B. LE FONDS POUR L'EMPLOI DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER (FEDOM)

1. Évolution globale du FEDOM

Dans le projet de loi de finances pour 2004, les crédits du fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer (FEDOM) représentent 41 % des crédits du ministère de l'outre-mer . Cette proportion était de 44 % en 2003, 40 % en 2001 et de 33 % en 1999.

La baisse de cette année s'explique à la fois par la stabilisation des crédits en volume, alors que le budget de l'outre-mer progresse du fait notamment des dispositions relatives à la couverture maladie universelle.

Depuis 2000, les crédits du FEDOM ont progressé de 49 %, soit une dépense supplémentaire de 157 millions d'euros.

Certains crédits relatifs à la politique de l'emploi outre-mer restent inscrits au budget du ministère des affaires sociales, malgré la volonté affichée ces dernières années de regrouper l'ensemble des crédits au budget de l'outre-mer. Il en va ainsi des stages d'insertion et de formation à l'emploi (SIFE) et des stages d'accès à l'entreprise (SAE), dont le montant s'élevait en 2002 à 27,8 millions d'euros.

Les crédits du FEDOM s'établissent dans le projet de loi de finances pour 2004 à 459 millions d'euros .

Le FEDOM a cependant connu deux changements majeurs par rapport à l'année précédente :

- dans le cadre de la mise en place de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), une expérimentation est mise en place en Martinique. 70 millions d'euros sont transférés du FEDOM à la préfecture de Martinique (et viennent donc abonder un nouvel article (44-03-21) ;

- les moyens du FEDOM, qui étaient répartis en loi de finances entre plusieurs articles, ont été rassemblés sur une même ligne budgétaire.

Votre rapporteur avait eu l'occasion lors de son rapport spécial 2003 de faire un certain nombre de remarques concernant la répartition des crédits du FEDOM.

Il déplorait ainsi la part prépondérante des emplois aidés dans le secteur non marchand, qui lui paraissait contraire à la vocation du FEDOM. La globalisation constitue à ce propos une avancée positive, tant en ce qui concerne la mise en oeuvre de la loi organique 1 er août 2001 relative aux lois de finances du que de la souplesse d'utilisation ainsi accordée. En effet, la fongibilité accrue des crédits permettra aux autorités d'ajuster le volume des différents contrats à la situation locale. La répartition devrait être décidée par le comité directeur du FEDOM.

Deux remarques peuvent êtres faites concernant les crédits du FEDOM :

- le première concerne la lisibilité du dispositif. Si la fongibilité des crédits est incontestablement un facteur d'efficacité, elle ne facilité pas pour l'hure le travail du Parlement. Les lignes budgétaires qui étaient regroupées au sein du FEDOM sont dorénavant concentrées. La ministre de l'outre-mer a cependant indiqué que, en ce qui concerne l'année 2004, de grands mouvements de crédites entre les différents types de contrat ne devraient pas se produire, l'année 2003 servant de base de travail ;

- la seconde remarque concerne le financement des dispositions du FEDOM. Votre rapporteur spécial se félicite ainsi que les 35 millions d'euros dégagés par la sortie des emplois-jeunes soient redéployés en faveur de l'aide à l'emploi marchand, selon les souhaits exprimés par la ministre de l'outre-mer.

En ce qui concerne l'expérimentation en Martinique, votre rapporteur spécial tient à souligner qu'un succès de l'initiative ouvrirait la voie à une gestion plus efficace des crédits du FEDOM au niveau local, et pourrait permettre en conséquence une réorientation des fonds vers le secteur de l'emploi marchand.

Les crédits du FEDOM en 2003

La répartition de ces crédits entre les articles qui composent le chapitre 44-03 est la suivante :

Le graphique ci-dessus met en évidence la part prépondérante des dispositifs d'emplois aidés dans le secteur non marchand (les contrats emplois consolidés, les contrats emplois solidarité ou encore les emplois-jeunes).

Les dispositifs d'insertion dans le secteur marchand (contrat d'accès à l'emploi, projet initiative jeune ou allocation de retour à l'activité) sont minoritaires.

