Rapport n° 59 (2002-2003) de M. Ladislas PONIATOWSKI , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 13 novembre 2002

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N° 59

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 13 novembre 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur la proposition de résolution (n° 44, 2002-2003) présentée en application de l'article 73 bis du Règlement par MM. Ladislas PONIATOWSKI, Henri REVOL et Gérard LARCHER sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel et la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité (E-1742),

Par M. Ladislas PONIATOWSKI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Gérard Larcher, président ; MM. Jean-Paul Emorine, Marcel Deneux, Gérard César, Pierre Hérisson, Jean-Marc Pastor, Mme Odette Terrade, vice-présidents ; MM. Bernard Joly, Jean-Paul Émin, Patrick Lassourd, Bernard Piras, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Philippe Arnaud, Gérard Bailly, Bernard Barraux, Mme Marie-France Beaufils, MM. Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Jean Besson, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Marcel-Pierre Cleach, Yves Coquelle, Gérard Cornu, Roland Courtaud, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré, Yves Detraigne, Mme Evelyne Didier, MM. Michel Doublet, Bernard Dussaut, Hilaire Flandre, François Fortassin, Alain Fouché, Christian Gaudin, Mme Gisèle Gautier, MM. Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Charles Guené, Mme Odette Herviaux, MM. Alain Journet, Joseph Kergueris, Gérard Le Cam, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Jean-Yves Mano, Max Marest, Jean Louis Masson, Serge Mathieu, René Monory, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Claude Saunier, Bruno Sido, Daniel Soulage, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Trillard, Jean-Pierre Vial.

Voir le numéro :

Sénat : 44 (2002-2003).

Energie.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Votre rapporteur a déposé avec MM. Henri Revol et Gérard Larcher, le 5 novembre 2002, une proposition de résolution n° 44 sur la proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant les règles communes pour les marchés intérieurs de l'électricité et du gaz naturel et la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité (E 1742).

Si aucune demande d'inscription à l'ordre du jour n'est déposée, cette proposition de résolution deviendra une résolution du Sénat à l'issue du délai de dix jours à compter de la date de distribution du rapport, prévu par l'article 73 bis du règlement de notre assemblée.

Or, tout donner à penser que le Conseil européen des ministres de l'énergie adoptera, sous présidence danoise, le 25 novembre prochain, une position commune qui précisera les modalités de modification des directives électriques et gazières de 1996 de 1998.

Comme l'a indiqué Mme la ministre de l'industrie au cours d'une récente audition devant la Commission des Affaires économiques, la position de la France est particulièrement isolée parmi les Etats appartenant à l'Union européenne dans le cadre des ces négociations .

C'est pourquoi il est urgent que le Sénat prenne publiquement position sur les modifications proposées par la Commission européenne et dise son attachement aux valeurs du service public et à la préservation des intérêts nationaux, dans le cadre de la constitution du marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel.

I. LE PROCESSUS DE NÉGOCIATION DES DIRECTIVES SUR LE MARCHÉ INTÉRIEUR DE L'ÉNERGIE

Comme le soulignait notre collègue Aymeri de Montesquiou dans un rapport présenté au nom de la Délégation pour l'Union européenne intitulé Vers l'achèvement du marché intérieur de l'énergie 1 ( * ) , l'énergie n'est pas un produit de consommation comme un autre mais un bien primaire dont la carence peut déstabiliser une économie entière, un enjeu stratégique qui touche à la souveraineté étatique. C'est pourquoi la négociation des directives relatives à la constitution du marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel s'est inscrite dans le cadre d'un processus de difficiles négociations en cours depuis près de quinze ans, dont on rappellera les principales étapes.

A. LES DIRECTIVES DE 1996 ET DE 1998 SUR LE MARCHÉ UNIQUE DE L'ÉLECTRICITÉ ET SUR LE MARCHÉ UNIQUE DU GAZ

L'adoption des directives relatives à la démonopolisation des marchés électriques et gaziers a obéi à une procédure spécifique dont le déroulement s'est étendu sur plusieurs années.

1. La procédure d'adoption

En vertu des articles 81, 82 et 86 du traité sur l'Union européenne, les directives et règlements qui concernent les règles de concurrence entre les Etats de l'Union - et donc celles qui s'appliquent à la démonopolisation des secteurs de l'électricité et du gaz naturel - sont établis par le Conseil statuant à la majorité qualifiée , sur proposition de la Commission européenne et après consultation du Parlement européen, dans le cadre de la procédure de co-décision . Les Etats ne disposent donc d'aucun droit de veto sur ces dispositions qui, en cas de carence du Conseil, peuvent même être édictées par la Commission motu proprio car elles concernent des entreprises chargées de la gestion de service d'intérêt général.

