CHAPITRE V
REMBOURSEMENT DE FRAIS

Les élus locaux ont droit au remboursement de frais que nécessite l'exécution de mandats spéciaux, dans des conditions qui mériteraient d'être précisées.

Les membres des assemblées départementales et régionales peuvent recevoir une indemnité de déplacement dans le département (ou la région) pour prendre part aux réunions de l'assemblée dont ils sont membres et des commissions ou organismes dont ils font partie ès qualité.

Enfin, le conseil municipal peut voter des indemnités de représentation pour le maire.

Les dispositions du présent chapitre tendent à « mieux prendre en compte les réalités de l'exercice des mandats locaux afin de veiller à ce que les élus ne subissent pas de dépenses personnelles consécutives aux missions qui leur incombent », selon l'étude d'impact du projet de loi.

Il s'agirait aussi, selon M. Bernard Derosier, rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale « d'encourager la mise en oeuvre de la parité ».

Les dispositions proposées sont, pour une certaine part, inspirées de la proposition de loi de Mme Jacqueline Fraysse adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux fonctions électives municipales, et des dispositions retenues par le Sénat sur cette proposition de loi, le 8 février 2001, destinées à prendre en compte, d'une manière plus large, les évolutions des conditions d'exercice des mandats locaux.

L'article 31 concerne les élus municipaux et l'article 32 les élus départementaux et régionaux. L'article 33 du projet de loi institue une mesure d'incitation à l'utilisation du chèque service par certains élus, pour la garde d'enfants nécessaire à l'exercice de leur mandat.

Article 31
(art. L. 2123-18 à L. 2123-18-3
du code général des collectivités territoriales)
Remboursement de frais des élus municipaux

Sur un plan formel, l'article 31 modifie l'intitulé de la sous-section 2 du code général des collectivités territoriales concernant les frais de mission et de représentation 177 ( * ) des élus municipaux, qui s'appellerait « remboursement de frais ».

L'article L. 2123-18 serait complété et trois nouveaux articles créés : L. 2123-18-1 à L. 2123-18-3. En revanche, l'article L. 2123-19, concernant les conditions d'indemnisation des frais de représentation des maires ne serait pas modifié.

Les dispositions en vigueur de l'article L. 2123-18 prévoient que les élus municipaux (et les membres de délégations spéciales) ont droit à un remboursement forfaitaire des frais que nécessite l'exécution des mandats spéciaux dans la limite du montant des indemnités journalières allouées à cet effet aux fonctionnaires de l'Etat 178 ( * ) et que les frais de transports engagés dans ce cadre sont remboursés sur présentation d'un état de frais.

La jurisprudence a défini le mandat spécial comme devant « s'entendre de toutes les missions accomplies (...) avec l'autorisation du conseil municipal dans l'intérêt des affaires communales, à l'exclusion seulement de celles qui lui incombent en vertu d'une obligation expresse » 179 ( * ) .

Les missions exercées dans ce cadre doivent donc revêtir un caractère exceptionnel et se distinguer des missions traditionnelles de l'élu. Il peut, par exemple, s'agir du lancement d'une opération de grande ampleur comme un festival ou de faire face à une situation exceptionnelle comme une catastrophe naturelle. Selon le ministère de l'Intérieur, certaines missions de représentation auprès d'autres collectivités, mêmes étrangères, confiées à un élu, remplies sur décision de l'assemblée, peuvent entrer dans le cadre juridique du mandat spécial. Une liste précise de ces mandats spéciaux ne peut cependant pas être dressée.

Le mandat spécial résulte donc d'une délibération particulière de l'assemblée et ne porte pas sur les missions accomplies dans le cadre normal du mandat municipal et qui sont normalement couvertes par les indemnités de fonction.

Le remboursement de frais que nécessite l'exercice d'un mandat spécial, en principe forfaitaire dans la limite du montant des indemnités journalières, peut néanmoins être basé sur les frais réellement engagés, à la condition que l'assemblée délibérante en ait fixé préalablement les règles, en particulier pour le plafonnement 180 ( * ) .

En revanche, les frais remboursés doivent toujours correspondre à un « intérêt public ». Ainsi, la jurisprudence s'oppose-t-elle à l'institution d'un remboursement des frais de garde d'enfants par un conseil municipal 181 ( * ) .

L'article 31 du projet de loi, adopté sans modification par l'Assemblée nationale, apporte tout d'abord une modification formelle à l'article L. 2123-18 du code général des collectivités territoriales pour supprimer la référence aux fonctionnaires « appartenant au groupe I », puisque cette notion a disparu.

Cet article comporte des dispositions sur les conditions de prise en charge de différentes dépenses liées à l'exercice du mandat municipal.

Les dépenses liées à l'exercice d'un mandat spécial

L'article 31 prévoit, comme la proposition de loi de Mme Jacqueline Fraysse adoptée par l'Assemblée nationale, que les autres dépenses liées à l'exercice d'un mandat spécial, « notamment les frais pour garde d'enfants », pourront être remboursées par la commune sur présentation d'un état de frais et après délibération du conseil municipal. Le remboursement des frais de garde ne pourrait dépasser, par heure, le montant horaire du SMIC.