Source : rapport spécial « Outre-mer », n° 68, Tome III, annexe 28 (2002-2003)

2. La consommation des crédits du FEDOM

Le taux de consommation des crédits des dispositifs qui composent le FEDOM est inégal, ce qui se traduit par des reports d'une année sur l'autre d'un montant non négligeable (32 millions d'euros de 2000 sur 2001 et 40,2 millions d'euros de 2001 sur 2002).

Compte tenu des reports de l'année précédente, la dotation du FEDOM disponible au titre de l'année était majorée de 8 % en 2001 et 2002. Les crédits du FEDOM sont par ailleurs soumis à de nombreux mouvements de crédits en cours d'année si bien que, en tenant compte des reports et de ces mouvements, les crédits ouverts en 2001 étaient supérieurs de 14 % aux crédits inscrits en loi de finances initiale.

Le niveau de consommation des crédits du FEDOM varie très fortement selon les dispositifs. En 2002, les crédits des contrats emploi solidarité (CES), des contrats emploi consolidés (CEC), des contrats d'insertion par l'activité (CIA) et des emplois-jeunes ont été dépensés à plus de 97 %, voire à 100 % pour les deux principaux d'entre eux.

En revanche, les taux de consommation des crédits relatifs aux dispositifs d'aide à l'emploi marchand sont moins satisfaisants : 46 % pour la prime à la création d'emploi, 27 % pour les projets initiative jeune (PIJ), 5,6 % pour l'allocation de retour à l'activité et 88 % pour les contrats d'accès à l'emploi (CAE). En ce qui concerne cette dernière mesure, le ministère indique que les demandes constatées au niveau local seraient cependant supérieures aux enveloppes allouées.

Votre rapporteur spécial notait pour l'année 2003 (donc, sur les crédits connus à l'époque, c'est à dire 2001) :

« En 2001, le « contrat » de gestion prévoyait le report de 40,2 millions d'euros de crédits sur le chapitre 44-03 du FEDOM et les reports de 2001 sur 2002 se sont élevés à 40,2 millions d'euros : l'ensemble des reports de 2001 sur 2002 s'explique par l'application de la régulation budgétaire.

« Une question se pose : le choix de faire porter les reports sur les dispositifs d'aide à l'emploi marchand s'explique-t-il par la difficulté de consommer ces crédits ou par la volonté de privilégier les dispositifs d'aide à l'emploi non marchand ? » .

La fongibilité des crédits, qui sera désormais possible avec la globalisation des crédits, devrait permettre d'améliorer la consommation des crédits et leur adaptation à la situation locale . Pour autant, il conviendra de rester vigilant pour l'année 2004, afin que les possibilités ouvertes par la LOLF se traduisent sur le terrain par une meilleure utilisation des fonds.

3. Les critiques émises par la Cour des comptes

En application des dispositions de l'article L. 135-5 modifié du code des juridictions financières, la Cour des comptes a transmis au président de la commission des finances du Sénat un référé (n° 35715) sur la gestion du fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer. Les observations de la Cour des comptes portent sur les exercices allant de 1996 à 2000.

Les critiques portaient sur un certain nombre de points.

1) L'organisation et la gestion

La Cour des comptes relève que

« [...] la procédure suivie devant le comité directeur [du FEDOM] correspond à une consultation sans portée réelle dès lors que ses avis sont chaque année substantiellement modifiés par le comité permanent du fonds.

« [...] A cette défaillance dans le contrôle de l'évaluation, s'ajoute l'extrême faiblesse des moyens de suivis en place par l'administration centrale au regard du montant des crédits budgétaires mis en cause

«  Depuis la création effective du fonds en 1995, les dotations initiales n'ont, en effet, cessé de croître [...] Et pourtant, ce fonds, qui selon les réponses adressées à la Cour est « au coeur des priorités budgétaires du ministère », est géré au soin de l'administration centrale par un unique agent à qui est ainsi confiée une tâche à l'évidence beaucoup trop lourde ».

2) Les modes d'intervention

La Cour des comptes a relevé des « anomalies ou des incertitudes auxquelles il convient de mettre un terme ». Elle note ainsi des dépenses étrangères à l'objet du FEDOM, et un suivi insuffisant des actions menées en faveur de l'emploi. Ces critiques rejoignent d'ailleurs en partie celles que votre rapporteur avait été amené à émettre l'année dernière concernant le faible taux d'utilisation de certaines enveloppes.

