N° 215

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 6 février 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE, relative au régime d' assurance chômage des intermittents du spectacle ,

Par M. Bernard FOURNIER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Xavier Darcos, Ambroise Dupont, Pierre Laffitte, Mme Danièle Pourtaud, MM. Ivan Renar, Philippe Richert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Philippe Nogrix, Jean-François Picheral, secrétaires ; MM. Nicolas Alfonsi, Jean Arthuis, François Autain, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Jean-Louis Carrère, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Fernand Demilly, Christian Demuynck, Jacques Dominati, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Daniel Eckenspieller, Mme Françoise Férat, MM. Bernard Fournier, Jean François-Poncet, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Marcel Henry, Jean-François Humbert, André Labarrère, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Serge Lepeltier, Pierre Martin, Jean-Luc Miraux, Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jack Ralite, Victor Reux, René-Pierre Signé, Michel Thiollière, Jean-Marc Todeschini, Jean-Marie Vanlerenberghe, Marcel Vidal, Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 e législ.) : Première lecture : 3407 , 3412 , 3426 , 3558 et T.A. 748

Commission mixte paritaire : 2558

Nouvelle lecture : 3557 , 3562 et T.A. 782

Sénat : Première lecture : 138 , 166 et T.A. 50 (2001-2002)

Commission mixte paritaire : 190 (2001-2002)

Nouvelle lecture : 212 (2001-2002)

Chômage : indemnisation.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Après l'échec de la commission mixte paritaire qui s'était réunie le 29 janvier 2002 au Palais-Bourbon, la proposition de loi relative au régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle a été examinée en nouvelle lecture le 5 février par l'Assemblée nationale.

A quelques précisions rédactionnelles près, l'Assemblée nationale est revenue au texte qu'elle avait adopté en première lecture le 12 décembre 2001, alors même que le contexte qui avait motivé le dépôt et l'adoption de la proposition de loi qui nous est soumise a profondément changé.

En décembre dernier, en effet, l'intervention du législateur était justifiée par la caducité, depuis le 1 er juillet 2001, des annexes VIII et X au règlement annexé à la convention du 1 er janvier 1997, relatives à l'assurance chômage des intermittents du spectacle.

Examinant, le 9 janvier 2002, la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale, votre commission avait partagé son souci de donner une base juridique incontestable au régime d'assurance chômage des quelque 120 000 salariés relevant des annexes VIII et X et de ménager un délai permettant aux partenaires sociaux de négocier un nouveau régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle sur la base de la convention UNEDIC du 1er janvier 2001.

Votre commission avait cependant jugé indispensable de limiter dans le temps la prorogation législative des annexes VIII et X, pour deux raisons :

- la première, d'ordre juridique, tenait au souci de respecter la compétence du législateur, à qui il appartient de fixer les conditions de mise en vigueur des règles qu'il édicte, comme l'a rappelé la décision du Conseil constitutionnel n° 86-223 DC du 29 décembre 1986. Or, la durée de la prorogation « temporaire » des annexes VIII et X prévue par la proposition de loi dépendait uniquement de l'intervention de l'agrément -que le ministre compétent n'est pas tenu de donner- d'un accord sur les aménagements à apporter à la convention générale du 1 er janvier 2001 pour définir un nouveau régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle. Bien plus, si aucun accord n'était agréé avant l'échéance de la convention du 1 er janvier 2001, cette prorogation temporaire devenait permanente : le rapport, en première lecture, de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale l'avait d'ailleurs très justement noté, en relevant que seul l'agrément d'aménagements à la convention du 1 er janvier 2001 emportait « l'extinction du dispositif » ;

- la seconde raison qui avait guidé votre commission était d'opportunité : il lui semblait en effet essentiel de fixer un terme à la prorogation législative des annexes VIII et X, pour limiter, d'une part, l'intervention du législateur dans un domaine dévolu à la négociation collective et, d'autre part, pour inciter les partenaires sociaux à reprendre les négociations et à les conclure dans un délai raisonnable.

