E. LES DÉPENSES EN CAPITAL (TITRE VI18 ( * ))

Les dépenses d'investissement sont presque intégralement affectées aux actions de coopération avec les Etats en développement.

Tous les chapitres voient leurs crédits de paiement progresser, hormis les subventions d'investissement du chapitre 68-80 dont les dotations régressent fortement, mais portent sur des montants il est vrai plus symboliques.

Evolution des crédits du titre VI

(millions d'euros)

LFI 2002

PLF 2003

Evolution (%)

68-02. Participation de la France au FED

AP

3 353,40

0,00

N.S.

CP

218,46

496,00

+127

68-80. Subventions d'investissement

- art. 10 : aide à des projets de coopération

AP

0,76

0,50

-43,3

CP

1,07

0,30

-72

- art. 40 : établissements culturels et de

coopération AP

3,35

3,00

-10,4

CP

3,58

2,85

-20,4

- art.60 : projets de coopération militaire

AP

1,22

0,90

-26,2

CP

1,22

0,85

-30,3

68-91. Fonds de Solidarité Prioritaire

AP

150,16

190,00

+26,5

CP

112,20

112,00

-

68-93. Dons destinés à financer des projets mis en oeuvre par l'AFD

AP

152,45

190,00

+24,6

CP

137,20

137,00

-

Total AP

3 661,34

384,40

N.S.

CP

473,73

749,00

N.S.

1. La contribution française au Fonds européen de développement : davantage de sincérité, mais une efficacité toujours à prouver

Le PLF 2002 avait été marqué par le transfert du budget des Charges communes au budget du ministère des affaires étrangères de la participation de la France au FED, mouvement qui avait été préconisé depuis longtemps par votre rapporteur et apporte davantage de cohérence et de lisibilité .

Le montant inscrit pour l'exercice 2002 avait cependant été volontairement sous-estimé , de sorte qu'il a fallu procéder à un nouvel abondement de 137 millions d'euros en loi de finances rectificative. Les prévisions d'exécution à fin septembre 2002 établies par le Trésor, qui intègrent également les 286 millions d'euros de reports en début d'exercice, font ainsi état de 641 millions d'euros de crédits de paiement (y compris l'apurement de la dette de la France relative au STABEX, mécanisme que l'accord de Cotonou a rendu caduc), à comparer avec les 218 millions inscrits en loi de finances initiale. Le projet de budget pour 2003 prend dès lors acte de ce décalage et procède à une « opération vérité » par une inscription de crédits plus conforme à la réalité 19 ( * ) . Il s'agit également de donner des gages à la réforme en cours de l'aide européenne (cf. encadré ci-après), par une relance des crédits des paiements susceptibles d'accélérer la mise en oeuvre des nombreux projets dormants.

L'aide au développement européenne

La Communauté européenne agit à la fois comme donneur bilatéral et comme structure de coordination entre les Etats membres de l'Union. A ce titre, la Commission a en mars 2002 encouragé les Quinze à porter leur effort d'APD à 0,39% du RNB d'ici 2006. L'aide communautaire représentait 10% de l'APD mondiale en 2001 avec 5,91 milliards de dollars de décaissements selon trois canaux privilégiés :

- le FED , destiné aux 77 pays ACP et doté de 1,55 milliard d'euros de crédits de paiement ;

- 5 programmes régionaux , disposant de 2,3 milliards d'euros et consacrés aux pays méditerranéens (MEDA), à l'Amérique latine et à l'Asie (PVD/ALA), à l'Afrique du Sud (PERD), aux nouveaux Etats issus de l'URSS (TACIS), et aux Balkans (CARDS) ;

- des lignes budgétaires thématiques concernant l'aide humanitaire (programme ECHO), la promotion des droits de l'homme, la protection de l'environnement et le soutien aux ONG.

Au-delà de l'aide proprement dite, l'Union européenne a développé une politique intitulée « trade and aid », par opposition à la conception libérale du « trade no aid », qui met en doute la complémentarité de l'APD et du développement des échanges commerciaux . L'initiative TSA (« Tout sauf les armes »), adoptée en mars 2001, permet ainsi d'accorder aux produits des pays les moins avancés un accès en franchise de droits de douane et de quotas. L'accord de Cotonou, signé pour une durée de 20 ans en juin 2000 et qui se substitue aux conventions de Lomé, participe de la même volonté de lier aide et échanges commerciaux.

Destinée à l'origine aux pays ACP, l'aide communautaire a connu une extension de ses priorités géographiques avec le démantèlement de l'Union soviétique et la perspective de l'élargissement. Selon l'OCDE, les dix principaux pays bénéficiaires de l'aide européenne en 2000 étaient ainsi les suivants : Pologne, République tchèque, Roumanie, Yougoslavie, Maroc, Bosnie-Herzégovine, Hongrie, Slovaquie, Etats d'ex-Yougoslavie et Egypte. Les pays d'Afrique sub-saharienne représentaient 29,6%, le Moyen-Orient et le Maghreb 14,8%, l'Europe de l'est 20,3%. Cette relative dispersion a été critiquée, au même titre que la lenteur et la complexité des procédures, l'insuffisante coordination avec l'aide des Etats membres, l'importance des programmes dormants (pour environ 1,35 milliards d'euros fin 2000) et le défaut de stratégie confinant au saupoudrage mal contrôlé. Un certain nombre de réformes ont ainsi été décidées en novembre 2000 :

- limitation du champ d'action à six thèmes privilégiés (politiques macro-économiques et accès équitable aux services sociaux, sécurité alimentaire et développement rural, transports, commerce et développement, intégration régionale, bonne gouvernance) et trois priorités transversales (démocratie, rôle de la femme et protection de l'environnement) ;

- réforme des procédures de l'assistance technique : plan d'action, documents de stratégie-pays, simplification du fonctionnement des comités chargés de l'approbation et de la gestion des programmes ;

- réforme des structures : création en janvier 2001 du bureau EuropAid qui centralise désormais l'essentiel de l'aide, sous l'autorité des deux directions générales Relex (relations extérieures) et Développement, et déconcentration progressive par un renforcement de la présence sur le terrain des délégations européennes.

