B. COMPTE-RENDU DU CONTRÔLE EFFECTUÉ À LA MILDT

En application des dispositions de l'article 164-IV de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958, votre rapporteur a donc décidé d'effectuer une mission d'information et de contrôle budgétaire portant sur la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT).

1. Une structure mouvante

Depuis 1982, sept programmes, rapports et autres plans gouvernementaux censés donner un nouveau souffle à la politique de lutte contre la drogue en France se sont succédé ainsi que cinq structures interministérielles différentes chargées de mettre en oeuvre cette politique. Selon les époques, ces structures ont été rattachées aux services du Premier ministre, au Ministère de la Santé et de la Solidarité, ou au Ministère de la Justice. Dernier avatar de cette structure mouvante : la " Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie " (MILDT) a été créée par un décret du 24 avril 1996 et placée auprès du Premier ministre.

La MILDT anime et coordonne l'action de dix-sept départements ministériels concernés par la lutte contre la drogue et la prévention des dépendances, notamment dans les domaines de la prise en charge sanitaire et sociale, de la prévention, de la répression, de la formation, de la communication, de la recherche et de la coopération internationale. Elle prépare et met en oeuvre les décisions du comité interministériel de lutte contre la drogue et de prévention des dépendances, qui concerne depuis le plan gouvernemental du 16 juin 1999 aussi bien les consommations de drogues illicites que l'abus d'alcool, de tabac et de médicaments psychoactifs, soit l'ensemble des pratiques addictives.

2. La MILDT bénéficie de son rattachement au Premier ministre

a) Les crédits en provenance du budget des Services généraux du Premier ministre

Depuis 1998, la MILDT bénéficie d'une délégation de crédits inscrits au budget des Services généraux du Premier ministre. Auparavant ces crédits étaient délégués par le ministère de la Santé. Cette délégation en provenance des Services généraux du Premier ministre justifie en partie le rattachement de la MILDT au Premier ministre et permet d'affirmer son caractère interministériel.

Frais de fonctionnement de la MILDT (1997-2000)

(en millions de francs)

Années

1997

1998

1999

2000

Total

3.237

3.296,45

3.226,45

3.296,45

Source : Services généraux du Premier ministre.

Ces crédits doivent servir, outre à la rémunération de la Présidente et du délégué, au financement des frais de fonctionnement de la MILDT. Toutefois, ne sont pas prises en compte les rémunérations des autres personnels (mis à disposition par d'autres administrations et établissements publics) ni le loyer et les frais de téléphone qui sont acquitté par le ministère de la Santé.

Votre rapporteur souhaiterait que cette situation soit plus claire avec notamment des transferts d'emplois budgétaires au profit de la MILDT (qui figureraient alors au budget des Services généraux du Premier ministre) et une prise en charge du loyer et des frais de téléphone par le budget des Services généraux du Premier ministre.

b) Les autres crédits dont bénéficie la MILDT

A ces crédits s'ajoutent ceux en provenance du budget de la Santé et de la solidarité ainsi que le produit de deux fonds de concours . L'un de ces fonds, mis en place pour rapporter une trente millions de francs, ne produit en réalité que 500.000 francs annuels au maximum. Votre rapporteur estime que cette situation, principalement liée à des dysfonctionnements administratifs, doit être rapidement éclaircie.

3. Appréciation sur les dépenses de fonctionnement

Les dépenses de fonctionnement de la MILDT sont donc, en principe prises en charge par le budget des Services généraux du Premier ministre qui délègue chaque année, en début d'année, l'enveloppe de crédits destinée à couvrir ces frais.

a) Les dépenses de personnel
(1) La " valse des présidents " a longtemps affecté la crédibilité de la MILDT

Dans un rapport de 1998 consacré à la politique de lutte contre la drogue en France, la Cour des comptes avait critiqué à juste titre la succession des présidents à la tête de la MILDT, souvent hauts fonctionnaires ou personnalités politiques dont cette présidence ne constituait pas l'unique fonction. Elle déplorait également l'insuffisante durée du mandat, soulignant que l'institution avait connu douze responsables entre 1982 et 1998 et que le poste de président avait même été laissé vacant de décembre 1995 à avril 1996.

