminution de la part départementale de la même taxe ( 4,604 milliards de francs ).

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L'évolution des concours de l'Etat aux collectivités locales en 2000 met en évidence l'insuffisance de l'indexation dont ils font l'objet. Bien que cette indexation intègre 25 % de la croissance du PIB, l'enveloppe normée devrait connaître une progression limitée de 1,475 %. Les collectivités locales sont ainsi les " oubliées " du partage des fruits de la croissance , à laquelle elles apportent pourtant une contribution décisive en réalisant près de 75 % des investissements publics.

Ce constat est d'autant plus préoccupant que les collectivités locales doivent subir des charges croissantes -sur lesquelles votre rapporteur pour avis reviendra- dont elles n'ont pas la maîtrise. Tel est en particulier le cas des conséquences de l'accord salarial du 10 février 1998 dont le coût s'élève à 9,5 milliards de francs sur trois ans. Or, ces charges nouvelles -bien souvent imposées par l'Etat seul- ne sont pas prises en compte dans le cadre du " contrat de croissance et de solidarité ", contrairement aux demandes répétées de votre commission des Lois au cours des exercices précédents.

Les conditions d'évolution de la DGF d'une année sur l'autre ne paraissent pas non plus satisfaisantes . Si, en principe, la DGF doit progresser selon un indice qui prend en compte les prix et 50 % du taux de croissance du PIB, les opérations de recalage de la base de calcul et de régularisation au titre du "trop perçu " des exercices antérieurs altèrent sensiblement la progression de cette dotation essentielle au fonctionnement des collectivités locales. Ainsi, avant la prise en compte des abondements exceptionnels, la DGF en 2000 n'augmenterait que de 0,821 % au lieu des 2,05 % qui auraient résulté de l'indice. Au total, la DGF aura moins augmenté entre 1998 et 2000 que les dépenses supplémentaires imposées aux collectivités locales au titre du seul accord salarial du 10 février 1998.

Cette faible évolution est d'autant plus préoccupante que plusieurs autres dotations de fonctionnement doivent évoluer comme la DGF. En conséquence, le taux de 0,821 % qui est appliqué fait progresser ces dotations moins vite que l'évolution prévisionnelle des prix.

L'impossibilité dans laquelle la DGF est placée de faire face à de nouvelles charges de fonctionnement ressort également des conséquences du recensement général de la population de 1999.

Si le droit en vigueur était appliqué, la prise en compte dans la DGF d'une population supplémentaire de 2 millions d'habitants représenterait un coût de 1,4 milliard de francs pour la dotation forfaitaire. La DGF étant une " enveloppe fermée ", cette augmentation se répercuterait sur la dotation d'aménagement au sein de laquelle la DSU pourrait baisser de 23 % et le DSR de 28 %. Dans ces conditions, afin de prévenir de telles conséquences, le Gouvernement a soumis au Parlement un projet de loi prévoyant un " lissage " sur trois ans de la prise en compte du recensement et prévu un abondement de la DGF.

En outre, le poids croissant du financement de l'intercommunalité -comme votre commission des Lois l'avait souligné- fait que toute nouvelle incitation par le biais de la DGF risque de mettre en cause tout l'équilibre déjà fragile de cette dotation.

Dans ce contexte d'une évolution insuffisante de la DGF, se développe la pratique des abondements exceptionnels : abondement de la DSU à hauteur de 500 millions de francs pendant les trois années d'application du contrat de croissance et de solidarité ; majoration de 500 millions de francs pendant cinq ans de la part de la DGF consacrée aux structures intercommunales, pour financer les nouvelles communautés d'agglomération ; majoration de 200 millions de francs de la dotation d'aménagement, de 500 millions de francs de la DSU et de 150 millions de francs de la DSR, afin de permettre à ces dotations de progresser en dépit des effets du recensement général de la population.

Ce n'est qu'au prix de ces abondements exceptionnels que la DGF a pu connaître une progression ( 2,04 % ) lui permettant d'" amortir " les différents " chocs " extérieurs.

Bien que sa diminution soit plus faible cette année (- 3,4 % ), la DCTP doit encore régresser cette année, sa finalité initiale -compenser une perte de recettes due à des exonérations de taxe professionnelle consenties par l'Etat aux entreprises- étant désormais effacée au profit d'une mécanique complexe qui déconnecte les concours de l'Etat de la situation réelle des collectivités. En témoigne la modulation qui a dû être opérée par la loi de finances pour 1999 et reconduite en 2000, des effets de la baisse de leur DCTP pour les collectivités éligibles aux dotations de solidarité.

Au total, les objectifs mêmes d'une programmation pluriannuelle des concours de l'Etat aux collectivités locales -que symbolise l'" enveloppe normée "- semblent désormais mis en cause .

La volonté de conférer aux évolutions des concours de l'Etat un caractère plus prévisible n'est désormais plus atteinte. Compte tenu des mécanismes de recalage et de régularisation, le montant de la DGF ne peut pas être anticipé par les collectivités locales. En outre, la pratique des abondements exceptionnels soumet l'évolution de ces concours aux arbitrages effectués chaque année par l'Etat et donc à un aléa plus grand.

