3. Le PLF pour 2003 : une réaction nécessaire

L'évolution générale du budget pour 2003 constitue une entrée en loi de programmation tout à fait satisfaisante. Cette reprise était indispensable dans le contexte actuel marqué par une certaine montée des périls.

a) Évolution générale des crédits

Le projet de budget de la défense pour 2003 s'élève à 39,96 Mds €, dont 8,89 Mds € de pensions, soit un montant hors pensions de 31,07 Mds € .

Par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale pour 2002, la progression atteint + 6,3 %, contre une moyenne de + 1,1 % pour l'ensemble des budgets civils .

Les crédits (hors pensions) du titre III proposés pour 2003, s'élèvent à 17,43 Mds € contre 16,5 Mds € en 2002, soit une progression de + 4,7 % , égale au double de celle de + 2,24 % constatée pour l'ensemble des budgets civils de fonctionnement.

Les crédits des titres V et VI s'élèvent à 13,64 Mds € contre 12,3 Mds € en projet de loi de finances pour 2002, soit une augmentation de + 11,2 % , sensiblement supérieure à la hausse moyenne de + 5,34 % pour les dépenses d'investissement civil.

Le changement est d'autant plus net que, l'année dernière, le Gouvernement avait inscrit dans la présentation des chiffres du projet de budget 2002 - le report partiel de crédits d'équipement 2001 non consommés, à hauteur de 411,6 M€, ce qui lui avait permis d'afficher une progression - purement optique- de 0,6 % des crédits d'équipement et de 1,6 % du budget total de la défense.

Évolution globale des crédits

Mds €

LFI 2002

PLF 2003

Évolution

Rappel : budgets civils

Dépenses ordinaires -

16,64

17,43

+ 4,7 %

+ 5,1 %

Dépenses en capital (CP)

12,27

13,64

+11,2 %

- 1,7 %

Total 2001

28,91

31,07

+ 7,5 %

+ 2,5 %

b) L'effort français de défense en perspective

Avec 31,07 Mds €, le budget de la défense redevient le quatrième poste de dépenses de l'État , après la jeunesse et l'éducation nationale (68,963 Mds €), les charges communes (54, Mds €, dont 38,29 milliards de dette publique nette), les concours de l'État aux collectivités locales (58,2 Mds €) à égalité avec celui du secteur travail, santé et solidarité (31,655 Mds €).

Poids relatif du budget de la défense (hors pensions)

Budget Défense/Budget État
(LFI)

Budget Défense/PIB
(LFI)

1980

15,52 %

3,07 %

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

12,30 %

12,28 %

11,65 %

11,70 %

11,26 %

11,17 %

10,87 %

11,35 %

2,41 %

2,36 %

2,19 %

2,19 %

2,05 %

1,96 %

1,89 %

1,98 %

Alors que de 1996 à 2002, la part de l'effort consacré à la défense dans le budget de l'État a diminué de 1,4 point, et la part de l'effort de la défense dans le PIB de 0,5 point, on assiste à un redressement, puisque ces taux augmentent respectivement de presque 0,5 et 0,1 point.

Mais, sur le long terme la baisse reste considérable : ainsi depuis 1980, cette diminution atteint toujours plus de quatre points de PIB, et plus d'un point de budget général.

En outre, cette tendance baissière déjà marquée dès les lois de finances initiales, a jusqu'à présent été renforcée en cours d'exécution. Le défi sera donc celui de la durée.

c) L'amorce d'un rééquilibrage de la structure du budget militaire

Une année ne suffit pas pour inverser les tendances lourdes du budget de la défense et, en particulier, l'accroissement du poids relatif des dépenses de fonctionnement au détriment des dépenses en capital depuis 1990.

Équilibré en 1990, avec un léger avantage aux dépenses en capital, qui absorbaient 51,7 % de l'ensemble, le ratio apparaît aujourd'hui très défavorable à ces dernières, qui ne représentent plus que 38,9 % du budget de la défense.

Évolution de la structure du budget de défense 1990-2001 en termes de budgets exécutés

Loi de règlement 1990

Structure en %

Loi de règlement 2001

Structure en %

Titre III

Titres V et VI

13818

14555

48,7 %

51,3 %

17022

10825

61,1 %

38,9 %

Total

28373

100%

27847

100%

(Mds € courants)

Le tableau ci-dessus, qui retrace l'évolution de la structure du budget de la défense ex post, montre bien que les dépenses d'équipement du titre V, ont systématiquement servi de variable d'ajustement interne, tant en loi de finances initiale qu'en exécution budgétaire.