La marge de manoeuvre de notre pays est donc étroite : en ne participant pas au consensus qui se dégagera le 25 novembre, il peut se voir imposer, dans les nouvelles directives de libéralisation, des dispositions contraires à ses intérêts essentiels. La dernière phase de négociation sera donc cruciale pour notre pays qui y trouvera la dernière chance de faire valoir ses vues.

2. Le contenu des directives

a) La directive n° 96/92/CE concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité

La négociation des directives relatives à la libéralisation du marché de l'électricité a débuté en 1987, avec la constitution du marché unique européen. Elle s'est poursuivie en 1989 par l'examen des mesures propres à assurer l'accès des tiers au réseau, puis de l'ensemble des dispositions qui composent la directive n°96/92. Ce texte prévoit une ouverture graduelle du marché de l'électricité :

- de 27 % en février 1997 ;

- de 30 % en février 2000 ;

- et de 35 % en février 2003.

Il a été transposé en France par la loi n°2000-1208 du 10 février 2000, relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

b) La directive n° 98/30/CE concernant les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel

La négociation de la directive du Parlement européen et du Conseil sur la libéralisation du marché du gaz naturel s'est déroulée, de 1992 à 1998, dans une large mesure sous présidence française. La directive, qui aurait dû être transposée au plus tard le 10 août 2000 prévoit, elle aussi, une ouverture en trois étapes :

- 20 % du marché le 10 août 2000 ;

- 28 % le 10 août 2003 ;

- 33 % en août 2008.

Comme le demandait votre rapporteur depuis plus de deux ans, un projet de loi de transposition n° 406 (2001-2002) relatif aux marchés énergétiques a été préparé par le Gouvernement. Le Sénat l'a adopté, le jeudi 16 octobre dernier en première lecture, en ajoutant la référence au service public dans son intitulé, preuve de l'intérêt que votre assemblée porte à cette question.

Pendant que la France s'emploie à rattraper le temps perdu, les négociations se poursuivent à l'échelon européen.

B. LA NÉGOCIATION DU NOUVEAU "PAQUET" DE DIRECTIVES SUR LA LIBÉRALISATION DES MARCHÉS DE L'ÉLECTRICITÉ ET DU GAZ NATUREL

Le 13 mars 2001, la Commission européenne a présenté deux textes tendant à modifier les directives de 1996 et de 1998 :

- la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant les règles communes pour les marchés intérieurs de l'électricité et du gaz naturel ;

- la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité.

Le contenu de ces documents s'est trouvé modifié au fil des négociations qui se sont déroulées depuis lors.

1. Contenu de la proposition de modification initiale

Comme l'indiquait, en janvier 2002, notre collègue Aymeri de Montesquiou, dans son rapport précité, la Commission de Bruxelles a exercé une forte pression pour que les Etats membres parviennent à un accord avant la fin de la présidence espagnole , le Président Romano Prodi menaçant même, à l'époque, de recourir à l'article 86 du Traité, en vertu duquel la Commission peut édicter une directive de sa propre initiative.

En matière d'ouverture du marché, la rédaction initiale de la proposition de modification des directives de 1996 et 1998 prévoit de reconnaître :

- le libre choix du fournisseur d'électricité pour les consommateurs du secteur non résidentiel le 1 er janvier 2003 ;

- le libre choix du fournisseur de gaz pour les consommateurs du secteur non résidentiel au 1 er janvier 2004 ;

- l'ouverture totale du marché le 1 er janvier 2005.

S'agissant de la création de nouvelles capacités de productio n, le projet prévoit le recours au système d'autorisation afin de laisser aux opérateurs le soin de construire de nouvelles unités, les Etats ne pouvant plus recourir au système d'appel d'offres que pour garantir la sécurité d'approvisionnement.

En ce qui concerne les stockages gaziers, la commission propose d'instaurer un droit d'accès des tiers aux stockages de gaz naturel .

Pour ce qui concerne la rémunération de l'accès au réseau , il est proposé de généraliser le système de l' accès réglementé , en vertu duquel l'utilisation du réseau s'effectue sur la base d'un tarif publié et approuvé par les autorités de régulation.