C'est enfin la lisibilité des concours de l'Etat qui est en cause. Le recours aux abondements exceptionnels " hors contrat de croissance et de solidarité " conduit à l'émergence de deux montants divergents des concours de l'Etat : le montant inscrit pour la DGF dans l'enveloppe " normée " (110,865 milliards de francs) ; le montant qui sera effectivement réparti compte tenu des abondements exceptionnels (112 ,036 milliards de francs).

B. LES BUDGETS LOCAUX : UNE RECONSTITUTION DES MARGES DE MANOEUVRE FINANCIÈRES DANS UN CONTEXTE ENCORE MARQUÉ PAR DE FORTES INCERTITUDES SUR L'EVOLUTION DES CHARGES IMPOSÉES AUX COLLECTIVITÉS LOCALES

1. La situation d'ensemble

Le rapport établi par notre collègue Joël Bourdin, au nom de l'observatoire des finances locales sur l'état des finances locales en 1999, souligne la volonté d'assainissement et de reconstitution de leur marge de manoeuvre financière , manifestée par les collectivités locales depuis plusieurs années.

Cette volonté s'est traduite par une politique volontariste de limitation de la croissance des dépenses de gestion (dépenses de fonctionnement hors intérêts de la dette).

Les dépenses de personnel -qui représentent pour l'ensemble des collectivités territoriales 36 % des dépenses de gestion- connaissent de nouveau une progression plus sensible (+ 5 % en 1998, + 6,7 % en 1999 selon la note de conjoncture établie par le Crédit local de France en juillet dernier).

Comme en 1998, elles subissent des charges sur lesquelles les collectivités locales n'ont pas de prise, en particulier les effets du protocole salarial du 10 février 1998 qui pourrait générer un coût total de 9,5 milliards de francs sur trois ans (1998, 1999, 2000).

Les dépenses de personnel connaissent également une évolution liée aux augmentations d'effectifs et notamment, à partir de 1998, au développement des emplois-jeunes . Les conventions signées entre l'Etat, les collectivités locales, les établissements publics et les associations auraient porté sur 97.765 emplois et auraient permis 84.164 embauches , dont 38 % au sein des collectivités locales.

Outre ces facteurs déjà observés, de hausse des dépenses de personnel, la situation de la CNRACL aura un effet direct sur les taux des cotisations " employeurs ". Devant votre commission des Lois, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a indiqué que l'Etat réduirait de 4 % la surcompensation effectuée au profit des caisses structurellement déficitaires, ce qui représenterait une somme d'un milliard de francs compensée par le versement à ces régimes d'une dotation de l'Etat du même montant. En contrepartie, les cotisations employeurs des collectivités locales et des établissements hospitaliers seront augmentées de 0,5 % au 1 er janvier prochain.

Les dépenses liées aux transferts de compétences ont connu des évolutions contrastées .

Les dépenses d'aide sociale départementale progressent à un rythme nettement inférieur (2,4 %) à celui enregistré de 1990 à 1996 (supérieur à 6,5 %). Elles devront néanmoins subir des effets de la prestation spécifique dépendance (100.000 bénéficiaires attendus fin 1998).

Les dépenses pour les collèges connaissent également une évolution limitée et pourraient même diminuer en 1999 (- 2,7 %), après une forte progression enregistrée en 1998 (+ 8 %). Il convient de souligner l'importance de l'effort mené par les départements au profit des collèges puisque depuis dix ans leurs dépenses dans ce domaine ont presque triplé.

Si les dépenses des régions au profit des établissements du second degré concernent essentiellement l'investissement (73 % des 20 milliards de francs engagés), il n'en est pas de même pour la formation professionnelle (95 % de dépenses de fonctionnement) qui ont progressé à un rythme élevé (+ 6,2 %). S'ajoute pour certaines régions l'expérimentation du transfert des compétences en matière ferroviaire (7 régions en 1999) qui a un impact sur les budgets tant en fonctionnement qu'en investissement.

Au total, néanmoins les dépenses de gestion devraient connaître une progression modérée (+ 3,9 %) en 1999.

Depuis 1994, les collectivités ont par ailleurs bénéficié d'une diminution du montant des intérêts de la dette . Entre 1994 et 1998, le volume des intérêts payés par les collectivités locales a diminué de plus de 10 milliards de francs (- 24 %). Depuis 1997, la diminution des intérêts s'accentue, les collectivités profitant non seulement des effets de la baisse des taux mais aussi du mouvement de désendettement enregistré en 1997 et 1998.

Les collectivités locales doivent parallèlement compter sur une progression modérée de leurs recettes de fonctionnement . Depuis 1997, les collectivités ont choisi de marquer une pause sensible dans la progression de leurs taux d'imposition en matière de fiscalité directe (+ 1,3 % en 1997, + 0,8 % en 1998 et + 0,5 % en 1999).

Le produit des quatre taxes directes a donc essentiellement augmenté en fonction de la croissance des bases, qui est elle-même restée limitée depuis 1995. Le produit des quatre taxes devrait croître d'environ 4,1 % en 1999 (en prenant en compte la compensation de l'abattement de 100.000 francs sur la part " salaires " et la compensation de la réduction pour embauche ou investissement) de la taxe professionnelle.