Budget de la défense : crédits votés et dépenses exécutées 1991=100

Le sacrifice des matériels est d'autant plus sensible que certaines dépenses d'entretien, en l'occurrence les dépenses d'entretien programmé, ont été transférées en titre V.

d) Les priorités du budget 2003

Le Gouvernement a procédé à certains changements dans la nomenclature budgétaire de nature à mieux faire correspondre les dotations du ministère à des actions en faveur de la défense nationale.

Contrairement aux pratiques antérieures, les titres V et VI du projet de budget pour 2003 ne comprennent plus un certain nombre de dépenses, dont on a pu dire qu'elles servaient à faire du « bourrage d'enveloppe ». Il s'agit des crédits consacrés au développement de la Polynésie, des dépenses de démantèlement des installations nucléaires à caractère militaire, qui ont vocation à être prises en charge par un fonds à compter du 1 er janvier 2003 pour un montant de 79,3 M €, ainsi que, selon les déclarations de Mme Michèle Alliot-Marie devant votre commission des finances, des dépenses éventuelles de recapitalisation des entreprises du secteur public de l'armement.

En outre, l'inscription de 190 M€ de crédits au titre du budget civil de recherche et de développement, BCRD, devrait donner lieu à une ouverture équivalente en collectif de fin d'année 2002.

(1) Entretenir les matériels et renforcer les capacités opérationnelles

Le rebond des crédits d'équipement, qui s'accroissent de + 11,2% pour atteindre 13,64 Mds €, tout appréciable qu'il soit, doit être remis en perspective. Pour le titre V, l'augmentation de 0,8 Md €, est à comparer aux quelque 445 M € de diminution du titre V dans le précédent projet de loi de finances et, surtout, aux 2 Mds €, de recul du même titre V hors reports autorisés.

Commandes du PLF 2003

- 59 avions Rafale (46 Air + 13 Marine)

- 70 valorisations canons automoteurs

- 55 rénovations d'engins AMX 10 RC

- 88 véhicules blindés légers

- 15 valorisations de systèmes Roland

- 680 missiles MICA (430 Air + 250 Marine)

- 6 véhicules blindés à roue pour la gendarmerie

- 3.620 véhicules de brigade et de police de la route pour la gendarmerie

- 42.000 gilets pare-balles à port discret

Trois domaines d'intervention sont particulièrement favorisés :

1) la remise à niveau de la disponibilité des matériels avec une enveloppe d'entretien programmé égale à 2,6 Mds € ;

2) le renouvellement des équipements en vue d'améliorer le renforcement des capacités opérationnelles de nos forces. C'est ainsi que sont prévus, 962 M € au titre du programme Rafale, 358 M € pour le financement des satellites d'observation Helios et de transmissions Syracuse, de 346 M € pour les frégates anti-aériennes Horizon, ainsi que 279 M € pour la poursuite du programme de fabrication des chars Leclerc ;

3) la relance des études, qui, avec un montant de 712 millions d'AP et de 655 M € de CP, vient inverser la tendance défavorable constatée au cours de la précédente loi de programmation : ainsi, entre 1997 et 2002, les AP étaient passées de 940 M € à 648 M €, tandis que les CP diminuaient corrélativement de 950 M € à 678 M €.

Livraisons en 2003

- 3 ème Hawkeye

- 45 chars Leclerc

- 3 hélicoptères de gendarmerie EC 145

- 2 hélicoptères Tigre (HAP)

- 3 avions cargo légers Casa 235

- 41 missiles Apache

- 60 missiles SCALP-EG

- 50 torpilles MU 90

- 4 chasseurs de mines type Eridan modernisés

- 5 remises à niveau de frégates F670

- 285 valorisations de véhicules de l'avant blindés

- 9.000 lance-roquettes anti-chars légers

- 88 véhicules blindés légers

- 3.000 véhicules de brigade et de police de la route pour la gendarmerie

- 42.000 gilets pare-balles à port discret

- 1 bâtiment hydrographique et océanographique

Le Gouvernement donne ainsi les moyens aux forces françaises d'augmenter leur taux d'activité , qui retrouvent le niveau des normes OTAN, sans toutefois égaler le niveau britannique. Cet effort devrait permettre d'atteindre :

