C. CONFORTER LES GARANTIES RÉSULTANT DES DISPOSITIONS CONCERNANT LA PROTECTION DE L'ACQUÉREUR, LE STATUT DES COPROPRIÉTÉS ET LE RÉGIME DES ÉDIFICES MENAÇANT RUINE

• S'agissant des dispositions relatives à la protection de l'acquéreur d'immeuble et au régime applicable à la copropriété des immeubles bâtis , votre commission des Lois vous propose une série d'amendements qui, lorsqu'ils n'ont pas pour objet de lever des ambiguïtés ou de corriger des incohérences, tendent à :

- rétablir la logique de protection de l'acquéreur non professionnel en lui réservant le bénéfice de la faculté de rétractation tout en accordant , par souci d'équilibre, des garanties au vendeur en modulant l'interdiction de recevoir un versement avant l'expiration du délai de sept jours ( article 28 ).

Votre commission a considéré que si l'acquéreur non professionnel, et lui seul, mérite de bénéficier d'un délai de réflexion, le vendeur, qui bien souvent cède son bien en vue de procéder immédiatement à une nouvelle acquisition, doit également obtenir des garanties qui constituent la contrepartie de l'immobilisation de son bien. Aussi votre commission des Lois vous propose-t-elle une réécriture de l'article L. 271-2 du code de la construction et de l'habitation afin de moduler l'interdiction qui y figure de recevoir tout versement avant l'expiration du délai de rétractation ou de réflexion. Ce versement serait possible lorsque les garanties financières existent pour garantir la restitution des sommes versées et les modalités de ce remboursement seraient organisées par la loi. Cela permettra en outre d'encadrer et de sécuriser les pratiques actuelles.

Concernant les promesses visées à l'article L. 271-1 du même code, votre commission des Lois vous propose, contrairement à ce qui résulte du texte adopté par l'Assemblée nationale, d'exclure du champ du dispositif celles qui sont établies en la forme authentique, dont la solennité et les garanties qu'elles présentent par nature semblent suffire à assurer la protection de l'acquéreur. Il en est de même pour l'acte authentique définitif.

Enfin, il paraît nécessaire de libeller différemment l'article 1589-1 inséré par l'article 28 dans le code civil tendant à frapper de nullité tout engagement unilatéral en vue de l'acquisition d'un bien ou un droit immobilier assorti d'un engagement au versement d'une somme d'argent pour tenir compte du fait que, s'il paraît nécessaire de mettre un terme à des pratiques de réservation conduisant en réalité à organiser des enchères sur un bien entre les candidats à l'acquisition, un engagement unilatéral en vue de cette acquisition se conclut nécessairement par le versement du prix.

- supprimer certaines dispositions introduites par l'Assemblée nationale risquant de faire obstacle à de nombreuses transactions (obligation de bornage préalablement à toute vente de terrain à bâtir : article 28 ) ou nécessitant une réflexion plus approfondie (régime applicable en matière de commercialisation des lots de lotissement : article 28 bis ) ;

Bien que sensible à la nécessité de renforcer la protection de l'acquéreur, votre commission vous propose de supprimer la disposition insérée par l'Assemblée nationale à l'article 28 tendant à imposer le bornage, à peine de nullité de la promesse, préalablement à toute vente de terrain à bâtir. Cette disposition soulève en effet plusieurs difficultés : impossibilité de donner une définition légale du " terrain à bâtir " et risque de bloquer de nombreuses transactions sur des terrains situés en terrain diffus du fait du caractère nécessairement contradictoire de la procédure de bornage. Elle vous propose en revanche d'imposer ce bornage pour les ventes de lots de lotissement, de terrains situés dans une zone d'aménagement concerté (ZAC) ou de parcelles vendues par une association foncière urbaine (AFU) et, pour l'ensemble des terrains, d'exiger que soit portée dans la promesse la mention précisant si les caractéristiques du terrain vendu résultent ou non d'un procès-verbal de bornage.

Par ailleurs, si la justification économique qui sous-tend le dispositif proposé à l'article 28 bis mérite d'être prise en considération, le régime applicable en matière de lotissements étant particulièrement sévère malgré les assouplissements introduits par la loi n° 94-112 du 9 février 1994 portant diverses dispositions en matière d'urbanisme et de construction, dite " loi Bosson ", celui-ci contient de nombreuses incohérences qui en compromettent la validité. En outre, de nombreuses dispositions concernant le régime applicable aux lotissements figurant dans la partie réglementaire du code de l'urbanisme bien qu'elles du domaine de la loi. Votre commission des Lois a donc considéré qu'une réflexion approfondie devrait être menée sur ce sujet afin d'instaurer des mécanismes susceptibles de répondre aux impératifs économiques sans méconnaître la sécurité du consommateur. Pareille entreprise ne semblant pas pouvoir être menée à bien à l'occasion d'un texte examiné dans l'urgence, elle vous proposera, à ce stade, la suppression de cet article.