La séparation juridique des gestionnaires de transport par rapport aux fonctions de production constitue également une innovation de la proposition de directive qui va nettement plus loin que les directives de 1996 et 1998, lesquelles prévoyaient seulement que les activités de transport seraient séparées au plan de la gestion et que les entreprises intéressées s'abstiendraient de toute discrimination entre les utilisateurs de réseau.

S'agissant du statut des régulateurs nationaux , la Commission recommande qu'un régulateur indépendant soit désigné dans chaque Etat membre et qu'il exerce certaines compétences minimales telles que :

- la fixation ou l'approbation des conditions de connexion et d'accès aux réseaux internationaux ;

- la détermination ou l'approbation des tarifs au niveau national pour tenir compte des coûts et recettes résultant du transport transfrontalier d'électricité ;

- la fixation des règles concernant la gestion des congestions et l'attribution de capacités d'interconnexion pour le gaz et l'électricité ;

- la détermination de mesures propres à remédier à l'encombrement des réseaux nationaux d'électricité ou de gaz ;

- la garantie du respect d'exigences telles que le service universel, la protection des consommateurs, la cohésion économique et sociale, le respect de l'environnement et la sécurité d'approvisionnement.

Au cours du récent conseil des ministres de l'énergie du 4 octobre 2002, les bases d'un accord ont été envisagées. Elles pourraient consister en :

- une ouverture totale du marché à un terme qui reste à déterminer ;

- la définition des obligations de service public susceptibles d'être édictées pour protéger les ménages, lesquelles comprendraient notamment la péréquation tarifaire.

2. Les conclusions du sommet de Barcelone et leur mise en oeuvre

A l'issue de la réunion qui s'est déroulée à Barcelone les 15 et 16 mars 2002, le Conseil Européen a engagé le Conseil et le Parlement Européen à adopter, « dès 2002, les propositions en instance concernant la phase finale de l'ouverture des marchés de l'électricité et du gaz ». Ceci comporte notamment :

- le libre choix du fournisseur pour tous les consommateurs européens autres que les ménages à partir de 2004 pour l'électricité et le gaz, ce qui représentera au moins 60 % de la totalité du marché ;

- à la lumière de l'expérience acquise et avant le Conseil européen du printemps 2003, une décision sur d'autres mesures qui tiennent compte de la définition des obligations de service public, de la sécurité d'approvisionnement et, en particulier, de la protection des régions reculées et des groupes les plus vulnérables de la population ;

- la dissociation entre le transport et la distribution , d'une part, et la production et l'approvisionnement ;

- l' accès non discriminatoire au réseau pour les consommateurs et les producteurs, sur la base de tarifs transparents et publiés ;

- la création dans chaque Etat membre et dans le cadre réglementaire adéquat, d'un organisme régulateur en vue d'assurer, en particulier, le contrôle effectif des conditions de fixation des tarifs.

Le Conseil a en outre invité la Commission et le Conseil à analyser, lors du Conseil européen du printemps 2006, les progrès globaux réalisés sur le marché intérieur de l'énergie , notamment le degré de transposition du cadre réglementaire et ses effets en ce qui concerne la protection des consommateurs, les investissements en infrastructures, l'intégration effective des marchés, l'interconnexion, la concurrence et l'environnement.

De son côté, le Gouvernement français a, par la voix de Mme Nicole Fontaine, ministre de l'Industrie 2 ( * ) , rappelé l'accord des chefs d'Etat et de gouvernement réunis à Barcelone se donnant jusqu'au printemps 2003 pour prendre les décisions relatives à l'ouverture du marché du gaz et de l'électricité aux ménages et les éventuelles mesures qui les concerneraient. Il a également repoussé l'éventualité d'un accord politique sur cette question lors du Conseil du 4 octobre 2002 et déclaré que, dans cette hypothèse, il ne pourrait que s'y opposer au nom de la France. Mme Fontaine a en outre déclaré que la France participerait, dans un esprit constructif, mais sans précipitation, à l'élaboration d'un compromis acceptable pour tous et prenant notamment en compte les exigences nécessaires à l'exercice d'un service public de qualité.

C'est précisément un tel compromis que la Commission des Affaires économiques appelle de ses voeux.

II. LE CONTENU DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION N°44

Après avoir invité le Gouvernement à faire adopter, dès que possible, le projet de loi de transposition de la directive de 1998 voté par le Sénat le 16 octobre 2002, la proposition de résolution n° 44 appelle l'attention du Gouvernement sur six points cruciaux :

- l'effectivité de la démonopolisation chez nos partenaires ;

- la préservation du service public de l'électricité et du gaz ;

- l'unité des opérateurs nationaux de l'électricité et du gaz ;

- la préservation des stockages gaziers souterrains situés en France ;

- l'établissement d'un bilan de la démonopolisation ;

- la désignation d'autorités de régulation dans tous les Etats de l'Union.

