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Projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit

7 octobre 2004 : Simplification du droit ( rapport - première lecture )

 

Rapport n° 5 (2004-2005) de M. Bernard SAUGEY, fait au nom de la commission des lois, déposé le 7 octobre 2004

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N° 5

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 octobre 2004

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, de simplification du droit,

Par M. Bernard SAUGEY,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest, président ; MM. Patrice Gélard, Bernard Saugey, Jean-Claude Peyronnet, François Zocchetto, Mme Nicole Borvo, M. Georges Othily, vice-présidents ; MM. Christian Cointat, Pierre Jarlier, Jacques Mahéas, Simon Sutour, secrétaires ; M. Nicolas Alfonsi, Mmes Michèle André, Eliane Assassi, Robert Badinter, José Balarello, Laurent Béteille, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. François-Noël Buffet, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Pierre-Yves Collombat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Yves Détraigne, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Gaston Flosse, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Philippe Goujon, Mme Jacqueline Gourault, MM. Charles Guené, Hubert Haenel, Jean-René Lecerf, Mme Josiane Mathon, MM. Hugues Portelli, Henri de Richemont, Jean-Pierre Sueur, Alex Türk, André Vallet, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (12ème législ.) : 1504, 1635 et T.A. 305

Sénat : 343 (2003-2004)

Administration.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

La commission des Lois du Sénat, réunie le jeudi 7 octobre 2004 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président, a examiné, sur le rapport de M. Bernard Saugey, le projet de loi modifié par l'Assemblée nationale de simplification du droit.

Après avoir rappelé que la commission des Lois avait délégué l'examen de certaines parties du texte aux commissions des Affaires sociales, des Affaires économiques, des Affaires culturelles et des Finances ayant souhaité se saisir pour avis, le rapporteur a expliqué que ce projet de loi s'inscrivait dans une démarche ambitieuse, cohérente et durable de simplification.

La commission des Lois a adopté 35 amendements tendant principalement à :

préciser le champ de certaines habilitations, en particulier celles relatives aux régimes d'accès aux documents administratifs (article 1er), aux règles relatives aux enquêtes publiques (article 42), aux tribunaux du contentieux de l'incapacité (article 5) ainsi que celles concernant les régimes de déclarations et d'autorisations d'utiliser le sol (article 13) et des incapacités d'exercer une activité commerciale ou industrielle (article 21) ;

supprimer deux habilitations visant respectivement à simplifier le droit de la filiation (article 4) et à instaurer un pouvoir de substitution du préfet dans l'exercice des compétences de police administrative des maires dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle (3° de l'article 8) ;

transformer en dispositions d'application directe certaines habilitations prévues aux articles 39 (audience hors la présence du public au sein des juridictions administratives et utilisation de moyens de visioconférence par les magistrats des juridictions d'outre-mer), 43 (allègement des procédures de classement ou déclassement des voies de collectivités territoriales) et 47 (limitation des cas de consultation cumulative du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et des comités techniques paritaires) ;

insérer de nouvelles mesures d'application directe afin, d'une part, d'assurer la transposition correcte de la directive 85/374/CEE du 7 juillet 1985 instituant la responsabilité du producteur du fait des produits défectueux (article additionnel après l'article 21) et, d'autre part, de reprendre une disposition initialement prévue dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux tendant à prévoir un régime d'autorisation par l'Etat et de mise en exploitation des « tapis roulants neige » ainsi qu'un contrôle de ces installations par les agents spécialisés des transports (article additionnel après l'article 27) ;

améliorer le dispositif de contrôle du Parlement sur l'application des lois (article 47 bis) ;

ratifier l'ensemble des ordonnances prises à ce jour en application de la loi du 2 juillet 2003 ainsi que deux ordonnances portant extension, adaptation et mise à jour de dispositions dans des collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.

Votre commission a adopté le projet de loi ainsi modifié.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi en première lecture du projet de loi de simplification du droit, adopté après déclaration d'urgence par l'Assemblée nationale le 10 juin 2004.

Ce texte s'inscrit dans une démarche ambitieuse, cohérente et durable de simplification de notre droit dont le Gouvernement a fait l'une de ses priorités et que la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant à simplifier le droit avait initiée.

De nombreux efforts ont déjà été faits, tant par le législateur que par le pouvoir réglementaire, afin de maîtriser l'inflation législative et de limiter le caractère parfois abscons, souvent inutilement complexe, de certaines branches de notre droit. Il convient cependant de les poursuivre car, bien que l'on puisse le regretter, il n'est guère envisageable, par un seul instrument législatif, d'apporter aux quelque 8.000 lois et 400.000 textes réglementaires actuellement en vigueur les réformes indispensables qui permettraient de garantir tout à la fois leur intelligibilité, mais aussi parfois leur applicabilité.

Tout comme le texte adopté en 2003, le présent projet de loi ne saurait donc constituer qu'une simple étape, mais une étape nouvelle sur un long chemin qui en comprendra d'autres. Lors de son audition devant votre commission des Lois le 27 avril 2004, M. Renaud Dutreil, ministre de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat a d'ailleurs rappelé que le Président de la République souhaitait qu'une loi de simplification soit votée chaque année et a, en conséquence, annoncé la préparation prochaine d'un troisième texte présentant un ensemble de simplifications du droit applicables à certaines catégories d'usagers du service public, telles que les très petites entreprises, les personnes âgées, les mères de famille et les maires.1(*)

Actuellement composé de soixante-cinq articles, le présent projet de loi est d'une portée considérable. Il regroupe plus de deux cents mesures qui touchent des domaines législatifs très divers.

La diversité des secteurs concernés est telle qu'outre votre commission des Lois, saisie au fond, quatre commissions se sont saisies pour avis de ce texte. Votre commission leur a délégué l'examen des dispositions relevant intégralement de leurs compétences2(*).

I. UN APPROFONDISSEMENT NÉCESSAIRE DE LA DÉMARCHE DE SIMPLIFICATION DU DROIT

A. UN PRÉCÉDENT LÉGISLATIF AU BILAN POSITIF : LA LOI N° 2003-591 DU 2 JUILLET 2003 HABILITANT LE GOUVERNEMENT À SIMPLIFIER LE DROIT

Adoptant une démarche résolument novatrice, la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit a permis d'apporter, dans des domaines très variés, des simplifications attendues. En adoptant ce texte, le Parlement a donné au Gouvernement les moyens d'agir véritablement en vue de simplifier notre législation, dans le cadre de ce qui constitue l'un des axes majeurs de sa politique.

Démarche politique, la simplification du droit est également un objectif juridique à part entière comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003. Examinant la conformité de la précédente de loi de simplification à la Constitution, le Conseil constitutionnel a en effet précisé que les mesures de simplification et de codification du droit, répondaient « à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi »3(*).

De nombreuses habilitations ont été adoptées dans ce texte, autorisant le Gouvernement à intervenir, par ordonnance, dans le domaine de la loi afin d'introduire des modifications destinées à simplifier les formalités dans le domaine sanitaire et social, ainsi que les démarches des usagers et des entreprises. De même, poursuivant l'effort de codification du droit entrepris depuis 1989, la loi précitée a permis la structuration de la législation en regroupant dans de nouveaux codes les dispositions jusqu'alors éparses qui régissaient un même domaine. Pour accompagner et encourager l'oeuvre de simplification du droit, des structures pérennes et efficaces ont été instituées.

1. La création de structures pérennes et efficaces tendant à simplifier notre droit

La simplification du droit doit être une démarche permanente. Pour ce faire, il est donc nécessaire que des organes d'impulsion et de suivi pérennes et efficaces puissent assurer la coordination des démarches de simplification du droit dans l'ensemble des administrations.

Dans ce domaine, l'apport de la loi du 2 juillet 2003 a été la création du Conseil d'orientation de la simplification administrative (COSA).

Certes, avant l'adoption de la loi précitée du 2 juillet 2003, certains organes assuraient déjà un tel rôle. Le décret n° 90-1125 du 18 décembre 1990 avait ainsi institué auprès du Premier ministre une commission pour la simplification des formalités destinée à coordonner et à gérer l'ensemble de la politique de simplification administrative. Le décret n° 98-1083 du 2 décembre 1998 relatif aux simplifications administratives a substitué à cet organisme une commission pour les simplifications administratives (COSA), dont la compétence a été élargie à cette occasion.

Plus récemment, quelques semaines avant l'examen par le Parlement du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, le Gouvernement a créé de nouvelles structures administratives à même de mener à bien le chantier de la simplification. Le décret n° 2003-141 du 21 février 2003 portant création de services interministériels pour la réforme de l'Etat a ainsi institué deux délégations auprès du Premier ministre chargées, pour l'une de la modernisation de la gestion publique et des structures de l'Etat, pour l'autre des usagers et des simplifications administratives (DUSA). Le même texte a également mis en place une agence pour le développement de l'administration électronique (ADAE).

Ces structures permettent de rassembler des informations et sont à même de constituer une source de proposition en vue de simplifications éventuelles de la législation et de la réglementation. Leur caractère interministériel tend à assurer que l'ensemble des ministères mènera des actions destinées à simplifier les règles de droit sibyllines auxquels les usagers sont bien trop souvent confrontés. Ces organes ne constituent toutefois que des démembrements de l'administration et ne sont composés que de membres de cette administration.

Or, comme l'avait souligné votre commission des Lois, lors de l'examen de la loi du 2 juillet 2003, « compte tenu de l'ampleur et de la complexité de la tâche que s'est assigné le Gouvernement, il est indispensable que de larges échanges de vues sur les mesures à prendre en vue de simplifier la réglementation dans tous les domaines de la législation interviennent entre les services ministériels et les élus. Ces derniers, au contact quotidien et direct des citoyens, sont particulièrement à même de percevoir les difficultés et les lenteurs que certaines procédures administratives sont susceptibles de générer auprès des usagers. »4(*) Il manquait donc au paysage institutionnel une structure idoine que la loi a opportunément instituée.

Le Conseil d'orientation de la simplification administrative, qui remplace la commission pour les simplifications administratives, est ainsi constitué de trois députés, de trois sénateurs, d'un conseiller régional, d'un conseiller général, d'un maire ainsi que de six personnalités qualifiées. Votre rapporteur en est d'ailleurs l'un des membres, nommé par le Premier ministre en sa qualité de sénateur.

Aux termes de l'article 1er de la loi précitée, cet organe « formule toute proposition pour simplifier la législation et la réglementation ainsi que les procédures, les structures et le langage administratifs ». Le décret n° 2003-1099 du 20 novembre 2003 portant création d'un Conseil d'orientation de la simplification administrative a précisé les prérogatives de cet organisme et les moyens mis à sa disposition.

Il est ainsi saisi pour avis du programme annuel de simplification des formalités et des procédures administratives préparé par chaque ministre dans les conditions prévues à l'article 1er du décret n° 98-1083 du 2 décembre 1998 relatif aux simplifications administratives, donne un avis au Premier ministre sur le rapport annuel adressé au Parlement en application de l'article 37 de la loi précitée du 2 juillet 2003, et peut être saisi pour avis de toute mesure de simplification que les ministres envisagent d'adopter, à commencer par les projets de loi, d'ordonnance ou de décret comportant des dispositions de simplification administrative.

Chargé de proposer des simplifications aux dispositifs tant de nature législative que réglementaire, le conseil d'orientation de la simplification administrative adresse chaque année au Premier ministre un rapport public dans lequel sont présentées ses propositions et relatées les conditions dans lesquelles ses avis, recommandations et propositions ont été pris en compte.

Pour assurer pleinement sa mission, le conseil est habilité à demander aux administrations de l'Etat ainsi qu'aux organismes chargés d'une mission de service public placés sous la tutelle de l'Etat la communication de tout document qui lui paraîtrait utile et peut entendre les responsables de ces administrations et organismes, ainsi que des représentants de leurs administrés et usagers.

Si cet organe nouveau n'a pas encore totalement pris son envol, son action sera à l'avenir déterminante pour inciter l'administration à faire des efforts réguliers afin d'assurer une meilleure intelligibilité et lisibilité de notre droit, tant au niveau législatif que réglementaire.

2. L'adoption de nombreuses ordonnances permettant la simplification et la codification de notre droit

La large habilitation donnée au Gouvernement par la loi du 2 juillet 2003 a été largement mise à profit, pas moins de trente-trois ordonnances ayant été adoptées sur son fondement, à un rythme encore jamais égalé sous la Vème République. Ces textes ont en effet modifié ou créé six cent trente-neuf dispositions législatives.

Le contenu des réformes apportées par ordonnance pour l'année civile 2003 est relaté dans un rapport, présenté au Parlement en application de l'article 37 de la loi, qui retrace également les mesures de simplification prises au niveau réglementaire. On peut toutefois regretter que ce rapport, qui aurait du être remis au Parlement au mois de mars 2004, ne lui ait été effectivement transmis que le 11 août 2004.

a) La simplification du droit par ordonnance

Les ordonnances de simplification prévues par la loi d'habilitation devaient être prises dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi. Intervenant dans des domaines particulièrement variés, elles sont au nombre de trente :

- l'ordonnance n° 2003-719 du 1er août 2003 relative à la simplification de la validation du permis de chasser (article 13 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-902 du 19 septembre 2003 portant suppression de procédures administratives de concertation applicables à certains projets de travaux, d'aménagements et d'ouvrages de l'Etat et de ses établissements publics, ainsi que des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics en relevant (article 9 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation (articles 20 et 21 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1059 du 6 novembre 2003 relative aux mesures de simplification pour les emplois du spectacle et modifiant le code du travail (8° de l'article 24 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1067 du 12 novembre 2003 relative à l'élection des membres des chambres de commerce et d'industrie, à la prorogation des mandats des délégués consulaires et modifiant le code de commerce (article 19 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1165 du 8 décembre 2003 portant simplifications administratives en matière électorale (articles 16, 17 et 18 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1188 du 11 décembre 2003 relative à certaines modalités d'adjudication du droit de chasse (2° de l'article 13 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003 relative aux mesures de simplification des formalités concernant les entreprises, les travailleurs indépendants, les associations et les particuliers employeurs (article 14 ; 1°, 2 ; 4° et 6° de l'article 24 ; 10° de l'article 25 de la loi). ;

- l'ordonnance n° 2003-1216 du 18 décembre 2003 portant suppression de l'affirmation des procès-verbaux (article 8 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1235 du 22 décembre 2003 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et supprimant le droit de timbre devant les juridictions administratives (articles 7 et 3 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-141 du 12 février 2004 portant simplification des élections à la mutualité sociale agricole (article 19 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004 relative aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs (article 4 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004 portant simplification du droit et des formalités pour les entreprises (2°, 3°, 5°, 6°, 7°, 8°, 9° et 10° de l'article 26 de la loi) ;

- l'ordonnance n°2004-279 du 25 mars 2004 portant simplification et adaptation des conditions d'exercice de certaines activités professionnelles (2° et 3° de l'article 27 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-280 du 25 mars 2004 relative aux simplifications en matière d'enquêtes statistiques (article 23 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-281 du 25 mars 2004 relative à des mesures de simplification en matière fiscale (articles 7 et 10 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-328 du 15 avril 2004 relative à l'élection des délégués consulaires et des juges des tribunaux de commerce (article 19 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-329 du 15 avril 2004 allégeant les formalités applicables à certaines prestations sociales (article 15 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat (article 6 de la loi) dont le contenu avait été fortement encadré par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 qui, en son considérant n° 18, avait précisé que les dérogations apportées aux règles générales régissant la commande publique devaient être réservées « à des situations répondant à des motifs d'intérêt général tels que l'urgence qui s'attache, en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable, ou bien la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d'un équipement ou d'un service déterminé » ;

- l'ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 portant modification de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée (article 6 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-570 du 17 juin 2004 portant diverses mesures de simplification dans le domaine agricole, simplification et harmonisation des modalités d'organisation et de contrôle ainsi que de la procédure contentieuse applicables aux élections aux tribunaux paritaires des baux ruraux (article 19 ; 2° de l'article 27 et d) du 1° de l'article 2 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-602 du 24 juin 2004 relative à la simplification du droit dans les domaines du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (3° de l'article 24 et article 25 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-603 du 24 juin 2004 relative aux mesures de simplification dans le domaine des élections prud'homales (article 19) ;

- l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales et extension à l'outre-mer de dispositions ayant modifié la législation commerciale (4° de l'article 26 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse (article 15, 6° de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-631 du 1er juillet 2004 relative à la simplification du régime d'entrée en vigueur, de transmission et de contrôle des établissements locaux d'enseignement (article 29 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires (article 12 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004 relative à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce (1° de l'article 27 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-637 du 1er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et à la réduction de leur nombre (1°, 2° et 3° de l'article 2 de la loi).

Conformément aux exigences constitutionnelles et à l'article 35 de la loi du 2 juillet 2003, des projets de loi de ratification des ordonnances ont été déposés par le Gouvernement dans le délai de trois mois à compter de leur publication. Seule l'ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004 relative aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs n'a pas fait l'objet d'un projet de loi de ratification spécifique car sa ratification était prévue par le texte initial du présent projet de loi de simplification du droit, déposé à l'Assemblée nationale le 17 mars 2004. La caducité des ordonnances d'ores et déjà adoptées est donc totalement écartée et leurs dispositions sont ainsi pleinement applicables.

b) La codification du droit par ordonnance

Plusieurs habilitations, inscrites aux articles 32 à 34 de la loi du 2 juillet 2003, avaient autorisé le Gouvernement à intervenir en matière de codification. Comme votre commission l'avait souligné lors de la discussion de ce texte, ces dispositions permettant d'opérer une codification tant à droit constant -sans changement de substance par rapport aux législations éparses rassemblées- qu'à droit non constant -c'est-à-dire en modifiant le fond même des règles codifiées. La loi d'habilitation a, dans ce domaine, induit un changement de perspective notable dans les méthodes de codification suivies jusqu'alors et issues de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration.

Quatre ordonnances devaient être prises dans un délai de six mois ou d'un an, selon le cas, à compter de la publication de la loi et ont été effectivement adoptées dans ce délai :

- l'ordonnance n° 2003-1187 du 11 décembre 2003 modifiant la partie législative du code rural (1° de l'article 32 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2003-1212 du 18 décembre 2003 modifiant la partie législative du code général des collectivités territoriales (2° de l'article 32 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-178 du 20 février 2004 relative à la partie législative du code du patrimoine (1° de l'article 33 de la loi) ;

- l'ordonnance n° 2004-545 du 11 juin 2004 relative à la partie législative du code de la recherche (2° de l'article 33 de la loi).

Ces quatre ordonnances ont donné lieu au dépôt, dans les délais impartis par l'article 35 de la loi, de projets de loi de ratification à l'Assemblée nationale ou au Sénat. La caducité des ordonnances étant ainsi écartée, leurs dispositions sont donc également totalement applicables.

En outre, s'agissant des habilitations permettant d'assurer une codification à droit non constant, une ordonnance a d'ores et déjà été adoptée, bien que le délai d'habilitation n'expire que le 3 janvier 2005 : l'ordonnance n° 2004-825 du 19 août 2004 relative au statut des immeubles à usage de bureaux et des immeubles dans lesquels est effectué le contrôle technique des véhicules et modifiant le code du domaine de l'Etat (2° de l'article 34 de la loi). Cette ordonnance n'a pas encore donné lieu au dépôt d'un projet de loi de ratification.

3. Des améliorations réelles apportées à la vie quotidienne des citoyens et des entreprises

Ces nombreuses ordonnances ont permis au Gouvernement d'apporter des améliorations réelles à la vie quotidienne des citoyens et des entreprises.

Sans doute, toutes les simplifications envisagées lors de l'adoption de la loi précitée du 2 juillet 2003 ne résultent-elles pas des ordonnances susvisées. En effet, certaines habilitations prévues par la loi n'ont pas été mises à profit dans la mesure où les modifications envisagées ont été apportées par d'autres textes législatifs d'application directe.

Il en va ainsi, notamment, de l'habilitation prévue par le 1° de l'article 26 relative au nantissement du fonds de commerce, des dispositions simplifiant les règles applicables en la matière ayant été adoptées dans le cadre de l'article 3 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 sur l'initiative économique. Il en est de même de l'habilitation prévue à l'article 28, concernant les relations entre les autorités administratives et les collectivités territoriales dans le cadre du contrôle de légalité, des dispositions permettant l'utilisation de moyens de transmission électronique dans le cadre du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales figurant à l'article 139 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

En tout état de cause, grâce à ces différentes ordonnances, des mesures attendues, facilitant les démarches pour l'ensemble des usagers et assurant une meilleure intelligibilité du droit ont bel et bien été adoptées.

La généralisation de la procédure d'homologation des documents administratifs, organisée par l'ordonnance n° 2004-637 du 1er juillet 2004 précitée, est de nature à simplifier les formulaires, parfois difficilement compréhensibles, présentés par les administrations aux usagers. La suppression du droit de timbre devant les juridictions administratives, issue de l'ordonnance n° 2003-1235 du 22 décembre 2003 précitée, facilite incontestablement l'accès des justiciables aux prétoires. La simplification des modalités d'entrée en vigueur des lois, décrets et règlements, résultant de l'ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004 précitée, renforce la sécurité juridique des citoyens. Les formalités et démarches imposées aux bénéficiaires de prestations sociales ont été simplifiées par l'ordonnance n° 2004-329 du 15 avril 2004 précitée. Enfin, certaines simplifications dans les démarches et obligations des contribuables ont été apportées par l'ordonnance n° 2004-281 du 25 mars 2004 précitée.

Des mesures essentielles ont permis de simplifier les contraintes juridiques pesant sur les entreprises.

Les conditions d'accès et d'exercice applicables à certaines professions réglementées ont été assouplies par l'ordonnance n°°2004-279 du 25 mars 2004 précitée, de manière à développer la liberté d'entreprendre. Les petites et moyennes entreprises peuvent désormais bénéficier, dans le cadre de la société à responsabilité limitée, d'un statut plus adapté grâce aux modifications apportées par l'ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004 précitée. Le régime des valeurs mobilières, qui permet aux sociétés de lever les fonds nécessaires au développement de leurs activités, a été considérablement rénové par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 précitée. Les formalités sociales des entreprises ont également été allégées et rendues plus efficientes grâce aux dispositions de l'ordonnance n° 2003-1213 du 18 décembre 2003 précitée.

Les structures administratives sont elles-mêmes modifiées, afin de les rendre plus efficaces et mieux en mesure de répondre aux besoins de la société.

La suppression de certaines procédures de concertation inutilement lourdes et complexes a ainsi été opérée par l'ordonnance n° 2003-902 du 19 septembre 2003 précitée, tandis que l'ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 a permis de simplifier l'organisation et le fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation. Certains dispositifs surannés, tels que la procédure d'affirmation des procès-verbaux ont été supprimés en vertu de l'ordonnance n° 2003-1216 du 18 décembre 2003 précitée. Les conditions de réalisation et de gestion d'équipements publics sont par ailleurs grandement améliorées par l'institution de contrats de partenariat, créés par l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 précitée.

La structuration de la législation en matière de protection du patrimoine et de recherche par la création de codes législatifs, rendue possible par les ordonnances n° 2004-178 du 20 février 2004 et n° 2004-545 du 11 juin 2004 précitées, renforce enfin l'accessibilité et l'intelligibilité de ces pans de notre droit.

La loi du 2 juillet 2003 n'a d'ailleurs pas épuisé tous ses effets, dans la mesure où certains délais d'habilitation n'ont pas encore expiré. Ainsi, les habilitations prévues par les articles 33 et 34 de la loi courent jusqu'au 3 juillet 2005. Les ordonnances encore susceptibles d'être prises sont d'abord prévues aux 3° et 4° de l'article 33, relatives à la partie législative du code du tourisme et du code de l'organisation judiciaire. L'habilitation prévue à l'article 34 est également toujours en vigueur et devrait permettre la codification à droit non constant des dispositions relatives au code de l'artisanat, au code du domaine de l'Etat, au code monétaire et financier, au code de la défense nationale.

Si son bilan est incontestablement positif, la loi d'habilitation du 2 juillet 2003 ne constitue toutefois qu'une simple étape sur le long chemin de la simplification. L'effort de simplification doit être poursuivi De nombreuses dispositions de nos codes et lois restent encore à simplifier, pour le plus grand profit des usagers mais aussi de l'administration elle-même.

B. UN EFFORT DE SIMPLIFICATION ET DE CODIFICATION À POURSUIVRE

1. La montée en puissance de la simplification

Le présent projet de loi de simplification du droit, qui comportait initialement soixante-et-un articles, en compte soixante-cinq après son examen par l'Assemblée nationale, soit deux fois plus que le projet de loi de 2003, et prévoit près de deux cents mesures de simplification. Il s'agit par conséquent d'une véritable montée en puissance de la simplification du droit, qui s'étend désormais aux règles concernant l'urbanisme, le logement, les régimes sociaux agricoles, le sport ou encore le droit de la consommation.

Lors du premier comité d'évaluation des stratégies ministérielles de réforme (SMR), le 14 septembre 2004, son président, M. Francis Mer, a estimé qu'« une très longue marche » restait « à accomplir » en matière de réforme de l'Etat. Si les propositions de réforme examinées à cette occasion concernaient souvent des mesures de rationalisation à l'origine d'économies importantes pour le budget de l'Etat, comme le transfert au secteur concurrentiel du contrôle technique des véhicules poids lourds du ministère des finances, d'autres appellent des mesures législatives ou réglementaires, comme la dématérialisation complète, à terme, du journal officiel.

La réforme de l'Etat embrasse un champ aussi large que celui de l'action administrative, qui touche aujourd'hui la plupart des aspects de la vie courante.

Le projet de loi qui vous est soumis, succédant à la première loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit adoptée l'année dernière, inscrit donc la simplification du droit dans la continuité et en fait un axe essentiel de la réforme de l'Etat. Les améliorations qui devraient en résulter tant pour l'usager et le contribuable que pour le fonctionnaire, seront d'autant plus sensibles que son champ est large. Approfondissant la démarche pragmatique de la première loi, le présent texte comporte à la fois des mesures de simplification de portée générale et des mesures de simplification sectorielles. Le caractère éclectique du projet de loi n'est ainsi que le reflet de la variété des complexités qu'il entend réduire. La continuité, c'est-à-dire la poursuite et l'approfondissement de la réforme dans le temps ainsi que l'universalité des domaines visés apparaissent en effet comme les deux conditions d'une simplification du droit efficace.

Les enjeux de cet approfondissement et de cet élargissement sont la sécurité juridique, l'intelligibilité de notre droit et l'égalité devant la loi. Si, comme l'a résumé le doyen Vedel5(*) « l'Etat de droit n'est finalement que la dose de juridique que la société peut supporter sans étouffer », le projet de loi de simplification du droit devrait permettre à notre société de mieux respirer. L'amélioration du régime d'accès aux documents administratifs établi en 1978 (article 1er) et le développement de l'administration électronique (article 3) seront ainsi, par exemple, de nature à renforcer l'Etat de droit en facilitant les échanges entre l'administration et les usagers, citoyens ou entreprises.

2. La confirmation d'une méthode : l'habilitation

Avec ce deuxième projet de loi, le Gouvernement confirme le recours aux ordonnances de l'article 38 de la Constitution comme instrument privilégié de la simplification du droit. Si ce texte comporte davantage de mesures d'application directe que le précédent, l'essentiel des mesures présentées procèdera en effet d'une habilitation législative. Cette nouvelle utilisation, d'une ampleur inédite, de l'article 38 de la Constitution peut s'appuyer sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à la première loi.

a) Le recours aux ordonnances sous la Vème République

A la différence de la Constitution de 1848, des lois constitutionnelles de 1875 et de la Constitution de 1946, la Constitution du 4 octobre 1958 prévoit explicitement, en son article 38, que « le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Elle consacre ainsi une pratique acceptée par le Parlement sous les Républiques antérieures, en dehors de tout cadre constitutionnel, notamment avec les décret-lois de la IIIème République, la loi Marie du 17 août 1948 et la loi sur les pouvoirs spéciaux sous la IVème République.

Les ordonnances de l'article 38 procèdent d'une dissociation entre l'organe d'édiction et le domaine dans lequel il intervient : elles sont prises par le Gouvernement mais leur contenu est législatif. La loi d'habilitation doit fixer deux délais : d'une part celui pendant lequel le Gouvernement peut prendre des ordonnances, d'autre part celui avant l'expiration duquel doit être déposé un projet de loi de ratification de ces ordonnances. Celles-ci entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation.

Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat. Elles n'ont, après leur publication et jusqu'à leur ratification, qu'une valeur réglementaire et restent susceptibles de recours devant le juge administratif.

Aux termes de l'article 41 de la Constitution, le Parlement peut se voir opposer par le Gouvernement l'irrecevabilité à l'encontre d'une proposition ou d'un amendement qui serait « contraire à une délégation accordée en vertu de l'article 38 ». A contrario, une loi adoptée avant l'expiration du délai d'habilitation peut modifier et ratifier tacitement les dispositions d'une ordonnance, dès lors que le Gouvernement n'a pas opposé l'irrecevabilité6(*).

De même, à l'issue du délai pendant lequel le Gouvernement est habilité à prendre des ordonnances, le Parlement peut amender le contenu des ordonnances, soit au moment de l'examen du projet de loi de ratification, soit de sa propre initiative.

Dans le cas d'une ratification implicite, à l'occasion d'une loi dont ce n'est pas l'objet, le Conseil constitutionnel vérifie « si la loi comporte effectivement ratification de tout ou partie des dispositions de l'ordonnance en cause et, dans l'affirmative, si les dispositions auxquelles la ratification confère valeur législative sont conformes à la Constitution »7(*).

Depuis 1995, certains gouvernements ont eu recours aux ordonnances pour mettre en oeuvre des aspects de leur programme au contenu politique très sensible : les privatisations en 1986, le découpage électoral la même année, la réforme de la sécurité sociale en 1995. Si le présent projet de loi comporte avant tout des habilitations relatives à des mesures techniques, son champ et sa forme doivent respecter le cadre progressivement défini par la jurisprudence.

b) Une méthode dont la jurisprudence a confirmé la souplesse

Il ressort de la jurisprudence constitutionnelle que l'article 38 de la Constitution n'exclut de la délégation que les domaines réservés par la Constitution aux lois organiques, aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale8(*). Aussi étendu soit-il, le champ des matières traitées dans le présent projet de loi paraît respecter le cadre matériel ainsi défini.

S'agissant des motifs qui peuvent conduire le Gouvernement à recourir aux ordonnances, le Conseil constitutionnel a estimé, dans sa décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 sur la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, que « l'urgence est au nombre des justifications que le Gouvernement peut invoquer pour recourir à l'article 38 de la Constitution »9(*). Le juge constitutionnel a de plus considéré que la simplification du droit et la codification répondent à « l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi » a fortiori lorsqu'elles ne pouvaient être réalisées « dans des délais raisonnables » compte tenu de « l'encombrement de l'ordre du jour parlementaire ».

Si le Gouvernement doit indiquer avec précision au Parlement la finalité des mesures qu'il souhaite prendre par ordonnances et leur domaine d'intervention, comme l'a estimé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 76-72 DC du 12 janvier 1977, il n'est pas tenu de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu'il prendra10(*). Il peut même « faire dépendre cette teneur des résultats de travaux et d'études dont il ne connaîtra que plus tard les conclusions ».11(*)

Le juge constitutionnel contrôle par conséquent avec souplesse les lois d'habilitation. Il vérifie en particulier qu'elles ne comportent aucune disposition pouvant autoriser le Gouvernement à s'écarter des règles et principes de valeur constitutionnelle (Décision Privatisations, 26 juin 1986). La loi d'habilitation apparaît ainsi comme une forme de dépossession temporaire et consentie de la compétence parlementaire, susceptible d'intervenir dans toutes les matières législatives autres qu'organiques et financières.

A cet égard, le présent projet de loi paraît élargir encore le champ de l'habilitation à simplifier le droit, l'étendue de certaines propositions de modification justifiant un examen approfondi de votre commission.

Toutefois, si la diversité des matières législatives concernées semble sans précédent, le projet comporte davantage de mesures d'application directe que la première loi d'habilitation à simplifier le droit du 2 juillet 2003.

c) L'hybridation de la méthode : le recours à des mesures d'application directe

Dès son dépôt à l'Assemblée nationale, le 17 mars 2004, le projet de loi comportait des mesures d'application directe. Le recours à l'ordonnance, aussi pertinent soit-il pour mener à bien le travail de simplification et de clarification de notre droit, ne doit ne doit en effet être choisi que lorsqu'il permet d'agir de manière plus efficiente sans priver de son rôle en amont (habilitation) et en aval (ratification).

Certaines mesures d'ordre technique, ou des réformes qui ne requièrent la modification que d'un seul texte, seraient au contraire retardées par une habilitation. L'application directe présente l'avantage d'une mise en oeuvre plus rapide et d'un examen sur le fond en séance publique.

Il en va ainsi dans le présent projet de loi de la création de groupements d'intérêt public pour favoriser l'utilisation des technologies de l'information (article 3, II), de la clarification de l'exercice des compétences pour l'organisation des élections régionales (article 10), de l'accroissement de la durée de validité des passeports délivrés à titre exceptionnel et pour un motif d'urgence (article 18), ou de la révision du taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes (article 40).

II. LE PROJET DE LOI ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : LA POURSUITE DE LA SIMPLIFICATION PAR VOIE D'ORDONNANCES ET PAR DES MESURES D'APPLICATION DIRECTE

A. LES MESURES DE SIMPLIFICATION ET DE MODERNISATION

1. Un effort conséquent de simplification et de modernisation en faveur des usagers

Le chapitre premier du présent projet de loi rassemble les mesures de simplification en faveur des usagers, soit dix neuf articles qui impriment à cette démarche un effort de rationalisation et de modernisation qui devrait se traduire rapidement par des améliorations concrètes dans la vie des citoyens.

a) Une nouvelle étape de la transparence administrative

Les premiers articles du projet de loi donnent une nouvelle impulsion au mouvement de transparence administrative initié à la fin des années 1970. L'accès aux documents administratifs devrait ainsi recevoir un cadre harmonisé, avec la généralisation de la compétence de la Commission d'accès aux documents administratifs (article 1er).

Le développement de l'administration électronique prévu à l'article 3 permettra aux citoyens d'accéder à de nouveaux services administratifs en ligne, dans des conditions de sécurité optimisées.

b) La simplification pour renforcer les droits des citoyens

Plusieurs mesures de simplification devraient aboutir à un renforcement des droits des personnes. Ainsi, l'article 4 devrait permettre de donner davantage de cohérence au droit de la filiation, dans l'intérêt de l'enfant.

Les droits des justiciables seront améliorés par l'article 5 qui prévoit une simplification du fonctionnement des tribunaux de l'incapacité et par l'article 6 qui concerne la simplification des conditions d'attribution de l'aide juridictionnelle.

Dans le domaine du logement, les bénéficiaires d'aides au logement devraient voir leurs droits mieux garantis par l'harmonisation des régimes prévue à l'article 12 ; les démarches des propriétaires bailleurs pour le conventionnement des logements qu'ils entendent louer seront simplifiées (article 14) et les définitions légales de la notion de superficie seront harmonisées (article 15).

Une nouvelle vague de simplifications fiscales devrait alléger les formalités pesant sur les contribuables et améliorer les procédures de recouvrement ainsi que les régimes de pénalité (article 17).

Une simple modification du code général des impôts permettra aux usagers d'obtenir, dans des situations d'urgence exceptionnelle, la délivrance d'un passeport valable un an au lieu de six mois actuellement (article 18).

c) Un ensemble de mesures sectorielles de clarification du droit

Un effort de clarification très important sera conduit en matière de droit de l'urbanisme. La sécurité juridique des différents régimes d'autorisation devrait ainsi être mieux assurée grâce l'harmonisation des règles de retrait des actes administratifs (article 2). Le régime même des autorisations d'urbanisme sera simplifié grâce à une meilleure définition de leurs champs d'application respectifs et une modernisation de la structure du code et des formulaires (article 13).

Le régime de protection du patrimoine culturel sera rationalisé et modernisé (article 7). En cette matière, l'ordonnance devrait notamment permettre la déconcentration de plusieurs autorisations en matière de travaux et d'urbanisme et préciser les droits et obligations du propriétaire d'un monument protégé en cas de travaux.

La simplification du droit forestier devrait entraîner un assouplissement des formalités de déclaration de coupe, un allègement des conditions à remplir pour l'obtention de certaines aides et de la procédure d'élaboration des documents de gestion de l'espace agricole et forestier (article 16).

2. Un large volet de simplification en faveur des entreprises

A l'instar de la précédente loi d'habilitation, le présent projet de loi comporte un large volet de simplifications en faveur des entreprises qui sont les premières touchées par la complexité administrative qui affecte directement leur compétitivité.

a) Les mesures de portée générale

Certaines mesures de simplification prévues par le présent projet de loi sont de portée générale.

Ainsi en va-t-il de l'habilitation accordée au Gouvernement afin de substituer aux régimes d'autorisation existants des régimes de déclaration préalable (article 20). Cette mesure, qui figurait déjà dans la loi du 2 juillet 2003 mais n'a pas encore conduit à l'adoption d'ordonnances, a été étendue lors de la première lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale. Désormais, cet article permet également au Gouvernement de supprimer purement et simplement certains régimes déclaratifs ainsi que certains régimes d'autorisation.

Dans le même ordre d'idée, l'article 22 du projet de loi permet la suppression des procédures de paraphe ou de cotation de certains registres et livres effectuées par le juge d'instance qui constituent autant de lourdeurs tant pour le juge lui-même que pour les entreprises.

b) Les simplifications sectorielles

Toutefois, les mesures de simplification envisagées dans le présent projet de loi sont, pour l'essentiel, de nature sectorielle.

Certaines dispositions du projet de loi tendent à améliorer les conditions d'accès ou d'exercice de certaines professions.

L'article 21 permet ainsi d'adapter les dispositions relatives aux interdictions d'entreprendre dans le domaine commercial ou industriel, d'améliorer les règles concernant la profession de commissaire aux comptes et de supprimer certaines contraintes déclaratives imposées aux commerçants.

Les articles 23, 28 et 29 apportent respectivement des simplifications dans les conditions d'accès et dans l'organisation des professions d'architecte, de géomètre-expert et de transporteur routier.

D'autres dispositions visent à supprimer la rigidité ou la complexité de certaines procédures et formalités auxquelles sont, au quotidien, soumises les entreprises. Ces dispositions sont, de loin, les plus nombreuses du projet de loi.

Dans ce contexte, l'article 24 du projet de loi procède à diverses modifications des règles applicables à l'industrie cinématographique et audiovisuelle afin de simplifier les démarches des professionnels concernés et d'apporter davantage de sécurité juridique aux contrats de production et d'exploitation des oeuvres audiovisuelles et cinématographiques.

Dans le domaine de la construction et du logement, le présent projet de loi prévoit de clarifier les conditions d'assurance et de responsabilité des constructeurs (article 25), de simplifier les règles relatives aux états et constats destinés à protéger les acquéreurs et les preneurs de biens immobiliers (article 26) et d'adapter le régime du changement d'affectation des locaux à usage d'habitation datant de l'après-guerre (article 27).

Un important volet de mesures tend à modifier la législation relative aux animaux et certaines dispositions en matière agricole, vitivinicole.

L'article 30 permet notamment de simplifier et d'adapter les règles applicables aux abattoirs, aux quotas laitiers, aux centres d'insémination artificielle pour les équidés et de modifier la nomenclature des maladies réputées contagieuses.

L'article 31 est destiné à simplifier les règles relatives à l'activité vitivinicole et aux produits bénéficiant d'une appellation d'origine, en clarifiant le statut des interprofessions en ce domaine et en allégeant la procédure d'agrément pour les vins et autres produits d'appellation d'origine.

Les procédures administratives dans le domaine agricole sont également simplifiées, l'article 32 du projet de loi développant notamment les mesures de déconcentration en matière d'agrément ou d'autorisation et supprimant, sous certaines conditions, certaines formalités déclaratives, comme celles imposées aux patrons-pêcheurs.

D'autres dispositions tendent à simplifier et adapter les règles législatives en matière sociale qui s'appliquent aux entreprises.

Il en va ainsi de l'article 33 du projet de loi qui prévoit de simplifier le régime social de l'agriculture et de la pêche, notamment en clarifiant le champ du régime social agricole, en modifiant les règles de détermination de l'assiette servant au calcul des cotisations et des contributions sociales des personnes salariées agricoles et en étendant à l'ensemble des employeurs de salariés agricoles le bénéfice du titre emploi simplifié agricole.

L'article 36 vise à renforcer la sécurité juridique des cotisants dans le cadre de leurs relations avec les organismes de recouvrement des cotisations et des contributions sociales en leur permettant de se prévaloir des circulaires et des instructions ministérielles publiées.

L'article 37 tend à clarifier et simplifier les obligations mises à la charge des organismes prestataires d'actions de formation par les dispositions du code du travail. Il a également pour objet de favoriser la politique contractuelle en matière de formation professionnelle.

Inséré par l'Assemblée nationale en première lecture à la suite d'un amendement présenté par le rapporteur de sa commission des lois, l'article 37 bis unifie le traitement des litiges préélectoraux pour l'élection des comités d'entreprise, harmonise les conditions d'ancienneté requises pour l'exercice des différents mandats de représentant du personnel et clarifie la définition de l'effectif pris en compte pour l'organisation des élections professionnelles.

Enfin, l'article 55 tend à modifier les dispositions relatives au droit de la consommation en réformant le régime de constatation et de répression des atteintes au code de la consommation et au code de commerce. Il allège également certaines contraintes procédurales dans le cadre du contrôle des pratiques anticoncurrentielles et des opérations de concentration.

3. Des mesures de modernisation de l'administration de grande ampleur

Davantage que la première loi d'habilitation, le présent projet de loi entreprend la réforme de plusieurs régimes et structures dans un objectif de modernisation de l'administration. Ces mesures figurent parmi les plus larges du texte par leur objet et nécessiteront une refonte complète de certains textes.

Toutefois, l'une d'entre elles devrait avoir une portée concrète directe pour le contrôle de l'application des lois par le Parlement. En effet, l'article 47 bis, issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, prévoit le dépôt d'un rapport dressant le bilan des mesures d'application de chaque loi, quelques mois après sa promulgation. Cette disposition relève bien de la modernisation administrative puisqu'il s'agit d'inciter les services ministériels à assurer le plus rapidement possible l'applicabilité des textes votés par le législateur.

a) La simplification et l'allégement des procédures

L'essentiel des mesures de modernisation de l'administration vise à simplifier les procédures. Ainsi, l'article 40 tend à remplacer la révision annuelle du taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes par un taux fixe déterminé de façon réglementaire, l'article 41 prévoit la simplification des règles de gestion administrative et financière des laboratoires publics, et l'article 43 permettra d'alléger les procédures de classement et de déclassement des voies des collectivités territoriales et des lignes du réseau ferré national.

Prolongeant la logique initiée dans la loi du 2 juillet 2003 avec l'habilitation à supprimer certaines commissions administratives, l'article 47 tend à réduire le nombre de cas dans lesquels est requise la consultation du conseil supérieur de la fonction publique de l'État et d'un ou plusieurs comités techniques paritaires.

Deux grandes réformes complètent cet ensemble :

- la simplification et l'harmonisation des règles relatives aux enquêtes publiques (article 42), qui font intervenir des préoccupations de rationalisation et de participation du public au processus de décision ;

- la simplification et l'amélioration des règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales, à leurs groupements et aux établissements publics locaux qui leur sont rattachés (article 44).

b) La définition d'un cadre général pour les groupements d'intérêt public

Face au succès des groupements d'intérêt public qui se multiplient dans la plupart des secteurs d'activité où des personnes publiques peuvent trouver avantage à s'associer entre elles ou avec des personnes privées, l'article 38 devrait leur donner un cadre législatif général.

c) L'amélioration du fonctionnement des juridictions administrative et financière

L'article 39 du projet de loi devrait faciliter l'exercice de la justice administrative grâce à deux mesures de modernisation consistant, d'une part, à autoriser la tenue d'audiences à huis clos lorsque la sauvegarde de l'ordre public ou le respect de l'intimité ou du secret l'exigent, et d'autre part, à permettre aux membres d'une formation de jugement affectés simultanément dans au moins deux juridictions administratives d'outre-mer de recourir à des moyens de visioconférence.

Les juridictions financières devraient quant à elle voir leur fonctionnement amélioré par la création de formations conjointes de délibéré rassemblant les juridictions ayant participé à un contrôle conjoint, par le transfert du contrôle des comptes des groupements d'intérêt public locaux aux chambres régionales des comptes, par l'unification des compétences des rapporteurs, et par la mise à jour du code des juridictions financières (article 45).

4. La poursuite des efforts de simplification et de réorganisation dans le domaine sanitaire et social

Comme la première loi de simplification du droit, le présent projet de loi comprend un important volet sanitaire et social.

L'article 48 habilite le Gouvernement à simplifier, alléger et harmoniser certaines règles et procédures dans le domaine de la protection sociale. Il allège par exemple les dispositions applicables aux relations entre l'Etat et les caisses et organismes concourrant à la protection sociale ainsi que les procédures d'extension et d'élargissement des accords conclus par les organisations syndicales et professionnelles en matière de prévoyance et de retraite complémentaire. Il vise également à simplifier les dispositions applicables aux organismes de sécurité sociale et les règles relatives à certaines aides et fonds d'indemnisation. Cet article tend en outre à supprimer des dispositions législatives inutiles (procédures redondantes dans la mise en oeuvre des actions expérimentales de caractère médical et social) ou inopportunes (compétence des organismes de sécurité sociale pour approuver les budgets des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux).

Un régime social unique pour les travailleurs indépendants devrait en outre être instauré (12° de l'article 48), dans le prolongement de la mise en place d'un interlocuteur social unique prévu par l'article 24 de la loi précitée du 2 juillet 2003. Il s'agirait d'une mesure de simplification essentielle pour les travailleurs indépendants. En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à prévoir que le régime social des travailleurs indépendants exerce les mission d'un interlocuteur unique, notamment en organisant le recouvrement des cotisations et contributions sociales, et puisse déléguer certaines fonctions liées à ses missions.

S'agissant de l'aide sociale, les procédures d'admission à cette aide devraient être simplifiées, notamment par la suppression des commissions d'admission à l'aide sociale. Les régimes d'autorisation et d'habilitation des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des activités d'accueil familial des personnes âgées et handicapées devraient également être simplifiés et harmonisés, alors que leurs règles de fonctionnement et de contrôle ainsi que les modalités de tarification qui leur sont applicables devraient être mieux adaptées (article 49)

L'article 50 poursuit l'application du plan « Hôpital 2007 » en permettant notamment de simplifier les procédures de fonctionnement interne des établissements de santé. Il prévoit ainsi de préciser, harmoniser et compléter les dispositions relatives aux différents établissements publics nationaux à caractère sanitaire et de réformer les modalités de fonctionnement des établissements publics de santé, les règles et modes d'organisation budgétaire et comptable ainsi que les dispositions relatives à la gestion des établissements de santé. Cet article habilite également le Gouvernement à adapter et aménager les compétences des agences régionales de l'hospitalisation et à réformer les règles de gestion des directeurs de ces établissements.

Cet article permet également d'harmoniser les dispositions relatives aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et modifier le statut du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies.

Il vise en outre à simplifier l'organisation et le fonctionnement des ordres professionnels des professions de santé et à unifier la compétence juridictionnelle pour connaître des litiges relatifs à des contaminations.

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a enfin inséré dans ce chapitre IV un article additionnel tendant à étendre le bénéfice de la qualité de pupilles de la Nation à certains enfants de fonctionnaires civils ou militaires décédés dans l'exercice de leurs fonctions et qui en étaient jusqu'à présent exclus (article 48 A).

B. LA POURSUITE DU TRAVAIL DE CODIFICATION PAR ORDONNANCE

La codification est un processus ancien qui, depuis l'élaboration de cinq codes sous le Consulat et l'Empire12(*), a connu des avancées plus ou moins importantes. Le droit français a en effet connu de grandes vagues de codification ce qui permet aujourd'hui à la commission supérieure de codification de constater que près des deux tiers de nos lois sont aujourd'hui codifiés.13(*)

Comme votre commission l'avait déjà souligné l'an dernier lors de l'examen du projet de loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit14(*), la codification constitue un accès essentiel à la règle de droit. Dans sa décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999 relative à la loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes, le Conseil constitutionnel a érigé l'accessibilité et l'intelligibilité de la loi en objectif de valeur constitutionnelle. Il a en outre affirmé que la codification, constitutionnellement consacrée à cette occasion, permettait d'atteindre cet objectif et la satisfaction de l'intérêt général.

En 1999, le processus de codification a été relancé alors qu'il connaissait un important ralentissement depuis plusieurs années, en partie dû à l'encombrement du calendrier législatif. Afin de contourner cette difficulté, la loi n°  du 16 décembre 1999 habilita le gouvernement à adopter par ordonnance les parties législatives de nombreux codes. Pour la première fois la technique des ordonnances est employée pour faciliter la codification. Ainsi, l'année 2000 a vu l'adoption des parties législatives de neufs codes15(*) et la publication des parties réglementaires de trois codes16(*), représentant une oeuvre sans précédent de codification.

La loi du 2 juillet 2003 a poursuivi cet effort en habilitant le gouvernement à adopter la partie législative de quatre codes17(*) à droit constant et à inclure les dispositions législatives non encore codifiées et remédier aux erreurs ou insuffisances de rédaction dans trois codes18(*). Elle a en outre autorisé le Gouvernement à codifier à droit non constant les réglementations dans les secteurs des métiers et de l'artisanat, des propriétés publiques, de la défense et à modifier et compléter le code monétaire et financier.

Le présent projet de loi constitue une nouvelle étape. Comme dans la loi du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit, le présent projet de loi permet à la fois de la codification à droit constant et à droit non constant.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements, présentés par la commission des Lois et ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, afin de regrouper à l'article 56 l'ensemble de la codification à droit constant et de déplacer en conséquence l'adaptation du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et du code rural à l'article 57.

S'agissant de la codification à droit constant, l'article 56 prévoit l'adoption de la partie législative de cinq nouveaux codes : code de l'administration, code des sports, code des transports, code de la commande publique et code général de la fonction publique.

Il envisage également la refonte du code de justice militaire afin de réactualiser la partie de ce code consacrée aux situations en temps de guerre au regard des nouvelles dispositions applicables en temps de paix depuis la loi n° 99-929 du 10 novembre 1999 portant réforme du code de justice militaire.

Enfin, il adapte les parties législatives des codes de l'action sociale et des familles, de la santé publique, de la sécurité sociale et du travail afin d'inclure les dispositions législatives non encore codifiées et remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification.

L'ensemble de ces mesures de codification serait effectué à droit constant. Par conséquent, seules seraient autorisées les modifications nécessaires pour « assurer le respect de la hiérarchie des normes, la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet. » Votre commission remarque que deux nouvelles réserves à la codification à droit constant sont prévues par le projet de loi (remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet) au regard de celles « traditionnellement » prévues par la loi précitée du 16 décembre 1999, la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ainsi que la loi précitée du 2 juillet 2003 qui retenaient uniquement la possibilité de modifier les dispositions codifiées pour, d'une part, harmoniser le droit et, d'autre part, assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes concernés. Ces nouvelles hypothèses visent à préciser la marge de manoeuvre dont disposent les services en matière de codification à droit constant. Il est en effet indispensable qu'une erreur de référence puisse être corrigée et une disposition obsolète supprimée.

A droit non constant, l'article 57 autorise le gouvernement, d'une part, à modifier le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique afin d'inclure des dispositions législatives non encore codifiées et de donner compétence en appel à la juridiction de droit commun et, d'autre part, à achever la codification de la partie législative du code rural en y intégrant les dispositions non encore codifiées et « en adaptant la législation des céréales compte tenu notamment des évolutions économiques, techniques et juridiques. »

L'Assemblée nationale a, par un sous-amendement du Gouvernement à l'amendement présenté par sa commission des Lois, complété l'article 57 afin de donner force de loi à la partie législative du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. En effet, depuis sa codification par décrets, ce code n'avait jamais fait l'objet d'une consécration législative.

Une habilitation est également prévu à l'article 59 afin que le Gouvernement puisse modifier les dispositions du code minier afin de les harmoniser avec celles du code de l'environnement relatives à l'eau et d'abroger celles qui sont devenues sans objet.

Enfin, l'article 58 propose de prolonger de dix-huit mois le délai de l'habilitation initialement prévu par l'article 33 de la loi du 3 juillet 2003 tendant à procéder à la refonte du code de l'organisation judiciaire, l'échéance ne pouvant être respectée au regard de l'état des travaux et des difficultés rencontrées pour la détermination du périmètre de ce code.

C. LA RATIFICATION EXPRESSE DES ORDONNANCES

L'article 38 de la Constitution exige seulement le dépôt d'un projet de loi de ratification de l'ordonnance devant le Parlement dans le respect du délai fixé par la loi d'habilitation pour assurer sa pérennité. En son absence, l'ordonnance devient caduque.

Toutefois, la ratification des ordonnances par le Parlement revêt une importance particulière s'agissant de la valeur juridique de ces textes. En effet, les ordonnances n'acquièrent valeur législative qu'une fois ratifiées19(*). A défaut, bien que traitant des matières législatives, elles conservent un caractère réglementaire.

Au regard de l'ampleur de l'habilitation autorisée dans la loi du 2 juillet 2003, votre commission avait rappelé dans son rapport l'importance de la ratification des ordonnances. Elle avait estimé qu'« alors que de nombreuses dispositions législatives vont se retrouver modifiées et que le Gouvernement sera autorisé à codifier à droit non constant, le risque est grand de voir les règles édictées demeurer de nature réglementaire, créant ainsi une grande insécurité juridique. » De plus, votre commission estime indispensable que le Parlement puisse contrôler le fond de chaque ordonnance, notamment au regard du champ de l'habilitation dont disposait le Gouvernement pour intervenir dans le domaine législatif.

Le Gouvernement, par la voix de M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, s'était engagé en séance à ce que les ordonnances prises sur le fondement de la loi du 2 juillet 2003 soient toutes ratifiées par le Parlement20(*).

Le présent projet de loi permet en effet la ratification de ces ordonnances prises en vertu de la loi du 2 juillet 2003. Il prévoyait initialement la ratification de quatre ordonnances à l'article 51 et de quatre autres à l'article 52.

Toutefois, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de la commission des Lois ayant reçu un avis favorable du gouvernement, tendant à réunir au sein de l'article 51 l'ensemble des ordonnances prises en vertu de la loi du 2 juillet 2003, provoquant ainsi la suppression de l'article 52, et à y intégrer douze nouvelles ordonnances dont l'adoption fut postérieure au passage du présent projet de loi en Conseil des ministres.

En outre, l'article 53 prévoit la ratification de quinze ordonnances de transposition des directives communautaires prises en vertu de la loi n° 2001-1 du 3 Janvier 200121(*). Il ne prévoyait initialement que la ratification de sept ordonnances mais l'Assemblée nationale, à la suite d'un amendement présenté par la commission des lois avec l'avis favorable du Gouvernement, a ajouté, d'une part, l'ordonnance dont la ratification était prévu à l'article 54, par ailleurs supprimé, ainsi que, d'autre part, les huit ordonnances transposant des directives communautaires restant à ratifier.

Votre commission se félicite de cet important effort de ratification fourni par le Gouvernement et le Parlement qui permet d'assurer la sécurité juridique de près de huit cent cinquante dispositions relevant du domaine de la loi, crées ou modifiées par trente-cinq ordonnances.

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : RENFORCER L'EFFICACITÉ DES MESURES DE SIMPLIFICATION PRÉVUES DANS LE PROJET DE LOI

Votre commission des Lois approuve le présent projet de loi. Il poursuit et approfondit l'oeuvre de simplification de notre droit et devrait assurer les conditions de la modernisation de notre administration, au bénéfice des usagers.

Les trente-quatre amendements que vous soumet votre commission des Lois visent en premier lieu à procéder à l'amélioration rédactionnelle d'un texte qui habilite le Gouvernement à réformer des pans entiers de notre droit. Sur le fond, ils répondent à quatre séries d'objectifs :

- préciser le champ des habilitations ;

- introduire de nouvelles mesures d'application directe ;

- améliorer le dispositif destiné à faciliter le contrôle du Parlement sur l'application des lois ;

- ratifier les ordonnances prises en application de la loi du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

A. MODIFIER LE CHAMP DE L'HABILITATION DONNÉE AU GOUVERNEMENT

1. Préciser le champ de certaines habilitations

Votre commission des Lois vous propose de préciser et compléter l'habilitation prévue à l'article 1er, afin de permettre l'harmonisation des différents régimes spéciaux d'accès aux documents administratifs, de préciser la composition, les compétences et le fonctionnement de la commission d'accès aux documents administratifs, et d'assurer la transposition, dans le cadre de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public, de la directive n° 2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public.

A l'article 3 relatif au développement de l'administration électronique, votre commission vous soumet deux amendements tendant à :

- préciser le champ de l'habilitation afin de permettre à l'ordonnance de définir un cadre commun d'interopérabilité pour les services offerts sous forme électronique par les autorités administratives.

- étendre l'habilitation relative à la mise en place d'un service de déclaration unique de changement d'adresse à la déclaration des changements de situation familiale.

Votre commission vous soumet également un amendement tendant à préciser le champ de l'habilitation de l'article 5 relatif aux tribunaux du contentieux de l'incapacité, afin de permettre au Gouvernement, d'une part, de simplifier les règles de fonctionnement de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, juridiction d'appel pour les décisions des tribunaux du contentieux de l'incapacité et, d'autre part, de modifier, pour l'harmonisation du statut des assesseurs, non seulement les dispositions applicables aux tribunaux du contentieux de l'incapacité mais aussi celles applicables aux tribunaux des affaires de sécurité sociale.

A l'article 6, votre commission vous propose un amendement de réécriture tendant principalement à permettre la modification des dispositions relatives à procédure d'admission à l'aide juridictionnelle dans la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Le champ de l'habilitation prévu à l'article 13 permettant actuellement au gouvernement de modifier l'ensemble des dispositions régissant les déclarations et autorisations d'utiliser le sol, votre commission vous propose de le limiter à la simplification du champ d'application et des règles de délivrance des déclarations et autorisations d'utiliser le sol ainsi qu'à la redéfinition des procédures de contrôle de la conformité des travaux. Cet amendement n'empêcherait en rien l'adoption des nombreuses mesures de simplification déjà annoncées par le gouvernement dans ce domaine.

Votre commission vous propose, à l'article 21, de préciser l'habilitation permettant au Gouvernement de modifier le régime des incapacités d'entreprendre une profession commerciale ou industrielle afin qu'elle couvre également l'ensemble du régime des incapacités d'exercer une activité commerciale ou industrielle qui s'avère en contradiction avec le principe constitutionnel de personnalité des peines. Elle vous propose également dans le cadre d'une démarche cohérente avec l'habilitation permettant la modification des dispositions relatives aux commissaires aux comptes, d'habiliter le Gouvernement à apporter certaines modifications indispensables au bon fonctionnement du Haut conseil du commissariat aux comptes.

Afin de mieux définir le champ et les objectifs de l'habilitation à modifier les règles relatives aux enquêtes publiques, votre commission des Lois vous soumet, à l'article 42, un amendement prévoyant non seulement la simplification et l'harmonisation des régimes applicables, mais aussi le recours à une procédure d'enquête unique ou conjointe en cas de pluralité de maîtres de l'ouvrage ou de réglementations distinctes, et la coordination des enquêtes avec les procédures de concertation avec le public.

2. La suppression de deux habilitations

Le 3° du I de l'article 8 du présent projet de loi, tendant à instaurer, dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, un pouvoir de substitution du préfet dans l'exercice des compétences de police administrative des maires, semble n'avoir fait l'objet d'aucune concertation préalable.

Si le gouvernement s'est certes engagé devant l'Assemblée nationale à prévoir une procédure de concertation lors de l'élaboration de l'ordonnance, notamment avec la commission d'harmonisation du droit privé et l'Institut du droit alsacien-mosellan, votre commission considère qu'il est préférable que cette concertation soit menée avant l'adoption de l'habilitation.

Par conséquent, sans préjuger de la nécessité de cette mesure, votre commission vous propose un amendement de suppression de cette habilitation.

Par ailleurs, l'article 4 du présent projet de loi tend à habiliter le gouvernement à « modifier par ordonnance les dispositions du code civil relatives à la filiation pour en harmoniser le droit, faciliter l'établissement du lien de filiation, en garantir la sécurité et organiser le régime de contestation. »

Outre le fait que le principe d'une telle réforme du code civil par la voie de l'ordonnance est inédit, les termes de l'habilitation sont particulièrement larges et imprécis.

Par conséquent, compte tenu de l'extrême sensibilité de ce sujet et des prérogatives du Parlement en la matière, votre commission des Lois estime indispensable un débat public sur cette question ainsi que des précisions supplémentaires quant à la nature des mesures envisagées par l'ordonnance et aux garanties d'information et de contrôle du Parlement.

Votre commission vous propose donc de supprimer l'article 4.

B. INTRODUIRE DE NOUVELLES MESURES D'APPLICATION DIRECTE

Afin de permettre une application immédiate de certaines mesures de simplification ou parce qu'elle estime que certaines actions de simplification doivent, compte tenu de leur domaine, s'incrire dans le processus législatif normal, votre commission vous propose d'introduire de nouvelles mesures d'application directe dans le présent projet de loi.

1. La transformation de certaines habilitations en dispositions d'application directe

À l'article 39, votre commission des Lois vous propose d'insérer directement dans le code de justice administrative les dispositions permettant, dans les juridictions administratives, d'une part la tenue d'audience hors la présence du public et, d'autre part, l'utilisation de moyens de visioconférence par les magistrats des juridictions d'outre-mer.

Votre commission vous propose également de supprimer à l'article 43 l'habilitation tendant à alléger les procédures de classement et de déclassement des voies des collectivités territoriales et de modifier directement les articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière dans un article additionnel après l'article 43 qui prévoirait que l'enquête publique préalable serait uniquement maintenue lorsque le classement ou déclassement d'une voie aurait pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurée par ladite voie.

De même, votre commission vous soumet un amendement tendant à substituer à l'habilitation prévue à l'article 47 une disposition complétant directement l'article 17 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et tendant à permettre une limitation des cas de consultation cumulative du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et des comités techniques paritaires.

2. L'insertion de nouvelles mesures

Par un article additionnel après l'article 21, votre commission vous invite à adopter des mesures d'application directe destinées à assurer la transposition correcte de la directive 85/374/CEE du 7 juillet 1985 instituant la responsabilité du producteur du fait des produits défectueux, afin de tirer les conséquence d'un arrêt en constatation de manquement prononcé, en 2002, par la Cour de justice des Communautés européennes.

Elle vous propose également un article additionnel après l'article 27 qui reprend la disposition déjà prévu à l'article 62 ter A du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux tendant à prévoir, comme pour les remontées mécaniques, un régime d'autorisation par l'Etat de mise en exploitation des « tapis roulants neige » ainsi qu'un contrôle par les agents spécialisés du ministère des transports de ces installations.

C. AMÉLIORER LE DISPOSITIF DESTINÉ À FACILITER LE CONTRÔLE DU PARLEMENT SUR L'APPLICATION DES LOIS 

À l'article 47 bis, votre commission des Lois vous propose d'adapter le délai de dépôt par le Gouvernement du rapport au Parlement sur l'application de chaque loi, en le portant à neuf mois à compter de la publication de la loi ou, le cas échéant, de l'expiration du délai fixé pour son entrée en vigueur. Au même article, un amendement vous est soumis qui tend à prévoir le dépôt d'un rapport complémentaire lorsque plus d'un tiers des mesures d'application nécessaires à l'entrée en vigueur de la loi n'ont pas été prise à la date de publication du premier rapport

D. RATIFIER LES ORDONNANCES PRISES EN APPLICATION DE LA LOI DU 2 JUILLET 2003 HABILITANT LE GOUVERNEMENT À SIMPLIFIER LE DROIT

Afin d'assurer la sécurité juridique des mesures de simplification apportées par les ordonnances prises en vertu de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, votre commission vous propose, à l'article 51, de procéder à la ratification de l'ensemble des ordonnances prises à ce jour sur le fondement de cette loi.

Est donc proposée, outre la ratification des ordonnances figurant déjà dans le projet de loi, celle des ordonnances prises depuis l'adoption par l'Assemblée nationale, en première lecture, du présent projet de loi :

- l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat ;

- l'ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 portant modification de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;

- l'ordonnance n° 2004-603 du 24 juin 2004 relative aux mesures de simplification dans le domaine des élections prud'homales ;

- l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales et extension à l'outre-mer de dispositions ayant modifié la législation commerciale ;

- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ;

- l'ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004 relative à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce ;

- l'ordonnance n° 2004-637 du 1er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et à la réduction de leur nombre ;

- l'ordonnance n° 2004-825 du 19 août 2004 relative au statut des immeubles à usage de bureaux et des immeubles dans lesquels est effectué le contrôle technique des véhicules et modifiant le code du domaine de l'Etat.

Votre commission vous propose d'apporter, à l'occasion de cette ratification, certaines modifications dans le dispositif des ordonnances ainsi prises.

Dans le même souci de sécurité juridique, votre commission vous propose, par un article additionnel après l'article 51, de ratifier l'ordonnance n° 2004-567 du 17 juin 2004 portant extension et adaptation en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna de la loi n° 2003-495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, et complétant le code de la route, prise sur le fondement de l'article 46 de la loi n° 2003-495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière et de l'article 62 de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer.

Ces nouvelles ratifications permettront de conférer une valeur législative expresse à trois cent soixante-douze dispositions crées ou modifiées par ces différentes ordonnances.22(*)

Votre commission vous propose enfin quelques modifications pour certaines des ordonnances figurant déjà à l'article 51.

*

* *

Votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi ainsi modifié.

EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE PREMIER
MESURES DE SIMPLIFICATION
EN FAVEUR DES USAGERS

Article premier
Habilitation à améliorer l'accès des personnes
aux documents administratifs

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à améliorer par ordonnance l'accès des personnes aux documents administratifs, suivant trois axes complémentaires :

- l'extension du régime prévu par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public à des matières encore régies par des lois spéciales ;

- l'harmonisation des règles applicables aux demandeurs ;

- l'élargissement des possibilités d'accès aux documents.

Le Gouvernement disposera d'un délai de six mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance sur le fondement de l'habilitation prévue à cet article.

Ces dispositions se situent dans le prolongement des premières améliorations apportées au régime d'accès aux documents administratifs par l'article 7 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (DCRA).

La compétence du législateur en ce domaine a été affirmée par le Conseil d'État dans sa décision Ullmann du 29 avril 2002, qui a estimé que les dispositions « relatives à l'étendue du droit d'accès aux documents administratifs, concernent les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques » et qu'elles « portent ainsi sur des matières réservées à la loi par l'article 34 de la Constitution ».

La deuxième étape de la simplification du droit d'accès aux données publiques que vise le présent article s'appuie sur un constat de complexité, auquel la loi DCRA a apporté une réponse encore insuffisante. Il tend en particulier à généraliser la compétence de la commission d'accès aux documents administratifs (CADA).

1. Les améliorations apportées à la communication des documents administratifs depuis la loi de 1978

Le titre premier de la loi du 17 juillet 1978 a consacré un droit d'accès général aux documents administratifs, chargeant la CADA de veiller au respect de la liberté d'accès. La CADA émet ainsi des avis « lorsqu'elle est saisie par une personne qui rencontre des difficultés pour obtenir la communication d'un document ».

Mais la loi du 17 juillet 1978 n'a pas abrogé les textes antérieurs, qui organisent un régime de communicabilité spécial. La complexité résultant de la coexistence de régimes spéciaux et d'un droit d'accès général a été relevée par la CADA dès son huitième rapport d'activité, paru en 1995, ainsi que par le Conseil d'État dans son étude de 1997 « pour une meilleure transparence de l'administration ».