Lors de l'examen du budget 2002, votre rapporteur s'était en effet alarmé sur le montant des « crédits en compte » au 1 er janvier 2001 sur le budget français au titre de la contribution française : avec 7,53 milliards d'autorisations de programme et 4,54 milliards de crédits de paiement, le montant singulièrement élevé de non-décaissements indiquait une sous-utilisation massive de ces crédits , qui constitue sans doute un des plus grands motifs d'insatisfaction que nous donne l'Union européenne, et ampute d'autant les efforts d'aide bilatérale de la France. Le Comité d'Aide au Développement de l'OCDE, d'habitude prudent, a ainsi relevé dans sa dernière évaluation de l'aide européenne (été 2002) que « la Communauté européenne se heurte à de grandes difficultés pour améliorer les retombées en termes de développement de la répartition sectorielle de son aide ». Si le montant des crédits de paiement en compte sur le budget français au 1 er janvier 2002 n'a pas été fourni par le Trésor 20 ( * ) , la situation des versements du FED témoigne d'une amélioration substantielle du taux de décaissement global du FED 21 ( * ) (qui s'explique notamment par les cycles d'investissement) puisqu'il n'était que de 15% pour le 8 e FED fin 2000, mais dont on ne saurait se satisfaire compte tenu de son niveau encore très insuffisant et de l'imminence du 9 e FED 22 ( * ) .

Situation au 31/12/01 des versements du FED*

Engagements

Paiements

Reste à liquider

Taux de décaissement

6e FED

7 482

7 187

295

96,06%

7e FED

10 803

8 906

1 897

82,44%

8e FED

9 868

3 591

6 277

36,39%

Total

28 153

19 684

8 469

*La situation actualisée des reliquats sur enveloppe doit être fournie par la Commission.

Il convient également de relever le montant élevé de la trésorerie du FED , qui avec 370 millions d'euros fin 2001 a augmenté de plus de 40 % par rapport à l'année précédente, ce qui illustre un décalage persistant entre les appels à contribution et les engagements.

Votre rapporteur considère que la France témoigne peut-être d'une confiance excessive (ou de naïveté ?) à l'égard de la Commission européenne et des résultats à venir de la réforme de l'aide au développement communautaire, et doit accentuer sa vigilance sur les actions effectivement menées 23 ( * ) ainsi que ses exigences sur des délais réalistes d'évaluation des résultats. Le maintien de crédits de paiement élevés pour le FED devrait constituer une sorte de « dernière chance » soumise à une obligation de succès de la réforme. Si cette dernière venait à échouer, tant dans la mise en oeuvre de l'aide que dans l'utilisation réelle des crédits, la France devrait en tirer rapidement les conséquences avec ses partenaires et s'interroger sur l'intérêt que présente pour elle et pour les pays concernés sa position de premier contributeur.

* 18 Les crédits du titre V affectés aux actions de coopération ne concernent qu'une fraction minoritaire du chapitre 57-10 « Equipement administratif », déjà mentionnée précédemment.

* 19 Selon le Trésor, les prévisions de la Commission européenne pour l'exercice 2003 portent sur un montant de 2,3 milliards d'euros, correspondant à une contribution française de 552 millions d'euros. Toutefois le montant de l'inscription budgétaire demandée (496 millions d'euros) tient compte d'un surdimensionnement chronique des prévisions de la Commission et de la capacité réelle de mobilisation des ressources du FED, afin d'inciter la Commission à davantage de rigueur budgétaire.

* 20 Les réponses du ministère des finances au questionnaire budgétaire de votre rapporteur ont après force relances été transmises deux jours avant la présentation en commission, ce qui ne facilite pas un examen précis des crédits. En outre la qualité de ces réponses est inégale, et certaines d'entre elles sont lapidaires voire très parcellaires. Votre rapporteur rappelle à ce titre que le Président de la commission des finances de l'Assemblée a récemment exprimé son indignation face aux retards manifestés par certains ministères dans la transmission de l'information...

* 21 Les engagements ont été inférieurs en 2001 par rapport à 2000 (-60 %), mais les décaissements ont progressé de 36 %.

* 22 Le 9 e FED, conséquence financière des accords de Cotonou, prévoit pour la période 2000-2005 (vraisemblablement prolongée, compte tenu du retard pris) 13,5 milliard d'euros d'opérations en faveur des pays ACP, dont 24,3% seront à la charge de la France.

* 23 Le CAD a récemment souligné que « le processus de réforme et la mise en oeuvre du programme risquent encore de se heurter à quelques difficultés si des mesures ne sont pas prises pour, entre autres, mobiliser le soutien des sphères politiques (...) et affiner encore le dispositif organisationnel afin de préciser les responsabilités, d'accélérer l'acheminement de l'aide et de mettre en place les moyens organisationnels et analytiques voulus pour que la déconcentration porte ses fruits ». La route est encore longue...

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