Quant à la fiscalité indirecte , elle a bénéficié du dynamisme du marché immobilier en 1997 et plus encore en 1998. Cependant, la loi de finances pour 1999 a supprimé la taxe additionnelle régionale aux droits de mutation et a abaissé de 15,4 à 3,6 % le taux de la taxe de publicité foncière ou du droit départemental d'enregistrement perçu par les départements sur les cessions d'immeubles à usage professionnel. Pour les régions, la suppression de la taxe s'est appliquée dès le 1 er septembre 1998 pour ce qui concerne les mutations d'immeubles à usage d'habitation. Des mesures de compensation ont été prévues, sur la base des droits perçus en 1997 pour les régions et des droits perçus en 1998 pour les départements.

La vignette (+3,4 %) et la taxe sur les cartes grises (+6,6 %) ont évolué assez favorablement en 1998 grâce au seul effet de la conjoncture favorable du marché de l'automobile. Les départements et les régions ont, en effet, marqué leur volonté de limiter la pression fiscale, y compris sur les taxes indirectes. Cette volonté s'est confirmée en 1999.

Les dotations de fonctionnement de l'Etat ont progressé dans le cadre des règles du " contrat de croissance et de solidarité " qui ont pris en compte une partie (20 %) de la croissance du PIB dans le calcul de l'enveloppe " normée ".

L' épargne de gestion devrait progresser de 3,5 % selon l'estimation du Crédit local de France. Depuis 1994, les collectivités ont par ailleurs bénéficié d'une diminution du montant des intérêts de la dette . Entre 1994 et 1998, le volume des intérêts payés par les collectivités locales a diminué de plus de 10 milliards de francs (- 24 %). Depuis 1997, la diminution des intérêts s'accentue, les collectivités profitant non seulement des effets de la baisse des taux mais aussi du mouvement de désendettement enregistré en 1997 et 1998.

Grâce à la maîtrise des dépenses de gestion et à la baisse des intérêts de la dette, les collectivités ont pu accroître sensiblement leur niveau d' épargne brute (qui résulte de la soustraction du montant des intérêts de la dette à l'épargne de gestion) en 1998 à un taux (+8,3 %) assez proche de ceux observés en 1997 (+9,6 %) et 1996 (+12 %). Entre 1995 et 1998, les collectivités locales ont augmenté le volume de leur épargne brute de plus de 30 milliards de francs, soit une progression annuelle de 11 %.

Au total, les collectivités locales ont réussi à dégager un fort potentiel d'auto-financement des investissements. Ce constat se retrouve en comptabilité nationale, les administrations publiques locales dégageant une capacité de financement de 22,8 milliards de francs en 1998, soit 5 milliards de francs supplémentaires par rapport à 1998. Les collectivités locales apportent une contribution très positive à la réduction des déficits publics.

Le rapport de M.Joël Bourdin relève qu'après les fortes baisses de 1992 à 1996 (supérieurs à 9 % au cours de la période), les dépenses d'équipement brut ont légèrement augmenté en 1997 (+1,7 %) puis très nettement progressé en 1998 (+8,2 %), sauf pour les régions (-11 %). Les premières informations pour 1999 laissent apparaître une reprise des investissements (+ 3 %) dans les régions. Au rythme annuel moyen de 1997 et 1998, les collectivités locales retrouveraient en 2000 leur niveau d'investissement de 1992 (150 milliards de francs). La reprise de l'investissement n'a pas interrompu le désendettement entamé en 1997.

Le Crédit local de France fait valoir que les conditions conjoncturelles d'une croissance dynamique de l'investissement sont réunies. La progression de l'investissement des collectivités locales devrait notamment contribuer à stabiliser l'activité globale du secteur des travaux publics.

En outre, des besoins structurels importants devraient soutenir l'investissement : pour les transports collectifs urbains , les projets à venir sont estimés d'ici 2008 à 66 milliards de francs par le Groupement des autorités responsables de transport (GART). Des investissements non négligeables devraient également résulter du développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication.

En outre, la mise aux normes pèse toujours sur les investissements. Une étude de la Fédération des maires des villes moyennes et du Crédit local de France estime son coût global à 140 milliards de francs , dont les deux tiers sont encore à réaliser, les dépenses d'environnement apparaissent prépondérantes (75 milliards de francs) : les investissements nécessaires seraient de l'ordre de 29 milliards de francs pour les déchets ménagers ; de 15 milliards de francs pour les eaux usées; de 28 milliards de francs pour l'amélioration de la qualité de l'eau potable. Selon une étude de l'ADEME, les investissements en matière de déchets pourraient atteindre plus de 5 milliards de francs en 1999.

2. La situation par collectivité

a) Les budgets des communes

Selon le Crédit local de France, la progression du produit des quatre taxes directes a nettement diminué en 1999 (+0,5 % contre +3,4 % en 1998), sous le double effet de la modération de la pression fiscale et de la réduction des bases de la taxe professionnelle en application de la réforme fiscale décidée par la loi de finances pour 1999. Les dotations de fonctionnement ont connu une évolution plus favorable (+2,8 % contre +0,8 %).

Essentiellement en raison de l'augmentation des charges de personnel, les dépenses de gestion ont cru plus vite que les recettes courantes (respectivement +3,9 % et +3,5%). En revanche, les autres dépenses de gestion ont augmenté à un rythme particulièrement modéré (+1,9 %) au regard de la moyenne annuelle observée de 1989 à 1997 (environ +6 %). L' épargne de gestion progresse plus modérément (+2,2 %) qu'en 1998 (+3 %). L' épargne brute connaît encore une forte croissance (+5,7 %), même si la réduction des intérêts de la dette est moins sensible (-8,1% après 10 %).