- Les apports de la loi DCRA

La loi DCRA du 12 avril 2000 a ouvert la voie d'une plus grande effectivité du droit d'accès aux documents administratifs, en initiant l'élargissement du champ de compétence de la CADA à certains régimes spéciaux.

Ces améliorations ont d'abord consisté à préciser le champ matériel du titre premier de la loi du 17 juillet 1978, d'une part en y intégrant les fichiers informatiques et les documents numérisés, et d'autre part en en retranchant, notamment, l'ensemble des actes des assemblées parlementaires, les documents d'instruction des réclamations adressées au Médiateur de la République et les documents de travail internes aux chambres régionales des comptes.

Tous les documents résultant d'un traitement automatisé des données, quel que soit leur contenu, sont désormais inclus dans le régime d'accès aux documents administratifs, mettant fin aux disparités de diffusion des données publiques selon qu'elles relevaient de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ou de la loi du 17 juillet 1978 précitée. La seule hypothèse où le requérant doit encore s'adresser à la CNIL23(*) plutôt qu'à la CADA est celle d'une demande d'accès aux informations nominatives le concernant contenues dans un fichier.

L'article 7 de la loi du 12 avril 2000 a par ailleurs étendu l'obligation de communication des autorités administratives aux documents qu'elles détiennent, et non plus aux seuls documents dont elles seraient l'auteur, et précisé la liste des secrets protégés pouvant justifier des restrictions au droit d'accès.

Enfin, le champ de compétence de la CADA a été élargi à plusieurs régimes spéciaux d'accès aux documents, permettant désormais aux usagers de saisir la commission en cas de refus de communication fondés sur :

- la loi du 3 janvier 1979 sur les archives ;

- l'article L. 2121-26 du code général des collectivités territoriales, qui organise la communication des procès-verbaux des conseils municipaux, des budgets et des comptes des communes et de leurs établissements publics administratifs ainsi que des arrêtés municipaux ;

- l'article L. 28 du code électoral, qui organise l'accès aux listes électorales ;

- l'article L. 104 b et l'article L. 111 du livre des procédures fiscales, qui régissent l'accès aux listes des contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu, à l'impôt sur les sociétés et à la taxe départementale sur le revenu tenues par la direction des services fiscaux ;

- l'article 2 du décret du 16 août 1901, qui porte sur les modalités d'accès aux statuts et déclarations des associations rendues publiques conservés dans les préfectures et sous-préfectures ;

- les articles L. 213-13 et L. 332-29 du code de l'urbanisme, qui prévoient la tenue par chaque commune de registres retraçant les acquisitions faites par exercice ou par délégation du droit de préemption ainsi que les contributions d'urbanisme.

La compétence donnée à la CADA s'est ajoutée sans se substituer à l'application de ces règles sectorielles spécifiques. On ne peut donc vraiment parler, en l'occurrence, de simplification, mais plutôt d'amélioration des garanties offertes aux usagers, qui peuvent saisir la CADA en cas de refus de communication. Cette saisie est même un préalable nécessaire à tout recours contentieux contre le refus de communication24(*).

L'élargissement du champ de compétence de la CADA a permis en pratique une véritable amélioration de l'accès aux documents, notamment en ce qui concerne les demandes fondées sur la loi relative aux archives du 3 janvier 1979. Aux termes des articles 6 et 7 de cette loi, les archives, selon leur degré de sensibilité, ne sont consultables qu'après un délai de 30 à 150 ans, sauf dérogation accordée en vertu de l'article 8. Depuis la loi DCRA, la CADA peut être saisie par les personnes qui souhaitent contester un refus de dérogation. Elle évalue alors si les motifs avancés par le demandeur justifient cette dérogation et rend un avis que l'administration n'est pas tenue de suivre.

En outre, deux réformes législatives du droit d'accès sont intervenues depuis la loi DCRA, concernant les dossiers de pupilles et le dossier médical.

- La communication des dossiers de pupilles

Le caractère particulièrement sensible des demandes présentées par d'anciens pupilles et personnes adoptées à la recherche de leurs origines a conduit à la création d'un dispositif spécifique, dans la loi du 22 janvier 2002 relative à l'accès aux origines des personnes adoptées et pupilles de l'État. Le Conseil national pour l'accès aux origines personnelles (CNAOP) est ainsi chargé de résoudre les litiges susceptibles de naître entre les services de l'aide sociale à l'enfance et les anciens pupilles souhaitant accéder à leur dossier.

- L'accès au dossier médical

L'article 4 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a amélioré les règles d'accès aux dossiers médicaux et aux documents contenant des informations à caractère médical.

Ainsi, les patients peuvent désormais accéder directement à leur dossier médical sans nécessairement passer par l'intermédiaire d'un médecin (art. L. 1111-7 du code de la santé publique) tandis que le délai de communication a été ramené à huit jours pour les informations médicales de moins de cinq ans. De même, les ayants droit d'un patient décédé peuvent désormais accéder de plein droit à son dossier médical, sauf circonstances particulières (art. L. 1110-4 du code de la santé publique). La CADA est compétente en ce qui concerne l'accès aux dossiers médicaux ayant un caractère administratif.

2. Un régime d'accès aux documents administratifs caractérisé par une inutile complexité

En dépit de ces améliorations, la loi du 12 avril 2000 n'a pas davantage réformé les régimes spéciaux de communication des documents administratifs que ne l'avait fait la loi du 17 juillet 197825(*). Aussi peut-on recenser aujourd'hui cinq cas de figure différents en matière d'accès aux documents administratifs :

- L'accès aux documents peut être demandé sur le fondement de dispositions spéciales qui renvoient aux règles de droit commun posées par la loi du 17 juillet 1978. C'est le cas des budgets et des comptes des organismes privés ayant reçu une subvention publique, en vertu de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 ;

- L'accès aux documents peut être demandé sur le seul fondement d'une loi spéciale, l'usager pouvant néanmoins saisir la CADA en cas de refus. C'est le cas pour les documents d'archives publiques ;

- L'accès aux documents peut être demandé soit sur le fondement des dispositions de la loi du 17 juillet 1978, soit sur le fondement de dispositions spéciales, la CADA pouvant être saisie dans tous les cas. C'est le cas pour l'ensemble des documents relevant des régimes spéciaux énumérés à l'article 5-1 de la loi du 17 juillet 1978 modifiée (listes électorales, rôles d'imposition, documents municipaux,...). Toutefois, la saisine de la CADA ne constitue un recours précontentieux obligatoire que lorsque la demande est faite sur le fondement de la loi du 17 juillet 1978. Par ailleurs, les dispositions spéciales permettent souvent un accès plus large que le régime de droit commun ;

- L'accès aux documents peut être demandé seulement sur le fondement d'une loi spéciale, quelquefois moins libérale que le régime de droit commun, notamment en ce qui concerne les modalités concrètes du droit d'accès (possibilité de prendre copie, choix du support,...). Tel est le cas pour les documents cadastraux (loi du 7 messidor an II26(*)), pour le casier judiciaire, (art. 772 et suivants du code de procédure pénale) ou encore, en matière électorale, pour les listes d'émargement complétées par chaque bureau de vote, qui sont accessibles aux électeurs et aux candidats pendant une période limitée après la tenue du scrutin (art. L. 68 et LO 179 du code électoral) ;

- L'accès aux documents peut être demandé soit sur le fondement de la loi du 17 juillet 1978, soit sur le fondement d'un texte spécial excluant l'intervention de la CADA, selon la date à laquelle a été faite la demande.

C'est le cas pour les documents se rapportant à un projet soumis à enquête publique, tel que l'élaboration, la révision ou la modification d'un plan d'occupation des sols. Tant que l'enquête publique est en cours, ces documents ne peuvent être communiqués au public que selon les modalités particulières prévues par le code de l'urbanisme. Une fois qu'elle est close, ils entrent alors dans le champ de la loi du 17 juillet 1978 et sont soumis aux règles de communication de droit commun.

3. L'extension de la compétence de la CADA et l'harmonisation des règles d'accès applicables aux demandeurs prévues par le projet de loi.

- L'extension de la compétence de la CADA

La CADA est aujourd'hui contrainte de se déclarer incompétente pour connaître du refus de communication de documents dans une dizaine de cas. Elle indique alors aux requérants les dispositions particulières relatives à la communication de ces documents.

L'ordonnance devrait par conséquent élargir la compétence de la commission aux régimes de communication pour lesquels son intervention paraîtrait pertinente. Elle serait alors en mesure d'émettre un avis, ce qui lui conférerait un rôle de médiation entre les demandeurs et l'administration. Dans tous ces cas, la saisine précontentieuse de la CADA deviendrait obligatoire.

L'extension du régime de la loi du 17 juillet 1978 pourrait ainsi concerner l'accès aux documents cadastraux, aux documents détenus par les conservateurs des hypothèques en matière de publicité foncière, aux listes d'émargement des élections ou à la liste générale des objets mobiliers classés et aux documents nécessaires à la constitution de cette liste.

Au-delà d'une quasi généralisation de la compétence de la CADA, l'ordonnance procéderait également à l'harmonisation des règles applicables aux demandeurs en vertu des lois spéciales, notamment en matière de délais. La rédaction actuelle de l'habilitation prévoit cette harmonisation.

- L'élargissement des possibilités d'accès aux documents

L'ordonnance pourrait en outre consacrer, en les reprenant dans la loi du 17 juillet 1978, certaines solutions jurisprudentielles, d'ailleurs issues de la CADA. Ainsi, pour les documents qui entrent dans la liste des secrets protégés et, partant, ne sont pas communicables aux termes de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, le juge peut, le cas échéant, demander à l'administration d'en donner communication partielle.

La principale occurrence des refus de communication en raison d'une atteinte au secret concerne la recherche, par les services compétents, des infractions fiscales et douanières. En ce domaine le Conseil d'État a autorisé la communication, sous réserve d'occulter, au préalable, la partie sensible du document, des monographies établies par la direction générale des impôts pour faciliter le travail des vérificateurs (CE, 22 octobre 1990 Cassigneul).

Si la solution adoptée par le juge administratif permet de satisfaire aux exigences de transparence, la loi ne prévoit toujours pas explicitement la possibilité d'une communication partielle. La Cour de justice des communautés européennes a ainsi condamné la France pour ne pas avoir repris expressément dans la loi du 17 juillet 1978 l'obligation, énoncée à l'article 3, paragraphe 2, de la directive 90/313/CEE relative à la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement, de communiquer partiellement les informations lorsqu'il est possible d'en retirer les mentions qui peuvent justifier un refus de communication27(*)28(*).

En revanche, l'ordonnance ne reviendra par sur l'exclusion du champ matériel des documents communicables au titre de la loi du 17 juillet 1978 de l'ensemble des actes des assemblées parlementaires.

- L'amélioration de l'accès aux documents administratifs

Si l'accès aux documents administratifs a été consacré comme une nouvelle garantie fondamentale et devrait recevoir de nouvelles améliorations avec cette ordonnance, sa pleine application requiert une attention particulière du pouvoir exécutif pour qu'il entre dans la culture administrative.

A cet égard, l'évaluation trouve ses limites dans l'absence d'éléments statistiques pertinents, puisque les administrations ne recensent pas les demandes d'accès qui leur sont adressées. Il est donc impossible d'estimer la part que représentent les refus de communication soumis à la CADA par rapport à l'ensemble des demandes d'accès.

De façon récurrente, la CADA déplore le manque de transparence des administrations. Elle note ainsi dans son rapport d'activité pour 1999-2000 qu' « au-delà des imperfections, somme toute relatives, des régimes applicables, le principal obstacle à la mise en oeuvre du régime d'accès institué par la loi du 17 juillet 1978 reste, plus de vingt ans après l'adoption de ce texte, l'attitude des administrations elles-mêmes. »

Comme le relève Mme Michèle Puybasset, présidente de la CADA29(*), « le moins que l'on puisse dire est que le droit d'accès des citoyens aux documents n'est pas une priorité pour les administrations et que la transparence n'est toujours pas une finalité intégrée dans leurs objectifs ». Il est par conséquent souhaitable que le Gouvernement intègre l'exigence de transparence dans sa démarche d'amélioration des relations avec les usagers, par exemple au moyen de la « Charte Marianne » que doivent appliquer les administrations.

Votre commission des Lois vous soumet par conséquent un amendement précisant que l'ordonnance pourra comporter des mesures visant à améliorer l'accès aux documents.

La rédaction proposée autorise, le cas échéant, le Gouvernement, à inclure dans les modifications de la loi du 17 juillet 1978 une incitation à la transparence administrative. Ce dispositif pourrait consister en la mise en place de correspondants dans les administrations, voire dans certaines collectivités territoriales, chargés d'assurer l'application de la loi du 17 juillet 1978.

4. Donner une valeur législative à la composition de la CADA

L'article 5 de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 renvoie à un décret en Conseil d'État la composition et le fonctionnement de la CADA. Plus de vingt-cinq ans après cette loi, alors que, comme l'a indiqué M. Renaud Denoix de Saint Marc, vice-président du Conseil d'État, lors du colloque célébrant cet anniversaire, « la CADA a pris toute sa place dans nos institutions », il conviendrait de donner une valeur législative à sa composition. Il s'agirait ainsi de mieux reconnaître le rôle et l'indépendance de cette autorité.

La plupart des lois relatives à la création de nouvelles autorités administratives indépendantes comportent en effet des dispositions précisant leur composition.

Tel est le cas pour la CNIL (loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, article 13), la Commission nationale consultative du secret de la défense nationale (loi n° 98-567 du 8 juillet 1998, article 2) ou encore la Commission nationale de déontologie de la sécurité (loi n° 2000-494 du 6 juin 2000, article 2).

Cette habilitation permettrait en outre de préciser au sein de l'ordonnance les compétences de la CADA, pour leur conférer, après ratification par le Parlement, une valeur législative. C'est le sens de l'amendement que votre commission des Lois vous propose.

Composition de la commission d'accès aux documents administratifs
(article 1er du décret n° 78-1136 du 6 décembre 1978)

La CADA est aujourd'hui composée :

- d'un membre du Conseil d'État, d'un grade au moins égal à celui de conseiller d'État, qui la préside, d'un magistrat de la Cour de cassation et d'un magistrat de la Cour des comptes, nommés par décret ;

- d'un député et d'un sénateur désignés respectivement par le président de l'Assemblée nationale et par le président du Sénat ;

- d'un représentant du Premier ministre ;

- un membre d'un conseil général ou d'un conseil municipal désigné par décision conjointe du Président du Sénat et du Président de l'Assemblée nationale ;

- d'un professeur de l'enseignement supérieur en activité ou honoraire nommé par décret ;

- du directeur général des Archives de France ou, en cas d'empêchement, son représentant ;

- du directeur de la Documentation française ou, en cas d'empêchement, de son représentant.

5. La transposition de la directive n°2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public

L'amendement que vous propose votre commission des Lois tend à intégrer au sein de l'article 1er l'habilitation à transposer la directive n°2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public, prévue au 7° de l'article 3. La transposition de cette directive, qui doit intervenir avant le 1er juillet 2005, doit entraîner, en effet des modifications de la loi du 17 juillet 1978.

Adoptée le 17 novembre 2003 par le Parlement européen et le Conseil, la directive 2003/98/CE organise l'harmonisation des règles et pratiques nationales régissant la réutilisation des documents du secteur public, afin d'assurer « la pleine réalisation du potentiel économique de cette ressource essentielle »30(*). Elle entend satisfaire cet objectif sans affecter les règles d'accès en vigueur dans les États membres et ne s'applique pas aux cas dans lesquels les citoyens ou les entreprises doivent démontrer un intérêt particulier pour obtenir l'accès aux documents.

Sa transposition requiert néanmoins des modifications de la loi du 17 juillet 1978 qui devront être définies en concertation avec la CADA et la CNIL. Ainsi, l'article 10 de cette loi, qui dispose que le droit à communication « exclut, pour ses bénéficiaires ou pour les tiers, la possibilité de reproduire, de diffuser ou d'utiliser à des fins commerciales les documents communiqués » ne paraît pas compatible avec le principe de réutilisation des documents, y compris à des fins commerciales, établi par la directive.

La transposition de la directive pose ensuite le problème de la réutilisation des fichiers contenant des données à caractère personnel. La loi du 17 juillet 1978 permettant l'accès à des informations nominatives, la compétence qui pourrait être confiée à la CADA pour connaître des contentieux relatifs à la réutilisation des documents devrait alors prendre en compte les règles de protection établies par la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés (loi du 6 janvier 1978).

Enfin, les principes de tarification définis à l'article 6 de la directive appelleront également des aménagements dans la définition des tarifs pratiqués par certains établissements publics ou services qui ont pour mission d'établir et de diffuser des documents dont la vente génère des recettes, comme l'Institut géographique national ou l'Institut national de la statistique et des études économiques.

Le texte communautaire prévoit en effet que le total des recettes générées par la fourniture et les autorisations de réutilisation des documents « ne dépasse pas leur coût de collecte, de production, de reproduction et de diffusion, tout en permettant un retour sur investissement raisonnable ». La tarification appliquée en France, qui n'excède pas, aux termes de la loi du 17 juillet 1978, le principe de redevance pour service rendu, devrait être adaptée en tenant compte de la nécessaire garantie des droits de propriété intellectuelle.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 1er ainsi modifié.

Article 2
Harmonisation des règles de retrait des actes administratifs

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance à l'harmonisation des règles de retrait des actes administratifs individuels créateurs de droit entachés d'illégalité.

Le retrait d'un acte correspond à son annulation par l'administration et se distingue ainsi de son annulation contentieuse, tout en ayant également pour effet de faire disparaître l'acte rétroactivement, de sorte qu'il est considéré comme n'ayant jamais existé.

L'enjeu de l'harmonisation des règles de retrait des actes administratifs est donc l'équilibre entre une exigence de légalité31(*), qui doit conduire à faire disparaître un acte illégal, même créateur de droits, et une exigence de stabilité des situations juridiques, tant pour les citoyens que pour les collectivités territoriales ou les entreprises, dont les activités peuvent dépendre du caractère définitif d'une décision. Il est donc primordial que les délais de retrait obéissent à des règles claires et précises.

Tel n'est pas le cas aujourd'hui, où la multiplication des catégories d'actes -décisions implicites et explicites, ayant fait l'objet ou non d'une publicité ou d'un recours contentieux- s'accompagne d'autant de régimes de retrait différents, fixés par la loi DCRA du 12 avril 2000 pour le retrait des actes implicites et par la décision Ternon32(*) du Conseil d'Etat pour le retrait des actes explicites. Cette situation appelle donc une réforme d'ensemble.

1. Un régime de retrait marqué par l'incertitude juridique

a) De la jurisprudence Dame Cachet à l'intervention du législateur

Dans sa décision Dame Cachet du 3 novembre 1922, le Conseil d'État a jugé que l'autorité administrative pouvait prononcer le retrait d'un acte créateur de droits tant que les délais de recours contentieux n'étaient pas expirés, et qu'un tel retrait pouvait encore être décidé après l'expiration de ces délais dans le cas où un recours contentieux avait été formé et tant que le juge ne s'était pas prononcé.

Cette jurisprudence fondatrice laissait toutefois en suspens la question du délai de retrait d'un acte créateur de droits en l'absence de mesures de publicité susceptibles de déclencher le délai de recours ouvert aux tiers.

La réponse fut apportée dans la décision Ville de Bayeux du 6 mai 1966 : le défaut de publication d'un acte, même notifié à la personne à laquelle il ouvre des droits, empêche le délai de recours contentieux de courir à l'égard des tiers, si bien que la décision illégale, ne revêtant pas de caractère définitif, peut être retirée à tout moment par l'administration. Si cette solution avait le mérite de la logique, puisqu'elle préservait le lien entre la période où l'administration peut retirer son acte et celle où l'acte peut être annulé par le juge, elle présentait un danger pour la stabilité juridique.

Afin d'éviter que le bénéficiaire d'une décision implicite d'acceptation ne pâtisse d'une insécurité juridique excessive, le Conseil d'Etat a exclu, dans sa jurisprudence Eve du 14 novembre 1969, toute possibilité de retrait d'une telle décision, après l'expiration du délai de décision implicite et même pendant le délai de recours contentieux, dès lors qu'elle n'avait pas fait l'objet de mesures d'information à l'égard des tiers.

b) Les conditions de retrait des décisions implicites fixées par la loi DCRA du 12 avril 2000

L'article 23 de la loi DCRA du 12 avril 2000 est revenu sur les règles définies par la jurisprudence Eve, en envisageant trois situations différentes pour le retrait des décisions implicites d'acceptation entachées d'illégalité, selon qu'elles ont été portées ou non à la connaissance des tiers. Aux termes de cet article le retrait de telles décisions est donc possible :

- pendant le délai de recours contentieux, lorsque des mesures information des tiers ont été effectivement mises en oeuvre ;

- pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ;

- pendant la durée de l'instance, lorsqu'un recours contentieux a été formé.

c) Les conditions de retrait des décisions explicites définies par l'arrêt Ternon

Dans sa décision Ternon du 26 octobre 2001, le Conseil d'Etat a remis en cause sa jurisprudence Ville de Bagneux afin de simplifier la définition des délais de retrait des décisions explicites créatrices de droits et de les rendre plus respectueux de l'équilibre entre légalité et stabilité des droits individuels acquis.

Désormais l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits « que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ». Le véritable bouleversement de cette jurisprudence réside par conséquent dans le découplage du droit de retrait et du délai de recours contentieux, le délai de quatre mois s'imposant à l'administration même lorsqu'un tel recours a été déposé.

L'ordonnance devrait retenir cet apport de la jurisprudence pour les décisions implicites et explicites, qui correspond davantage, comme l'a indiqué le commissaire du Gouvernement devant l'Assemblée du contentieux, à « la conception moderne de la répartition des pouvoirs entre autorités administratives et juridictionnelles ». L'assimilation entre retrait par l'autorité administrative et annulation contentieuse relevait de la théorie du ministre-juge, qui paraît aujourd'hui d'autant moins pertinente que les procédures de référé permettent au juge administratif de prendre très rapidement des mesures pour mettre fin aux situations nées de l'illégalité.

2. Les deux objectifs de l'harmonisation : l'intelligibilité du dispositif et un meilleur équilibre entre légalité et sécurité juridique

L'éclatement du droit du retrait des actes administratifs en une multiplicité de régimes différents nuit à toute intelligibilité non seulement pour les usagers mais aussi pour les auteurs de ces décisions. Les administrations peuvent ainsi douter du régime à appliquer dans le cadre de leur propre contrôle de légalité.

L'harmonisation des règles de retrait des actes administratifs individuels créateurs de droits, intervenus de façon explicite ou implicite, doit par conséquent permettre de déterminer facilement le point de départ du délai de retrait.

L'exigence de sécurité juridique et les incidences importantes en cas de retrait, doivent par ailleurs conduire à limiter dans le temps la possibilité de retrait de l'acte par l'administration. Ainsi, s'agissant des décisions individuelles créatrices de droits dans le domaine de l'urbanisme, ce délai de retrait détermine le moment où l'acte peut être considéré comme définitif, c'est-à-dire aussi, dans nombre de situations, le moment où peuvent commencer les travaux.

L'arrêt Ternon a substitué un délai uniforme de quatre mois pour le retrait des décisions explicites à un délai qui n'était auparavant que de deux mois et demi, soit le délai de recours (deux mois) auquel s'ajoutait l'obligation de notification de la décision dans les quinze jours. Une circulaire du 13 avril 2002 adressée par le secrétaire d'État au logement aux préfets ne recensait pas moins de treize catégories d'autorisations d'urbanisme, décisions explicites, concernées par la jurisprudence Ternon : permis de construire, permis de démolir, certificat d'urbanisme, autorisation de lotir... Pour toutes ces décisions, la solution adoptée par le juge correspond par conséquent à un allongement de la durée de latence préalable au démarrage des travaux.

Le groupe de travail rassemblant le Conseil d'État et le ministère de l'équipement, qui sera chargé d'élaborer l'ordonnance, devrait préférer un délai général de retrait plus adapté, qui commencerait à courir dès la signature de la décision. Cette durée devrait permettre de le distinguer du délai de recours contentieux de deux mois, qui ne court qu'après la publication de l'acte. En outre, il paraîtrait acceptable qu'au terme de ce délai et en cas de recours, l'administration dispose encore d'un délai réduit pour retirer sa décision.

L'ordonnance prise sur le fondement de l'habilitation prévue à cet article devra être adoptée dans un délai de douze mois suivant la publication de la présente loi.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 2 sans modification.

Article 3
Développement de l'administration électronique

Cet article a pour objet, d'une part, d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance un ensemble de mesures destinées à favoriser le développement de l'administration électronique (I), et d'autre part, de permettre la création de groupements d'intérêt public pour promouvoir l'utilisation des technologies de l'information dans l'administration (II).

Le Gouvernement disposera d'un délai de douze mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance sur le fondement de cet article.

L'utilisation par les usagers des procédures administratives dématérialisées, où l'échange électronique remplace le contact avec un fonctionnaire, ne pourra se développer que si elles offrent au minimum les mêmes garanties.

L'ensemble des mesures que le Gouvernement serait habilité à prendre par ordonnance pour favoriser ce développement est donc conditionné par le respect des libertés individuelles. Le projet de loi initial soumettait l'habilitation au « respect de la liberté individuelle et de la vie privée ». L'Assemblée nationale a adopté, avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement qui définit plus précisément cette condition en faisant mention « des règles de protection de la liberté individuelle et de la vie privée établies par la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. »

La référence aux garanties prévues en particulier par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés est d'autant plus pertinente que la Commission nationale de l'informatique et des libertés, se prononçant sur les dispositions de l'article relatif au développement de l'administration électronique contenues dans l'avant-projet de loi33(*), a estimé que ces dispositions n'appelaient « pas d'objection de principe au regard des principes de protection des données à caractère personnel mais qu'elle devra être consultée sur les dispositions des ordonnances qui préciseront les mesures envisagées et qui seront susceptibles d'intéresser la protection des droits et libertés des personnes à l'égard des traitements de données à caractère personnel ».

1. L'administration électronique en France

L'OCDE définit l'administration électronique comme « l'usage des technologies de l'information et de la communication et en particulier de l'Internet en tant qu'outil visant à mettre en place une administration de meilleure qualité ».

Le développement de l'administration électronique en France a d'abord été initié en août 1997, avec le lancement du programme d'action gouvernemental pour la société de l'information (PAGSI) par le Premier ministre Lionel Jospin. Ce programme a laissé la place au plan RE/SO34(*) 2007, qu'a lancé M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, le 12 novembre 2002. Ce plan vise trois objectifs complémentaires :

agir sur l'offre, par la mise en place d'un « environnement favorable au développement de l'offre d'infrastructures, de contenus et de services », en facilitant l'accès à la création d'entreprises et en améliorant le financement des projets ;

agir sur la demande, en accélérant la diffusion et l'appropriation des technologies nouvelles par les citoyens ;

intervenir directement en tant qu'acteur de la société de l'information, en s'appuyant sur les technologies de l'information et de la communication pour l'éducation et la formation, en intégrant l'apport de ces technologies dans les politiques culturelles et de santé, et en passant à « la deuxième phase de l'administration électronique », qui correspond aux dispositions du présent article.

Cette deuxième phase consiste à dématérialiser les procédures, à renforcer les moyens de l'Etat par la création de l'agence pour le Développement de l'Administration Électronique (ADAE), et à faire avancer rapidement des chantiers ciblés et exemplaires.

L'ADAE, créée par le décret n°2003-141 du 21 février 2003, est un service interministériel placé auprès du Premier ministre et mis à la disposition du ministre chargé de la réforme de l'Etat. Aux termes de l'article 4 du décret, « elle favorise le développement de systèmes d'information et de communication permettant de moderniser le fonctionnement de l'administration et de mieux répondre aux besoins du public ».

L'agence a élaboré un plan stratégique de l'administration électronique (PSAE), afin d'accélérer la création de services en ligne, et coordonne la mise en oeuvre du projet ADELE (Administration Électronique 2004/2007), inauguré par le Premier ministre le 9 février 2004. Le projet ADELE rassemble 140 mesures qui correspondent à la création de 300 nouveaux services.

L'habilitation prévue à l'article 3 permettra en particulier la mise en oeuvre des projets :

- ADELE 4, sur le changement d'adresse ;

- ADELE 33, relatif à la mise en place d'un espace de stockage personnel ;

- ADELE 76, sur la carte d'agent public pour la signature de pièces par les agents ;

- ADELE 119, relatif à la politique de référencement intersectorielle de sécurité.

2. La sécurité des échanges d'information, préalable indispensable au développement de l'administration électronique

Le Gouvernement serait habilité à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des informations échangées entre les usagers et les autorités administratives, ainsi qu'entre les autorités administratives (I, 1°).

Comme pour les autres dispositions de cet article, sont considérées comme autorités administratives « les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes gérant des régimes de protection sociale relevant du code de la sécurité sociale et du code rural ou mentionnés aux articles L. 223-16 et L. 351-21 du code du travail et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif ».

Il incombe à l'Etat de garantir la sécurité juridique et technique des échanges d'information par voie électronique avec les usagers. A cet effet, l'ordonnance devrait mettre en place une politique de référencement intersectorielle de sécurité (PRIS), prévoyant plusieurs niveaux de sécurité possibles pour chaque procédé de sécurité : identification, signature, confidentialité, archivage et horodatage.

L'ordonnance devrait par ailleurs obliger les autorités administratives offrant des téléservices à exiger un niveau de sécurité qui se réfère à la PRIS et les prestataires de services de sécurité à respecter ses exigences. La PRIS pourra également être utilisée pour la définition de politiques de sécurité ou de spécifications techniques par le secteur privé et s'appliquera aux échanges d'information par voie électronique entre les autorités administratives.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement tendant à préciser, conformément aux préconisations de la CNIL dans son avis susmentionné, qu'il s'agit d'assurer la sécurité des informations échangées par voie électronique.

3. La simplification des procédures et le recours aux échanges électroniques

Les 2° et 3° du I de l'article 3 du projet de loi tendent à habiliter le gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour permettre aux usagers de réaliser leurs démarches administratives par voie électronique et aux autorités administratives de recourir aux échanges électroniques dans le cadre des procédures de contrôle.

Le développement des téléservices doit être mis à profit pour simplifier les démarches administratives. L'« e-administration » doit ainsi être, comme le suggère le Forum des droits sur l'Internet dans son rapport d'activité pour 2003, « un facteur de réduction des contraintes a priori imposées aux usagers, et notamment des pièces justificatives à produire ». La fourniture de telles pièces peut être remplacée par un mécanisme de déclaration sur l'honneur comme aujourd'hui pour la procédure de déclaration des revenus par voie électronique (Télé-IR). L'administration électronique apparaît ainsi comme un levier important de la réforme de l'État, puisqu'il est indispensable de simplifier les démarches administratives avant de permettre leur réalisation en ligne35(*).

Aujourd'hui, plus de 90% des formulaires administratifs sont disponibles en ligne et on recense plus de 200 télé-services publics. Le ministère de l'économie et des finances fait aujourd'hui figure de pionner en ce domaine, puisque les usagers peuvent désormais effectuer en ligne toutes les démarches fiscales courantes : télé-déclaration des revenus, télé-paiement des impôts, consultation de son dossier fiscal. Ainsi, selon M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État au budget et à la réforme budgétaire, 54% de la TVA a été collectée en ligne depuis le début 2004 et la télé-déclaration des revenus a progressé de 50% cette année, ce qui porte à 1,2 millions le nombre de télé-déclarations36(*).

S'agissant du ministère de la santé, plus de 50% des feuilles de soin sont traitées au travers de Sesam Vitale, soit plus de 600 millions de feuilles maladie, ce qui a permis une réduction des délais de remboursement de deux mois à sept jours.

Cette habilitation vise à fixer par ordonnance des règles applicables à tous les télé-services et à donner aux administrations une autorisation générale pour développer des télé-procédures dans leurs domaines d'intervention. L'agence pour le développement de l'administration électronique exercera auprès d'elles un rôle d'accompagnement, par la mise en commun des savoir-faire acquis et par la normalisation technique.

L'habilitation accordée par le 3° du I de cet article tend à autoriser par ordonnance les échanges par voie électronique « dans le cadre des procédures de contrôle ». Ce champ très général recouvre à l'origine les procédures de contrôle douanier et fiscal. La dématérialisation des échanges est inédite en ce domaine. L'ordonnance permettrait de façon générale aux administrations et aux usagers d'échanger par voie électronique les pièces nécessaires au contrôle : documents comptables, justificatifs...

La simplification de l'exercice des démarches administratives par voie électronique devrait requérir la définition de référentiels communs à toutes les autorités administratives proposant des services en ligne. Les travaux des différentes administrations et collectivités seront fédérés autour de méthodes, ressources et outils communs. Devront donc être mis en place des référentiels techniques, de sécurité, de qualité, de données.

L'ordonnance pourrait par conséquent établir un « cadre commun d'interopérabilité », ou un service serait désigné comme gestionnaire pour chaque contenu.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement tendant à préciser que le Gouvernement pourra, dans le cadre de l'ordonnance et pour simplifier les démarches administratives, définir les conditions d'une interopérabilité des services offerts par les administrations.

4. Le stockage sous forme électronique des documents administratifs des usagers

Le 4° de l'habilitation donnée au gouvernement devrait lui permettre d'organiser un dispositif de stockage électronique des données intéressant les usagers et susceptibles d'être transmis aux destinataires de leur choix.

Le stockage sous forme électronique de documents administratifs des usagers se distingue du dossier administratif en ligne que les administrations peuvent mettre à la disposition des citoyens. Dans le cas du dossier administratif, chaque administration conserve et met à jour les documents relatifs à l'usager : déclarations, avis d'imposition,... En revanche, le dispositif de stockage relèvera de l'entière responsabilité de chaque citoyen.

L'espace personnel appartiendrait ainsi à l'usager qui aurait la faculté d'en demander à tout moment la radiation. La liste des informations qui pourraient y être stockées sera fixée par décret en Conseil d'État, pris après avis de la CNIL. Il s'agirait d'une part des documents certifiés par l'administration (données prouvées) tels que des diplômes, des actes d'état civil, des attestations d'assurance maladie et d'autre part des données fournies par l'usager (données alléguées), comme son nom, son adresse, sa date et son lieu de naissance...

Cet espace personnel serait hébergé sur l'une des entités agréées par l'État sur le fondement d'un cahier des charges soumis à l'avis de la CNIL. Il incomberait à l'usager d'assurer la mise à jour des informations stockées.

5. Le service de changement d'adresse en ligne

Le 5° de l'habilitation concerne la mise en place d'un service de déclaration en une seule opération du changement d'adresse d'un usager aux autorités administratives ainsi qu'à tout organisme chargé d'une mission du service public et à des organismes de droit privé.

Les formalités administratives de changement d'adresse concernent chaque année 10 % de la population, soit environ 6 millions de personnes. La mise en place d'un service unique de changement d'adresse représente par conséquent une mesure de simplification d'une portée pratique considérable. Cette faculté permettra aux citoyens qui changent de résidence principale de ne communiquer qu'une seule fois leur nouvelle adresse à l'administration, qui sera tenue de répercuter l'information auprès des destinataires choisis par l'usager.

La déclaration de changement d'adresse pourra être faite indifféremment auprès des services administratifs auxquels l'usager a recours, à un guichet ou en ligne. Les services administratifs concernés lui confirmeront la prise en compte de sa demande, par retour de courrier postal, électronique ou message téléphonique.

La déclaration unique de changement d'adresse constitue une réforme emblématique des potentialités de l'administration électronique pour simplifier la vie des usagers. Plusieurs services en ligne peuvent ainsi être mis en place qui correspondent à des événements de la vie qui requièrent encore des démarches administratives trop répétitives.

Dans le cas du changement d'adresse, la simplification qu'autorise le recours aux échanges électroniques est d'autant plus conséquente que le nombre d'organismes publics (administrations, collectivités locales) et privés (banques, assurances) participant au service est élevé.

Ainsi, le service de changement d'adresse mis en place au Québec en juin 2004 permet aux usagers de signaler rapidement par Internet37(*) leur déménagement à six ministères et organismes : le ministère de l'emploi, de la solidarité et de la famille, la Régie des rentes du Québec, la société de l'assurance automobile du Québec, le ministère du revenu du Québec, le directeur général des élections, ainsi que la régie de l'assurance maladie du Québec.

Dans sa première version, le service français de changement d'adresse aura pour participants la Caisse nationale d'allocations familiales, la Caisse nationale d'assurance vieillesse, la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, l'UNEDIC, le service des cartes grises, la direction générale des impôts, la direction générale de la comptabilité publique , la direction du service national (journée d'appel et de préparation à la défense).

L'ordonnance pourrait comporter des dispositions de nature à faire participer les services des collectivités territoriales à cette nouvelle procédure.

En outre, si le service de changement d'adresse ne devrait, dans un premier temps, concerner que les personnes physiques, il sera étendu progressivement aux personnes morales et, notamment, aux entreprises. La mise en place du service de déclaration unique de changement d'adresse pour les personnes morales de droit privé devrait être réalisée après une concertation étroite avec les centres de formalité des entreprises et les greffiers des tribunaux de commerce.

L'habilitation pourrait être utilement étendue aux changements de situation familiale : mariage, PACS, naissance, divorce, décès... Ces événements intéressent également de multiples interlocuteurs tels que l'état civil, l'administration fiscale, l'assurance maladie, les allocations familiales ou encore l'assurance vieillesse.

Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement tendant à élargir le champ de l'habilitation à la mise en place d'un service permettant aux usagers de déclarer en une seule opération leurs changements de situation familiale.

6. La signature électronique des actes administratifs

Le 6° de l'habilitation donnée au Gouvernement par le I du présent article vise à permettre et favoriser la signature électronique des actes des autorités administratives. La signature électronique pourrait ainsi être utilisée pour la promulgation des lois, la signature des décrets et arrêtés ou encore le contrôle de légalité des actes des collectivités locales.

Dotée d'une valeur juridique depuis la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique, cette dernière « consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache » (art. L. 1316-4 du code civil).

Les conditions de fiabilité de la signature électronique sont définies par le décret n° 2001-272 du 30 mars 2001, qui impose que cette signature soit « établie grâce à un dispositif sécurisé de signature électronique et que la vérification de cette signature repose sur l'utilisation d'un certificat électronique qualifié » (article 2). Répondant aux exigences définies par la directive 1999/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques, la loi du 13 mars 2000 ne s'applique pas au champ administratif.

L'ordonnance permettra aux agents de recourir à la signature électronique afin de signer certaines pièces dans le cadre de la dématérialisation des procédures et de s'assurer de leurs droits, en accédant à un espace professionnel grâce à leur carte d'agent public (projet ADELE 76).

7. La transposition de la directive n°2003/98/CE concernant la réutilisation des informations du secteur public

Votre commission des Lois ayant intégré l'habilitation à transposer la directive n° 2003/98/CE dans la nouvelle rédaction de l'article 1er, elle vous propose en conséquence un amendement tendant à supprimer le huitième alinéa de l'article 3.

8. La création de groupements d'intérêt public en matière d'utilisation des technologies de l'information

Le II de l'article 3 du projet de loi, d'application directe, autorise la création de groupements d'intérêt public (GIP) entre des personnes morales de droit public ou entre des personnes morales de droit public et de droit privé, pour favoriser l'utilisation des technologies de l'information, en vue de développer l'administration électronique ou de gérer des équipements d'intérêt commun dans ce domaine.

La forme juridique du GIP, qui permet de mettre en commun des moyens pour atteindre un résultat défini, paraît adaptée au développement de l'administration électronique. Ces GIP devraient être soumis au statut initialement défini par l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France38(*). Ainsi, le GIP est avant tout une convention entre les personnes publiques et privées qui y participent. La convention constitutive du groupement doit être approuvée par les pouvoirs publics. Le GIP dispose alors de la personnalité morale et de l'autonomie financière.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter deux amendements au II de cet article, afin :

- d'apporter une précision rédactionnelle au champ de l'habilitation ;

- mettre à jour la référence au statut des GIP défini par l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982, qui a été transférée aux articles L. 341-1 à L. 341-4 du code de la recherche, depuis l'ordonnance n° 2004-545 du 11 juin 2004.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié.

Article 4
Simplification du droit de la filiation

Le droit de la filiation se caractérise aujourd'hui par une complexité qui, si elle reflète la diversité des situations, le rend illisible. Le rapport remis par Mme Irène Théry39(*) à la ministre de l'emploi et de la solidarité et au garde des Sceaux en mai 1998 et celui du groupe du travail animé par Mme Françoise Dekeuwer-Défossez sur la rénovation du droit de la famille, rendu au garde des Sceaux en septembre 199940(*), ont tous deux appelé à sa réforme.

Le groupe réuni à partir de décembre 2002 par le Gouvernement afin de préparer la réforme du droit de la famille, composé de parlementaires, de praticiens et d'universitaires, s'est consacré à la filiation après la préparation de la réforme du divorce.

L'habilitation demandée par le présent article vise à mettre en oeuvre ses orientations, centrées sur l'égalité entre les enfants sans considération du lien existant entre leurs parents et des circonstances de leur conception et de leur naissance, sur la stabilité du lien de filiation et l'intérêt de l'enfant.

Le présent article autorise donc le Gouvernement à « modifier les dispositions du code civil relatives à la filiation pour en harmoniser le droit, faciliter l'établissement du lien de filiation, en garantir la sécurité et organiser le régime de contestation ». Conformément à l'article 61 du présent projet de loi, cette ordonnance devra être prise dans les neuf mois suivant la publication de la présente loi.

1. La suppression de la distinction entre filiation légitime et filiation naturelle

Le droit de la filiation repose sur la distinction entre la filiation légitime, liée au mariage, et la filiation naturelle, fondée sur la naissance hors mariage, qui entraîne des règles d'établissement et de contestation différentes. Le maintien de deux types de filiation est actuellement remis en cause.

L'expression de filiation naturelle est en elle-même contestable, cette filiation n'étant ni plus ni moins naturelle que la filiation des enfants nés du mariage, les uns comme les autres pouvant être nés de procréation médicalement assistée. De plus, l'opposer à celle de filiation légitime tendrait à dire que seul le second type de filiation est conforme aux lois.

La préférence donnée à la famille fondée sur le mariage par le code civil de 1804 avait fondé une hiérarchie entre les enfants. L'enfant naturel simple, c'est-à-dire né de parents tous deux célibataires, avait des droits inférieurs à ceux de l'enfant légitime, né de parents mariés entre eux, tandis qu'était interdit l'établissement de la filiation des enfants adultérins (dont le père ou la mère était engagé dans les liens du mariage avec une autre personne) ou incestueux.

La loi n° 72-3 du 3 janvier 1972 a marqué une étape décisive en posant le principe de l'égalité des filiations et en permettant l'établissement des filiations adultérines à l'égard du parent marié. Les droits de l'enfant adultérin demeuraient cependant restreints. Ainsi, ses droits successoraux étaient réduits de moitié en cas de concurrence avec le conjoint victime de l'adultère ou les enfants légitimes (art. 759 et 760 du code civil). Une réduction identique s'appliquait pour les libéralités.

La Cour européenne des droits de l'homme a condamné dans son arrêt Mazurek contre France le 1er février 2000 cette discrimination fondée sur la naissance41(*).

Tirant les conséquences de cette condamnation, la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral a aboli la distinction entre enfants naturels simples et enfants adultérins, et supprimé les différentes dispositions du code civil organisant cette discrimination42(*). Le concept même d'enfant adultérin a disparu.

Enfin, la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale a précisé dans un nouvel article 310-1 du code civil que « tous les enfants dont la filiation est légalement établie ont les mêmes droits et les mêmes devoirs dans les rapports avec leur père et mère. Ils entrent dans la famille de chacun d'eux »43(*). De plus, elle a supprimé les références aux enfants légitimes et naturels et renforcé le principe d'une autorité parentale exercée en commun, dépendant non plus du statut des parents, mais de la date d'établissement de la filiation.

Du fait de cette égalisation des droits des enfants, la distinction des filiations légitime et naturelle est devenue sans objet. Plusieurs pays, dont certains de tradition juridique proche de la France, l'ont d'ailleurs récemment abandonnée : la Belgique par la loi du 31 mars 1987, le code civil du Québec depuis le 1er janvier 1994 et l'Allemagne par la loi du 16 décembre 1997.

L'ordonnance devrait donc suivre les préconisations émises tant par Mme Irène Théry que par le groupe de travail animé par Mme Françoise Dekeuwer-Défossez et suivre la même voie. 

En effet, la distinction entre filiations légitime et naturelle apparaît archaïque, alors que les naissances hors mariage atteignaient en 2000 43 % des naissances (contre 6 % en 1965), et que les enfants nés hors mariage sont dans leur immense majorité désirés par leurs deux parents (92 % des enfants nés en 1994 ont été reconnus par leur père)44(*). En outre, la filiation vise d'abord à rattacher l'enfant à ses parents. La société admettant la coexistence de plusieurs formes de conjugalité, il devient peu significatif d'articuler l'ensemble du droit de la filiation à partir de l'existence ou non du mariage.

La suppression de ces deux qualifications devrait entraîner une réorganisation du titre VII du livre Ier du code civil, actuellement composé de trois chapitres respectivement consacrés aux dispositions communes aux deux types de filiation, à la filiation légitime et à la filiation naturelle. Les titres VIII et IX du code civil, relatifs à la filiation adoptive et à l'autorité parentale, qui mentionnent ces deux types de filiation, seraient également concernés. De même, les dispositions relatives à la légitimation (art. 329 à 333-6 du code civil) devraient être abrogées. En revanche, conformément aux préconisations de Mme Françoise Dekeuwer-Défossez, la présomption de paternité bénéficiant au mari de la mère (art. 312 du code civil) devrait perdurer45(*).

L'égalisation des droits des enfants et l'abandon des qualifications de filiations naturelle et légitime devraient permettre une simplification et une harmonisation attendues des régimes d'établissement et de contestation de la filiation.

2. L'harmonisation des actions judiciaires relatives à la filiation

La persistance de règles d'établissement et de contestation de la filiation distinctes (tant en matière de délais d'action, de titulaires ou de régimes de preuve) héritées de la faveur ancienne du code civil pour la famille légitime brouille la lisibilité du droit de la filiation et ne se justifie plus compte tenu de l'égalisation des droits des enfants.

L'habilitation donnée par le présent article du projet de loi au Gouvernement a donc pour objet de simplifier et d'harmoniser le régime des actions judiciaires en matière de filiation. L'ordonnance ne devrait cependant pas concerner les dispositions relatives à l'accouchement sous X ni celles relatives à la procréation médicalement assistée.

a) L'établissement judiciaire de la filiation

Actuellement, les modes d'établissement judiciaire de la filiation diffèrent selon qu'il s'agit de la maternité ou de la paternité, et d'une filiation naturelle ou légitime. L'ordonnance devrait instituer une action unifiée.

Les dispositions actuelles concernant la paternité

- En matière de filiation légitime, l'action en rétablissement de la présomption de paternité (art. 313-2 du code civil) est ouverte à chacun des époux s'ils apportent la preuve d'une réunion de fait pendant la période légale de la conception, rendant vraisemblable la paternité du mari. Cette action obéit à la prescription trentenaire lorsqu'elle est exercée par l'un ou les deux époux, tandis que l'enfant doit l'exercer dans les deux ans suivant sa majorité.

- L'action en recherche de paternité naturelle, interdite en 1804, a été facilitée par la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993. Les cas d'ouverture et les fins de non-recevoir ont été supprimés et la preuve est libre, l'ouverture de l'action nécessitant cependant des présomptions graves.

L'action appartient à l'enfant, contre le père prétendu ou ses héritiers, dans les deux ans qui suivent la naissance (ou la cessation du concubinage ou de la contribution à l'entretien de l'enfant), l'action étant exercée par la mère ou le tuteur pendant la minorité de l'enfant (art. 340 à 340-4 du code civil). L'enfant se voit rouvrir un nouveau délai de deux ans après sa majorité.

Le délai de deux ans après la naissance apparaît extrêmement bref. Les raisons invoquées sont le respect de la paix des familles et le risque de dépérissement des preuves, ce que la réouverture du délai à la majorité de l'enfant parait cependant contredire. Le rapport Dekeuwer-Défossez proposait d'ouvrir l'action pendant toute la minorité de l'enfant et dans les cinq ans suivant sa majorité. Notons qu'en cas d'accord du père présumé, il est toujours possible de faire dresser un acte de notoriété constatant la possession d'état.

Dans un souci de simplification, l'ordonnance devrait instaurer un régime commun applicable à ces deux actions. Les actions seraient ouvertes durant la minorité de l'enfant, puis à son seul profit dans les dix années suivant sa majorité, soit un net allongement par rapport à la prescription prévalant actuellement en matière de paternité naturelle. Le régime de la preuve à rapporter serait simplifié.

Les dispositions actuelles concernant la maternité

- En matière de filiation légitime existent deux actions.

L'enfant peut exercer une action en réclamation de sa filiation légitime à l'égard d'une femme mariée lorsqu'il n'en a ni le titre, ni la possession d'état, ou quand il a été déclaré à l'état civil sous de faux noms ou sans indication du nom de la mère, s'il existe des présomptions graves (art. 323 du code civil). Cette action est soumise à la prescription trentenaire.

En outre, les époux qui se prétendent les parents de l'enfant peuvent, séparément ou conjointement, exercer une action en revendication d'enfant légitime (art. 328 du code civil). Cette action, extrêmement rare, suit le régime de la prescription trentenaire, mais suppose de démontrer l'inexactitude de la filiation établie en premier lieu. Il s'agit essentiellement de l'hypothèse d'un enfant naturel déjà reconnu par un tiers. L'article 339, alinéa 3, autorise la contestation de la reconnaissance même si cette dernière est corroborée par une possession d'état depuis plus de 10 ans. Dans le cas d'un enfant légitime, cela suppose que la filiation ne soit pas irréfragablement établie par un acte de naissance et une possession d'état conforme (sous réserve d'une supposition ou d'une substitution d'enfant).

- En matière de filiation naturelle, l'action en recherche de maternité est ouverte à l'enfant contre la mère prétendue s'il existe des présomptions graves. Contrairement à la recherche en paternité naturelle, cette action est soumise à la prescription trentenaire. L'article 341 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-22 du 8 janvier 1993, oppose une fin de non-recevoir dans l'hypothèse d'un accouchement sous X.

Les modifications envisagées

Une action unique devrait se substituer à ces trois actions actuelles et, dans un souci de simplification et de cohérence, obéir au même régime que l'action en établissement de paternité. Ces actions devraient d'ailleurs décliner, l'ordonnance devant prévoir que l'indication du nom de la mère naturelle sur l'acte de naissance suffit à établir la filiation.

b) La contestation du lien de filiation

L'article 4 du présent projet de loi doit également permettre au Gouvernement d'harmoniser les actions en contestation d'un lien de filiation légalement établi, actuellement au nombre d'une dizaine, dont huit pour la contestation de la paternité légitime. Leur réforme est aujourd'hui unanimement souhaitée.

Les dispositions actuelles concernant la paternité

Les actions en contestation de paternité suivent un régime complexe.

 

Actions

Titulaire de l'action

Délai pour agir

Filiation légitime

Action en désaveu
(art. 312 du code civil)

le mari

6 mois à compter de la date de la naissance ou de la découverte

Action en désaveu
par dénégation lorsque l'enfant est né avant le 180e jour du mariage
(art. 314 du code civil)

le mari

6 mois à compter de la naissance ou de la découverte

Action en désaveu en défense
(art. 325 du code civil)

le mari

6 mois à compter du jugement définitif établissant la maternité de la femme mariée

Action en désaveu préventif (art. 326 du code civil)

le mari

6 mois à compter du jour où le mari a connu la naissance

Action en contestation de légitimité
(art. 316-1 du code civil)

les héritiers du mari

6 mois à partir
du jour où l'enfant a reçu sa part ou du jour où il l'a réclamée

Action en contestation de paternité par la mère (art. 318 du code civil)

la mère, à condition
qu'elle se remarie
avec le véritable père

dans les 6 mois du remariage et avant les 7 ans de l'enfant

Action en contestation, lorsque
le titre n'est pas corroboré par la possession d'état
(art. 322 du code civil a contrario)

tout intéressé

30 ans

Action en contestation,
lorsque le titre n'est pas corroboré par la possession d'état
(art. 334-9 du code civil a contrario)

- le père naturel ayant fait une reconnaissance ; 

- l'enfant

30 ans

Filiation naturelle

Action en contestation de reconnaissance (art. 339 du code civil) :

-  lorsque l'enfant n'a pas une possession d'état de dix ans avec l'auteur de la reconnaissance ;

- tout intéressé ;

- le ministère public si
des indices tirés des actes eux-mêmes rendent invraisemblable la filiation déclarée ou lorsque la reconnaissance est effectuée en fraude des règles régissant l'adoption 

30 ans

-  lorsque la reconnaissance est confortée par une possession d'état de dix ans.

- l'enfant ;

- l'autre parent ;

- ceux qui se prétendent
les parents véritables

 

Action en contestation
de possession d'état
(art. 334-8 du code civil)

tout intéressé

30 ans

Les dispositions actuelles concernant la maternité

- En matière de filiation légitime, l'article 322-1 du code civil prévoit une faculté d'action en contestation de maternité légitime en cas de supposition ou de substitution, volontaire ou non, avant ou après la rédaction de l'acte de naissance.

La maternité peut également être contestée sur le fondement de l'article 322 du code civil a contrario dès lors que le titre n'est pas corroboré par la possession d'état et dans les mêmes conditions que pour la paternité.

- La contestation de la filiation naturelle maternelle se fait dans les mêmes conditions que pour la filiation paternelle.

Une complexité unanimement critiquée

- Tout d'abord, les créations jurisprudentielles ont rendu pratiquement inutile ce système complexe.

Si la loi de 1972 a ouvert sous certaines conditions la contestation de paternité à la mère, alors qu'auparavant, seul le mari pouvait renverser la présomption de paternité, sous réserve de conditions strictes, la jurisprudence ultérieure est allée beaucoup plus loin, en permettant à tout intéressé de remettre en cause cette présomption dès lors que l'enfant n'a pas une possession d'état conforme à son titre de naissance d'enfant légitime, grâce à une interprétation a contrario des articles 334-9 et 322, alinéa 2, du code civil46(*).

L'article 334-9 du code civil disposant que « toute reconnaissance est nulle, toute demande en recherche est irrecevable quand l'enfant a une filiation légitime déjà établie par la possession d'état », a contrario, l'enfant ayant un titre d'enfant légitime sans en avoir la possession d'état peut faire l'objet d'une reconnaissance ou exercer une action en recherche de paternité. L'action est soumise à la prescription trentenaire. Elle peut être exercée par tout intéressé et notamment par l'enfant, la mère de l'enfant et le père naturel, le juge tranchant ce conflit en faveur de la filiation la plus vraisemblable.

L'article 322, alinéa 2, prévoit que « nul ne peut contester l'état de celui qui a une possession conforme à son titre de naissance ». Il est possible de contester la paternité légitime en démontrant l'absence de possession d'état conforme au titre d'enfant légitime. L'action est ouverte à tout intéressé dans les trente ans de la naissance de l'enfant. Contrairement à l'hypothèse précédente, cette solution débouche sur un vide de filiation, l'enfant n'étant rattaché à aucun père.

Une telle solution prive les autres actions en contestation de paternité légitime d'une grande partie de leur utilité.

- De plus, comme le soulignait le rapport de Mme Françoise Dekeuwer-Défossez, les délais de contestation, de trente ans à défaut de précision contraire dans la loi (art. 311-7 du code civil), sont considérés comme favorisant une trop grande instabilité. Or ce délai s'applique aux actions en contestation de paternité légitime dégagées par la jurisprudence. En outre, ce délai est suspendu pendant la minorité de l'intéressé.

Par ailleurs, la diversité des délais est également critiquée, une loi particulière pouvant soumettre les actions relatives à la filiation à un délai plus bref, comme c'est le cas notamment de l'action en désaveu de paternité (six mois) ou encore de l'action en recherche de paternité naturelle (deux ans).

- De même, la protection des enfants naturels apparaît moindre.

Alors que l'enfant naturel peut voir sa filiation contestée pendant trente ans, l'enfant légitime ne peut voir sa filiation paternelle contestée au-delà de ses sept ans lorsque son titre est corroboré par la possession d'état. Le père légitime ne peut remettre en cause le lien de filiation que pendant les six mois qui suivent la naissance alors que le père naturel peut le faire durant dix ans si l'enfant a eu une possession d'état conforme au titre. La mère d'un enfant légitime peut remettre en cause la paternité de son mari dans des conditions strictement définies tandis que la mère naturelle peut faire tomber la paternité du père naturel durant la prescription trentenaire de droit commun.

Par ailleurs, dès lors que le titre est conforme à la possession d'état, le sort de la filiation légitime repose presque exclusivement dans les mains du mari et la filiation est difficilement attaquable alors que tel n'est pas le cas pour une filiation naturelle.

- De plus, le champ des titulaires des actions en contestation de filiation apparaît trop vaste, conduisant, ainsi que le relevait Mme Irène Théry, « à une fragilisation indue de la filiation, au surplus pour des motifs souvent pécuniaires (héritage) ».

Se pose notamment le problème des reconnaissances de complaisance effectuées par le compagnon de la mère, lequel décide de contester sa paternité après sa rupture avec celle-ci, ou de mères privant de droits leur ancien compagnon qui avait pourtant élevé l'enfant. Depuis le milieu des années quatre-vingt dix, le nombre de contestations de reconnaissance a fortement cru. Si elles n'ont plus pour l'enfant de conséquences juridiques graves compte tenu de l'égalisation des droits entre enfants légitimes et naturels, les actions en contestation de filiation ont l'inconvénient, comme le relevait le rapport de Mme Françoise Dekeuwer-Défossez, de détruire un lien fondamental. Elles entraînent ainsi un changement du nom de l'enfant, le retrait de l'autorité parentale, la rupture des liens avec l'une des personnes ayant élevé l'enfant.

- Enfin, le droit actuel favorise les conflits de filiation et parfois des vides de filiation.

Lorsque l'enfant a une filiation légitime, le défaut de possession d'état de l'enfant à l'égard du mari doit être établi préalablement à toute action en recherche de paternité naturelle, sous peine d'irrecevabilité.

Au contraire, l'article 334-9 du code civil interprété a contrario permet d'établir une filiation naturelle sans que la filiation légitime établie par un titre non corroboré par la possession d'état ait été victorieusement contestée, pouvant donc provoquer des conflits de paternité47(*).

Le conflit peut également résulter de l'existence d'une possession d'état d'enfant naturel à l'égard de l'auteur de la reconnaissance, qui suffit à établir la filiation naturelle (art. 334-8 du code civil). La possession d'état d'enfant naturel contribue à rendre suspecte ou à invalider la possession d'état d'enfant légitime. Les tribunaux doivent trancher le conflit48(*).

Lorsque l'enfant a une autre filiation naturelle, l'article 338 du code civil prévoit que « tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, une reconnaissance rend irrecevable l'établissement d'une autre filiation naturelle qui la contredirait ».

Les modifications envisagées

L'ordonnance devrait, dans un souci de simplification, substituer aux différentes actions existantes une action générique :

en l'absence de possession d'état corroborant le titre, tout intéressé, y compris l'enfant, pourrait agir pendant dix ans à compter de l'établissement de la filiation (présomption de paternité ou reconnaissance). L'action serait également ouverte à l'enfant dans les dix ans suivant sa majorité ;

- en présence d'une possession d'état conforme au titre, seuls la mère, le père prétendu, l'enfant ou, selon le cas, le mari ou l'auteur de la reconnaissance pourraient agir. Une possession d'état de cinq ans à compter du jour de l'établissement interdirait toute contestation.

Ces mesures s'inspirent des propositions faites par le groupe de travail animé par Mme Françoise Dekeuwer-Défossez. Le délai d'action serait donc ramené de trente à dix ans maximum. Lorsque le titre est corroboré par la possession d'état, le groupe de travail a considéré que « la filiation d'un enfant qui avait été traité comme tel pendant cinq ans devait l'emporter sur la vérité biologique ». S'agissant des titulaires des actions, leur nombre serait limité dès lors que le titre est conforme à la possession d'état, afin d'éviter que tout intéressé puisse intervenir dans un lien de filiation vécu quotidiennement, alors que, dans le cas contraire, tout intéressé pourrait agir.

Enfin, l'objectif de sécurisation du lien de filiation poursuivi par le projet de loi devrait conduire à poser un principe chronologique tendant à priver d'effet une seconde filiation tant que la première n'aura pas valablement été contestée. Ce principe de bon sens, nécessaire pour éviter les conflits de filiation, n'existe actuellement que pour la filiation naturelle.

3. La simplification des modes de preuve de la filiation

L'ordonnance devrait également opérer une simplification des modes de preuve de la filiation, s'agissant de la preuve de la maternité, de la possession d'état et du régime des preuves scientifiques en matière de filiation.

La preuve de la maternité

Actuellement, si l'indication du nom de la femme mariée ayant accouché dans l'acte de naissance de l'enfant suffit à établir la filiation maternelle (art. 319 du code civil), la femme non mariée ayant indiqué son nom dans l'acte de naissance de l'enfant doit également le reconnaître.

Certes, l'article 337 du code civil prévoit que cette indication vaut reconnaissance dès lors qu'elle est corroborée par la possession d'état, mais il ne remédie pas complètement à ce problème en raison du flou entourant la notion de possession d'état.

Cette particularité, qui s'explique historiquement par la volonté de ne pas imposer à une mère une filiation qu'elle ne voudrait pas assumer et de faciliter l'adoption de l'enfant, est ignorée de nombre de femmes, ce qui retarde l'établissement de la filiation maternelle naturelle49(*).

De nombreux pays européens, ainsi que l'article 1er de la convention n° 6 de la commission internationale de l'état civil (CIEC) relative à l'établissement de la filiation maternelle des enfants naturels, signée à Bruxelles le 12 décembre 1962 et l'article 2 de la convention européenne sur le statut juridique des enfants nés hors mariage de 1975 (signée par la France le 2 septembre 1977 mais non ratifiée) se contentent de l'acte de naissance (solution exprimée par l'adage mater semper certa).

Le droit français, en admettant un établissement différent de la filiation maternelle légitime et naturelle, apparaît discriminatoire au regard de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dans l'arrêt Marckx du 13 juin 1979, la Cour européenne des droits de l'homme a ainsi condamné la loi belge similaire, considérant que le refus d'imposer aux mères naturelles un lien de filiation non voulu ne constituait pas une justification objective et raisonnable. De fait actuellement il n'y a aucune raison de supposer que les mères non mariées soient plus portées à vouloir abandonner leur enfant. A la suite de cette décision, une juridiction nationale50(*) a fait une application directe de la convention, considérant que l'indication du nom de la mère dans l'acte de naissance de l'enfant emportait de facto établissement de la filiation maternelle.

L'ordonnance devrait étendre à la filiation maternelle naturelle la solution admise en matière de filiation légitime, conformément à la proposition figurant dans le rapport de Mme Françoise Dekeuwer-Défossez, qui insistait sur la certitude de la maternité, le caractère majoritairement souhaité des enfants nés hors mariage, l'incompréhension des mères célibataires et la sécurité juridique apportée par la précocité de l'établissement du lien de filiation.

Il faut noter que la mère pourra toujours s'opposer à l'indication de son nom dans l'acte de naissance, préservant ainsi sa liberté de voir établi un lien de filiation (art. 57 du code civil relatif à l'état civil). En outre, l'établissement de la filiation n'oblige pas la mère à élever son enfant et l'article 350 permet de rendre adoptables les enfants dont la mère se désintéresse, même si elle ne consent pas à leur adoption.

La possession d'état

L'ordonnance prise en application du présent article devrait également concourir à sécuriser le lien de filiation en encadrant le régime juridique de la possession d'état.

La possession d'état est la filiation vécue ouvertement et quotidiennement : vérité du coeur, vérité sociologique. Elle remplit plusieurs fonctions.

Depuis 1804 pour la filiation légitime51(*) et depuis la loi n° 82-536 du 25 juin 1982 pour la filiation naturelle, la possession d'état peut servir de manière autonome à établir la filiation maternelle ou paternelle (art. 334-8 du code civil). Ceci permet d'atténuer le couperet du délai de deux ans pendant lequel l'action en recherche de paternité naturelle est ouverte.

Par ailleurs, la possession d'état permet également de consolider une filiation déjà établie. Ainsi, la filiation légitime ne peut être contestée s'il y a concordance entre l'acte de naissance et la possession d'état (art. 322 du code civil). Cette concordance rend aussi impossible toute reconnaissance ou toute demande de recherche de filiation (art. 334-9 du code civil). En matière de filiation naturelle, l'article 339, alinéa 3, du code civil précise qu'une possession d'état conforme à la reconnaissance d'au moins dix ans limite l'exercice de la contestation à l'autre parent, à l'enfant lui-même et à ceux qui se prétendent les parents véritables.

Son régime est précisé par les articles 311-1 à 311-3 du code civil. L'article 311-1 du code civil affirme que « la possession d'état s'établit par une réunion suffisante de faits qui indiquent le rapport de filiation et de parenté entre un individu et la famille à laquelle il est dit appartenir ». Les principaux faits qui constituent la possession d'état sont précisés de façon non limitative : le nom, le fait d'avoir traité un enfant comme le sien et d'être considéré par celui-ci comme ses parents52(*), la réputation. La réunion de tous ces éléments n'est pas nécessaire, non plus que chacun des faits, pris isolément, ait existé pendant toute la durée de la période considérée. La possession d'état doit être continue et ne doit être ni viciée ni équivoque53(*).

Or, ainsi que le soulignait le rapport d'Irène Théry, la possession d'état est « un lien précaire et fragile. En effet, la possession d'état a changé avec le temps et l'évolution des moeurs : la continuité n'implique plus qu'elle soit originelle et ininterrompue, et elle est souvent séquentielle, précaire. Dès lors, ce mode d'établissement extrajudiciaire de la filiation soulève un certain nombre de difficultés : incertitude quant à la date d'établissement, quant à la possession d'état à prendre en compte (celle d'origine ou celle de la réalité du moment) lorsqu'il existe plusieurs possessions d'état successives. En outre, elle rend possible l'établissement d'une seconde filiation à l'égard d'un enfant déjà doté d'une filiation, créant un conflit entre vérité biologique et vérité affective ».

La preuve de la possession d'état est libre. Néanmoins, la loi de 1972 a prévu un mode de preuve simplifié, l'acte de notoriété délivré par le juge des tutelles à la suite de trois témoignages, qui peut être contesté (art. 311-3 du code civil).

Si le rapport de Mme Irène Théry proposait de reconnaître la seule possession originaire et soulignait la grande difficulté tenant à l'établissement d'une filiation par la possession d'état à l'égard d'un enfant déjà doté d'une filiation, l'ordonnance ne devrait reprendre que sa proposition d'encadrer plus strictement les actes de notoriété afin de limiter la précarité de la filiation. La possession d'état devrait être établie par un acte de notoriété délivré dans des délais précis et adaptés. Par souci d'efficacité et de simplification, cette délivrance devrait être confiée au juge aux affaires familiales, et non plus au juge des tutelles.

L'unification du régime des preuves scientifiques dans le contentieux de la filiation

L'ordonnance prévue devrait également harmoniser les preuves scientifiques, essentielles pour établir ou contester un lien de filiation. Les régimes de l'expertise génétique et celui de l'examen des sangs, actuellement différents, seront unifiés.

Les conditions d'identification d'une personne par ses empreintes génétiques sont précisées à l'article 16-11 du code civil. Cette identification ne peut être recherchée qu'en exécution d'une mesure d'instruction ordonnée par le juge saisi d'une action tendant soit à l'établissement ou la contestation d'un lien de filiation, soit à l'obtention ou la suppression de subsides. Le consentement de l'intéressé doit être préalablement et expressément recueilli.

Le rapport de Mme Irène Théry appelait un encadrement plus strict et plus cohérent des expertises biologiques (tant sanguines que génétiques), en particulier des expertises post mortem, estimant choquant que la loi permette à un homme de refuser une expertise tout en donnant la possibilité de l'imposer à son cadavre. La loi n°2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique prévoit désormais que dans le cadre d'une procédure judiciaire civile, l'identification post mortem n'est possible que lorsque l'intéressé a donné un accord exprès de son vivant.