A la suite de ce référé, votre rapporteur spécial a interrogé la ministre de l'outre-mer à ce propos lors de son audition par la commission des affaires sociales le mardi 7 octobre.

La ministre lui a alors indiqué que les éléments de réponse avaient été transmis à la Cour des comptes.

La réponse aux observations définitives de la Cour relative au fonctionnement du FEDOM a été adressée à la Cour des comptes le 22 septembre 2003, qui l'a fait parvenir au président de la commission des finances le 14 octobre 2003.

Les éléments contenus dans ce document indiquent que le ministère a pris la mesure des observations qui lui avaient été adressées.

1) Concernant les critiques émises sur l'organisation et la gestion :

« Le ministère partage l'avis de la Cour sur l'inadaptation des dispositions du code du travail relative aux instruments d'évaluation dans le cadre du FEDOM.

« De l'avis du ministère, cette inadaptation résulte moins des dispositions législatives succinctes consacrées au FEDOM dans ce code que des dispositions réglementaires prises pour leur application

« [...] Il a déjà été répondu à la Cour sur le chantier, effectivement lancé depuis la réunion du comité directeur du FEDOM du mois de janvier 2003, de la réalisation d'un cahier des charges pour l'évaluation de l'effet des mesures financées par le FEDOM

«  D'autres initiatives répondent, selon le ministère de l'outre-mer, aux préconisations de la Cour :

- pour la première fois, en mais 2003, une circulaire signée conjointement par le ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité et celui de l'outre-mer a assigné aux préfets des objectifs à atteindre en matière de retour à l'mploi des publics prioritaires de la politique de l'emploi dans les DOM[...]

- priorité budgétaire du ministère, la politique de l'emploi fera l'objet d'une expérimentation dès 2004 dans le cadre de la Moderfie. Cette expérimentation sera l'occasion de moderniser en profondeur la mise en oeuvre de cette politique publique et de souligner la valeur ajoutée du ministère ».

En ce qui concerne plus précisément les moyens de gestion, le ministère souligne :

« Une réorganisation a été opérée au début de l'année 2003 afin de mieux répartir la gestion des crédits du FEDOM, auparavant assurée, comme le souligne la Cour, par un seul agent : une adjointe spécialement chargée des questions budgétaires et notamment de la mise en oeuvre de la LOLF a été nommée, trois autres chargées de mission sont en mesure de gérer les crédits et, en cas d'absence, de se remplacer mutuellement ».

2) Concernant les critiques émises sur les modes d'intervention

La Cour des comptes a été amenée à juger que certaines opérations financées par le FEDOM ne relevaient pas de sa mission. Le ministère remarque que :

« Les opérations ainsi financées résultent de l'application d'arbitrages interministériels. On peut relever que la plupart de ces opérations (88 % des crédits concernés) consiste en un accompagnement des restructurations intervenant dans le tissu des entreprises domiennes. [...] Ce faisant, le ministère de l'outre-mer a également contribué à la réduction des tensions sociales dans les régions concernées ».

Enfin, suite aux remarques de la Cour concernant les observations formulées sur la consommation des enveloppes, le ministère constate que les dépassements se limitent aux seuls CES.

« Toutefois, à la suite de ce constat qui avait également été effectué par ses services, le ministère de l'outre-mer s'est montré particulièrement attentif à la nécessité d'obtenir des différents départements un strict respect des enveloppes ouvertes annuellement en comité FEDOM [...]

« Conscient que des améliorations étaient indispensables, le ministère de l'outre-mer a redéployé ses moyens, notamment en personnel, pour renforcer ceux des gestionnaires du FEDOM, comme exposé précédemment ».

Votre rapporteur spécial estime que cette prise de conscience, jointe à la globalisation des crédits instituée par le présent projet de loi de finances, apporte des réponses satisfaisantes aux interrogations de la Cour des comptes, et devrait permettre dans les prochaines années une amélioration notable de la gestion du FEDOM. En tout état de cause, ce point devra être surveillé dans les prochaines lois de finance, tant dans sa mise en oeuvre que dans ses conséquences sur la politique de l'emploi en outre-mer.

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