- 100 jours de sortie sur le terrain pour l'armée de terre (contre 75 en 2001, à comparer aux 100 jours de la norme OTAN, et aux 110 à 150 jours de l'armée britannique),

- 100 jours à la mer pour les bâtiments de marine (contre 97 aujourd'hui, à comparer aux 100 jours de la norme OTAN et aux 150 jours pour les Britanniques ;

- 180 heures de vol pour les pilotes de combat , qui réalisent déjà le nombre d'heures de vol requis par la norme OTAN, à comparer aux 211 heures des forces britanniques.

(2) Poursuivre l'amélioration de la condition militaire

Le précédent gouvernement avait donné la priorité à la « condition militaire », qui avait fait l'objet d'efforts particuliers en la matière consistant :

- d'une part, en un plan exceptionnel d'amélioration de la condition des personnels , qui comprenait à la fois la revalorisation des rémunérations (221 M €), et plusieurs mesures catégorielles (79 M €), ainsi que des mesures de fonctionnement hors rémunérations et charges sociales pour un montant de (78 M €) ;

- d'autre part, en des mesures rendues publiques au printemps 2002 : le précédent gouvernement avait annoncé, mais non financé, une série de mesures représentant 174 M € en 2002 et 259 M € en 2003.

Ces mesures comportent un dispositif amélioré pour le repos compensatoire au titre du TAOPM (temps d'activité et d'obligations professionnelles des militaires), ainsi que diverses mesures d'ordre social et familial. On peut citer ainsi la revalorisation de l'indemnité pour charges militaires (ICM) de 7 % au 1 er avril 2002 pour ce qui concerne l'Île-de-France et de 4 % pour le reste du territoire ; le train de mesures comportait également une revalorisation de l'indemnité des services en campagne (ISC) égale à 10 % pour les militaires mariés et de 30 % pour les célibataires. Pour la marine, c'est l'indemnité journalière de sujétion pour absence du port de base (IJSAPB) de 7 %. Enfin, l'indemnisation des jours du TAOPM non pris est portée à 85 € par jour dans un maximum de 8 jours par an au lieu de 7 auparavant.

(3) Renforcer les moyens de la Gendarmerie

L'analyse des crédits proposés pour 2003 confirme également une autre tendance relevée sur la plus longue période : la priorité donnée à la Gendarmerie, et le poids croissant prélevée par celle-ci dans la répartition des moyens.

Évolution des moyens
- Titres III, V et VI -
(en pourcentage du total des agrégats correspondants)

LFI
1991

LFI
1996

LFI
2001

PLF
2002

PLF

2003

Air

Terre

Mer

Gendarmerie

Total

27,4

34,0

26,3

12,3

100

25,9

34,6

24,8

14,7

100

24,8

34,8

24,0

16,4

100

24,2

34,2

23,9

17,7

100

24,2

33,4

23,7

18,6

100

Représentant un peu plus de 12 % du total des moyens de la défense en 1991, la Gendarmerie en représente, en 2002, 18,6 % . Une autre façon d'appréhender le phénomène est de remarquer que les dépenses ordinaires affectées à la gendarmerie, se sont accrues en euros courants de 790 M € entre le projet de loi de finances pour 1998 et celui pour 2003, contre seulement de 116 M € pour les armées de l'air et de la marine. L'évolution reste significative, même si au cours de la même période les dotations ordinaires de l'armée de terre ont augmenté de plus de 2,5 Mds € courants avec la professionnalisation.

analyse des DéPENSES D'éQUIPEMENT

En dépit des engagements pris dans la précédente loi de programmation, les crédits de la défense ont servi de variable d'ajustement du budget de l'État .

Loin de bénéficier des « dividendes de la croissance », la défense a pâti d'une politique axée sur le court terme.

Ce qui est vrai du budget de la défense dans son ensemble l'est encore plus des dépenses en capital qui ont fait les frais de la montée inexorable des dépenses de personnels, dites RCS (rémunérations charges sociales). Le projet de budget pour 2003 tend à inverser cette évolution défavorable.

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