Après une reprise modérée en 1997, l'investissement communal a connu une progression soutenue en 1998 (+10,8%). Selon le Crédit local de France, la poursuite de l'effort d'investissement en 1999 (+5,3 %) devrait s'accompagner d'un recours accru à l'emprunt (+9,7% après +7,8 %).

Sous l'effet de la création régulière de nouveaux groupements et de l'élargissement des compétences des structures existantes, la progression des budgets des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre apparaît soutenue (près de 8% en moyenne annuelle entre 1995 et 1999 contre environ 3 % pour les budgets communaux). Leurs dépenses courantes augmentent plus sensiblement que celles des communes, notamment les dépenses de personnel en hausse de 9 % (contre 6 % pour les communes) qui atteignent près de 10 milliards de francs. Leurs dépenses d'investissements (hors remboursement) devraient s'établir à plus de 15 milliards de francs, soit l'équivalent de 14 % de l'investissement des communes.

b) Les budgets des départements

Les données provisoires pour 1999 exploitées par le Crédit local de France mettent en évidence que, comme en 1998, les départements ont cherché à modérer la pression fiscale : la moitié d'entre eux ont maintenu leurs taux inchangés et 9 ont décidé de les baisser. Le ralentissement de l'évolution des bases, dû à la réforme de la taxe professionnelle et la modération fiscale, se traduisent par une faible progression du produit voté (+0,9 % après 4,1% en 1998). La fiscalité indirecte des départements reste dynamique (+10%), notamment sous l'effet de la bonne tenue du marché immobilier. Au total, la progression des recettes fiscales est légèrement plus forte qu'en 1998 (+5,9% contre +5,8%). En outre, les dotations de fonctionnement ont évolué plus favorablement (+2,7% contre +1,2 %).

Les dépenses de gestion subissent le poids de la progression soutenue des dépenses de personnel (+6,8 %). Pour les autres dépenses de gestion, la " montée en charge " de la prestation spécifique dépendance produit ses effets sur les dépenses d'aide sociale.

Cependant, comme l'an passé, les recettes courantes augmentent plus rapidement que les dépenses de gestion. L' épargne de gestion poursuit, en conséquence une progression rapide (+6,7% après +7,8%) pour atteindre 54 milliards de francs. En dépit de la réduction moindre des intérêts de la dette (-5,9% après -9,6% en 1998), ; l' épargne brute demeure élevée (48 milliards de francs, +8,6 ).

Selon le Crédit local de France, les dépenses d'investissement (hors remboursements) retrouveraient en 1999 leur niveau de 1997 (57 milliards de francs). Grâce au développement des marges d'autofinancement, le dynamisme de l'investissement ne s'accompagne pas d'une reprise de l'emprunt qui accuse même une diminution nette (-9,2%).

c) Les budgets des régions

La volonté de modérer la pression fiscale a conduit quinze régions à maintenir leurs taux et trois d'entre elles à les réduire. La réforme des bases de la taxe professionnelle a provoqué un ralentissement marqué du produit voté (+0,5 % après +2,9 % en 1998). Globalement néanmoins le produit perçu -qui prend en compte les compensations fiscales- a augmenté de 4,5 %. La fiscalité indirecte a été dynamisée par le nombre important d'immatriculations neuves et par la hausse du produit des cartes grises. Les recettes fiscales des régions déjà dynamiques en 1998, progressent ainsi sensiblement en 1999 (+5,2% contre +4,3 %).

Malgré une progression toujours rapide des frais de personnel (+8,6 % contre +7,8%), les dépenses de gestion ont tendance à évoluer moins fortement (+8,2 % après +9,6 % en 1998), sous l'effet d'une hausse plus modérée des autres dépenses de gestion.

Dans ces conditions, les soldes d'épargne sont bien orientés : l'épargne de gestion progresse de +2,1% (contre -1,2 % en 1998) ; grâce à la réduction des intérêts de la dette pour la cinquième année consécutive, l'épargne brute augmente de 2,8% atteignant 28 milliards de francs.

Le Crédit local de France fait valoir que les conditions financières d'une reprise de l'investissement semblent réunies. En outre, de manière plus conjoncturelle, l'année suivant les élections devrait correspondre à la mise en place de nouveaux projets même si 1999 constitue une phase transitoire avant le démarrage des nouveaux contrats de plan Etat-région.

III. PLUSIEURS ENJEUX MAJEURS POUR LA DÉCENTRALISATION ET LA DÉMOCRATIE LOCALE

La décentralisation apparaît plus que jamais comme une réforme nécessaire pour permettre à notre société de relever les défis auxquels elle est confrontée et qui ne pourront que s'accentuer au début du prochain siècle. Dans un monde où les obstacles aux échanges économiques et à la circulation de l'information s'estompent, la gestion de proximité est la mieux à même d'offrir à nos concitoyens les repères indispensables dont ils ont besoin et de promouvoir la nécessaire cohésion sociale et territoriale .

Les collectivités locales ont démontré leur capacité de gestion , apportant notamment une contribution majeure au respect des critères du Traité de Maastricht pour le passage à la monnaie unique. Elles ont, en outre, fait un effort d'équipement considérable, réalisant les trois quarts de l'investissement public national. En rapprochant le processus de décision du citoyen, la gestion décentralisée constitue une richesse pour le fonctionnement de notre démocratie.

