B. LES MOYENS DE FONCTIONNEMENT (TITRE III)

1. Les imperfections de l'agrégat 11 (« Personnel, moyens et équipements des services »)

Depuis la mise en oeuvre du décret du 20 décembre 1998 portant fusion des services relevant des affaires étrangères et de l'ancien ministère de la coopération, il est devenu plus difficile d'identifier clairement les moyens spécifiquement affectés à la coopération avec les pays en développement . Le « bleu » précise d'ailleurs que « le ministère des affaires étrangères se caractérise par une certaine fongibilité des moyens et une rapide rotation des effectifs entre administration centrale et réseau à l'étranger, d'une part, ainsi que par la polyvalence des structures, des coûts et des effectifs, notamment à l'étranger, d'autre part » .

L'agrégat « Personnel, moyens et équipement des services » comporte une « mission » de « coopération internationale », dont les instruments sont la DGCID, le service des affaires francophones, les services d'action culturelle et de coopération des postes diplomatiques et l'AEFE (placée sous la tutelle de la DGCID). Il apparaît que 26 % des effectifs réels du ministère (8.913 emplois), soit 2.319 emplois (dont près des trois quarts à l'étranger) étaient en 2001 affectés à la coopération. Votre rapporteur spécial déplore que le « bleu » ne précise pas cette part pour 2002 ni a fortiori pour 2003 . Cette part est légèrement inférieure à celle de l'administration générale du Quai d'Orsay (« pôle de gestion transversale »), mais serait plus élevée si l'on y intégrait les recrutements locaux et 265 agents des alliances françaises, qui ne figurent pas dans l'agrégat.

2. Evolution globale : un effort conséquent de maîtrise des dépenses de fonctionnement

Le rapprochement de la « grille » définie par les « jaunes » et des crédits inscrits aux « bleus » permet d'établir le tableau suivant :

Crédits inscrits au budget des affaires étrangères au titre de la coopération entre les Etats en développement - Dépenses de fonctionnement (DO + CP)

(en millions d'euros)

LFI 2003

PLF 2004

Evolution 2002/ 2003 (%)

Montant

% des crédits du MAE

Montant

% des crédits du MAE

Services centraux dont :

32,8

14,6

30,6

13,6

-6,7

- rémunérations, cotisations et prestations

21,6

14,5

20,4

13,5

-5,5

- moyens généraux des services

10,8

15,2

9,9

14,3

-8,3

- équipement administratif (titre V)

0,3

9,7

0,27

6,4

-10

Services déconcentrés et établissements à l'étranger dont :

291,1

24,2

282,3

23,4

-3

- rémunérations, cotisations et prestations (1)

117,5

21,5

111

20,7

-5,5

- subventions aux établissements publics

104,3

28,5

105,3

28,4

+1

- établissements culturels, de coopération et de recherche

37,8

73,5

37,5

73,5

-0,8

- moyens généraux des services

13,8

6,9

12,7

5,9

-8

- équipement administratif (titre V)

17,7

44,2

15,8

45,9

-10,7

Délégations auprès d'organisations intergouvernementales

4,5

N.S.

4,1

N.S.

-8,9

Total pour le seul titre III (2)

310,3

21,7

300,9

21,5

-3

Source : commission des finances du Sénat, à partir des « bleus » et « jaunes » 2003 et 2004

(1) Les dotations globalisées prévues en 2004 dans le cadre de l'expérimentation des budgets pays sont intégrées dans les rémunérations et prestations sociales.

(2) Ont été déduits du titre III les pensions civiles, les dépenses d'action sociale, les frais de réception et de déplacements et les frais de justice.

Avec une diminution de 2,2 %, l'évolution des crédits du titre III de l'ensemble du ministère - minorés des dépenses afférentes aux pensions civiles, à l'action sociale, aux frais de réception et de déplacements et aux frais de justice 19 ( * ) - est inférieure à celle des crédits de fonctionnement affectés aux actions de coopération comptabilisés dans le jaune, qui diminuent de 3 % 20 ( * ) . Ainsi l'effort de diminution des dépenses de fonctionnement du ministère a davantage porté sur la coopération que sur les autres missions.

