N° 350

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 31 mai 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l' approbation de l' avenant à la convention d'assistance administrative mutuelle internationale du 10 septembre 1985 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire , visant la prévention , la recherche et la répression des fraudes douanières par les administrations douanières des deux pays,

Par M. Claude ESTIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Auban, Pierre Biarnès, secrétaires ; Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, René-Georges Laurin, Christian de La Malène, Louis Le Pensec, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Jean-Yves Mano, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. René Monory, Paul d'Ornano, Michel Pelchat, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière, Raymond Soucaret.

Voir le numéro :

Sénat : 289 (2000-2001)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi soumis au Sénat a pour objectif d'autoriser l'approbation de l'avenant, signé à Alger le 10 avril 2000, à la convention d'assistance administrative mutuelle internationale, signée le 10 septembre 1985, entre la France et l'Algérie, visant la prévention, la recherche et la répression des fraudes douanières par les administrations compétentes des deux pays.

Depuis son entrée en vigueur le 1 er octobre 1986, cette convention a permis le développement de la coopération entre nos deux pays, les douanes algériennes étant devenues le premier partenaire des douanes françaises au Maghreb.

L'enjeu de cet avenant est donc à la fois d'approfondir cette coopération en lui offrant de nouveaux outils et d'en élargir le champ pour faire face aux nouvelles menaces et nouveaux trafics, notamment celui des stupéfiants et produits psychotropes.

Cet avenant relativement technique a aussi une signification politique en s'inscrivant dans le cadre de la reprise globale de notre coopération avec l'Algérie et de nos relations bilatérales, alors que ce pays doit faire face à d'importantes difficultés internes.

I. L'ALGÉRIE, UNE SITUATION INTÉRIEURE DIFFICILE DANS L'ATTENTE DES RÉFORMES

L'Algérie connaît une situation intérieure troublée depuis la mort, le 18 avril 2001, d'un jeune lycéen Kabyle dans un poste de gendarmerie de Beni-Douala. Les conditions de ce décès, qui ne sont pas encore complètement élucidées, ont provoqué une vive réaction des jeunes puis de l'ensemble de la population de Kabylie. La riposte violente des forces de l'ordre, notamment la gendarmerie, a accru la force de la protestation et des émeutes. Ces manifestations et ces violences, qui durent depuis plus de deux mois, ont d'ailleurs provoqué de nombreuses victimes.

Lors de ces manifestations, dont les plus importantes ont été « la marche noire » du 21 mai à Tizi-Ouzou et le rassemblement à Alger du 14 juin qui ont réuni chacune plusieurs centaines de milliers de personnes, les revendications aussi bien politiques qu'économiques et sociales ont paru prendre le pas sur les revendications identitaires, culturelles et linguistiques relatives à la Kabylie. Les réponses apportées, lors de plusieurs discours successifs, par le Président Abdelaziz Bouteflika : plan de relance économique, création d'une commission d'enquête indépendante sur les événements, report des examens, promesse que des sanctions pourraient être prises contre les forces de l'ordre et que les revendications identitaires seraient prises en compte par une réforme constitutionnelle, n'ont pas permis, pour l'instant, de faire baisser durablement la tension et la contestation du pouvoir semble s'étendre au-delà de la seule Kabylie.

Il semble donc particulièrement opportun de faire le point sur la situation politique et économique de l'Algérie, à un moment où la France renforce sa coopération.

A. UNE TRANSITION DÉMOCRATIQUE À CONSOLIDER

La démission du Président Zeroual, le 11 septembre 1998, semblait devoir marquer une avancée vers une plus grande démocratisation des institutions et le renforcement des pouvoirs des civils sur ceux des militaires. Selon les partis d'opposition et de nombreux observateurs, cet objectif ne semble pas avoir été complètement atteint. En effet, le Président Abdelaziz Bouteflika a été élu le 16 avril 1999 avec 74 % des voix au premier tour en raison du retrait de l'ensemble de ses adversaires qui craignaient des fraudes similaires à celles qui, selon eux, avaient émaillé les élections législatives du 5 juin 1997. Le Rassemblement national démocratique (RND), le parti du Président Zéroual, et le Front de libération nationale (FLN) avaient obtenu respectivement 155 et 54 sièges, soit une majorité de 219 sièges sur 380 et les manifestations de l'opposition, protestant contre les fraudes, avaient été réprimées.

Depuis ces élections, le Président Bouteflika a toutefois semblé ouvrir une nouvelle ère pour l'Algérie, grâce à une diplomatie dynamique et ouverte et à une volonté affichée de réforme. Surtout, il a donné la priorité à son projet de « concorde civile », après la reddition officielle de l'AIS (Armée islamique armée), branche armée de l'ancien FIS (Front islamique du salut) le 5 juin 1999, projet approuvé très largement par référendum le 16 septembre 1999. Fort de ce soutien populaire massif, cette politique a pu porter ses fruits. La loi de concorde civile permettant aux combattants islamistes repentis, sauf ceux coupables de crimes de sang, de quitter la clandestinité sans craindre de poursuites pénales, a provoqué une forte diminution du nombre des attentats par rapport à 1997 et 1998 où le nombre des victimes était estimé entre 7.000 et 10.000. Dès 1999, le nombre de victimes aurait été inférieur à 3.000, la diminution se poursuivrait en 2001 sans que le terrorisme paraisse pouvoir être éradiqué complètement à brève échéance.

Dans ce contexte, les manifestations violentes de ces derniers mois ont suscité l'inquiétude, ranimant le souvenir des événements de 1988 qui avaient ébranlé le régime du Président Chadli et conduit au développement des mouvements islamistes. Le récent retrait du Gouvernement du parti de M. Saïd Saadi, le Rassemblement pour le culture et la démocratie (RCD) ayant une forte implantation en Kabylie, a affaibli la majorité soutenant le Président Bouteflika. Surtout, les manifestants, organisés par les assemblées de villages, ont dénoncé la « Hogra », c'est-à-dire le mépris du pouvoir pour le peuple et la corruption généralisée, sans épargner les partis implantés en Kabylie ou d'opposition comme le Front des forces socialistes de M. Hocine Aït Ahmed. Ce mouvement semble manifester une forte demande de représentation et de prise en compte des préoccupations sociales de la population. Elles pourraient trouver à s'exprimer lors des élections locales et législatives de 2002.

En outre, le respect des droits de l'homme et des libertés reste une question délicate. Le projet de modification du code pénal pour faciliter les poursuites contre la presse ou les auteurs de prêches dans les mosquées, notamment en cas d'attaque contre la personne du Chef de l'Etat, a provoqué de très vives réactions, la presse écrite ayant conservé une grande liberté de ton malgré les événements des années 1990.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page