En revanche, les examens sanguins ne sont soumis à aucun régime similaire et ne sont pas expressément limités aux actions relatives à la filiation.

L'ordonnance devrait unifier le régime des preuves scientifiques en ce qui concerne le consentement, la compétence du juge ou la limitation de ces expertises aux actions judiciaires relatives à la filiation.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des Lois, et avec l'avis favorable du Gouvernement, adopté un amendement rédactionnel.

Le principe même d'une réforme de cette importance du code civil par la voie de l'ordonnance est inédit, d'autant plus que la force symbolique de la loi en cette matière est patente.

Certes, votre rapporteur a pris acte des engagements souscrits lors de la discussion à l'Assemblée nationale par M. Eric Woerth, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Celui-ci a indiqué, d'une part, que l'élaboration de l'ordonnance ferait l'objet d'une concertation approfondie associant les commissions des Lois des deux assemblées et, d'autre part, que l'ordonnance relative à la filiation ferait l'objet d'un projet de loi de ratification particulier, qui donnerait lieu à un nouveau débat.

Néanmoins, votre commission des Lois estime indispensable un débat sur l'opportunité de réformer par ordonnance le droit de la famille et le code civil, s'agissant d'une prérogative essentielle du Parlement. Elle souhaite également recevoir des informations complémentaires de la part du Gouvernement, les termes de l'habilitation paraissant particulièrement larges et imprécis.

Par conséquent, votre commission des Lois vous propose de supprimer l'article 4.

Article 5
Simplification des règles de fonctionnement
des tribunaux du contentieux de l'incapacité

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à simplifier les règles de fonctionnement des tribunaux du contentieux de l'incapacité et de les harmoniser avec les dispositions régissant d'autres tribunaux compétents en matière de sécurité sociale.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels présentés par sa commission des Lois et avec l'avis favorable du gouvernement.

Le délai d'habilitation pour cet article est fixé à 6 mois à compter de la publication de la loi d'habilitation.

I. L'état du droit

L'organisation du contentieux technique de la sécurité sociale est prévue à l'article L. 143-1 du code de la sécurité sociale.

En vertu de cet article et de l'article L. 143-2 du même code, les tribunaux du contentieux de l'incapacité sont chargés de régler les contestations relatives :

- à l'état ou au degré d'invalidité, en cas d'accident ou de maladie non régie par le livre IV du code de sécurité sociale et à l'état d'inaptitude au travail ;

- à l'état d'incapacité permanente de travail et notamment au taux de cette incapacité, en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;

- à l'état d'incapacité de travail pour l'application des dispositions du livre VII du code rural autres que celles relevant soit du contentieux général de la sécurité sociale, soit des juridictions de droit commun en vertu des articles 1169, 1234-17 et 1234-25 du code rural.

Régis par les articles L. 143-2 à L. 143-2-2 et R. 143-1 à R. 143-14, les tribunaux du contentieux de l'incapacité sont composés de cinq membres : un président, magistrat honoraire de l'ordre administratif ou judiciaire, deux assesseurs représentant les travailleurs salariés et deux assesseurs représentant les employeurs ou travailleurs indépendants.

Le président et le président suppléant sont désignés pour trois ans renouvelables par arrêté du Garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur une liste de quatre noms dressée par le premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle le tribunal a son siège.

Dans le cas où le président ne pourrait être un magistrat honoraire, la présidence est assurée par une personnalité qui présente les garanties d'indépendance et d'impartialité requises et qualifié pour l'exercice de ces fonctions compte tenu de sa compétence et de son expérience dans les domaines juridiques.

Les assesseurs titulaires et suppléants doivent être de nationalité française et âgés de vingt-trois ans au moins. Ils doivent également avoir la capacité d'être juré de cour d'assises et n'avoir fait l'objet d'aucune condamnation prévue et réprimée par le code de la sécurité sociale. Ils sont désignés par le premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle le tribunal a son siège sur des listes dressées par le chef du service régional de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricoles ou par le directeur régional des affaires sanitaires et sociales, sur proposition des organisations professionnelles les plus représentatives intéressées.

Il est possible de faire appel des jugements des tribunaux du contentieux de l'incapacité devant la cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail.

II. L'habilitation proposée par le projet de loi

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à simplifier les règles de fonctionnement des tribunaux du contentieux de l'incapacité et à les harmoniser avec celles établies pour les autres tribunaux compétents en matière de sécurité sociale, en particulier les tribunaux des affaires de sécurité sociale.

D'après l'exposé des motifs du présent projet de loi, il s'agirait notamment de permettre au président du tribunal de statuer seul, sous certaines conditions. En effet, contrairement à ce qui est prévu pour les tribunaux des affaires de sécurité sociale, les présidents des tribunaux du contentieux de l'incapacité ne disposent actuellement pas de cette possibilité.

Le fait que le président puisse juger seul permettrait de statuer plus rapidement sur les dossiers soumis à ces tribunaux.

L'ordonnance prise en vertu de la présente habilitation prévoirait par conséquent que, comme pour les tribunaux des affaires de sécurité sociale54(*), le président de la formation de jugement du tribunal puisse statuer seul soit, lors de la première audience lorsque plusieurs assesseurs manquent et avec l'accord des parties, soit lors de la seconde audience si la formation de jugement n'est de nouveau pas au complet et sans que l'accord des parties soit nécessaire.

En vertu de cette habilitation, il serait également prévu de déroger pour les contentieux présentés devant les tribunaux du contentieux de l'incapacité au principe posé par l'article 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant création de la nouvelle profession d'avocat selon lequel les parties peuvent uniquement être assistées ou représentées par un avocat ou un avoué.

L'ordonnance prévoirait ainsi que les requérants pourraient désormais se faire assister ou représenter par leur conjoint ou un ascendant ou descendant en ligne directe, un avocat, un administrateur ou un employé de l'organisme partie à l'instance ou un employé d'un autre organisme de sécurité sociale, un délégué des associations de mutilés et invalides du travail les plus représentatives ou, suivant le cas, un travailleur salarié, un employeur ou travailleur indépendant exerçant la même profession ou un représentant qualifié des organisations syndicales de salariés ou d'employeurs.

Il s'agirait ainsi de prévoir que les tribunaux du contentieux de l'incapacité disposent des mêmes règles d'assistance et de représentation que celles actuellement prévues pour les tribunaux des affaires de sécurité sociale à l'article R. 142-20 du code de sécurité sociale.

Si cette évolution est compréhensible, votre rapporteur insiste sur la nécessité de limiter par une liste exhaustive les personnes susceptibles d'assister ou de représenter les requérants. D'après les informations recueillies par votre rapporteur, une telle liste devrait être établie dans le décret d'application de l'ordonnance.

Une intervention législative est indispensable pour permettre cela, dans la mesure où l'arrêt du Conseil d'Etat n° 205136 du 6 avril 2001 pose le principe selon lequel seul le législateur est compétent pour prendre une disposition portant atteinte à l'obligation de représentation par avocat des parties à un litige établie par la loi précitée du 31 décembre 1971.

Enfin, l'ordonnance pourrait également être amenée à harmoniser le statut des assesseurs des tribunaux du contentieux de l'incapacité et des tribunaux des affaires de sécurité sociale. Ainsi, les règles établies pour les assesseurs des tribunaux du contentieux de l'incapacité seraient étendues aux assesseurs des tribunaux des affaires de sécurité sociale en modifiant les articles L. 142-5 et L. 142-6 du code de la sécurité sociale.

Votre commission estime très souhaitable les évolutions proposées par l'habilitation. Il s'agit de faciliter le fonctionnement de ces tribunaux et de raccourcir les délais d'examen des contentieux qui leur sont soumis.

Elle vous propose un amendement tendant à préciser le champ de l'habilitation afin de permettre au Gouvernement :

- de simplifier les règles de fonctionnement de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;

- de modifier, pour l'harmonisation du statut des assesseurs, non seulement les dispositions applicables aux tribunaux du contentieux de l'incapacité mais aussi celles applicables aux tribunaux des affaires de sécurité sociale.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié.

Article 6
Modification des règles de l'aide juridictionnelle

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance les règles de l'aide juridictionnelle afin d'en simplifier les conditions d'attribution et les effets.

Le Gouvernement serait ainsi autorisé à modifier la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'ordonnance n° 92-1143 du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle à Mayotte et l'ordonnance n° 92-1147 du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle en matière pénale dans les territoires d'outre-mer.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

L'ordonnance devrait être prise dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi.

I. L'aide juridictionnelle en cours de réforme : le constat d'un droit inadapté

L'aide juridictionnelle est régie par la loi précitée du 10 juillet 1991 fixant le régime de droit commun. Les deux ordonnances du 12 octobre 1992 étendent et adaptent ces règles pour l'outre-mer.

En vertu de l'article 2 de la loi précitée du 10 juillet 1991, l'aide juridictionnelle peut être accordée aux personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice.

Cette aide peut être totale ou partielle. A titre exceptionnel, les personnes morales ayant leur siège social en France peuvent également en bénéficier.

Comme l'indique l'avis budgétaire de notre excellent collègue Christian Cointat relatif aux crédits consacrés aux services généraux de la justice par la loi de finances pour 200355(*), après une légère baisse entre 1997 et 2002, le nombre d'admissions au bénéfice de l'aide juridictionnelle a connu une hausse en 2002 avec 688.637 demandes acceptées. Il explique que l'entrée en vigueur de nouvelles réformes étendant le champ des bénéficiaires de l'aide juridictionnelle ainsi que la revalorisation annuelle des plafonds de ressources expliquent en grande partie cette situation.

Il est apparu nécessaire depuis maintenant plusieurs années, de modifier la législation relative à l'aide juridictionnelle. Ses faiblesses et ses dysfonctionnements ont notamment été mis en évidence par le rapport publié en mai 2001 par la commission de réforme de l'accès au droit et à la justice, présidée par M. Paul Bouchet et chargée de préconiser des éléments de réforme.

Par la suite, un projet de loi relatif à l'accès au droit et à la justice présenté par Mme Marylise Lebranchu, garde des Sceaux, ministre de la justice sous le gouvernement de M. Lionel Jospin avait été déposé le 20 février 2002 sur le bureau du Sénat mais n'a jamais été examiné. Il proposait notamment une réforme complète du régime de l'aide juridictionnelle.

Améliorer l'accès des citoyens au droit et à la justice constitue également une priorité pour l'actuel gouvernement. Cet objectif constitue en effet le quatrième axe de réforme avancé par l'annexe de la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, dans laquelle est notamment prévu :

- la recherche d'une amélioration du dispositif d'aide juridictionnelle, en prenant à la fois en considération « les seuils d'admission et la rémunération des auxiliaires de justice intervenant en matière d'aide juridictionnelle ».

- le bénéfice de droit, dans le plan d'aide aux victimes, de l'aide juridictionnelle, sans condition de ressources, aux victimes des atteintes les plus graves à la personne ou à leurs ayants droit (personnes grièvement blessées et psychologiquement fragilisées ou venant de « perdre un proche dans des circonstances dramatiques à la suite des infractions criminelles les plus graves telles que le meurtre, les violences et viols aggravés »).

D'autres mesures ont également été prises ces dernières années par le gouvernement pour soutenir l'aide juridictionnelle.

Ainsi, la rétribution des avocats paraissant largement insuffisante, le gouvernement a, d'une part, pris le décret n° 2003-853 du 5 septembre 2003 qui a augmenté le barème de 15 procédures judiciaires et, d'autre part, majoré de 2 % le montant de l'unité de valeur constituant la base de calcul de la rémunération des avocats, passant de 20,43 à 20,84 euros.

Le gouvernement a également adopté une circulaire du 6 juin 2003 tendant à simplifier et harmoniser les modalités de prise en compte des ressources des demandeurs par les différents bureaux de l'aide juridictionnelle. Elle exclut ainsi du calcul des ressources l'hébergement à titre gratuit et les ressources des parents pour les mineurs.

L'aide personnalisée au logement et l'allocation de logement sociale ne sont également plus pris en compte dans l'appréciation des ressources des demandeurs de l'aide juridictionnelle du fait de la loi de finances pour 2004 du 30 décembre 2003.

II. Le projet de loi : une habilitation à simplifier les conditions d'attribution et les effets de l'aide juridictionnelle

En vertu du présent article, le gouvernement devrait être habilité à prendre par ordonnance, des mesures permettant de simplifier l'aide juridictionnelle, tant quant à ses conditions d'attribution encore complexes qu'à ses effets.

Comme l'indique l'exposé des motifs, cinq directions sont envisagées par le gouvernement :

- la substitution de la notion de revenu fiscal de référence ou de revenu déclaré, à celle de ressources ;

- la réforme des voies de recours contre les décisions prises par les bureaux de l'aide juridictionnelle ;

- l'harmonisation des conditions d'attribution de l'aide juridictionnelle aux mineurs délinquants ;

- la simplification de la procédure de renonciation par l'avocat à la perception de la rétribution de sa mission au titre de l'aide juridictionnelle ;

- l'adaptation aux territoires d'outre-mer et à Mayotte des règles relatives à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue, en matière de médiation pénale et de composition pénale ainsi que pour l'assistance aux détenus au cours de procédures disciplinaires.

Ø Substitution de la notion de revenu fiscal de référence ou de revenu déclaré à celle de ressources pour l'attribution de l'aide juridictionnelle

Actuellement, en vertu de l'article 4 de la loi précitée du 10 juillet 1991, les ressources mensuelles du demandeur sont prises en compte pour l'attribution de l'aide juridictionnelle.

PLAFOND DES RESSOURCES POUR L'OBTENTION DE L'AIDE JURIDICTIONNELLE

 

CONDITIONS DE RESSOURCES

taux
de l'aide juridic-tionnelle

pour
un demandeur sans personne
à charge (*)

pour un demandeur ayant

1 personne
à charge (*)

2 personnes
à charge (*)

3 personnes
à charge (*)

4 personnes
à charge (*)

5 personnes
à charge (*)

6 personnes
à charge (**)

le montant actuel des ressources du foyer doit être inférieur à

100%

630 €

979 €

1 128 € €

1 222 €

1 316 €

1 410 €

1 504 €

 

le montant actuel des ressources mensuelles du foyer doit être compris entre

85 %

831 € à 869 €

980 € à 1 017 €

1 129 € à 1 166 €

1 223 € à 1 260 €

1 317 € à 1 354 €

1 411 € à 1 448 €

1 505 € à 1 542 €

70 %

869 € à 915 €

1 018 € à 1 064 €

1 167 € à 1 213 €

1 281 € à 1 307 €

1 355 € à 1 401 €

1 449 € à 1 495 €

1 543 € à 1 589 €

55 %

916 € à 981 €

1 085 € à 1 130 €

1 214 € à 1 279 €

1 308 € à 1 373 €

1 402 € à 1 467 €

1 495 € à 1 561 €

1 590 € à 1 655 €

40 %

982 € à 1 056 €

1 131 € à 1 205 €

1 280 € à 1 354 €

1 374 € à 1 449 €

1 468 € à 1 542 €

1 562 € à 1 636 €

1 656 € à 1 730 €

25 %

1 057 € à 1 151 €

1 206 € à 1 300 €

1 355 € à 1 449 €

1 449 € à 1 543 €

1 543 € à 1 637 €

1 637 € à 1 731 €

1 731 € à 1 825 €

16 %

1 152 € à 1 244 €

1 301 € à 1 393€

1 450 € à 1 542 €

1 544 € à 1 636 €

1 638 € à 1 730 €

1 732 € à 1 824 €

1 825 € à 1 918 €

Source : ministère de la Justice

(*) personnes à charge ou assimilées aux personnes à charge au sens de l'article 4 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991.

(**) au-delà de six personnes à charge, les plafonds de ressources prévus dans cette colonne sont majorés de 94 € par personne supplémentaire.

montant des correctifs pour charges de famille pour 2004 : 149 € pour les deux premières personnes ; 94 € pour les suivantes.

Les bureaux de l'aide juridictionnelle ont parfois beaucoup de difficultés pour calculer ces ressources mensuelles, les décisions se trouvant dès lors retardées.

De plus, la complexité de la législation engendre des disparités entre les différents bureaux de l'aide juridictionnelle pour l'appréciation des ressources devant être prises en compte et des justificatifs devant être fournis par les demandeurs.

En vertu de l'article 5 de la loi précitée du 10 juillet 1991, « sont prises en compte les ressources de toute nature dont le demandeur a directement ou indirectement la jouissance ou la libre disposition. Il est tenu compte des éléments extérieurs du train de vie. Sont exclues de l'appréciation des ressources les prestations familiales ainsi que certaines prestations sociales à objet spécialisé selon les modalités prévues par décret en Conseil d'Etat. » Le même article précise qu'il est également tenu compte de l'existence de biens meubles ou immeubles même non productifs, à l'exclusion de ceux qui ne pourraient être vendus ou donnés en gage sans entraîner un trouble grave pour l'intéressé, ainsi que des ressources du conjoint du demandeur et des personnes vivant habituellement dans son foyer, sauf si la procédure oppose entre eux ces différentes personnes ou s'il existe entre eux une divergence d'intérêt à l'égard du litige rendant nécessaire une appréciation distincte des ressources.

Même si le gouvernement est intervenu pour clarifier les règles de détermination des ressources des demandeurs, il appert que le travail des bureaux de l'aide juridictionnelle demeure complexe et que les pratiques ne sont pas homogènes.

Tenant compte de ce constat, le gouvernement souhaiterait, par cet article du projet de loi, être habilité à modifier la loi du 10 juillet 1991 afin de substituer la notion de revenu fiscal de référence ou de revenu déclaré pour l'attribution de l'aide juridictionnelle.

Il s'agit là d'une mesure essentielle de simplification dans la mesure où il serait dès lors beaucoup plus facile, à la fois pour les demandeurs de justifier de leur revenu fiscal que de leurs ressources mensuelles, et pour les bureaux de l'aide juridictionnelle de déterminer si les demandeurs dépassent ou non les plafonds pour bénéficier de l'aide juridictionnelle totale ou partielle.

En vertu de cette habilitation, les articles 4 et 5 précités de la loi du 10 juillet 1991 devraient être modifiés.

Ø La réforme des voies de recours contre les décisions prises par les bureaux de l'aide juridictionnelle

Les demandeurs de l'aide juridictionnelle ne disposent actuellement d'aucune voie de recours contre une décision de refus du bureau de l'aide juridictionnelle lorsqu'elle est motivée par le fait que le demandeur ne satisfait pas à la condition de ressources.

En effet, seules peuvent faire l'objet d'un recours les décisions ayant été refusées du fait que le demandeur ne remplirait pas la condition d'attribution en vertu de laquelle son action n'apparaîtrait pas manifestement irrecevable ou dénuée de fondement. Dans ce cas, sont compétents pour statuer, selon le cas, le président du tribunal de grande instance, le premier président de la cour d'appel ou de la cour de cassation, le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel, le président de section du contentieux du Conseil d'Etat, le vice-président du tribunal des conflits, le président de la commission de recours des réfugiés ou leur délégué.

Lorsque le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé au demandeur pour des motifs liés au montant de ses ressources, l'article 23 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit que l'intéressé peut uniquement demander une nouvelle délibération du bureau ayant rejeté sa demande.

D'après les informations fournies à votre rapporteur par le ministère, cette absence de voies de recours serait tellement contestée qu'en pratique de nombreux présidents de juridictions statueraient tout de même lorsque le demandeur conteste une décision de refus du bureau de l'aide juridictionnelle fondée sur le montant de ses ressources.

Il semble par conséquent nécessaire que soit instaurée une véritable voie de recours contre ces décisions de refus. L'ordonnance issue de cette habilitation devrait permettre d'unifier les voies de recours en déférant les décisions des bureaux de l'aide juridictionnelle, soit devant le président de la juridiction concernée, soit devant un magistrat de la cour d'appel.

Ø L'harmonisation des conditions d'attribution de l'aide juridictionnelle aux mineurs délinquants

L'habilitation prévue au présent article du projet de loi devrait également permettre de conférer une valeur législative à la disposition précitée de la circulaire du 6 juin 2003 qui incite les bureaux de l'aide juridictionnelle, en ayant une appréciation souple de la situation, à ne plus nécessairement prendre en compte les ressources des parents pour le calcul des ressources d'un délinquant mineur lorsque, soit la procédure oppose le mineur à ses parents, soit une divergence d'intérêt apparaît entre eux, rendant nécessaire une appréciation distincte des ressources.

Comme l'explique la circulaire, il arrive en pratique que les parents ne demandent pas l'aide juridictionnelle, qu'ils ne fournissent pas les justificatifs nécessaires pour l'obtenir ou qu'ils refusent de payer les honoraires de l'avocat lorsque leurs ressources dépassent le plafond de l'aide juridictionnelle.

Il convient par conséquent d'offrir à ces enfants la possibilité de bénéficier de l'aide juridictionnelle, quelles que soient les ressources de leurs parents, en donnant valeur législative à cette disposition issue de la circulaire précitée. La modification en ce sens de l'article 5 de la loi du 10 juillet 1991 permettrait en outre de mettre cette loi en conformité avec la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 et les exigences de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Ø La simplification de la procédure de renonciation par l'avocat à la perception de la rétribution de sa mission au titre de l'aide juridictionnelle

Il existe deux hypothèses dans lesquelles la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut être amenée à devoir payer la rétribution de l'avocat de la partie adverse :

- en vertu de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, les avocats « peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. » A l'expiration d'un délai de six mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l'avocat du bénéficiaire de l'aide qui n'a pas demandé le versement de la part contributive de l'Etat est réputé avoir renoncé à sa rétribution ;

- l'article 43 de la loi du 10 juillet 1991 prévoit que l'Etat peut également être remboursé d'office par la partie perdante ou condamnée aux dépens, sauf si cette dernière est dispensée de ce remboursement par le juge « pour des considérations tirées de l'équité ou de sa situation économique ». Le remboursement concerne alors les dépens ainsi que la rétribution des avocats.

Ces procédures ne peuvent être utilisées en matière pénale que si le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle est la partie civile.

Lorsqu'en vertu de l'article 37 précité de la loi du 10 juillet 1991, l'avocat décide de renoncer à la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle et de se faire rétribuer par la partie adverse disposant de ressources suffisantes, s'applique alors la procédure de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, selon lequel « le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. »

Toutefois, cette procédure de renonciation par l'avocat est en pratique très rarement employée. En effet, comme l'a constaté la commission de réforme de l'accès au droit et à la justice précitée, le mécanisme de la loi du 10 juillet 1991 « est peu utilisé par les avocats, pour trois raisons principales : une méconnaissance du dispositif, une application parcimonieuse par le juge, qui octroie souvent des sommes trop faibles et une crainte des avocats de ne pas parvenir à recouvrer la somme allouée par le juge, ce qui les conduit à préférer le paiement par l'aide juridictionnelle. »

L'habilitation devrait permettre au gouvernement de modifier par ordonnances les règles encadrant cette procédure afin que les avocats soient incités à y avoir davantage recours.

Ceci aurait non seulement pour avantage de clarifier ces dispositions jusqu'à présent peu connues et employées, mais également d'offrir à l'Etat une économie budgétaire non négligeable au moment même où, comme votre commission l'a déjà indiqué, le nombre de bénéficiaires de l'aide juridictionnelle tend à augmenter.

Ø L'adaptation aux territoires d'outre-mer et à Mayotte des règles relatives à l'aide juridictionnelle et à l'aide à l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue, en matière de médiation pénale et de composition pénale ainsi que pour l'assistance aux détenus au cours de procédures disciplinaires

La présente habilitation vise enfin à modifier les ordonnances précitées du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle à Mayotte et du 12 octobre 1992 relative à l'aide juridictionnelle en matière pénale dans les territoires d'outre-mer, lesquels étendent et adaptent les règles applicables en matière d'aide juridictionnelle aux collectivités d'outre-mer.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, il s'agirait de moderniser le droit relatif à l'aide juridictionnelle en outre-mer.

D'un point de vue procédural, une rétribution des avocats au titre de l'aide juridictionnelle devrait notamment être instaurée pour toutes les matières relevant de la compétence de l'Etat. Cette disposition concernerait la Polynésie française. En effet, l'article 14 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2002 portant statut d'autonomie de la Polynésie française a précisé, conformément à l'avis du Conseil d'Etat n° 363-242 du 27 mai 1999, que l'aide juridictionnelle relevait des compétences de l'Etat.

De plus, l'ordonnance devrait prévoir l'adaptation à l'outre-mer des dispositions relatives à la médiation et la composition pénales prévues par la troisième partie de la loi précitée du 10 juillet 1991.

Votre commission pense qu'il est indispensable que le champ de l'habilitation de cet article soit quelque peu étendu afin de l'adapter aux différentes mesures de simplifications souhaitées par le Gouvernement.

En effet, la rédaction actuelle ne permet ni de modifier les procédures d'admission à l'aide juridictionnelle ni d'adapter à Mayotte, à la Polynésie française et aux Iles Wallis-et-Futuna les règles relatives à la médiation et à la composition pénale.

Votre commission vous soumet par conséquent un amendement de réécriture de cet article qui prévoit également la modification directe du titre de l'ordonnance précitée du 12 octobre 1992 pour remplacer les mots « territoires d'outre-mer » par « la Polynésie française et les Iles Wallis-et-Futuna » afin de tenir compte de la révision constitutionnelle du 28 mars 200356(*).

L'ensemble de ces mesures de simplification et d'amélioration de la législation relative à l'aide juridictionnelle semble bienvenu. Toutefois, votre commission estime que si les diverses mesures prises par le Gouvernement depuis plusieurs années dans ce domaine, y compris celles prévues par le projet de loi, sont utiles, elles ne sauraient remplacer une véritable réforme de l'aide juridictionnelle, nécessaire tant pour les avocats que pour les bénéficiaires de cette aide.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 ainsi modifié.

Article 7
Amélioration du régime de protection du patrimoine culturel

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à améliorer le régime juridique de protection du patrimoine culturel en :

- rendant plus cohérentes les diverses dispositions relatives aux monuments historiques, aux secteurs sauvegardés et aux zones de protection du patrimoine architectural (1° du I) ;

- déconcentrant plusieurs autorisations en matière de travaux et d'urbanisme (2° du I) ;

- étendant les compétences des collectivités territoriales dans la création de zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager et pour l'approbation des plans de sauvegarde et de mise en valeur des secteurs sauvegardés (3° du I) ;

- précisant les droits et obligations des propriétaires de monuments protégés pour l'exécution de travaux sur ces monuments (4° du I) ;

- modifiant la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée afin d'exclure de l'application de cette loi toutes les « opérations d'entretien, de réparation ou de restauration effectuées sur des immeubles classés. » (II) ;

- complétant l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme pour prévoir la possibilité de déroger aux règles fixées par les plans locaux d'urbanisme dans le cadre de travaux de restauration ou de reconstruction de monuments historiques et tenir compte des contraintes architecturales propres à ces immeubles (III).

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires culturelles57(*).

Article 8
Diverses mesures de simplification relatives au droit funéraire,
à la législation applicables aux associations, au pouvoir de substitution
du préfet en Alsace-Moselle, aux règles encadrant l'exercice de certaines professions réglementées, au régime de protection des mineurs accueillis hors du domicile parental et à la prestation de serment des contrôleurs chargés de surveiller l'application des congés payés

Cet article tend, d'une part, à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance une série de dispositions concernant aussi bien la législation applicable aux cimetières, aux opérations funéraires et à la police des funérailles que le régime juridique des associations, fondations et congrégations, le régime applicable aux compétences de police administrative des maires dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, les procédures relatives à l'exercice des professions réglementées de courtier en vins et de commerçant ambulant et le régime de protection des mineurs accueillis hors du domicile parental et, d'autre part, à proposer l'abrogation directe du dernier alinéa de l'article L. 223-17 du code du travail prévoyant la nécessité pour les contrôleurs chargés de surveiller l'application des congés payés par les employeurs de prêter serment, avant leur entrée de fonction, de ne rien révéler des secrets de fabrication et des procédés et résultats d'exploitation dont ils pourraient prendre connaissance dans l'exercice de leurs fonctions.

Les ordonnances devraient être prises dans un délai de 9 mois à compter de la publication de la présente loi.

I. Les mesures de simplification prévues par ordonnances

a) Aménagement de la législation applicable aux cimetières, aux opérations funéraires et à la police des funérailles

Le I-1° du présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures d'aménagement du régime juridique relatif aux cimetières, aux opérations funéraires et à la police des funérailles.

Il convient de rappeler que jusqu'en 1993, les pompes funèbres étaient détentrices d'un monopole pour toutes les opérations funéraires.

La loi n° 93-23 du 8 janvier 1993 est revenue sur ce monopole en prévoyant que le service extérieur des pompes funèbres pouvait être assuré par les communes, directement ou par voie de gestion déléguée (article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales). Les régies, entreprises ou associations participant à l'exercice de cette mission de service public doivent être habilitées à cet effet (article L. 2223-23 du code général des collectivités territoriales). En revanche, la gestion et l'entretien des cimetières demeurent de la seule compétence des communes.

S'agissant des opérations funéraires, les mesures prévues devraient, d'après l'exposé des motifs, permettre de faciliter les démarches des familles des défunts en simplifiant les procédures administratives car actuellement, « la procédure aboutissant à l'inhumation se caractérise par un grand nombre d'autorisations qui doivent être sollicitées auprès du maire, ce qui allonge les délais et complique les démarches des familles. Ces contraintes pénalisent les opérateurs funéraires dans leur travail et peuvent être préjudiciables au travail de deuil des familles ».

De nombreuses démarches administratives sont actuellement nécessaires en vertu de la législation sur les opérations funéraires. Ainsi, le rapport « Décès massifs » remis le 12 mars 2004 aux ministres de l'Intérieur et de la Santé par le Professeur Dominique Lecomte, directeur de l'Institut médico-légal de Paris et présidente du groupe de travail, constate que « les dispositions législatives et réglementaires actuelles imposent un grand nombre d'autorisations administratives et de vacations de police [...] La valeur ajoutée de certaines formalités n'est pas évidente. Elles sont souvent sources de retards, et peuvent même être ingérables en cas de crises ». La multiplication des actes administratifs nécessaires est illustrée dans le tableau issu de ce rapport, ci-après reproduit.

RECAPITULATIF DES PROCEDURES D'AUTORISATION

OPERATIONS

INTERVENANTS

 

Situation normale

Problème médico-légal

 

PARIS

Hors PARIS

Contraintes, délais

 
 

Certificat de décès

Tout médecin, ou médecin désigné par l'Officier d'Etat civil

Dans les meilleurs délais

Médecin requis par l'officier de police judiciaire (OPJ),
(y compris pour les décès
sur la voie publique)

Acte de décès

Officier d'Etat civil de la mairie d'arrondissement (lieu de décès)

Officier d'Etat de la mairie du lieu de décès

24h au maximum après le décès

Officier d'Etat de la mairie du lieu de décès après procés verbal de l'OPJ

Fermeture de cercueil

Maire d'arrondissement du lieu de décès

ou maire de Paris

Maire du lieu de décès

Sur présentation préalable du certificat médical de décès

Maire, au vu du permis d'inhumer délivré par le Parquet

Soins de conservation *

Préfet de police

Maire du lieu de dépôt initial

Exclusivement par des thanatopracteurs.

Contre indiqués si maladies contagieuses

(arrêté du 20 juillet 1998/arrêté du 17 novembre 1986 du ministère de la santé)

Interdits en cas de problèmes médico légaux

Moulage *

Préfet de police

maire du lieu de décès

-Après un délai de 24 heures sauf dérogation

-

Transport avant mise en bière

Vers le domicile du défunt ou d'un proche*

Préfet de police

Maire du lieu de dépôt

Dans les 24h après le décès ou 48h si soins de conservation.

Procureur de la république

Vers un funérarium *

Préfet de police

Maire du lieu de dépôt

Dans les 24h après le décès ou 48h si soins de conservation.

Après 10 h, en cas de décès en établissement et impossibilité de trouver la famille du défunt.

Vers un établissement

- pour don du corps

- pour prélèvement (recherche cause mort)

Préfet de police

Maire du lieu de dépôt

- don du corps : volonté du défunt+ avis médecin.

- pour prélèvements : en cas de maladie suspecte : préfet+avis de deux médecins.

d'un établissement vers la chambre mortuaire d'un autre établissement

Chef de service de l'établissement d'origine

Chef de service de l'établissement d'origine

-

OPERATIONS

INTERVENANTS

 

Situation normale

Problème médico-légal

 

PARIS

Hors PARIS

Contraintes, délais

 

Transport après mise en bière, seulement si le transport a lieu en dehors de la commune du lieu de décès

entre communes ou départements *

Préfet de police

Maire de la commune de mise en bière

-

Procureur de la République

hors métropole

Préfet de police

Préfet de département

Cercueil hermétique obligatoire

de l'étranger vers métropole

Autorités consulaires

Cercueil hermétique obligatoire

Dépôt temporaire *

Préfet de police

Maire de la commune de dépôt au vu de l'autorisation de fermeture de cercueil

Cercueil hermétique si délai supérieur à 6 jours par rapport au décès.

Procédure liée à l'autorisation de fermeture de cercueil.

Inhumation

Inhumation en métropole *

Maire de Paris

Maire du lieu d'inhumation

Pas avant un délai de 24 h après le décès et dans le délai de 6 jours.

Permis d'inhumer délivré par le procureur de la République après constat d'un OPJ et d'un médecin commis par lui.

Inhumation sur terrain privé *

-

Préfet de département

Inhumation à l'étranger

Préfet de police

Préfet de département

Obligation d'un cercueil hermétique

Préfet après procédure préalable et permis d'inhumer délivré par le Parquet

Crémation *

et

Scellement ou dépôt de l'urne

Dispersion des cendres

Maire de Paris

Maire du lieu de décès ou de mise en bière

Contre indication des cercueils hermétiques.

Retrait des pacemakers

Procureur de la République

Exhumation *

Préfet de police

Maire du lieu d'exhumation

Pas autorisée avant le délai 1 an après l'inhumation, en cas de maladies contagieuses

Procureur de la République

* opérations nécessitant la présence d'un fonctionnaire de police

Source : Rapport « Décès massifs » du 12 mars 2004 du Professeur Dominique Lecomte, directeur de l'Institut médico-légal de Paris.

OPERATIONS nécessitant une vacation de police

OPERATIONS

CGCT

Mesures prises
par le fonctionnaire de police

Soins de conservation

Art R 2213-4

Procès verbal

Moulage

Art R 2213-45

Procès verbal

Transport avant mise en bière en dehors de la commune

Art R 2213-46

Pose d'un bracelet plombé

Arrivée du transport avant mise en bière en dehors de la commune

Art R 2213-46

Apposition de sceau sur l'autorisation de transport

Accomplissement des formalités de transport avant mise en bière

Art R 2213-47

 

Levée du corps en cas de transport après mise en bière

Art R 2213-48

Pose de deux cachets revêtus du sceau de la mairie

Inhumation dans caveau provisoire

Art R 2213-49

Pose de scellés

Arrivée d'un corps pour être inhumé

Art R 2213-49

Vérification des scellés

Inhumation

Art R 2213-49

Procès verbal

crémation

Art R 2213-50

Pose de scellés

Exhumation à la demande de la famille ou autre

Art R 2213-40

Art R 2213- 51

Procès verbal

Réinhumation après exhumation

Art R 2213-51

Procès verbal

Source : Rapport « Décès massifs » du 12 mars 2004 du Professeur Dominique Lecomte, directeur de l'Institut médico-légal de Paris.

Les circonstances particulièrement douloureuses dans lesquelles sont effectuées ces démarches administratives nécessitent qu'un soin tout particulier soit apporté au régime juridique établi. Il convient de ne pas créer des contraintes excessives aux familles se trouvant dans la peine.

L'exposé des motifs explique que « cette simplification devrait conduire à une meilleure lisibilité du droit funéraire et faciliter son application et son interprétation tant par les préfectures et les services de police que par les mairies. Elle devrait faciliter le déroulement de la procédure aboutissant à l'inhumation des personnes décédées, permettre à des familles se trouvant loin de leur défunt de le revoir une dernière fois à visage découvert et d'éviter que cette période, au cours de laquelle le travail de deuil doit commencer, soit perturbée par des contraintes administratives que les familles ont souvent du mal à comprendre ».

D'après les informations fournies au rapporteur, la présente habilitation devrait en particulier permettre de supprimer certaines autorisations administratives et vacations de police prévues par le code général des collectivités territoriales devenues inutiles ou non appliquées.

Ainsi, des régimes déclaratifs devraient se substituer à certains régimes d'autorisation, notamment pour les transports de corps en dehors de la commune nécessitant actuellement une autorisation du maire. Certaines vacations de police devraient également disparaître, telles que celles obligeant un fonctionnaire de police à être présent lors d'une crémation (pour fermer le cercueil, poser les scellés puis dresser le procès-verbal) ou lorsque sont pratiqués des soins de conservation sur le défunt.

L'assouplissement de cette réglementation devrait en contrepartie s'accompagner d'une plus importante responsabilisation des opérateurs funéraires, se traduisant notamment par un renforcement des motifs de suspension ou de retrait de l'habilitation dont ils disposent pour participer au service extérieur des pompes funèbres (article L. 2223-25 du code général des collectivités territoriales). Ceci doit avoir pour effet d'offrir des garanties importantes aux familles ayant recours à ces opérateurs.

L'ordonnance devrait également être l'occasion pour le Gouvernement de supprimer de la liste des opérations appartenant au service extérieur des pompes funèbres et fixée à l'article L. 2223-19 du code général des collectivités territoriales, la fourniture des tentures extérieures des maisons mortuaires, laquelle constitue une activité obsolète à laquelle les familles n'ont plus recours.

En outre, s'agissant de la législation relative aux cimetières, l'ordonnance devrait permettre de prendre certaines mesures concernant les cendres des défunts incinérés. Il s'agirait d'aménager la législation relative à la crémation au regard des évolutions les plus récentes de la société.

La crémation concerne environ 20 % des décès actuellement, contre moins de 1 % en 1980.

Un groupe de travail chargé de réfléchir au statut des cendres a été formé au sein du Conseil national des opérations funéraires.

Reprenant ses propositions, l'ordonnance devrait notamment permettre la création et la gestion de véritables équipements cinéraires au sein des crématoriums. En effet, l'instauration dans les cimetières de sites cinéraires tels que les colombariums et « cavurnes »58(*) reste jusqu'à présent facultative. Le maire, chargé de la police des funérailles et des lieux de sépultures, décide de l'opportunité ou non de leur création. Toutefois, en pratique, de nombreux crématoriums ont d'ores et déjà créé des jardins cinéraires afin de répondre à la demande des familles. Sans base légale, les crématorium s'appuient actuellement, pour la création de ces sites cinéraires, sur le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 juin 2002 ayant affirmé que, dans la mesure où l'article L. 2223-40 du code général des collectivités territoriales permettait aux communes de déléguer la création et la gestion des crématoriums, celles-ci peuvent également déléguer la création et la gestion de jardins cinéraires, élément indissociable du crématorium.

L'ordonnance devrait également prévoir de redéfinir le terme de « sépulture » visé à l'article L. 2223-13 du code général des collectivités territoriales, afin de lever une ambiguïté et garantir un droit à l'inhumation d'une urne recueillant des cendres dans le caveau familial59(*). En effet, les textes actuels prévoyaient uniquement la possibilité de la sceller sur le monument funéraire.

Il serait également envisagé de légaliser une pratique déjà existante, consistant à prévoir, comme pour les inhumations, un régime de concession pour les lieux de recueil des cendres, c'est-à-dire les cases de colombariums ou des « cavurnes ». Ceci aurait pour principal effet de sécuriser leurs conditions d'attribution.

L'ordonnance devrait aussi prévoir qu'à l'expiration de la convention de délégation de service public, le crématorium et les équipements cinéraires qui y sont rattachés seraient intégrés au domaine public de la commune.

Enfin, la translation de cimetières, compétence actuellement confiée au préfet du département, devrait désormais être du ressort communal, dans la mesure où le conseil municipal est déjà compétent en matière de création et d'agrandissement des cimetières. L'article L. 2223-1 du code général des collectivités territoriales serait modifié en ce sens.

b) Aménagement du régime juridique des associations, fondations et congrégations

Le 2° de l'article 8 tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance certaines mesures aménageant le régime juridique des associations, fondations et congrégations.

Cette habilitation est toutefois limitée à la possibilité de modifier :

- le régime d'autorisation relatif aux libéralités consenties au profit des associations, fondations et congrégations ;

- certaines modalités de déclaration des associations auprès des préfectures ;

- les obligations des associations et des fondations relatives à la tenue des comptes annuels, au contrôle de ceux-ci et à leur publicité.

Le nombre d'associations en France est généralement estimé à environ 800.000 avec près de 60.000 nouvelles associations créées chaque année. En 2003, 70.283 déclarations de création d'association ont été enregistrées en préfecture. 1.931 associations reconnues d'utilité publique, 485 fondations reconnues d'utilité publique, 92 fondations d'entreprises et 639 congrégations sont également recensées au 15 septembre 2004.

D'après les informations fournies par les ministères, les représentants des associations seraient favorables à des mesures de simplification ayant pour principal objectif de clarifier leurs obligations. Les associations subissent bien souvent la lourdeur et la complexité de démarches administratives imposés par la loi.

Plusieurs mesures de simplification ont déjà été prises ces dernières années dans le domaine législatif ou réglementaire. Par exemple, la loi n° 2003-442 du 19 mai 2003 a créé un « chèque emploi associatif » tendant à simplifier les formalités administratives et sociales devant être effectuées par l'association lors d'une embauche60(*). Il s'inspirait directement du chèque-emploi services ou du titre emploi simplifié agricole.

Le présent article vise à poursuivre ces efforts de simplification autour des trois axes précités et ci-dessous détaillés.

 Habilitation à simplifier le régime d'autorisation relatif aux libéralités consenties au profit des associations, fondations et congrégations

En vertu de la législation actuelle, seules certaines associations peuvent recevoir des libéralités (dons par acte authentique et legs) :

- les associations reconnues d'utilité publique ; 

- les associations cultuelles et congrégations reconnues par décret ; 

- les unions d'associations familiales agréées ; 

- les associations ayant pour objet exclusif l'assistance, la bienfaisance, la recherche scientifique ou médicale ;

- les associations agréées de financement électoral ou d'un parti politique.

Les dons par actes authentiques et legs consentis à ces associations, fondations ou congrégations sont soumis à un régime dit de tutelle61(*). Cela signifie qu'elles peuvent uniquement être octroyées aux associations après autorisation discrétionnaire du préfet du département où siège l'association. L'administration ne donne son accord qu'après avoir exercé un contrôle sur le but et l'activité de l'association bénéficiaire d'une part, et la situation de famille et de fortune de l'auteur de la libéralité d'autre part.

Les héritiers peuvent s'opposer à l'autorisation de l'administration et exercer un recours pour excès de pouvoir contre ladite décision devant le juge administratif en vertu de l'article 7 de la loi du 4 février 1901 sur la tutelle administrative en matière de dons et legs62(*).

La législation actuelle relative aux libéralités n'est pas satisfaisante.

En effet, la procédure administrative apparaît trop complexe et engendre d'importants délais d'attente pour les associations bénéficiaires d'un don, legs ou donation. Comme l'indique l'exposé des motifs, « cette procédure retarde considérablement l'entrée en possession des établissements légataires » alors qu'en pratique, l'administration ne refuse que très rarement l'octroi de la libéralité à une association.

C'est pourquoi l'habilitation proposée par le présent article permettrait de réformer le régime des libéralités en substituant un régime déclaratif à l'actuelle tutelle. Ce régime de déclaration serait assorti d'un pouvoir d'opposition dont disposerait l'administration pendant un délai de quatre mois, comme l'indique l'exposé des motifs. Il serait envisagé que la déclaration soit effectuée par le notaire par la voie d'un formulaire électronique qui pourrait être géré par les greffes des tribunaux de commerce et mis en ligne sur leur site.

Cette nouvelle procédure permettrait de réduire les délais d'octroi des libéralités consenties à des associations, fondations et congrégations en allégeant le travail de l'administration et en ne subordonnant plus l'entrée en possession des biens légués par l'association à l'accord de l'administration. Elle devrait conduire, d'une part, à la modification de l'article 910 du code civil en vertu duquel ces libéralités ne prennent leur effet qu'après autorisation administrative63(*), des articles 6, 11 et 15 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ainsi que du décret n° 66-388 du 13 juin 1966 et, d'autre part, à l'abrogation de la loi du 2 janvier 1817 sur les donations et legs faits aux établissements ecclésiastiques, la loi du 24 mai 1825 relative aux congrégations religieuses de femmes, l'ordonnance du 14 janvier 1831 relative aux donations et legs, acquisitions et aliénations concernant les établissements ecclésiastiques et les communautés religieuses de femmes et enfin la loi précitée du 4 février 1904.

En outre, cette habilitation pourrait être l'occasion de supprimer le pouvoir d'opposition des héritiers du défunt ayant consenti à la libéralité.

 Habilitation à alléger certaines modalités de déclaration des associations auprès des préfectures

En vertu de l'article 5 de la loi précitée du 1er juillet 1901, la création d'une association nécessite que ses fondateurs la rende publique. Ces derniers doivent ainsi effectuer une déclaration préalable, à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l'arrondissement où l'association aura son siège social, dans laquelle sont précisés le titre et l'objet de l'association, le siège de ses établissements et les noms, professions, domiciles et nationalités des personnes chargées de son administration ou de sa direction. Les associations doivent faire connaître tout changement survenu dans leur administration ou leur direction ainsi que toute modification apportée à leurs statuts dans un délai de trois mois. En outre, les associations ne sont rendues publiques que par une insertion au Journal officiel.

Deux exemplaires des statuts de l'association doivent être joints à la déclaration dont il est donné récépissé dans un délai de cinq jours.

Le présent article 8 du projet de loi tend à habiliter le gouvernement à alléger par ordonnance certaines de ces modalités de déclarations des associations auprès des préfectures. Deux simplifications sont d'ores et déjà envisagées :

- d'une part, il conviendrait de clarifier les changements de personnes au sein de l'association devant être déclarés à la préfecture. En effet, la notion de personnes chargées « de l'administration ou de la direction » de l'association est imprécise et conduit parfois les associations à déclarer à la préfecture chaque changement d'administrateur, tout renouvellement de bureau voire les changements de directeurs salariés. C'est pourquoi l'ordonnance pourrait substituer à ces termes ceux de « personnes habilitées à représenter l'administration », figurant déjà dans l'essentiel des statuts des associations. Cette mesure serait bénéfique à la fois pour l'administration, souvent submergée par le nombre important de récépissés devant être fournis à chaque déclaration, et pour les usagers, en allégeant les démarches administratives nécessaires dans l'exercice du droit d'association ;

- d'autre part, l'ordonnance devrait permettre de réduire à un le nombre d'exemplaires des statuts de l'association devant être joints à la déclaration initiale. Le dépôt de deux exemplaires s'avère en pratique inutile.

 Habilitation à harmoniser les obligations comptables imposées aux associations et fondations ayant une activité économique ou recevant des subventions ou des dons

La loi impose des obligations comptables aux organismes ayant une activité économique ou recevant des subventions ou des dons. Concernant les associations et fondations, les règles qu'elles doivent respecter sont actuellement prévues dans plusieurs textes législatifs.

En premier lieu, les associations ayant une activité économique ou recevant des subventions doivent, au-delà d'un certain seuil, établir des comptes annuels et nommer un commissaire aux comptes en vertu des articles L. 612-1 à L 612-5 du code de commerce.

En second lieu, le sixième alinéa de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit que « les organismes de droit privé ayant reçu annuellement de l'ensemble des autorités administratives une subvention supérieure à un montant fixé par décret doivent déposer à la préfecture du département où se trouve leur siège social leur budget, leurs comptes, les conventions prévues au présent article et, le cas échéant, les comptes rendus financiers des subventions reçues pour y être consultés. »

Enfin, l'article 3 de la loi n° 2003-709 du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations insérant un article 4-1 dans la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat impose aux associations et fondations reconnues d'utilité publique, aux associations ayant pour but exclusif l'assistance, la bienfaisance, la recherche scientifique ou médicale ainsi qu'à tout organisme bénéficiaire de dons de personnes physiques ou morales ouvrant droit, au bénéfice des donateurs, à un avantage fiscal au titre de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, d'assurer, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat, la publicité par tous moyens et la certification de leurs comptes annuels au-dessus d'un certain montant.

Le seuil à partir duquel ces trois séries de dispositions législatives s'appliquent est actuellement fixé à 153.000 euros.

L'habilitation prévue au présent article dans le domaine du droit des associations devrait permettre d'harmoniser l'ensemble de ces dispositions législatives relatives à la tenue, à la publicité et au contrôle des comptes annuels des associations.

En effet, alors que l'article 10 précité de la loi du 12 avril 2000 prévoit un dépôt en préfecture des comptes annuels de ces associations, la récente loi précitée du 1er août 2003 a instauré, après un large débat parlementaire, un nouveau dispositif selon lequel les associations doivent assurer la publicité et la certification de leurs comptes, lesquels peuvent également être contrôlés par la Cour des comptes qui vérifie la conformité des dépenses financées par les dons ouvrant droit à avantage fiscal avec les objectifs de ces associations.

Par conséquent, l'ordonnance prise en vertu de la présente habilitation permettrait de simplifier le droit en vigueur en remplaçant, à l'article 10 de la loi du 12 avril 2000, le dépôt en préfecture par un système de publicité, de certification et de contrôle identique à celui prévu par l'article 3 de la loi du 1er août 2003. Toutes les associations entrant dans les catégories établies par ces deux lois seraient par conséquent régies par des dispositions identiques s'agissant de leurs comptes annuels.

Cette mesure simplifierait considérablement les obligations faites aux associations recevant annuellement des subventions supérieures à 153.000 euros et étant pour beaucoup d'entre elles soumises aux deux dispositifs prévus par les lois du 12 avril 2000 et du 1er août 2003.

Votre commission se félicite principalement de l'effort de mise en cohérence des différents textes législatifs en vigueur. Toutefois, s'il convient de ne pas alourdir à l'excès les démarches administratives devant être assurées par les associations, votre commission rappelle la nécessité qu'un véritable contrôle des comptes annuels des associations soit assuré. Elle considère qu'aux côtés du contrôle assuré par la Cour des comptes, la publicité de ces comptes constitue un « garde-fou » efficace contre les dérives éventuelles, dans la mesure où il permet à chaque citoyen de surveiller le bon emploi par l'association de ses moyens financiers.

En première lecture, outre un amendement rédactionnel de la commission des Lois approuvé par le gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par M. Jérôme Lambert, avec un avis défavorable de la commission des Lois et un avis favorable du Gouvernement, visant à exclure du champ de cette habilitation les associations définies à l'article 1er de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales.

Votre commission vous propose un amendement tendant à modifier cette habilitation aménageant le régime juridique des associations, fondations et congrégations.

Il tendrait à la rédaction et la place dans le présent article de la référence aux mouvements sectaires inséré par amendement à l'Assemblée nationale. En effet, le texte actuel est source de difficultés dans la mesure où, en prévoyant l'exclusion du bénéfice de cet article pour les associations condamnées du fait de leur caractère sectaire dans le c) de cet article, cet amendement est contre productif car l'objectif principal de cette habilitation est de généraliser à toutes les associations et fondations, à partir d'un seuil unique, l'obligation de transparence introduite par le législateur par la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations pour l'établissement des comptes annuels. Il serait par conséquent préférable qu'elles restent soumises à cette évolution législative.

Il n'est pas nécessaire d'exclure ce genre d'association du bénéfice du b) de cet article, à savoir de la simplification des modalités de déclaration des associations auprès des préfectures. En effet, en pratique il est de toute façon très rare que ce genre d'association fasse part de ses changements de dirigeants.

En revanche, il est utile d'insérer une référence aux mouvements sectaires au a) de cet article en prévoyant que les associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants seraient visées à l'article 1er de la loi du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales seraient exclues du champ de cette habilitation. Elles ne pourraient ainsi bénéficier de la simplification du régime des libéralités consenties aux associations, fondations et congrégations.

Alignement du régime applicable à l'exercice des compétences des maires en matière de police administrative dans les communes des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle sur celle des autres communes

Comme tous les maires de France, les maires des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle disposent du pouvoir de police administrative établi à l'article L. 2122-24 du code général des collectivités territoriales. Toutefois, contrairement à ce que prévoit le droit commun, le préfet ne dispose pas, dans ces trois départements, de la possibilité de se substituer au maire pour prendre une mesure de police sur le territoire communal.

En effet, alors qu'aux termes de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, le préfet du département peut prendre toute mesure de police administrative sur le territoire d'une commune lorsque les autorités municipales ne sont pas elles-mêmes intervenues, ce pouvoir de substitution d'action ne s'applique pas pour les maires des communes situées dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle, comme le prévoit explicitement l'article L. 2542-1 du même code64(*).

Le pouvoir de substitution d'action accordé au préfet a continué d'exister pour les communes des autres départements malgré la suppression de la tutelle et l'adoption de la loi de décentralisation n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions. Toutefois, le préfet ne peut désormais plus agir à la place du maire sur le domaine des compétences que ce dernier détient en tant qu'autorité décentralisée. Il conserve uniquement cette faculté pour les cas où le maire aurait pu intervenir en tant qu'agent de l'Etat.

Les préfets de l'Alsace et de la Moselle ne disposent pas de ce pouvoir de substitution d'action pour des raisons historiques. Un avis du Conseil d'Etat du 24 juillet 1951 avait déjà posé le principe selon lequel il n'existait pas de pouvoir de substitution du représentant de l'Etat à la place des maires des communes du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Toutefois, certaines dispositions législatives prévoient explicitement un pouvoir de substitution d'action des préfets dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle. Ainsi en est-il en cas d'urgence dans le domaine de la santé publique, notamment lors d'un danger ponctuel imminent, le préfet pouvant alors intervenir directement (article L. 1311-4 du code de la santé publique) ou, lorsque le maire n'a pas pris lui-même de décision en matière de logement insalubre, le préfet devant alors soit décider l'exécution d'office des travaux, soit, si la démolition de l'immeuble a été prescrite, procéder d'office à la réalisation des travaux provisoires nécessaires pour mettre fin au danger menaçant la santé des occupants ou des voisins (article L. 1331-29 du code de la santé publique).

Le présent article propose, afin de clarifier l'état actuel du droit applicable dans le Bas-Rhin, le Haut-Rhin et la Moselle s'agissant du pouvoir de substitution d'action des préfets, d'aligner le régime applicable à l'exercice des compétences de police administrative des maires dans les communes de ces trois des départements sur celle des autres communes françaises.

Le gouvernement s'est engagé en première lecture devant l'Assemblée nationale à ce qu'une « concertation approfondie » soit engagée avant l'adoption de l'ordonnance, notamment avec la commission d'harmonisation du droit privé et l'Institut du droit alsacien-mosellan.

Toutefois, votre commission estime qu'il serait préférable que cette concertation soit menée avant que le Sénat ne se prononce sur cette habilitation.

C'est pourquoi, sans préjuger de la nécessité de cette mesure, votre commission vous propose un amendement de suppression de cette habilitation.

Aménagement des procédures relatives à l'exercice des professions réglementées de courtier en vins et commerçant ambulant

Le 2° de l'article 27 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit prévoyait déjà par ordonnance la simplification et l'adaptation aux exigences de la profession de la législation relative à certaines professions réglementées : agents de voyage, experts-comptables, coiffeurs, courtiers de marchandises assermentés, exploitants forestiers et voyageurs, représentants ou placiers. Conformément à cette habilitation, le gouvernement a pris l'ordonnance n° 2004-279 du 25 mars 2004 portant simplification et adaptation des conditions d'exercice de certaines activités professionnelles, laquelle devrait être ratifiée à l'occasion du présent projet de loi65(*).

Dans le même esprit de modernisation et de simplification des régimes applicables aux professions réglementées, le présent article tend cette fois-ci à habiliter le gouvernement à simplifier par ordonnance les procédures relatives à l'exercice des professions de courtier en vins et de commerçant ambulant.

La réglementation de la profession de courtier en vins

La profession réglementée de courtier en vins est régie par la loi n° 49-1652 du 31 décembre 1949.

Les courtiers en vins, dits « courtiers de campagne », sont, en vertu de l'article premier de la loi précitée du 31 décembre 1949, « les courtiers qui, dans les régions de production, et moyennant une rémunération fixe de courtage, mettent en rapport les producteurs ou vendeurs de vins, spiritueux et dérivés, avec les négociants ».

Pour exercer cette profession, le postulant doit obtenir une carte professionnelle délivrée par le préfet de son domicile, après avis d'une commission consultative de six membres qui vérifie s'il remplit les conditions légales, c'est-à-dire s'il :

- jouit de ses droits civils et justifie de sa moralité par un certificat de bonne vie et moeurs ;

- n'a pas encouru l'une des condamnation, destitution ou déclaration de faillite qui emportent interdiction d'entreprendre une profession commerciale ou industrielle ;

- est de nationalité française ou titulaire de la carte spéciale de commerçant étranger ;

- n'exerce aucune des activités déclarées incompatibles avec la profession de courtier en vins ;

- ne fait aucun achat ou vente de vins à son compte, sauf achat pour ses besoins familiaux ou la vente de vins provenant de ses propriétés, et n'est pas titulaire d'une licence de marchand de vins en gros ou en détail ;

- satisfait à des conditions d'expérience professionnelle et d'honorabilité ;

- est titulaire d'une carte d'identité professionnelle établie et délivrée par l'autorité préfectorale.

La commission consultative précitée est présidée par le président de la chambre de commerce et d'industrie et composée de deux membres du ou des syndicats des négociants en vins et concessionnaires, de deux membres du ou des syndicats de courtiers en vins, de deux membres des associations viticoles les plus représentatives.

La carte professionnelle d'un courtier en vins peut lui être retirée dans un délai de trois mois lorsqu'il ne remplit plus les conditions exigées ou s'il a noté l'une des dispositions encadrant l'exercice de la profession.

Une liste des courtiers agréés est établie, tenue à jour et publiée chaque année.

La profession réglementée de commerçant ambulant

La profession réglementée de commerçant ambulant est régie par la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France sans domicile ni résidence fixe.

Le postulant à l'exercice de cette profession doit accomplir à la fois les formalités habituellement requises pour exercer une activité commerciale et celles prévues expressément pour l'exercices des activités ambulantes.

Pour exercer une profession ou une activité ambulante hors du territoire de la commune où est située son habitation ou son principal établissement, toute personne physique ou morale doit avoir soit son domicile soit une résidence fixe depuis plus six mois ou soit son siège social en France ou dans un autre Etat membre de l'Union européenne et le déclarer à la préfecture.

La déclaration doit être renouvelée périodiquement.

Si le déclarant n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat parti à l'Espace économique européen, il doit justifier de sa résidence régulière en France depuis au moins cinq ans.

Les personnes ne répondant pas à ces conditions doivent, pour exercer la profession de commerçant ambulant, être munies d'un livret de circulation remis par l'autorité administrative. Lorsqu'elles sollicitent ce titre de circulation, elles doivent faire connaître la commune à laquelle elles souhaitent être rattachées.

La préfecture délivre ensuite une attestation provisoire d'exercice de la profession de commerçant ambulant au postulant qui peut s'inscrire au Centre des formalités des entreprises puis obtenir, auprès du greffe du tribunal de commerce, son immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

Sur présentation d'un extrait Kbis, une carte définitive de commerçant ambulant lui est enfin délivrée par la préfecture. Elle doit être validée tous les deux ans.

D'après les informations obtenues par votre rapporteur, le gouvernement devrait supprimer par ordonnance la carte professionnelle nécessaires pour l'exercice de la profession de commerçant ambulant. Un extrait du Kbis pourrait suffire à justifier de la qualité du commerçant.

S'agissant de la profession de courtier en vin, la délivrance de la carte pourrait être transférée aux chambres de commerce et d'industrie qui instruisent déjà les dossiers.

Cette mesure aurait pour avantage d'alléger les formalités administratives devant jusqu'à présent être effectuées par le candidat à l'une de ces deux professions. Elle soulagerait également les services préfectoraux d'une importante charge de travail.

Aménagement du régime de protection des mineurs accueillis hors du domicile parental

Le I-5° de cet article vise à autoriser le Gouvernement à aménager par ordonnance le régime de protection des mineurs accueillis hors du domicile de leurs parents à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels et des loisirs.

Il s'agit ainsi de modifier certaines règles établies par les articles L. 227-1 à L. 227-3 du code de l'action sociale et des familles, tels qu'issus de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.

Environ 37.000 centres de vacances et 30.000 centres de loisirs sont concernés par ces dispositions.

D'après l'exposé des motifs, l'habilitation devrait en particulier permettre :

- de préciser la définition du champ de la législation relative à la protection des mineurs accueillis hors du domicile parental, c'est-à-dire de déterminer clairement les accueils soumis à ce dispositif ;

- de simplifier la procédure de déclaration de ces accueils, en substituant un contrôle a posteriori au contrôle a priori des centres d'accueil lors de la délivrance du récépissé de déclaration par le préfet, en fixant la déclaration de tous les accueils auprès du préfet du département dans lequel ils sont organisés et en constituant une « source d'information concernant les locaux accueillant les mineurs ».

La commission des Lois a renvoyé l'examen de cette disposition (5° du I du présent article) à la commission des Affaires culturelles saisie pour avis66(*).

II. L'abrogation directe de l'obligation de prêter serment pour les contrôleurs chargés de surveiller l'application des congés payés par les employeurs

Le II du présent article a pour objet d'abroger le dernier alinéa de l'article L. 223-17 du code du travail qui prévoit l'obligation pour les contrôleurs chargés de surveiller l'application des congés payés par les employeurs de prêter serment de ne rien révéler des secrets de fabrication et des procédés et résultats d'exploitation dont ils pourraient prendre connaissance dans l'exercice de leurs fonctions.

Ils doivent actuellement prêter serment avant leur entrée en fonction devant le préfet du département où la caisse a son siège.

La commission des Lois a renvoyé l'examen de cette disposition à la commission des Affaires sociales saisie pour avis67(*).

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter l'article 8 ainsi modifié.

Article 9
(loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse)
Suppression de la procédure de déclaration obligatoire
pour l'exercice de la profession de colporteur ou de distributeur

Cet article a pour objet de supprimer la procédure de déclaration imposée à toute personne exerçant la profession de colporteur ou de distributeur.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires culturelles68(*).

Article 10
(art. L. 347 et L. 350 du code électoral)
Simplification de l'exercice des compétences
en matière d'organisation des élections régionales

Cet article a pour objet de simplifier l'exercice des compétences en matière d'organisation des élections régionales en prévoyant que les déclarations de candidature seraient désormais déposées à la préfecture chef-lieu de région et que la possibilité de donner récépissé provisoire et définitif de cette déclaration serait confiée au préfet du département chef-lieu de région.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

En vertu des articles L. 346 à L. 352 du code électoral, la déclaration de candidature résulte d'une liste déposée à la préfecture de région et constituée collectivement pour chaque liste par le candidat tête de liste ou par son mandataire. Elle est obligatoire avant chaque tour de scrutin pour chaque liste de candidats.

S'agissant du dépôt de la déclaration de candidatures pour le premier tour, celui-ci doit être fait au plus tard à midi le quatrième lundi qui précède le jour du scrutin. En vertu de l'article L. 350 du code électoral, il en est donné récépissé provisoire par le préfet de région qui délivre ensuite un récépissé définitif, un fois la déclaration de candidature enregistrée, au plus tard à midi le quatrième vendredi précédant le jour du scrutin.

En cas de refus d'enregistrement, le candidat désigné tête de liste ou son mandataire peut le contester dans un délai de quarante-huit heures devant le tribunal administratif qui dispose de trois jours pour statuer.

Au second tour, la déclaration de candidatures est déposée au plus tard à dix-huit heures le mardi suivant le premier tour. Un récépissé définitif et valant enregistrement est immédiatement délivré aux listes.

L'éventuel refus d'enregistrement peut faire l'objet d'un recours dans les vingt-quatre heures, le tribunal administratif disposant également du même délai pour statuer.

L'article 10 du projet de loi tend à simplifier la procédure de dépôt des déclarations de candidatures en modifiant les articles L. 347 et L. 350 du code électoral pour prévoir :

- que les déclarations de candidatures seraient désormais déposées à la préfecture chef-lieu de région et non plus à la préfecture de région ;

- que les récépissés provisoires et définitifs seraient donnés par le préfet du département chef-lieu de région et non plus par le préfet de région.

Cette clarification des compétences en matière d'élections régionales est justifiée par le fait que le préfet de département dispose de plus de facultés de délégation de signature en la matière que le préfet de région.

En effet, en vertu de l'article 38 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements, le préfet de région peut donner délégation de signature :

- en toutes matières, et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs de services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans la région, au secrétaire général pour les affaires régionales, et en cas d'empêchement de celui-ci, aux agents de catégorie A placés sous son autorité ;

- pour les matières relevant des attributions du pôle, aux chefs des pôles régionaux de l'Etat qui peuvent, pour certaines attributions déterminées, subdéléguer leur signature aux chefs de services déconcentrés ;

- aux responsables des délégations interservices pour les seules matières relevant de leurs attributions ;

- pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs ou responsables des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans la région ou à leurs subordonnés.

S'agissant du domaine électoral, les chefs des pôles régionaux de l'Etat, les chefs ou responsables des services extérieurs des administrations civiles de l'Etat dans la région ainsi que les responsables des délégations interservices n'exerçant aucune compétence en la matière, le préfet de région ne peut accorder de délégation de signature qu'au secrétaire général pour les affaires régionales et, en son absence, aux agents de catégorie A placés sous son autorité.

En revanche, le préfet de département peut, en vertu de l'article 43 du décret précité du 29 avril 2004, déléguer sa signature :

- au secrétaire général et aux chargés de mission, en toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services des administrations civiles de l'Etat dans le département ;

- aux chefs de services des administrations civiles de l'Etat dans le département ou à leurs subordonnés, pour les matières relevant de leurs attributions ;

- au directeur de cabinet, pour les matières relevant de ses attributions ;

- aux agents en fonction dans les préfectures pour les matières relevant, soit des attributions du ministère de l'intérieur, soit des départements ministériels qui ne disposent pas de services dans le département ou encore pour la transformation en états exécutoires des ordres de recettes mentionnés à l'article 85 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

- aux responsables des délégations interservices pour les matières relevant de leurs propres attributions ;

- au commandant du groupement départemental de gendarmerie en matière de police administrative, à l'exclusion de ce qui relève de la participation des forces armées au maintien de l'ordre ;

- aux sous-préfets ou au fonctionnaire assurant le service de permanence pour prendre toute décision nécessitée par une situation d'urgence, pour l'ensemble du département.

Ainsi, le préfet du département pourrait, dans le domaine électoral, déléguer sa signature, tant au secrétaire général et aux chargés de mission, qu'au directeur de cabinet et même aux agents en fonction dans les préfectures puisqu'il s'agit d'une matière relevant d'attributions du ministère de l'intérieur.

Par conséquent, il semble souhaitable de modifier les articles L. 347 et L. 350 du code électoral pour que l'enregistrement des candidatures lors des élections régionales soit effectué par le préfet du département chef-lieu de région plutôt que par le préfet de région.

La commission vous propose d'adopter l'article 10 sans modification.

Article 10 bis (nouveau)
(art. 265 du code de procédure pénale)
Simplification de la procédure de tirage au sort des jurés d'assises

Inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du gouvernement, avec un avis favorable de la commission des lois, l'article 10 bis prévoit de supprimer le passage par la préfecture des listes annuelles et spéciales des jurés qui seraient désormais directement adressées aux maires par les commissions chargées d'élaborer les listes définitives.

La formation des jurys d'assises est régie par les articles 259 à 267 du code de procédure pénale.