1. L'effectivité de la démonopolisation chez nos partenaires

Comme l'ont montré les rapports pour avis adoptés sur les crédits de l'énergie, à l'occasion de l'examen du projet de loi de Finances, par votre commission des Affaires économiques 3 ( * ) mais aussi le colloque sur l'Energie 4 ( * ) , il y a bien loin entre le degré théorique et juridique de l'ouverture des marchés affiché par les Etats de l'Union européenne et l'effectivité de la concurrence qui y prévaut . C'est pourquoi il apparaît particulièrement judicieux d' exiger que la Commission européenne s'assure que l'ensemble des Etats membres de l'Union mettent en oeuvre des modalités d'ouverture efficientes du marché des clients éligibles puisque certains Etats s'en tiennent encore à une libéralisation purement juridique et formelle.

2. La préservation du service public de l'électricité et du gaz

Votre commission a constaté, avec satisfaction, que les conclusions du sommet européen de Barcelone ont clairement reconnu l'importance du service public . C'est pourquoi elle approuve pleinement les dispositions de la proposition de résolution qui tendent à ce que le Gouvernement favorise l'élaboration de mesures qui préservent efficacement l'étendue et le contenu du service public de l'électricité et du gaz , notamment en ce qui concerne les personnes les plus démunies, la desserte des régions les moins favorisées et la péréquation tarifaire.

3. L'unité des opérateurs nationaux de l'électricité et du gaz

Conformément aux déclarations du Président de la République qui faisait part, le 13 juillet 2002, de son attachement à une ouverture minoritaire du capital d'EDF destinée à permettre à l'opérateur historique de poursuivre son développement, la proposition de résolution réaffirme l'attachement du Sénat à l'unité des opérateurs nationaux de l'électricité et du gaz .

4. La préservation des stockages gaziers souterrains situés en France

Les capacités de stockage gazier , résultent de situations géologiques très spécifiques. Elles constituent une richesse pour les pays qui les détiennent. En France, ils sont un maillon essentiel de la chaîne gazière, permettant la modulation entre les approvisionnements, relativement constants au cours de l'année, et les besoins en gaz naturel, qui varient fortement suivant les saisons (le jour le plus froid de l'hiver, ils assurent plus de 60 % la demande).

Eu égard aux convoitises que suscitent ces infrastructures, le Sénat se doit d'appeler le Gouvernement à veiller, au cours de la négociation finale, à la préservation de la richesse nationale que constituent les stockages gaziers souterrains situés sur le territoire français .

5. L'établissement d'un bilan de la démonopolisation

Si la Commission européenne a établi un bilan de la transposition des directives européennes voici un peu plus d'un an, il s'avère qu' aucune étude systématique sur les effets de la démonopolisation n'a été menée jusqu'à ce jour au niveau de l'Union. Il apparaît donc très souhaitable, comme l'ont fait les participants au sommet de Barcelone, de demander qu'un bilan sur les effets de la démonopolisation des secteurs de l'électricité et du gaz , pour l'ensemble des consommateurs, soit établi dès que possible au niveau de l'Union européenne et régulièrement mis à jour.

6. La désignation d'autorités de régulation dans tous les Etats appartenant à l'Union

Il existe dans l'Union européenne deux conceptions de la mission des autorités de régulation. Pour la France, ces autorités, nécessairement indépendantes et spécialisées, doivent jouer un rôle majeur dans la mise en oeuvre des règles de concurrence. Pour d'autres Etats, comme l'Allemagne, les autorités chargées de préserver la concurrence sont les fondées à exercer les missions de régulateur, quitte à ce qu'ils doivent reconnaître, comme le Président du Bundeskartelamt, que la dérégulation qu'ils encadrent est imparfaite 5 ( * ) . Il apparaît donc très souhaitable que tous les régulateurs européens soient dotés de moyens suffisants, de compétences appropriées et d'une spécialisation qui constituent des gages d'indépendance . Aussi votre commission recommande-t-elle que la Commission européenne obtienne que tous les Etats de l'Union se dotent d'autorités de régulation spécialisées et réellement indépendantes afin d'assurer l'ouverture effective des marchés électriques et gaziers.