Votre commission avait donc adopté un amendement limitant au 30 juin 2002 la prorogation des annexes VIII et X.

Cependant, le lendemain même de l'examen de la proposition de loi par votre commission, est intervenu un événement qui remettait en cause la justification de l'intervention du législateur pour prolonger le régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle.

En effet, le 10 janvier dernier, les partenaires sociaux ont signé un accord qui « à titre dérogatoire et dans l'attente de la négociation d'un nouvel accord, (maintient) les dispositions des annexes VIII et X dans la rédaction issue de la convention du 1 er janvier 1997 ». Cet accord, conclu pour la période du 1 er janvier 2001 au 30 juin 2002, a été signé par l'ensemble des organisations patronales et syndicales, à la seule exception de la CGT.

A condition d'être agréé par le ministre chargé de l'emploi, il permet, sans intervention du législateur, de combler le vide juridique existant depuis le 1 er juillet 2001.

Il traduit également la volonté des partenaires sociaux d'engager la réforme du régime prévu par les annexes VIII et X puisque les signataires de l'accord sont convenus de se réunir dès le 5 mars 2002 « pour examiner la situation de la gestion des annexes ».

Interrogé par votre commission, le gouvernement n'a cependant pas manifesté l'intention d'agréer l'accord du 10 janvier 2002.

Prenant acte de cette position , le Sénat, en première lecture, a estimé nécessaire de poursuivre l'examen de la proposition de loi.

En adoptant l'amendement proposé par votre commission, qui, comme l'accord du 10 janvier, limitait au 30 juin la prorogation des annexes VIII et X, il a voulu pallier la carence du gouvernement et donner , en quelque sorte, un « agrément législatif » à cet accord .

En revenant, en nouvelle lecture , au texte qu'elle avait adopté le 12 décembre, l'Assemblée nationale , tout comme le gouvernement qui se refuse à l'agréer, considère comme nul et non avenu l'accord du 10 janvier.

En prévoyant de proroger les annexes VIII et X pour une durée indéterminée, elle choisit d'ignorer la volonté exprimée par les partenaires sociaux de reprendre rapidement les négociations, et compromet du même coup les chances de parvenir à un accord sur le régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle.

Elle prend, par ailleurs, deux risques majeurs :

- celui de dessaisir les partenaires sociaux puisque, en l'absence de l'agrément d'un accord avant l'expiration de la convention UNEDIC du 1 er janvier 2001, la nature du régime d'assurance chômage des intermittents du spectacle se trouvera modifiée : de conventionnelle, elle deviendra législative. Ainsi, au prétexte de laisser aux partenaires « le choix du moment auquel ils décideront d'exercer pleinement leurs responsabilités 1 ( * ) », le texte adopté par l'Assemblée nationale organise leur dessaisissement ;

- celui de pérenniser le régime actuel, dont les dérives iront en s'accentuant, ce qui se traduira par un déficit croissant et pourrait, à terme, mettre en cause l'existence même d'un régime adapté à la spécificité de l'activité artistique et qui constitue un atout essentiel pour la vitalité de la création nationale.

Lors des débats en première lecture au Sénat, votre rapporteur avait souligné qu'en refusant d'agréer l'accord du 10 janvier 2002, le gouvernement pratiquait la politique du pire. Force est de reconnaître qu'en reprenant son texte de première lecture, l'Assemblée nationale adopte la même attitude.

Soucieuse de respecter la compétence des partenaires sociaux et de permettre une réforme du régime de l'assurance chômage des intermittents du spectacle indispensable à sa pérennité, votre commission proposera au Sénat de confirmer en nouvelle lecture la position qu'il avait prise en première lecture et de conforter l'accord du 10 janvier 2002 en limitant au 30 juin 2002 la prorogation des annexes VIII et X.

*

* *

* 1 Rapport en nouvelle lecture de M. Jean Le Garrec au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (n° 3562, 2001-2002).

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