Une liste de jury criminel est établie annuellement dans le ressort de chaque cour d'assises. Elle comprend un juré pour 1.300 habitants, sauf arrêté ministériel du ministre de la justice fixant un nombre plus élevé et sans toutefois que le nombre puisse toutefois être inférieur à 200. Ce chiffre est porté à 1.800 jurés pour la cour d'assises de Paris.

Une liste préparatoire à la liste annuelle est dressée par arrêté préfectoral pour une circonscription. A partir des listes électorales, chaque maire tire au sort publiquement trois fois le nombre de noms fixé par l'arrêté préfectoral pour la circonscription. Sont exclus de cette liste préparatoire les personnes qui n'auront pas atteint l'âge de vingt-trois ans au cours de l'année civile suivante. A Paris, ce tirage au sort est effectué dans chaque arrondissement par l'officier d'état civil désigné par le maire.

Le maire doit transmettre cette liste préparatoire au secrétariat-greffe de la juridiction siège de la cour d'assises et avertir les personnes ayant été tirées au sort en leur demandant d'indiquer leurs professions.

Une liste annuelle et une liste spéciale de jurés suppléants sont ensuite dressées au siège de chaque cour d'assises par une commission présidée, dans les cours d'appel, par le premier président ou son délégué et, dans les tribunaux de grande instance, sièges de la cour d'assises, par le président du tribunal ou son délégué. Cette commission exclut les personnes ne remplissant pas les conditions d'aptitude légale pour devenir juré et statue sur les demandes de dispenses présentées par certaines personnes en vertu de l'article 258 du code de procédure pénale.

Les listes annuelles et spéciales sont établies par tirage au sort au sein des noms n'ayant pas été exclus. L'actuel article 265 du code de procédure pénale prévoit que ces deux listes sont ensuite transmises par le président de la commission au préfet qui les fait parvenir au maire de chaque commune.

Trente jours au moins avant l'ouverture des assises, le premier président de la cour d'appel ou le président du tribunal de grande instance ou leurs délégués respectifs tire au sort les quarante jurés qui formeront la liste de session parmi la liste annuelle ainsi que les douze jurés suppléants parmi la liste spéciale. Les jurés tirés au sort dans l'une de ces deux listes sont alors informés par une notification du préfet au moins quinze jours avant le jour de l'ouverture de la session.

Parmi les étapes de cette longue et importante procédure, il ne semble pas utile qu'une fois établies par la commission compétente, les listes annuelles et spéciales transitent par les préfectures qui les reçoivent uniquement pour les retransmettre au maire de chaque commune.

Source de complexité et ne conférant aucune compétence particulière au préfet, cette disposition mérite d'être supprimée. Désormais, les listes annuelles et spéciales des jurés d'assises devraient être directement adressées aux maires par les commissions chargées d'élaborer ces listes définitives.

Le II de cet article prévoit que cette simplification de la procédure de transmission des listes annuelles et spéciales entrerait en vigueur à partir du 1er janvier 2005. Elle serait ainsi applicable pour la formation des jurys d'assises qui devrait intervenir en septembre ou octobre de cette même année.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 10 bis sans modification.

Article 11
(art. 463-6 du code de l'éducation)
Déconcentration de la procédure d'interdiction pour une personne d'enseigner des activités physiques et sportives

Cet article tend à modifier l'article L. 463-6 du code de l'éducation afin de déconcentrer la procédure d'interdiction d'exercer, pour toute personne dont le maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants, à titre temporaire ou définitif, des fonctions d'enseignement des activités physiques et sportives.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires culturelles69(*).

Article 12
Rationalisation de la réglementation
relative aux aides personnelles au logement

Cet article a pour objet :

- de simplifier, clarifier et harmoniser la réglementation relative aux aides personnelles au logement ;

- de tirer les conséquences de la fusion du Conseil national de l'aide personnalisée au logement et du Conseil national de l'accession à la propriété.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales70(*).

Article 13
Simplification du régime des autorisations d'utiliser le sol

Cet article a pour objet d'habiliter le gouvernement à modifier le code de l'urbanisme afin de simplifier par ordonnance le régime applicable aux autorisations d'utiliser le sol. Elle considère toutefois que les modifications des règles relatives au retrait des déclarations et autorisations d'utiliser le sol devront être effectuées en coordination avec l'harmonisation des règles de retrait des actes administratifs prévues à l'article 2 du présent projet71(*)

L'Assemblée nationale a adopté en première lecture un amendement présenté par la commission des Lois avec un avis favorable du Gouvernement tendant à étendre la possibilité de simplifier les règles relatives aux autorisations d'utiliser le sol à l'ensemble des dispositions du code de l'urbanisme et non, comme le prévoyait le projet de loi initial, pour les seules dispositions des livres III et IV du code de l'urbanisme.

La rédaction de cette ordonnance devrait s'appuyer sur les propositions du groupe de travail sur la sécurité juridique des autorisations d'urbanisme institué par M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la Justice et M. Gilles de Robien, ministre de l'Equipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer72(*).

Au regard de la lettre de mission écrite par ces deux ministres en date du 29 juin 2004, ce groupe de travail devrait réfléchir aux règles devant être modifiées pour proposer une « réforme en profondeur du régime des autorisations d'urbanisme avec pour objectifs principaux la simplification des procédures et une meilleure prise en compte de la qualité ». En outre, il est précisé que, afin de mieux concilier le droit des citoyens à contester les décisions administratives qu'ils estiment illégales avec la stabilité des autorisations d'utiliser le sol et la mise en oeuvre des opérations autorisées par l'administration, il devra également proposer des mesures tendant à améliorer la gestion des contentieux, faciliter la régularisation de vices de procédure mineurs ainsi que la lisibilité des délais de recours.

Ce groupe de travail est composé de « personnes représentatives de l'ensemble des milieux professionnels et associatifs concernés » et aurait déjà procédé à de nombreuses auditions au cours du mois de septembre.

Le présent article précise que l'habilitation devrait notamment permettre de :

- préciser le champ d'application des différentes autorisations et déclarations d'utiliser le sol ;

- simplifier leurs règles de délivrance ;

- redéfinir les procédures de contrôle de conformité des travaux.

En effet, il serait nécessaire de modifier le droit actuellement en vigueur dans ce domaine dans la mesure où il s'avère être particulièrement complexe. Issu d'une multitude de lois adoptées au cours des dernières décennies, il peut être source d'incompréhension voire d'insécurité juridique pour les usagers de l'administration.

Cette habilitation devrait permettre au gouvernement de « toiletter » la partie législative du code de l'urbanisme.

D'après l'exposé des motifs, la réforme envisagée s'articulerait autour de cinq axes principaux.

· En premier lieu, il s'agirait d'améliorer la clarté et la compréhension de la structure même du code de l'urbanisme. En effet, il paraît difficile pour un lecteur non avisé de déterminer avec évidence le champ d'application des déclarations et des autorisations d'utiliser le sol. Comme l'explique l'exposé des motifs, le plan du code de l'urbanisme, en particulier pour ses livres III et IV ayant respectivement pour objet « l'aménagement foncier » et les « règles relatives à l'acte de construire et à divers modes d'utilisation du sol », est tel qu'après avoir défini les travaux entrant dans le champ du permis de construire, sont indiqués les cas dans lesquels ces mêmes travaux sont simplement soumis à déclaration, « de sorte que le lecteur non habitué du code de l'urbanisme ne peut pas comprendre si les travaux qu'il envisage sont ou non soumis à permis de construire. » Il indique également que l'ensemble des dispositions de ce livre du code de l'urbanisme devrait être fusionné et qu'un article introductif devrait distinguer clairement les travaux subordonnés à un permis de construire, ceux soumis à simple déclaration et ceux dispensés de toute formalité.

· En second lieu, le champ d'application de chacune des différentes procédures d'autorisations et déclarations d'utiliser le sol devrait être clarifié. En effet, le droit actuel « est source de grandes incertitudes juridiques et de complications, dans la mesure où on varie d'une commune à l'autre, voire d'une zone à l'autre d'une même commune, en fonction du contenu du document d'urbanisme ». L'exposé des motifs précise également qu'il est également difficile de connaître la procédure applicable pour chaque opération, par exemple pour le changement de destination lorsqu'il n'est pas accompagné de travaux.

L'ordonnance pourrait permettre une diminution du nombre de déclarations ou autorisations actuellement existantes, en prévoyant la suppression de certaines d'entre elles. Il existe actuellement treize catégories de régimes d'autorisation ou de déclaration dans le code de l'urbanisme73(*). D'après le ministère de l'équipement, pourraient ainsi être rapprochées la déclaration de travaux, la déclaration de clôtures et l'autorisation des installations et travaux divers.

Les opérations pourraient être regroupées en trois catégories : celles qui sont ne soumises à aucune procédure et à un simple contrôle de police, celles soumises à simple déclaration et celles soumises à autorisations.

Certaines procédures relatives à ces autorisations apparaissent en outre inutiles et obsolètes. Il convient de les supprimer. Par exemple, l'ordonnance ne devrait plus soumettre à permis de construire le montage de constructions provisoires tels que les chapiteaux de cirque et plus généralement toutes structures légères démontables. Ainsi, toutes les installations temporaires de chantiers ne seraient plus soumises à permis de construire, alors qu'actuellement seuls ceux situés sur le même terrain que la future construction en sont exemptés.

· En troisième lieu, l'ordonnance devrait également avoir pour objet de simplifier la procédure de la déclaration de travaux qui, du fait de sa complexité, tend à créer un important risque d'insécurité juridique pour le déclarant.

En vertu du droit en vigueur, dans un délai d'un mois à compter de la réception du dossier, ou de deux mois lorsque les travaux envisagés nécessitent la consultation d'autres administrations, l'autorité administrative compétente, à savoir le maire ou le préfet, peut s'opposer aux travaux ou imposer certaines prescriptions.

En l'absence d'opposition, le déclarant est autorisé à commencer les travaux, le silence de l'administration valant dans ce cas acceptation. La mention de la non opposition doit alors être affichée sur le terrain pendant un délai de deux mois ou pendant toute la durée du chantier si elle est supérieure à deux mois.

Toutefois, comme tout acte administratif même tacite, l'absence d'opposition peut faire l'objet d'un recours contentieux par un tiers pendant deux mois à compter du dernier affichage de la non opposition, à la mairie ou sur le terrain. De plus, pendant ce même délai, l'autorité administrative peut prendre une décision d'opposition en cas d'illégalité de l'absence d'opposition, valant retrait de la décision implicite d'acceptation. En effet, en vertu de l'article 23 de la loi 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative soit pendant le délai de recours contentieux, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre, soit pendant un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a pas été mise en oeuvre, ou enfin pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé.

Par conséquent, le déclarant n'est assuré de pouvoir réaliser ses travaux qu'au terme de ces différents délais.

L'exposé des motifs indique que pour faire de la déclaration de travaux un véritable système déclaratif, il devrait être prévu que l'autorité administrative ne puisse plus, au terme du délai de deux mois à compter de la réception du dossier, revenir sur son accord tacite. Par conséquent, cela ferait sortir la déclaration de travaux du champ de l'article 23 précité de la loi du 12 avril 2000.

· En quatrième lieu, la partie législative du code de l'urbanisme devrait faire l'objet d'un « toilettage » nécessaire pour tenir compte de l'institution par l'administration de nouveaux formulaires de demande de permis de construire et autres autorisations ou déclarations d'utiliser le sol.

Plus de 200.000 permis de construire sont délivrés chaque année.

En juin dernier, le ministère de l'équipement a présenté les nouveaux formulaires administratifs pour les permis de construire et autres autorisations d'utiliser le sol. Le vocabulaire y est simplifié et le contenu complété afin de fournir aux demandeurs une information exhaustive sur leurs droits et obligations. Par exemple, l'ancien document n'indiquait pas l'obligation du volet paysager du permis de construire.

Quelques règles législatives du code de l'urbanisme pourraient être modifiées afin de tenir compte de ces nouveautés.

· En cinquième lieu, l'ordonnance devrait améliorer les conditions de contrôle de la conformité des travaux par rapport aux autorisations d'utiliser le sol.

L'article L. 460-2 du code de l'urbanisme dispose actuellement qu'« à leur achèvement, la conformité des travaux avec le permis de construire est constatée par un certificat ». En effet, dans un délai de trois mois à compter de la date de réception de la déclaration d'achèvement de travaux, ce certificat de conformité doit en principe être délivré par le maire au bénéficiaire du permis de construire. Ce document atteste de la conformité des travaux au permis de construire, au regard de l'implantation des constructions, leur destination, leur nature, leur aspect extérieur, leurs dimensions et l'aménagement de leurs abords (articles R. 460-3 et R. 460-4 du code de l'urbanisme).

En pratique, les conditions de contrôle de la conformité des travaux ne sont pas satisfaisantes, dans la mesure où, avant de remettre le certificat de conformité, les services des communes et des directions départementales de l'équipement n'ont pour la majorité des cas pas la possibilité d'exercer des contrôles effectifs. Ces derniers ne sont en réalité assurés que pour les opérations les plus sensibles ou les plus importantes.

Il convient par conséquent d'améliorer le dispositif actuel. Tout en maintenant la possibilité pour les communes ou l'Etat de contrôler les travaux effectués, l'ordonnance pourrait donner à la déclaration d'achèvement de travaux une valeur juridique plus importante qu'actuellement et la substituer au certificat de conformité des travaux. Cela limiterait considérablement la responsabilité des communes qui n'auraient plus à délivrer des certificats de conformité sans avoir pu, faute de temps ou de moyens, effectuer un seul contrôle.

Dans un communiqué de presse, M. Gilles de Robien, ministre de l'Equipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer, a indiqué que le projet d'ordonnance devrait être présenté avant la fin de l'année.

En outre, la gestion des recours contentieux contre les autorisations et déclarations d'utiliser le sol devrait être améliorée. En effet, les conditions et délais de recours sont tels que les bénéficiaires d'un permis de construire ne sont que très rarement assurés de ne plus voir leur autorisation attaquée devant le juge administratif. Ceci s'explique notamment par le fait qu'en vertu de l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme, le délai de recours ne court qu'à compter soit du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage du permis de construire sur le terrain, soit du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage du permis de construire en mairie, en retenant la date de l'affichage le plus tardif des deux. Par conséquent, dans la mesure où il est quasiment impossible de déterminer le jour précis de l'affichage du permis de construire sur le terrain et de prouver le respect du délai de deux mois, le délai de recours ne court pas et les permis de construire peuvent être attaqués plus de vingt ans après l'achèvement des travaux. Le gouvernement envisage par conséquent de modifier les dispositions réglementaires nécessaires afin de remettre en cause cet état du droit.

Votre commission est particulièrement sensible aux efforts d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, consacrés au rang d'objectifs de valeur constitutionnelle par décision du Conseil constitutionnel n° 99-421 DC du 16 décembre 1999, que souhaite faire le Gouvernement dans le domaine de l'urbanisme. La clarification de la structure du code de l'urbanisme apparaît en ce sens très souhaitable et positive.

Elle est également très favorable à la simplification des régimes des autorisations et déclarations d'utiliser le sol. Elle considère que les modifications des règles relatives au retrait des déclarations et autorisations d'utiliser le sol devraient être effectuées en coordination avec l'harmonisation des règles de retrait des actes administratifs prévue à l'article 2 du présent projet de loi74(*).

Votre commission vous propose toutefois d'adopter un amendement tendant à limiter le champ de l'habilitation à trois orientations : regrouper les procédures de délivrance des autorisations et déclarations d'utiliser le sol, simplifier leurs règles de délivrance et redéfinir les procédures de conformité des travaux. Il améliore également la rédaction de l'article.

L'ordonnance devrait être prise dans un délai de 12 mois à compter de la publication de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 13 ainsi modifié.

Article 14
Simplification de la procédure de conclusion des conventions
pour les logements locatifs privés bénéficiant des aides
de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat

Cet article vise à autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures facilitant la procédure de conclusion des conventions pour les logements locatifs privés bénéficiant des aides de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques75(*).

Article 15
Harmonisation de la définition des surfaces bâties

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à harmoniser la définition des surfaces bâties prises en compte pour l'application des législations de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques76(*).

Article 16
Simplification de dispositions dans le domaine forestier

Cet article a pour objet de rationaliser certaines procédures dans le domaine forestier en :

- étendant le champ des dispenses d'autorisation de coupes ;

- assouplissant les formalités de déclaration de coupes d'urgence ;

- allégeant les conditions mises à l'admission des propriétaires de forêts au bénéfice de certaines aides publiques et exonérations fiscales ;

- simplifiant la procédure d'élaboration du document départemental de gestion de l'espace agricole et forestier ;

- supprimant la procédure de confirmation des plans simples de gestion à la suite d'une mutation à droits réduits.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques77(*).

Article 17
Simplification de la législation
relative aux impositions de toute nature

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à adapter la législation relative aux impositions de toute nature pour :

- simplifier les démarches des usagers en allégeant, dématérialisant ou supprimant certaines formalités ;

- simplifier les modalités de recouvrement de l'impôt et les règles régissant le contentieux du recouvrement ;

- simplifier, harmoniser ou aménager le régime de pénalités prévu par le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- simplifier et améliorer les procédures de déclaration, de collecte et de contrôle de la taxe d'apprentissage ;

- améliorer les rapports entre l'administration fiscale et les contribuables ;

- permettre aux contribuables de se prévaloir de la doctrine et des décisions de l'administration relatives à l'assiette des droits et taxes perçus et recouvrés selon les modalités du code des douanes ;

- adapter les articles du code général des impôts dont les dispositions se réfèrent à d'autres législations ayant été modifiées ou abrogées.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Finances78(*).

Article 18
(art. 953 du code général des impôts)
Augmentation de la durée de validité
des passeports délivrés à titre exceptionnel

Cet article, d'application directe, tend à augmenter la durée de validité des passeports délivrés à titre exceptionnel.

Aux termes de l'article 953 (I, alinéa 1er) du code général des impôts, « la durée de validité des passeports ordinaires délivrés en France est fixée à dix ans ». Par dérogation à ces dispositions, le troisième alinéa du I du même article fixe à six mois la durée de validité « des passeports délivrés à titre exceptionnel et pour un motif d'urgence dûment justifié ou délivrés par une autorité qui n'est pas celle du lieu de résidence ou de domicile du demandeur ».

La validité des passeports ainsi délivrés aux personnes devant se rendre à l'étranger et ne disposant plus de leur document à la suite d'un vol ou d'une perte peut se révéler trop brève au regard des exigences de nombreux pays étrangers.

Certains États demandent en effet que les étrangers souhaitant se rendre sur leur territoire soient en possession d'un passeport valable pendant au moins six mois. D'autres conditionnent la délivrance d'un visa à la possession d'un passeport valable pendant encore six mois à compter de la date d'expiration du visa.

Les visas touristiques étant en général délivrés pour une durée de trois mois, un passeport d'une validité de six mois constitue alors un obstacle évident au séjour à l'étranger.

Le doublement de la durée de validité des passeports délivrés à titre exceptionnel et pour des motifs d'urgence est donc justifié par la nécessité de faciliter le déplacement des Français à l'étranger. Plus pertinente, la durée d'un an préserve la nécessité de renouveler le passeport dans un délai fixe après sa perte ou son vol.

Le Sénat avait adopté, lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2003, un amendement de notre collègue M. Robert del Picchia, qui prévoyait une disposition identique.

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n°2003-488 DC du 29 décembre 2003, a déclaré cet article additionnel contraire à la Constitution parce qu'étranger au domaine des lois de finances.

La reprise de cette mesure dans le présent projet de loi semble en revanche tout à fait pertinente, puisqu'il s'agit d'assouplir la durée de validité d'un document administratif dans le seul but de l'adapter à des nécessités pratiques.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 18 sans modification.

Article 19
Harmonisation des expressions
désignant les Français établis hors de France

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance à la définition de la notion de Français établis hors de France et à l'harmonisation des expressions désignant ces derniers dans la législation en vigueur.

Aux termes de l'article 24 de la Constitution du 4 octobre 1958 « les Français établis hors de France sont représentés au Sénat ». Mais dans les dispositions législatives dont l'application est étendue aux Français vivant à l'étranger, d'autres dénominations viennent perturber la désignation d'une catégorie aux contours pourtant bien déterminés.

S'il est fait mention des « Français établis hors de France » dans le code électoral (art. L. 12 et L. 14), dans le code de l'éducation (art. L. 214-12-1 et L. 822-1), dans le code du service national (art. L. 114-13), ou encore dans le code de la construction et de l'habitation (art. L. 371-2), l'expression « Français résidant à l'étranger » est utilisée dans d'autres codes (art. L. 193 du code de la famille et de l'aide sociale), voire dans d'autres articles des mêmes codes (art. L. 28 du code du service national).

On trouve par ailleurs l'expression « Français de l'étranger », où le critère de résidence est moins explicite, dans le code de l'éducation (art. L. 131-5 et L. 214-12-1) et le code de la sécurité sociale (art. L. 123-3, L. 153-1, L. 762-3...).

L'expression utilisée dans le texte constitutionnel, rapprochée des autres dénominations utilisées, apparaît comme la plus pertinente tant d'un point de vue juridique qu'administratif. Elle permet en effet d'embrasser les critères sur lesquels devrait se fonder la définition de la notion de Français établis hors de France qui figurera dans l'ordonnance : la nationalité et la résidence permanente située à l'étranger.

Aux termes de l'article 1er du décret n° 2003-1377 du 31 décembre 2003 relatif à l'inscription au registre des Français établis hors de France, l'expression Français établi hors de France désigne ainsi « toute personne de nationalité française ayant sa résidence habituelle dans une circonscription consulaire telle que prévue par la convention de Vienne du 24 avril 1963 sur les relations consulaires [...] et définie par arrêté du ministre des affaires étrangères. »

L'unification de la dénomination des Français établis hors de France, déjà commencée par le ministère des affaires étrangères en ce qui concerne les textes réglementaires, ne devrait connaître, s'agissant des textes législatifs, qu'une exception, relative à l'Assemblée des Français de l'étranger.

En effet, l'article 1er de la loi n° 2004-805 du 9 août 2004 relative au Conseil supérieur des Français de l'étranger, d'origine sénatoriale79(*), a substitué à cette appellation originelle celle d'Assemblée des Français de l'étranger.

En l'occurrence, l'expression « Français de l'étranger » paraît convenir davantage à la dénomination d'une assemblée représentative que l'expression « Français établis hors de France » dont la précision juridique est plus particulièrement indiquée pour les textes fixant un cadre à l'action administrative.

La dénomination du Conseil supérieur des Français de l'étranger qui n'a pas été modifiée au sein de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 sur le vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République, sera harmonisée à l'occasion d'une prochaine modification de ce texte par un projet de loi organique.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 19 sans modification.

CHAPITRE II
MESURES SPÉCIFIQUES DE SIMPLIFICATION
EN FAVEUR DES ENTREPRISES

A l'instar de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, le présent projet de loi comporte un important volet de simplification en faveur des entreprises. La complexité administrative présentant un coût majeur en matière économique, il convient en effet d'alléger les démarches qui pèsent inutilement sur les entreprises, personnes physiques ou morales, quelle que puisse être leur activité.

Article 20
Substitution de régimes déclaratifs à des régimes d'autorisation préalable Simplification ou suppression de régimes d'autorisation
ou de régimes déclaratifs

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre, par ordonnance, les mesures permettant de substituer des régimes déclaratifs à des régimes d'autorisation préalable et de simplifier ou supprimer certains régimes d'autorisation ou certains régimes déclaratifs. Les ordonnances prises par le Gouvernement sur le fondement de ces deux habilitations devront être prises dans un délai de douze mois, le délai d'habilitation de neuf mois, prévu par le texte initial, ayant été prolongé à la suite d'un amendement à l'article 61 du projet de loi, présenté par le rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale et sous-amendé par le Gouvernement.

Cette habilitation reprend partiellement les dispositions de l'article 22 de la loi précitée du 2 juillet 2003 dont l'habilitation n'a pas été utilisée par le Gouvernement dans les délais prévus.

 La loi du 2 juillet 2003 avait en effet autorisé le Gouvernement à substituer, par ordonnance, des régimes de déclaration préalable à certains régimes d'autorisation préalable. Toutefois, afin de prévenir les abus et de maintenir une forme de contrôle, la disposition autorisait également le Gouvernement à prévoir, en contrepartie, des possibilités d'opposition, des modalités de contrôle a posteriori ainsi que des sanctions qui s'appliqueraient en cas de fausse déclaration. La première phrase du premier paragraphe (I) de l'article 20 du présent projet de loi reprend intégralement ce dispositif.

Votre commission avait salué cette mesure, lors de la précédente loi d'habilitation, estimant qu'elle était indispensable et attendue, dans la mesure où il n'est guère pertinent de maintenir plusieurs régimes d'autorisation préalable dont l'utilité n'est plus démontrée. Elle s'était également félicitée que des mécanismes d'opposition, de contrôle et, le cas échéant, de sanction soient également prévus, afin de prévenir ou de sanctionner toute tentative de fraude de la part d'entreprises mal intentionnées.80(*)

Aujourd'hui, même si elle peut regretter que cette disposition n'ait pas pu être mise à profit dans le cadre de l'habilitation précédente pour des raisons de délais, elle approuve la reprise de ce dispositif dans le présent projet de loi. En effet, selon les informations communiquées à votre rapporteur, un premier recensement en 1997 avait fait apparaître l'existence d'environ 4.200 régimes d'autorisation préalable. Les services du secrétariat d'Etat à la Réforme de l'Etat et de la Délégation aux usagers et aux simplifications administratives (DUSA) ont d'ores et déjà entamé un nouveau recensement destiné à déterminer les procédures pouvant faire l'objet d'une substitution par des procédures de déclaration préalable.

La nécessité pratique d'une suppression de régimes d'autorisation obsolètes qui pénalisent l'activité des acteurs économiques pourrait d'ailleurs se doubler prochainement d'une nécessité de nature juridique. Afin de supprimer les obstacles au libre établissement des entreprises dans le marché intérieur, une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 13 janvier 2004 relative aux services dans le marché intérieur prévoit une harmonisation des procédures d'autorisation dans les différents Etats membres de l'Union européenne. Son article 9 énonce ainsi que les Etats membres ne peuvent subordonner l'accès à une activité de service ainsi que son exercice qu'à la triple condition que :

- le régime d'autorisation ne soit pas « discriminatoire quant au prestataire visé » ;

- la nécessité d'un tel régime soit « objectivement justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général » ;

- l'objectif poursuivi ne puisse pas « être réalisé par une mesure moins contraignante, notamment parce qu'un contrôle a posteriori interviendrait trop tardivement pour avoir une efficacité réelle ».

La présente habilitation devrait ainsi permettre de simplifier les démarches imposées aux entreprises notamment par le code général des impôts, le code de commerce, le code de l'artisanat ainsi que le code des douanes. Elle permettrait ainsi de poursuivre les efforts ponctuels de substitution des régimes d'autorisation existants, à l'instar de la substitution d'un régime déclaratif au régime d'autorisation prévu pour l'exploitation de réseaux cablés distribuant des services de radio et de télévision, opérée par l'article 65 de la récente loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.

 En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du rapporteur de sa commission des Lois, M. Etienne Blanc, tendant à insérer le I du présent article afin d'autoriser le Gouvernement à intervenir dans le domaine de la loi pour « supprimer ou simplifier certains régimes d'autorisation et pour supprimer certains régimes déclaratifs ».

Cet amendement a donc élargi la portée de l'habilitation conférée au Gouvernement, dans la mesure où il ne s'agit plus d'une substitution de régimes, mais d'une suppression pure et simple tant de régimes d'autorisation que de régimes de déclaration préalable, sans que soient prévus des mécanismes de contrôle a posteriori. Cependant, compte tenu de sa place au sein du titre II du projet de loi, cette habilitation ne saurait s'appliquer qu'aux régimes d'autorisation ou de déclaration auxquels sont soumises les entreprises, quelle que soit leur forme juridique. Aussi, si elle permet de supprimer certains régimes applicables aux entrepreneurs personnes physiques, cette habilitation n'autorise pas la suppression des régimes applicables aux simples particuliers n'exerçant pas d'activités économiques.

Votre commission estime que certains régimes d'autorisation ou de déclaration préalable sont effectivement inutilement contraignants et qu'il convient d'assurer une « remise à plat » des différents dispositifs existants. Il s'agirait donc, de façon transversale, de poursuivre les démarches ponctuelles de suppression des autorisations ou déclarations préalables inutiles, comme l'a fait l'article 5 de la loi précitée du 9 juillet 2004 concernant l'autorisation d'établissement et d'exploitation de réseaux indépendants filaires.

Les suppressions permises par la présente habilitation pourraient intervenir dans des domaines très différents. Ainsi, selon les informations communiquées à votre rapporteur, pourraient être notamment supprimées :

- l'autorisation exigée pour permettre l'indemnisation des sociétés immobilières d'investissement, prévue par la loi n° 63-254 du 15 mars 1963 portant réforme de l'enregistrement, du timbre et de la fiscalité immobilière ;

- l'autorisation individuelle d'exercice, donnée par le ministre de la Santé, pour les médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes après vérification de leurs compétences professionnelles, prévue par l'article L. 4111-2 du code de la santé publique et l'article 60 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle ;

- l'autorisation de création des syndicats interhospitaliers, donnée par le directeur de l'Agence régionale de l'hospitalisation, prévue par l'article L. 6132-2 du code de la santé publique ;

- la déclaration des ouvertures et clôtures de comptes, prévue à l'article 1649 A du code général des impôts, à laquelle sont soumises les administrations publiques, les établissements ou organismes soumis au contrôle de l'autorité administrative et toutes personnes qui, à titre habituel, reçoivent en dépôt des valeurs mobilières ;

 Afin de supprimer une disposition désormais frappée de caducité, le second paragraphe (II) de cet article abroge l'article 22 de la loi précitée du 2 juillet 2003 dont le contenu est repris intégralement dans le présent article.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 20 sans modification.

Article 21
Simplification et adaptation du régime juridique applicable aux commerçants, dirigeants d'entreprises et commissaires aux comptes

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à intervenir par ordonnance dans le domaine de la loi afin de simplifier le régime juridique actuellement applicable aux commerçants, dirigeants d'entreprises et commissaires aux comptes. Les ordonnances prises sur le fondement de cet article devront intervenir, aux termes de l'article 61, dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la loi.

1. L'adaptation et la codification des dispositions législatives instituant des interdictions d'entreprendre une profession commerciale ou industrielle ou de gérer une entreprise commerciale ou industrielle

Aux termes du 1° du présent article, le Gouvernement serait autorisé à intervenir, par ordonnance, dans le domaine de la loi, afin d'adapter et de codifier dans le code de commerce les dispositions législatives instituant des interdictions d'entreprendre une profession commerciale ou industrielle ou de gérer une entreprise commerciale ou industrielle.

En l'état actuel du droit, la condamnation d'une personne physique à certaines peines pour des infractions limitativement énumérées emporte automatiquement l'interdiction pour celle-ci d'entreprendre une profession commerciale ou industrielle, ainsi que de gérer ou diriger une entreprise commerciale ou industrielle.

Ces dispositions résultent, pour l'essentiel de deux textes - le décret-loi du 8 août 1935 portant application aux gérants et administrateurs de sociétés de la législation de la faillite et de la banqueroute et instituant l'interdiction et la déchéance du droit de gérer et d'administrer une société, et la loi n° 47-1635 du 30 août 1947 relative à l'assainissement des professions commerciales et industrielles- qui n'apparaissent aujourd'hui plus conformes aux impératifs constitutionnels.

Or, l'automaticité de l'interdiction d'exercice prévue par ces textes se heurte au principe de la nécessité des peines, découlant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen,81(*) dans la mesure où le juge n'intervient pas pour apprécier, au cas par cas, s'il convient, compte tenu des faits de l'espèce, d'appliquer l'interdiction à la personne concernée.82(*) Le caractère illimité de cette interdiction, qui s'applique à toute personne ayant fait, dans le passé, l'objet d'une condamnation pour certaines infractions pénales apparaît également contraire à ce principe. De même, ce dispositif peut être considéré comme contraire à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme qui impose au juge de « décider » sur des contestations portant sur des droits et obligations civils.

Afin de modifier l'état du droit, le Gouvernement serait donc amené, grâce à la présente habilitation, à supprimer par ordonnance l'automaticité de l'interdiction et à prévoir une interdiction limitée dans le temps. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le délai qui pourrait être retenu pourrait être un délai de dix ans à compter de la condamnation devenue définitive qui constitue la cause de l'interdiction, à l'instar de ce qu'a prévu l'ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004 relative à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce.

L'habilitation donnée au Gouvernement lui permettrait également d'abroger des dispositions devenues sans objet et, conformément à l'article 3 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, d'apporter aux textes en vigueur les modifications nécessaires pour assurer la hiérarchie des normes, améliorer la cohérence rédactionnelle des textes rassemblés et harmoniser l'état du droit.

Ainsi modifiées, ces dispositions devraient être codifiées dans le code de commerce, conformément au 1° du présent article, cette codification apparaissant donc comme une codification « à droit non constant ».

Votre commission est favorable à cette démarche de codification qui permettra une clarification et une adaptation des dispositions actuellement contraires aux principes constitutionnels. Elle vous soumet cependant un amendement tendant à prévoir la codification à droit non constant non des seules interdictions d'entreprendre, mais de l'ensemble des incapacités d'exercer une activité dans le domaine industriel ou commercial, dans la mesure où certaines interdictions de gérer, d'administrer, ou de diriger une entreprise ou une société apparaissent également contraires aux principes constitutionnels susvisés.

2. La modification et la codification des dispositions législatives relatives aux commissaires aux comptes

Selon le 2° du présent article, le Gouvernement serait autorisé à prendre par ordonnance des mesures permettant d'opérer la refonte des dispositions du code de commerce relatives aux commissaires aux comptes ainsi que la codification des dispositions régissant cette profession et figurant actuellement dans des textes épars.

La sécurité financière des investisseurs et de l'ensemble de l'économie impose que les comptes des entités ayant une activité économique -et, notamment, les sociétés faisant l'objet d'une cotation boursière- soient soumises à un contrôle strict et permanent de la sincérité de leurs comptes. Depuis le début des années 80, l'institution du contrôle des comptes a été considérablement renforcée et a été imposée à un nombre sans cesse croissant de personnes juridiques. Tirant les conséquences des scandales ayant surgi dernièrement outre-atlantique, la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière est, en particulier, l'aboutissement de cette volonté de sécurisation de la sincérité des comptes sociaux. Pourtant, malgré cette évolution, l'état du droit n'apparaît pas satisfaisant.

En premier lieu, le contrôle des comptes est imposé par des textes épars et divers. S'il est prévu, dans la majeure partie des cas, par le code de commerce, il figure également dans des lois non encore codifiées ou dans d'autres codes tels que le code monétaire et financier dont les articles L. 511-38 et L. 511-39 définissent les modalités du contrôle des comptes dans les établissements de crédit et les entreprises d'investissement. Il pourrait donc être envisagé de reproduire dans le code de commerce ces dispositions, afin que les textes sur le commissariat aux comptes figurent dans leur intégralité dans le code de commerce.

La recodification du code de commerce, opérée par l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de commerce n'a par ailleurs pas permis de rationaliser les dispositions relatives au contrôle des comptes. Ainsi, ces dernières sont pour partie contenues dans le livre II du code de commerce, relative aux sociétés commerciales, et pour partie intégrées dans le livre VIII qui, intéressant les « professions réglementées », comprend les dispositions régissant la profession de commissaire aux comptes. Dans le souci de clarté et d'intelligibilité qui doit animer le législateur, il convient donc de regrouper l'ensemble de ces dispositions au titre VIII du code de commerce.

Ainsi, pourraient être intégrées au sein du titre VIII les dispositions du titre II relatives à la désignation et à la récusation des commissaires aux comptes83(*), aux missions dévolues aux commissaires aux comptes84(*), ainsi qu'aux actions en responsabilité contre ceux-ci dans le cadre des sociétés anonymes85(*). Les dispositions similaires prévues par le code de commerce dans le cadre des sociétés à responsabilité limitée86(*) ou d'autres sociétés commerciales seraient également transférées sous ce titre.

Par ailleurs, l'obligation du commissariat aux comptes, qui s'impose tant aux sociétés commerciales87(*) et groupements d'intérêt économique88(*) qu'aux associations89(*) et aux entreprises publiques90(*), varie en fonction de seuils de chiffre d'affaires, de bilan et d'effectifs différents pour chaque entité. Dans un souci de simplification du droit, il conviendrait donc d'harmoniser les régimes actuellement applicables, en instituant un seul corpus juridique régissant le contrôle des comptes dans l'ensemble des entités juridiques qui y sont actuellement soumises.

En second lieu, il est nécessaire de renforcer la formation des commissaires aux comptes, qui peut apparaître actuellement insuffisante compte tenu de l'évolution de la nature et de la place du contrôle des comptes des entreprises, en particulier depuis les scandales financiers intervenus ces dernières années.

L'amélioration de la formation des membres de cette profession pourrait ainsi conduire à la création d'un diplôme à part entière de commissaire aux comptes. En effet, à l'heure actuelle, l'exercice de cette profession est conditionné par l'inscription sur la liste des commissaires aux comptes, ouverte soit aux personnes ayant subi avec succès les épreuves de l'examen d'aptitude aux fonctions de commissaire aux comptes, soit aux personnes titulaires d'un diplôme d'expertise comptable, d'un brevet d'expert-comptable ou d'un diplôme d'expert comptable91(*).

De même, il serait envisagé d'organiser des centres chargés d'assurer la formation des commissaires aux comptes. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ces centres pourraient être organisés avec la participation des chambres de commerce et d'industrie et être partiellement financés par une partie de la taxe d'apprentissage versée par les cabinets des commissaires aux comptes.

Ces réformes conduiraient à modifier les dispositions des articles L. 822-1 à L. 822-5 du code de commerce, récemment introduits par la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière.

La présente disposition, en permettant au Gouvernement de procéder à la refonte des livres II et VIII du code de commerce, en codifiant les dispositions figurant dans d'autres projets de loi en améliorant la formation, en harmonisant l'état du droit et en abrogeant les dispositions devenues sans objet devrait ainsi conduire à simplifier le régime juridique applicable au commissariat aux comptes. L'habilitation donnée au Gouvernement lui permettrait également, conformément à l'article 3 de la loi du 12 avril 2000 précitée, d'apporter aux textes en vigueur les modifications nécessaires pour assurer la hiérarchie des normes, améliorer la cohérence rédactionnelle des textes rassemblés et harmoniser l'état du droit.

Votre commission estime cependant que le présent projet de loi doit également permettre de clarifier un certain nombre de difficultés qu'a fait naître la mise en oeuvre récente de la loi du 1er août 2003 de sécurité financière.

En matière de contrôle des comptes, l'un des apports majeurs de la réforme de 2003 a été la création d'un Haut conseil du commissariat aux comptes, régi par les articles L. 821-3 et suivants du code de commerce et les dispositions du décret n° 2003-1121 du 25 novembre 2003 portant modification du décret n° 69-810 du 12 août 1969 relatif à l'organisation de la profession et au statut professionnel des commissaires aux comptes de sociétés et relatif au Haut Conseil du commissariat aux comptes. Or, le fonctionnement de cet organe nouvellement créé a montré la nécessité de retoucher le dispositif législatif existant.

En effet, le Haut conseil a pour mission d'assurer le suivi des contrôles sur les commissaires aux comptes, ce suivi s'effectuant en pratique sur la base de fiches de contrôle transmises par la Compagnie nationale des commissaires aux comptes. Mais ce suivi est exercé par le Conseil sans que le secret professionnel soit levé à son égard, ce qui limite l'ampleur de son action. En outre, les fiches de contrôle n'ont pas un caractère anonyme, ce qui empêche le Haut conseil de statuer par la suite, le cas échéant, en qualité d'instance disciplinaire sur l'un des dossiers examinés. En conséquence, il serait nécessaire de modifier le code de commerce afin de lever le secret professionnel devant le Haut conseil tout en instaurant une procédure d'anonymisation des dossiers.

Par ailleurs, aucune disposition législative ne permet actuellement au Haut conseil du commissariat aux comptes de conclure des conventions de coopération internationale avec les organes homologues à l'étranger. Or, l'intérêt d'une coopération entre les organes nationaux chargés de surveiller le contrôle des comptes n'est plus à démontrer, compte tenu du caractère transnational croissant des entreprises et de leurs transactions. Au surplus, cette possibilité devrait devenir prochainement une exigence communautaire, dès lors que devrait être inscrite dans la 8ème directive sur le contrôle des comptes, actuellement en cours de révision, la faculté pour les organes nationaux de négocier et conclure des accords de coopération internationale92(*).

Enfin, certaines améliorations au fonctionnement quotidien du Haut conseil, telles que les conditions de suppléance de son président, lorsque ce dernier est empêché, pourraient également être apportées.

En conséquence, votre commission vous soumet un premier amendement tendant à autoriser le Gouvernement à prendre, par ordonnance, les mesures nécessaires afin de clarifier les points susvisés.

3. La suppression des obligations déclaratives auxquelles sont soumis les commerçants concernant leur régime matrimonial

Le dernier alinéa de l'article 1394 du code civil impose au commerçant marié de faire publier au registre du commerce et des sociétés « le contrat de mariage et ses modifications », « à son initiative et sous sa seule responsabilité, dans les conditions et sous les sanctions prévues par les dispositions législatives et réglementaires relatives au registre du commerce et des sociétés ». Les conditions de cette inscription et les mentions obligatoires sont précisées par l'article 8 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce et des sociétés93(*).

Cette obligation, modifiée de manière marginale par la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, a pour but d'assurer l'information la plus large des tiers sur l'état du patrimoine des personnes physiques ayant la qualité de commerçant, état largement conditionné par le régime matrimonial choisi.

De fait, pour un créancier, il n'est pas neutre de savoir si son débiteur commerçant est soumis à un régime de communauté de bien réduite aux acquêts, un régime de participation aux acquêts, un régime de communauté universelle ou un régime de séparation des biens, car l'importance du patrimoine de son débiteur varie en fonction de ces éléments. Toutefois, la pertinence de cette obligation peut être discutée, dans la mesure où elle n'assure pas une véritable sécurité juridique pour le créancier du commerçant.

En effet, compte tenu de la complexité des régimes matrimoniaux, en particulier lorsque des éléments de droit international privé interviennent en raison de la nationalité étrangère des époux ou du lieu de leur mariage, les déclarations des commerçants peuvent s'avérer inexactes. Or, les tiers ne peuvent se prévaloir d'une inexactitude dans la mention du régime matrimonial au registre du commerce et des sociétés. Ainsi, par exemple, le conjoint d'un commerçant peut se prévaloir d'un changement de son statut matrimonial à l'encontre des tiers, quand bien même cette modification n'aurait pas été publiée au registre du commerce et des sociétés.94(*) Les tiers peuvent donc être trompés par l'inscription, ce qui est contraire à l'objectif de sécurité recherché par le législateur.

De plus, le fait que seuls les commerçants soient soumis à cette mesure de publicité légale, alors qu'elle n'est pas imposée aux artisans ou aux professionnels libéraux, crée une rupture d'égalité dépourvue de justification.

Le 3° de cet article tend, en conséquence, à habiliter le Gouvernement à supprimer purement et simplement, par ordonnance, cette obligation, ce qui conduirait à modifier, outre l'article 1394, plusieurs autres articles du code civil.

Votre commission vous soumet un dernier amendement de coordination et vous propose d'adopter l'article 21 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 21
(art. 1386-2, 1386-7 et 1386-12 du code civil)
Aménagement du régime de responsabilité
du fait des produits défectueux

Votre commission vous propose un amendement tendant à insérer un article additionnel pour modifier trois dispositions du code civil relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux, à la suite d'un arrêt en constatation de manquement, rendu par la Cour de justice des Communautés européennes le 25 avril 200295(*).

Le régime de responsabilité pour les dommages causés aux personnes et aux biens par des produits défectueux est organisé, au niveau communautaire, par la directive 85/374/CEE du 7 juillet 1985 instituant la responsabilité du producteur du fait des produits défectueux. Ce texte a eu pour ambition de donner un cadre européen unifié à la protection des victimes de produits comportant des défauts de nature à leur causer des dommages.

Treize ans après son adoption, la directive a fait l'objet d'une transposition au sein du code civil par la loi n° 98-389 du 19 mai 1998 relative à la responsabilité des produits défectueux96(*). Cette loi, modifiant à cet effet le code civil, a entendu simplifier certains dispositifs créés par la directive tout en assurant, autant que possible, une protection optimale du consommateur.

Par son arrêt en date du 25 avril 2002, la Cour de justice des Communautés européennes, saisie par la Commission d'un recours en manquement d'État, a condamné la France pour transposition incorrecte des dispositions de la directive 85/374 sur la responsabilité du fait des produits défectueux. Elle a jugé, à cette occasion, que les États membres ne disposent pas de la possibilité de s'écarter de cette directive « d'harmonisation maximale » à l'occasion de sa transposition, même dans le sens d'une amélioration du niveau de protection des consommateurs victimes.

La non conformité de la loi précitée aux dispositions de la directive 85/374/CEE, relevée par la juridiction communautaire, porte sur trois points, de nature essentiellement technique :

- l'indemnisation, prévue par l'article 1386-2 du code civil, des dommages aux biens inférieurs à 500 €, alors que l'article 9, premier alinéa, b de la directive 85/374 prévoit leur exclusion ;

- l'assimilation, dans tous les cas, du distributeur au producteur d'un produit défectueux, pour la mise en jeu de l'action en réparation des dommages, opérée par l'article 1386-7 du code civil, alors que le paragraphe 3 de l'article 3 de la directive organise une hiérarchie en vertu de laquelle le distributeur n'est mis en cause subsidiairement que si le producteur est inconnu ;

- l'obligation, mise à la charge du producteur par le second alinéa de l'article 1386-12 du code civil, de prouver qu'il a pris les dispositions propres à prévenir les conséquences d'un produit défectueux, afin de pouvoir se prévaloir des causes d'exonération prévues à l'article 7 d et e de la directive, alors que la directive ne prévoit pas une telle condition.

Conformément au droit communautaire, les Etats membres doivent, dans des délais raisonnables, prendre les mesures qu'impose le respect de la chose jugée par la Cour de justice. Faute d'une correction rapide des dispositions issues de la loi précitée du 19 mai 1998, la France pourrait être condamnée par la juridiction communautaire au paiement d'une forte astreinte journalière. Il y a donc lieu, en conséquence, de modifier les articles 1386-2, 1386-7 et 1386-12 du code civil pour assurer une transposition plus conforme de la directive précitée du 12 juillet 1985.

Votre commission vous propose donc, par amendement, d'insérer un article additionnel afin de :

- préciser qu'un décret simple fixera le montant des dommages aux biens en dessous duquel une action en responsabilité sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux ne pourra être intentée. La somme sera fixée à 500 € par le décret ;

- prévoir que le vendeur ou le loueur du produit défectueux ne peut voir sa responsabilité mise en cause que si le producteur est inconnu ;

- supprimer l'exigence imposée au producteur de prouver qu'il a pris les dispositions propres à prévenir les conséquences d'un produit défectueux.

Ces dispositions s'appliquent aux instances en cours, sans affecter cependant les décisions passées en force de chose jugée. Leur champ d'application est étendu à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, aux îles Wallis et Futuna et aux Terres australes et antarctiques françaises, conformément au champ d'application initial de la loi précitée du 19 mai 1998.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 22
Suppression des procédures de paraphe
et de cotation effectuées par le juge d'instance

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à intervenir, par ordonnance, dans le domaine de la loi afin de supprimer les procédures de paraphe et de cotation effectuées par le juge d'instance sur divers documents. En application du premier alinéa de l'article 61 du présent projet de loi, les ordonnances prises sur le fondement de cette habilitation devront intervenir dans un délai de six mois suivant la publication de la loi.

Dans le cadre de la mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice, votre commission avait souligné la nécessité de « recentrer le juge du siège sur ses missions », en évoquant « la suppression de la cotation et des paraphes obligatoires de certains registres (livres, registres et répertoire des officiers de l'état civil, des conservateurs des hypothèques, des notaires....) » 97(*). Suivant cette recommandation, ce type de formalité, mise à la charge du juge du tribunal de grande instance, dans le cadre des droits d'enregistrement, a ainsi été récemment supprimé par l'article 22 de l'ordonnance n° 2004-281 du 25 mars 2004 relative à des mesures de simplification en matière fiscale. La présente habilitation permet de poursuivre cette démarche en l'appliquant au juge d'instance.

Dans le cadre de ses attributions gracieuses, le juge d'instance est en effet appelé à viser, coter et parapher des registres de natures aussi diverses que le livre de paie des employeurs, les registres des procès-verbaux de délibérations de sociétés commerciales, les registres des conservateurs des hypothèques ou des sociétés coopératives entre médecins.

Cette procédure est actuellement prévue par de nombreux textes de nature réglementaire, comme par exemple, en matière de cotation des procès-verbaux d'assemblées d'associés ou d'actionnaires de sociétés commerciales.98(*) La suppression de ces procédures et leur remplacement pourront donc intervenir par décret. Mais certaines dispositions législatives prévoient également cette formalité, destinée à éviter toute possibilité de fraude par substitution de feuillets.

En particulier, l'article 2201 du code civil dispose, dans son premier alinéa, que le registre du conservateur des hypothèques « est coté ou paraphé à chaque page, par première et dernière, par le juge d'instance dans le ressort duquel le bureau [des hypothèques] est établi. » Toutefois, cette exigence a été assouplie par l'article 14 de la loi n° 98-261 du 6 avril 1998 portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière qui a prévu qu'un « document informatique écrit peut tenir lieu de registre ; dans ce cas, il doit être identifié, numéroté et daté dès son établissement par des moyens offrant toute garantie en matière de preuve ». L'habilitation pourrait, sur ce point, conduire à supprimer purement et simplement l'obligation de cotation et de paraphe pour ne conserver qu'un registre de nature informatique.

La procédure de cotation et de paraphe a été édictée dans le souci d'assurer l'intégrité physique de registres afin de renforcer leur valeur probante. Cet objectif doit toujours être poursuivi, notamment pour les registres qui peuvent présenter une importance particulière, tels ceux relatant la tenue des assemblées d'associés ou d'actionnaires, ou concernant le registre du conservateur des hypothèques.

En conséquence, l'habilitation prévoit le remplacement de certaines des procédures de cotation et de paraphe par « d'autres formalités ». Cette expression permettrait au Gouvernement de prévoir le recours à un procédé technique assurant que les documents n'ont subi aucune altération comme, par exemple, la suppression d'un feuillet. Si cette mesure peut apparaître très technique, elle n'en modifie pas moins le régime de la preuve en matière civile, qui relève du seul législateur. Elle impose donc une habilitation à intervenir dans le domaine de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 22 sans modification.

Article 23
Modification de dispositions relatives à l'architecture

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à modifier la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture afin de :

- transposer la directive communautaire 2001/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2001 modifiant les directives 89/48/CEE et 92/51/CEE du Conseil concernant le système général de reconnaissance des qualifications professionnelles, et les directives 77/452/CEE, 77/453/CEE, 78/686/CEE, 78/687/CEE, 78/1026/CEE, 78/1027/CEE, 80/154/CEE, 80/155/CEE, 85/384/CEE, 85/432/CEE, 85/433/CEE et 93/16/CEE du Conseil concernant les professions d'infirmier responsable des soins généraux, de praticien de l'art dentaire, de vétérinaire, de sage-femme, d'architecte, de pharmacien et de médecin, en tant qu'elle a trait à la profession d'architecte ;

- aménager les procédures relatives, d'une part, au fonctionnement de l'ordre des architectes et, d'autre part, aux élections ordinales et aux mesures disciplinaires applicables aux architectes ;

- régler, en tenant compte des situations existantes, le cas des professionnels de la maîtrise d'oeuvre qui ont déposé une demande de reconnaissance de qualification professionnelle et sur laquelle il n'a pas été statué définitivement ;

- tenir compte des conséquences, sur les conditions d'accès et d'exercice de la profession d'architecte, de l'instauration dans l'enseignement de l'architecture d'un dispositif fondé sur les trois grades de licence, master et doctorat.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires culturelles99(*).

Article 24
Modification des dispositions relatives au registre public
de la cinématographie et de l'audiovisuel

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à modifier les dispositions relatives au registre public de la cinématographie et de l'audiovisuel, afin :

- d'alléger les formalités demandées aux usagers ;

- supprimer les dispositions devenues inutiles

- élargir le champ de la publicité ;

- instituer un registre des options prises pour l'achat du droit d'adaptation d'oeuvres.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires culturelles100(*).

Article 25
Simplification du régime de l'assurance
en matière de construction et de responsabilité des sous-traitants

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires afin de simplifier le régime de l'assurance en matière de construction ainsi que celui applicable à la responsabilité des sous-traitants. En application de l'article 61 du présent projet de loi, le délai imparti au Gouvernement est limité à six mois à compter de la publication de la loi.

Il s'agit, pour l'essentiel, de pallier certaines difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre des dispositions de la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l'assurance dans le domaine de la construction.

1. La modification du champ d'application de l'obligation d'assurance dans le domaine de la construction

Le 1° du présent article tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures permettant de « préciser le champ d'application de l'obligation d'assurance dans le domaine de la construction ».

Le constructeur d'un ouvrage immobilier est, en vertu des articles 1792 et suivants du code civil, soumis à une présomption de responsabilité à l'égard des dommages « qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination » 101(*). Afin de couvrir cette responsabilité, et dans un souci de protection des victimes de dommages de construction, une obligation d'assurance est instituée par les articles L. 241-1 et suivants du code des assurances, la France étant d'ailleurs le seul pays européen à avoir institué un tel dispositif.

L'obligation d'assurance contre les dommages de construction s'applique, aux termes du code des assurances, aux « travaux de bâtiment ». Toutefois, cette notion n'a été explicitée par aucun texte législatif. Au surplus, un arrêté du ministre de l'Economie du 17 novembre 1978 ayant pour objet de préciser le champ de l'obligation d'assurance et de définir cette notion a fait l'objet d'une annulation par le Conseil d'Etat pour incompétence102(*).

Cette situation a conduit à des difficultés d'interprétation dans le cadre de contentieux juridictionnels, en particulier au regard de la notion d'« ouvrage », retenue par les dispositions du code civil. En effet, il a été jugé que l'assurance obligatoire devait s'appliquer à tous les ouvrages dont la construction « fait appel aux techniques de travaux du bâtiment »103(*), ce qui implique une extension notable du champ de l'obligation, allant jusqu'à soumettre à l'obligation d'assurance des éléments tout à fait accessoires tels que les clôtures104(*). Ce faisant, la jurisprudence a manifestement confondu les régimes de l'assurance obligatoire et de la responsabilité décennale, pourtant bien distincts juridiquement.

Une modification du champ -imprécis- de l'obligation d'assurance s'impose donc. Elle est d'ailleurs souhaitée de longue date tant par les entrepreneurs que par les spécialistes du droit immobilier. Un groupe de travail, constitué autour du professeur Hugues Périnet-Marquet, avait ainsi émis des propositions de réforme, dans un rapport remis au ministre de l'Equipement, le 18 décembre 1997. Ces propositions avaient été partiellement reprises dans le cadre du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, déposé au Sénat le 30 mai 2001105(*), mais qui n'a jamais été inscrit à l'ordre du jour parlementaire.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, l'ordonnance prise en application de cet article devrait reprendre l'essentiel du dispositif prévu par l'article 23 du projet de loi précité, à savoir :

- la modification des articles 1792-2 et suivants du code civil, afin de clarifier la notion de « bâtiment » et celle d'« élément d'équipement » ;

- la modification des articles L. 241-1 et suivants du code des assurances, afin d'exclure de l'obligation d'assurance les ouvrages existants ainsi que certains ouvrages limitativement énumérés, tels que les ouvrages lacustres ainsi que les ouvrages de transport ou de production.

En tout état de cause, la présente habilitation permettrait de modifier à la fois le champ de l'assurance pesant sur les constructeurs (assurance-construction) et celui de l'assurance pesant sur le maître de l'ouvrage (assurance-dommage). En effet, bien que juridiquement distincts, ces deux régimes sont complémentaires et il convient donc de pouvoir les modifier ensemble, dans le cadre de la réforme envisagée. Ces modifications seront ainsi de nature à renforcer la sécurité juridique de l'ensemble des intervenants aux travaux de construction.

2. L'institution d'une obligation de proposer une assurance facultative relative à des dommages causés à des ouvrages existants

Le 2° de cet article tend à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures tendant à instituer une obligation de proposer une assurance facultative relative à des dommages causés à des ouvrages existants.

La soumission à l'obligation d'assurance des travaux effectués sur des ouvrages existants soulève, en pratique, certaines difficultés. On a ainsi pu souligner que « l'évolution de la jurisprudence s'avère tortueuse et souvent déroutante, et ne répond pas toujours à la sécurité juridique indispensable à la prospérité des affaires »106(*).Il n'est en effet pas toujours aisé de déterminer le régime de responsabilité applicable et l'existence ou l'absence d'une obligation d'assurance lorsque des travaux nouveaux causent des dommages à des ouvrages existants.

L'exécution de certains travaux d'amélioration, d'entretien, de réfection, de restauration ou de réhabilitation de constructions ou d'ouvrages préexistants -qualifiés de travaux neufs sur existants- peuvent constituer des travaux de bâtiment et, dès lors, être soumis à la responsabilité décennale ainsi qu'au régime de l'assurance obligatoire. En revanche, des travaux neufs peuvent causer des dommages à des constructions ou ouvrages antérieurs à l'ouverture du chantier, sur, dans ou sous lesquels ils sont exécutés. Ces dommages ne relèvent pas de la garantie décennale, mais de la responsabilité de droit commun et ne sont en conséquence pas garantis par le régime d'assurance obligatoire.

Dans ces conditions, dans un souci de protection, il serait souhaitable de permettre une couverture par le biais d'une assurance facultative afin de permettre la réparation des dommages qui pourraient survenir au cours de ces travaux. Une modification à cette fin de l'état du droit avait d'ailleurs été évoquée par le COPAL, comité pour l'application de la loi du 4 janvier 1978, siégeant auprès du Premier ministre et composé de professionnels de la construction et du droit de la construction.

En effet, en pratique, ce type de risque est difficilement couvert par une assurance idoine. L'habilitation devrait donc permettre de faire figurer dans le code des assurances, ainsi que dans le code de la construction et de l'habitation -code suiveur- une disposition imposant aux assureurs de proposer une assurance couvrant les dommages sur des ouvrages existants, susceptibles de résulter de travaux nouveaux, soumis à l'obligation d'assurance. Ainsi, seul le bénéficiaire de l'assurance pourra refuser de souscrire l'assurance, après examen de sa situation particulière et acceptation des risques éventuels.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le contenu du contrat d'assurance couvrant ce type de dommage devrait être défini dans le cadre d'une convention conclue entre l'Etat, les représentants des constructeurs et les représentants des sociétés d'assurance. A défaut de signature de cette convention par les différents partenaires ou si celle-ci était dénoncée, il reviendrait alors au pouvoir réglementaire de fixer le contenu de ce contrat, après avis du conseil national de l'assurance et de la commission technique de l'assurance-construction. Ce système reproduirait donc le procédé retenu par l'article 98 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

3. L'alignement du délai d'action en responsabilité contre les sous-traitants sur celui applicable aux actions à l'encontre des constructeurs

Le 3° de cet article autoriserait le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à l'alignement du délai d'action en responsabilité contre les sous-traitants sur celui applicable aux actions à l'encontre des constructeurs.

La sous-traitance en matière de construction est largement répandue, l'entrepreneur principal faisant souvent appel à d'autres entreprises pour effectuer certaines catégories de travaux sur l'ouvrage concerné. Or, la responsabilité de l'entrepreneur principal et du sous-traitant diffèrent juridiquement.

L'entrepreneur principal est soumis aux dispositions de l'article 2270 du code civil et peut, à ce titre, voir sa responsabilité engagée dans un délai de dix ans à compter de la réception des travaux. En revanche, le sous-traitant est soumis aux dispositions du droit commun de la responsabilité, le régime de la garantie lui étant inapplicable107(*) et n'étant pas couvert par l'obligation d'assurance108(*).

Le sous-traitant est ainsi soumis à une responsabilité contractuelle envers l'entrepreneur principal en cas d'inexécution de ses obligations pendant trente ans à compter de la date de survenance du dommage ou de la mise en jeu de la responsabilité de l'entrepreneur principal. Il est également soumis à une responsabilité de nature délictuelle à l'égard du maître de l'ouvrage109(*), et peut voir sa responsabilité engagée dans un délai de trente ans à compter de la date de survenance du dommage.

La différence de prescription ainsi que de départ du délai selon que l'action est intentée contre l'entrepreneur principal ou contre son sous-traitant peut sembler injustifiée, d'autant plus que la jurisprudence semble avoir tendance à soumettre les actions au même délai de prescription, soit dix ans, ainsi qu'au même point de départ, soit la date de réception des travaux.

L'habilitation donnée au Gouvernement permettrait ainsi d'opérer un alignement complet du délai de prescription de l'action en responsabilité intentée contre le sous-traitant de l'entrepreneur principal. Ce délai serait fixé à dix ans et son point de départ serait désormais la date de réception des travaux.

4. L'harmonisation des dispositions du code civil et du code de la construction et de l'habitation concernant les régimes d'assurance

En vertu du 4° de l'article 25, le Gouvernement serait habilité à prendre par ordonnance les mesures destinées à « assurer la cohérence des dispositions du code de la construction et de l'habitation relatives aux régimes d'assurance avec celles du code civil et du code des assurances ». En effet, le code de la construction et de l'habitation est un « code suiveur » qui reprend, en « miroir », les dispositions du code civil et du code des assurances en matière de responsabilité et d'assurance dans le domaine de la construction.

En principe, dans le système de codification retenu en 1989 par la Commission supérieure de codification, la modification des dispositions du code « pilote » reprises dans le code « suiveur » n'impose pas une habilitation spécifique pour modifier les dispositions du code « suiveur ». Ces modifications interviennent mécaniquement et de manière automatique. Toutefois, en l'espèce, de nouveaux articles devraient être introduits dans le code civil ainsi que dans le code des assurances, et seraient alors reproduits dans le code de la construction et de l'habitation. Cette situation justifie donc le recours à une habilitation spécifique afin de tirer les conséquences des modifications apportées dans le code civil et le code des assurances.

Votre commission estime que la simplification qui devrait intervenir dans le cadre de la mise en oeuvre de la présente habilitation doit également s'accompagner d'une clarification du régime de responsabilité de certains intervenants aux travaux de construction, et notamment les contrôleurs techniques, régis par les articles L. 111-27 du code de la construction et de l'habitation.

En effet, la responsabilité du contrôleur technique ne saurait, en principe, être engagée que « dans les limites de la mission à lui confiée par le maître de l'ouvrage ».110(*) Or, des ambiguïtés rédactionnelles dans le code de la construction et de l'habitation ont conduit certaines juridictions à faire supporter aux contrôleurs techniques des charges financières parfois sans commune mesure avec l'étendue de leur intervention dans le cadre des chantiers de construction, intervention qui se limite pourtant à s'assurer « que les vérifications techniques qui incombent à chacun des constructeurs énumérés à l'article 1792-1 du code civil s'effectuent de manière satisfaisante » 111(*).

Votre commission des Lois vous soumet en conséquence un amendement tendant à habiliter le Gouvernement à préciser le contenu de la mission du contrôleur technique et les limites de sa responsabilité.

Elle vous propose en conséquence d'adopter l'article 25 ainsi modifié.

Article 26
Simplification du régime applicable aux états et constats
assurant la protection des acquéreurs de biens immobiliers

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à intervenir, par ordonnance, dans le domaine de la loi par ordonnance afin de simplifier le régime applicable aux états et constats assurant la protection des acquéreurs de biens immobiliers. Aux termes de l'article 61 du présent projet de loi, les ordonnances prévues devront intervenir, à peine de caducité, dans un délai de six mois à compter de la publication de la loi.

1. La simplification des modalités d'établissement et de production des états et constats assurant la protection des acquéreurs et preneurs de biens immobiliers

Le souci de protection des acquéreurs ou des preneurs de biens immobiliers a conduit tant le législateur que le pouvoir réglementaire à multiplier les documents destinés à les informer de l'état des biens immobiliers concernés par une vente ou une mise en location.

Certains certificats visent à garantir la superficie du bien vendu, notamment lorsqu'il s'agit d'un lot de copropriété. La loi n° 96-1107 du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs de lot de copropriété, modifiant l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, a ainsi institué l'obligation de prévoir dans la promesse de vente ou l'acte authentique de vente la production d'un document certifiant la superficie du lot vendu, et ce à peine de nullité de l'acte.

D'autres constats ont pour objet d'informer l'acheteur ou le preneur à bail de l'état sanitaire des locaux faisant l'objet d'une transaction. Tel est le cas :

- de l'état parasitaire, prévu par l'article 8 de la loi n° 99-471 du 8 juin 1999 tendant à protéger les acquéreurs et propriétaires d'immeubles contre les termites et autres insectes xylophages, dont l'absence de production lors de la réalisation de la vente implique l'impossibilité de stipuler au contrat la clause d'exonération de la garantie des vices cachés, prévue par l'article 1643 du code civil en cas d'infection par les termites ;

- du constat précisant la présence ou l'absence de matériaux et produits contenant de l'amiante, prévu par l'article L. 1334-7 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dont l'absence de production interdit toute stipulation contractuelle destinée à exonérer le vendeur de la garantie des vices cachés concernant la présence d'amiante ;

- du diagnostic des installations intérieures de gaz naturel, prévu par l'article 17 de la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie. L'absence de ce certificat annexé à l'acte de vente entraîne également l'impossibilité de stipuler une clause d'exonération de la garantie pour vice caché conformément à l'article 1643 du code civil ;

- de l'état des risques naturels et technologiques, prévu par l'article L. 125-5 du code de l'environnement, inséré par la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages. L'absence de cet état, dont la durée de validité n'est pas précisée et qui doit être annexé aux promesses de vente ou d'achat, autorise l'acquéreur à poursuivre la résolution du contrat ;

- du constat de risque d'exposition au plomb, prévu par l'article L. 1334-5 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, qui doit être dressé en cas de vente d'immeuble affecté en tout ou partie à l'habitation, construit avant le 1er janvier 1949. L'absence de ce document entraîne l'impossibilité de stipuler dans la promesse ou l'acte de vente une clause d'exonération des vices cachés concernant la présence de plomb. Ce constat doit également être dressé avant tous travaux portant sur les parties communes d'un immeuble collectif affecté en tout ou partie à usage d'habitation construits avant le 1er janvier 1949 et de nature à provoquer une altération substantielle des revêtements. Il devra également être annexé à tout contrat de location d'un immeuble construit avant le 1er janvier 2004, cette exigence s'appliquant à compter de l'expiration d'un délai de quatre ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi précitée du 9 août 2004 et étant sanctionnée par la mise en jeu éventuelle de la responsabilité pénale du bailleur.

La multiplication de ces états et constats ainsi que la diversité des sanctions prévues en leur absence rend nécessaire une certaine harmonisation qui ne pourra que contribuer à l'intelligibilité du droit et renforcer la sécurité juridique de l'acquéreur ou du preneur d'un bien immobilier.

Ainsi, l'obligation d'établir un constat ou un état n'est imposée dans certains cas que si le bien immobilier concerné est situé dans une zone particulière de risques, alors que d'autres sont imposés quelle que soit la situation de l'immeuble. De même, le moment auquel il doit être justifié par le vendeur ou le bailleur de l'existence de cet état ou constat est très variable : lors de la promesse de vente ou d'achat dans certains cas ; lors de l'acte authentique de vente dans d'autres. Enfin, la durée de validité de ces états et constats est très fluctuante, variant de trois mois à un an, tandis qu'aucune durée n'est imposée pour certains d'entre eux.