La nomination en juin 1998 de Mme Nicole Maestracci, magistrate, présidente de la MILDT à temps plein depuis 1998, a mis fin à cette pratique particulièrement préjudiciable pour l'activité et la crédibilité de la mission.

(2) Des mises à disposition systématiques qui nuisent à la transparence

Si l'on considère les crédits de personnel délégués à la MILDT, seuls deux postes apparaissent : celui de la Présidente et celui du délégué. Or, la MILDT compte au total 42 collaborateurs. Cette illusion d'optique résulte de la pratique systématique des mises à disposition de personnels par les administrations impliquées dans l'action interministérielle de lutte contre la drogue (30 personnels sur le total de 42), en application du décret de 1996 dont l'article 6 prévoit : " La MILDT dispose de personnels mis à disposition par les départements ministériels ou établissements publics ".

Ces mises à disposition résultent d'un arbitrage du Premier ministre, rendu le 12 décembre 1996 et qui fixait les effectifs que chaque administration devait mettre à disposition de la MILDT. Votre rapporteur a d'ailleurs remarqué que ces objectifs n'étaient pas intégralement remplis, certaines administrations ayant peine à verser leur " écot " à la MILDT.

Le système des mises à disposition présente certains avantages pour la MILDT puisqu'elle n'en supporte aucun coût et qu'elle dispose ainsi de véritables professionnels de leur secteur. Mais il présente surtout des inconvénients (la MILDT n'a pas le choix de ses collaborateurs, les emplois ainsi proposés sont peu attractifs, etc.).

Votre rapporteur estime que ce système n'est ni sain ni clair pour une institution pérenne comme la MILDT qui doit pouvoir compter sur un noyau de personnel propre. C'est pourquoi votre rapporteur se félicite de la décision prise pour le budget pour 2001 de procéder à des transferts d'emplois au bénéfice de la MILDT (19 emplois dans un premier temps pour un coût de 6 millions de francs). Il estime toutefois que cette décision aurait du être prise dès l'an dernier puisque l'arbitrage du Premier ministre avait été rendu en septembre 1998 en faveur d'un transfert des emplois et que le plan triennal avait rappelé cet objectif.

Tableau des transferts d'emplois prévus pour 2001

Ministères

Mises à disposition

Transferts 2001

Catégories d'emplois

Justice

3

0

Education nationale

4

2

1 A+ ; 1 A

Recherche

2

0

Défense

4

2

1 A ; 1 C

Affaires étrangères

1

1

1 A+

Intérieur

4

3

2 A+ ; 1 C

Economie et Finances

7

4

2 A ; 2 C

Jeunesse et sports

2

0

Emploi et solidarité

8

6

3 A+ ; 1 A ; 2 C

Equipement

1

1

1 A

Outre-mer

1

0

Culture

1

0

TOTAL

38

19

7 A+ ; 6 A ; 6 C

Source : Services généraux du Premier ministre.

b) Les autres dépenses de fonctionnement

Les autres dépenses de fonctionnement sont financées par des crédits délégués du budget des Services généraux du Premier ministre, à l'exception des locaux, dont le loyer est acquitté sur le budget de la Santé et de la Solidarité. Les frais de téléphone sont pris en charge par ce même ministère alors que ce sont les Services généraux du Premier ministre qui se chargent des frais d'affranchissement.

Source : MILDT.

Le rapport de la Cour des comptes avait souligné le caractère peu justifié de dépenses de loyer de locaux dans la rue du Faubourg-Saint-Honoré qui dépassaient les 2,92 millions de francs en 1995. Aujourd'hui, la MILDT est installée dans 693 m 2 place des Cinq Martyrs du Lycée Buffon dans le 15 ème arrondissement parisien pour un loyer annuel de 2,7 millions de francs (et 3,35 millions de francs si on y inclut les charges et les frais de nettoyage). Ce loyer demeure donc une charge lourde pour l'Etat.

Il faut déplorer le " nomadisme " de la mission qui va être une nouvelle fois amenée à quitter ses locaux actuels. La Mission déménage environ tous les dix-huit mois ce qui semble tout à fait excessif et surtout très onéreux au plan financier comme au plan organisationnel.

Il semblerait donc de meilleure politique que les Services généraux du Premier ministre prennent à leur charge le loyer de la mission et s'engagent à lui trouver des locaux pérennes.

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