Les lignes budgétaires concourant à la coopération et au développement ne bénéficient d'aucune mesure nouvelle positive (celle de 9,7 millions d'euros dont bénéficie l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger est annulée par la révision à la baisse des services votés), hormis les traditionnelles mesures de revalorisation salariale de l'administration centrale. Ces efforts sont à rapprocher de la rigueur assumée par l'ensemble du ministère dans la gestion de ses crédits de fonctionnement , qui se traduit par :

- une diminution nette des effectifs de 116 emplois et de 4,2 % de la masse salariale ;

- une forte baisse de 8,2 % des moyens généraux de l'ensemble des services centraux et déconcentrés (chapitre 37-90) ;

- une économie sur les indemnités de résidence, permettant la revalorisation des rémunérations des personnels de recrutement local (4,2 millions d'euros) et l'abondement des primes versées en administration centrale (3,8 millions d'euros) dans le cadre d'une harmonisation avec les autres ministères.

Les établissements culturels et de recherche à l'étranger voient leur situation relativement préservée comme en 2003, puisque la dotation du chapitre 37-95 s'inscrit en baisse modérée de 0,8 %.

Dans le cadre du chantier ouvert par le ministre sur la valorisation des métiers de l'action culturelle et du développement, une réflexion à moyens budgétaires constants a été engagée sur l'évolution du dispositif culturel de la France à l'étranger dans son ensemble , visant à renforcer les principaux établissements, ou ceux sur lesquels le ministère souhaite s'appuyer prioritairement. Au terme de cette réflexion, un plan de modernisation du réseau pourrait être proposé en vue d'organiser son évolution à moyen terme (2003-2006). Son objectif est de permettre à un dispositif resserré de bénéficier de moyens accrus. Sa mise en oeuvre répondra, selon le ministère, à un triple souci :

- le schéma d'évolution du réseau devra être global , porter sur l'ensemble des régions du monde et sur tous les types d'implantation quels que soient leurs statuts : établissement à autonomie financière, association de droit local (alliance française), service d'ambassade. Les principes d'ergonomie, de cohérence et d'efficacité seront mis en exergue et pourront trouver des traductions très différentes ;

- ce plan devra aboutir à des redistributions de compétences , à partir de l'analyse pragmatique des besoins et des missions confiées à nos implantations, ainsi que de leurs performances relatives. C'est ainsi qu'une Alliance ou un établissement à autonomie financière pourraient être amenés à prendre le relais d'un SCAC que son faible volume d'activités conduirait à fermer, qu'un établissement à autonomie financière pourrait être dissous au profit d'une Alliance ou d'un SCAC, ou encore qu'une Alliance à l'étranger pourrait cesser de recevoir l'appui financier de la France, là où elle coexisterait avec un établissement à autonomie financière plus efficace. Chaque fois qu'une fermeture sera envisagée, un cadre de substitution (redéploiement des fonctions vers des implantations-relais et renforcement des moyens) sera prévu avant de procéder à la restructuration correspondante ;

- dans cet effort de restructuration, les « périmètres » physique, administratif et fonctionnel seront distingués, et le statut juridique de l'établissement à autonomie financière devrait être réformé . La reconnaissance de la mission de coopération assurée par les établissements à autonomie financière, la généralisation en parallèle de l'autonomie financière au bénéfice des SCAC, devrait ouvrir la voie à la création d'une forme administrative unifiée.

On observe comme en 2003 un décalage entre le « bleu », qui affecte l'ensemble des 159 centres culturels (dont 148 bénéficient de l'autonomie financière) à la mission « Coopération culturelle et scientifique » 21 ( * ) de l'agrégat « Coopération et interventions internationales », et le « jaune », qui attribue à la coopération 73,5 % des subventions de fonctionnement à ces établissements. C'est bien la conception chiffrée du « jaune » qui prévaut puisque près du tiers des établissements du réseau sont situés dans des pays développés. En termes de montants affectés au cours de l'exercice 2002, les principales villes bénéficiaires sont les suivantes :

Principales subventions de fonctionnement versées aux établissements culturels en 2003

(en euros)

Ville d'implantation

Montant

 
 
 

Hanoi

1.085.000

 

Vienne

705.300

Beyrouth

1.066.000

 

Moscou

676.000

Rabat

1.031.000

 