C'est dans cette perspective que le premier alinéa du présent article habiliterait le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour « harmoniser les modalités d'établissement » de ces états. De même, le Gouvernement pourrait « prévoir la production dans un document unique » de l'ensemble de ces constats. Si l'existence de ces différents constats est prévue par les textes législatifs, il reviendra cependant au pouvoir réglementaire de déterminer plus précisément leur contenu.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, un « diagnostic technique unique » devrait être créé. Il rassemblerait les cinq états relatifs à l'état sanitaire des locaux précités, ainsi que le certificat de performance énergétique imposé par la directive 2002/91/CE du Parlement européen et du Conseil 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments, pour la transposition de laquelle le Gouvernement sollicite une habilitation dans le cadre du deuxième alinéa du présent article. Les modalités de présentation de ces constats seraient harmonisées en prévoyant la production de ce document lors de la promesse de vente du bien concerné ou, à défaut de promesse, lors de l'acte authentique constatant la vente.

Cette unification et cette harmonisation ne concerneraient que les documents attestant de l'état sanitaire des bâtiments. Elle ne modifierait pas, en particulier, les dispositions relatives à la garantie de superficie des lots de copropriété, telles qu'elles figurent dans la loi précitée du 10 juillet 1965.

2. La définition des conditions requises des professionnels procédant aux états et constats

La sécurité des acquéreurs ou preneurs de biens immobiliers réside tant dans l'existence des états ou constats prévus par la loi que dans la compétence et le professionnalisme des personnes chargées de les dresser. Or, sur ce point, des précisions devraient être apportées dans le cadre des textes législatifs instaurant la délivrance obligatoire de ces documents, dans la mesure où l'indépendance, la compétence ainsi que les conditions d'assurance de ces professionnels ne sont pas actuellement précisément définis. Le premier alinéa du présent article prévoirait d'habiliter à cet effet le Gouvernement à intervenir par ordonnance.

Sur ce fondement, le Gouvernement pourrait s'inspirer du dispositif désormais prévu à l'article L. 1334-5 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l'article 76 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Cette disposition prévoit :

- la détermination par décret en Conseil d'Etat des « conditions exigées de l'auteur du constat » et, en particulier, de ses « qualifications » ;

- l'obligation d'une couverture du professionnel par une assurance contre les conséquences de sa responsabilité civile professionnelle ;

- l'interdiction de liens « de nature à porter atteinte à son impartialité et à son indépendance ni avec le ou les propriétaires et leurs mandataires qui font appel à lui, ni avec une entreprise susceptible d'effectuer des travaux sur les ouvrages, installations ou équipements » pour lesquels il réalise le constat en cause.

Grâce à ces garanties, qu'il appartiendra au pouvoir réglementaire de préciser, la protection des acquéreurs ou preneurs de biens immobiliers sera ainsi mieux assurée.

3. La transposition de la directive communautaire 2002/91/CE du 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments

Une partie importante des rejets de dioxyde de carbone dans l'atmosphère provient de la consommation énergétique des bâtiments. Partant de ce constat, le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne ont, sur la base de l'article 175 du traité instituant la Communauté européenne, adopté la directive 2002/91/CE du 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments. Ce texte a pour objet « de promouvoir l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments dans la Communauté, compte tenu des conditions climatiques extérieures et des particularités locales, ainsi que des exigences en matière de climat intérieur et du rapport coût-efficacité ».

La directive fixe en conséquence des exigences dans plusieurs domaines : la méthode de calcul de la performance énergétique intégrée des bâtiments ; la création d'exigences minimales en matière de performance énergétique aux bâtiments neufs ; l'application d'exigences minimales en matière de performance énergétique aux bâtiments existants de grande taille lorsque ces derniers font l'objet de travaux de rénovation importants ; la certification de la performance énergétique des bâtiments ; l'exigence d'une inspection régulière des chaudières et des systèmes de climatisation dans les bâtiments ainsi que l'évaluation de l'installation de chauffage lorsqu'elle comporte des chaudières de plus de quinze ans.

Cette directive doit faire l'objet d'une mesure de transposition en droit français avant le 4 janvier 2006.

Votre commission est attentive à ce que la transposition des ordonnances communautaires puisse s'effectuer dans les délais impartis par les textes communautaires. Elle considère que le recours à la procédure des ordonnances est fondé, dans un domaine par nature technique. Toutefois, elle relève que le projet de loi d'orientation sur l'énergie, adopté en première lecture par le Sénat le 10 juin 2004 et en cours de navette à l'Assemblée nationale pour la seconde lecture, a déjà prévu, en son article 6 bis, un dispositif permettant d'introduire en droit français le « certificat de performance énergétique », prévu par l'article 7 de la directive, destiné à fournir des informations sur la performance énergétique du bâtiment mis en vente ou en location.112(*)

Votre commission estime que la transposition de cette directive en droit français doit s'effectuer dans le cadre du présent projet de loi. En effet, il y a une véritable cohérence juridique à modifier le régime des états et constats déjà prévus par les dispositions du droit national, et à y intégrer, de façon concomitante, le certificat de performance énergétique.

Elle vous propose en conséquence d'adopter l'article 26 sans modification.

Article 27
Adaptation et simplification du régime applicable
aux changements d'affectation des locaux

Cet article a pour objet d'autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires à l'adaptation et à la simplification du régime applicable aux changements d'affectation des locaux. En application de l'article 61 du présent projet de loi, les ordonnances prises sur le fondement de cet article devront intervenir dans le délai de six mois à compter de la publication de la loi.

Afin de préserver les locaux à usage d'habitation ou d'augmenter leur nombre dans certaines communes, le législateur a, dès 1945, posé le principe, aujourd'hui codifié à l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation, de l'interdiction du changement de destination des locaux d'habitation, ainsi que de l'impossibilité d'affecter les locaux à usage professionnel ou administratif ainsi que les meublés, hôtels, pensions de famille ou établissements similaires à une autre destination que l'habitation. De même est interdite la transformation de garages ou remises en des locaux à usage commercial, industriel ou artisanal.

Toutefois, il peut être fait exception à ces interdictions en vertu d'une autorisation préalable et motivée du représentant de l'Etat, donnée après avis du maire ainsi que, à Paris, Marseille et Lyon, avis du maire d'arrondissement. Cette autorisation, donnée à titre personnel, permet à son titulaire de modifier la destination du local concerné, afin de lui donner, le cas échéant, tout autre type d'affectation.

En outre, depuis la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 relative à diverses dispositions d'ordre économique et financier, modifiée par la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 sur l'initiative économique, l'exercice d'une activité professionnelle sans autorisation préalable dans une partie de local à usage d'habitation est possible, à la condition que le local constitue la résidence principale de la personne exerçant son activité professionnelle et que ne soit reçue ni clientèle, ni marchandise dans ce local.

Enfin, il convient de préciser que l'obligation de transformer des locaux à usage professionnel en des locaux à usage d'habitation en cas de perte de leur affectation primitive, prévu par le 2° de l'article L. 631-7 précité n'est désormais plus applicable qu'aux locaux appartenant aux personnes privées, le changement d'affectation des locaux professionnels qui sont la propriété de personnes publiques étant désormais dispensé de toute autorisation administrative, en vertu de l'article 81 de la loi n° 2033-1312 du 30 décembre 2003 portant loi de finances rectificative pour 2003.

La présente habilitation n'a pas pour objet de supprimer tout dispositif destiné à préserver les locaux à usage d'habitation. Il importe en effet de prévoir un encadrement des possibilités de transformation de l'affectation des locaux afin d'assurer un équilibre entre les logements et les locaux professionnels ou commerciaux. Cependant, malgré les assouplissements apportés dans les dernières années, le régime institué par l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation soulève des difficultés que l'ordonnance envisagée par le Gouvernement pourrait opportunément résoudre.

 La première tient au champ d'application des dispositions de cet article. Si, en principe, toutes les communes de plus de 10.000 habitants sont soumises au régime du changement d'affectation,113(*) seuls Paris, les communes de la petite couronne de la région parisienne ainsi que certaines grandes communes telles que Lyon voient ce dispositif effectivement appliqué. Il est vrai que le seuil retenu peut, à l'heure actuelle, apparaître beaucoup trop faible car le dispositif de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation ne se justifie que lorsqu'il existe une forte spéculation immobilière, de nature à réduire les surfaces destinées à l'habitation. Or, cette situation se rencontre pour l'essentiel dans les villes importantes ou à leur périphérie.

L'ordonnance prise sur la base de la présente habilitation pourrait donc permettre de relever le seuil actuel afin qu'il concerne les grandes agglomérations ou certaines communes moins importantes mais limitrophes de grande villes, en faisant en sorte que le dispositif s'applique à l'ensemble des communes répondant à ce critère et ce, sur l'ensemble du territoire national.

 La seconde difficulté concerne la définition de la notion de local à usage d'habitation, ainsi que les notions de locaux administratifs et professionnels, utilisées par l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation. Faute d'une définition légale de la notion de local à usage d'habitation, la jurisprudence apparaît hésitante -voire contradictoire- pour déterminer au cas par cas s'il convient ou non de faire application du dispositif prévu par cet article. Les notions de local administratif ou de local professionnel suscitent également de nombreuses interrogations et donnent lieu à des contentieux inutiles.

Partant de ce constat, le Gouvernement pourrait, dans le cadre de la présente habilitation, donner une définition textuelle du local à usage d'habitation, qui pourrait notamment inclure les logements proprement dits, les logements de fonction ou inclus dans un bail commercial, les meublés ainsi que les chambres de service ou les logements de gardien. L'ordonnance pourrait également utilement supprimer les notions de local professionnel ou administratif qui n'apparaissent pas opératoires.

 La troisième difficulté concerne la preuve de l'usage d'habitation des locaux. S'il est acquis, en jurisprudence, que l'usage des locaux s'apprécie par rapport aux circonstances de fait et non aux circonstances de droit,114(*) il s'avère parfois difficile d'apporter la preuve de cet usage. En outre, la pratique administrative a conduit à rechercher l'usage d'habitation tel qu'il apparaissait sur des fichiers anciens datant, notamment pour la ville de Paris, de 1945. Dans la mesure où ces fichiers ne sont pas accessibles au public, la loi n° 94-624 du 21 juillet 1994 a d'ailleurs inséré une disposition prévoyant que, « sur requête de tout intéressé, le représentant de l'Etat dans le département délivre, après avis du maire et dans le délai de deux mois, un certificat indiquant si le local peut être régulièrement ou non affecté à l'usage mentionné dans la demande » 115(*).

Cet état du droit n'est pas satisfaisant. Les fichiers datant de 1945 sont archaïques et obsolètes et ne reflètent plus la réalité urbaine en ce début de XXIème siècle. L'ordonnance envisagée par le Gouvernement permettrait de prévoir que le fichier établi lors de la réforme foncière de 1970 sera désormais utilisé pour établir la nature du local envisagé.

 La dernière difficulté tient au caractère personnel et incessible de l'autorisation préfectorale relative au changement de destination. La loi n° 86-1291 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, a conféré ce caractère à l'autorisation délivrée par le préfet, dans le souci d'assouplir le dispositif initial. En effet, en raison du caractère personnel de cette autorisation, lorsque le bénéficiaire est une personne exerçant une profession libérale réglementée dans des locaux libérés, il lui est possible de transformer un autre local d'habitation en local professionnel pour une surface équivalente. En revanche, lorsque le titulaire de l'autorisation vient à perdre son droit d'occupation sur le local pour lequel il avait obtenu cette autorisation, le local est réputé redevenir un local à usage d'habitation.

Le caractère personnel de l'autorisation suscite une difficulté dans l'hypothèse où le préfet subordonne le changement d'affectation à la transformation concomitante d'un autre local en local à usage d'habitation. Il s'agit du mécanisme dit de « compensation », aujourd'hui pratiqué par les préfectures sans aucune base juridique et, de ce fait, sans encadrement. La compensation est en effet attachée à un local déterminé, alors même que l'autorisation conserve, elle, un caractère personnel.

L'ordonnance devrait donc consacrer juridiquement le mécanisme de la compensation qui ferait l'objet d'un encadrement afin de mettre fin à son caractère quasi-discrétionnaire. L'ordonnance pourrait également prévoir de conserver le principe du caractère personnel de l'autorisation. Toutefois, par exception, cette autorisation serait rattachée au local concerné lorsque l'autorisation est donnée sous réserve d'une compensation. Votre commission insiste sur la nécessité de prévoir des mesures de publicité adéquate de cette autorisation, qui deviendrait alors un véritable droit réel, au sens juridique du terme, par le biais d'une inscription au fichier immobilier ou au livre foncier.

Bien que l'habilitation prévue au présent article soit large, elle ne devrait pas conduire à décentraliser la compétence en matière d'autorisation du changement d'affectation. Le représentant de l'Etat dans le département devrait donc toujours être responsable de la délivrance des autorisations, le Gouvernement, par la voix de M. Eric Woerth, secrétaire d'Etat à la Réforme de l'Etat, ayant estimé lors du débat à l'Assemblée nationale que « dans certaines zones où le marché immobilier connaît des tensions très fortes, la protection des locaux à usage d'habitation est probablement en de bonnes mains lorsque l'Etat reste garant du droit au logement » 116(*).

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 27 sans modification.

Article additionnel après l'article 27
(art. 50 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985)
Instauration d'une réglementation
relative aux « tapis roulants neige »

Plusieurs accidents, parfois dramatiques comme à Val Cenis l'hiver dernier, sont survenus ces dernières années sur des « tapis roulants neige », tapis roulants assurant le transport à titre principal de skieurs dans les stations de ski.

Afin de limiter ces risques, votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 27 du projet de loi pour réglementer l'usage de ces « tapis roulants neige ».

Il est ainsi proposé de modifier l'article 50 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne pour que, comme pour les remontées mécaniques, ces installations soient soumises à autorisation avant mise en exploitation ainsi qu'au contrôle technique et de sécurité de l'Etat.

Une telle disposition a déjà été prévu par l'article 62 ter A du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. Toutefois, il semble préférable de l'inscrire également dans le présent projet de loi afin de permettre qu'elle entre en vigueur le plus rapidement possible.

Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission vous propose d'insérer après l'article 27.

Article 28
Adaptation des règles
relatives à la profession de géomètre-expert

Cet article tend à permettre au Gouvernement d'intervenir par ordonnance dans le domaine de la loi afin d'adapter les règles relatives à la profession de géomètre-expert aux dispositions de la directive 2001/19/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2001, ainsi que les dispositions relatives aux procédures disciplinaires applicables à ces professionnels. Les ordonnances prévues devront intervenir dans un délai de six mois à compter de la publication de la loi.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires culturelles117(*).

Article 29
Modification du régime de reconnaissance
de capacité professionnelle de certaines professions de transport Simplification des procédures d'établissement
des contrats types de transport public de marchandises

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à intervenir, par ordonnance, dans le domaine de la loi afin de modifier le régime de reconnaissance de capacité professionnelle de certaines professions de transport et de simplifier les procédures d'établissement des contrats types de transport public de marchandises. A cet effet, les ordonnances devront être prises dans délai de neuf mois à compter de la publication de la loi.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques118(*).

Article 30
Simplifications dans le domaine de l'agriculture

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre certaines mesures en matière agricole afin de :

- moderniser et simplifier les dispositions relatives aux abattoirs ;

- renforcer le contrôle du respect de certains accords interprofessionnels laitiers et adapter les sanctions prévues pour les manquements à la réglementation relative aux quotas laitiers à la gravité de ces manquements ;

- alléger le régime d'autorisation des centres d'insémination artificielle et des centres de transfert des embryons pour les équidés, les ovins et les porcins ;

- simplifier l'identification des équidés ;

- confier aux haras nationaux la mission d'enregistrement des détenteurs d'équidés ;

- simplifier et moderniser les dispositions relatives aux colombiers et à la colombophilie civile ;

- simplifier et adapter les règles applicables à la lutte contre les maladies animales et à l'élaboration de la nomenclature des maladies réputées contagieuses.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques119(*).

Article 31
Simplifications de dispositions relatives aux produits
bénéficiant d'une appellation d'origine et à l'activité vitivinicole

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à simplifier certaines dispositions relatives aux produits bénéficiant d'une appellation d'origine et à l'activité vitivinicole afin de :

- permettre la coexistence, sur la même aire géographique, de différents vins mousseux en appellation d'origine ;

- supprimer des comités interprofessionnels vitivinicoles ayant cessé tout activité.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques120(*).

Article 32
Simplification de diverses procédures administratives
concernant l'agriculture et la pêche

Dans son I, cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à simplifier certaines procédures administratives en matière agricole.

Tout d'abord, il s'agit de simplifier la procédure d'agrément des sociétés coopératives agricoles, de leurs unions et des sociétés d'intérêt collectif agricole et d'harmoniser le droit applicable aux coopératives agricoles avec celui des autres coopératives.

Ensuite, cet article vise à simplifier par ordonnance la procédure d'agrément en matière de médicaments vétérinaires.

Il tend également à habiliter le Gouvernement à modifier et à simplifier la procédure d'extension des avenants salariaux à des conventions collectives dans les professions agricoles

La procédure de détermination de la surface minimum d'installation et des équivalences hors-sol dans les départements d'outre-mer devrait également être simplifiée par ordonnance.

Le Gouvernement serait également autorisé à exonérer par ordonnance certains patrons pêcheurs propriétaires de navires de l'obligation de s'inscrire au registre du commerce et des sociétés en fonction des caractéristiques de leur activité et de la dimension des navires.

Le II de cet article abroge l'article L. 227-2 du code rural prévoyant un régime d'agrément préalable à la mise sur le marché des produits d'hygiène de la traite applicables aux trayons.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques121(*).

Article 33
Simplifications relatives au régime social
de l'agriculture et de la pêche

Cet article a pour objet de simplifier le régime social de l'agriculture et de la pêche en :

- clarifiant le champ d'application du régime social agricole par rapport à la définition économique de l'activité agricole ;

- simplifiant les règles de détermination de l'assiette servant au calcul des cotisations et des contributions sociales des personnes non salariées agricoles ;

- étendant le dispositif du titre emploi simplifié agricole à l'ensemble des employeurs de salariés agricoles ;

- permettant aux adultes handicapés sans activité professionnelle de demeurer rattachés au régime de protection sociale agricole dont relèvent leurs parents lorsqu'ils perdent la qualité d'enfants à charge ;

- alignant les conditions de majoration de la pension de retraite servie à titre personnel au conjoint collaborateur du chef d'une exploitation ou d'une entreprise agricole sur celles de leur pension de reversion ;

- simplifiant le versement, par le régime spécial de sécurité sociale des marins, des pensions de faible montant ;

- simplifiant les relations des associations agricoles bénéficiaires du dispositif chèque-emploi associatif avec leur organisme de recouvrement en confiant les opérations de recouvrement des cotisations et contributions sociales ainsi que des cotisations de médecine du travail et, le cas échéant, des cotisations d'ordre conventionnel dues au titre de l'emploi de salariés agricoles aux caisses de mutualité sociale agricole.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales122(*).

Article 34
Habilitation en matière de police de l'eau
et de police de la pêche et du milieu aquatique

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre les dispositions nécessaires pour :

- permettre à l'autorité administrative compétente de faire opposition aux projets d'installations, d'ouvrages, de travaux et d'activités soumis à déclaration ;

- instituer un régime de transaction pénale pour les délits et contraventions en matière d'eau et préciser les conséquences de cette transaction pénale sur l'action publique ;

- adapter les conditions de mise en conformité des installations et ouvrages préexistants à la loi sur l'eau n° 92-3 du 3 janvier 1992 ;

- simplifier les procédures de demande d'autorisation applicables, en vertu des articles L. 214-1 à L. 214-6 du code de l'environnement, aux opérations connexes ou relevant d'une même activité ;

- simplifier, harmoniser et adapter les procédures d'autorisation au titre de la police de l'eau, de la police de la pêche et en matière d'immersion ainsi que le régime contentieux qui leur est applicable.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques123(*).

Article 35
Simplifications dans le domaine des installations classées

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance certaines mesures dans le domaine des installations classées pour :

- simplifier les procédures de suspension d'autorisation d'installations classées ;

- simplifier les procédures consultatives prescrites en cas de demande d'autorisation d'installations classées situées dans des vignobles ;

- abroger les dispositions du code de l'environnement devenues sans objet concernant les installations classées et les déchets ;

- simplifier les procédures prévues à l'article L. 541-17 du code de l'environnement et devant être respectées pour tous les travaux de recherche de formations ou de cavités géologiques susceptibles d'être utilisées pour le stockage souterrain de déchets ultimes.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires économiques124(*).

Article 36
Renforcement des droits des cotisants
dans leurs relations avec les organismes de recouvrement
des cotisations et des contributions sociales

Cet article a pour objet de renforcer les droits des cotisants dans leurs relations avec les organismes de recouvrement des cotisations et des contributions sociales en :

- leur permettant de se prévaloir des circulaires et instructions ministérielles publiées ;

- leur octroyant la possibilité d'invoquer l'interprétation de l'organisme de recouvrement sur leur situation au regard de la législation relative aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale ;

- résolvant les difficultés pouvant apparaître lors de leurs affiliation ou de l'application qui leur est faite des règles d'assiette ou de recouvrement de ces cotisations ou contributions.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales125(*).

Article 37
Simplification de la législation relative à la formation

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à modifier le code du travail pour simplifier certaines dispositions relatives à la formation en :

- allégeant les formalités d'acquisition des prestations de formation ;

- aménageant les règles applicables aux prestataires de formation ;

- adaptant et harmonisant les procédures de contrôle et les sanctions applicables en matière d'actions de formation professionnelle ;

- adaptant les dispositions relatives à la définition des mesures destinées à anticiper et accompagner l'évolution des emplois et des compétences et organiser leur mise en oeuvre par voie de conventions conclues entre l'Etat et les organisations professionnelles et syndicats.

Cette disposition fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales126(*).

Article 37 bis (nouveau)
Simplifications en matière d'élections professionnelles

Cet article nouveau, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, sur proposition de la commission des Lois et avec un avis favorable du Gouvernement, propose d'habiliter le Gouvernement à prendre certains mesures de simplification pour :

- unifier le traitement des litiges préélectoraux ;

- harmoniser les conditions d'ancienneté requises pour l'exercice des différents mandats de représentant du personnel ;

- clarifier la définition de l'effectif pris en compte pour l'organisation des élections professionnelles.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales127(*).

CHAPITRE III
MESURES DE MODERNISATION
DE L'ADMINISTRATION

Article 38
Harmonisation du cadre législatif
des groupements d'intérêt public

Les groupements d'intérêt public (GIP) ont été créés en grand nombre à partir de 1982, à l'origine dans le secteur de la recherche, pour servir de cadre à la coopération entre personnes publiques et privées.

Le présent article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à donner par ordonnance un cadre législatif général aux GIP.

L'ordonnance prise sur le fondement de l'habilitation prévue par cet article devra être publiée dans un délai de douze mois suivant la publication de la présente loi.

1. Une catégorie de personnes publiques originale à la cohérence incertaine

A partir de la fin des années 1960, se sont développés les groupements d'intérêt économique (GIE), créés par l'ordonnance n° 67-821 du 23 septembre 1967. La structure du GIE, entre la société et l'association, a pour objet de permettre aux administrations de coopérer entre elles ou avec des organismes de droit privé. Créés par convention, avec ou sans capital, les GIE ont proliféré dans le domaine de la recherche.

Alors que leur but est de « faciliter ou de développer l'activité économique de leurs membres, d'améliorer ou d'accroître les résultats de cette activité » (article L. 251-1 du code de commerce), les GIE ont été utilisés pour gérer de véritables missions de service public administratif.

Les réflexions suscitées par cette évolution et les besoins spécifiques des organismes de recherche ont amené à la création d'une forme originale de personne morale, le groupement d'intérêt public, par l'article 21 de la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.

L'objet initial de cette structure était de permettre la mise en commun de moyens relevant de laboratoires publics et privés pour réaliser des programmes d'intérêt général. Le GIP apparaît ainsi comme une nouvelle catégorie de personnes morales de droit public créées par convention pour éviter les rigidités de la formule de l'établissement public.

Dès juin 1996, le Conseil d'Etat relevait, dans une étude qui leur était consacrée128(*), le succès des groupements d'intérêt public, dont près de 50 avaient alors été créés dans le domaine de la recherche et « un engouement de la part du législateur, qui a étendu la formule à de très nombreux domaines, tout en modifiant, plus ou moins profondément, les caractéristiques de l'institution ».

Aux termes de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982, repris aux articles L. 341-1 à L. 341-4 du code de la recherche depuis l'ordonnance n° 004-545 du 11 juin 2004 relative à la partie législative de ce code, le GIP devait remplir six critères :

- une durée indéterminée ;

- une majorité de participants publics ;

- l'absence de réalisation et de partage de bénéfice ;

- la nomination, par le conseil d'administration, d'un directeur qui assure sous l'autorité du conseil et de son président, le fonctionnement du groupement ;

- un contrôle de l'Etat, par un commissaire du Gouvernement nommé auprès du groupement et par le contrôle de la Cour des comptes ;

- un mode de création original, par une concertation entre les membres, qui détermine les modalités de participation des membres, les conditions dans lesquelles ils sont tenus des dettes du groupement et les conditions dans lesquelles ils mettent à sa disposition des personnels qu'ils rémunèrent.

Le décret n° 83-204 du 15 mars 1983 a précisé que le groupement d'intérêt public était doté de la personnalité morale dès la publication au journal officiel de l'approbation de sa convention constitutive par l'Etat.

Dans son étude de 1996, le Conseil d'Etat relève d'abord que les GIP créés dans le domaine de la recherche et du développement technologique l'ont été pour une durée moyenne de cinq ans et ont associé, en moyenne, sept partenaires, tels que le CNRS, l'INRA, l'INRIA, le CNES, des établissements universitaires, des écoles d'ingénieurs et l'Etat, ainsi que des sociétés ou associations. Mais il indique également que cette structure innovante a été utilisée dans d'autres secteurs, « au prix de transformations du modèle initial ».

Il dénombrait alors vingt six textes législatifs instaurant autant de catégories de GIP, dans des secteurs très divers.

La formule du groupement d'intérêt public, qui permettait de concilier la souplesse de fonctionnement avec les garanties de l'intérêt général et du service public, s'est multipliée, débordant progressivement son champ initial.

Le législateur a ainsi permis la création de GIP dans les domaines de l'enseignement supérieur (loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur) ; de la montagne (loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne) ; de la formation et de l'orientation professionnelle (loi du 17 juillet 1992 portant diverses dispositions relatives à l'apprentissage, à la formation professionnelle et modifiant le code du travail), ou encore, comme le propose le présent projet de loi à son article 3, pour le développement de l'administration électronique.

Le Conseil d'Etat estime, par conséquent, que « des groupements d'intérêt public peuvent se constituer dans presque tous les domaines de l'action administrative, à l'exception sans doute de la sécurité et de la défense ».

Les GIP apparaissent aujourd'hui comme une catégorie protéiforme, notamment quant à leur durée et à leur objet.

On distingue ainsi les groupements transitoires, disparaissant au terme prévu par la convention constitutive, les groupements provisoires renouvelés, à défaut d'évolution du programme ou de structure permanente adéquate, et les groupements pérennes, dès leur création. La plupart des lois prévoyant la création de nouvelles catégories de GIP renvoient, pour leurs règles de fonctionnement, aux dispositions de l'article 21 de la loi du 15 juillet 1982.

Les GIP ont perdu leur cohérence initiale et ne satisfont plus les critères de référence énoncés par ce texte, comme l'illustre le groupement d'intérêt public d'observation et d'évaluation de l'aménagement du territoire, créé par l'article 9 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. Cette structure ne semble avoir avec les GIP originaux qu'un rattachement nominal, puisque lui est confiée une mission permanente de service public, sans mise en commun de moyens et pour une durée indéterminée.

Issues de la sédimentation de dispositions législatives recourant à cette structure pour sa souplesse, les règles encadrant les GIP sont aujourd'hui dépourvues d'unité et les incertitudes qui en résultent doivent être levées.

2. La nécessité d'un cadre juridique clair et uniforme des groupements d'intérêt public

Dans son étude de 1996, le Conseil d'Etat rappelle que chaque structure juridique correspond à un objectif défini : le groupement d'intérêt public vise le développement économique de ses membres, l'association tend à des activités ayant un but autre que le partage de bénéfices et la société commerciale a pour objet la réalisation de bénéfices.

Outre la nécessité de fixer un cadre législatif général aux GIP pour leur donner davantage de cohérence, la définition d'un statut législatif des groupements d'intérêt public offre l'occasion de préciser certaines questions qui sont aujourd'hui source d'insécurité.

Les incertitudes quant à la nature publique ou privée des groupements d'intérêt public

À maints égards les GIP peuvent être considérés comme des personnes morales de droit public. Le Conseil d'Etat, dans son avis du 15 octobre 1985, va jusqu'à en déduire qu'ils sont assujettis aux mêmes règles que les établissements publics proprement dits.

Néanmoins, dans sa décision du 14 février 2000 GIP et Verdier, le tribunal des conflits a estimé, en se fondant sur les travaux préparatoire de la loi du 15 juillet 1982, que le législateur avait entendu faire des groupements d'intérêt public « des personnes publiques soumises à un régime spécifique » qui se caractérise « par une absence de soumission de plein droit de ces groupements aux lois et règlements régissant les établissements publics ».

Les avantages recherchés lors de la création des GIP pourraient en effet disparaître s'ils devaient être assimilés à des établissements publics. Mais la nature publique des GIP ne leur enlève pas pour autant leur attractivité, qui tient davantage à leur possibilité de faire appel au droit privé dans leur activité. Il est même concevable, dans un objectif de cohérence, de distinguer des GIP à caractère administratif, qui ne rassembleraient que des personnes morales de droit public, et des GIP à caractère industriel et commercial, associant des personnes privées.

Le renforcement de la sécurité juridique des GIP

La sécurité juridique du GIP serait renforcée par une définition plus précise du contenu de la convention constitutive, qui se concentrerait sur les règles d'organisation et de fonctionnement du GIP.

Le statut législatif des groupements pourrait également fixer un délai maximal d'approbation de la convention par l'autorité administrative. Cette approbation, qui confère au groupement la personnalité morale, ne peut intervenir après un délai raisonnable sans amoindrir l'intérêt de la structure du GIP, qui tient largement à sa souplesse.

La publicité systématique de la convention approuvée au Journal officiel garantirait par ailleurs l'opposabilité aux tiers de la création d'un GIP.

Préciser le régime juridique des activités des GIP

Les règles du code des marchés publics ne sont plus applicables aux GIP depuis la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (MURCEF).

L'article 8 de cette loi soumet en effet les GIP aux règles de publicité et de mise en concurrence définie par l'article 9 de la loi no 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence.

On peut s'interroger sur la nécessité d'appliquer aux GIP les règles du nouveau code des marchés publics, ce qui conduirait sans doute à rigidifier les procédures. Il pourrait s'agir d'une faculté et, le cas échéant, d'une obligation pour les GIP exclusivement composés de personnes publiques.

Le régime de la comptabilité applicable à un groupement, comme celui des biens qu'il possède, doivent également pouvoir être déterminés aisément, grâce à des critères simples et précis.

La définition du statut du personnel des GIP

Un GIP peut employer des catégories de personnel très différentes : un personnel propre, des fonctionnaires détachés ou un personnel de droit privé mis à disposition.

Le statut législatif devrait en particulier répondre à la question du statut de droit public ou de droit privé du personnel directement recruté par le GIP. En effet, le personnel mis à disposition par les personnes constituant le GIP doit conserver son statut juridique, public pour les personnels issus des personnes publiques, privé pour les personnels venant des organismes de droit privé et des entreprises.

Le tribunal des conflits, amené à se prononcer à plusieurs reprises sur la situation du personnel des GIP, a jugé en 1998129(*) que « les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'un service public à caractère administratif sont des agents contractuels de droit public quel que soit leur emploi ». Ces décisions ne faisaient que reprendre la jurisprudence Berkani du 25 mars 1996, selon laquelle les personnels non statutaires travaillant pour le compte d'une personne publique gérant un service public à caractère administratif sont soumis à un régime de droit public. La juridiction administrative peut ainsi procéder à des requalifications du personnel des GIP du droit privé vers le régime de droit public.

Dans ses jurisprudences postérieures, le tribunal des conflits a confirmé cette analyse130(*). A l'inverse, lorsque le GIP gère un service public à caractère industriel et commercial, son personnel propre est régi par le code du travail. Dans cette hypothèse, peut se poser la question de la durée des contrats de travail par rapport à la durée de vie du GIP.

L'ordonnance devra par conséquent préserver la souplesse structurelle qui fait le prix de GIP tout en harmonisant et précisant leurs règles de constitution, de fonctionnement et de contrôle, pour corriger les incertitudes suscitées par un foisonnement des règles.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 38 sans modification.

Article 39
Possibilité d'audience à huis clos dans les juridictions administratives
et de recours aux moyens de communication audiovisuels
dans les juridictions administratives d'outre-mer

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance le code de justice administrative afin de permettre, d'une part, la tenue de l'audience hors la présence du public dans certains cas et, d'autre part, le recours, le cas échéant, à un moyen de communication audiovisuelle pour faire participer les magistrats à une audience outre-mer.

Le Gouvernement disposerait d'un délai de six mois pour prendre une ordonnance sur le fondement de l'habilitation prévue à cet article.

1. Les audiences à huis clos devant le juge administratif : une faculté respectueuse des droits fondamentaux

Cet article a d'abord pour objet d'habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance le code de justice administrative afin de permettre la tenue de l'audience hors la présence du public pour trois motifs distincts :

- la sauvegarde de l'ordre public ;

- le respect de l'intimité des personnes ;

- le respect de secrets protégés par la loi.

L'article L. 6 du code de la justice administrative dispose que « les débats ont lieu en audience publique ». Au regard des dispositions applicables à la publicité des audiences devant les autres juridictions, l'absence totale d'exception devant le juge administratif paraît appeler une adaptation, dans le respect des droits fondamentaux.

Ainsi, s'agissant des juridictions civiles, le législateur a reconnu, dès la loi du 9 juillet 1975 portant diverses dispositions relatives à la réforme de la procédure civile, la possibilité pour le juge de décider que les débats aient lieu en chambre du conseil, c'est-à-dire hors la présence du public, « s'il doit résulter de leur publicité une atteinte à l'intimité de la vie privée, ou si toutes les parties le demandent, ou s'il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice »131(*).

L'article 435 du code de procédure civile prévoit la possibilité d'une audience à huis clos dans des termes semblables. Le code de procédure pénale autorise également des exceptions précises à la publicité des débats : à la cour d'assises en cas de danger « pour l'ordre ou les moeurs » (article 306) et au tribunal correctionnel « pour l'ordre, la sérénité des débats, la dignité de la personne ou les intérêts d'un tiers132(*) » (article 400). Enfin, dans les juridictions ayant à connaître d'infractions militaires, l'article 698-9 du même code permet des débats à huis clos lorsque « la publicité risque d'entraîner la divulgation d'un secret de la défense nationale ».

L'ordonnance devra respecter les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit à un procès équitable, dont l'habilitation reprend d'ailleurs les principaux critères.

Aux termes de cet article, « le jugement doit être rendu publiquement » mais l'audience peut se dérouler hors la présence de la presse et du public « pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice ».

La possibilité de tenir des audiences hors la présence du public dans les juridictions administratives devrait en fait rendre leur fonctionnement plus respectueux encore des droits fondamentaux de la personne.

En effet, s'agissant de la sauvegarde de l'ordre public, le recours au huis clos peut assurer, le cas échéant, les conditions d'une justice plus sereine, alors que l'audience publique peut dans certains cas susciter un trouble à l'ordre public (décisions d'internement psychiatrique...).

Le motif de respect de l'intimité des personnes trouvera directement à s'appliquer au sujet de contentieux concernant, par exemple, les refus d'agrément en matière d'adoption.

Enfin, le critère des secrets protégés par la loi vise en particulier le secret médical et le secret fiscal. Dans de nombreux cas, le huis clos pourra ainsi faciliter la libre expression des parties.

2. L'utilisation de moyens de visioconférence pour répondre aux nécessités des juridictions administratives d'outre-mer

Le code de justice administrative prévoit que les tribunaux administratifs de Basse-Terre (Guadeloupe), Cayenne (Guyane), Fort-de-France (Martinique) et Saint-Pierre (Saint-Pierre-et-Miquelon) ont un même président et peuvent avoir des membres communs (article R-223-1).

Les fonctions de commissaire du Gouvernement auprès de ces tribunaux comme auprès des tribunaux administratifs de Mamoudzou (Mayotte) et Saint-Denis (la Réunion) sont assurées par le ou les mêmes magistrats (article R-223-2). Enfin, le président du nouveau tribunal administratif de Mata-Utu (Wallis et Futuna) est le même que celui du tribunal de Nouvelle-Calédonie.

Ces dispositions adaptées au volume du contentieux administratif dans les départements et collectivités d'outre-mer, contraignent les magistrats concernés à des déplacements sur des distances importantes avec des délais qui peuvent ne pas toujours respecter ceux qu'impose la loi, notamment pour les procédures d'urgence. Ainsi, le juge des référés doit se prononcer dans un délai de quarante-huit heures dans le cadre de la procédure de « référé liberté » définie à l'article L. 521-2 du code de justice administrative.

Il semble donc pertinent, comme le propose le 2° de l'article 39 du présent projet de loi, d'habiliter le Gouvernement à modifier le code de justice administrative pour permettre aux membres des formations de jugement et au commissaire du gouvernement affectés dans au moins deux juridictions, de siéger ou de prononcer leurs conclusions au moyen d'une visioconférence, lorsque leur venue à l'audience n'est pas matériellement possible dans les délais exigés par la loi ou par la nature de l'affaire.

Le recours à un moyen de communication audiovisuelle pour permettre la tenue d'une audience dans les juridictions d'outre-mer a déjà été prévu par l'article premier de l'ordonnance du 20 août 1998 relative à l'organisation juridictionnelle dans les territoires d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour le remplacement du président du tribunal supérieur d'appel de cette dernière (article L. 952-7 du code de l'organisation judiciaire).

L'utilisation de la visioconférence est par ailleurs prévue par l'article 706-71 du code de procédure pénale notamment pour l'audition ou l'interrogatoire d'une personne. Elle a été étendue à l'audition à distance des témoins dans le cadre de l'entraide judiciaire internationale, par l'article 17 de la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Votre commission des Lois vous invite à adopter un amendement tendant à remplacer l'habilitation prévue à cet article par des dispositions d'application directe.

Deux nouveaux articles seront ainsi insérés dans le code de justice administrative afin de permettre, d'une part, les audiences à huis clos et, d'autre part, le recours à des moyens de communication audiovisuelle.

Votre commission des lois vous propose d'adopter l'article 39 ainsi modifié.

Article 40
(art. L. 511-1 du code du travail)
Suppression de la révision annuelle du taux de compétence
en dernier ressort des conseils de prud'hommes

Cet article tend à simplifier le fonctionnement des conseils de prud'hommes en supprimant la révision annuelle du taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification en première lecture.

En effet, l'avant-dernier alinéa de l'actuel article L. 511-1 du code du travail dispose que « le taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes est fixé par décret ; il est révisé annuellement ».

Cette disposition avait été introduite dans le code du travail par la loi n° 82-372 du 6 mai 1982 portant modification de certaines dispositions du titre premier du livre V du code du travail relatives aux conseils de prud'hommes dans le but de pouvoir adapter chaque année ce taux de compétence en dernier ressort à l'évolution des salaires.

Alors qu'en principe un décret devait préciser les critères fondant cette révision annuelle, celui-ci n'a jamais été pris et l'administration fixe chaque année le taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes en fonction de la moyenne entre l'évolution du SMIC et le taux de salaire ouvrier de l'année précédente.

Si la révision annuelle de ce taux paraissait souhaitable en ce qu'elle devait permettre de le faire évoluer au regard de la situation salariale, elle semble toutefois créer également des difficultés importantes, en particulier pour les justiciables.

Tout d'abord, cette révision annuelle engendre régulièrement une variation d'une des conditions essentielles pour l'exercice de la voie d'appel.

Ensuite, elle crée une différenciation entre le taux de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes et le taux, fixe et unique, établi pour l'ensemble des autres juridictions d'exception du premier degré (tribunal d'instance, tribunal de commerce, tribunal paritaire des baux ruraux, et tribunaux des affaires sociales). Le gouvernement craint que, dans le contexte économique actuel, la disparité entre ces deux taux soit sans cesse croissante.

Le taux de compétence de dernier ressort des conseils de prud'hommes est fixé pour 2004 à 3.980 euros par l'article 2 du décret n° 2003-1287 du 26 décembre 2003. Le taux de compétence de dernier ressort se situe à 3.800 euros pour les autres juridictions d'exception.

Le présent article propose donc de substituer un taux fixe déterminé par décret à l'actuel taux indexé de compétence en dernier ressort des conseils de prud'hommes.

Cette suppression de la révision annuelle aurait, d'après l'exposé des motifs et les informations fournies à votre rapporteur, été acceptée par les syndicats au sein du groupe de travail mis en place dans le cadre du Conseil supérieur de la prud'homie et le ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité aurait évoqué le principe d'une révision quinquennale. Toutefois, cette possibilité n'est pas forcément souhaitable dans la mesure où elle créerait de nouveau un système particulier pour les conseils des prud'hommes par rapport aux autres juridictions d'exception alors que certaines d'entre elles traitent aussi de contentieux indexés.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 40 sans modification.

Article 41
Simplification des règles de gestion
des établissements publics à caractère scientifique et technologique

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance des dispositions permettant aux établissements publics à caractère scientifique et technologique de déroger au régime budgétaire et comptable leur étant applicable et de présenter leur comptabilité selon les usages du commerce.

Cette disposition fera l'objet d'un examen par délégation par la commission des Finances133(*).

Article 42
Harmonisation des règles relatives aux enquêtes publiques

Cet article a pour objet d'habiliter le Gouvernement à simplifier et harmoniser par ordonnance les règles relatives aux enquêtes publiques.

Le Gouvernement disposera d'un délai de douze mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance sur le fondement de cet article.

Ces enquêtes, prévues par des textes parfois anciens, tels que la loi du 26 mars 1897 concernant les clôtures et barrières de chemins de fer et la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie, permettent d'informer le public sur les dossiers relatifs à des travaux, aménagements ou ouvrages qui requièrent une expropriation ou qui sont susceptibles d'affecter l'environnement, en raison de leur nature même ou du caractère des zones concernées.

Si la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a réformé les modalités d'appréciation de l'utilité publique pour assurer notamment une plus grande participation du public, la phase de l'enquête publique même doit être améliorée.

En effet, l'hétérogénéité des régimes d'enquête publique apparaît aujourd'hui comme un obstacle à la lisibilité du droit dans ce domaine.

L'harmonisation des modalités communes aux enquêtes publiques pourrait s'accompagner de mesures de principe susceptibles d'éviter la répétition ou la multiplication des procédures.

L'habilitation prévue par cet article recouvre donc à la fois l'oeuvre de simplification et d'harmonisation, mais aussi une rationalisation qui consisterait à permettre, en cas de pluralité de maîtres de l'ouvrage, le dépôt d'un dossier unique et l'organisation d'une procédure commune d'enquête. Elle conduira le Gouvernement à modifier les codes de l'environnement et de l'expropriation.

Cette réforme devrait ainsi concilier des objectifs de lisibilité et d'économie avec la nécessité de garantir l'information du public et la transparence administrative.

1. L'hétérogénéité des procédures d'enquête publique

Dans le rapport annuel du Conseil d'État de 2003, la section des travaux publics incite le Gouvernement à « remettre de l'ordre » dans les régimes d'enquêtes publiques afin de mieux satisfaire les objectifs de qualité des procédures administratives134(*). Elle souligne la nécessité d'unifier les modalités communes à plusieurs catégories d'enquêtes publiques prévues dans les codes de l'environnement et de l'expropriation, et celles relatives à la désignation du commissaire enquêteur, à son paiement ou encore au versement de provisions par le maître de l'ouvrage.

Dans son étude de 1999 sur l'utilité publique135(*), le Conseil d'Etat identifie en effet sept catégories d'enquêtes publiques, régies par des textes différents :

l'enquête dite Bouchardeau, régie par la loi n° 83-630 du 12 juillet 1983 et son décret d'application n° 85-453 du 23 avril 1985, qui est la plus courante. Près de quarante catégories d'aménagements, d'ouvrages et de travaux, en matière de voirie routière, de voies ferrées, d'aérodromes, d'oléoducs ou d'installations nucléaires, sont soumises à ce type d'enquête, et cinq à sept mille projets requièrent une enquête de ce type chaque année ;

une série d'enquêtes renvoyant au régime établi par la loi du 12 juillet 1983, telles que l'enquête préalable à la réalisation d'un plan d'exposition au bruit du voisinage des aérodromes (art. L. 1473 du code de l'urbanisme), l'enquête préalable à la réalisation de constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau dans la bande littorale de 100 mètres (art. L. 146-4 du code de l'urbanisme) ou l'enquête préalable à l'institution de servitudes d'utilité publique à l'intérieur d'un périmètre délimité autour d'une installation classée (art. 7-2 de la loi du 9 juillet 1976 relative aux installations classées) ;

l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de droit commun, régie par les articles L. 11-4 et R. 11-4 et suivants du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

les enquêtes renvoyant à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de droit commun, telles que l'enquête préalable à l'établissement du plan de servitudes aéronautiques de dégagement (article R-242-1 du code de l'aviation civile) ;

les enquêtes renvoyant selon le cas à l'enquête prévue par la loi du 12 juillet 1983 ou à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de droit commun, comme l'enquête préalable aux autorisations au titre de la loi sur l'eau (art. 4 du décret du 29 mars 1993 pris pour l'application de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992) ;

les enquêtes régies par une réglementation propre ; comme, par exemple, l'enquête publique préalable au classement et au déclassement des routes départementales (art. L. 131-4 du code de la voirie routière). Certaines de ces enquêtes, comme celle préalable aux opérations d'immersion en mer (art. 9 du décret du 29 septembre 1982) se déroulent sans commissaire enquêteur ;

les enquêtes de commodo et incommodo qui, sans être régies par un texte le prévoyant, donnent lieu, en général, à la désignation d'un commissaire enquêteur, comme l'enquête publique préalable à la création et à l'agrandissement de cimetières (art. R-361-3 du code des communes) ou celle préalable à l'homologation des terrains devant abriter des épreuves, manifestations et compétitions comportant la participation de véhicules à moteur (art. 10 de l'arrêté du 17 février 1961).

La coexistence de réglementations différentes pour l'élaboration des dossiers d'enquêtes publiques est une source potentielle d'erreurs, dont la sanction peut aller jusqu'à l'annulation de toute la procédure. L'obligation de recommencer la procédure retarde alors le projet de plusieurs mois. Le foisonnement des régimes d'enquêtes peut également aboutir à la répétition de procédures sur le même projet.

La quantité d'enquêtes publiques conduites chaque année en France peut apparaître démesurée en comparaison avec les pays voisins136(*). Par ailleurs, la complexité de ces procédures et leur intervention en aval des projets ne sont pas de nature à susciter l'intérêt des citoyens.

2. L'harmonisation des procédures et le regroupement des enquêtes publiques prévus par l'habilitation

Les enquêtes publiques suivent dix-sept procédures différentes et interviennent dans près de soixante-dix régimes d'autorisation de projets.

Il convient de simplifier ces règles pour en faciliter la compréhension par le public et par les élus locaux et garantir la sécurité juridique des projets. Cette simplification pourrait amener au regroupement des procédures d'enquête, pour les concentrer sur quelques points, tels que l'origine de la propriété, l'information et l'avis du public, et le respect de certaines réglementations (eau, bruit, carrières...). Elle serait complétée par une harmonisation des règles.

L'harmonisation des procédures d'enquête

L'harmonisation du contenu des dossiers exigés au titre de chaque procédure apparaît comme une simplification préalable au regroupement éventuel des enquêtes publiques successives sur les mêmes projets.

Ainsi, nombre de projets importants requièrent à la fois une enquête préalable à la déclaration d'utilité publique (art. L. 11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique) et une enquête hydraulique préalable à l'autorisation de travaux au titre de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau (art. L. 214-1 et suivants du code de l'environnement). Le public est ainsi amené à consulter des dossiers distincts alors qu'ils contiennent des informations portant sur les mêmes thèmes.

L'ordonnance devrait par conséquent harmoniser le contenu et la présentation des enquêtes publiques, même lorsqu'elles ne sont pas simultanées. Cette unification permettrait en outre de limiter les risques d'erreurs de composition des dossiers pour les petits maîtres d'ouvrage.

La directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement prévoit, à ses articles 4 et 5, que les États organisent cette évaluation en évitant des répétitions.

L'ordonnance n° 2004-489 du 3 juin 2004 portant transposition de cette directive137(*) modifie respectivement les codes de l'environnement et de l'urbanisme pour soumettre à une évaluation environnementale les plans, schémas, programmes et documents de planification adoptés par l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements et les établissements publics en dépendant, relatifs à l'agriculture, à la sylviculture, à la pêche, à l'énergie, à l'industrie, aux transports, à la gestion des déchets ou de l'eau, aux télécommunications, au tourisme ou encore à l'aménagement du territoire.

Ainsi, les nouveaux articles L. 122-6 du code de l'environnement et L. 121-11 du code de l'urbanisme prévoient que le rapport environnemental contient les informations « qui peuvent être raisonnablement exigées, compte tenu [...] de procédures d'évaluation environnementale prévues à un stade ultérieur ».

La même logique devrait inspirer le regroupement des enquêtes et l'harmonisation des dossiers exigés au titre de chaque procédure. L'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique pourrait ainsi anticiper sur tout ou partie des procédures ultérieures.

Le recours à des enquêtes publiques conjointes sur certains projets

L'ordonnance pourrait ouvrir la possibilité de conduire des enquêtes conjointes en application de réglementations différentes. Il ne s'agirait toutefois que d'une option et non d'une obligation.

En effet, le rassemblement d'enquêtes prévues par des réglementations différentes en une seule ne paraît pas pertinent pour les très grandes opérations, où le dossier relatif à l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, qui intervient en amont pour permettre la suite des opérations, ne saurait être suffisamment détaillé pour l'enquête au titre de la loi sur l'eau.

Ainsi, dans le cas d'un projet d'autoroute, alors que l'enquête hydraulique peut supposer un dossier assez détaillé afin de déterminer, par exemple, le diamètre des tuyaux nécessaires pour rétablir la continuité de l'écoulement des eaux, l'enquête sur la déclaration d'utilité publique de l'opération intervient avant cette étude approfondie. En revanche, la réalisation d'enquêtes conjointes paraît adaptée à des projets localisés et d'une ampleur réduite : crèches, centres culturels, zones d'activité.

Par conséquent, les différences d'échelle entre projets devraient justifier le maintien de dossiers d'enquête différents et conduire à donner à l'enquête conjointe un caractère facultatif.

Le regroupement des enquêtes publiques en cas de pluralité des maîtres de l'ouvrage

Le regroupement des procédures d'enquête interviendrait lorsqu'un projet unique concerne des maîtres d'ouvrage différents.

Des opérations complexes peuvent aujourd'hui aboutir à la situation, difficilement compréhensible pour le public, où les collectivités territoriales participant à la même opération présentent chacune un dossier d'enquête distinct portant sur des parties d'ouvrage différentes. Il s'agit pourtant du même projet, sur lequel le public devrait porter une appréciation globale. Tel peut être le cas pour la modification du tracé d'une route départementale à l'occasion de la réalisation d'une zone industrielle, par exemple.

La pluralité de maîtres de l'ouvrage entraîne, en l'état actuel du droit, des dossiers distincts, afin de permettre à chaque collectivité maître d'ouvrage de faire valoir ses préoccupations.

L'ordonnance devrait faciliter l'utilisation, dans de telles situations et de façon facultative, d'un dossier unique, plus clair pour le public. Cette option pourra être conditionnée, le cas échéant, en fonction des contraintes propres à chaque maître de l'ouvrage.

3. La recherche d'une meilleure articulation entre les enquêtes publiques et la concertation

L'enquête publique a été instaurée à une époque où la concertation avec les citoyens sur les projets de travaux et d'aménagement n'existait pas.

Si l'enquête est aujourd'hui devenue une étape obligatoire pour le droit de l'expropriation, elle apparaît surtout comme un temps de procédure, qui intervient à la fin de l'élaboration du projet déjà pratiquement abouti.

La simplification du régime des enquêtes publiques devrait assurer une meilleure prise en compte des observations du public et s'accompagner d'une amélioration de la concertation.

Le remplacement ou l'articulation de certaines enquêtes publiques par des procédures de concertation avec les citoyens

Afin de simplifier les procédures d'enquêtes publiques, l'ordonnance pourrait supprimer certaines d'entre elles, à condition de leur substituer une procédure de concertation avec le public.

Plus généralement, les procédures d'enquête devraient être davantage coordonnées avec les concertations que peuvent conduire les élus locaux sur les projets. Ces procédures sont en effet susceptibles d'assurer une plus grande adhésion des citoyens aux projets, en les associant davantage, au moyen d'un processus démocratique, à leur élaboration.

L'article L. 300-2 du code l'urbanisme prévoit ainsi que le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les modalités de concertation associant notamment, pendant toute la durée du projet, les habitants et les associations locales avant toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme, toute création, à son initiative, d'une zone d'aménagement concerté, ou toute opération d'aménagement réalisée par la commune lorsqu'elle modifie de façon substantielle le cadre de vie ou l'activité économique de la commune.

Le public devrait être davantage informé des possibilités de prise en compte des résultats d'une telle concertation dans l'évolution du projet, alors même qu'elle peut être conduite dans un temps très rapproché de l'enquête publique.

En outre, en améliorant la concertation avec le public sur les projets, l'ordonnance rapprocherait notre droit des exigences du droit communautaire et de la convention d'Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement138(*), auxquelles l'étape formaliste de l'enquête publique ne répond que très partiellement.

La convention d'Aarhus signée le 25 juin 1998 au Danemark, ratifiée par la France en février 2002 et entrée en vigueur le 6 octobre 2002 prévoit en effet que le public participe au processus décisionnel par sa consultation très en amont de la décision sur les projets ayant des incidences sur l'environnement, selon une procédure qui n'existe en France que pour les projets soumis à la commission nationale du débat public. Elle prévoit également que le résultat de la participation du public doit être pris en considération dans la décision finale, laquelle doit faire également l'objet d'une information.

Ainsi, la participation du public en France devrait en particulier être mieux répartie dans le temps, afin d'accompagner l'élaboration des projets. Cette nouvelle articulation entre enquête et concertation supposerait par ailleurs une redéfinition du rôle du commissaire enquêteur. Plutôt qu'un avis sur le projet, celui-ci émettrait alors une appréciation sur le déroulement de la concertation, dont il serait le garant.

L'amélioration de la prise en compte des résultats de l'enquête dans l'élaboration des projets

L'ordonnance devrait permettre la modification du projet après enquête publique, sans toutefois obliger à ouvrir une nouvelle enquête. En effet, dans le cas de projets dont la déclaration d'utilité publique est ancienne, les évolutions de la réglementation ou les résultats des enquêtes sectorielles peuvent faire apparaître la nécessité de revenir sur le projet initial. De telles modifications devraient répondre à des observations du public et ne pas bouleverser l'économie générale du projet.

Cette ordonnance sera élaborée à partir des résultats des travaux de trois instances : une commission consultative sur les enquêtes publiques présidée par le ministre de l'écologie et du développement durable et deux groupes de travail, l'un sous l'égide du Conseil d'État, l'autre animé par l'inspection générale de l'environnement et le conseil général des ponts et chaussées, qui devraient rendre leurs rapports définitifs au printemps 2005.

Votre commission des Lois vous invite, en accord avec la commission des Affaires économiques saisie pour avis de cet article et dont les travaux ont abouti à la même conclusion, à adopter un amendement tendant à mieux définir l'habilitation prévue par l'article 42, en lui assignant trois objectifs :

- regrouper les différentes procédures d'enquête et en simplifier et harmoniser les règles ;

- autoriser le recours à une procédure d'enquête unique ou conjointe en cas de pluralité des maîtres de l'ouvrage ou de réglementations distinctes ;

- coordonner les procédures d'enquête publique avec celles relatives à la concertation avec le public ou à la participation du public au processus de décision.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 42 ainsi modifié.

Article 43
Simplification des procédures de classement
et de déclassement dans le domaine de la voirie routière et ferroviaire
et allègement des procédures d'adoption et de révision
des schémas de services collectifs

Le présent article tend à autoriser le gouvernement à prendre une ordonnance pour alléger certaines procédures administratives particulièrement lourdes et complexes, à savoir :

- des procédures de classement et de déclassement de la voirie routière communale et départementale (1°) et des lignes du réseau ferré national (2°) ;

- des procédures d'adoption et de révision des schémas de services collectifs (3°).

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté le présent article sans modification.

Le Gouvernement dispose d'un délai de six mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance en vertu de l'habilitation prévue par cet article.

1° L'habilitation à alléger les procédures de classement et de déclassement des voies des collectivités territoriales

Les procédures de classement et de déclassement des voies des collectivités territoriales sont régies par les articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière.

En vertu de ces articles, le classement et le déclassement des voies d'une collectivité territoriale sont prononcés par l'assemblée délibérante de ladite collectivité. La délibération du conseil municipal ou du conseil général ne peut intervenir qu'après enquête publique.

La présente habilitation tend à alléger ces procédures de classement et de déclassement de la voirie routière communale et départementale. Elle devrait permettre de supprimer l'obligation de procéder à une enquête publique avant tout nouveau classement ou déclassement d'une route par un conseil municipal ou général. En effet l'apport de ces enquêtes est très faible, dans la mesure où, d'une part, comme l'explique l'exposé des motifs, les classement et déclassement d'une voie procèdent uniquement à un « échange patrimonial entre collectivités territoriales » et, d'autre part, elles se superposent souvent avec d'autres enquêtes publiques.

Les enjeux soulevés par ces enquêtes ne semblent pas mériter leur maintien dans le cadre des procédures de classement et de déclassement. Toutefois, d'après les informations obtenues par votre rapporteur, certaines exceptions à ce principe d'absence d'enquêtes publiques devraient être retenues lorsque l'opération envisagée serait susceptible de créer des risques importants d'opposition voire de conflits sur le territoire de la collectivité concernée. Ainsi, l'enquête publique préalable pourrait être maintenue dans les cas où le classement ou déclassement d'une voie aurait pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurée par ladite voie (transformation d'une voie de circulation en promenade, déclassement portant atteinte au droit d'accès des propriétaires riverains...).

Cet allègement des procédures de classement et déclassement semble d'autant plus justifié que les même opérations effectuées par l'État sont encadrées par des règles beaucoup plus souples. Aucune enquête préalable n'est exigée, seul l'accord de la collectivité territoriale concernée étant requis.

Dans la mesure où l'allègement de ces procédures nécessite uniquement de modifier deux articles du code de la voirie routière, votre commission vous propose un amendement tendant à supprimer la présente habilitation et à procéder directement à la modification des articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière dans un article additionnel après l'article 43.

2° L'habilitation à simplifier les procédures de classement et de déclassement des lignes du réseau ferré national

La commission des Lois a renvoyé l'examen de cette disposition (3° du présent article) à la commission des Affaires économiques saisie pour avis139(*).

3° L'habilitation à alléger les procédures d'adoption et de révision des schémas de services collectifs

La commission des Lois a renvoyé l'examen de cette disposition (3° du présent article) à la commission des Affaires économiques saisie pour avis140(*).

Votre commission vous propose d'adopter l'article 43 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 43
(art. L. 131-4 et art. L. 141-3 du code de la voirie routière)
Allègement par une disposition d'application directe des procédures
de classement et déclassement des voies des collectivités territoriales

Par coordination avec l'amendement de suppression présenté à l'article 43141(*), votre commission vous soumet un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 43 du projet de loi afin d'alléger directement, par une disposition d'application immédiate, les procédures de classement et déclassement des voies des collectivités territoriales.

Le présent amendement prévoit ainsi de modifier les articles L. 131-4 et L. 141-3 du code de la voirie routière respectivement relatifs à la procédure de classement et déclassement des voies des communes et des départements, pour supprimer l'obligation d'enquête publique, sauf lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte et de circulation assurée par la voie.

Tel est l'objet de l'article additionnel que votre commission vous propose d'insérer après l'article 43.

Article 44
Simplification et amélioration des règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales, à leurs groupements
et établissements publics locaux

Cet article tend à habiliter le gouvernement à simplifier et améliorer les règles budgétaires et comptables applicables aux collectivités territoriales, à leurs groupements et aux établissements publics locaux qui leur sont rattachés. Il s'agirait ainsi, quelques années après la rénovation de la comptabilité communale par la mise en place de l'instruction budgétaire et comptable « M14 », de prendre quelques mesures de simplification et d'amélioration attendues par les élus et qui seraient notamment issues des propositions d'un groupe de travail constitué au sein du Comité des finances locales.

L'ordonnance devra être prise dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification en première lecture.

I. La modernisation de la comptabilité nationale : la généralisation de l'instruction budgétaire et comptable « M14 »

D'abord expérimentée dans quelques collectivités puis généralisée le 1er janvier 1997 à toutes les communes, la nouvelle instruction budgétaire et comptable dite « M14 » issue de la loi n° 94-504 du 22 juin 1994 portant dispositions budgétaires et comptables relatives aux collectivités locales avait pour objectif d'offrir aux communes un nouveau cadre budgétaire et comptable qui leur permettrait d'améliorer l'information budgétaire et financière les concernant, en particulier à propos de leur patrimoine. Cette modernisation de la comptabilité communale a mis fin aux instructions M11 et M12, respectivement applicables aux communes de moins et plus de 10.000 habitants, qui dataient de 1957.

Une meilleure information sur la situation financière et patrimoniale des communes est désormais offerte par les annexes des documents budgétaires qui détaillent notamment la répartition des charges, les engagements donnés et reçus, les immobilisations...

Ce souci de transparence et de meilleure connaissance de l'impact financier des collectivités territoriales s'est développé après l'adoption des premières lois de décentralisation et l'accroissement considérable des compétences des collectivités territoriales.

La modernisation de la comptabilité communale a été plus limitée pour les communes de moins de 3.500 habitants. Trois niveaux différents de règles budgétaires et comptables ont en effet été établis afin de tenir compte de la taille des communes.

Ainsi, un système simplifié a été prévu pour les communes de moins 500 habitants, avec une présentation par nature de leurs documents budgétaires qui sont par ailleurs simplifiés. La nomenclature est également abrégée.

Les communes de 500 à 3.500 habitants se voient également appliquer un système de base avec présentation par nature de leurs documents budgétaires.

Pour les communes de plus de 3.500 habitants, une présentation fonctionnelle des documents budgétaires est prévue. Les communes de plus de 10.000 habitants peuvent décider de faire voter leur budget sous une présentation par nature ou par fonction. Un état complémentaire doit en outre proposer une présentation croisée en fonction de celle qui n'aura pas été retenue pour le vote du budget.

II. Le projet de loi : l'habilitation à simplifier les règles budgétaires et comptables afin de renforcer l'efficacité de la M14 et améliorer la lisibilité des documents budgétaires

Plusieurs années après la généralisation de la nouvelle instruction budgétaire et comptable « M14 », une réflexion est actuellement engagée afin d'y apporter quelques améliorations et mesures de simplifications.

Un groupe de travail présidé par notre excellent collègue Jean-Claude Frécon a été constitué au sein du Comité des finances locales le 27 mars 2003. Il a dégagé deux axes de réflexion pour parvenir à une simplification des règles budgétaires et comptables applicables aux communes, à leurs groupements et à leurs établissements publics :

- harmonisation de ces règles avec celles relatives aux autres niveaux de collectivités territoriales en réduisant les contraintes pesant sur eux et en simplifiant les mécanismes budgétaires et comptables ;

- simplification et meilleure lisibilité des documents budgétaires.

Travaillant en collaboration avec les administrations centrales et les associations d'élus, ce groupe de travail s'est déjà réuni le 4 décembre 2003, les 29 janvier, 2 mars et 8 avril 2004 et devrait bientôt achever ses travaux, le rapport devant être rendu à la fin de cette année. Les modifications opérées en fonctions de leurs conclusions ne devraient pas avoir lieu avant le 1er janvier 2006.

En outre, d'autres mesures de simplification devraient également être proposées par le groupe de travail institué depuis décembre 2003 par le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, composé d'élus et de représentants d'associations d'élus.

Au regard des dernières informations obtenues par votre rapporteur, un certains nombre de mesures de simplification auraient déjà été acceptées par ces différents groupes de travail, nécessitant ainsi de modifier certaines dispositions législatives du code général des collectivités territoriales.

Tout d'abord, le principe de pluriannualité, déjà prévu pour les départements, pourrait être introduit pour certaines dépenses de fonctionnement. Le recours aux autorisations de paiement et aux autorisations d'engagement devrait être étendu à toutes les communes, le seuil démographique de 3.500 habitants étant supprimé pour la pluriannualité en section d'investissement (modification des articles L. 2311-3 et L. 2512-21 du code général des collectivités territoriales).

Afin de lever une ambiguïté textuelle, la rédaction de l'article L. 2312-1 du code général des collectivités territoriales devrait être modifiée afin de préciser qu'une autorisation de programme ou d'engagement peut être votée lors de chaque étape budgétaire, même sans avoir été présentée lors du débat d'orientation budgétaire.

Ensuite, les règles de provisionnement posées à l'article L. 2252-3 du code général des collectivités territoriales devraient être modifiées. En effet, les provisions de droit commun déjà prévues pour les régions ou les départements, devraient être substituées aux provisions réglementées. Cette disposition libèrerait les communes d'une procédure lourde et excessivement contraignante. La suppression des provisions réglementées rendrait également inutile le cautionnement obligatoire qui devrait dès lors être supprimé.

En outre, il serait offert, dans certains cas, la possibilité de reprendre un excédent d'investissement en fonctionnement, ce qui confèrerait aux communes une certaine souplesse dans l'utilisation de leur budget (modification de l'article L. 2311-5 du code général des collectivités territoriales).

S'agissant de la simplification et de la meilleure lisibilité des documents budgétaires, les annexes prévues à l'article L. 2313-1 du code général des collectivités territoriales devraient être allégées. Les maquettes budgétaires devraient notamment être standardisées.

Il pourrait également être prévu de créer des régies municipales simplifiées pour les communes de moins de 3.500 habitants, qui seraient gérées en budget annexe. Cela permettrait aux communes de développer une gestion directe de certains services sans avoir à constituer de nouvelle structure.

En outre, certains établissements publics seraient autorisés, du fait de leur toute petite taille et qu'ils n'utilisent pas la section d'investissement, à prendre une délibération d'affectation du résultat.

Cette évolution législative du cadre budgétaire et comptable des communes devrait également s'accompagner de l'adoption de nombreuses mesures de simplification et d'amélioration de nature réglementaire. Ainsi en serait-il par exemple pour la simplification de la présentation des documents budgétaires. Les subventions d'équipement devraient en outre être inscrites directement en section d'investissement alors que jusqu'à présent elles étaient imputées en section de fonctionnement et réapparaissaient en investissement par une opération d'étalement de la charge.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 44 sans modification.

Article 45
Modifications du code des juridictions financières

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance le code des juridictions financières afin de permettre la création de formations conjointes de délibéré rassemblant les juridictions ayant pris part à un contrôle commun (1°), de transférer aux chambres régionales des comptes le contrôle des groupements d'intérêt public majoritairement composés de personnes morales de droit public relevant de leur compétence (2°), d'étendre aux chambres territoriales des comptes la possibilité de recevoir de la Cour les mêmes délégations que les chambres régionales (3°) et de mettre à jour le code pour :

- étendre les pouvoirs d'instruction des magistrats de la Cour à toutes les catégories de rapporteurs (4° a) ;

- compléter la liste des rapports que publie la Cour par des rapports thématiques (4° b) ;

- y inscrire les relations de la Cour avec le Parlement telles que les détermine la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (4° c).

Le Gouvernement disposera d'un délai de six mois à compter de la publication de la loi pour prendre une ordonnance sur le fondement de l'habilitation prévue à cet article.