Le Sénat, suivant sa commission des Lois, avait, pour sa part, estimé, lors de l'examen des propositions de loi relatives à la démocratie locale, qu'il n'était pas injustifié, dans son principe, que des dépenses, y compris de nature privée mais engagées dans le but exclusif de permettre l'exercice d'un mandat, puissent être prises en charge par la collectivité concernée, déjà autorisée par la loi à rembourser les frais de transport nécessaires à l'accomplissement d'un mandat spécial.

Toutefois, la Haute Assemblée avait considéré que cet assouplissement nécessaire ne devait pas se limiter aux seuls frais de garde d'enfants.

Ainsi, un élu pourrait-il être contraint d'engager des frais pour la prise en charge de son conjoint malade, par exemple, afin de pouvoir exercer un mandat spécial qui lui a été confié.

Votre commission des Lois vous propose par amendement une rédaction qui, au lieu de citer limitativement les seules gardes d'enfants, s'appliquerait, outre à celles-ci, aux dépenses d'assistance aux personnes âgées, handicapées ou à celles qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile , selon la formule de l'article L. 129-1 du code du travail pour les chèques-service.

Ces dépenses pourraient être prises en charge sur présentation de pièces justificatives et après délibération du conseil municipal. Comme le prévoit le projet de loi, les frais de garde seraient plafonnés par heure au montant horaire du SMIC .

Les frais de transport et de séjour pour se rendre à des réunions

La deuxième modification apportée par l'article 31 du projet de loi concerne les frais de transport et de séjour engagés par les élus municipaux pour participer à certaines réunions. Sur un plan formel, un nouvel article L. 2123-18-1 serait créé.

Le code général des collectivités territoriales prévoit déjà l'indemnisation des conseillers généraux et des conseillers régionaux de leurs frais de déplacements dans le département ou la région afin de participer aux réunions de l'assemblée et de ses commissions et à celles des organismes dont ils font partie ès qualités (articles L. 3123-19 et L. 4135-19).

Aucune disposition de cette nature n'existe pour les élus municipaux appelés à participer à des réunions hors de leur commune.

Le présent article tend à transposer avec adaptations aux communes les dispositions existantes pour les départements et les régions.

Les conseillers municipaux pourraient bénéficier du remboursement des frais de transport et de séjour qu'ils ont engagés pour se rendre à des réunions dans des instances ou organismes où ils représentent leur commune ès qualités, lorsque la réunion se tient en dehors du territoire de la commune. La prise en charge de ces frais se ferait dans les conditions applicables aux fonctionnaires de l'Etat. Ces dispositions seraient aussi applicables aux membres des délégations spéciales.

Autres dépenses exposées pour se rendre à des réunions

Un nouvel article L. 2123-18-2 serait inséré dans le code général des collectivités territoriales pour prévoir, en faveur des conseillers municipaux ne percevant pas d'indemnités de fonction , le remboursement des frais de garde d'enfants pour participer aux réunions du conseil municipal, des commissions ou d'organismes dans lesquels ils représentent la commune ès qualités.

Comme pour les dépenses de garde liées à l'exercice d'un mandat spécial (voir ci-dessus), les dépenses seraient remboursées sur présentation d'un état de frais et après délibération du conseil municipal. Le remboursement ne pourrait pas excéder, par heure, le montant horaire du SMIC.

Là encore, votre commission des Lois, a approuvé le principe de la prise en charge de dépenses engagées pour l'exercice du mandat municipal, mais a estimé qu'il n'y avait pas lieu de citer exclusivement les gardes d'enfants, qui pourraient certes être prises en considération, mais comme d'autres dépenses.

L' amendement que votre commission des Lois vous propose retient les mêmes principes que le précédent. Pourraient être pris en charge les « frais de garde d'enfants ou d'assistance aux personnes âgées, handicapées ou à celles qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile » afin de permettre à l'élu de participer aux réunions du conseil municipal, de ses commissions ou d'organismes au sein desquels il représente la commune ès qualités.

Ces dépenses pourraient être prises en charge sur présentation de pièces justificatives et après délibération du conseil municipal. Les frais de garde seraient plafonnés au montant horaire du SMIC .

Dépenses d'assistance et de secours

L'Assemblée nationale a enfin adopté les dispositions du projet de loi permettant aux maires et adjoints de se faire rembourser les dépenses exceptionnelles d'assistance et de secours qu'ils ont engagées sur leurs deniers personnels en cas d'urgence. Le remboursement se ferait sur justificatifs, après délibération du conseil municipal.

Cette disposition a été approuvée par votre commission des Lois.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 31 ainsi modifié .

Article 32
(art L. 3123-19 et L. 4135-19
du code général des collectivités territoriales)
Remboursement de frais des élus départementaux et régionaux

L'article 32 tend à une nouvelle rédaction des articles L. 3123-19 et L. 4135-19 du code général des collectivités territoriales concernant le régime de remboursement des frais engagés par les élus respectivement du département et de la région.