Pourtant, trop d'obstacles s'opposent encore à l'approfondissement du processus de décentralisation, la trop lente adaptation de l'Etat aux conséquences de cette grande réforme n'étant pas le moindre de ces obstacles. Force est, en effet, de constater que l'Etat n'a pas redéfini ses missions comme il aurait dû le faire en appliquant ainsi efficacement le principe de subsidiarité et que la déconcentration de ses moyens constitue un objectif toujours en chantier. Plus grave, les risques d'une volonté de recentralisation n'ont pas manqué au cours des dernières années notamment dans la définition des ressources locales.

Depuis plusieurs années, votre commission des Lois a appelé l'attention sur la nécessaire relance de la décentralisation, notamment dans le cadre des réflexions conduites au sein du groupe de travail placé sous la présidence de M. Jean-Paul Delevoye 1( * ) . Le Sénat, fidèle à sa vocation constitutionnelle, a lui-même souhaité établir un bilan clair des conditions d'exercice des compétences locales et examiner les voies et moyens de les améliorer en créant au début de l'année 1999 une mission d'information commune à cinq commissions permanentes présidée par M. Jean-Paul Delevoye, dont le rapporteur est M. Michel Mercier.

Dans le cadre du présent avis, votre commission des Lois soulignera plus particulièrement trois enjeux majeurs pour la décentralisation et la démocratie locale : le renforcement nécessaire de la sécurité juridique de l'action publique locale et l'amélioration des conditions d'exercice des mandats locaux ; la mise en oeuvre de la réforme du régime de la coopération intercommunale ; l'avenir du système de financement local.

A. UNE PRIORITÉ POUR LA DÉMOCRATIE LOCALE : RENFORCER LA SÉCURITÉ JURIDIQUE DE L'ACTION PUBLIQUE LOCALE ET AMÉLIORER LES CONDITIONS D'EXERCICE DES MANDATS

En plaçant le thème " Le maire et l'innovation " au coeur des réflexions de son 82è congrès de 1999, l'Association des Maires de France a souligné à quel point la capacité d'innovation des élus locaux était une exigence pour leur permettre de relever les défis de plus en plus diversifiés auxquels la gestion locale est confrontée.

Cette capacité d'innovation devrait pouvoir se développer dans un environnement juridique sûr qui, sans brider inutilement leurs initiatives, permettrait aux maires de connaître précisément les limites dans lesquelles l'action publique locale peut être mise en oeuvre. Or cette sécurité juridique indispensable n'est plus assurée aujourd'hui. Cette situation peut conduire au découragement de beaucoup d'élus locaux, périlleux pour notre démocratie locale. Une enquête récente 2( * ) met en évidence que près de la moitié des maires pourrait ne pas solliciter le renouvellement de leur mandat, lors des prochaines élections municipales. Si tel était le cas, serait confirmé un mouvement déjà observé lors des élections de 1995.

S'il peut être difficile d'identifier les motifs pouvant conduire un maire à ne pas se représenter, tout porte néanmoins à croire que l' insécurité juridique croissante constitue un facteur majeur, comme l'ont mis en évidence les réponses aux questionnaires établis dans le cadre des Etats généraux des élus locaux organisé par M. le Président du Sénat. C'est pourquoi, la mission commune d'information sur la décentralisation a fait de la sécurité juridique de l'action publique locale et des conditions d'exercice des mandats, deux thèmes prioritaires de ses réflexions.

Ces réflexions s'inscrivent dans la continuité de celles conduites précédemment par votre commission des Lois sur la responsabilité pénale des élus locaux qui ont conduit à l'adoption de la loi du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence ou de négligence. En outre, toujours à l'initiative de votre commission des Lois en collaboration avec la commission des finances, une réflexion approfondie a été menée par le groupe de travail sur les chambres régionales des comptes, présidé par M. Jean-Paul Amoudry et dont le rapporteur était M. Jacques Oudin 3( * ) .

A l'occasion d'une question orale avec débat posée par M. Hubert Haenel, le 28 avril dernier, le Sénat a appelé l'attention du Gouvernement sur la question de la responsabilité pénale des élus locaux. Mme Elisabeth Guigou, ministre de la Justice, Garde des sceaux, a annoncé au Sénat la mise en place d'un groupe d'étude restreint, présidé par M. Jean Massot, Conseiller d'Etat, et composé de magistrats, d'élus et d'universitaires, qui a été chargé de faire un " état des lieux " et de formuler des propositions sur la responsabilité pénale des décideurs publics.

Enfin, le Sénat a organisé, le 29 avril dernier, un colloque sur le thème " sécurité juridique et action publique locale " témoignant ainsi de sa volonté de répondre aux attentes légitimes des acteurs locaux.

De l'ensemble de ces travaux et réflexions, il ressort clairement que l'action publique locale est de plus en plus entravée par une complexité excessive et des charges croissantes . Dans ce cadre, l' inflation normative , l' imprécision de certains textes et, a l'inverse la trop grande technicité d'autres textes constituent des sujets de préoccupation majeure.

