C. LA SITUATION TRÈS PRÉOCCUPANTE DE L'INDUSTRIE TEXTILE

1. Une dégradation persistante

En raison du contexte international, marqué par le développement de la concurrence des pays à bas salaires et une " globalisation " accrue (avec l'entrée de la Chine dans l'OMC et la fin de l'accord multi-fibres programmé en 2005), la production est tendanciellement à la baisse.

Les effets de la crise asiatique (déstockage généralisé et effondrement des prix) de la mi 98 à la mi 99, ont pratiquement annulé les conséquences bénéfiques sur l'emploi du plan Borotra d'allégement des charges sociales.

Les effectifs ont diminué, durant la seule année 1999, de 6 % (-17.000 emplois).

D'après les dernières statistiques disponibles de l'INSEE 29 ( * ) , la baisse continue dans ce secteur, malgré la reprise économique générale.

au 30/06/99

au 30/06/2000

2000/1999

Habillement et cuir

154,6

145,5

-5,9 %

Industrie textile

117,8

114,3

-3 %

Les difficultés rencontrées par l'économie japonaise ont, par ailleurs, affecté notre solde extérieur, ce pays étant devenu le deuxième client de la France.

Le déficit de nos échanges, en 1999, s'est élevé, dans le textile-habillement, à 33 milliards de francs.

2. Une meilleure résistance de certains de nos partenaires européens

Des graphiques communiqués à votre rapporteur, en réponse à son questionnaire budgétaire, font état d'évolutions de l'industrie textile française plus défavorable que celles de certains de nos principaux partenaires européens , s'agissant de :

- la production du textile (celle de l'Italie a nettement moins reculé depuis 1995 et l'Allemagne, contrairement à nous, amorce un redressement en 2000) ;

- la production d'habillement (la dégradation française est la plus forte de celles des quatre pays analysés, la situation du Royaume-Uni s'étant stabilisée depuis la fin de 1998 ) ;

- l'emploi, enfin, qui recommence à progresser (très légèrement il est vrai) en Allemagne à la fin de 1999, alors qu'il connaît seulement dans la même période, un fort ralentissement de son recul en France.

3. L'analyse du gouvernement

La réponse du gouvernement à une question parlementaire, dont de larges extraits sont ici reproduits, résume très clairement l'analyse du gouvernement face à la crise du textile .

a) L'appréciation du contexte

" Le secteur du textile-habillement-cuir est engagé, sous la pression de la concurrence internationale, dans un processus de mutation extrêmement rapide à tous les niveaux de cette filière. La conjoncture internationale, très défavorable de la mi-98 à la mi-99, marquée par un ralentissement de l'économie et une chute très brutale des prix, a accentué violemment le phénomène. Elle s'est depuis redressée et on peut considérer que le textile est revenu au niveau d'avant la crise, tandis que l'habillement, surtout pour les activités intensives en main-d'oeuvre, continue à être soumis à une forte pression. Néanmoins, ce processus d'adaptation doit être considéré comme structurel ; la crise n'a fait que l'accélérer. Ainsi, l'entrée prochaine de la Chine à l'Organisation mondiale du commerce et la fin programmée de l'accord multi-fibres en 2005 ne font que renforcer la " globalisation " de ce secteur.

L'internationalisation de l'industrie est un fait et les exportations hors Union européenne représentent actuellement 40 % du commerce. Une bonne part des produits français est compétitive et trouverait des débouchés supplémentaires si de multiples entraves aux échanges n'existaient pas et si les règles loyales du commerce étaient respectées. "

b) La politique gouvernementale

" Le gouvernement est parfaitement conscient de la situation difficile que doit affronter ce secteur et met en oeuvre, depuis 1997, une politique adaptée à cette problématique. Il n'est pas dans les intentions des pouvoirs publics d'édicter un nouveau " plan sectoriel " fondé sur des " mesures d'urgence " au sens traditionnel. L'expérience passée a montré d'une part leur inefficacité face à des problèmes structurels, d'autre part que les règles européennes s'opposent aux mesures sectorielles considérées comme contraires aux règles de la concurrence. Aussi, le Gouvernement a-t-il fait le choix d'un dispositif horizontal , applicable à tous les secteurs, mais ayant un effet plus marqué sur les industries de main-d'oeuvre et en particulier le textile-habillement-cuir. Cette politique consiste notamment à favoriser la mutation des entreprises en accompagnant le développement et la mise sur le marché de produits innovants et créatifs et en modernisant le système productif.

Pour cela, les entreprises peuvent faire appel aux procédures de soutien à l'innovation comme :

- l'appel à propositions technologies clés (géré par la direction générale de l'industrie, des technologies de l'information et des postes) ;

- l'aide à l'innovation de l'Agence nationale de valorisation de la recherche ou le crédit d'impôt recherche ;

- la procédure ATOUT qui permet l'introduction des nouvelles technologies ;

- les actions collectives favorisant les rapprochements d'entreprises. "

" Des crédits seront par ailleurs consacrés à l'exécution du nouvel engagement de développement de la formation, signé pour cinq ans. La profession elle-même vient de décider une " année des compétences ", vaste campagne de sensibilisation pour convaincre les entreprises d'embaucher de nouvelles compétences et les jeunes de s'intéresser à ce secteur. Distributeurs et fabricants ont pris des engagements en matière de valorisation des produits lors de la table ronde tenue fin 1999 sous l'égide des secrétaires d'état chargés de l'industrie et du commerce ".

" Sur le plan international, le gouvernement français a soutenu l'application, le cas échéant, des clauses de sauvegarde et des règles anti-dumping. Dans le cadre de la négociation OMC, il a comme position d'obtenir une ouverture équilibrée des marchés les plus protégés et de favoriser la constitution d'une zone paneuropéenne sur le modèle de l'accord de libre-échange nord-américain (NAFTA). "

c) Appréciations de votre rapporteur

Votre rapporteur partage cette analyse, particulièrement en ce qui concerne la nécessité du développement et de la mise sur le marché de produits innovants -" hauts de gamme " ajouterait-il-, seule façon de résister à la concurrence des pays à bas salaires.

Or, il semble que la profession, dans notre pays, reste morcelée à l'excès (à l'opposé des PME italiennes regroupées en " districts "), investit trop peu dans le " marketing " et le " design ", ne crée pas de marques, comme Benetton ou Gap, n'innove pas assez et exploite trop tardivement les possibilités offertes par de nouveaux produits comme les microfibres.

* 29 Informations rapides - 15 septembre 2000 - n° 240

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