*

* *

Réunie le mercredi 13 novembre 2002, la commission des Affaires économiques a adopté la proposition de résolution dans la rédaction suivante, les groupes de l'union centriste, des républicains et indépendants, du rassemblement pour la république et le groupe socialiste votant pour, le groupe communiste, républicain et citoyen s'abstenant :

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Le Sénat,

Vu l'article n° 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant les règles communes pour les marchés intérieurs de l'électricité et du gaz naturel (E 1742),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité (E 1742),

Invite le Gouvernement à faire adopter, dès que possible, par le Parlement français le projet de loi relatif aux marchés énergétiques et au service public de l'énergie voté par le Sénat le 16 octobre 2002 ;

Demande au Gouvernement d'exiger que la Commission européenne s'assure que l'ensemble des Etats membres de l'Union mettent en oeuvre des modalités d'ouverture efficientes du marché des clients éligibles puisque certains Etats s'en tiennent encore à une libéralisation purement juridique et formelle ;

Souhaite que le Gouvernement favorise l'élaboration de dispositions qui préservent efficacement l'étendue et le contenu du service public de l'électricité et du gaz, notamment en ce qui concerne les personnes les plus démunies, la desserte des régions les moins favorisées et la péréquation tarifaire, dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité et d'efficacité économique ;

Réaffirme son attachement à l'unité des opérateurs nationaux de l'électricité et du gaz ;

Appelle le Gouvernement à veiller, au cours de la négociation finale, à la préservation de la richesse nationale que constituent les stockages gaziers souterrains situés sur le territoire français ;

Invite le Gouvernement à demander à la Commission européenne d'établir dans les meilleurs délais, et de mettre régulièrement à jour, un bilan sur les effets de la démonopolisation des secteurs de l'électricité et du gaz, pour l'ensemble des consommateurs -éligibles et non éligibles, professionnels et domestiques- au niveau de l'Union européenne ;

Souhaite que la Commission européenne obtienne de tous les Etats de l'Union qu'ils se dotent d'autorités de régulation spécialisées et réellement indépendantes afin d'assurer l'ouverture effective des marchés électriques et gaziers.

ANNEXE -

AMENDEMENTS EXAMINES PAR LA COMMISSION

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis

du Règlement du Sénat)

Amendement n° 1

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier, M. Le Cam, Mme Terrade

Remplacer le dixième alinéa de la proposition de résolution par un alinéa ainsi rédigé :

Invite le gouvernement à demander qu'un bilan public, officiel et précis, permettant d'évaluer les effets sur les tarifs et sur l'emploi de la libéralisation des services publics du gaz et de l'électricité soit mené dans les plus brefs délais au sein des pays de l'Union européenne.

OBJET

Cet amendement se justifie par son texte même.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 2

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier, M. Le Cam, Mme Terrade

Supprimer le cinquième alinéa de la proposition de résolution.

OBJET

La transposition des directives européennes visant à la libéralisation des services publics du gaz et de l'électricité doit faire l'objet d'un débat démocratique.

L'inscription à l'ordre du jour à l'Assemblée Nationale doit donner le temps aux différents acteurs sociaux de prendre connaissance des dispositions du texte de loi relatif aux marchés énergétiques.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 3

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier, M. Le Cam, Mme Terrade

Remplacer le dernier alinéa de la proposition de résolution par un alinéa ainsi rédigé :

Souhaite que la Commission européenne veille à ce que tous les Etats de l'Union européenne se dotent d'autorités de régulation assurant une représentativité de ses membres réellement démocratique.

OBJET

Cet amendement se justifie par son texte même.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 4

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

M. Coquelle, Mmes Beaufils, Didier, M. Le Cam, Mme Terrade

Remplacer le septième alinéa de la proposition de résolution par un alinéa ainsi rédigé :

Souhaite que le gouvernement veille à la préservation des obligations de service public de l'électricité et du gaz sur l'ensemble du territoire.

OBJET

Cet amendement se justifie par son texte même.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 5

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

MM. Raoul, Courteau, Trémel et les membres du groupe socialiste

Supprimer le cinquième alinéa.