Cette année encore, votre commission des Lois constate que près de quatre ans après la publication de la partie législative du code général des collectivités territoriales (loi du 21 février 1996), la partie réglementaire de ce code reste toujours en chantier. Impliquant un effort important de rassemblement et de classement d'environ 200 décrets, soit 600 textes en tenant compte des décrets modificatifs pour atteindre un total de 1.900 articles, la partie réglementaire a été approuvée par la commission supérieure de codification le 1 er juillet dernier. Votre commission des Lois souhaite que sa parution ne soit pas plus longtemps différée.

Mais si la codification à droit constant constitue un préalable avant une simplification nécessaire des textes applicables aux collectivités locales, elle n'est pas non plus une garantie contre l'instabilité juridique . Depuis l'entrée en vigueur de la partie législative du code général des collectivités territoriales, 27 lois ont créé, modifié ou abrogé 399 articles de ce code. En outre le code général des collectivités territoriales étant un code " institutionnel ", le rassemblement des dispositions éparses applicables aux collectivités locales doit être poursuivi à travers l'élaboration de différents codes sectoriels tels que le code de l'éducation.

Par ailleurs, depuis plusieurs années, la prolifération des normes techniques -dont votre rapporteur pour avis a déjà souligné le coût financier pour les collectivités locales- constitue une source importante d'instabilité juridique. Le comité des finances locales a mis en place, sur ce thème, un groupe de travail animé par notre collègue  Philippe Adnot.

Les réflexions menées par l'inspection générale de l'administration, à la demande du ministre de l'intérieur, ont ainsi mis en évidence que le stock de normes établies par l'AFNOR -qui certes ne concernent pas toujours les collectivités locales- s'élève à 20.000 et s'enrichit de 1.800 normes nouvelles chaque années. 85 % des nouvelles normes de l'AFNOR ont une origine européenne ou internationale. Il apparaît indispensable, qu'outre une meilleure évaluation préalable de leur coût préalable , l'élaboration des normes donne lieu à une concertation accrue avec les collectivités locales, lesquelles en supportent le coût financier.

La responsabilité pénale des élus locaux pour des faits d'imprudence ou de négligence susceptibles d'avoir été commis dans le cadre de la gestion locale constitue, dans ce contexte, un motif de préoccupation majeure auquel le Sénat a entendu répondre depuis plusieurs années déjà.

Issue des réflexions menées au sein de votre commission des Lois, la loi du 13 mai 1996 a prévu que cette responsabilité ne pourrait être engagée que s'il est établi que l'élu " n'a pas accompli les diligences normales compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi lui confie ".

S'il est encore trop tôt pour mesurer l'impact sur la jurisprudence de ces nouvelles règles, il paraît néanmoins envisageable de préciser mieux encore les conditions de mise en jeu de la responsabilité pour des faits d'imprudence ou de négligence, notamment en exigeant que la faute soit caractérisée . Tel est l'objet de la proposition de loi (n° 9 rectifié, 1999-2000) déposée récemment par notre collègue Pierre Fauchon dont M. le Président du Sénat a indiqué qu'elle serait inscrite à l'ordre du jour des travaux du Sénat le 27 janvier prochain.

Remédier à l'insécurité juridique de l'action publique locale suppose également d'autres mesures destinées à clarifier le rôle des différents acteurs de la vie publique locale, à renforcer l'information des élus locaux, à prévenir le procès pénal par une revalorisation de la voie civile ou encore à remédier aux contradictions résultant de la superposition des différents contrôles. Le groupe de travail sur les chambres régionales des comptes a en particulier formulé des propositions équilibrées pour moderniser les conditions d'exercice du contrôle financier et veiller à sa complémentarité avec le contrôle de légalité. La proposition de loi (n° 8, 1999-2000) déposée par MM. Jacques Oudin, Jean-Paul Amoudry et plusieurs de nos collègues tend à donner une traduction législative à l'ensemble de ces propositions.

Outre par la recherche d'une plus grande sécurité juridique, les conditions d'exercice des mandats locaux doivent être améliorées par d'autres mesures. La diversification de plus en plus grande des tâches qui incombent aux élus locaux s'est en effet opérée dans un contexte marqué par une dégradation des conditions dans lesquelles ils exercent leur mandat.

Le cadre juridique en vigueur -très largement issu de la loi du 3 février 1992- ne paraît plus garantir l' égal accès de tous les citoyens à un mandat local , comme en témoigne la forte progression de la représentation des retraités et des agents de la fonction publique parmi les maires, à l'issue des élections municipales de 1995.

Des mesures doivent donc être envisagées pour assurer la compatibilité entre un mandat local et l'exercice d'une activité professionnelle, améliorer le régime indemnitaire et de protection sociale ou encore renforcer la formation des élus locaux.

La Livre blanc élaboré au sein de l'Association des Maires de France a formulé plusieurs propositions qui ont été présentées lors du 82 è congrès de l'Association. La mission d'information du Sénat sur la décentralisation a fait de cette question un thème prioritaire de réflexion.

Le Sénat a d'ores et déjà souhaité apporter plusieurs modifications au droit en vigueur en adoptant, sur le rapport du président Jacques Larché, plusieurs amendements au projet de loi ordinaire relatif aux incompatibilités entre mandats électoraux et fonctions électives. Le Sénat a ainsi généralisé à l'ensemble des maires et adjoints salariés qui exercent leur activité professionnelle, quelle que soit la taille de la commune, les mesures relatives à la suspension du contrat de travail avec garantie de réintégration. Il a par ailleurs décidé de revaloriser les indemnités de fonction des maires et -sur la proposition de votre rapporteur pour avis- de mieux définir leur nature juridique afin d'établir clairement qu'elles n'ont le caractère ni d'un salaire, ni d'un traitement, ni d'une rémunération quelconque.