- assurer le respect du principe de la légalité des délits et des peines (suppression des critères subjectifs introduits par l'Assemblée nationale en matière d'interdiction de division d'immeubles : article 29 ).

Le caractère subjectif des critères introduits par l'Assemblée nationale (notion de décence dont la définition précise est renvoyée à un décret, notion de chauffage adapté ...), dès lors qu'ils contribuent à la définition d'une incrimination pénale (sont punies d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 500.000 F les personnes qui mettent en vente, en location ou à la disposition d'autrui des locaux destinés à l'habitation provenant d'une division réalisée en méconnaissance des interdictions légales), ne paraît pas recevable : ce dispositif serait contraire au principe de la légalité des délits et des peines.

- améliorer les garanties offertes aux copropriétaires (exigence que le plan comptable rendu applicable à la gestion des copropriétés soit un plan comptable simplifié pour assurer une réelle lisibilité des comptes et permettre aux syndics bénévoles de l'utiliser : article 30 ; consultation des copropriétaires et décision réservée au juge lorsque les difficultés doivent conduire à une scission de la copropriété : article 31 ; communication des seules conclusions du rapport de l'administrateur provisoire au maire et au préfet pour éviter la divulgation d'informations relatives à la vie privée des copropriétaires : article 31 ).

- éviter d'encombrer inutilement les tribunaux (initiative de toute modification de la définition de la mission de l'administrateur provisoire réservée comme actuellement au seul juge : article 31 ) mais maintenir l'intervention obligatoire du juge pour le règlement de certains litiges dans les copropriétés (suppression de la possibilité ouverte au syndic de demander de son propre chef réparation à un copropriétaire pour un dommage qu'il aurait causé à la copropriété et d'imputer directement à ce copropriétaire les frais de recouvrement : article 31 ).

- renforcer les garanties offertes à l'acquéreur d'un lot de copropriété ( article additionnel après l'article 30 bis ).

Votre commission vous propose de rendre le carnet d'entretien de l'immeuble consultable par tout candidat à l'acquisition d'un lot titulaire d'un avant-contrat : celui-ci pourra ainsi être averti des dépenses auxquelles il devra faire face résultant de travaux lourds susceptibles d'être engagés à court ou moyen terme par la copropriété (réfection de la toiture, ravalement, changement de la chaudière ...). Cette mesure d'information du candidat à l'entrée dans une copropriété est également de nature à prévenir les difficultés que pourrait rencontrer cette copropriété du fait de la défaillance du nouvel arrivant.

- Clarifier et assouplir certaines règles applicables en matière de copropriété ( article 31 ).

Souscrivant à la préoccupation de l'Assemblée nationale de faciliter l'adoption des décisions relatives aux modalités de réalisation des travaux obligatoires urgents, votre commission des Lois vous propose de la prendre en considération dans un dispositif plus global tendant à résoudre les difficultés d'interprétation résultant du dernier alinéa de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1965 et à préserver l'exigence d'un consensus minimal pour les décisions importantes.

Concernant les copropriétés mises sous administration provisoire, votre commission estime que, s'il est opportun de réduire ses charges en mettant fin au mandat du syndic, il convient également de faire en sorte que l'administrateur puisse se consacrer pleinement à sa mission de redressement de la situation de la copropriété en permettant à l'ancien syndic de continuer à assumer certaines tâches matérielles : à cet effet, votre commission des Lois vous propose de prévoir la possibilité de conclure une convention avec cet ancien syndic.

• Enfin, votre commission des Lois vous soumet plusieurs modifications sur les dispositions du titre IV relatives aux édifices menaçant ruine , afin notamment de mieux préciser les procédures applicables et de veiller à leur cohérence avec les dispositions du code pénal.

Sur les dispositions de ce même titre consacrées aux droits des locataires , elle vous propose plusieurs amendements procédant à la suppression de plusieurs incohérences et ayant pour objet de renforcer le caractère objectif de la notion de décence appliquée aux locaux à usage d'habitation donnés à bail et de ne pas déroger aux règles de représentation devant les tribunaux en matière de conflits locatifs ( articles 85 A et 85 ).

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Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve des modifications qu'elle vous propose, votre commission des Lois a donné un avis favorable à l'adoption du présent projet de loi.

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