L'ensemble des textes législatifs relatifs aux juridictions financières a fait l'objet d'une codification, intervenue en 1995142(*).

Les mesures que le Gouvernement serait habilité à prendre par ordonnance en vertu de l'article 45 visent à simplifier et rendre plus efficace le fonctionnement de ces juridictions.

1. Les délibérés conjoints

Les juridictions financières sont progressivement conduites à réaliser des contrôles parallèles, afin de s'adapter aux évolutions de l'organisation de l'État et d'examiner de façon plus complète certains thèmes.

Ainsi, la décentralisation ayant entraîné le développement de politiques communes associant l'État et les collectivités territoriales, la Cour et les chambres régionales ont multiplié les contrôles simultanés, dans une perspective de synthèse. Les chambres territoriales peuvent aussi mener des enquêtes conjointes sur certains thèmes, comme le prévoit l'article R. 136-3 du code des juridictions financières. Le contrôle de gestion est effectué par chaque juridiction dans son ressort territorial.

En revanche, pour orienter les travaux simultanés, pour la globalisation de l'évaluation et, le cas échéant, les suites à donner sous forme de publication, la formation de délibéré devrait être adaptée.

En effet, les travaux simultanés aboutissent généralement à une publication des observations des juridictions financières, dans un souci d'évaluation des politiques publiques. Les dernières publications issues de travaux communs ont porté, en 2003, sur la gestion du système éducatif et sur la gestion des services publics d'eau et d'assainissement.

Toutefois, le code des juridictions financières n'organise pas ce type de contrôles. Cette déficience est particulièrement dommageable en ce qui concerne l'adoption des observations des juridictions. En effet, le code ne prévoit pas de formation de délibéré permettant aux juridictions ayant participé à un contrôle commun d'adopter conjointement une synthèse.

Le comité du rapport public et des programmes, devant lequel est présentée la synthèse des travaux communs des chambres, ne comprend que des magistrats de la Cour des comptes qui n'ont pas participé aux travaux présentés par les chambres.

L'ordonnance permettrait donc la création de formations conjointes, rassemblant les juridictions prenant part à un des contrôles simultanés. Ces formations interjuridictions seraient amenées à statuer sur l'orientation des travaux, leur synthèse et leurs suites. Un décret devrait fixer leur composition et leur fonctionnement.

Le comité du rapport public pourrait également accueillir des magistrats issus des chambres régionales des comptes.

2. Le transfert du contrôle des groupements d'intérêt public aux chambres compétentes pour contrôler les personnes morales qui y participent

La charge des contrôles juridictionnels de la Cour des comptes s'est considérablement accrue du fait de la multiplication des groupements d'intérêt public (GIP).

Le nombre de GIP que la Cour doit obligatoirement contrôler est ainsi passé de 96 en 1996 à 323 en 2003143(*), alors qu'une grande partie d'entre eux rassemble essentiellement des collectivités locales, ou vise à mener à bien des politiques d'intérêt local, dans des domaines tels que la politique de la ville, le développement social urbain, l'accès à l'emploi ou l'enseignement.

Actuellement, seuls les GIP hospitaliers sont soumis au contrôle des chambres régionales, en application de l'article L. 211-9 du code des juridictions financières, issu de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle. Les chambres régionales contrôlent par ailleurs les comptes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics (art. L. 211-1 du code des juridictions financières).

Par cohérence, l'ordonnance confierait aux chambres régionales des comptes le contrôle des comptes de tous les GIP dotés d'un comptable public et majoritairement composés de personnes morales de droit public relevant de leur compétence.

S'il n'est pas possible aujourd'hui, avant qu'ils ne déposent les dossiers relatifs à leurs comptes annuels et que leurs statuts soient analysés, de connaître le nombre de GIP dont le contrôle sera ainsi transféré aux chambres régionales, on peut estimer qu'une grande partie d'entre eux devrait échapper au contrôle de la Cour après cette réforme.

3. Les délégations de la Cour aux chambres territoriales des comptes

La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française sont toutes deux dotées d'une chambre territoriale des comptes (art. L. 262-1 et 272-1 du code des juridictions financières).

L'habilitation prévue au 3° de l'article 45 a pour objet d'étendre aux chambres territoriales des comptes la faculté reconnue à la Cour de déléguer aux chambres régionales le contrôle des comptes et de la gestion des établissements publics nationaux (art. L. 111-9 du code des juridictions financières).

Cette délégation est donnée par arrêté du premier président de la Cour, après avis de son procureur général et des présidents des chambres régionales concernées. Les catégories d'établissements publics intéressés et la durée de la délégation sont définis à l'article R. 111-1 du code. Peut ainsi être délégué par la Cour le contrôle :

- des établissements publics à caractère scientifique ;

- des établissements d'enseignement supérieur à caractère administratif placés sous la tutelle du ministre chargé de l'enseignement supérieur ;

- des écoles d'architecture ;

- des établissements d'enseignement supérieur agricole et vétérinaire ;

- des instituts universitaires de formation des maîtres ;

- des centres régionaux des oeuvres universitaires ;

- des centres régionaux d'éducation populaire et de sports ;

- des centres régionaux de documentation pédagogique ;

- des établissements d'enseignement mentionnés à l'article L. 211-4 et L. 162-3 du code de l'éducation et du lycée Comte de Foix, à Andorre, assimilé à cette catégorie ;

- des établissements créés en application de l'article L. 321-1 du code de l'urbanisme ;

- des chambres de commerce et d'industrie et de leurs groupements ;

- des chambres des métiers et de leurs groupements ;

- des chambres d'agriculture et de leurs groupements.

S'agissant de la Polynésie française, la possibilité de délégation a été prévue par l'article 21 de la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française, qui a complété à cet effet l'article L. 111-9 du code des juridictions financières. Ainsi « le jugement des comptes et l'examen de la gestion de tout ou partie des établissements publics nationaux relevant d'une même catégorie et ayant leur siège en Polynésie française peuvent être délégués à la chambre territoriale des comptes par arrêté du premier président de la Cour des comptes pris après avis du procureur général près la Cour des comptes et du président de la chambre territoriale des comptes ».

Plus récemment encore, les compétences de la chambre territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie ont été élargies par une possibilité de délégation prévue dans les mêmes conditions, à l'article 1er (1°) de l'ordonnance n° 2004-728 du 22 juillet 2004 portant actualisation des dispositions du code des juridictions financières applicables en Nouvelle-Calédonie144(*).

Votre commission estime par conséquent que ce point de l'habilitation prévue à l'article 45 est devenu caduc. Aussi vous propose-t-elle d'adopter un amendement tendant à supprimer le 3° du présent article.

4. L'actualisation du code des juridictions financières.

Le 4° de l'article 45 tend à habiliter le Gouvernement à mettre à jour le code des juridictions financières sur trois points.

L'extension à tous les rapporteurs des pouvoirs d'instruction réservés aux magistrats de la Cour

Le régime juridique applicable, au sein de la Cour des comptes, aux rapporteurs extérieurs à temps plein -au nombre de soixante environ- et aux conseillers maîtres en service extraordinaire -au nombre d'une dizaine- diffère de celui des membres du corps de la Cour, qui ont le statut de magistrats. En effet, les rapporteurs extérieurs et les conseillers maîtres, qui ne prêtent pas serment tout en étant soumis aux secrets professionnel et de l'instruction, ne peuvent signer les arrêts relatifs aux comptes des comptables publics, puisque toute activité juridictionnelle leur est interdite.

Il résulte par ailleurs de l'évolution des textes et du fonctionnement de la Cour qu'ils ne peuvent, dans le cadre de l'instruction, encadrer les experts privés auxquels la Cour peut recourir aux termes de l'article L. 140-3 du code des juridictions financières, ni bénéficier du droit de communication des agents des services financiers prévu par l'article L. 140-4 du même code, ni prendre connaissance des documents comptables des contractants pour contrôler l'exécution d'une délégation de service public (art. L. 140-4-1 du code précité).

Toutes ces limitations sont dues à la rédaction des textes en vigueur, qui fait référence aux « magistrats » plutôt qu'aux « rapporteurs ». L'ordonnance devrait par conséquent unifier les compétences d'instruction de l'ensemble des rapporteurs, qu'ils appartiennent ou non au corps des magistrats de la Cour des comptes, en procédant, en l'espèce, à une simple substitution des deux termes.

Les pouvoirs d'instruction des magistrats et rapporteurs des chambres régionales des comptes étant définis par renvoi aux articles concernant la Cour145(*), une démarche d'unification similaire devrait être mise en oeuvre à l'égard des compétences des rapporteurs extérieurs de ces chambres.

- Les rapports thématiques de la Cour des comptes

Depuis une douzaine d'années, la Cour des comptes publie des rapports dits « particuliers », consacrés aux résultats de ses contrôles et de ceux des chambres régionales, dont le rapport public annuel ne permettrait pas de rendre compte dans toute leur ampleur et toute leur complexité. Ces rapports ont porté, par exemple, sur :

- les organismes d'habitation à loyer modéré (1994) ;

- le dispositif de lutte contre la toxicomanie (1998) ;

- la fonction publique de l'État (2000) ;

- les communautés urbaines (2001) ;

- la politique de la ville (2002) ;

- la Poste (2003).

L'intégration de ces rapports dans la liste des rapports que doit publier la Cour apparaît aujourd'hui nécessaire face au développement de recours contentieux à l'encontre de ses décisions, même non juridictionnelles. Seul le rapport public annuel, prévu aux articles L. 136-1 à L. 136-5 du code des juridictions financières, et les rapports sur chaque projet de loi de règlement (art. L.O. 132-1) et sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale (art. L.O. 132-3) ont aujourd'hui une existence reconnue par la loi.

L'ordonnance devrait donc compléter le code par la liste des rapports particuliers, afin d'éviter toute mise en cause des compétences de la Cour en ce domaine.

- Les relations de la Cour des comptes avec le Parlement

L'article 58 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances a redéfini les relations de la Cour et du Parlement, en prévoyant que « la mission d'assistance du Parlement confiée à la Cour des comptes par le dernier alinéa de l'article 47 de la Constitution comporte notamment :

« 1° L'obligation de répondre aux demandes d'assistance formulées par le président et le rapporteur général de la commission chargée des finances de chaque assemblée dans le cadre des missions de contrôle et d'évaluation [...] ;

«  La réalisation de toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elle contrôle. [...] ;

« 3° Le dépôt d'un rapport préliminaire conjoint au dépôt du rapport mentionné à l'article 48 relatif aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur ;

« 4° Le dépôt d'un rapport conjoint au dépôt du projet de loi de règlement, relatif aux résultats de l'exécution de l'exercice antérieur et aux comptes associés, qui, en particulier, analyse par mission et par programme l'exécution des crédits ;

« 5° La certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l'État. Cette certification est annexée au projet de loi de règlement et accompagnée du compte rendu des vérifications opérées ;

« 6° Le dépôt d'un rapport conjoint au dépôt de tout projet de loi de finances sur les mouvements de crédits opérés par voie administrative dont la ratification est demandée dans ledit projet de loi de finances. [...] »

Le texte initial du projet de loi habilitait le Gouvernement, d'une part, à reprendre dans le code des juridictions financières cet article, afin de compléter la codification en la matière et, d'autre part, à procéder à des aménagements connexes.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Etienne Blanc, rapporteur de la commission des Lois, qui limite le champ de l'habilitation, s'agissant des relations de la Cour et du Parlement, à la seule transposition dans le code des juridictions financières de l'article 58 de la loi organique du 1er août 2001. Le Parlement conserverait ainsi l'initiative de proposer, le cas échéant, les mesures d'application de l'article 58.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 45 ainsi modifié.

Article 46
Nouvelle habilitation à clarifier le droit de la commande publique

Cet article tend à habiliter le Gouvernement pour six nouveaux mois à clarifier par ordonnance le droit de la commande publique. En effet, l'ordonnance prévue par l'article 5 de la loi précitée du 2 juillet 2003 n'a pu l'être dans les délais impartis146(*).

L'adoption de cette ordonnance était tributaire de l'entrée en vigueur des nouvelles directives communautaires relatives à la commande publique. Or, la directive n° 2004/18/CE relative à la coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, de fournitures et de services et la directive n° 2004/17/CE portant coordination des procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux n'ont été publiées que le 31 avril 2004 et n'ont par conséquent pas pu être transposées à temps.

Le champ de l'habilitation permettrait au Gouvernement de prendre par ordonnance, dans le respect de la transparence et de la bonne information du public :

- les mesures nécessaires pour rendre compatibles avec le droit communautaire les dispositions législatives relatives à la passation des marchés publics. Avant même l'adoption de ces deux plus récentes directives précitées, certaines lois n'ont pas été adaptées à l'évolution des normes communautaires ;

- les mesures permettant de clarifier les règles applicables aux marchés passés par certains organismes non soumis au code des marchés publics.

Cette habilitation devrait concerner les lois régissant les marchés passés par les organismes non soumis au nouveau code des marchés publics, ce dernier, issu du décret n° 2004-15 du 7 janvier 2004, ne couvrant pas l'ensemble du droit de la commande publique.

Par conséquent, l'ordonnance devrait avoir en particulier pour objet de modifier les lois n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence, n° 92-1282 du 11 décembre 1992 relative aux procédures de passation de certains contrats dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications, n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques et n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques ainsi que certaines disposition législative du code de la santé publique, du code de la sécurité sociale et du code de la construction et de l'habitat147(*).

Comme votre rapporteur l'avait déjà indiqué l'an dernier lors de l'examen de la première habilitation, il est indispensable que l'ordonnance prise en application de cet article prenne en compte l'évolution la plus récente du droit communautaire de la commande publique. Il avait en effet affirmé qu' « il serait regrettable que, quelques mois après l'adoption des ordonnances, les dispositions législatives nouvellement modifiées ne soient de nouveau plus compatibles avec les règles communautaires »148(*).

Par conséquent, il convient d'habiliter de nouveau le gouvernement afin qu'il puisse prendre cette ordonnance rendant notamment compatible le droit national de la commande publique avec les règles posées par les deux directives communautaires précitées.

En vertu de l'article 61, l'ordonnance devra être prise dans un délai de six mois suivant la publication de la présente loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 46 sans modification.

Article 47
Diminution des cas de consultation cumulative
du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat
et des comités techniques paritaires

Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, a pour objet d'habiliter le gouvernement à diminuer le nombre de procédures décisionnelles dans lesquelles à la fois le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires doivent être consultés.

En effet, les procédures de décision de l'Etat peuvent se trouver alourdies et retardées par ces multiples consultations, bien souvent redondantes et inutiles.

Cet article a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture.

L'ordonnance devra être prise dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi.

Sans remettre en cause l'importance du dialogue, de la participation et de la concertation au sein de l'administration, il convient de parvenir à un équilibre prenant davantage en compte la sécurité juridique et la nécessité d'avoir une administration réactive et efficace.

La participation des fonctionnaires s'exerce par l'intermédiaire de leurs délégués, qui siègent dans des organismes consultatifs dans les trois domaines suivants (article 9 de la loi n° 83-634 portant statut général de la fonction publique) :

- organisation et fonctionnement des services publics ;

- élaboration des règles statutaires ;

- examen des décisions individuelles relatives à leurs carrières.

S'agissant des fonctionnaires de l'Etat, leur participation s'exerce notamment au sein du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, des commissions administratives paritaires, des comités techniques paritaires et des comités d'hygiène et de sécurité en vertu de l'article 12 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat.

Si les comités techniques paritaires sont spécialisés dans l'élaboration des règles statutaires et les commissions administratives paritaires pour l'examen des décisions individuelles relatives aux carrières des fonctionnaires, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat est en revanche susceptible d'intervenir dans les trois domaines précédemment cités.

Par conséquent, disposant d'un champ de compétences se recouvrant en partie, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires sont souvent amenés à donner chacun leur avis à propos d'une même décision administrative.

Les compétences du Conseil supérieur
de la fonction publique de l'Etat

Institué dès la création du statut général de la fonction publique de l'Etat par la loi du 19 octobre 1946, le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat est présidé par le Premier ministre et comprend en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires (article  13 de la loi précitée du 11 janvier 1984).

L'article 81 peut connaître de « toute question d'ordre général intéressant les fonctionnaires de l'Etat ou la fonction publique de l'Etat, dont il est saisi soit par le Premier ministre, soit à la demande écrite du tiers de ses membres titulaires » en vertu de l'article 1er du décret n° 82-450 du 28 mai 1982 qui fixe les compétences, la composition, l'organisation et le fonctionnement du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat.

Aux termes de l'article 2 du décret précité, il doit être consulté sur :

- les projets de loi modifiant les lois précitées du 13 juillet 1983 et 11 janvier 1984 ainsi que ceux dérogeant à ces lois et relatifs à un ou plusieurs corps de l'Etat ;

- les projet de décret comportant des dispositions communes à plusieurs corps de fonctionnaires de l'Etat, sauf lorsque ces projets relèvent d'un seul comité technique paritaire du fait qu'ils concernent une question relative à l'élaboration ou la modification des règles régissant les personnels soit affectés dans les services placés sous l'autorité du ministre auprès duquel il est institué, soit d'un établissement public, ou du fait qu'ils concernent des problèmes de formation intéressant ces personnels ;

- les projets de décret concernant les corps interministériels ou à vocation interministérielle relevant du Premier ministre ou régissant des emplois communs à l'ensemble des administrations. Dans ce domaine, l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat remplace la consultation des comités techniques paritaires ;

- les orientations de la politique de formation professionnelle continue dans la fonction publique de l'Etat. Il examine le rapport du directeur général de l'administration et de la fonction publique de l'Etat sur les programmes de formation des départements ministériels ainsi que sur le bilan des actions entreprises et il est consulté sur les principales questions relatives à l'élaboration et la mise en oeuvre des actions de formation professionnelle dans l'administration ;

- les problèmes relatifs à l'hygiène, la sécurité du travail et la médecine de prévention ;

- les questions d'ordre général relatives à l'élaboration, à la mise en oeuvre et au bilan des actions liées à la modernisation du service public, aux restructurations administratives, à la déconcentration et aux implantations des administrations publiques sur le territoire.

Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut également, dans certains cas, être une commission de recours.

Les compétences des comités techniques paritaires

En vertu de l'article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la formation publique de l'Etat, les comités techniques paritaires sont institués dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère économique et commercial.

Composés d'un nombre égal de représentants de l'administration et de représentants du personnel, les CTP « connaissent des problèmes relatifs à l'organisation et au fonctionnement des services, au recrutement des personnels et des projets de statuts particuliers ».

L'article 12 du décret n° 82-452 du 28 mai 1982 relatif aux comités techniques paritaires prévoit que ces derniers sont saisis pour avis pour tous les projets de textes et questions relatifs :

- aux problèmes généraux d'organisation des administrations, établissements ou services ;

- aux conditions générales de fonctionnement des administrations et services ;

- aux programmes de modernisation des méthodes et techniques de travail et à leur incidence sur la situation du personnel ;

- aux règles statutaires ;

- à l'examen des grandes orientations à définir pour l'accomplissement des tâches de l'administration concernée ;

- aux problèmes d'hygiène et de sécurité ;

- aux critères de répartition des primes de rendement ;

- aux plans fixant des objectifs pluriannuels d'amélioration de l'accès des femmes aux emplois d'encadrement supérieur ;

- à l'évolution des effectifs et des qualifications.

Les comités techniques paritaires ministériels, placés auprès de chaque ministre concerné, examinent les questions intéressant l'ensemble des services centraux et déconcentrés du département ministériel considéré.

Les comités techniques paritaires centraux institués auprès des directeurs du personnel de l'administration centrale, connaissent des questions intéressant l'ensemble des services centraux du département ministériel concerné.

Comme l'explique l'exposé des motifs, ces procédures de consultation cumulative se sont en partie développées du fait de la jurisprudence du Conseil d'Etat qui interprète le droit actuel comme imposant dans de nombreuses hypothèses l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat ainsi que celui d'un, voire plusieurs comités techniques paritaires ministériels.

Ainsi en est-il par exemple lorsqu'un texte législatif ou réglementaire a une incidence sur l'ensemble de la fonction publique de l'Etat. Le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut alors donner son avis en tant qu'organisme interministériel tandis que tous les comités techniques paritaires sont consultés pour représenter chacun des ministères.

Dans son rapport annuel de 2003 dont l'étude était consacrée aux « perspectives de la fonction publique », le Conseil d'Etat avait lui-même indiqué que, du fait des textes législatifs et réglementaires en vigueur, il était « amené, de son côté, à plusieurs reprises, à refuser d'examiner un texte ou à l'annuler, faute de consultation nécessaire en droit, ou encore à devoir expliciter précisément la conduite à tenir par l'administration devant tel ou tel type de textes, par exemple en cas d'élaboration d'un statut d'emplois ou d'un statut de fonctions »149(*).

Parmi les exemples cités par le Conseil d'Etat figure notamment un arrêt du 25 avril 1986 dans lequel il a jugé que le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat devait être consulté sur un projet de texte relatif aux obligations de service des enseignants de plusieurs corps de fonctionnaires150(*).

La présente habilitation pourrait par conséquent permettre au gouvernement de limiter par ordonnance les cas dans lesquels le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires doivent être cumulativement consultés, en particulier pour les décisions mineures, et éviter ainsi les lourdeurs inutiles dans les procédures décisionnelles de l'administration.

L'exposé des motifs indique que l'ordonnance pourrait en particulier prévoir la possibilité de substituer l'avis du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat à celui des comités techniques paritaires dans des cas fixés par décret.

L'allègement des procédures de consultation au sein de l'administration est indispensable. Dans son étude précitée consacrée aux « Perspectives pour la fonction publique »151(*), le Conseil d'Etat a également mis en évidence « la lourdeur et la complexité du régime de consultation des organismes paritaires, dont l'intervention s'impose de plus en plus systématiquement ».

Votre commission vous propose un amendement tendant à substituer à cette habilitation une mesure d'application immédiate. L'article 17 de la loi précitée du 11 janvier 1984 serait ainsi modifié afin de prévoir que le décret déterminant la compétence, la composition, l'organisation et le fonctionnement de ces organismes consultatifs devrait également préciser les cas dans lesquels la consultation du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat peut dispenser de celle des comités techniques paritaires et la consultation de ces derniers dispenser de celle du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat.

Il semble en effet inutile d'habiliter le gouvernement à prendre une ordonnance alors qu'il suffit de modifier un seul article de la loi du 11 janvier 1984 pour que le décret puisse ensuite déterminer dans quels cas la consultation cumulative du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat et les comités techniques paritaires serait nécessaire.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 47 ainsi modifié.

Article 47 bis (nouveau)
Rapport au Parlement sur la mise en application des lois

L'article 47 bis du projet de loi, issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, avec un avis favorable de la commission des Lois, tend à prévoir que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la mise en application de chaque loi, six mois après sa publication.

Lors de la présentation de son amendement152(*), le Gouvernement a indiqué vouloir donner une force supplémentaire au dispositif de la résolution de M. Jean-Luc Warsmann, adopté par l'Assemblée nationale le 12 février 2004153(*).

Cette résolution complète l'article 86 du Règlement de l'Assemblée nationale et prévoit, sans préjudice de la possibilité pour les commissions de conduire des missions sur l'application d'une législation, qu'« à l'issue d'un délai de six mois suivant l'entrée en vigueur d'une loi dont la mise en oeuvre nécessite la publication de textes de nature réglementaire, le député qui en a été le rapporteur ou, à défaut, un autre député désigné à cet effet par la commission compétente, présente à celle-ci un rapport sur la mise en application de cette loi ».

Si aucun bilan ne peut encore être tiré de cette réforme récente, la démarche du Gouvernement peut néanmoins s'appuyer sur le contrôle de l'application des lois réalisé chaque année par le Sénat, depuis 1972.

1. L'expertise du Sénat en matière de contrôle de l'application des lois

Le rapport du Sénat sur le contrôle de l'application des lois met chaque année en évidence les insuffisances du suivi réglementaire exercé par le pouvoir exécutif pour assurer l'application des prescriptions du législateur. Il se fonde sur le recensement par chaque commission des textes réglementaires publiés pour assurer l'application de chacune des lois qu'elle a été chargée de rapporter au fond.

L'évaluation de l'applicabilité de chaque loi se fonde sur le rapport entre le nombre de mesures d'application publiées et le nombre de textes d'application qu'elle prévoit.

Ces travaux permettent aujourd'hui d'apprécier sur le long terme l'évolution de l'application des lois votées. Ainsi, au cours de la XIème législature, s'est amplifiée une tendance à voter moins de lois, mais d'une particulière densité et multipliant les renvois à des décrets d'application.

Alors que les 27 lois promulguées en 2000-2001 (hors les traités et accords internationaux et les lois d'application directe) appelaient 425 décrets ou arrêtés, les 27 lois adoptées en 2001-2002 en appelaient 617154(*). Cette tendance a cependant connu une atténuation en 2002-2003. En effet, au cours de cette session, si le nombre de lois votées a augmenté (41)155(*), le nombre de dispositions renvoyant à des textes réglementaires a considérablement diminué: 559, soit une baisse de 9,4 % par rapport à la session précédente.

Outre cette évolution en tendance, le rapport annuel du Sénat sur le contrôle de l'application des lois indique le stock des lois qui demeurent, depuis juin 1981, partiellement ou totalement inapplicables, en raison des carences du suivi réglementaire. On dénombrait ainsi 193 textes en attente en 2002-2003 (contre 169 en 2001-2002), soit 15,2 % des lois adoptées depuis juin 1981.

Une amélioration peut être relevée au cours des dernières années, s'agissant des délais de publication des mesures expressément prévues par les lois adoptées au cours de chaque session. Ainsi, 83 % des mesures publiées l'ont été moins de six mois après la promulgation de la loi en 2002-2003156(*) (contre 86 % en 2001-2002, 75 % en 2000-2001 et 66 % en 1999-2000).

Application des lois : évolution de 1999-2000 à 2002-2003
(en % des lois appelant des mesures réglementaires d'application)157(*)

 

1999-2000

2000-2001

2001-2002

2002-2003

Lois non applicables

Près de 60 %

Près de 60 %

Un tiers

Près de 60 %

Lois partiellement applicables

Près de 30 %

Plus de 30 %

Près de 60 %

Près de 25 %

Lois applicables

Plus de 12 %

Plus de 7 %

Plus de 10 %

Près de 20 %

En revanche, le taux d'application des dispositions réglementaires prévues par les lois adoptées au cours de chaque année parlementaire s'est effondré, passant d'une moyenne supérieure à 20 % au cours de la XIème législature, à 9,7 % en 2002-2003, ce qui s'explique par l'adoption au cours de la session extraordinaire des textes appelant le plus grand nombre de mesures d'application (projet de loi portant réforme des retraites, projet de loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine).

Évolution du taux d'application des dispositions réglementaires prévues
(au 30 septembre de chaque année parlementaire)2

 

Nombre de lois votées
(1)
(à l'exclusion des lois d'application directe)

Nombre
de dispositions réglementaires prévues
(2)

Nombre
de dispositions réglementaires prises
(3)

(3)/(2)

1997-1998

33

358

76

21,2 %

1998-1999

32

392

74

18,9 %

1999-2000

32

331

115

34,7 %

2000-2001

27

425

95

22,3 %

2001-2002

27

617

141

22,8 %

2002-2003

41

559

54

9,7 %

Si le contrôle de l'application des lois effectué par le Sénat apparaît à la fois exhaustif et pertinent, il ne permet pas toujours d'obtenir du Gouvernement les raisons du retard de la mise en application des lois. C'est en particulier sur ce point que le dialogue avec le Gouvernement pourrait se révéler fructueux.

L'Assemblée nationale, quant à elle, ne s'est dotée que récemment d'une procédure de contrôle dans ce domaine.

2. Le choix de l'Assemblée nationale : le contrôle de l'application de chaque loi par son rapporteur

En modifiant son règlement par la résolution adoptée le 12 février 2004, l'Assemblée nationale a fait le choix d'une méthode de contrôle plus personnalisée, où le rapporteur du texte est amené à rapporter, six mois après son entrée en vigueur, sur sa mise en application. Avant cette réforme, l'Assemblée nationale ne réalisait de suivi de l'application des textes que dans le domaine fiscal158(*).

Le rapport désormais prévu par le dernier alinéa de l'article 86 du Règlement de l'Assemblée nationale a pour objet de faire le bilan des textes pris pour assurer l'entrée en vigueur de la loi et des dispositions qui n'ont pas été suivies des textes réglementaires nécessaires à leur mise en oeuvre. Le rapporteur est entendu par la commission à l'issue d'un nouveau délai de six mois en cas d'inapplicabilité persistante.

Très récente, cette réforme ne devrait connaître ses premières applications que dans la seconde moitié de l'année 2004.

3. Le rapport systématique du Gouvernement : une démarche ambitieuse qui reprend les initiatives du Parlement

Dans le prolongement des initiatives du Premier ministre en la matière, le Gouvernement a choisi de s'imposer une démarche symétrique à celle du Parlement.

Dans sa circulaire du 30 septembre 2003 relative à la qualité de la réglementation, le Premier ministre a défini une nouvelle procédure visant les décrets d'application des lois nouvelles. Une réunion interministérielle doit être organisée dans les jours suivant la promulgation de la loi, afin de recenser les décrets nécessaires à son application et d'arrêter un échéancier prévisionnel, « communiqué aux deux assemblées afin d'assurer l'information des parlementaires ».

Dans le cadre plus général du plan stratégique de l'administration électronique (PSAE) pour 2004-2007, un système d'organisation en ligne des opérations normatives (SOLON) doit être mis en place159(*). Il s'agit de développer un outil permettant la dématérialisation de l'ensemble de la chaîne normative.

Ce système concerne environ trois cent cinquante personnes au sein des cabinets ministériels et de certaines directions, qui interviennent lors de la production des textes normatifs. À terme, il devrait permettre au secrétariat général du Gouvernement de disposer d'un outil fiable de suivi de la production normative, qui pourra être utilisé pour évaluer l'applicabilité des lois et réaliser les rapports prévus à l'article 47 bis.

Le nouveau dispositif de contrôle de l'application des lois adopté en première lecture par l'Assemblée nationale apparaît ainsi comme le complément naturel des initiatives gouvernementales, sur lesquelles le suivi réglementaire pourra se fonder.

a) Le champ des textes réglementaires d'application

L'article 47 bis du présent projet de loi reprend le champ de contrôle adopté par l'Assemblée nationale, en considérant comme textes d'application non seulement les décrets et les arrêtés, mais aussi les circulaires. En effet, si la loi ne renvoie pas, pour son application, à des circulaires, les services chargés de l'application d'un texte se fondent souvent sur la norme la plus directement applicable et la plus proche. Le critère ainsi retenu pour la prise en compte des circulaires n'est pas l'obligation prévue par la loi de prendre un texte d'application, mais l'impact du texte réglementaire, quelle que soit sa nature, dans l'application de la loi par l'administration.

Dans la mesure où, comme l'a établi la jurisprudence du Conseil d'État, les circulaires peuvent contenir des « dispositions impératives à caractère général »160(*), il paraîtrait justifié que le législateur en prenne connaissance lorsqu'il souhaite contrôler l'application des lois.

b) Un rapport unique, à échéance fixe

Le délai de présentation du rapport par le Gouvernement, fixé à six mois après la publication de la loi, reprend celui fixé par l'Assemblée nationale pour son propre dispositif de contrôle.

Ce délai, ambitieux au regard du délai moyen de publication des mesures d'application des textes législatifs, peut appeler des ajustements. En effet, le délai de six mois pourrait revêtir un caractère incitatif à l'égard du Gouvernement. Toutefois, il ne pourra s'appliquer aux lois qui prévoyaient explicitement un délai supérieur à six mois pour la parution des textes d'application.

L'article 61 du présent projet de loi prévoit ainsi que certaines ordonnances ne soient prises que dans un délai de neuf, douze voire dix-huit mois. En outre, l'entrée en vigueur de la loi ne coïncide pas nécessairement avec sa promulgation, puisqu'elle peut fixer une entrée en application différée, globale ou partielle.

La loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce prévoit ainsi, en son article 33, qu'elle n'entrera en vigueur, sous certaines exceptions, que le 1er janvier 2005. De même, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ne prévoit pas moins de cinq délais d'entrée en vigueur différents pour ses différentes dispositions.

Aussi votre commission des Lois vous propose-t-elle d'adopter un amendement tendant à fixer le délai de dépôt du rapport au Parlement à neuf mois à compter de la publication de la loi ou, le cas échéant, à compter de la date d'entrée en vigueur qu'elle fixe.

Par ailleurs, le dispositif prévu par l'article 47 bis diffère de celui que s'est fixé l'Assemblée nationale en ce qu'il ne prévoit pas de poursuite du dialogue entre le Parlement et le pouvoir législatif dans l'hypothèse où toutes les dispositions de la loi n'auraient pas fait l'objet des mesures d'application nécessaires.

Votre commission des Lois vous invite par conséquent à adopter un amendement afin de prévoir le dépôt par le Gouvernement d'un rapport complémentaire, six mois après le rapport initial, lorsque plus d'un tiers des mesures d'application nécessaires à l'entrée en vigueur de la loi n'ont pas été prises à la date de publication du premier rapport.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter l'article 47 bis ainsi modifié.

CHAPITRE IV
MESURES DE SIMPLIFICATION ET DE RÉORGANISATION
DANS LE DOMAINE SANITAIRE ET SOCIAL

Article 48 A (nouveau)
(article premier de la loi du 19 juillet 1993)
Extension du bénéfice de la qualité de pupilles de la Nation

A l'initiative du Gouvernement et avec un avis favorable de la commission des Lois, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture ce nouvel article 48 A tendant à étendre le bénéfice de la qualité de pupilles de la Nation, à titre purement moral et à l'exclusion de toute attribution d'avantages pécuniaires, à certains enfants de fonctionnaires civils ou militaires décédés dans l'exercice de leurs fonctions, qui en étaient jusqu'à présent exclus.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales161(*).

Article 48
Simplification et clarification en matière de sécurité sociale

Cet article tend à habiliter le Gouvernement à modifier par ordonnance certaines dispositions dans le domaine de la sécurité sociale, pour :

- permettre les transferts de propriété entre la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et les unions de gestion des établissements des caisses d'assurance maladie, rénover le régime de suppléance des représentants du personnel dans les conseils d'administration des caisses de sécurité sociale et aménager les règles de tutelle financière et d'intervention des caisses nationales pour assurer le respect des conventions d'objectifs et de gestion ;

- simplifier et alléger les règles applicables aux relations entre l'Etat et les caisses et organismes concourant à la protection sociale et aux procédures d'extension et d'élargissement des accords conclus par les organisations syndicales et professionnelles en matière de prévoyance et de retraite complémentaire ;

- simplifier les règles de contreseing d'arrêtés ou de signature des conventions ;

- supprimer les procédures redondantes dans la mise en oeuvre des actions expérimentales de caractère médical et social ;

- simplifier les règles relatives à l'organisation, au fonctionnement et au financement des fonds gérés par les caisses de sécurité sociale ;

- simplifier le mode d'établissement et de révision des tableaux de maladies professionnelles ;

- simplifier les procédures d'indemnisation et le fonctionnement du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante ;

- harmoniser les conditions de suivi médical des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles graves et celles des victimes d'affections de longue durée ;

- supprimer la compétence des organismes de sécurité sociale en matière d'approbation des budgets des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux ;

- harmoniser le dispositif de report et de fractionnement des cotisations de retraite des professions libérales avec celui prévu pour les autres travailleurs non salariés non agricoles ;

- harmoniser l'application du plan comptable unique des organismes de sécurité sociale en l'étendant aux caisses de prévoyance sociale de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon ;

- simplifier l'organisation des régimes de sécurité sociale des travailleurs indépendants en prenant les mesures nécessaires à la création d'un régime social des travailleurs indépendants se substituant aux régimes d'assurance vieillesse et invalidité-décès des professions artisanales, industrielles et commerciales et au régime d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles, ce régime social devant exercer les missions d'un interlocuteur social unique, et à la création, à titre provisoire, d'une instance nationale élue se substituant aux conseils d'administration des caisses nationales des régimes mentionnés et à la nomination d'un directeur commun à ces caisses ;

- clarifier et aménager la mission, l'organisation et le fonctionnement de l'Union des caisses nationales de sécurité sociale et adapter les règles régissant ses relations avec l'Etat ;

- simplifier les modalités d'actualisation du montant du plafond de la sécurité sociale.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales162(*).

Article 49
Simplifications de dispositions
du code de l'action sociale et des familles

Cet amendement a pour objet d'autoriser le Gouvernement à modifier par ordonnance la partie législative du code de l'action sociale et des familles pour :

- simplifier les procédures d'admission à l'aide sociale ;

- simplifier et harmoniser les régimes d'autorisation et d'habilitation des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des activités d'accueil familial des personnes âgées et handicapées et adapter les règles de fonctionnement et de contrôle ainsi que les modalités de tarification qui leur sont applicables.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales163(*).

Article 50
Simplification dans le domaine de la santé

Cet article a pour objet de simplifier et clarifier certaines dispositions dans le domaine de la santé en :

- précisant, harmonisant et complétant les dispositions relatives aux différents établissements publics nationaux à caractère sanitaire ;

- simplifiant l'organisation et le fonctionnement des ordres professionnels des professions de santé ;

- harmonisant les dispositions répressives applicables aux infractions d'usurpation de titre et d'exercice illégal des professions réglementées par le code de la santé publique ;

- simplifiant la classification des boissons et la réglementation des débits de boissons ;

- unifiant la compétence juridictionnelle pour connaître des litiges relatifs à des contaminations ;

- transformant le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies en société anonyme à capitaux détenus majoritairement par l'Etat ou ses établissements publics ;

- réformant les règles de fonctionnement des établissements publics de santé, les règles et les modes d'organisation budgétaires et comptables, ainsi que les règles de festion des établissements de santé, adapter et aménager les compétences des agences régionales de l'hospitalisation en ces matières et réformant les règles de gestion des directeurs de ces établissements ;

- unifiant et clarifiant la compétence des juridictions en matière d'allocation des ressources des établissements de santé ;

- limitant aux seuls conventions collectives et accords conclus au niveau national la procédure d'agrément pour les établissements de santé ;

- simplifiant les procédures d'enregistrement applicables aux psychologues et aux assistants de services sociaux ;

- simplifiant les procédures de remplacement des professionnels de santé, y compris les médecins propharmaciens ;

- simplifiant les procédures relatives à la création et au changement d'exploitant des pharmacies et unifiant les régimes d'exercice de la profession de pharmacien.

Cet article fait l'objet d'un examen par délégation de la commission des Affaires sociales164(*).

CHAPITRE V
RATIFICATION D'ORDONNANCES
ET HABILITATION DU GOUVERNEMENT À PROCÉDER
À L'ADOPTION ET À LA RECTIFICATION
DE LA PARTIE LÉGISLATIVE DE CODES

Article 51
Ratification des ordonnances prises sur le fondement
de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003
habilitant le Gouvernement à simplifier le droit

Cet article a pour objet de ratifier l'ensemble des ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

Le Gouvernement, par la voix du ministre de la Fonction publique, s'était engagé publiquement à ce qu'intervienne une ratification expresse des ordonnances prises sur le fondement de la présente loi d'habilitation, estimant qu'un débat sur le contenu de ces ordonnances « qui n'est pas imposé par la jurisprudence parlementaire », relevait « d'une saine relation entre l'exécutif et le législatif » 165(*). Rappelons que, aux termes de l'article 38 de la Constitution, seul le dépôt d'un projet de loi de ratification est imposé à peine de caducité de l'ordonnance prise sur le fondement de la loi d'habilitation. En revanche, rien n'impose l'inscription à l'ordre du jour parlementaire et l'adoption de ces textes.

Votre commission se félicite donc que le présent article matérialise l'engagement gouvernemental et permette la ratification expresse des ordonnances prises en vertu de la loi précitée du 2 juillet 2003.

La ratification expresse permet de donner valeur législative expresse à l'ensemble des dispositions des ordonnances qui, à défaut de ratification, conservent une simple valeur réglementaire. En outre, elle présente toutes les garanties en matière de sécurité juridique, dans la mesure où la question de la valeur de telle ou telle disposition législative modifiée par ordonnance n'a plus à se poser, alors que cette difficulté est réelle lorsqu'aucun texte ne procède à cette ratification. Elle évite que des interrogations surgissent sur l'application éventuelle de la jurisprudence du Conseil constitutionnel consacrant la possibilité d'une ratification « implicite » ou « impliquée » des ordonnances, jurisprudence régissant l'hypothèse où les dispositions d'une ordonnance non expressément ratifiée seraient modifiées par un texte législatif ultérieur166(*).

Enfin, élément essentiel aux yeux de votre commission, la ratification expresse des ordonnances met le Parlement en mesure d'exercer un contrôle réel sur le contenu des ordonnances prises par le Gouvernement et notamment sur le respect des termes de la loi d'habilitation sur le fondement de laquelle elles ont été prises. L'examen du contenu des ordonnances prises en application de la loi précitée du 2 juillet 2003 s'impose d'ailleurs d'autant plus en raison de leur nombre (trente-trois ordonnances ont été prises à ce jour) et de leur champ d'application particulièrement varié et étendu.

Dans le cadre du présent article, votre commission vous proposera de ratifier, le cas échéant en les modifiant, les ordonnances prévues par le présent projet de loi (I). Elle vous soumettra également un amendement tendant à ratifier les ordonnances adoptées depuis la lecture à l'Assemblée nationale et rentrant dans son champ de compétence (II).

I. Les ratifications d'ordonnances prévues par le projet de loi

Dans sa rédaction actuelle, issue de la première lecture à l'Assemblée nationale, l'article 51 prévoit la ratification expresse de vingt ordonnances. Le texte initial de cet article assurait seulement la ratification de quatre ordonnances. L'Assemblée nationale, à la suite d'un amendement présenté par le rapporteur de sa commission des lois avec l'avis favorable du Gouvernement, a ajouté à ces ordonnances l'ensemble des ordonnances dont l'article 52 du projet de loi, par ailleurs supprimé, prévoyait la ratification. Elle a, par le même amendement, intégré cinq nouvelles ordonnances dans cet article de ratification, afin de prendre en compte l'adoption de certaines ordonnances après le dépôt du présent projet de loi.

L'ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux soumis à autorisation ne figure toutefois pas dans la liste dressée par le présent article, dans la mesure où ce texte a déjà été ratifié par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

Votre commission a renvoyé l'examen de certaines ordonnances n'entrant pas dans son champ de compétence aux quatre commissions saisies pour avis du présent projet de loi. Ainsi, la commission des Affaires économiques a procédé à l'examen des ordonnances visées aux I, VI et VII du présent article167(*), la commission des Affaires sociales à l'examen des ordonnances visées aux III, IX et XX,168(*) la commission des Finances à l'examen des ordonnances visées aux XI, XVII, XVIII169(*), et la commission des Affaires culturelles à l'examen de l'ordonnance visée au XIV170(*).

Seules onze ordonnances, ratifiées par les II, IV, V, VIII, X, XII, XIII, XV, XVI et XIX du présent article sont donc examinées ci-après.

1. L'ordonnance n° 2003-902 du 19 septembre 2003 portant suppression de procédures administratives de concertation applicables à certains projets de travaux, d'aménagements et d'ouvrages de l'Etat et de ses établissements publics, ainsi que des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics en relevant (article 51, II)

Cette ordonnance a été prise en application de l'article 9 de la loi du 2 juillet 2003. Cet article habilitait le Gouvernement à prendre des mesures de simplification des procédures de concertation administratives relatives aux travaux d'aménagement de l'Etat, des collectivités territoriales ou des établissements publics, pour favoriser la déconcentration des décisions et abréger les délais d'instruction. Elle comporte quatre articles.

Un projet de loi de ratification a été déposé à l'Assemblée nationale le 26 novembre 2003171(*), qui permet de satisfaire aux exigences de l'article 38 de la Constitution.

La loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a abrogé, à compter du 28 février 2003, la loi n° 52-1265 du 29 novembre 1952 sur les travaux mixtes, qui instituait une procédure de concertation sur les projets de travaux de l'Etat et des collectivités locales.

Cette procédure dite « d'instruction mixte à l'échelon central » (IMEC), pilotée par le préfet dans le département ou par le ministre compétent au niveau national, devait aboutir à un accord sur les projets entre les différents services de l'Etat. Lorsqu'un service exprimait des réserves, une commission de conciliation des « travaux mixtes » était saisie. Il revenait au Premier ministre de prendre une décision sur les travaux en cas de désaccord persistant.

Après de nombreuses années d'une pratique souple, cette procédure a été combinée avec celle de l'enquête publique, ce qui a entraîné une importante augmentation des délais d'instruction.

S'efforçant de corriger la lourdeur de cette procédure, les articles 135 et 136 de la loi relative à la démocratie de proximité l'ont remplacée par une concertation inter-administrative, complétée par une concertation avec les collectivités locales. La concertation devait cependant être conduite dans un délai maximal de six mois, si bien qu'elle ne pouvait être poursuivie durant toute la vie du projet, et que se posait la question du moment de son engagement.

Les difficultés posées ont retardé l'élaboration du décret d'application des articles 135 et 136 de la loi du 27 février 2002. Examinant le projet de décret en mai 2003, le Conseil d'Etat a estimé que le dispositif de concertation était d'autant plus complexe qu'il s'ajoutait à d'autres procédures. Ce dispositif alourdissait par conséquent les contraintes pesant sur le maître de l'ouvrage et accroissait les risques juridiques inhérents à la gestion des procédures.

L'article 1er de l'ordonnance abroge les dispositions introduites dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) par l'article 135 de la loi du 27 février 2002 (art. L. 1331-1 à L. 1331-3 du CGCT). Ces dispositions définissaient la procédure de concertation administrative applicable aux collectivités territoriales et aux établissements publics placés sous leur tutelle.

Les collectivités auront désormais la faculté de saisir ou non de leur projet le représentant de l'Etat dans le département. Ce dialogue, laissé à leur initiative, pourra porter sur des points précis, sans être contraint par un formalisme excessif. Le préfet garde par ailleurs la possibilité de s'opposer au projet au moment du lancement de l'enquête publique ou du prononcé de l'utilité publique. Les collectivités pourront recueillir auprès de lui tous les avis qu'elles jugent utiles.

L'article 2 de l'ordonnance abroge l'article 136 de la loi relative à la démocratie de proximité, qui établissait les règles applicables aux projets de l'Etat. Il s'agit ainsi de supprimer, d'une part, la procédure de concertation obligatoire avec les collectivités territoriales sur les projets de l'Etat et, d'autre part, la procédure de concertation entre les services de l'Etat.

Une circulaire du Premier ministre devrait rappeler la nécessité de la concertation informelle avec les collectivités, en amont de l'élaboration des projets. Une autre circulaire définira la concertation inter-administrative, suivant les recommandations du Conseil d'Etat172(*).

L'article 3 de l'ordonnance précise les conditions d'application dans le temps de l'ordonnance. Ainsi, les abrogations prévues aux articles 1er et 2 ne concernent pas les projets de travaux, d'aménagements ou d'ouvrages pour lesquels la décision d'ouvrir l'enquête publique a été prise antérieurement au 21 septembre 2003, date de publication de l'ordonnance.

Toutefois, l'absence de décret d'application des articles 135 et 136 de la loi relative à la démocratie de proximité a engendré, depuis la suppression de l'IMEC le 28 février 2003, une incertitude juridique qui paraissait susceptible de menacer la sécurité des procédures conduites depuis cette date. Pour remédier à ce risque, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de sa commission des Lois qui valide, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les décisions administratives relatives à la réalisation de projets de travaux, d'aménagements et d'ouvrage, pour lesquels une enquête publique a été ouverte après le 27 février 2003 et avant le 21 septembre 2003, en tant que leur légalité serait contestée sur le fondement de la méconnaissance des dispositions de la loi du 29 novembre 1952 sur les travaux mixtes, de ses décrets d'application, des articles L. 1331-1 à L. 1331-3 du code général des collectivités territoriales, ou de l'article 136 de la loi relative à la démocratie de proximité.

Cette nouvelle disposition paraît donc assurer la sécurité juridique des procédures de concertation menées au cours de la période transitoire.

Votre commission vous invite par conséquent à ratifier cette ordonnance sans modification.

2. L'ordonnance n° 2003-1067 du 12 novembre 2003 relative à l'élection des membres des chambres de commerce et d'industrie, à la prorogation des mandats des délégués consulaires et modifiant le code de commerce (article 51, IV)

En application de l'article 19 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, l'ordonnance n° 2003-1067 du 12 novembre 2003 a modernisé le régime des élections des membres des chambres de commerce et d'industrie (CCI).

Le champ de l'habilitation du Gouvernement à intervenir dans le domaine de la loi couvrait cinq domaines :

- simplifier les modalités d'organisation et de contrôle des élections, ainsi que la procédure contentieuse et harmoniser le régime électoral applicable aux CCI, aux tribunaux de commerce, aux tribunaux paritaires des baux ruraux, aux conseils prud'homaux et à la mutualité sociale agricole (1° de l'article 19) ;

- alléger les formalités nécessaires à l'établissement des fichiers électoraux et permettre la mise en oeuvre du vote électronique (2° de l'article 19) ;

- alléger les opérations électorales en adaptant le mode de scrutin et la durée des mandats des membres des CCI (3° de l'article 19) ;

- modifier la composition du corps électoral et les conditions d'éligibilité des membres des CCI (4° de l'article 19) ;

- simplifier la composition des CCI (5° de l'article 19).

En outre, le Gouvernement était autorisé à proroger, au plus tard jusqu'au 31 décembre 2004, le mandat des délégués consulaires, des membres des CCI et des tribunaux de commerce.

Cette ordonnance a été publiée le 13 novembre 2003. Le Gouvernement a donc respecté le délai de publication prévu par la loi d'habilitation à simplifier le droit, -douze mois à compter du 3 juillet 2003, date de publication de cette loi.

Un projet de loi de ratification a été déposé le 5 février 2004 sur le bureau du Sénat173(*). Cette formalité a été accomplie dans le délai prévu par la loi d'habilitation -trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

La présente ordonnance, composée de douze articles, ne reprend pas l'ensemble des points couverts par l'habilitation. N'y figure aucune mesure relative aux modalités de contrôle des élections et à la procédure contentieuse ou encore à l'allègement des formalités nécessaires à l'établissement des fichiers électoraux, lesquelles relèvent d'un décret n °2004-576 du 21 juin 2004 modifiant le décret n° 91-739 du 18 juillet 1991 relatif aux chambres de commerce et d'industrie, à l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie et aux groupements interconsulaires174(*).

Cette ordonnance propose de modifier la composition du corps électoral des CCI, les règles d'éligibilité de leurs membres, les modalités de vote et le nombre de sièges des CCI.

Cette réforme est entrée en vigueur le 1er janvier 2004, à l'exception du second alinéa du I de l'article premier et des articles 9 et 10. Certaines de ses dispositions ont cependant été modifiées ponctuellement par l'ordonnance n° 2004-328 du 15 avril 2004 relative à l'élection des délégués consulaires et des juges des tribunaux de commerce.

En effet, sous réserve d'une mesure destinée à réparer un oubli, l'ordonnance du 15 avril 2004 a apporté des modifications de pure forme pour compléter la structure du chapitre III du titre premier du livre VII du code de commerce relatif à l'élection des membres de chambres des commerce et d'industrie et des délégués consulaires. Ont été créées trois sections distinctes relatives aux membres des chambres de commerce et d'industrie, aux délégués consulaires et à des dispositions communes. En conséquence, cette ordonnance a donné une nouvelle numérotation aux articles figurant sous ce chapitre, y compris ceux mentionnés dans la présente ordonnance. Votre rapporteur regrette que le Gouvernement n'ait pas regroupé l'ensemble des modifications apportées au chapitre III précité au sein d'une seule ordonnance. Le travail de concertation entre le ministère de l'économie, de l'industrie et des finances et celui de la justice aurait sans doute mérité d'être davantage approfondi.

Les articles premier à 3 de l'ordonnance du 12 novembre 2003 modifient les articles L. 713-1 à L. 713-3 du code de commerce relatifs à la composition du corps électoral.

L'article premier de l'ordonnance réécrit entièrement l'article L. 713-1 du code de commerce relatif à la durée des mandats des membres des CCI, des présidents des CCI et des chambres régionales (I de l'article L. 713-1) et à la composition du corps électoral (II de l'article L. 713-1).

Le mandat des membres des CCI est réduit de six à cinq ans. Désormais complet, ce renouvellement n'intervient plus par moitié comme précédemment. Cette disposition se justifie par le souci de remédier à l'excessive abstention relevée lors des dernières élections (près de 70 %). D'après les informations fournies à votre rapporteur, l'espacement des élections, outre les économies et l'allègement des tâches des préfectures qui en résulteront, devrait contribuer à un regain d'intérêt pour celles-ci. De plus, la multiplication des consultations électorales ne permet pas aux élus de définir une politique à moyen terme pour leur chambre.

Afin de favoriser le renouvellement des dirigeants, une limitation à trois du nombre de mandat des présidents des CCI et des chambres régionales de commerce et d'industrie est instituée. En application de l'article 11 de l'ordonnance, cette disposition a vocation à s'appliquer aux « mandats acquis à compter des élections organisées en 2004 ».

L'économie du dispositif relatif à la composition du corps électoral n'est pas bouleversée. La distinction entre les électeurs à titre personnel et les électeurs par l'intermédiaire d'un représentant est maintenue. Le nouveau dispositif s'efforce toutefois d'assurer une meilleure représentativité des professionnels exerçant de réelles responsabilités de gestion, afin de renforcer les chambres dans leurs missions de porte-parole des intérêts économiques. Selon les informations fournies à votre rapporteur, les catégories d'électeurs n'ayant pas de fonction effective dans les entreprises ne pourront plus demeurer électeurs.

Ainsi, ne figurent plus dans la liste des électeurs à titre personnel plusieurs professions tels les capitaines au long cours, les capitaines de la marine marchande, les pilotes de l'aéronautique. De même, sont supprimées les références aux membres en exercice et anciens membres des tribunaux de commerce et des chambres de commerce et d'industrie ayant perdu la qualité d'électeur au titre de leur activité et ayant demandé leur maintien sur les listes électorales.

Relèvent en revanche toujours de la catégorie des électeurs à titre individuel : les commerçants immatriculés au registre du commerce et des sociétés, les chefs d'entreprise inscrits au répertoire des métiers et immatriculés au registre du commerce et, sous réserve d'une modification rédactionnelle, les conjoints qui collaborent à l'activité de leur époux commerçant ou chef d'entreprise.

La liste des électeurs par l'intermédiaire d'un représentant est également modifiée à la marge. L'ordonnance procède à une actualisation de la liste des sociétés autorisées à désigner un représentant chargé d'élire les membres des CCI :

- outre le maintien de la référence aux établissements publics à caractère industriel et commercial, il est désormais renvoyé à l'article L. 210-1 du code de commerce qui énonce les différentes sociétés commerciales en vigueur (société en nom collectif, société en commandite simple, société à responsabilité limitée, société par actions) ;

- comme précédemment, les personnes physiques ayant la qualité d'électeur à titre personnel (chefs d'entreprise et commerçants) et les sociétés commerciales disposent également de la faculté de désigner un représentant, sous réserve de disposer dans la circonscription d'un établissement faisant l'objet d'une inscription complémentaire ou d'une immatriculation secondaire dans la circonscription ;

- une mention nouvelle relative aux établissements enregistrés au registre du commerce et des sociétés appartenant à des sociétés étrangères à caractère commercial est ajoutée, sous réserve que le représentant désigné soit un ressortissant de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen (article 3 de l'ordonnance).

Aux termes de l'article 2 de l'ordonnance, une rédaction plus claire est donnée au III de l'article L. 713-2 du code de commerce pour éviter que les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite soient surreprésentées par rapport aux autres sociétés. En effet, ces dernières disposent non seulement de la possibilité de désigner un représentant mais possèdent autant de voix supplémentaires que d'associés, lesquels sont tous électeurs à titre individuel du fait de leur inscription au registre du commerce et des sociétés. Il est donc prévu qu'un représentant unique soit désigné au titre des associés et de la société. Ce dispositif n'exclut pas la possibilité prévue au I de l'article L. 713-2 de désigner des représentants supplémentaires selon l'importance des effectifs de l'établissement.

L'article 3 de l'ordonnance confirme les conditions requises pour être électeur figurant à l'article L. 713-3 du code de commerce, sous réserve de quelques compléments et clarifications.

Les représentants peuvent prendre part au vote, à condition d'exercer certaines fonctions dans l'entreprise telles que président-directeur général, président ou membre du directoire.... Aux termes de la nouvelle rédaction de l'ordonnance, la référence aux administrateurs est supprimée, afin d'éviter toute confusion avec la fonction d'administrateur judiciaire. La liste est également complétée par la référence aux fonctions de président du conseil de surveillance et de gérant. Le Gouvernement ayant omis de faire référence aux fonctions de président ou de membre du conseil d'administration, l'ordonnance n° 2004-328 du 15 avril 2004 répare cet oubli en complétant la liste énoncée dans cet article175(*).

L'ordonnance ne modifie pas profondément les conditions générales que doivent remplir l'ensemble des électeurs pour participer au vote :

- en application de l'article L. 2 du code électoral auquel il est renvoyé, l'âge minimum requis reste dix-huit ans, la jouissance des droits civils et politiques demeurant obligatoire. En revanche, l'exigence de la nationalité française disparaît, l'ordonnance prévoyant désormais que tout électeur doit être ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'espace économique et européen ;

- toute condamnation à l'une des peines, déchéances ou sanctions prévues par les articles L. 5 et L. 6 du code électoral et L. 625-8 du code de commerce (interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler) ou à une interdiction d'exercer une activité commerciale constitue un motif d'exclusion du corps électoral. Ces dispositions sont la stricte reprise du droit existant. Toutefois, le renvoi à l'article L. 5 du code électoral ne paraît plus pertinent. En effet, la nouvelle rédaction de cet article -entrée en vigueur en 1994- ne fait pas référence à une condamnation particulière. Sans doute l'ordonnance vise-t-elle l'ancienne rédaction de l'article L. 5 du code électoral laquelle énonçait les condamnations pénales entraînant automatiquement la radiation des listes électorales. Votre commission vous propose par un amendement de supprimer ce renvoi erroné pour viser expressément l'interdiction de toute condamnation pénale en raison de faits contraires à l'honneur ou à la probité et de toute condamnation civile (faillite personnelle) figurant au chapitre V du titre II du livre VI du code de commerce, au titre VI de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, ou dans le régime antérieur à cette loi, au titre II de la loi n °67-563 du 13 juillet 1967 ;

- constitue également un motif d'exclusion toute condamnation à des peines, déchéances ou sanctions prononcées sur le fondement de législations en vigueur dans les Etats membres de la Communauté européenne ou dans les Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen équivalentes à celles énoncées précédemment. Cet alinéa constitue un ajout destiné à tirer les conséquences de la possibilité pour les ressortissants européens de devenir électeurs des CCI. Votre commission vous propose par le même amendement une mesure de coordination avec les modifications précédemment présentées.

L'article 4 de l'ordonnance réécrit le second alinéa de l'article L. 713-6 du code de commerce afin d'augmenter le nombre de sièges en fonction de la démographie de chaque CCI. Ainsi, pour les CCI dont la circonscription compte moins de 30.000 électeurs, le nombre maximum de sièges est porté de 36 à 50176(*), pour celles dont la circonscription regroupe entre 30.000 et 100.000 électeurs ce nombre maximum augmente de 64 à 70177(*). L'ordonnance prévoit également une règle nouvelle relative aux CCI regroupant plus de 100.000 électeurs lesquelles peuvent désormais disposer d'un nombre de sièges compris entre 64 et 100.

Ces modifications se justifient par le souci de donner une meilleure représentativité aux acteurs économiques.

Notons qu'aux termes de l'ordonnance du 15 avril 2004178(*), l'article L. 713-6 du code de commerce devient l'article L. 713-12.

L'article 5 de l'ordonnance réécrit l'article L. 713-10 du code de commerce relatif aux conditions d'éligibilité des membres des CCI.

Figurent toujours dans la liste des membres éligibles les électeurs à titre personnel visés à l'article L. 713-1 du code de commerce ainsi que les électeurs inscrits en qualité de représentant. En revanche, est supprimée de cette liste la référence aux membres en exercice et aux anciens membres des chambres de commerce et d'industrie, par coordination avec la nouvelle rédaction de l'article L.713-1 du code de commerce.

Certaines conditions générales sont assouplies. Ainsi, l'âge d'éligibilité est réduit de trente à « dix-huit ans accomplis ». La condition de durée d'inscription au registre du commerce et des sociétés prévue pour les électeurs à titre individuel est également abaissée de cinq à deux ans au moins. La même mesure est prévue s'agissant des électeurs inscrits en qualité de représentant en ce qui concerne la durée d'activité minimale. Cette modification est destinée à de faciliter l'accès aux CCI des jeunes créateurs d'entreprises.

L'ordonnance ajoute un paragraphe nouveau (II de l'article L. 713-10) pour décrire la procédure applicable en cas de démission d'un membre d'une CCI ne remplissant plus les conditions d'éligibilité. La démission doit être présentée au préfet. A défaut, ce dernier déclare le membre démissionnaire d'office. Une cessation d'activité inférieure à six mois ne constitue pas un motif de démission, sauf si elle résulte d'une condamnation pénale ou civile visée à l'article L. 713-3. Votre commission vous propose dans le même amendement, une coordination avec les modifications proposées à l'article L. 713-3 (article premier).

Notons qu'aux termes de l'ordonnance du 15 avril 2004 (article 2), l'article L. 713-10 devient l'article L. 713-4.

L'article 6 de l'ordonnance modifie le dernier alinéa de l'article L. 713-11 du code de commerce pour définir de nouvelles modalités de vote aux élections des membres des CCI. Le vote par correspondance ou par voie électronique est désormais la règle. En cas de confusion entre ces deux modes de vote, seul celui par voie électronique pourra être considéré comme valide179(*). Ce dispositif nouveau vise à lutter contre un taux d'abstention très élevé. Les prochaines élections des membres des CCI qui doivent avoir lieu le 3 novembre prochain permettront de prendre la mesure de l'efficacité de ce mécanisme.

Notons qu'aux termes de l'ordonnance du 15 avril 2004 (article 2), l'article L. 713-11 qui devient l'article L. 713-15 est complété afin d'étendre l'application de ces dispositions aux élections des délégués consulaires180(*).

Votre commission vous propose dans le même amendement d'insérer un article additionnel après l'article 6 afin d'actualiser le contenu de l'article L. 713-16 du code de commerce relatif au mode de scrutin des élections des délégués consulaires et des membres des chambres de commerce et d'industrie. Actuellement, le caractère uninominal à un tour du scrutin est consacré dans la loi. Toutefois, un usage s'est instauré depuis de nombreuses années selon lequel les élections ont lieu au scrutin majoritaire plurinominal à un tour. Dans le souci de mettre le droit en conformité avec la pratique, il est apparu opportun de préciser qu'il s'agit d'un scrutin majoritaire plurinominal à un tour.

L'article 7 de l'ordonnance réécrit le contenu de l'article L. 713-14 du code de commerce. L'incompatibilité entre le mandat de délégué consulaire et celui de membre d'une CCI est supprimée. D'après les informations obtenues par votre rapporteur, cette modification s'explique par le souci de prendre acte du fait que les délégués consulaires n'ont plus de fonction de conseil auprès des CCI181(*). De nouvelles dispositions relatives aux conditions de renouvellement des membres d'une CCI figurent désormais à l'article L. 713-14 :

- en cas de dissolution, le renouvellement des membres des CCI doit intervenir dans les six mois de la dissolution, sauf si celle-ci est prononcée moins d'un an avant le renouvellement général ;

- en cas de vacance de la moitié des sièges de la CCI, de nouvelles élections sont organisées par le préfet dans un délai de six mois, sauf si cette situation intervient moins d'un an avant le renouvellement général ;

- la durée du mandat des membres élus en cas de vacance de sièges ou de dissolution expire à la date à laquelle le membre élu initialement aurait été soumis à renouvellement. Votre commission vous propose de clarifier la rédaction de cette disposition.

Aux termes de l'ordonnance du 15 avril 2004 (article 2), l'article L. 713-14 devient l'article L. 713-5.

L'article 8 de l'ordonnance procède à une coordination destinée à tenir compte de la réécriture de l'article L. 713-14 du code de commerce.

Les articles 9 à 12 de l'ordonnance prévoient des dispositions transitoires en vue de faciliter l'entrée en vigueur de la présente réforme.

Les articles 9 et 10 autorisent la prorogation des mandats des délégués consulaires et des membres des CCI -dont l'échéance était fixée à 2003- jusqu'au 31 décembre 2004. Il a paru en effet peu opportun d'organiser des élections selon les anciennes règles alors même qu'un nouveau dispositif était sur le point d'entrer en vigueur. Le Gouvernement a fait le choix de reporter les élections initialement prévues le 17 novembre 2003 jusqu'à la publication des textes législatifs et réglementaires modernisant la procédure.

Afin de permettre un renouvellement complet des CCI dès 2004 et, partant, une mise en oeuvre rapide de la réforme, l'article 10 de l'ordonnance propose également d'anticiper au 31 décembre 2004 l'échéance des mandats des membres des CCI expirant en 2006. Suivant la même logique, ce même article prévoit la prorogation ou la réduction, selon l'année de l'échéance, des mandats des membres de la chambre d'agriculture, de commerce et d'industrie et des métiers de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Votre commission tient à signaler que l'article 19 de la loi du 2 juillet 2003 ne prévoyait expressément qu'une habilitation pour le Gouvernement à proroger ces mandats, et non à en anticiper la fin. Par conséquent, le Gouvernement pourrait avoir, dans un souci de mise en oeuvre rapide de sa réforme, quelque peu dépassé le champ de l'habilitation s'agissant des dispositions transitoires prévues dans cette ordonnance. Certes, le 3° de l'article 19 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à « adapter les modes de scrutin et la durée des mandats » peut également être interprété comme ayant autorisé l'anticipation de la fin de certains mandats encours. Votre commission considère toutefois qu'au même titre que la prorogation des mandats, il aurait été préférable qu'une disposition transitoire de cette importance fasse l'objet d'une habilitation explicite.

Elle vous propose de ratifier ces articles 9 et 10 de l'ordonnance, dans un souci de sécurité juridique, les élections des membres des chambres de commerce et d'industrie et des délégués consulaires ayant lieu très prochainement, et dans la mesure où cette réforme est utile et répond parfaitement à l'objectif de simplification des élections professionnelles souhaitée par tous.

Votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance, sous réserve des modifications précédemment présentées.

3. L'ordonnance n° 2003-1165 du 8 décembre 2003 portant simplifications administratives en matière électorale (article 51, V)

Le V du présent article tend à autoriser la ratification de l'ordonnance n° 2003-1165 du 8 décembre 2003 portant simplifications administratives en matière électorale dont l'objet a été clairement défini par les articles 16 à 18 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit182(*).

Le Gouvernement a adopté cette ordonnance le 8 décembre 2003, respectant ainsi le délai d'habilitation d'un an prévu par l'article 35 de la loi du 2 juillet 2003. En outre, conformément aux exigences de l'article 38 de la Constitution, un projet de loi de ratification183(*) a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 3 mars 2004, dans le délai de ratification fixé à trois mois à compter de la publication de la loi du 2 juillet 2003.

Cette ordonnance, comportant 10 articles, tend à favoriser la participation des électeurs, à rationaliser certaines formalités essentielles et à harmoniser des procédures communes à plusieurs élections184(*).

1. Favoriser la participation électorale

Assouplir des conditions d'exercice du vote par procuration (titre III - articles 9 et 10)

Le vote par procuration, qui permet à un électeur empêché ou absent (le mandant) de choisir un autre électeur (le mandataire) pour accomplir à sa place les opérations de vote, obéit à un formalisme rigoureux185(*) car il déroge au caractère universel, égal et secret du suffrage186(*) : seules des catégories d'électeurs restreintes étaient autorisées à voter par procuration après avoir fourni de nombreuses pièces justificatives187(*).