B. LE DÉVELOPPEMENT D'UNE INTERCOMMUNALITÉ DE PROJET DANS UN CADRE JURIDIQUE CLARIFIÉ

Au cours des dernières années, le Sénat s'est fait régulièrement l'écho des légitimes préoccupations des élus locaux face à la complexité excessive du cadre juridique de l'intercommunalité. Telle fut notamment sa démarche lors de l'examen de la loi d'orientation du 4 février 1995 relative à l'aménagement et au développement du territoire dont l'article 78 a défini les pistes de réflexion en vue d'une réduction du nombre des catégories et d'une simplification du régime juridique de l'intercommunalité.

Le Sénat a également veillé à ce que face à la forte progression du poids financier des groupements au sein de la dotation globale de fonctionnement, les critères de répartition de celle-ci encourage une véritable intercommunalité de projet. Tel fut l'objet de la loi n° 93-1436 du 31 décembre 1993 complétée par la loi n° 96-241 du 26 mars 1996. Le Sénat a, de même, apporté sa pleine contribution à une première remise en ordre des textes applicables aux structures intercommunales, lors de l'adoption, en 1996, de la partie législative du code général des collectivités territoriales.

Le groupe de travail sur la décentralisation a par la suite mis en évidence le " maquis " actuel de la coopération intercommunale et défini les voies et moyens d'une nécessaire simplification . Ses propositions ont trouvé un écho dans le projet de loi relatif au développement de la coopération intercommunale, déposé sur le Bureau du Sénat le 23 avril 1997 par M. Dominique Perben, alors ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Tout en s'en distinguant sur certains aspects non négligeables, la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 -adoptée définitivement après qu'un accord fut intervenu au sein de la commission mixte paritaire présidée par M. Jacques Larché- reprend néanmoins pour une bonne part les conclusions des travaux antérieurs, notamment pour ce qui est de l'objectif de simplification .

A cet effet, elle recherche une rationalisation des structures se traduisant notamment par la suppression des districts et des communautés de villes et par une harmonisation des règles de fonctionnement des différentes structures intercommunales.

La loi du 12 juillet 1999 cherche en outre à promouvoir l'intercommunalité en milieu urbain à travers la création d'une nouvelle structure, la communauté d'agglomération qui bénéficiera de fortes incitations financières par le biais de la dotation globale de fonctionnement.

Répondant à votre rapporteur pour avis, M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, a estimé qu'il n'était pas exclu que trente communautés d'agglomération soient créées au 1 er janvier 2000 (contre vingt initialement prévues).

La loi aménage parallèlement le régime des communautés urbaines et des communautés de communes . En conséquence, la communauté urbaine sera la formule la plus intégrée s'adressant aux grandes agglomérations. La communauté d'agglomération concernera davantage les communes de taille moyenne tandis que la communauté de communes, dont la création n'est subordonnée à aucun seuil démographique, est destinée au milieu rural. Parallèlement, les syndicats de communes (à vocation unique ou multiple) et les syndicats mixtes continueront à prendre en charge une intercommunalité de services.

Sur le plan financier et fiscal , la loi du 12 juillet 1999 a organisé la promotion de la taxe professionnelle unique qui constituera le régime obligatoire des nouvelles communautés d'agglomération. Elle modifie par ailleurs les règles de répartition de la dotation globale de fonctionnement, en corrigeant le mode de calcul du coefficient d'intégration fiscale et le régime de la garantie des groupements éligibles.

Rappelons que l'impact financier des nouvelles communautés d'agglomération sur la dotation globale de fonctionnement a été atténué par un abondement annuel maximum de 500 millions de francs, prélevé sur les recettes de l'Etat, jusqu'en 2004.

Tout au long de l'examen de cette loi, le Sénat a souhaité veiller à ce que le succès de l'intercommunalité soit fondé sur une démarche progressive et volontaire . Il a en outre corrigé le dispositif qui lui était soumis afin d'éviter toute dichotomie entre l'urbain et le rural , et assurer une meilleure prise en compte des réalités locales , notamment dans la définition des compétences des structures intercommunales. Il a également veillé à ce que le renforcement de l'intercommunalité ne se traduise pas par un alourdissement des prélèvements obligatoires et par une pénalisation financière des communes au sein de la dotation globale de fonctionnement ou par le biais d'une ponction sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle. Ainsi a-t-il limité la faculté de prélever sur cette dotation les ressources qui seraient nécessaires au financement des communautés d'agglomération à 2000 et 2001, date d'échéance du " contrat de croissance et de solidarité ".

Si la loi du 12 juillet 1999 est d' application immédiate , plusieurs textes réglementaires devront néanmoins être pris pour préciser les conditions d'application de certaines dispositions ou procéder à un " toilettage " de la réglementation en vigueur. 13 décrets en cours de préparation pourraient, selon les indications fournies à votre rapporteur pour avis, être publiés d'ici la fin de l'année. En outre, l'abrogation de certaines dispositions réglementaires pourrait être envisagées dans le cadre de la codification de la partie réglementaire du code général des collectivités territoriales.