OBJET

Le projet de loi relatif aux marchés énergétiques et au service public de l'énergie voté par le Sénat le 16 octobre dernier ne nous paraît pas acceptable car il anticipe les éventuelles conclusions des directives en cours d'examen au niveau européen, notamment en termes de degré d'ouverture des marchés. Ce n'est pas une bonne méthode, car elle affaiblit nos capacités de négociations. Mieux vaut donc s'en tenir à la seule transposition de la norme européenne en vigueur, actuellement non transposée , à savoir la directive de 1998 sur le marché intérieur du gaz. C'est pourquoi, il est proposé de supprimer cet alinéa.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 6

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

MM. Raoul, Courteau, Trémel et les membres du groupe socialiste

Rédiger comme suit le cinquième alinéa :

Invite le Gouvernement à s'opposer à l'ouverture totale des marchés énergétiques, même à moyen terme, à s'en tenir à l'accord dessiné lors du Conseil de Barcelone des 15 et 16 mars 2002, à refuser toute directive qui fragiliserait le bon accomplissement des missions de service public par Electricité de France et Gaz de France et remettrait en cause implicitement ou explicitement le statut de leurs salariés.

OBJET

Il est surprenant que la première recommandation de la proposition de résolution ne porte pas sur le coeur des projets énergétiques en cours d'examen au sein de l'Union mais sur un projet de loi franco-français, même si son contenu est directement lié au droit européen.

Il est donc proposé de réécrire cette première recommandation et de la faire porter sur les deux points fondamentaux :

- le degré et le calendrier d'ouverture des marchés énergétiques : en demandant au Gouvernement de s'opposer à toute ouverture complète du marché énergétique même à moyen terme et de s'en tenir à l'accord du Conseil de Barcelone, à savoir une ouverture des marchés à l'exclusion des marchés domestiques à partir de 2004 ;

- le bon accomplissement des missions de service public que seuls deux opérateurs publics forts sont capables d'assurer.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 7

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

MM. Raoul, Courteau, Trémel et les membres du groupe socialiste

Compléter in fine le septième alinéa par les mots suivants :

, dans le respect des principes d'égalité, de continuité, d'adaptabilité, d'universalité et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de prix et d'efficacité économique.

OBJET

Il paraît utile de compléter l'alinéa traitant du service public par une référence aux principes qui le fondent.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 8

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

MM. Raoul, Courteau, Trémel et les membres du groupe socialiste

Après le huitième alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé :

En conséquence de quoi demande au Gouvernement de s'opposer à la séparation juridique des activités de distribution et de transport des entreprises intégrées.

OBJET

La séparation juridique des activités de transport et de distribution sonnerait la fin du caractère intégré d'EDF et de GDF.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 9

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

MM. Raoul, Courteau, Trémel et les membres du groupe socialiste

Rédiger comme suit le dixième alinéa :

Invite le Gouvernement à demander qu'un bilan sur les effets de l'ouverture à la concurrence des marchés énergétiques, soit établi régulièrement par l'Union européenne et notamment avant toute modification de la législation. Ce bilan devra porter sur les conséquences pour chaque type de consommateurs et notamment les prix, sur l'emploi et sur l'efficacité énergétique et environnementale.

OBJET

Le terme de « démonopolisation » employé par les auteurs de la proposition de loi est un néologisme dont le sens mériterait d'être précisé. Il est dont proposé de réécrire cet alinéa portant sur le bilan de l'ouverture des marchés en élargissant son contenu et en le rendant obligatoire avant tout changement de la législation.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMISSION
DES AFFAIRES ECONOMIQUES
ET DU PLAN

(Application

de l'article 73 bis du

Règlement du Sénat)

Amendement n° 10

12 novembre 2002

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

« Marchés intérieurs de l'électricité et du gaz »

(E 1742)

AMENDEMENT

présenté par

M. Henri Revol

L'avant-dernier alinéa de cette proposition est ainsi rédigé :

Invite le Gouvernement à demander à la Commission européenne d'établir dans les meilleurs délais, et de mettre régulièrement à jour, un bilan sur les effets de la démonopolisation des secteurs de l'électricité et du gaz, pour l'ensemble des consommateurs -éligibles et non éligibles, professionnels et domestiques- au niveau de l'Union européenne ;

OBJET

Il s'agit de demander que le bilan soit établi dans les meilleurs délais et de préciser qu'il devra détailler les effets de l'ouverture des marchés sur les différentes catégories de clients : éligibles et non éligibles, professionnels et domestiques.

* 1 Sénat, rapport n° 187 (2001-2002).

* 2 Communiqué de presse du 12 septembre 2002.

* 3 Cf., en particulier, le rapport pour avis de M. Jean Besson sur le projet de loi de finances pour 2002.

* 4 Colloque organisé par votre commission le 26 juin 2002 au Sénat.

* 5 Cf. les déclarations de M. Ulf Böge, Président du Bundeskartelamt dans Ernergie News du 25 février 2002, p. 7.

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