Cependant, les limites de ce dispositif (différences d'appréciation de la validité des documents exigés selon les autorités établissant les procurations), peu adapté à la mobilité croissante des Français, ont pu pénaliser la participation électorale.

Ainsi, le vote par procuration est simplifié par une extension des catégories d'électeurs pouvant en bénéficier et le remplacement des pièces justificatives par une simple déclaration sur l'honneur.

Peuvent ainsi désormais voter par procuration :

- les électeurs attestant sur l'honneur qu'en raison d'obligations professionnelles, en raison d'un handicap, pour raison de santé ou en raison de l'assistance apportée à une personne malade ou infirme, il leur est impossible d'être présents dans leur commune d'inscription le jour du scrutin ou de participer à celui-ci en dépit de leur présence dans la commune ;

- les électeurs attestant sur l'honneur qu'en raison d'obligations de formation, parce qu'ils sont en vacances ou parce qu'ils résident dans une commune différente de celle où ils sont inscrits sur une liste électorale, ils ne sont pas présents dans leur commune d'inscription le jour du scrutin ;

- les personnes placées en détention provisoire et les détenus purgeant une peine n'entraînant pas une incapacité électorale.

De plus, le volet du formulaire de procuration destiné au mandataire, est supprimé : aujourd'hui obligatoire, la présentation de ce volet au bureau de vote est inutile (ledit bureau possédant déjà un volet).

Cette réforme a été appliquée lors des élections de 2004.

Assouplir les critères d'inscription des Français et des Françaises établis hors de France sur la liste électorale d'une commune (Titre 1er - article premier)

Sur leur demande, pour les élections où le territoire national forme une circonscription unique (élection présidentielle ; référendums), les Français établis hors de France peuvent s'inscrire sur la liste d'un centre de vote, situé dans un poste diplomatique ou consulaire, (ils étaient 385.000 en 2002) et y voter.

Sinon, ils peuvent s'inscrire sur la liste électorale d'une commune de France avec laquelle ils possèdent un lien spécifique188(*), afin d'exercer leur droit de vote par procuration. Cette faculté devient obligation lors des élections pour lesquelles il y a plusieurs circonscriptions.

Issu d'un amendement de votre rapporteur, le dispositif de l'ordonnance, qui donne la possibilité aux citoyens concernés de s'inscrire sur la liste électorale de la commune où est inscrit ou a été inscrit un de leurs parents jusqu'au quatrième degré, tend à faciliter l'exercice de leur droit de vote.

Permettre la participation des ressortissants des nouveaux Etats membres de l'Union européenne aux élections au Parlement européen du 13 juin 2004 (Titre IX-articles 33 à 37)

Les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne résidant en France peuvent y exercer leur droit de vote et y être éligibles pour l'élection du Parlement européen et les élections municipales189(*), s'ils remplissent certaines conditions (être âgé de 18 ans au moins ; jouir de ses droits civiques ; justifier d'une résidence continue et effective en France depuis six mois au moins ; joindre une déclaration écrite précisant sa nationalité).

Ils sont inscrits sur des listes électorales complémentaires, spécifiques à chaque type d'élection.

Les commissions administratives compétentes procèdent à la révision annuelle des listes électorales du 1er septembre jusqu'au 31 décembre. Ainsi, les personnes ayant déposé leur demande au début de l'année 2004 n'ont, en principe, le droit de voter qu'au 1er mars 2005.

L'application stricte de ces règles aurait empêché les ressortissants des nouveaux Etats membres (Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République Tchèque, Slovaquie et Slovénie, intégrés à l'Union européenne le 1er mai dernier) installés en France de participer à l'élection des 78 représentants français au Parlement européen, le 13 juin 2004.

En raison de l'urgence, sur proposition de notre collègue Christian Cointat, le Gouvernement a été autorisé à modifier par ordonnance les dispositions électorales en cause.

L'ordonnance fixe que le dépôt des demandes d'inscription dans les mairies devait être effectif au 15 avril 2004 et rappelle les règles que les intéressés devaient respecter (interdiction de l'inscription sur plusieurs listes électorales, recours...).

Sur le fondement de ce texte, les ressortissants des Etats-membres de l'Union européenne vivant en France qui le souhaitaient ont pu voter. Sa ratification doit garantir la sécurité juridique du dispositif.

2. Rationaliser certaines formalités essentielles

 Unifier la procédure de rattachement des candidats aux élections législatives à un parti politique avec la procédure prévue par la législation sur le financement public des partis politiques (Titre VIII - article 32) et simplifier les démarches que doivent accomplir les partis et groupements politiques pour participer à la campagne radiotélévisée des élections législatives (article 16)

La première fraction de l'aide publique aux partis politiques190(*) est attribuée aux formations ayant présenté des candidats ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés dans cinquante circonscriptions et, outre-mer, aux partis dont les candidats ont obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés dans l'ensemble des circonscriptions dans lesquelles ils se sont présentés.

Pour en bénéficier, les candidats aux élections législatives précisent leur formation politique de rattachement dans leurs déclarations de candidature, dont le dépôt intervient dorénavant au plus tard à dix-huit heures le quatrième vendredi précédant le premier tour, (au lieu de vingt-et-un jours avant le premier tour à minuit auparavant) et pour le second tour, à dix-huit heures (minuit auparavant) le mardi entre les deux tours191(*).

Dans les vingt-quatre heures suivant le dépôt, le préfet peut saisir le tribunal administratif, qui a trois jours pour statuer sur les dossiers litigieux. Il peut donc examiner la recevabilité des candidatures avant le début de la campagne électorale (fixé au vingtième jour, soit le quatrième lundi, précédant le premier tour).

Puis, au premier tour et, désormais, au second tour de scrutin, l'enregistrement de la déclaration amène la délivrance d'un reçu provisoire au candidat (le récépissé définitif étant délivré quatre jours après le dépôt).

Or, l'absence de disposition précise pour encadrer la procédure de rattachement, qui est facultative, a soulevé de nombreuses difficultés192(*). L'ordonnance prévoit donc que les candidats indiquent, s'il y a lieu, dans leur déclaration, le parti auquel ils se rattachent, sur une liste établie par arrêté du ministre de l'intérieur publié au Journal Officiel au plus tard le cinquième vendredi précédant le jour du scrutin, ou en dehors de cette liste.

Celle-ci comprend l'ensemble des formations ayant déposé une demande en vue de bénéficier des aides publiques au ministère de l'intérieur, au plus tard à dix-huit heures, le sixième vendredi précédant le jour du premier tour. Ainsi, les candidats peuvent en prendre connaissance avant le dépôt de leur déclaration de candidature.

La date de publication du décret de convocation des électeurs est avancée en conséquence afin qu'elle intervienne avant les demandes des partis : les élections auront lieu le septième dimanche (et non plus le cinquième) suivant la publication du décret de convocation.

Rationalisée, la procédure de rattachement des candidats est aussi désormais utilisée pour l'accès des partis non représentés à l'Assemblée nationale à la campagne radiotélévisée des élections législatives.

A ce titre, l'article L. 167-1 du code électoral précise que les partis politiques non représentés à l'Assemblée nationale193(*) peuvent bénéficier d'une durée d'émission de sept minutes au premier tour et de cinq minutes au second s'ils en font la demande et déposent un dossier rassemblant les déclarations de rattachement de soixante quinze candidats au plus tard le vingtième jour précédant le premier tour.

La liste des formations retenues est transmise au Conseil supérieur de l'audiovisuel, au plus tard le quinzième jour précédant le premier tour de scrutin.

L'obligation de rattachement de 75 candidats serait maintenue mais leur appartenance à une formation politique serait prise en compte par référence à celle qu'ils ont indiquée au moment du dépôt de leur candidature pour l'application de la législation relative à l'aide publique aux partis politiques. Cette réforme, confortée par la modification des délais de dépôt des déclarations de candidatures, instaure une procédure simple et cohérente d'accès à la campagne radiotélévisée.

Abroger les dispositions exigeant le versement par les candidats d'un cautionnement (articles 14, 20, 22)

La loi n° 95-65 du 19 janvier 1995 relative du financement de la vie politique a supprimé le cautionnement pour toutes les élections, sauf pour les élections européennes. La loi du 11 avril 2003 précitée a achevé la réforme en alignant le régime des élections européennes sur le droit commun.

L'ordonnance fait donc disparaître les mentions du cautionnement demeurant dans le code électoral et désormais inutiles (modification de l'article L. 161 du code électoral ; suppression des articles L. 212 et L. 245).

 Aménager les modalités du contrôle des comptes de campagne (articles 2 à 8)

Posées par les articles L. 52-4 à L. 52-18 du code électoral, les règles relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales194(*) (« autres que les dépenses de propagande directement prises en charge par l'Etat ») garantissent aux candidats et listes ayant obtenu un certain nombre de suffrages exprimés de bénéficier d'un remboursement forfaitaire de la part de l'Etat égal à 50 % de leur plafond de dépenses.

Les candidats doivent recueillir les fonds de leur campagne électorale par l'intermédiaire d'un mandataire (personne physique ou association), qui établit un compte de campagne, « retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celle de la campagne officielle »195(*) par le candidat ou pour son compte.

Dans les deux mois de l'élection, les comptes sont déposés et présentés par un expert-comptable en préfecture, avant d'être transmis à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CCFP). Cette dernière approuve, ou rejette les comptes avant de les publier ; elle peut saisir le juge de l'élection qui a la faculté de déclarer un candidat inéligible pour un an.

Tirant les leçons des dernières campagnes électorales l'ordonnance tend en premier lieu à clarifier le rôle du mandataire, en précisant :

- qu'il doit être désigné par le candidat « au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée » ;

- qu'il recueille les fonds destinés à la campagne électorale « pendant l'année précédant le premier jour du mois de l'élection », comme l'indique déjà l'article L. 52-4 actuel du code électoral, « jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne », et non plus « jusqu'à la date du tour de scrutin où l'élection a été acquise », mettant fin à une jurisprudence ambiguë, le juge ayant parfois validé l'élection face à l'inscription de recettes postérieures au scrutin dans les comptes de campagne (ex. : validation de recettes correspondant à des engagements antérieurs à l'élection) ;

- qu'il règle « les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique », remboursant « les dépenses antérieures à sa désignation, payées directement par le candidat ou à son profit »196(*) qu'il inscrit sur son compte bancaire ou postal.

Ce dernier doit mettre en évidence les opérations financières « ne provenant pas de l'apport du candidat », qui, pour ne pas pénaliser ce dernier, ne sont pas prises en compte par le mandataire lorsqu'il se prononce sur la dévolution de l'actif net au moment de la clôture de son activité (articles 3 et 4).

En second lieu, l'ordonnance prévoit le dépôt direct des comptes de campagne à la CCFP, au plus tard avant 18 heures le neuvième jour suivant le tour de scrutin où l'élection a été acquise (article 6).

De plus, en raison des difficultés rencontrées par certains candidats dont la campagne électorale n'avait engendré aucune dépense ou recette, elle substitue l'établissement d'une attestation d'absence de dépense et de recette à cette obligation de présentation par un expert-comptable.

Le statut et les moyens de la CCFP, mal adaptés à la croissance rapide de son activité, ont pu favoriser les erreurs dans l'examen des dossiers, relevées par le juge de l'élection.

Conformément à la position du juge constitutionnel197(*) et du Conseil d'Etat, la CCFP devient une autorité administrative indépendante : elle dispose ainsi d'une grande liberté d'appréciation et d'une réelle souplesse de gestion (possibilité d'employer des agents contractuels...), susceptibles d'accélérer le remboursement forfaitaire des candidats (article 7).

Enfin, conformément à la jurisprudence en vigueur198(*), pour éviter un enrichissement injustifié des candidats, le montant du remboursement de l'Etat, arrêté par la CCFP, ne peut excéder celui des dépenses réglées sur leur apport personnel, retracées dans leur compte de campagne (articles 5 et 8).

 Modifier les modalités de convocation des électeurs pour les élections législatives et les élections municipales (articles 17, 21, 23, 24, 25, 26)

A ce titre, outre les modifications précitées du délai de convocation des élections législatives, l'ordonnance prévoit, qu'aux élections municipales, un décret en Conseil des ministres fixera la date des élections et convoquera les électeurs alors que ces formalités nécessitaient respectivement un décret en Conseil des ministres et un arrêté préfectoral (par dérogation à ce principe, un arrêté du sous-préfet suffira pour convoquer les électeurs pour les élections partielles).

De plus, elle étend de deux à trois mois le délai durant lequel les électeurs sont convoqués pour de nouvelles élections municipales, après annulation définitive de tout ou partie du premier scrutin199(*) et celui durant lequel il est procédé à des élections complémentaires dès lors que le conseil municipal a perdu un tiers de ses membres à partir de la dernière vacance200(*).

3. L'harmonisation de procédures communes à plusieurs élections

 Harmoniser les calendriers des formalités électorales et la procédure de dépôt des candidatures aux élections régies par le code électoral (articles 11, 12, 13, 15, 27 et 28)

Les dispositions visées tendent d'abord à harmoniser les dates et horaires de dépôt des déclarations de candidatures aux élections législatives (déjà évoqués) et municipales.

Aux élections municipales dans les communes de 3.500 habitants et plus, ces derniers sont fixés pour le premier tour, au troisième jeudi qui précède le jour du scrutin, à 18 heures (au lieu du deuxième vendredi qui le précède à minuit) et pour le second tour, au mardi qui suit le premier tour, à 18 heures (contre minuit auparavant).

Simultanément, le régime de la preuve de la qualité d'électeur aux élections législatives est précisé.

Si l'article L. 127 du code électoral pose que « tout citoyen qui a vingt-trois ans révolus et la qualité d'électeur » est éligible aux élections législatives, aucune disposition ne l'oblige à prouver sa qualité d'électeur.

Pour faciliter la tâche des services préfectoraux, les candidats doivent désormais joindre à leur déclaration les pièces de nature à prouver qu'ils respectent ces conditions201(*), comme le droit en vigueur l'exige aux élections municipales et cantonales (articles 11 et 12).

Enfin, l'article LO. 265-1 du code électoral est rendu applicable au régime des déclarations de candidature aux élections municipales dans les communes de 3.500 habitants et plus (article 27).

Cet article précise que les listes comportant des candidats ressortissants d'un Etat-membre de l'Union européenne, doivent mentionner leur nationalité, leurs nom, prénoms, date et lieu de naissance.

Le candidat doit présenter une déclaration prouvant qu'il dispose du droit d'éligibilité dans son Etat d'origine et des justificatifs indiquant soit qu'il est inscrit sur la liste électorale de sa commune, soit qu'il remplit les conditions autres que la nationalité française pour être électeur et qu'il est inscrit au rôle de l'une des contributions directes de la commune.

L'absence de toute disposition applicable lors des élections municipales de 2001 a empêché en pratique la vérification de la nationalité des candidats considérés.

 Aligner le régime de démission d'office des conseillers généraux, des conseillers régionaux et des conseillers de Corse sur celui des conseillers municipaux (articles 18, 19, 29, 30 et 31)

Le régime de démission d'office des élus locaux posé par le code électoral, qui tend à régler des situations d'inéligibilité et d'incompatibilité et qui était variable selon l'élection concernée sans que ces différences soient justifiées par un motif d'intérêt général, est unifié.

La démission d'office des conseillers généraux posait de réelles difficultés : les conseils généraux, chargés de constater la démission de leurs membres en cause, soit d'office, soit sur la réclamation de tout électeur, ont parfois été paralysés par des situations délicates.

La compétence du représentant de l'Etat dans le département est substituée à celle du conseil général et la procédure est alignée sur celle qui est applicable aux conseillers municipaux : lorsqu'il se trouve en situation d'inéligibilité ou d'incompatibilité pour une cause survenue postérieurement à son élection, le conseiller municipal est immédiatement déclaré démissionnaire d'office par le préfet, sauf réclamation, dans les dix jours, de la notification, devant le tribunal administratif, et sauf recours devant le Conseil d'Etat.

Il reste en fonction dans l'attente de la décision définitive de la justice administrative. Le recours contre l'acte de notification n'est pas suspensif si l'intéressé a perdu ses droits civiques et électoraux à la suite d'une condamnation pénale définitive.

Le régime de démission d'office des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse, est proche de celui des conseillers municipaux202(*) (le représentant de l'Etat dans la région étant chargé de la constater).

Toutefois, ce dispositif était fragilisé par l'absence de mention explicite des voies de recours dont pouvaient bénéficier les élus en cause à l'encontre des arrêtés préfectoraux constatant la démission d'office : ils peuvent dorénavant être contestés dans les deux jours suivant leur notification devant le Conseil d'Etat.

Enfin, l'article 38 de l'ordonnance précise les dispositions applicables à la Nouvelle-Calédonie (titres Ier, II, III, IV, VI, IX), à la Polynésie française (titres Ier, II, III, IV, VII et IX) et aux îles Wallis et Futuna (titres Ier, II, III, IV, VIII et IX) en prévoyant les adaptations nécessaires.

Votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance sans modification.

4. L'ordonnance n° 2003-1212 du 18 décembre 2003 modifiant la partie législative du code général des collectivités territoriales (article 51, VIII)

L'ordonnance n° 2003-1212 du 18 décembre 2003 modifiant la partie législative du code général des collectivités territoriales a été prise en application de l'article 32 de la loi précitée du 2 juillet 2003.

Cette ordonnance ayant été adoptée le 18 décembre 2003 et publiée le 20 décembre de la même année, le Gouvernement a respecté le délai d'habilitation de six mois prévu par l'article 35 de la loi du 2 juillet 2003. En outre, conformément aux exigences de l'article 38 de la Constitution, un projet de loi de ratification203(*) a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 10 mars 2004, respectant le délai de ratification fixé à trois mois à compter de la publication de la loi du 2 juillet 2003.

En vertu de l'habilitation, la présente ordonnance, composée de 8 articles, a modifié la partie législative du code général des collectivités territoriales pour :

- inclure des dispositions législatives non encore codifiées ;

- corriger d'éventuelles erreurs ou insuffisances de rédaction.

Le code général des collectivités territoriales a fait l'objet de nombreuses évolutions depuis son adoption par la loi n° 96-142 du 21 février 1996, plus de quatre-vingt textes étant depuis venus le modifier. Par conséquent, certaines erreurs matérielles et insuffisances de rédaction devaient être corrigées.

De plus, plusieurs articles du code général des collectivités territoriales faisaient encore référence à des articles de loi ayant depuis fait l'objet d'une codification. L'ordonnance a par conséquent mis à jour les textes cités dans ces articles.

Votre commission salue cet important travail de consolidation du droit positif qui répond parfaitement à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, consacré par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-421 du 16 décembre 1999 relative à la loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes et rappelé dans sa décision précitée n° 2003-473 du 26 juin 2003 sur la loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

Votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance sans modification.

5. L'ordonnance n° 2003-1216 du 18 décembre 2003 portant suppression de l'affirmation des procès-verbaux (article 51, X)

Cette ordonnance, comportant vingt-cinq articles, a été prise, dans les délais impartis, sur le fondement de l'article 8 de la loi précitée du 2 juillet 2003 qui autorisait le Gouvernement à intervenir dans le domaine de la loi afin de « supprimer la procédure d'affirmation de certains procès-verbaux ». Elle a donné lieu au dépôt d'un projet de loi de ratification à l'Assemblée nationale, le 10 mars 2004, conformément aux exigences constitutionnelles et aux dispositions de l'article 35 de la loi d'habilitation.

Rappelons que la procédure d'affirmation des procès-verbaux est une formalité prévue, à peine de nullité, lors de la constatation par certains agents verbalisateurs d'infractions déterminées. Cette procédure ancienne devait à l'origine permettre au magistrat ou au maire de vérifier l'exactitude des mentions contenues dans le procès-verbal, dans la mesure où, au XIXème siècle, de nombreux agents étaient illettrés et faisaient écrire leur procès-verbal par un tiers. Le procédé de l'affirmation renforçait la force probante du procès-verbal en permettant au juge ou au maire de vérifier la conformité des écrits aux affirmations orales de l'agent.

Si de nombreuses catégories d'agents assermentés ont été dispensées de cette formalité, certaines dispositions en vigueur exigent toujours l'accomplissement d'une procédure d'affirmation. L'objet de la présente ordonnance est donc de supprimer cette formalité au caractère suranné, mettant ainsi en oeuvre l'une des propositions émises par la mission d'information de votre commission des Lois sur l'évolution des métiers de la justice204(*).

Le titre premier de l'ordonnance pose ainsi le principe de la suppression de « l'affirmation de tout procès-verbal en matière pénale ou de contravention de grande voirie, notamment dans les domaines faisant l'objet de la présente ordonnance ».

En conséquence, sont abrogées ou modifiées plusieurs dispositions législatives :

- les articles 42 et 153 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;

- les articles 328 et 333 du code des douanes ;

- l'article L. 363-17 du code forestier ;

- l'article L. 774-2 du code de justice administrative ;

- les articles L. 321-3 et L. 331-5 du code des ports maritimes ;

- l'article L. 1324-2 du code de la santé publique ;

- l'article 17 du décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime, texte de forme réglementaire mais de valeur législative ;

- l'article 40 du décret du 10 août 1853 sur le classement des places de guerre et des postes militaires et sur les servitudes imposées à la propriété autour des fortifications, texte de forme réglementaire mais de valeur législative ;

- l'article 25 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie.

En conséquence de ces modifications ou abrogations, le titre II de l'ordonnance supprime les dispositions législatives qui prévoyaient, ponctuellement, la dispense de la procédure d'affirmation.

Ces dispositions émanent notamment du code disciplinaire et pénal de la marine marchande, du code forestier, du code des postes et télécommunications, du code de la voirie routière, de la loi du 17 juillet 1856 dispensant de l'affirmation les procès-verbaux dressés par les brigadiers de gendarmerie et les gendarmes, le décret du 12 novembre 1938 modifié relatif à la coordination des transports et au statut des bateliers pris sur le fondement de la loi du 5 octobre 1938 tendant à accorder au Gouvernement les pouvoirs pour réaliser le redressement immédiat de la situation économique et financière du pays, de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952, loi de finances pour l'exercice 1952, de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958 modifiée concernant les conditions du travail dans les transports routiers publics et privés en vue d'assurer la sécurité de la circulation routière, de la loi n° 67-1206 du 29 décembre 1967 autorisant la ratification de l'accord européen pour la répression des émissions de radiodiffusion effectuées par des stations hors des territoires nationaux et relatif à cette répression, de la loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968 relative à l'exploration du plateau continental et à l'exploitation des ressources naturelles, et de la loi n° 75-1335 du 31 décembre 1975 relative à la constatation et à la répression des infractions en matière de transports publics et privés.

Votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance sans modification.

6. L'ordonnance n° 2004-141 du 12 février 2004 portant simplification des élections à la mutualité sociale agricole (article 51, XII)

L'ordonnance n° 2004-141 du 12 février 2004 portant simplification des élections à la mutualité sociale agricole a été prise en application du 1° de l'article 19 de la loi précitée du 2 juillet 2003205(*), afin de simplifier et harmoniser les modalités d'organisation et de contrôle ainsi que la procédure contentieuse applicables aux élections à la mutualité sociale agricole.

Conformément aux délais d'habilitation et de ratification fixés par l'article 35 de la loi du 2 juillet 2003, l'ordonnance simplifiant les élections à la mutualité sociale agricole a été prise dans l'année suivant la publication de la loi précitée et le projet de loi prévoyant sa ratification déposé à l'Assemblée nationale le 5 mai 2004.

L'adoption de l'ordonnance a donc respecté les règles constitutionnelles établies par l'article 38 de la Constitution.

Le régime de la mutualité sociale agricole avait été récemment réformé par l'article 22 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale qui modifiait le code rural et son décret d'application n° 2004-574 du 18 juin 2004 modifiant le décret n° 84-477 du 18 juin 1984 relatif aux élections aux assemblées générales et aux conseils d'administration des caisses de mutualité sociale agricole.

La présente ordonnance est venue améliorer le dispositif prévu aux articles L. 123-15 à 123-16 du code rural en simplifiant certaines dispositions.

En outre, la présente ordonnance, qui comporte deux articles, ne dépasse pas le champ de l'habilitation fixé par le Parlement. Au contraire, si elle a effectivement pour effet de simplifier et harmoniser les modalités d'organisation et de contrôle des élections à la mutualité sociale agricole avec celles d'autres élections non politiques, elle ne modifie pas la procédure contentieuse, possibilité pourtant prévue par la loi d'habilitation.

En vertu des deux premiers paragraphes (I et II) de l'article 1er modifiant les articles L. 317-17 et L. 317-18 du code rural, les conseils d'administration des caisses de mutualité sociale agricole, désormais chargées d'organiser les opérations préélectorales, se voient confier le pouvoir de réunir deux ou plusieurs cantons limitrophes d'un même département lorsque le nombre des électeurs d'un ou plusieurs cantons est inférieur, soit à cinquante pour les collèges des exploitants agricoles et des salariés, soit à dix pour le collège des employeurs. Cette compétence était autrefois conférée aux préfets.

Le paragraphe III de l'article 1er supprime les dispositions particulières concernant les seules communes divisées en plusieurs cantons et modifie les modalités de décompte du nombre de candidats pouvant être élus dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne ainsi que dans les villes de Paris, Lyon et Marseille (article L. 713-18-1 du code rural).

Le paragraphe IV modifie l'article L. 723-19 du code rural afin de préciser que les listes électorales ne sont plus établies par commune mais par canton, nouvelle circonscription de base des élections à la mutualité sociale agricole.

Les listes électorales sont établies par le conseil d'administration de la mutualité sociale agricole qui organise également les élections en vertu de l'article L. 723-22 du code rural tel que modifié par le paragraphe V de cet article.

Le paragraphe VI instaure le vote par correspondance au détriment du vote à l'urne et prévoit qu'une commission présidée par le préfet de région ou son délégué proclame les résultats des élections. En conséquence, les paragraphe VII supprime toutes les références au vote à l'urne et le paragraphe VIII supprime l'article L. 723-30 du code rural qui autorisait les salariés à être absents pour cette procédure de vote.

Le paragraphe IX affirme que chaque département doit être également représenté au sein de chaque collège du conseil d'administration d'une caisse pluridépartementale de mutualité sociale agricole. Il prévoit toutefois que si le nombre de sièges n'est pas divisible par le nombre de département entrant dans la circonscription de la caisse, les sièges restant sont attribués aux départements ayant le plus grand nombre de sièges.

Enfin, le paragraphe X modifie l'article L. 723-35 du code rural relatif aux attributions des conseils d'administration des caisses de mutualité sociale agricole. Il vise uniquement à tenir compte du fait que désormais ces conseils seraient compétents pour réunir plusieurs cantons quand le nombre d'électeurs au sein d'un collège électoral serait insuffisant en prévoyant que doit nécessairement être saisi pour avis conforme, soit le comité de la protection sociale des salariés lorsque cette opération s'effectue pour le collège électoral des salariés, soit le comité de la protection sociale des non salariés lorsque sont concernés le collège des exploitants agricoles et celui des employeurs.

Conformément à ce qui avait été annoncé lors de l'habilitation, la présente ordonnance parvient à réduire le poids de l'administration dans l'organisation de ces élections professionnelles. Elle contribue ainsi à l'allègement de la charge de travail induite par ces élections pour les préfectures.

En outre, elle participe à l'effort de systématisation du vote par correspondance qui était souhaité lors de l'adoption de la loi d'habilitation et perçu comme un moyen de lutter contre l'abstention.

Lors de l'examen en première lecture par le Sénat du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, d'ultimes modifications législatives, souhaitées ont été apportées au régime des élections à la mutualité sociale agricole dans un nouvel article 14 bis A. Il s'agissait notamment de procéder à quelques ajustements pour tenir compte des nouvelles dispositions introduites par l'ordonnance du 12 février 2004.

Par souci de cohérence, votre commission des Lois vous présente un amendement tendant à reprendre l'ensemble de ces modifications prévues par l'article 14 bis A du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux dans cet article du présent projet de loi afin que ces dispositions soient prises en compte lors de la ratification de l'ordonnance du 12 février 2004.

Cet amendement réduirait tout d'abord le nombre d'élus du deuxième collège (collège des salariés) de 4 à 3 par circonscription cantonale, à la demande unanime des organisations syndicales des salariés agricoles représentatives qui craignaient de ne pas pouvoir présenter quatre candidats dans chaque canton.

Il supprimerait également le régime d'incompatibilités de fonctions applicable aux administrateurs de la mutualité sociale agricole introduit par la loi de modernisation sociale précitée du 17 janvier 2002 et lui substituerait un système de déclaration des fonctions de dirigeants que les élus de la mutualité sociale agricole exercent dans les entreprises, associations ou institutions en relation financière avec les caisses.

Une autre disposition prévoirait également que les élus de la mutualité sociale agricole ne pourraient participer au vote des délibérations impliquant les organismes qu'ils dirigent et que le défaut de déclaration de leurs fonctions de dirigeants pourrait entraîner leur révocation. En conséquence, l'amendement supprime le 1er alinéa de l'article L. 723-44 devenu inutile.

L'amendement mettrait ensuite en cohérence l'article L. 723-38 du code rural avec la modification introduite à l'article L. 723-35 du même code par l'ordonnance du 12 février 2004.

Votre commission vous propose enfin dans cet amendement une dernière modification devant être ajoutée à celles déjà prévues à l'article 14 bis A du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, enfin de corriger une erreur de référence dans le paragraphe III de l'ordonnance du 12 février 2004.

Le prochain renouvellement des conseils d'administration des caisses de la mutualité sociale agricole aura lieu en 2005. L'ensemble des modifications apportées par l'ordonnance et la présente loi devrait être applicable à cet occasion.

Sous réserve de ces modifications, votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance.

7. L'ordonnance n° 2004-164 du 20 février 2004 relative aux modalités et effets de la publication des lois et de certains actes administratifs (article 51, XIII)

Cette ordonnance a été prise en application de l'article 4 de la loi du 2 juillet 2003, qui habilitait le gouvernement à simplifier et harmoniser les règles relatives aux conditions d'entrée en vigueur des lois, ordonnances, décrets et actes administratifs, ainsi que les modalités selon lesquelles ces textes sont publiés et portés à la connaissance du public, en prenant en compte les possibilités offertes par les technologies de l'information et de la communication.

Sa ratification est prévue par l'article 51 du présent projet de loi depuis son dépôt initial, le 17 mars 2004, à l'Assemblée nationale, soit dans le délai de trois mois prévu par la loi d'habilitation.

Comme l'avait indiqué votre commission des Lois dans son rapport sur le projet de loi d'habilitation206(*), l'entrée en vigueur des actes juridiques était régie par des règles très anciennes, telles que la loi du 12 vendémiaire an IV ou les ordonnances des 27 novembre 1816 et 18 janvier 1817. Depuis, la multiplication des normes, relevée par le Conseil d'Etat207(*), et l'évolution des technologies de l'information et de la communication, ont rendu ces règles obsolètes et inadaptées.

L'ordonnance, composée de huit articles, fixe par conséquent un nouveau régime, dont sont exclus les actes individuels et les actes des collectivités territoriales et des autorités déconcentrées de l'Etat.

L'article 1er de l'ordonnance établit une nouvelle rédaction de l'article 1er du code civil qui consacre la règle de l'entrée en vigueur des lois et des actes administratifs publiés au Journal officiel « à la date qu'ils fixent ou, à défaut [au] lendemain de leur publication ». Toutefois, l'entrée en vigueur des lois et des actes administratifs dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures.

Par ailleurs, en cas d'urgence, est maintenue l'entrée en vigueur dès leur publication des lois « dont le décret de promulgation le prescrit » et des actes administratifs « pour lesquels le gouvernement l'ordonne par une disposition spéciale ». La faculté de décider l'entrée en vigueur immédiate de la loi est cependant sans effet sur la date d'entrée en vigueur fixée par une disposition expresse de la loi dont il s'agit.

Les catégories d'actes qui doivent être publiés au Journal officiel sont définis à l'article 2 de l'ordonnance et recouvrent les lois, les ordonnances, les décrets et, lorsqu'une loi ou un décret le prévoit, les autres actes administratifs. Cette dernière catégorie vise en particulier certains actes des autorités administratives indépendantes.

Dans la nouvelle rédaction de l'article 51 adoptée par l'Assemblée nationale sur la proposition de son rapporteur, l'article 2 prévoit que les ordonnances sont publiées « accompagnées d'un rapport de présentation ». Cette précision assurera en particulier une meilleure information du Parlement sur les ordonnances à ratifier.

Les formalités de publication et le recours, pour ce faire, aux nouvelles technologies, sont ensuite définis aux articles 3 à 5 de l'ordonnance.

La publication est assurée le même jour sur papier et sous forme électronique, pour les actes mentionnés à l'article 2, « dans des conditions de nature à garantir leur authenticité ».

Une valeur probante égale à celle de la version imprimée est reconnue à la version électronique. L'article 3 précise en outre que le Journal officiel est mis à la disposition du public sous forme électronique de manière permanente et gratuite. La gratuité ne vise que la consultation du site. L'obligation de permanence doit quant à elle conduire à permettre l'accès en ligne à tout exemplaire du Journal officiel publié après l'entrée en vigueur de l'ordonnance.

L'article 4 prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la CNIL, définit les actes individuels qui, « en l'état des techniques disponibles », ne doivent pas faire l'objet d'une publication sous forme électronique. Sont ainsi visés, notamment, les actes relatifs à l'état et à la nationalité des personnes. Le décret n° 2004-459 du 28 mai 2004 est entré en vigueur le 1er juin 2004.

Catégories d'actes individuels ne pouvant faire l'objet d'une publication
sous forme électronique au Journal officiel de la République française
(décret n° 2004-459 du 28 mai 2004, art. 1er)

- décrets portant changement de nom (art. 61 du code civil) ;

- décrets d'acquisition de la nationalité française (art. 21-14-1 du code civil) ;

- décrets de naturalisation (art. 21-15 du code civil) ;

- décrets de réintégration dans la nationalité française (art. 24-1 du code civil) ;

- décrets de perte de la nationalité française (art. 23-4, 23-7 ou 23-8 du code civil) ;

- décrets de déchéance de la nationalité française (art. 25 du code civil) ;

- décrets de francisation de noms ou de prénoms ou d'attribution de prénoms (loi n° 72-964 du 25 octobre 1972) ;

- décrets rapportant un décret appartenant à une des catégories précédentes.

Ce décret précise en outre que ne peuvent faire l'objet d'une publication sous forme électronique au Journal officiel ni les demandes de changement de nom, ni les annonces judiciaires et légales mentionnant les condamnations pénales.

A contrario, l'article 5 de l'ordonnance prévoit un décret en Conseil d'Etat définissant les actes pour lesquels, compte tenu de leur nature, de leur portée et des personnes auxquelles ils s'appliquent, la publication sous forme électronique suffit à assurer l'entrée en vigueur.

Décret n° 2004-617 du 29 juin 2004 relatif aux modalités et effets
de la publication sous forme électronique de certains actes administratifs
au Journal officiel de la République française

La publication sous forme électronique au Journal officiel suffit à amener l'entrée en vigueur des actes suivants :

Art. 1er- 1° - Les actes réglementaires, autres que les ordonnances, qui sont relatifs à l'organisation administrative de l'Etat, en particulier les décrets se rapportant à l'organisation des administrations centrales, les actes relatifs à l'organisation des services déconcentrés de l'Etat, ainsi que ceux portant délégation de signature au sein des services de l'Etat et de ses établissements publics ;

2° - Les actes réglementaires, autres que les ordonnances, relatifs aux fonctionnaires et agents publics, aux magistrats et aux militaires ;

3° - les actes réglementaires, autres que les ordonnances, relatifs au budget de l'Etat, notamment les décrets et arrêtés portant répartition, ouverture, annulation,virement ou transfert de crédits, ceux relatifs aux fonds de concours, aux postes comptables du Trésor public et aux régies d'avances, ainsi que les instructions budgétaires et comptables ;

4° - Les décisions individuelles prises par le ministre chargé de l'économie dans le domaine de la concurrence ;

5° - Les actes réglementaires des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes dotées de la personnalité morale, autres que ceux qui intéressent la généralité des citoyens ;

Art. 2 - Les décisions individuelles et l'ensemble des autres actes dépourvus de valeur réglementaire, y compris les avis et propositions, dont une loi ou un décret prévoit la publication au Journal officiel font exclusivement l'objet d'une publication sous forme électronique, lorsqu'ils relèvent de l'une des matières énumérées aux 1°, 2° et 3° de l'article 1er du présent décret ou émanent de l'une des autorités mentionnées au 5° du même article.

L'article 6 de l'ordonnance abroge plusieurs textes relatifs à la publication et à l'entrée en vigueur des textes, devenus obsolètes et remplacés par les dispositions de cette ordonnance.

Conformément au principe d'assimilation, l'ordonnance est applicable aux départements et régions d'outre-mer.

En revanche, un régime spécifique sera mis en place pour les collectivités d'outre-mer que sont Mayotte, la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis et Futuna, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises. Pour ce faire, le législateur devrait adopter une loi organique, conformément à la jurisprudence constitutionnelle.

Il résulte en effet de la décision du Conseil constitutionnel n° 2004-490 DC du 12 février 2004 sur la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française, que relèvent de la loi organique pour ces collectivités, non seulement la détermination du champ respectif d'application du principe d'identité et du principe de spécialité législatives, mais aussi la fixation des règles relatives aux modalités d'entrée en vigueur et de publication des actes normatifs.

Votre commission des Lois vous propose de ratifier cette ordonnance sans modification.

8. L'ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004 portant simplification du droit et des formalités pour les entreprises (article 51, XV)

Cette ordonnance a été prise en application de l'article 26 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit. Cette dernière disposition habilitait en effet le Gouvernement à intervenir par ordonnance dans le domaine de la loi pour simplifier, adapter, assouplir ou unifier divers domaines du droit du commerce, dans un délai de douze mois à compter de la publication de la loi d'habilitation, intervenue le 3 juillet 2003.

La ratification de cette ordonnance dans le cadre du présent projet de loi résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois, avec l'avis favorable du Gouvernement. Un projet de loi de ratification a en outre été déposé, conformément aux exigences constitutionnelles et à l'article 35 de la loi d'habilitation, le 16 juin 2004 au Sénat208(*).

Comme l'avait souligné votre commission lors de l'examen de ce texte, « l'état du droit en la matière présente des anachronismes et des rigidités qu'il convient de supprimer afin de faciliter l'exercice de l'activité économique par les entrepreneurs, qu'ils soient commerçants ou artisans, et qu'ils exercent ou non sous une forme sociale »209(*). Une réforme, essentiellement technique, mais sur des aspects importants du droit du commerce était donc nécessaire et attendue. Elle s'applique à l'ensemble du territoire métropolitain et aux départements et régions d'outre-mer, ainsi que, sous certaines réserves, aux collectivités d'outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte, Nouvelle-Calédonie et Wallis et Futuna.

Toutefois, cette ordonnance, composée de cinquante articles, n'intervient que pour modifier la législation en vigueur dans le cadre de huit des dix habilitations prévues par l'article 26 de la loi précitée. La simplification du droit des valeurs mobilières, prévue par le 4° de cet article, a en effet été opérée par une ordonnance spécifique210(*) dont votre commission proposera, par voie d'amendement, la ratification expresse dans le cadre du présent projet de loi. En outre, la présente ordonnance ne contient aucune disposition relative aux conditions du nantissement du fonds de commerce, l'article 3 de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique ayant déjà apporté en cette matière les modifications envisagées.

a. L'élargissement des possibilités d'adhésion aux coopératives de commerçants détaillants et aux coopératives d'artisans et l'assouplissement de leurs conditions de fonctionnement

Les articles 1er à 9 de l'ordonnance n° 2004-274 modifient, en application du 3° de l'article 26 de la loi précitée du 2 juillet 2003, les dispositions du code de commerce et de la loi n° 83-657 du 20 juillet 1983 relative au développement de certaines activités d'économie sociale, qui déterminent le statut et le fonctionnement, respectivement, des sociétés coopératives de commerçants détaillants et des sociétés coopératives d'artisans.

 Les coopératives de commerçants détaillants peuvent désormais, afin de renforcer la définition et la mise en oeuvre d'une politique commerciale commune, mettre en place une « organisation juridique appropriée », ce qui pourra notamment les conduire à créer, le cas échéant, des groupements d'intérêts économiques dont le régime est défini à l'article L. 251-1 du code de commerce.

Elles peuvent en outre comporter, en qualité de membre, « tout commerçant, exerçant le commerce de détail, régulièrement établi sur le territoire d'un Etat étranger », ce qui devrait être de nature à mettre fin aux distorsions de concurrence avec les réseaux intégrés ou franchisés qui, à l'inverse du régime antérieurement applicable aux coopératives, permettent l'adhésion de commerçants étrangers sans restriction territoriale. Les membres d'une coopérative peuvent par ailleurs bénéficier directement des services offerts par une société coopérative dont elle est elle-même membre, ce qui n'était pas autorisé en vertu des textes antérieurs.

Le président du conseil de surveillance des sociétés coopératives à directoire et conseil de surveillance peut désormais être rémunéré, l'ordonnance soumettant toutefois sa rémunération au prorata des opérations ou des excédents réalisés -tout comme celle accordée au président du conseil d'administration ou aux membres du directoire- à une stipulation statutaire en ce sens. En outre, la majorité requise pour procéder à la modification des statuts est abaissée, la majorité des deux tiers des associés « présents ou représentés » étant aujourd'hui seulement exigée.

En outre-mer, les modifications relatives aux coopératives de commerçants détaillants s'appliquent à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte.

 Les coopératives d'artisans pourront acquérir une dimension européenne, la qualité de membre étant désormais ouverte aux personnes « régulièrement établies sur le territoire d'un Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen », à la condition que ces dernières exercent des activités identiques à celles prévues pour l'inscription au répertoire des métiers ou au registre des chambres de métiers d'Alsace-Moselle. La coopération entre membres de coopératives d'artisans ou ces coopératives et d'autres sociétés coopératives ayant une activité identique ou complémentaire est en outre autorisée.

Ces coopératives peuvent dorénavant être constituées sous forme de sociétés à responsabilité limitée à partir de deux associés, et non plus de quatre, comme le prévoyaient les dispositions antérieures.

La qualité des mandataires, chargés de l'administration de la coopérative, est modifiée par l'ordonnance. Le conjoint collaborateur du chef d'entreprise peut représenter l'entreprise adhérente au sein de la coopérative et voir ainsi son rôle renforcé dans la gestion de la coopérative. La dissociation entre les fonctions de président et celles de directeur général d'une société anonyme, introduite par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, est étendue aux sociétés coopératives, la qualité d'artisan ou de représentant d'une entreprise artisanale n'étant exigée que pour le président du conseil d'administration. De plus, le représentant légal d'une entreprise artisanale adhérente peut désormais être désigné président du conseil d'administration ou du directoire de la société coopérative, même s'il n'a pas la qualité d'administrateur ou de membre du directoire de cette dernière.

Les unions de sociétés coopératives artisanales peuvent dorénavant contribuer au développement des activités, même non artisanales, des sociétés coopératives artisanales participantes.

b. La simplification et l'unification du régime applicable à la location-gérance du fonds de commerce et du fonds artisanal en vue de faciliter leur transmission

L'article 10 de l'ordonnance modifie les articles L. 144-3 et L. 144-5 du code de commerce, conformément aux dispositions du 2° de l'article 26 de la loi précitée du 2 juillet 2003.

Il supprime, en premier lieu, l'exigence selon laquelle un fonds de commerce ou un fonds artisanal ne peut être mis en location-gérance qu'à la condition que le propriétaire du fonds ait été commerçant ou immatriculé au répertoire des métiers pendant sept ans ou ait exercé pendant cette même durée des fonctions de gérant ou de directeur commercial ou technique. Ne subsiste donc que la condition tenant à l'exploitation directe du fonds pendant deux ans, qui permet d'éviter les risques de spéculation sur les acquisitions de fonds en vue de leur seule mise en location-gérance.

L'interdiction posée à l'égard des personnes frappées d'une interdiction de gérer en vertu de la loi n° 47-1635 du 30 août 1947 relative à l'assainissement des professions commerciales et industrielles -dont les dispositions devraient être modifiées par voie d'ordonnance en application de l'article 21 du présent projet de loi- est également supprimée.

Cet article permet, en second lieu, au conjoint du propriétaire du fonds de commerce décédé de mettre celui-ci en location-gérance, en ne lui imposant pas une exploitation directe du fonds commercial ou artisanal pendant deux ans. En revanche, pour bénéficier de ce régime, le conjoint devra avoir participé à l'exploitation du fonds pendant au moins deux ans avant la dissolution du mariage ou du partage consécutif à cette dissolution.

L'ensemble des dispositions relatives à la location-gérance est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna.

c. L'assouplissement du régime applicable à la société à responsabilité limitée par l'émission d'obligations sans appel public à l'épargne, l'augmentation du nombre de ses associés, l'allègement des formalités de cession des parts sociales et l'assouplissement des modes d'organisation de sa gérance

En application du 5° de l'article 26 de la loi du 2 juillet 2003, l'ordonnance procède, en ses articles 11 à 23, à une réforme partielle du régime applicable aux sociétés à responsabilité limitée, modifiant en conséquence les dispositions concernées du code de commerce.

 Le nombre maximal des associés de la société à responsabilité limitée est porté de 50 à 100, ce qui devrait apporter davantage de souplesse dans le fonctionnement de cette forme sociale, le maintien d'un nombre maximal s'expliquant par le souci de favoriser la constitution de telles sociétés parmi les petites et moyennes entreprises. Les sanctions liées au dépassement du nombre d'associés sont également modifiées, afin de prévoir que, pour éviter une dissolution de plein droit dans l'année suivant le franchissement de ce seuil d'associés, il pourra être décidé de transformer la société en une forme sociale différente qui n'aura plus à être nécessairement une société anonyme.

 L'émission d'obligations nominatives, sans appel public à l'épargne, est consacrée par l'article 12 de l'ordonnance, qui modifie à cet effet l'article L. 223-11 du code de commerce.

A l'instar des associations et des groupements d'intérêt économique, les sociétés à responsabilité limitée peuvent désormais émettre des obligations sans faire appel public à l'épargne, cette possibilité étant cependant réservée aux sociétés tenues de désigner un commissaire aux comptes, en vertu de l'article L. 223-35 et dont les comptes des trois derniers exercices de douze mois ont été approuvés par les associés. Rappelons que la désignation d'un commissaire aux comptes est obligatoire lorsque deux des critères suivants sont remplis : le total du bilan atteint 1.550.000 €, le montant hors taxes du chiffre d'affaires s'élève à 3.100.000 € ou le nombre moyen de leurs salariés est supérieur ou égal à 50 au cours d'un exercice.211(*) De plus, le commissariat aux comptes peut être rendu obligatoire en vertu d'une décision judiciaire. La formulation retenue par l'ordonnance implique que l'émission d'obligations sera possible quelle que soit la raison pour laquelle le commissariat aux comptes est obligatoire.

Le régime de l'émission est largement emprunté au droit des sociétés par actions. Il opère ainsi un renvoi en bloc aux dispositions applicables à ce type de société, à l'exclusion toutefois des dispositions régissant les conditions de l'appel public à l'épargne, l'émission d'obligations étant soumise à une décision de l'assemblée « générale » des associés dans les conditions prévues en la matière pour les assemblées d'actionnaires.

A l'instar de ce que prévoit le droit positif pour les associations, lors de l'émission d'obligations, la société doit mettre à la disposition des souscripteurs une notice relative aux conditions de l'émission et un document d'information selon des modalités qui devront être fixées ultérieurement par décret en Conseil d'Etat. L'ordonnance interdit par ailleurs, à peine de nullité, de garantir une émission de valeurs mobilières, sauf si l'émission est faite par une société de développement régional ou s'il s'agit d'une émission d'obligations bénéficiant de la garantie subsidiaire de l'Etat.

 Les conditions de cession ou de transmission des parts sociales sont assouplies par les articles 13 et 14 de l'ordonnance.

En premier lieu, les conditions de cession des parts sociales aux héritiers d'un associé décédé sont modifiées afin que les statuts puissent décider de la continuation de la société avec ou sans les successeurs de cet associé, le cas échéant en conditionnant la qualité d'associé de l'héritier à un agrément donné dans des conditions identiques à celles prévues en cas de cession des parts sociales à un tiers.

Votre commission estime cependant que la précision, prévue dans l'ordonnance, selon laquelle, lorsque la société continue avec le conjoint survivant ou l'un des héritiers de l'associé, « la valeur des droits sociaux attribués aux bénéficiaires de cette stipulation est rapportée à la succession » est de nature à jeter le trouble sur la bonne application des règles de droit commun en matière successorale, prévues par le code civil. Les dispositions prévues par l'ordonnance constituent en effet un pacte sur succession future autorisé lorsqu'il existe des bénéficiaires ab intestat. Juridiquement, on ne saurait donc parler de « rapport », car les legs sont réputés fait hors part et par préciput, sauf volonté contraire de leur auteur. En revanche, leurs droits peuvent être réduits s'ils portent atteinte aux droits des héritiers réservataires. Aussi, afin d'éviter toute ambiguïté, votre commission vous propose de supprimer, par amendement, la disposition de l'article 13 de l'ordonnance imposant de rapporter la valeur des parts à la succession. Dès lors, le droit commun des successions trouvera naturellement à s'appliquer.

En second lieu, les règles de majorité instituées pour les cessions de parts sociales à des tiers sont abaissées, passant de la majorité des associés détenant les trois quarts des parts sociales à la majorité des associés représentant la moitié des parts. Le nouveau texte tire par ailleurs les conséquences d'un refus d'agrément du cessionnaire par la société, en laissant la possibilité au cédant de revenir sur sa décision de céder ses parts, selon un mécanisme repris par l'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales.

 Les conditions de fonctionnement de la gérance de la société sont modifiées par les articles 15 à 18 de l'ordonnance, afin de les simplifier.

Il en va ainsi de la nomination et de la révocation de la gérance. Les associés, lors d'une deuxième consultation suivant une première convocation infructueuse, peuvent désormais décider à la majorité des votes émis de révoquer le gérant, c'est-à-dire dans des conditions de majorité identiques à celles exigées pour les décisions collectives ordinaires. Cette majorité est désormais également celle requise pour la nomination du gérant.

Afin d'éviter la paralysie de la vie de la société à responsabilité limitée, les statuts peuvent désormais être modifiés dans des conditions de majorité plus faibles que celles normalement exigées. Ainsi, en cas de cessation des fonctions d'un gérant, les associés peuvent, sur décision prise à la majorité ordinaire, supprimer dans les statuts la mention relative au nom du gérant. Par ailleurs, en cas de décès du gérant unique, les statuts pourront prévoir un droit de convocation de l'assemblée générale par un associé en vue de procéder à son remplacement.

Le gérant est ainsi doté de deux prérogatives nouvelles. Il lui est désormais possible de déplacer lui-même le siège social dans le même département ou dans un département limitrophe, et de mettre en conformité les statuts de la société avec les lois et règlements en vigueur. La validité de ces décisions demeure toutefois soumise à homologation de l'assemblée générale.

L'ordonnance pose désormais l'interdiction de convoquer l'assemblée générale avant l'expiration du délai de communication des documents sociaux, cette formalité incombant également au gérant de la société dans le cadre d'un fonctionnement normal de la société.

Enfin, quoique cette disposition ne concerne pas véritablement l'organisation de la gérance, afin de faciliter le retrait des apports des associés lorsque la société n'a pas été définitivement constituée ou immatriculée, ceux-ci pourront dorénavant mandater collectivement une personne pour faire retirer les fonds déposés au moment des premiers actes de constitution, sans obtenir une décision judiciaire préalable.

Les dispositions relatives au fonctionnement de la société à responsabilité limitée sont rendues applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna.

d. La modification des articles L. 242-7, L. 242-12, L. 242-13, L. 242-15 et L. 245-13 du code de commerce en vue de substituer aux incriminations pénales des sanctions civiles et l'abrogation du 2° de l'article L. 245-9 du même code

Conformément au 6° de l'article 26 de la loi précitée du 2 juillet 2003, les articles 19 à 23 de l'ordonnance prévoient une dépénalisation partielle du droit des sociétés, largement attendue par les milieux économiques. Les dispositions modifiées visent à réprimer l'inaccomplissement de certaines formalités de publicité à l'égard des actionnaires, des obligataires ou des tiers, exigées dans le cadre des sociétés anonymes, en instituant des peines d'amende visant, selon le cas, le président, les administrateurs ou les directeurs généraux.

L'absence de constatation des délibérations du conseil d'administration par des procès-verbaux formant un registre spécial tenu au siège de la société (article L. 242-7 du code de commerce) est désormais sanctionnée par une nullité ou un mécanisme d'injonction de faire. L'absence de communication aux actionnaires des renseignements, de formules de procuration et de divers documents d'information exigés en vue de la tenue des assemblées est dorénavant sanctionnée par une injonction de faire (articles L. 242-12 et L. 242-13).

L'absence de constatation et de transcription sur un registre spécial des décisions des assemblées générales d'obligataires (article L. 245-13) ou des formalités de publicité nécessaires à la connaissance par les actionnaires ou les tiers du déroulement des assemblées d'actionnaires (article L. 242-15) donne lieu, en principe, à une injonction de faire. Toutefois, des incriminations pénales restent prévues en cas d'inexistence des procès-verbaux ou des mentions obligatoires.

L'incrimination, prévue au 2° de l'article L. 245-9, punissant l'émission, pour le compte d'une société par actions, des obligations négociables dont la valeur nominale est inférieure au minimum légal est abrogée conformément à l'habilitation prévue, puisque ce minimum légal a été supprimé par le décret n° 99-257 du 1er avril 1999 portant application de la loi n° 98-546 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier et modifiant le décret n° 67-236 du 23 mars 1967 sur les sociétés commerciales.

L'ordonnance abroge également l'incrimination prévue à l'article 241-2 du code de commerce, punissant l'émission par des sociétés à responsabilité limitée d'émettre des obligations. Cette abrogation est justifiée et cohérente, dans la mesure où une telle émission est désormais autorisée par le présent texte.

Les mesures de dépénalisation du droit des sociétés sont applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et aux îles Wallis et Futuna. Pour ce faire, la procédure d'injonction de faire instaurée par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, complétée par la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique et la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière, est rendue applicable à ces collectivités.

e. La substitution de régimes de déclaration préalable aux régimes d'autorisation administrative, auxquels sont soumis les ventes en liquidation, les foires et les salons

En application des 7° et 8°  de l'article 26 de la loi d'habilitation, l'article 26 et le I de l'article 28 de l'ordonnance prévoient la substitution au régime d'autorisation auquel sont soumises les ventes en liquidation d'un régime de déclaration préalable. Ce nouveau dispositif permet d'effectuer les contrôles en vue de vérifier, en tant que de besoin, les assertions des déclarants sans subordonner ces ventes à un processus d'instruction administratif systématique.

L'organisation des foires et salons est simplifiée grâce à une substitution identique au régime d'autorisation d'un régime de déclaration préalable. Une réglementation distincte s'applique selon que les foires et salons se tiennent dans un parc d'exposition ou hors de celui-ci.

Les salons professionnels tenus hors des parcs d'exposition n'ont plus à être autorisés. Les foires et salons professionnels ouverts au public qui se tiennent dans l'enceinte de parcs d'exposition sont soumis à une simple déclaration du programme annuel à l'autorité administrative, les parcs d'exposition devant, quant à eux, faire l'objet d'un enregistrement en préfecture. En tout état de cause, les organisateurs sont dispensés de demande d'autorisation de vente au déballage. Le texte lève également les incertitudes relatives à l'application de la réglementation de la vente au déballage pour les fêtes foraines et pour les manifestations agricoles lorsque seuls des producteurs ou des éleveurs y sont exposants, en prévoyant que ce type de vente n'est pas soumis à autorisation préalable.

En conséquence des modifications ainsi apportées, les sanctions applicables sont réaménagées et des dispositions de coordination figurant dans le code de la consommation et le code général des collectivités territoriales sont prévues.

L'autorité compétente tant en matière de ventes en liquidation que de foires et salons n'est plus nominativement le préfet. En renvoyant la compétence à l'« autorité administrative compétente », le pouvoir réglementaire pourra adapter cette détermination de l'autorité compétente à l'évolution de l'organisation des services de l'Etat -dans le cadre de la réforme de l'Etat- ou aux modifications de compétences entre celui-ci et les collectivités territoriales.

Les dispositions réformant les ventes en liquidation sont applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte et partiellement aux îles Wallis et Futuna.

f. L'assouplissement des règles relatives aux marchés d'intérêt national et l'ouverture à de nouvelles catégories de personnes de la gestion de ces marchés

Conformément au 9° de l'article 26 de la loi du 2 juillet 2003, les articles 34 à 45 de l'ordonnance assouplissent les dispositions du code de commerce relatives aux marchés d'intérêt national et modifient leur mode de gestion.

Une définition des marchés d'intérêt national est désormais donnée, ceux-ci constituant « des services publics de gestion de marchés, dont l'accès est réservé aux producteurs et aux commerçants, qui contribuent à l'organisation et à la productivité des circuits de distribution des produits agricoles et alimentaires, à l'animation de la concurrence dans ces secteurs économiques et à la sécurité alimentaire des populations ». L'initiative de la création des marchés est dorénavant confiée aux régions, le classement ou la création d'un tel marché devant néanmoins intervenir par décret. La possibilité est donnée d'installer les marchés d'intérêt national sur le domaine privé de l'Etat ou des collectivités territoriales, voire de louer des parcelles à des particuliers.

La gestion peut désormais être confiée à des personnes privées, sur appel d'offres. Toutefois, l'Etat conserve la possibilité de déterminer ce mode de gestion dans certains marchés d'intérêt national dont la liste devrait être fixée par décret, ce qui devrait être, en particulier, le cas du marché d'intérêt national de Paris-Rungis.

L'institution d'un périmètre de protection -désormais dénommé « périmètre de référence »- dans lequel une implantation nouvelle ou l'extension d'une activité de gros dans les produits protégés est en principe interdite, voit sa durée limitée dans le temps. Dans la mesure où elle conduit à une limitation de la liberté constitutionnelle d'installation et d'exercice commercial, elle est la seule qui, désormais, donne lieu à un décret en Conseil d'Etat dans la réglementation des marchés d'intérêt national. Les formalités liées à une extension de cette enceinte ou à un transfert de cette implantation lorsqu'elle ne modifie pas la situation de droit sont allégées : un simple arrêté est dorénavant suffisant. Il en est de même s'il apparaît que la restriction à la liberté d'installation et d'exercice posée par la création d'un périmètre n'apparaît plus nécessaire avant le terme fixé par le décret initial. Enfin, le fondement des dérogations susceptibles d'être apportées à ce régime d'interdiction, à savoir l'amélioration de la productivité de la distribution des produits protégés, est désormais précisé.

L'ordonnance abroge, en outre, la possibilité d'instituer d'un périmètre au sein duquel l'exercice même d'une activité de gros en produits protégés fait l'objet d'une interdiction absolue, disposition particulièrement réductrice de la liberté d'entreprendre.

Le classement d'un marché en tant que marché d'intérêt national, lorsqu'il ne s'accompagne pas de la création d'un périmètre de référence, se fait par décret simple. L'implantation du marché, ses extensions ou son transfert, lorsqu'ils ne s'accompagnent pas de la création ou de la modification du périmètre de référence, l'approbation des statuts des sociétés gestionnaires et de leurs modifications ne font plus l'objet de décision d'approbation de l'Etat.

L'ordonnance prévoit des dispositions transitoires en vue de l'application de ces nouveaux dispositifs. Les modifications apportées au régime juridique du marché d'intérêt national ne sont pas applicables aux collectivités d'outre-mer visées au livre IX du code de commerce, à savoir Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis et Futuna.

Votre commission vous propose un amendement tendant à corriger deux erreurs de référence au sein des dispositions relatives aux marchés d'intérêt national.

g. L'institution d'une procédure accélérée pour l'examen, par le Conseil de la concurrence, des affaires inférieures à un seuil déterminé et le relèvement du seuil du chiffre d'affaires des entreprises soumises au contrôle des opérations de concentration

Les articles 24 et 25 de l'ordonnance, pris en application du 10° de l'article 26 de la loi d'habilitation, définissent une procédure accélérée pour l'examen par le Conseil de la concurrence des affaires mettant en cause des opérateurs détenant des parts de marché inférieures à un niveau déterminé.

Ainsi, le Conseil de la concurrence peut recourir à la procédure accélérée d'examen, mise en place par la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, lorsque :

- les pratiques anticoncurrentielles qui lui sont soumises ne visent pas des contrats passés en application du code des marchés publics ;

- et que la part de marché cumulée détenue par les entreprises ou organismes parties à l'accord ou à la pratique en cause ne dépasse pas 10 % sur l'un des marchés affectés par l'accord ou la pratique lorsqu'il s'agit d'un accord ou d'une pratique entre des entreprises ou organismes qui sont des concurrents, existants ou potentiels, sur l'un des marchés en cause, ou bien 15 % sur l'un des marchés affectés par l'accord ou la pratique lorsqu'il s'agit d'un accord ou d'une pratique entre des entreprises ou organismes qui ne sont pas concurrents existants ou potentiels sur l'un des marchés en cause. Toutefois, ne peuvent bénéficier d'une telle procédure les accords ou pratiques limitativement énumérées par l'ordonnance en raison de leur caractère particulièrement attentatoires à la concurrence. Cette procédure simplifiée et accélérée sera désormais pleinement motivée.

Le seuil de déclaration des concentrations est par ailleurs relevé, le seuil relatif au chiffre d'affaires hors taxe réalisé en France par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernées étant porté de 15 millions d'euros à 50 millions d'euros.

En outre-mer, la réforme du droit de la concurrence et des concentrations s'applique à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, les dispositions du code de commerce excluant ce domaine pour la Nouvelle-Calédonie et partiellement pour les îles Wallis et Futuna.

Votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance, sous réserve d'un amendement tendant à supprimer l'obligation de rapporter à la succession la valeur des parts détenues par l'héritier ou le conjoint survivant lorsque ce dernier se substitue, en qualité d'associé de la société à responsabilité limitée, à l'associé décédé et à corriger certaines erreurs matérielles ou de référence concernant la société à responsabilité limitée et la réglementation applicable aux marchés d'intérêts nationaux. Ces modifications sont rendues applicables à Mayotte, à Wallis-et-Futuna et en Nouvelle-Calédonie.

9. L'ordonnance n° 2004-279 du 25 mars 2004 portant simplification et adaptation des conditions d'exercice de certaines activités professionnelles (article 51, XVI)

Cette ordonnance a été prise dans les délais impartis en application de l'article 27 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit. Cette disposition habilitait le Gouvernement à intervenir dans le domaine de la loi pour « simplifier la législation applicable à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce », « simplifier et adapter aux exigences de la profession les conditions d'établissement et d'exercice des professions d'agent de voyage, d'expert-comptable, de coiffeur, de courtier de marchandises assermenté, d'exploitant forestier et de voyageur, représentant ou placier », ainsi que « simplifier les conditions d'établissement des commerçants étrangers et l'exercice de leur activité ». La durée de cette habilitation était de douze mois à compter de la publication de la loi d'habilitation. Conformément aux exigences constitutionnelles, un projet de loi de ratification a été déposé, dans les délais prévus par l'article 35 de la loi d'habilitation, au Sénat et annexé au procès-verbal de la séance du 28 juin 2004.

La ratification de cette ordonnance dans le cadre du présent projet de loi résulte d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois, avec l'avis favorable du Gouvernement.

La présente ordonnance, composée de dix articles, ne couvre pas l'intégralité du champ de l'habilitation. En effet, la simplification des dispositions relatives à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce a fait l'objet d'une ordonnance ultérieure212(*) dont votre commission proposera, par voie d'amendement, la ratification dans le cadre du présent article. En outre, l'ordonnance ne comporte aucune disposition relative à l'établissement et à l'exercice des professions d'agent de voyage et d'exploitant forestier. Ces régimes ne peuvent toutefois plus faire l'objet d'une modification par voie d'ordonnance sur le fondement de l'article 27 de la loi d'habilitation du 2 juillet 2003, les délais d'habilitation prévus étant désormais expirés.

La présente ordonnance permet un établissement et un exercice dans des conditions moins contraignantes des professions d'expert-comptable, de coiffeur, courtier de marchandises assermenté et voyageur, représentant ou placier. Elle ne remet toutefois pas en cause le principe même d'une réglementation particulière à l'égard de l'accès et de l'exercice de ces professions, propre à chacune d'entre elles et liée à leurs particularités. Elle simplifie par ailleurs les conditions d'exercice des activités commerciales par des ressortissants étrangers.

Ces dispositions s'appliquent à l'ensemble du territoire métropolitain et aux départements et régions d'outre-mer, ainsi que, sous certaines réserves, aux collectivités d'outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte, Nouvelle-Calédonie et Wallis-et-Futuna.

a. La simplification et l'adaptation aux exigences de la profession des conditions d'établissement et d'exercice des experts-comptables, coiffeurs, courtiers de marchandises assermentés et voyageurs, représentants ou placiers

Les articles 2 à 5 de l'ordonnance simplifient les dispositions relatives aux experts-comptables, coiffeurs, courtiers de marchandises assermentés et voyageurs, représentants ou placiers, conformément à l'habilitation prévue par le 2° de l'article 27 de la loi du 2 juillet 2003.

 La loi n° 46-1173 du 23 mai 1946 portant réglementation des conditions d'accès à la profession de coiffeur est modifiée, afin de renvoyer à un décret la détermination des diplômes nécessaires à l'exercice de la coiffure ou des dérogations possibles à la qualification professionnelle. Ce dispositif permet ainsi de ne pas surcharger inutilement la loi et d'adapter plus facilement cette liste aux évolutions des techniques de formation des coiffeurs.

L'ordonnance vise par ailleurs à régler la situation des personnes qui avaient bénéficié de la validation de leur expérience professionnelle par une commission de validation, ce dispositif ayant été abrogé par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, sans pour autant que soit précisé leur sort. L'ordonnance dispose en conséquence que ces personnes sont réputées remplir les conditions de qualification professionnelle désormais requises pour l'exercice de la profession. La même disposition prévoit également que sont réputées satisfaire aux conditions d'exercice susvisées les personnes pour lesquelles une décision du Conseil d'Etat, notifiée postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi précitée du 17 janvier 2002, a annulé pour erreur manifeste d'appréciation un refus opposé par la Commission nationale de la coiffure.

En outre-mer, ces dispositions ne s'appliquent qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon.

 L'exercice de la profession de courtier de marchandises assermenté est simplifié par l'édiction d'un principe selon lequel la vente volontaire s'effectue sans autorisation du tribunal de commerce. En revanche, la vente de certaines marchandises dont la nature est définie par la loi mais dont la liste est fixée par simple arrêté du ministre de la justice et du ministre chargé du commerce reste soumise à autorisation.

Ces dispositions sont applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte et étendues en Nouvelle-Calédonie ainsi qu'à Wallis-et-Futuna.

 L'exigence d'une carte d'identité professionnelle de voyageur, représentant, placier, antérieurement prévue par le code du travail, est supprimée.

Comme l'avait souligné votre rapporteur dans son rapport sur le projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, cette carte ne sanctionnait aucunement le fait que la personne qui exerce la profession de voyageur représentant placier satisfaisait à des conditions d'aptitude ou de capacité professionnelles. De plus, si ce professionnel est soumis à certains avantages en matière fiscale, compte tenu de l'exercice de sa profession, il ne tire pas ces derniers de la détention de sa carte, ces avantages découlant seulement du contrat de représentation conclu entre le voyageur, représentant, placier et son employeur.213(*)

En outre-mer, cette disposition ne s'applique qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon.

 La profession d'expert-comptable est la plus profondément modifiée par la présente ordonnance dont l'article 5 réécrit entièrement plusieurs dispositions de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 portant institution de l'ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable.