Tunis

650.000

Phnom Penh

1.007.000

 

Budapest

650.000

Mexico

953.000

 

Alger

640.300

Berlin

860.800

 

Tel Aviv

612.000

Rome

811.400

 

Varsovie

600.700

Meknes

728.500

 

Marrakech

592.700

TOTAL ppaux étbts

12.669.700

 

TOTAL tous étbts

42.331.450

Source : ministère des affaires étrangères

Parmi les trois établissements publics subventionnés par le ministère (l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger - AEFE - l'Office français de protection des réfugiés et apatrides - OFPRA - et l'Office universitaire et culturel français pour l'Algérie - OUCFA), seuls l'AEFE et l'OUCFA s'inscrivent réellement dans l'aide au développement, l'OUCFA n'étant pas doté depuis deux ans. La dotation de l'AEFE diminue de 1,8 % par rapport à 2003. La quote-part retenue par le « jaune » pour l'agence indique en outre que 31,7 % des élèves scolarisés par cette agence relèvent vraiment de la coopération, soit environ la moitié des élèves étrangers.

Enfin au sein des crédits affectés aux « moyens généraux des services », les dépenses relatives à la Commission coopération développement 22 ( * ) s'inscrivent en diminution de 4,3 %, et celles consacrées au Haut conseil à la coopération internationale enregistrent une diminution équivalente (après une baisse de 26,1 % en 2003). Le HCCI continuera de bénéficier de 12 emplois, dont 5 titulaires. Conformément aux dispositions du décret du 14 novembre 2002, qui a remanié le format et la composition du HCCI, et au souhait du Premier ministre lors de l'installation du Haut conseil le 17 février 2003, celui-ci a préparé un programme pour la période 2003-2005 tenant compte des deux missions qui lui sont assignées : la concertation entre les différents acteurs de la coopération internationale pour le développement et la sensibilisation de l'opinion publique aux enjeux de cette coopération. Le programme triennal retient les sept thèmes suivants, qui feront chacun l'objet d'une commission spécialisée : information du public, éducation au développement ; coopération décentralisée ; lutte contre la pauvreté, les inégalités et l'exclusion ; financement du développement ; économie et solidarité ; négociations internationales, mobilisation des savoirs et concertation des acteurs ; crise, prévention et reconstruction.

Votre rapporteur spécial relève que la mission essentielle du HCCI depuis l'élection de notre collègue Jacques Pelletier à sa présidence, voici un an, a consisté à élaborer son programme de travail pour les trois prochaines années... Le Haut Conseil dans sa nouvelle composition n'a donc encore rendu aucun avis depuis octobre 2002 23 ( * ) . Il a néanmoins mis à profit l'année 2003 pour envoyer des représentants au sommet de l'OMC à Cancun ou au comité des institutions de Bretton Woods à Dubaï. Dans la mesure où cet organisme, en dépit de trop rares contributions écrites de qualité, n'a jamais vraiment fait la preuve de son utilité, votre rapporteur spécial considère que le nouveau mandat de trois ans qui lui a été attribué constitue pour le HCCI une « dernière chance » de prouver sa légitimité. Il note avec plaisir que c'est la tâche que lui a assignée le Président Pelletier.

* 19 La baisse du périmètre intégral du titre III est toutefois proche avec - 2,35 %.

* 20 D'après les réponses du ministère, les crédits de la DGCID imputés sur le titre III diminuent de 1,6 %, mais les chapitres pris en compte ne sont pas les mêmes que les crédits de coopération comptabilisés dans le jaune.

* 21 Ces centres culturels sont implantés dans 90 pays. La coopération est également assurée par un réseau de 1.135 alliances françaises présentes dans 138 pays, dont 295 bénéficient d'une aide du ministère des affaires étrangères (223 sous forme de subventions).

Les moyens de fonctionnement des SCAC relèvent en revanche de l'agrégat « Personnel, moyens et équipements des services ».

* 22 Cette commission est une structure de concertation paritaire entre les pouvoirs publics et les associations de solidarité internationale dans une volonté commune de dialogue et d'échange d'informations.

* 23 Le dernier avis, publié le 29 octobre 2002, a porté sur les « recommandations relatives à la politique française de coopération au développement ».

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