B. LA PROPOSITION DE LOI : UNIFIER LES RÈGLES DE COMPÉTENCE EN MATIÈRE D'APPLICATION DES PEINES

1. Un objectif : la continuité des parcours éducatifs

La présente proposition de loi tend à mettre en oeuvre l'une des recommandations importantes de la commission d'enquête du Sénat sur la délinquance des mineurs.

Dans ses conclusions, la commission d'enquête a souhaité que de véritables parcours éducatifs puissent être mis en place et qu'une continuité soit assurée dans le suivi des mineurs délinquants. Elle a très souvent constaté que de multiples ruptures jalonnaient le parcours de jeunes en grande difficulté ou délinquants et que la rupture du suivi éducatif était particulièrement marquée en cas d'incarcération :

« Certains mineurs doivent être contenus et enfermés pendant un temps parce que la sécurité de la société l'impose, parce qu'ils sont ancrés dans un processus d'auto-destruction qu'il faut arrêter.

« Aujourd'hui, cet enfermement est réalisé dans les quartiers des mineurs des maisons d'arrêt et marque une sorte de fin de parcours pour le mineur. Cependant que le juge des enfants n'est pas compétent pendant l'incarcération, la protection judiciaire de la jeunesse n'entre qu'avec réticence en prison. Dans ces conditions, l'enfermement marque un temps de contrainte sans éducation.

« En outre, les mineurs ne font que rarement l'objet de mesures d'aménagement de peine parce qu'ils sont le plus souvent incarcérés en détention provisoire et que les quartiers de mineurs des maisons d'arrêt ne se prêtent guère à des mesures de semi-liberté.

« A l'inverse, il est fréquent que la sortie de prison ne fasse l'objet d'aucun accompagnement, le mineur passant de la contention totale à la liberté totale.

« La commission souhaite une évolution profonde dans ce domaine, afin que des parcours éducatifs puissent être mis en oeuvre pour les mineurs délinquants réitérants, permettant des passages dans des structures plus ou moins ouvertes en fonction du comportement des mineurs ».

Afin de parvenir à cet objectif, la commission d'enquête a notamment proposé de faire du juge des enfants le juge de l'application des peines pour les mineurs, en milieu fermé comme en milieu ouvert.

2. Le dispositif proposé

Afin de contribuer à assurer une continuité dans le suivi des mineurs délinquants, la présente proposition de loi tend à donner au juge des enfants une compétence pleine et entière en matière d'application des peines prononcées par les juridictions spécialisées pour mineurs.

La proposition de loi, qui modifie l'article 20-9 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante prévoit donc dans son article 1 er , qu'en cas de condamnation prononcée par une juridiction spécialisée pour mineurs, le juge des enfants exerce les fonctions dévolues au juge de l'application des peines par le code pénal et le code de procédure pénale. Le tribunal pour enfants et la chambre spéciale des mineurs exerceraient alors les attributions dévolues en matière d'application des peines au tribunal correctionnel et à la chambre correctionnelle. Ces juridictions exercent en effet une compétence en cas d'appel des décisions du juge de l'application des peines.

L'attribution au juge des enfants des compétences dévolues au juge de l'application des peines ne modifierait en rien les autres règles procédurales. Ainsi, la commission d'application des peines continuerait à statuer sur les permissions de sortie et les réductions de peines, le juge des enfants remplaçant le juge de l'application des peines au sein de cette commission.

La proposition de loi prévoit que le juge des enfants exerce les fonctions dévolues au juge de l'application des peines jusqu'à ce que le condamné ait atteint l'âge de vingt-et-un ans . Cependant le texte tend à permettre au juge des enfants de se dessaisir au profit du juge de l'application des peines lorsque le condamné a atteint l'âge de dix-huit ans, en raison de sa personnalité ou de la peine prononcée.

La proposition de loi prévoit en outre que le juge des enfants pourra désigner un service de la protection judiciaire de la jeunesse pour veiller au respect des obligations imposées au condamné.

L' article 2 tend à compléter l'article 727 du code de procédure pénale pour inclure le juge des enfants dans la liste des magistrats qui sont tenus de visiter les établissements pénitentiaires.

Les articles 3 à 5 tendent à opérer des coordinations dans le code de procédure pénale et dans l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

L' article 6 prévoit l'application de la proposition de loi en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

Enfin, l' article 7 tend à reporter au 1 er janvier 2004 l'entrée en vigueur des dispositions de la proposition de loi.

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