Les textes réglementaires requis concernent les questions suivantes :

- liste des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dans lesquels le directeur ou le directeur-adjoint peut avoir délégation de signature (dispositions applicables au 1 er janvier 2000 - article 111 de la loi) ;

- fixation du taux des indemnités maximales pour les fonctions de président ou de vice-président de communauté d'agglomération (modification du décret n° 93-732 du 29 mars 1993 relatif aux indemnités de fonction des présidents et vice-présidents d'EPCI) ;

- frais de déplacement des élus des EPCI ne bénéficiant pas d'indemnités de fonction (conditions de remboursement à préciser par référence au décret n° 90-437 du 28 mai 1990 relatif aux frais de déplacement des fonctionnaires) ;

- nomination d'un liquidateur en cas de dissolution d'un EPCI et en cas d'annulation de l'arrêté de création ;

- commission départementale de la coopération intercommunale : modalités de désignation des membres appelés à siéger en formation restreinte et fonctionnement de ladite formation (dispositions applicables au 1 er janvier 2000 - article 112 ) ;

- abrogation d'articles réglementaires relatifs aux communautés urbaines ( article R 165-6 à 14 du code des communes) ;

- modification des conditions d'application du régime de crédit d'heures prévu pour les élus municipaux désignés pour siéger au sein des EPCI ;

- suppression de la qualité d'ordonnateur secondaire des délégués régionaux du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) ; incidence sur le régime administratif, budgétaire et financier de l'établissement ;

- modification des conditions d'évaluation des dépenses d'investissement transférées aux EPCI à taxe professionnelle unique (TPU) ;

- modification du prélèvement et versement des ressources du fonds de solidarité des communes de la Région d'Ile de France (FSRIF) ;

- modification de la composition du Comité des finances locales (CFL) ;

- nouvelles dispositions concernant le potentiel fiscal ;

- suppression de la dotation de développement rural (DDR) des communes de moins de 20 000 habitants des départements d'outre-mer et de celle de la collectivité territoriale de Saint-Pierre et Miquelon.

C. L'AVENIR DU SYSTÈME DE FINANCEMENT LOCAL

Lors de l'examen des crédits de la décentralisation inscrits dans le projet de loi de finances 1999, votre commission des Lois s'était inquiété des très fortes incertitudes qui pèsent désormais sur l'avenir du système de financement local, notamment à la suite de la réforme fiscale voulue par le Gouvernement.

Votre rapporteur pour avis a déjà souligné les limites du " contrat de croissance et de solidarité " régissant les concours de l'Etat aux collectivités locales. Traduisant insuffisamment la contribution majeure de ces dernières à la croissance, il ne prend pas en compte l'évolution de leurs charges. Ces limites sont sanctionnées par la pratique des abondements exceptionnels qui viennent combler l'insuffisante progression des concours de l'Etat.

En outre, cette situation est aggravée par la réforme fiscale décidée l'an passée qui tend progressivement à remplacer la fiscalité locale par une généralisation des dotations de l'Etat.

En outre, en ne choisissant pas de compenser les allégements fiscaux par la voie du dégrèvement , la réforme a privé les collectivités locales du bénéfice du dynamisme des bases et de la liberté de fixer les taux pour la part salariale de la taxe professionnelle. Alors qu'un mécanisme de dégrèvement aurait permis aux ressources des collectivités de continuer à évoluer comme les anciennes bases, le mécanisme de compensation qui a été retenu, prend en compte les bases de 1999 (c'est à dire en pratique les salaires versés en 1997) et les taux de 1998. Les situations économiques étant ainsi figées, les initiatives locales en faveur du développement risque d'être découragées .

Cette réforme a pu également susciter des interrogations exprimées l'an passé par votre rapporteur pour avis, quant à sa conciliation avec la volonté de promouvoir la taxe professionnelle unique dans le cadre d'une intercommunalité de projet. Les mécanismes de compensation n'ont pas non plus manqué de soulever des difficultés pour le calcul des contributions fiscalisées versées aux établissements publics de coopération intercommunale qui ne sont pas dotés d'une fiscalité propre.

La fiscalité locale est désormais de plus en plus acquittée par le contribuable local. La prise en charge de la fiscalité locale dépasse les 100 milliards de francs, soit un montant proche de la dotation globale de fonctionnement pour 2000.

Au total, paraît se concrétiser le risque d'une mise en cause des principes fondateurs de la décentralisation sous le double effet d'une étatisation progressive de la fiscalité locale et de ressources locales dépendant entièrement de dotations consenties par l'Etat et elles-mêmes soumises à des mécanismes complexes bridant leurs évolutions.

Votre commission des Lois entend au contraire réaffirmer son attachement à une rénovation de la fiscalité locale qui permette de l'adapter aux évolutions économiques et qui préserve l' esprit d'initiative des collectivités locales.

*

* *

Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, votre commission des lois a décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits relatifs à l'administration territoriale et à la décentralisation, inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.


1 Rapport de M. Daniel Hoeffel n° 239, 1996-1997

2 Enquête IPSOS-Le Courrier du Maire, n° 119, novembre 1999

3 " Chambres régionales des comptes et élus locaux : un dialogue indispensable au service de la démocratie locale "
(n° 520, 1997-1998).



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