Les dispositions proposées, adoptées sans modification par l'Assemblée nationale, comme celles en vigueur, sont identiques pour les deux collectivités territoriales.

Les frais de transport et de séjour pour se rendre à des réunions

Votre rapporteur a déjà exposé, à l'article 31, que les conseillers généraux et régionaux pouvaient être indemnisés de leurs frais de déplacement dans leur département ou leur région pour prendre part aux réunions du conseil dont ils sont membres, de ses commissions et des organismes au sein desquels ils représentent leur assemblée ès qualités (articles L. 3123-19 et L. 4135-19).

Selon le texte proposé, l'indemnisation pourrait porter non seulement sur les frais de transport, mais aussi sur ceux de séjour. Les dépenses liées aux réunions tenues en dehors du département (ou de la région) pourraient également être remboursées.

Les dépenses liées à l'exercice d'un mandat spécial

Ces dépenses sont actuellement remboursables dans les mêmes conditions aux élus départementaux et régionaux qu'aux élus municipaux : remboursement des frais de transport sur justificatifs ; les dépenses de séjour sont prises en charge dans la limite du montant de l'indemnité journalière ou sur la base des frais réels justifiés ; les frais de garde d'enfants ne sont pas admis (voir le commentaire de l'article 31 ci-dessus).

Les députés ont prévu des dispositions similaires à celles qu'ils ont adoptées pour les conseillers municipaux (article 31 ci-dessus) concernant les autres dépenses liées à l'exercice d'un mandat spécial, « notamment les frais de garde enfants ». Ces dépenses seraient donc remboursables sur présentation d'un état de frais et après délibération du conseil général ou régional, suivant le cas. Les frais de garde seraient plafonnés, par heure, au montant horaire du SMIC.

Votre commission des Lois vous propose, comme à l'article 31 pour les élus municipaux, un amendement pour autoriser la prise en charge des « frais de garde d'enfants ou d'assistance aux personnes âgées, handicapées ou à celles qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile » .

Les dépenses seraient prises en charge sur justificatifs et après délibération de l'assemblée concernée, dans la limite d'un plafond horaire égal au montant horaire du SMIC .

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 32 du projet de loi ainsi modifié .

Article 33
(art. L. 2123-18-4, L. 3123-19-1, L. 4135-19-1
du code général des collectivités territoriales)
Participation au financement de l'emploi par un élu
d'un salarié pour une garde d'enfant

Cet article, adopté par l'Assemblée nationale avec deux amendements de précision, tend à créer trois nouveaux articles dans le code général des collectivités territoriales, afin de prévoir une aide financière des collectivités en faveur de certains des élus locaux qui utilisent le chèque-service pour rémunérer les salariés chargés de la garde d'enfants à domicile 182 ( * ) .

Les élus concernés seraient les maires, les adjoints de communes d'au moins 20.000 habitants, les présidents et les vice-présidents de conseils généraux ou de conseils régionaux ayant reçu délégation de l'exécutif. Ils devraient avoir interrompu leur activité professionnelle pour l'exercice de leur mandat .

L'aide financière que la collectivité pourrait accorder ne serait pas cumulable avec les dispositions proposées aux articles 31 et 32 du présent projet, concernant la prise en charge de dépenses similaires et liées à l'exercice d'un mandat spécial ou à la participation aux réunions. L'article 33 est donc conçu en complément des dispositions des deux articles précédents du projet de loi.

Le texte proposé prévoit que cette aide serait accordée par délibération de l'assemblée concernée, qui serait donc libre de prévoir ou de ne pas prévoir cette formule , dans les conditions de l'article L. 129-3 du code du travail.

Selon cet article, les aides accordées par les comités d'entreprise ou les entreprises pour les services d'aide à domicile ouvrent droit à certaines réductions de charges. Cette disposition serait donc manifestement inadaptée aux collectivités territoriales et les conditions d'attribution de l'aide aux élus pourraient plus sûrement être définies par décret .

En outre, il conviendrait comme aux deux articles précédents, d'étendre la disposition aux frais d'assistance aux personnes âgées, handicapées ou à celles qui ont besoin d'une aide à domicile .

Votre commission des Lois vous propose en conséquence un amendement à cette fin et d'adopter l'article 33 ainsi modifié .

* 177 Il s'agit de la sous-section 2 de la section 3 du chapitre III du titre II du livre 1 er de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales.

* 178 484 F à Paris et 404 F en région.

* 179 Conseil d'Etat, 24 mars 1950, Sieur Maurice.

* 180 Cour administrative d'appel de Paris, 26 janvier 1995, Legros.

* 181 Tribunal administratif de Limoges, 22 mai 1990, préfet de la Haute-Vienne.

* 182 Pour les élus municipaux : art. L. 2123-18-4 ; pour les élus départementaux : art. L. 3123-19-1 ; pour les élus régionaux : art. L. 4135-19-1.

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