L'objet des modifications apportées est de permettre aux experts-comptables d'accompagner la création d'entreprise sous l'ensemble de ses aspects comptables ou à finalité économique et financière. Cette vocation est désormais expressément affirmée par le texte.

Les structures d'exercice de la profession sont aménagées. Ainsi, les experts-comptables peuvent dorénavant exercer leur profession sous forme de sociétés par actions simplifiée. Un régime dérogatoire est institué concernant le nombre d'administrateurs ou de membres du conseil de surveillance des sociétés d'expertise-comptable constituées sous forme de société anonyme susceptibles d'être bénéficiaires d'un contrat de travail.

Les dispositions de l'ordonnance prévoient désormais la possibilité d'exercer l'activité d'expertise comptable sous forme associative au sein d'associations de gestion et de comptabilité exerçant leur activité sans limitation de chiffre d'affaires ou de secteur socio-professionnel de leur clientèle, et qui ne seraient pas membres de l'ordre des experts-comptables. Cette nouvelle forme est destinée à remplacer les actuels centres de gestion agréés et habilités, nés de la pratique.

Ces associations sont créées à l'initiative de chambres de commerce et d'industrie, de chambres de métiers, de chambres d'agriculture, ou d'organisations professionnelles d'industriels, de commerçants, d'artisans ou d'agriculteurs, aucune association ne pouvant toutefois être inscrite au tableau si elle compte moins de trois cents adhérents lors de la demande d'inscription. Elles ne peuvent détenir de participations financières dans d'autres entreprises, à l'exception de celles ayant pour objet l'exercice des activités identiques à celles pouvant être pratiquées par des experts-comptables. Elles sont soumises aux dispositions législatives et réglementaires relatives à la profession d'expert-comptable. Les salariés responsables de cette activité au sein des associations doivent être diplômés d'expertise comptable et inscrits à l'ordre.

Deux organes, placés auprès du Conseil supérieur des experts comptables, sont institués. Une commission nationale chargée de statuer sur l'inscription des associations de gestion et de comptabilité au tableau et de tenir la liste de ces associations est chargée de surveiller l'exercice de l'activité d'expertise comptable sous forme associative. Une commission nationale est également chargée, en première instance, de la discipline des associations de gestion et de comptabilité, la chambre nationale de discipline des experts-comptables statuant en appel sur ses décisions, un des membres du conseil supérieur de l'ordre des experts-comptables étant alors remplacé par un représentant des associations de gestion et de comptabilité.

A titre transitoire, les salariés des centres de gestion agréés et habilités remplissant des conditions d'âge, de diplôme et d'activité professionnelle spécifiques peuvent soit être inscrits au tableau de l'ordre des experts-comptables, soit faire fonction d'expert-comptable. Les centres de gestion agréés sont habilités à tenir des comptabilités jusqu'au 31 décembre 2008. Ils peuvent demander, dans un délai de trois ans à compter du décret précisant les modalités de fonctionnement et de désignation de la commission chargée de l'inscription des associations au tableau, à être transformés en associations de gestion et de comptabilité. Afin de faciliter cette transformation, le code général des impôts est modifié pour que cette novation s'effectue en franchise d'impôt.

Les conditions d'accès des ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen sont également modifiées. Les professionnels de la comptabilité se voient par ailleurs offrir la possibilité de recourir, dans des conditions devant être fixées par décret, à des actions de promotion, ce dispositif permettant d'assurer la transposition de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 sur le commerce électronique.

En dernier lieu, pour apprécier les conséquences pratiques de la mise en oeuvre de ce nouveau régime, l'ordonnance n° 2004-279 du 27 mars 2004 prévoit l'établissement d'un rapport, avant le 1er mai 2008, sur la réforme des professions comptables et sur les centres de gestion agréés et habilités.

Dans leur totalité, les dispositions relatives aux experts-comptables ne sont pas applicables dans les collectivités d'outre-mer.

Contrairement aux craintes notamment exprimées par les membres de la profession d'avocat et relayées, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, par de nombreuses questions écrites, votre commission constate que le « périmètre du chiffre et du droit » n'est pas modifié par la présente ordonnance. En effet, le septième alinéa de l'article 22 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 précise toujours que les experts-comptables peuvent donner des consultations et effectuer toutes études et tous travaux d'ordre juridique et apporter leur avis devant toute autorité ou organisme public ou privé qui les y autorise, « sans pouvoir en faire l'objet principal de leur activité et seulement s'il s'agit d'entreprises dans lesquelles ils assurent des missions d'ordre comptable de caractère permanent ou habituel ou dans la mesure où lesdites consultations, études, travaux ou avis sont directement liés aux travaux comptables dont ils sont chargés ».

La réforme de la profession d'expert-comptable, qui était attendue par la profession, est donc de nature à clarifier le statut des « hommes du chiffre », tout en favorisant leur intervention, souvent indispensable, tant lors de la création que pendant le fonctionnement normal des entreprises.

b. La simplification des conditions d'établissement des commerçants étrangers et l'exercice de leur activité

Conformément à l'habilitation donnée au 3° de l'article 27 de la loi du 2 juillet 2003, l'article 1er de l'ordonnance modifie l'article L. 122-1 du code de commerce afin de simplifier les conditions d'établissement des commerçants étrangers et l'exercice de leur activité en France.

Votre rapporteur avait souligné, lors de l'examen de la loi d'habilitation, le caractère inapproprié du régime antérieurement prévu en la matière214(*). Les étrangers qui ne sont ressortissants ni d'un Etat membre de l'Union européenne ou de l'Espace économique européen, ni d'un Etat ayant conclu avec la France une convention les en dispensant, devaient en effet être titulaires d'une carte d'identité spéciale de commerçant étranger pour pouvoir exercer le commerce en France, cette première formalité se doublant d'une seconde, liée à l'application des dispositions de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France. Une double instruction ayant un objet similaire était donc opérée à l'égard de certains commerçants étrangers qui ne pouvait plus se justifier par des contraintes liées au respect de l'ordre public.

Ce constat a conduit à supprimer la carte d'identité de commerçant étranger. Lui est substituée l'obligation d'obtenir une autorisation préalable nécessaire à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale, donnée par le préfet de département dans lequel le commerçant étranger envisage d'exercer pour la première fois son activité. Les personnes titulaires d'une carte de résident sont cependant exemptées de l'accomplissement d'une telle formalité, de même que celles bénéficiant déjà, à la date de la publication de la présente ordonnance, d'une carte de commerçant étranger.

En outre, les commerçants ressortissants d'un Etat membre de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sont désormais, à l'instar de ceux qui sont ressortissants d'un Etat membre de la Communauté européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, exemptés de ce nouveau régime d'autorisation.

Ce nouveau régime est rendu applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, sous réserve d'une adaptation relative à l'autorité chargée de la délivrance de l'autorisation.

Compte tenu de sa conformité à l'habilitation conférée par la loi du 2 juillet 2003, votre commission vous invite à ratifier la présente ordonnance sans modification.

10. L'ordonnance n° 2004-280 du 25 mars 2004 relative aux simplifications en matière d'enquêtes statistiques (article 51, XVII)

Cette ordonnance a été prise en application de l'article 23 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, qui autorisait le Gouvernement, afin de réduire le nombre des enquêtes statistiques d'intérêt général obligatoires auxquelles les personnes morales de droit public et de droit privé, les entrepreneurs individuels et les personnes exerçant une profession libérale sont astreints, à prendre des mesures permettant :

- de déterminer les enquêtes statistiques qui doivent revêtir un caractère obligatoire ;

- d'organiser, dans le respect de la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, la cession aux services statistiques des données recueillies, dans le cadre de leurs missions, par les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics et les personnes morales de droit privé chargées d'une mission de service public, et de définir les conditions d'exploitation de ces données à des fins de recherche scientifique.

Un projet de loi de ratification de la présente ordonnance a été déposé devant le Sénat215(*) le 28 juin 2004, dans des délais qui satisfont les exigences de l'article 38 de la Constitution.

L'ordonnance, composée de 7 articles, modifie par conséquent la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, afin de diminuer le nombre d'enquêtes et de préciser le champ des enquêtes statistiques publiques obligatoires pour les personnes physiques et morales.

L'article 1er de l'ordonnance donne à l'autorité administrative le pouvoir de décider quelles sont les enquêtes statistiques publiques qui sont rendues obligatoires. Un décret devrait préciser que cette compétence est exercée par le ministre chargé de l'économie, après avis du conseil national de l'information statistique (CNIS).

La loi de 1951 ne prévoyait jusqu'à présent que des enquêtes obligatoires, même si le CNIS avait créé, il y a dix ans, la notion d'enquête non obligatoire et d'intérêt général. Ces enquêtes sont beaucoup moins contraignantes pour les entreprises interrogées que les enquêtes obligatoires. L'article 1er met ainsi le droit et la pratique en accord.

L'article 2 précise les obligations qui s'imposent aux personnes physiques et morales amenées à répondre aux enquêtes statistiques publiques rendues obligatoires. Ainsi, aux termes de la nouvelle rédaction de l'article 3 de la loi du 7 juin 1951, « les personnes sont tenues de répondre, avec exactitude, et dans les délais fixés, aux enquêtes statistiques qui sont rendues obligatoires en vertu de l'article 1er ».

L'article 3 de l'ordonnance modifie l'article 6 de la loi du 7 juin 1951 pour préciser le droit applicable aux renseignements individuels d'ordre économique et financier collectés par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). La loi disposera désormais que :

- ces données sont protégées par le secret statistique pendant trente ans suivant la date du recensement ou de l'enquête ;

- ces renseignements ne peuvent en aucun cas être utilisés à des fins de contrôle fiscal ou de répression économique. Les données recueillies font ainsi l'objet d'une dérogation au droit de communication fiscal et douanier dont bénéficient les données statistiques.

L'article 4 de l'ordonnance insère dans la loi de 1951 un article 6 bis instituant un comité du secret statistique, doté de prérogatives plus larges que le comité du secret statistique concernant les entreprises créées par le décret n° 84-628 du 17 juillet 1984 auquel il se substitue.

La sanction, par des dispositions de l'article 226-13 du code pénal, de la violation du secret professionnel relatif aux données sur lesquelles ce comité émet un avis justifie que sa création intervienne dans un texte de niveau législatif. Ce comité donne en effet son avis sur les demandes de communication des données individuelles d'ordre économique et financier relatives aux personnes morales de droit public et de droit privé et à l'activité professionnelle des entrepreneurs individuels et des personnes exerçant une profession libérale. Un décret en Conseil d'Etat précisera la composition du comité, qui sera présidé par un conseiller d'Etat et comprendra notamment des représentants de l'Assemblée nationale et du Sénat, et ses modalités de fonctionnement.

L'article 5 renforce, à l'article 7 bis de la loi du 7 juin 1951, les possibilités de cession, aux services statistiques, de données recueillies dans le cadre de leurs missions par l'ensemble des structures de nature administrative, aux fins d'établissement de statistiques.

Cette disposition permettra de réaliser des économies en substituant, dans la mesure du possible, l'exploitation de données administratives recueillies à d'autres fins, à la réalisation d'enquêtes statistiques spécifiques. Certaines enquêtes seront également allégées grâce à la suppression de questions et à l'utilisation des informations extraites de fichiers administratifs détenus par d'autres services.

Ainsi, sur demande du ministre chargé de l'économie, les informations relatives aux personnes physiques recueillies, dans le cadre de sa mission, par une administration, ou une personne morale de droit public ou privé gérant un service public sont cédées « à des fins exclusives d'établissement de statistiques, à l'INSEE ou aux services statistiques ministériels ».

Cet article étend en outre la possibilité de transmission aux données à caractère personnel relatives à la santé, à la condition qu'elles soient destinées à l'établissement de statistiques sur l'état de santé de la population et les politiques de santé publique.

Dans ce cas, les modalités de communication des données ne doivent pas permettre l'identification des personnes, sauf si des éléments d'identification sont nécessaires à l'établissement des statistiques. La transmission doit alors néanmoins se faire dans le respect des dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Afin de garantir le respect du secret médical, les éléments d'identification des personnes doivent être détruits après utilisation des données.

En conséquence, l'article 7 ter inséré dans la loi de 1951 par l'article 6 de l'ordonnance, donne compétence à la formation plénière du comité du secret statistique pour émettre des recommandations sur l'accès « pour des besoins de recherche scientifique » aux données individuelles transmises à l'INSEE. Il revient par ailleurs aux ministres chargés de l'économie et de la recherche et au ministre dont relève l'administration ou la personne morale qui a collecté les données, de signer la décision de transmission.

Le principe de substitution des retraitements de données administratives aux collectes directes par voie d'enquête statistique allègera la charge pesant sur les personnes physiques et morales interrogées tout en restant strictement encadré et contrôlé.

Votre commission des Lois vous propose de ratifier l'ordonnance sans modification.

11. L'ordonnance n° 2004-328 du 15 avril 2004 relative à l'élection des délégués consulaires et des juges des tribunaux de commerce (article 51, XIX)

Le paragraphe XIX du présent article propose la ratification de l'ordonnance n° 2004-328 du 15 avril 2004 relative à l'élection des délégués consulaires216(*) et des juges des tribunaux de commerce, prise en application de l'article 19 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit. L'ensemble des points couverts par l'habilitation y est repris217(*).

Cette ordonnance a été publiée le 15 avril 2004. Le Gouvernement a donc respecté le délai de publication prévu par la loi du 2 juillet 2003, -douze mois à compter du 3 juillet 2003. Un projet de loi de ratification218(*) a été déposé le 7 juillet 2004 dans le délai fixé par l'article 35 de cette même loi -trois mois à compter de la publication de l'ordonnance (soit le 15 juillet 2004).

Plutôt que d'attendre l'inscription de ce texte à l'ordre de jour, les députés -à l'initiative de leur commission des Lois et avec l'avis favorable du Gouvernement- ont proposé la ratification de cette ordonnance par voie d'amendement.

Cette ordonnance, composée de quinze articles, complète l'ordonnance n° 2003-1067 du 12 novembre 2003 relative à l'élection des membres des chambres de commerce et d'industrie, à la prorogation des mandats des délégués consulaires et modifiant le code de commerce, tout en y apportant quelques retouches ponctuelles.

Un décret n° 2004-799 du 29 juillet 2004 relatif à l'élection des délégués consulaires complète également la présente ordonnance. Il précise la procédure en matière d'établissement des listes électorales, les règles de dépôt des candidatures, les modalités de vote et le régime contentieux.

 Les articles premier à 8 de l'ordonnance modernisent le régime des élections des délégués consulaires défini par le code de commerce.

Les articles premier, 2 et 5 de la présente ordonnance apportent des modifications de pure forme au chapitre III du titre premier du livre VII du code de commerce. Afin de regrouper les articles de ce chapitre par thème, trois sections distinctes respectivement relatives à l'élection des membres des chambres de commerce et d'industrie (section 1), à l'élection des délégués consulaires (section 2) et aux dispositions communes à ces deux élections (section 3) sont créées. En conséquence, de nombreux articles sont renumérotés219(*). Par ailleurs, il est proposé une coordination destinée à prendre en compte cette nouvelle numérotation.

L'article 3 de la présente ordonnance réécrit les articles L. 713-6 et L. 713-7220(*). Ces dispositions reprennent en partie le contenu de l'article L. 713-4 relatif à la durée du mandat des délégués consulaires et à la composition du corps électoral. Quelques modifications de forme et de fond similaires à celles proposées par l'ordonnance précitée du 12 novembre 2003 pour les élections des membres des chambres de commerce sont toutefois prévues :

- la durée du mandat des délégués consulaires est relevée de trois à cinq ans (article L. 713-6) ;

- les membres et anciens membres des chambres de commerce et d'industrie sont supprimés de la liste des électeurs à titre individuel (article L.713-7) ;

- la liste des électeurs par l'intermédiaire d'un représentant est identique à celle mentionnée à l'article premier de l'ordonnance du 12 novembre 2003 (2° du II de l'article L. 713-1 du code de commerce)221(*).

D'après les informations fournies à votre rapporteur, il s'agit d'alléger la tâche des CCI, lesquelles organisent à la fois les élections des CCI et celles des délégués consulaires. Toutefois, l'alignement sur la composition du corps électoral des CCI n'est pas complet, le Gouvernement ayant souhaité conserver certaines particularités liées au rôle des délégués consulaires.

Outre les commerçants, les chefs d'entreprise et leurs conjoints collaborateurs, les membres et anciens membres des tribunaux de commerce demeurent électeurs à titre individuel des délégués consulaires, ainsi que les capitaines au long cours ou capitaines de la marine marchande, les pilotes maritimes et les pilotes de l'aéronautique. Subsiste également la référence aux « cadres » exerçant des fonctions impliquant des responsabilités de direction.

L'article 4 de l'ordonnance réécrit les articles L. 713-8 et L. 713-9222(*) relatifs aux conditions requises pour être électeur des délégués consulaires, reproduisant intégralement celles figurant dans l'ordonnance du 12 novembre 2003.

Par coordination avec les modifications apportées à l'ordonnance du 12 novembre 2003223(*), votre commission vous soumet un amendement pour corriger un renvoi erroné au code électoral.

L'article 6 de l'ordonnance complète le dernier alinéa de l'article L. 713-11 du code de commerce relatif au vote -renuméroté L. 713-15 aux termes de l'article 2224(*) et précédemment modifié par l'ordonnance du 12 novembre 2003. Il est précisé que les nouvelles modalités de vote applicables aux élections des CCI (par correspondance ou par voie électronique) sont également valables pour l'élection des délégués consulaires225(*).

L'article 7 de la présente ordonnance modifie l'article L. 713-13 du code de commerce relatif à l'organisation des élections des délégués consulaires et des membres des CCI -devenu aux termes de l'article 2 l'article L. 713-17 pour mentionner expressément que ces deux élections sont organisées concomitamment. Selon les informations obtenues par votre rapporteur, il s'agit de confirmer une pratique ancienne. En outre, la mention relative au préfet figurant à l'article L. 713-13 dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance est remplacée par une référence plus générale à « l'autorité administrative », ce qui donne une plus grande souplesse pour la désignation de l'autorité chargée d'organiser les élections.

L'article 8 de l'ordonnance modifie l'article L. 910-1 du code de commerce relatif à l'applicabilité du code de commerce à Saint-Pierre-et-Miquelon par coordination avec la nouvelle numérotation des articles proposée par l'article 2. D'après les informations fournies à votre rapporteur, il convient d'exclure l'application à cette collectivité de toutes les dispositions relatives aux délégués consulaires compte tenu du fait que le tribunal de première instance est compétent en matière commerciale. Votre commission vous propose dans le même amendement de modifier l'article 8 afin d'en améliorer la clarté rédactionnelle.

 Les articles 9 à 14 de la présente ordonnance modifient le code de l'organisation judiciaire pour moderniser le régime des élections des juges des tribunaux de commerce.

L'article 9 propose des modifications de pure forme. L'article 10 de l'ordonnance réécrit le premier alinéa de l'article L. 412-7 du code de l'organisation judiciaire, afin de clarifier le droit en vigueur. Selon les informations fournies par votre rapporteur, il s'agit de lever des ambiguïtés d'interprétation sur la durée des mandats des juges consulaires. Comme actuellement, la durée du premier mandat des juges élus est fixée à deux ans, puis quatre ans pour les élections suivantes. Il est toutefois expressément indiqué que cette règle s'applique, sous réserve de l'article L. 413-4 relatif au nombre maximal de mandats successifs exercés au sein d'un même tribunal de commerce (quatre pour les juges consulaires, cinq pour le président du tribunal de commerce).

L'article 11 de l'ordonnance modifie l'article L. 413-1 relatif à la composition du corps électoral des juges des tribunaux de commerce. Outre quelques modifications de pure forme, la liste des électeurs est réduite. Y figurent :

- les délégués consulaires, l'ordonnance précisant qu'il s'agit de ceux élus dans le ressort de la juridiction ;

- les membres du tribunal de commerce et les anciens membres ayant demandé à être inscrits sur les listes électorales.

Ne font plus partie du corps électoral les membres et anciens membres des chambres de commerce et d'industrie. Toutefois, compte tenu de la possibilité de cumul entre les fonctions de membre d'une chambre de commerce et d'industrie et celles de délégué consulaire instituée par l'ordonnance du 12 novembre 2003, un membre ou ancien membre d'une CCI par ailleurs délégué consulaire disposera de la faculté de participer aux élections des juges des tribunaux de commerce.

Les conditions relatives à l'interdiction de toute condamnation pénale, disciplinaire ou civile sont intégralement reprises. Ainsi, la présente ordonnance conserve le renvoi aux articles L. 5 et L. 6 du code électoral, sans avoir tiré les conséquences de la nouvelle rédaction de ces articles. A l'instar des modifications relatives au corps électoral des CCI et des délégués consulaires qu'elle vous a soumises respectivement dans l'ordonnance du 12 novembre 2003 et à l'article 4 de la présente ordonnance, votre commission vous propose de réparer cette erreur matérielle. Elle vous propose par le même amendement de mentionner expressément les interdictions énoncées dans les dispositions abrogées (condamnations pénales pour des agissements contraires à l'honneur, à la probité et aux bonnes moeurs, faillite personnelle...).

L'article 12 de la présente ordonnance reprend les règles d'éligibilité applicables aux juges des tribunaux de commerce fixées à l'article L. 413-3 du code de commerce, sous réserve de quelques modifications de pure forme liées à la nouvelle numérotation des articles du code de commerce. Demeurent éligibles à ces fonctions les électeurs des délégués consulaires (article L. 713-7 du code de commerce réécrit par l'article 3 de l'ordonnance). Les conditions d'âge -trente ans minimum- et d'expérience professionnelle -cinq ans d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou d'activité selon le type de profession exercée- sont reprises, avec un ajout relatif à l'exigence de la nationalité française.

Ce même article insère deux articles L. 413-3-1 et L. 413-3-2 dans le code de commerce pour renforcer le régime disciplinaire des membres des tribunaux de commerce.

Cette innovation se justifie par le souci d'éviter certains abus. En effet, aucune disposition du code de l'organisation judiciaire ne permettait d'interdire à un membre d'un tribunal de commerce de démissionner pour échapper à une sanction disciplinaire et de se représenter aux élections suivantes.

Le Gouvernement a souhaité empêcher un tel comportement de nature à porter un fort discrédit sur la juridiction consulaire. Ainsi, il est prévu que toute personne ayant été déchue de ses fonctions de membre d'un tribunal de commerce par la commission nationale de discipline soit inéligible pendant dix ans (article L. 413-3-1). Ce dispositif est complété par l'article L. 413-3-2 qui ouvre à la commission nationale de discipline la possibilité de déclarer inéligible toute personne déchue de sa qualité de membre d'un tribunal de commerce ayant présenté sa démission de membre d'un tribunal de commerce au cours de la procédure disciplinaire.

Par ailleurs, est transférée à l'article L. 413-3-1 la règle qui figurait à l'article L. 413-3 selon laquelle l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires à l'encontre d'un candidat aux fonctions de membre d'un tribunal de commerce ou de la société auquel ce candidat appartient constitue un motif d'inéligibilité.

Votre commission vous propose dans le même amendement, de maintenir ces dispositions au sein de l'article L. 413-3. En effet, il paraît plus logique de regrouper les conditions générales applicables aux candidats aux fonctions de membre d'un tribunal de commerce au sein d'un même article, les articles L.413-3-1 et suivant traitant plus spécifiquement de la discipline des juges en exercice ou démissionnaires.

Enfin, l'article 12 de l'ordonnance réécrit l'article L. 413-4 du code commerce qui concerne la limitation de la durée d'exercice des fonctions pour en clarifier la rédaction. Aucune modification n'est apportée sur le fond. Dans un souci de précision, la référence à un nombre maximal d'années d'exercice (quatorze années d'exercice au sein d'un même tribunal pour les juges des tribunaux de commerce - dix-huit années pour un président de tribunal de commerce) est remplacée par celle relative à un nombre maximal de mandats successifs (quatre mandats successifs226(*) pour les juges, cinq mandats pour un président de tribunal de commerce227(*)). Comme auparavant, à l'issue de cette période d'exercice, un juge n'est plus éligible pendant un an.

L'article 13 de l'ordonnance modifie l'article L. 413-6 relatif aux modalités de vote. A l'instar des élections des CCI et des délégués consulaires, les nouvelles modalités de vote -par correspondance ou par voie électronique- sont étendues aux élections des membres des tribunaux de commerce228(*). L'abandon du vote à l'urne est ainsi consacré.

L'article 14 de la présente ordonnance insère dans le code de l'organisation judiciaire une section 4 intitulée « mesures d'application », comprenant un article L. 413-12 qui renvoie à un décret en Conseil d'Etat les modalités d'application des règles relatives aux élections des juges des tribunaux de commerce.

L'article 15 de la présente ordonnance a pour objet de réparer un oubli de l'ordonnance du 12 novembre 2003 (article 3). L'article L.713-3 du code de commerce relatif au corps électoral des membres des CCI est complété afin de permettre à « un président ou un membre du conseil d'administration » d'être désigné comme représentant électeur.

Les articles 16 et 17 de la présente ordonnance précisent les délais d'application de la présente réforme.

L'entrée en vigueur du volet relatif à l'élection des délégués consulaires est fixée aux élections suivant la publication de la présente ordonnance, en l'espèce novembre 2004.

L'application des dispositions relatives aux juges des tribunaux de commerce est écartée pour l'année 2004 pour laquelle le régime ancien s'applique. Ainsi la réforme entrera-t-elle en vigueur lors des élections de 2005. Ce décalage se justifie par le souci d'attendre que les élections des délégués consulaires aient permis un renouvellement complet du corps électoral des juges consulaires.

Sous réserve des modifications qu'elle vous a précédemment proposées, votre commission vous invite à ratifier l'ordonnance du 15 avril 2004.

II. Les ratifications d'ordonnances auxquelles votre commission des Lois vous propose de procéder par voie d'amendement

Depuis le 10 juin 2004, date de l'adoption du présent projet de loi par l'Assemblée nationale en première lecture, treize nouvelles ordonnances ont été prises par le Gouvernement sur le fondement de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit.

Afin d'assurer la sécurité juridique de ces textes, pris dans le domaine de la loi, mais qui conservent un caractère réglementaire jusqu'à leur ratification par le Parlement, votre commission vous propose de ratifier, par amendement, les ordonnances, au nombre de huit, rentrant dans son champ de compétence et pour lesquelles elle avait examiné l'habilitation correspondante prévue dans la loi précitée du 2 juillet 2003, sous réserve des modifications qu'elle vous propose229(*).

Les autres ordonnances prises par le Gouvernement sur le fondement de la loi d'habilitation devraient faire l'objet de proposition de ratification par les commissions saisies pour avis. La commission des Affaires sociales, saisie pour avis, devrait ratifier les ordonnances n° 2004-605 du 24 juin 2004 simplifiant le minimum vieillesse et n° 2004-602 du 24 juin 2004 relative à la simplification du droit dans les domaines du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, la commission des Affaires économiques l'ordonnance n° 2004-570 du 17 juin 2004 portant diverses mesures de simplification dans le domaine agricole et la commission des Affaires culturelles l'ordonnance n° 2004-545 relative à la partie législative du code de la recherche et l'ordonnance n° 2004-631 du 1er juillet 2004 relative à la simplification du régime d'entrée en vigueur, de transmission et de contrôle des établissements locaux d'enseignement.

1. L'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat

L'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat, composée de vingt-neuf articles, a été prise sur le fondement de l'article 6 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit230(*) qui visait à permettre de :

modifier la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée231(*) ;

créer de nouvelles formes de contrats conclus par des personnes publiques ou des personnes privées chargées d'une mission de service public pour la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation, et le financement d'équipements publics, ou la gestion et le financement de services, ou une combinaison de ces différentes missions. La présente ordonnance vise justement à instituer ces nouveaux contrats de partenariat.

L'article 6 de la loi précitée du 2 juillet 2003 disposait également que l'ordonnance devrait, d'une part, déterminer les règles de publicité et de mise en concurrence relatives au choix du ou des cocontractants, les règles de transparence et de contrôle relatives au mode de rémunération du ou des cocontractants, à la qualité des prestations ainsi qu'au respect des exigences du service public et, d'autre part, prévoir les conditions d'un accès équitable à ces contrats des architectes, des concepteurs, des petites et moyennes entreprises et des artisans.

Cette dernière exigence consistant à prévoir les conditions d'un accès équitable aux architectes, aux concepteurs, aux petites et moyennes entreprises et aux artisans est issue d'un amendement présenté par votre commission, sous-amendé par notre excellent collègue Pierre Jarlier, et adopté par le Sénat lors de la première lecture de la loi, avec l'avis favorable du gouvernement. En effet, il était apparu nécessaire de garantir une place à l'ensemble de ces professions dont le rôle est essentiel pour la construction immobilière et qui craignaient de se voir exclus du champ ouvert par ces nouveaux contrats232(*).

L'ordonnance pouvait enfin étendre et adapter à d'autres besoins et à d'autres collectivités territoriales les dispositions :

- du I de l'article 3 de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, tendant à permettre à l'Etat de confier à une personne ou à un groupement de personnes, de droit public ou privé, une mission portant à la fois, soit sur la conception, la construction, l'aménagement, l'entretien et la maintenance d'immeubles affectés à la police nationale, à la gendarmerie nationale, aux armées ou aux services du ministère de la défense, soit à la fois sur la conception, la construction et l'aménagement d'infrastructures nécessaires à la mise en place de systèmes de communication et d'information répondant aux besoins des services du ministère de l'intérieur ;

- de l'article L. 34-3-1 du code du domaine de l'Etat créant un dispositif spécifique de location avec option d'achat ;

- de l'article L. 34-7-1 du code du domaine de l'Etat autorisant le financement par crédit bail des constructions édifiées ;

- de l'article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales permettant la passation de baux emphytéotiques par les collectivités territoriales sur les dépendances de leur domaine public, excepté les voies publiques et leurs dépendances ;

- de l'article L. 1311-4-1 du code général des collectivités territoriales autorisant, jusqu'au 31 décembre 2007, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à construire, acquérir ou rénover des bâtiments affectés à la justice, à la police ou à la gendarmerie nationales.

Contrats globaux pouvant à la fois porter sur la conception, la réalisation, la gestion, l'exploitation et le financement d'équipements et de services publics, les contrats de partenariat ont pour principal objectif de raccourcir les délais de construction et d'en diminuer le coût. Ils devraient également permettre de favoriser une meilleure coordination entre les concepteurs, les réalisateurs et les responsables de la gestion et de l'entretien.

La décision du Conseil constitutionnel n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 a, en son considérant n° 18, considérablement encadré le recours à de tels contrats de partenariat. Ainsi, même si « aucune règle ni principe de valeur constitutionnelle n'impose de confier à des personnes distinctes la conception, la réalisation, la transformation, l'exploitation et le financement d'équipements publics ou la gestion et le financement de services », « aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit non plus qu'en cas d'allotissement les offres portant simultanément sur plusieurs lots fassent l'objet d'un jugement commun en vue de déterminer l'offre la plus satisfaisante du point de vue de son équilibre global » et « le recours au crédit bail ou à l'option d'achat anticipé pour préfinancer un ouvrage public ne se heurte, dans son principe, à aucun impératif constitutionnel », le Conseil constitutionnel a indiqué que « la généralisation de telles dérogations au droit commun de la commande publique ou de la domanialité publique serait susceptible de priver de garanties légales les exigences constitutionnelles inhérentes à l'égalité devant la commande publique, à la protection des propriétés publiques et au bon usage des deniers publics ». Par conséquent, « les ordonnances prises sur le fondement de l'article 6 de la loi déférée devront réserver de semblables dérogations à des situations répondant à des motifs d'intérêt général tels que l'urgence qui s'attache, en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable, ou bien la nécessité de tenir compte des caractéristiques techniques, fonctionnelles ou économiques d'un équipement ou d'un service déterminé ».

Le titre premier de l'ordonnance précitée du 17 juin 2004 vise les contrats de partenariat de l'Etat et de ses établissements publics (article 1 à 13), le deuxième ceux des collectivités territoriales et de leurs établissements publics (articles 14 à 18 qui créent un nouveau chapitre IV dans le titre Ier du livre IV de la première partie du code général des collectivités territoriales -nouveaux articles L. 1414-1 à 1414-16)-, et le troisième (articles 19 à 29) regroupe diverses dispositions permettant, d'une part, la passation de tels contrats aux établissements publics de santé et aux structures de coopération sanitaire dotées de la personnalité morale publique ainsi qu'aux groupements d'intérêt public, et, d'autre part, de modifier ou insérer des dispositions dans plusieurs codes afin de tenir compte de la création de ces nouveaux contrats.

L'article premier de ladite ordonnance définit ces contrats de partenariat comme des « contrats administratifs par lesquels l'Etat ou les établissements publics de l'Etat confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au service public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, ainsi qu'à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et, le cas échéant, à d'autres prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée ». L'article 14 reprend cette même définition pour les contrats de partenariat passés par les collectivités territoriales et leurs établissements publics.

Le cocontractant de l'Etat ou son établissement public est le maître d'ouvrage des travaux à réaliser et peut en outre « se voir confier tout ou partie de la conception des ouvrages ». Dans les autres formes de contrats ou marchés, la personne publique restait jusqu'à présent maître d'ouvrage.

La passation du contrat

Avant toute procédure de passation, la personne publique doit procéder à une évaluation, réalisée avec le concours d'un organisme expert, pour justifier de la nécessité de recourir à un contrat de partenariat. Pour cela, elle doit, d'une part, montrer, soit que, « compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n'est pas objectivement en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet, soit que le projet présente un caractère d'urgence » et, d'autre part, « exposer avec précision les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif, qui l'ont conduite, après une analyse comparative, notamment en termes de coût global, de performance et de partage des risques, de différentes options, à retenir le projet envisagé et à décider de lancer une procédure de passation d'un contrat de partenariat » (articles 2 et 14).

Par conséquent, l'ordonnance tient compte de la réserve constitutionnelle précédemment rappelée, en conditionnant la possibilité pour l'Etat et les collectivités territoriales de recourir aux contrats de partenariat à la démonstration du caractère d'urgence ou de la complexité du projet envisagé.

Un décret devrait être pris pour fixer la liste des organismes experts pouvant être choisis par la personne publique pour réaliser cette évaluation avec elle.

Le respect des principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats et d'objectivité des procédures devra être assuré lors de la passation de ces contrats. La publicité devra en outre être assurée dans des conditions fixées par décret.

Lorsqu'un contrat de partenariat est envisagé par une collectivité territoriale ou un de ses établissements publics, l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou l'organe délibérant de l'établissement public se prononce sur le principe du recours à un tel contrat (article 14).

L'attribution des contrats de partenariat s'effectue soit par dialogue compétitif, soit par appel d'offres.

Lorsque la personne publique ne peut d'elle-même définir les moyens techniques ou établir le montage financier ou juridique nécessaires au projet, la personne publique a recours au dialogue compétitif.

Ce dialogue doit être engagé, dans le respect du principe d'égalité, avec chacun des candidats, dont le nombre ne peut être inférieur à trois. Il a pour objectif de déterminer quelles seraient les meilleures solutions pour la réalisation du projet.

Une fois la phase de dialogue achevée, la personne publique invite les candidats à remettre leurs offres finales qui « comprennent tous les éléments nécessaires à l'exécution du contrat ».

La procédure d'appel d'offres est uniquement utilisée à défaut de nécessité d'un dialogue compétitif et en cas d'urgence. Les candidats admis par la personne publique à y participer doivent être au moins cinq. Un décret devra déterminer les principes régissant cette procédure d'appel d'offres.

S'agissant des cocontractants pouvant être choisis par la personne publique, sont exclues les personnes qui, soit ont été condamnées définitivement pour avoir commis certains infractions, soit ont été mises en état de liquidation judiciaire, admises au redressement judiciaire ou ont fait l'objet de procédures équivalentes régies par un droit étranger, soit enfin n'ont pas souscrits à leurs déclarations en matière fiscale et sociale ou acquitté les impôts et cotisations exigibles au 31 décembre de l'année précédant celle au cours de laquelle a lieu le lancement de la consultation. Un autre décret devra établir la liste des impôts et cotisations pris en compte.

Quarante jours au moins doivent séparer la date d'envoi de l'avis d'appel à la concurrence et la date limite de réception des candidatures. Les critères d'attribution et les conditions d'exécution du contrat doivent être précisées par la personne publique.

Le choix du candidat s'effectue au regard de l'offre économiquement la plus avantageuse, en fonction de différents critères d'attribution faisant l'objet d'une pondération.

Le coût global de l'offre, les objectifs de performance définis en fonction de l'objet du contrat et la part d'exécution du contrat que le candidat s'engage à confier à des petites et moyennes entreprises et à des artisans doivent nécessairement figurer parmi les critères d'attribution retenus par la personne publique.

Le fait que la part d'exécution du contrat confiée aux petites et moyennes entreprises et aux artisans soit considéré comme étant un critère obligatoire d'attribution permet, conformément à l'exigence prévue par la loi d'habilitation du 2 juillet 2003, de leur assurer un accès aux contrats de partenariat.

L'article 8 de l'ordonnance précise qu'est considérée comme petite et moyenne entreprise une entreprise ayant un effectif ne dépassant pas 250 employés et un chiffre d'affaires inférieur ou égal à 40.000.000 d'euros en moyenne sur les trois dernières années. De plus, les entreprises dont le capital social est détenu à hauteur de plus de 33 % par une entreprise n'ayant pas le caractère d'une petite et moyenne entreprise n'entrent pas dans la catégorie des petites ou moyennes entreprises.

La valeur technique et le caractère innovant de l'offre, le délai de réalisation des ouvrages ou équipements, leur qualité esthétique ou fonctionnelle peuvent également constituer des critères d'attribution du contrat. La prise en compte de la qualité esthétique et du caractère innovant peut également permettre d'assurer une place particulière aux architectes dans le cadre de ces contrats globaux.

La personne publique peut renoncer à la passation du contrat. Dans ce cas, elle en informe les candidats.

Contenu et exécution du contrat

Concernant le mode de rémunération du cocontractant, la personne publique le paie pendant toute la durée du contrat et peut lier le montant aux objectifs de performance qu'elle lui a assignés.

Le contrat de partenariat doit nécessairement comporter certaines clauses relatives :

- à sa durée ;

- aux conditions dans lesquelles est établi le partage des risques entre la personne publique et son cocontractant ;

- aux objectifs de performance assignés au cocontractant. Il peut notamment s'agir de la qualité des prestations de services, de la qualité des ouvrages et équipements, des conditions dans lesquelles ils sont mis à la disposition de la personne publique et le cas échéant de leur niveau de fréquentation ;

- à la rémunération du cocontractant, aux conditions dans lesquelles sont pris en compte et distingués, pour son calcul, les coûts d'investissement, de fonctionnement et de financement et, le cas échéant, les recettes que le cocontractant peut être autorisé à se procurer en exploitant les ouvrages ou équipements pour répondre à d'autres besoins que ceux de la personne publique contractante, aux motifs et modalités de ses variations pendant la durée du contrat et aux modalités de paiement, notamment aux conditions dans lesquelles, chaque année, les sommes dues par la personne publique à son cocontractant et celles dont celui-ci est redevable au titre des pénalités ou de sanctions font l'objet d'une compensation ;

- aux obligations du cocontractant ayant pour objet de garantir le respect de l'affectation des ouvrages et équipements au service public dont la personne publique contractante est chargée et le respect des exigences du service public ;

- aux modalités de contrôle par la personne publique de l'exécution du contrat, notamment du respect des objectifs de performance ainsi que des conditions dans lesquelles le cocontractant fait appel à d'autres entreprises pour l'exécution du contrat, et notamment les conditions dans lesquelles il respecte son engagement d'attribuer une partie du contrat à des petites et moyennes entreprises et à des artisans ;

- aux sanctions et pénalités applicables en cas de manquement à ses obligations, notamment en cas de non-respect des objectifs de performance, de la part du cocontractant ;

- aux conditions dans lesquelles il peut être procédé, par avenant ou, faute d'accord, par une décision unilatérale de la personne publique, à la modification de certains aspects du contrat ou de sa résiliation, notamment pour tenir compte de l'évolution des besoins de la personne publique, d'innovations technologiques ou de modifications dans les conditions de financement obtenues par le cocontractant ;

- au contrôle exercé par la personne publique sur la cession partielle ou totale du contrat ;

- aux conditions dans lesquelles, en cas de défaillance du cocontractant, la continuité du service public est assurée, notamment lorsque la résiliation du contrat est prononcée ;

- aux conséquences de la fin, anticipée ou non, du contrat, notamment en ce qui concerne la propriété des ouvrages et équipements ;

- aux modalités de prévention et de règlement des litiges et aux conditions dans lesquelles il peut, le cas échéant, être fait recours à l'arbitrage, avec application de la loi française (articles 11 et 14).

Suivant également les conditions établies par le Parlement lors de l'habilitation, l'article 12 de l'ordonnance prévoit que, lorsque tout ou partie de la conception des ouvrages est confié au cocontractant, une équipe de maîtrise d'oeuvre chargée de la conception des ouvrages et du suivi de leur réalisation doit obligatoirement être identifiée, les offres concernant des bâtiments doivent comporter un projet architectural et la qualité globale des ouvrages nécessairement figurer parmi les critères d'attribution du contrat.

Pour les contrats de partenariat des collectivités territoriales ou leurs établissements publics, un rapport annuel établi par le cocontractant est présenté par l'exécutif de la collectivité territoriale ou de l'établissement public, à l'assemblée ou l'organe délibérant afin de permettre le suivi de l'exécution du contrat. Les contrats passés par l'Etat devraient également prévoir l'établissement d'un rapport annuel de suivi du contrat par le cocontractant.

Lorsque la collectivité territoriale dispose d'une commission consultative des services publics locaux en vertu de l'article L. 1413-1 du code général des collectivités territoriales, celle-ci est chargée d'examiner le rapport précédemment évoqué et doit être consulté pour avis sur tout projet de contrat de partenariat (article 15).

Les collectivités territoriales et leurs établissements publics ayant passé un contrat de partenariat pour un bien appartenant à leur patrimoine bénéficient du fonds de compensation pour la TVA sur la part de la rémunération versée à leur cocontractant correspondant à l'investissement réalisé par celui-ci pour les besoins d'une activité non soumise à la TVA (article 18 créant un article L. 1615-12 du code général des collectivités territoriales).

Votre commission vous propose, sous réserve de la correction de deux erreurs matérielles, de ratifier la présente ordonnance.

2. L'ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 portant modification de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée

L'ordonnance n° 2004-566 du 17 juin 2004 portant modification de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée (dite « loi MOP ») a été prise en application de l'article 6 de la loi précitée du 2 juillet 2003.

Cette ordonnance ayant été adoptée le 17 juin 2004 et publiée le 19 juin de la même année, le Gouvernement a respecté le délai d'habilitation d'un an prévu par l'article 35 de la loi du 2 juillet 2003. Conformément aux exigences de l'article 38 de la Constitution, elle a également fait l'objet d'un projet de loi de ratification233(*) déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 15 septembre 2004, dans le délai de ratification fixé à trois mois à compter de la publication de la loi du 2 juillet 2003.

La présente ordonnance, composée de cinq articles, modifie uniquement les dispositions relatives à la maîtrise d'ouvrage ( titre 1er de la « loi MOP »).

L'article 1er de l'ordonnance modifie l'article 2 de la « loi MOP ».

Il étend tout d'abord le champ des exceptions au principe selon lequel le programme et l'enveloppe financière prévisionnelle sont définis avant tout commencement des avants projets. Ainsi, l'élaboration du programme et la détermination de l'enveloppe financière prévisionnelle peuvent désormais être poursuivies pendant les études d'avants projets lorsque le maître d'ouvrage décide, soit de réutiliser ou de réhabiliter un ouvrage existant, soit, sous réserve qu'il l'ait annoncé dès le lancement des consultations, de réaliser des ouvrages neufs complexes d'infrastructure et de bâtiment. Le programme et l'enveloppe financière peuvent donc continuer d'évoluer au cours des études d'avant-projet, les contrats en cours étant modifiées en conséquence par la voie d'avenants.

L'article 1er de l'ordonnance complète également l'article 2 de la « loi MOP » par deux paragraphes tendant à prévoir que :

- lorsque la réalisation, la réutilisation ou la réhabilitation d'un ouvrage ou d'un ensemble d'ouvrages relève de plusieurs maîtres d'ouvrage, ces derniers peuvent désigner l'un d'entre eux pour assurer la responsabilité de la maîtrise d'ouvrage en signant une convention qui précise les conditions d'organisation de la maîtrise d'ouvrage et qui en fixe le terme. Cette disposition permet d'éviter la co-maîtrise d'ouvrage ;

- l'Etat peut confier la réalisation d'ouvrages ou de programmes d'investissement à l'un de ses établissements publics et décider que celui-ci exercera toutes les attributions de la maîtrise d'ouvrage. Cette disposition déroge au principe selon lequel le maître de l'ouvrage est le « responsable principal de l'ouvrage » et « remplit une fonction d'intérêt général dont il ne peut se démettre » (Premier alinéa de l'article 2 de la « loi MOP »). Cela permet à l'Etat de confier la maîtrise d'ouvrage à un établissement public sans utiliser la procédure de mandat qui était source de lourdeurs importantes et de coûts de gestion inutiles.

Les articles 2 à 4 visent à adapter la « loi MOP » aux exigences communautaires, dans la mesure où les institutions européennes considéraient que le principe d'une liste de catégories de personnes limitativement énumérées pour l'exercice du mandat de maîtrise d'ouvrage et la conduite d'opération étaient contraires au principe de libre prestation de services.

L'article 2 supprime par conséquent la liste limitative des catégories de personnes admises à exercer un mandat de maîtrise d'ouvrage à l'article 4 de la « loi MOP ». L'exercice de ce mandat est désormais autorisé à toute personne publique ou privée à condition qu'elle, ou une entreprise qui lui est liée, n'exerce aucune mission de maîtrise d'oeuvre, de réalisation de travaux ou de contrôle technique portant sur le ou les ouvrages concernés.

Toutefois, cette disposition n'est pas applicable lorsque le mandat peut uniquement être confié à une personne déterminée en vertu d'une loi. De plus, le mandataire est soumis à l'obligation d'exécution personnelle du contrat de mandat.

En conséquence des modifications apportées à l'article 4 de la « loi MOP », l'article 3 de l'ordonnance supprime la référence à la liste des personnes pouvant exercer un mandat de maîtrise d'ouvrage à l'article 5 de cette même loi. Il corrige également une erreur de rédaction en remplaçant le terme de « convention » par celui de « contrat ».

L'article 4 modifie l'article 6 de la « loi MOP » afin de supprimer, comme pour l'exercice du mandat de maîtrise d'ouvrage, la liste limitative des catégories de personnes pouvant intervenir comme conducteur d'opération auprès d'un maître d'ouvrage pour une assistance générale à caractère administratif, financier et technique. Il fixe également les mêmes règles d'incompatibilité que celles prévues pour le mandat.

Votre commission vous propose de ratifier la présente ordonnance sans modification.

3. L'ordonnance n° 2004-603 du 24 juin 2004 relative aux mesures de simplification dans le domaine des élections prud'homales

Votre commission vous propose de ratifier par voie d'amendement l'ordonnance n° 2004-603 du 24 juin 2004 relative aux mesures de simplification dans le domaine des élections prud'homales, afin de faciliter la mise en oeuvre de cette importante réforme.

En application de l'article 19 de la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, l'ordonnance n° 2004-603 du 24 juin 2004 modernise notablement le régime des élections prud'homales.

Le champ de l'habilitation du Gouvernement à intervenir dans le domaine de la loi couvrait deux domaines :

- la simplification des modalités d'organisation et de contrôle des élections, ainsi que de la procédure contentieuse et l'harmonisation du régime électoral applicable aux CCI, aux tribunaux de commerce, aux tribunaux paritaires des baux ruraux, aux conseils prud'homaux et à la mutualité sociale agricole (1° de l'article 19) ;

- l'allègement des formalités nécessaires à l'établissement des fichiers électoraux et la mise en oeuvre du vote électronique (2° de l'article 19) ;

Cette ordonnance a été publiée le 24 juin 2004. Le Gouvernement a donc respecté le délai de publication prévu par la loi d'habilitation à simplifier le droit, soit douze mois à compter de la date de publication de cette loi, le 3 juillet 2003.

Un projet de loi de ratification a été déposé le 20 septembre 2004 sur le bureau du Sénat234(*). Cette formalité a été accomplie dans le délai prévu par la loi d'habilitation -trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

La présente ordonnance, composée de douze articles, comporte trois volets relatifs à l'établissement des listes électorales (articles premier, 3 et 10), au dépôt des candidatures (articles 2, 4 à 7) et aux modalités de vote (article 9).

 Les mesures de simplification apportées aux règles de constitution des listes électorales

L'article premier de la présente ordonnance réécrit intégralement l'article L. 513-1 du code du travail pour simplifier les règles applicables au corps électoral des conseillers prud'homaux. Trois modifications sont prévues :

- s'agissant de la liste des électeurs, la notion de « salarié involontairement privé d'emploi » complexe et de nature à susciter des divergences d'interprétation est remplacée par une mention plus précise relative aux « personnes à la recherche d'un emploi inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi ». L'ordonnance ajoute une précision pour exclure expressément de la participation aux élections prud'homales les personnes « à la recherche d'un premier emploi ». Selon les informations obtenues par votre rapporteur, cette disposition tend à garantir « l'accès au scrutin aux seules personnes ayant déjà travaillé » (I de l'article L. 513-1) ;

- les dérogations au principe d'inscription sur la liste électorale de la commune dans laquelle l'électeur exerce son activité principale qui figuraient à l'article L. 513-3 sont reproduites avec quelques adaptations (V de l'article L. 513-1). Ainsi, le principe de l'inscription des électeurs exerçant des activités professionnelles multiples sur la liste de leur domicile est supprimé, l'ordonnance renvoyant désormais à un décret en Conseil d'Etat. Une précision relative à la possibilité pour les voyageurs, représentants et placiers de demander leur inscription sur la liste électorale du lieu de leur domicile est également ajoutée ;

- l'interdiction d'être inscrit dans plus d'une section énoncée dans l'ancien article L. 513-1 du code du travail est renforcée, l'ordonnance mentionnant également l'interdiction d'être inscrit sur plus d'une liste électorale prud'homale communale et dans plus d'un collège (VI de l'article L. 513-1). D'après les informations fournies à votre rapporteur, cette situation peut se produire lorsqu'un électeur a à la fois la qualité de salarié d'un établissement déclaré en tant que tel par son employeur, et la qualité d'employeur, par exemple comme employeur de gens de maison.

L'article 3 de la présente ordonnance allège les modalités de constitution des listes électorales fixées à l'article L. 513-3 du code électoral.

La procédure de déclaration des salariés par les employeurs est simplifiée. Celle-ci ne fait plus l'objet d'une procédure particulière s'ajoutant aux déclarations aux organismes sociaux, mais est intégrée dans la déclaration annuelle des données sociales établie par les organismes de sécurité sociale ou dans la déclaration trimestrielle des caisses de mutualité sociale agricole. L'obligation est faite à l'employeur de préciser le collège, la section et la commune d'inscription du salarié. L'ordonnance mentionne toutefois la possibilité de faire une déclaration séparée dont les modalités sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat afin de permettre l'inscription des employeurs et de certains salariés dans des cas très particuliers.

L'ordonnance précise certains points dans le souci de faciliter les formalités que doivent accomplir les électeurs pour être inscrits sur les listes électorales. Ainsi, lorsque l'entreprise possède plusieurs établissements, les salariés sont déclarés par l'employeur par « unité géographiquement individualisée ».

En outre, les règles d'inscription des personnes à la recherche d'un emploi sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat.

Reproduisant le droit en vigueur sous réserve de quelques modifications ponctuelles, l'ordonnance précise que jusqu'au jour du scrutin, les contestations relatives à l'inscription, à la modification du collège, de la section ou de la commune d'inscription sont portées devant le tribunal d'instance (paragraphe IV de l'article L. 513-3). Toutefois, le champ de la saisine de cette juridiction est réduit, l'article 10 de la présente ordonnance abrogeant l'article L. 513-10 du code du travail qui prévoit la compétence du tribunal d'instance s'agissant de toutes les contestations relative à l'électorat.

 Les mesures de simplification relatives au dépôt des candidatures

L'article 2 de la présente ordonnance réécrit l'article L. 513-2 du code du travail pour clarifier les règles d'éligibilité des candidats aux élections prud'homales. Sont éligibles aux fonctions de conseiller prud'homal :

- les personnes inscrites sur les listes électorales prud'homales ;

- les personnes remplissant les conditions pour y être inscrites ;

- les personnes ayant été inscrites au moins une fois sur les listes électorales, à condition qu'elles aient cessé d'exercer l'activité au titre de laquelle elles ont été inscrites depuis moins de dix ans. L'ordonnance assouplit ce dispositif en supprimant la durée d'inscription minimale sur les listes fixée à trois ans, cette référence étant devenue trop contraignante. En outre, la référence à la date de cessation de l'activité au titre de laquelle l'électeur a été inscrit et non plus à la date d'exercice de l'activité étend à des personnes toujours en activité le bénéfice de cette disposition, jusqu'à présent applicable aux seuls retraités.

Les règles relatives au ressort géographique des candidats constituent la reprise du droit en vigueur avec un ajout relatif à la possibilité pour les personnes ayant cessé l'activité au titre de laquelle elles sont inscrites d'être rattachées à la section du conseil où elles ont été inscrites ou à la section de même nature du conseil limitrophe235(*).

Par ailleurs, l'ordonnance complète le champ des interdictions applicables aux candidats. Outre l'impossibilité d'être membre de plus d'un conseil de prud'hommes et d'être candidat dans plus d'un conseil de prud'hommes ou dans une section appartenant à une catégorie différente de la section d'inscription, une référence à l'interdiction de figurer sur « plus d'une liste électorale prud'homale, dans plus d'une section et dans plus d'un collège » est ajoutée.

Enfin, l'ordonnance consacre le principe selon lequel les conditions d'éligibilité s'apprécient à la « date du scrutin ». Ainsi, une base légale et incontestable est donnée à la jurisprudence de la Cour de cassation (arrêt du 22 mai 2003).

L'article 4 de l'ordonnance complète l'article L. 513-3-1 du code du travail relatif aux modalités de dépôt des listes électorales en ajoutant deux paragraphes.

Aux termes du paragraphe III de l'article L. 513-3-1, le préfet dispose désormais de la faculté de refuser d'enregistrer les déclarations de candidatures présentant des irrégularités. L'ordonnance renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de définir les conditions d'irrecevabilité. Selon les informations fournies par votre rapporteur, le non-respect des délais de dépôt, la remise de documents incomplets ou périmés pourraient constituer des motifs de refus. L'ordonnance prévoit également la possibilité de refuser l'enregistrement d'une liste lorsque le nombre des candidats inscrits ne correspond pas aux seuils définis à l'article L. 513-6.

Aux termes du paragraphe IV de l'article L. 513-3-1, une mention nouvelle est ajoutée pour interdire la présentation simultanée de listes de candidats dans les deux collèges -salarié et employeur- d'un même conseil de prud'hommes ou de conseils de prud'hommes différents. Cette précision se justifie par le souci de garantir le respect du principe de parité lors des élections.

L'article 5 de la présente ordonnance complète le dernier alinéa de l'article L. 513-6 du code du travail relatif au nombre minimal de candidats inscrits sur une liste (au moins égal au nombre sièges à pourvoir) par deux précisions.

D'une part dans un souci de clarification, il donne valeur législative aux dispositions réglementaires relatives au nombre maximal de candidats figurant sur les listes -le double du nombre de postes à pourvoir236(*).

D'autre part, l'ordonnance clarifie les conséquences d'une contestation relative à l'éligibilité d'un candidat avant le déroulement du scrutin. Ainsi, l'inéligibilité d'un ou plusieurs candidats sur une liste constatée par le juge qui entraîne la réduction du nombre de candidats à un nombre inférieur au seuil minimal a pour effet de rendre cette liste irrégulière. Selon les informations fournies au rapporteur, cette disposition est destinée à éviter les difficultés rencontrées lors du dernier scrutin de 2002 et à garantir un traitement identique à l'ensemble des listes.

L'article 6 de la présente ordonnance reproduit à l'article L. 513-11 du code du travail la possibilité prévue par l'article R. 513-108 pour tout éligible -et non plus seulement pour tout électeur- de contester la régularité et la recevabilité des listes de candidats et la régularité des opérations électorales.

L'article 7 de la présente ordonnance modifie le deuxième alinéa de l'article L. 514-2 du code du travail pour renforcer le régime de protection des candidats aux élections prud'homales exposés à un licenciement. Il porte de trois à six mois la durée de la période de protection à compter de la publication de la liste par le préfet. Ainsi, le régime des candidats est aligné sur celui des conseillers prud'homaux pour lesquels une protection de six mois est accordée après cessation de leurs fonctions.

 Les mesures de simplification relatives au vote

L'article 8 de l'ordonnance reporte au plus tard au 31 décembre 2008 la date des prochaines élections prud'homales237(*). Les dernières élections prud'homales ayant eu lieu en décembre 2002, elles auraient donc dû se dérouler en décembre 2007. Toutefois, il est apparu préférable de repousser à 2008 le prochain renouvellement afin d'éviter l'organisation de cette élection en 2007, année déjà chargée en élections politiques.

L'article 9 de la présente ordonnance prévoit d'expérimenter le vote électronique lors des prochaines élections prud'homales (en 2008). Les conditions et les modalités de cette nouvelle procédure sont renvoyées à un décret en Conseil d'Etat. Selon les informations fournies à votre rapporteur, cette expérimentation recouvre tous les modes de vote électronique (vote à l'urne électronique, vote par internet) et les moyens utilisés devront assurer le secret du vote et la sincérité du scrutin.

L'article 11 de l'ordonnance rend la présente réforme applicable aux prochaines élections prud'homales générales.

Votre commission vous propose de ratifier la présente ordonnance sans modification.

4. L'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 portant réforme du régime des valeurs mobilières émises par les sociétés commerciales et extension à l'outre-mer de dispositions ayant modifié la législation commerciale

Cette ordonnance composée de soixante-sept articles, présente la particularité d'avoir été prise par le Gouvernement sur le fondement tant du 4° de l'article 26 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, que du d) du 4° de l'article 62 de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer. La première de ces dispositions autorisait le Gouvernement à intervenir dans le domaine de la loi afin de « simplifier et unifier le régime applicable aux valeurs mobilières des sociétés commerciales », la seconde habilitant le Gouvernement « à prendre, par ordonnance, les mesures nécessaires, en tant qu'elles concernent les compétences de l'Etat, à l'actualisation et à l'adaptation » du « droit économique, commercial, monétaire et financier » pour la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, les îles Wallis et Futuna, les Terres australes et antarctiques françaises et Mayotte.

Cette ordonnance est entrée en vigueur le 27 juin 2004. Conformément aux exigences constitutionnelles, elle a donné lieu au dépôt, à l'Assemblée nationale, d'un projet de loi de ratification le 15 septembre 2004, avant l'expiration du délai de trois mois imparti à peine de caducité de l'ordonnance.

a. La simplification et l'unification du régime des valeurs mobilières des sociétés commerciales

Votre commission avait souligné, lors de l'examen de la loi du 2 juillet 2003, que l'habilitation devait permettre, avant tout, de « stabiliser la réglementation juridique des valeurs mobilières, souvent malmenée par l'inventivité des opérateurs économiques et financiers. Cette stabilisation ne devrait pas être un frein à la créativité, nécessaire pour s'adapter à un environnement économique par nature fluctuant. Toutefois, il serait opportun de prévoir un cadre juridique unique et général pour l'ensemble de ces valeurs. En outre, il serait utile d'assurer, pour l'ensemble des valeurs mobilières existantes ou à venir, la protection des porteurs » 238(*). Elle constate que les mesures prises par le Gouvernement vont bien en ce sens.

La simplification et l'unification du régime des valeurs mobilières auxquelles procède la présente ordonnance conduisent à libéraliser les conditions de l'émission de ces valeurs, en allégeant les procédures et en accroissant la flexibilité du statut de ces différentes valeurs. A cette fin, plusieurs dispositions du code de commerce sont modifiées ainsi que, de façon plus limitée, certaines dispositions du code monétaire et financier et du code du travail.

? La modification du régime de l'augmentation de capital (articles 2 à 23)

L'ordonnance simplifie d'abord les mécanismes complexes jusqu'alors en vigueur, qui variaient en fonction du type de titre émis, en unifiant les règles applicables aux augmentations de capital. La possibilité d'augmenter le capital social des sociétés anonymes par le biais d'actions ordinaires ou d'« actions de préférence » est consacrée, ces deux catégories étant désormais incluses dans la notion plus large de « titres de capital ».

 Le régime de la délégation susceptible d'être consentie par l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires aux organes de direction -conseil d'administration ou directoire- pour décider une augmentation de capital est modifié par les articles 4 et 5 afin d'accroître les possibilités de délégation.

L'assemblée générale extraordinaire reste, comme en l'état du droit antérieur, seule compétente pour décider, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, une augmentation de capital immédiate ou à terme. L'augmentation de capital doit, en principe, être réalisée dans le délai de cinq ans à compter de cette décision ou de cette délégation, sauf s'il s'agit d'une augmentation devant être réalisée par l'exercice d'un droit attaché à une valeur mobilière donnant accès au capital ou par une levée d'options.

L'assemblée générale extraordinaire peut toutefois déléguer cette compétence au conseil d'administration ou au directoire, ou lorsqu'elle décide elle-même l'augmentation de capital, déléguer à ces organes le pouvoir de fixer les modalités de l'émission des titres. Toute délégation est cependant suspendue en période d'offre publique d'achat ou d'échange sur les titres de la société, à moins que celle-ci s'inscrive dans le cours normal de l'activité de la société et que sa mise en oeuvre ne soit pas susceptible de faire échouer l'offre.

Si elle délègue sa compétence pour décider de l'augmentation de capital, l'assemblée doit fixer la durée -qui ne peut excéder vingt-six mois- durant laquelle cette délégation peut être utilisée, ainsi que le plafond global de cette augmentation, toute délégation antérieure ayant le même objet devenant alors caduque. Cette délégation se fait en principe par une résolution unique.

Malgré l'unification opérée par l'ordonnance, des dispositions particulières continuent à s'appliquer à l'émission de certaines valeurs. Ainsi, doivent faire l'objet de résolutions particulières les émissions avec droit préférentiel de souscription, les émissions par appel public à l'épargne, les émissions d'actions de préférence ainsi que les émissions réservées à une ou plusieurs personnes nommément désignées ou à des catégories de personnes répondant à des caractéristiques déterminées. Pour ce dernier type d'émission, l'émission doit être réalisée dans un délai de dix-huit mois à compter de la décision d'émission ou de délégation de compétence, ce qui devrait permettre d'éviter toute vacance dans la délégation de l'assemblée qui peut, l'année suivante, ne pas se réunir exactement à la même date.

L'assemblée générale extraordinaire peut également déléguer au conseil d'administration ou au directoire le pouvoir d'émettre des titres dans la limite de 10 % du capital social pour rémunérer l'apport des titres de la société non cotée, dont la valeur est évaluée par un rapport du commissaire aux apports (article 19).

 L'ordonnance ouvre, en outre, dans les sociétés anonymes dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, la possibilité d'une subdélégation de compétence en matière d'émission (article 5).

Ainsi, le conseil d'administration peut, dans les limites qu'il aura préalablement fixées, déléguer au directeur général ou, en accord avec ce dernier, à un ou plusieurs directeurs généraux délégués le pouvoir de décider la réalisation de l'émission, ainsi que celui d'y surseoir. Cette prérogative est également reconnue au directoire, au profit de son président ou, en accord avec celui-ci, de l'un de ses membres. Les personnes désignées sont alors tenues de rendre compte au conseil d'administration ou au directoire de l'utilisation faite de ce pouvoir dans les conditions prévues par ces derniers. Une subdélégation des pouvoirs nécessaires au rachat d'actions peut également être donnée.

 Dans le cadre de l'émission de valeurs mobilières par appel public à l'épargne sans droit préférentiel de souscription, la règle des « dix parmi les vingt », imposant à l'émetteur de fixer un prix d'émission au moins égal à la moyenne des cours constatés pour ses actions pendant dix jours de bourse consécutifs choisis parmi les vingt derniers jours de bourse précédant le début de l'émission, est remplacée par une règle devant être fixée par décret, après avis de l'Autorité des marchés financiers (AMF) (article 12). Selon les informations communiquées à votre rapporteur, le décret, qui devrait être prochainement soumis au Conseil d'Etat, devrait prévoir la fixation du prix de l'émission en fonction des cours constatés dans les trois derniers jours de bourse. Cette nouvelle disposition devrait être de nature à introduire davantage de souplesse dans un système qui avait été critiqué dans l'hypothèse d'une volatilité importante des marchés, tout en limitant les risques de manipulation de cours.

Le même article prévoit que, dans la limite de 10 % du capital social par an, l'assemblée générale extraordinaire peut, en outre, autoriser le conseil d'administration ou le directoire à fixer le prix d'émission selon des modalités qu'elle détermine au vu d'un rapport du conseil d'administration ou du directoire, et d'un rapport spécial du commissaire aux comptes. Cette réforme autorise ainsi l'augmentation de capital « en continu » permettant ainsi aux sociétés d'émettre une partie de leurs titres dans les meilleures conditions.

Enfin, la pratique d'un délai de priorité est consacrée par l'ordonnance, tandis que le délai d'exercice du droit préférentiel de souscription est ramené de dix à cinq jours (articles 10 et 17).

 L'ordonnance apporte également des simplifications au régime des émissions réservées de valeurs mobilières. Les dispositions du code de commerce définissent désormais les personnes ou catégories de personnes pouvant être bénéficiaires d'augmentations de capital réservées. A l'instar des dispositions issues de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 sur la sécurité financière, l'assemblée générale peut désormais déléguer au conseil d'administration ou au directoire, selon le cas, le soin de fixer la liste précise des bénéficiaires au sein des catégories concernées ainsi que le nombre de titres à attribuer à chacun d'eux.

 D'autres dispositions tendent à coordonner les règles d'augmentation de capital avec les spécificités des titres particuliers.

Ainsi, l'extension à tous les titres de capital des règles relatives au démembrement de propriété, actuellement prévues pour les actions ordinaires, est opérée par l'ordonnance. L'exigence d'un bulletin de souscription est posée pour les titres de capital et les titres donnant accès au capital. Les formalités de constatation de l'augmentation de capital résultant de l'exercice d'un droit attaché aux valeurs mobilières donnant accès au capital sont précisées et simplifiées. Le régime de suspension de l'obtention d'attribution de titres de capital par exercice du droit attaché aux valeurs mobilières composées est unifié et assoupli, le versement du dividende au titre de l'exercice concerné devenant facultatif. Les règles relatives à la suppression des droits attachés aux titres donnant accès au capital lorsque ceux-ci ont été utilisés ou acquis par la société émettrice ou par la société appelée à émettre de nouveaux titres sont unifiées.

 Le régime des nullités est enfin aménagé et clarifié. Leur régularisation est désormais expressément rendue possible. Le délai de prescription applicable est ramené à trois mois à compter de l'assemblée générale suivant la décision d'augmentation de capital. Enfin, des nullités facultatives et de nouvelles injonctions de faire sont introduites en matière d'augmentation de capital, se substituant aux sanctions pénales préexistantes (articles 22, 48, 50 et 51).

? La réforme des catégories de valeurs mobilières (articles 24 à 54)

L'ordonnance n° 2004-604 du 24 juin 2004 opère des changements importants dans la nature et le statut des valeurs mobilières que peuvent créer les sociétés commerciales.

 En premier lieu, elle fait désormais figurer dans le code de commerce une définition des valeurs mobilières identique à celle prévue par le code monétaire et financier, évitant ainsi toute ambiguïté239(*). En outre, des dispositions relatives à la forme que peuvent revêtir les valeurs mobilières, jusqu'alors fixées par des textes de forme réglementaire antérieurs à la Constitution du 4 octobre 1958 et pris dans le domaine de la loi, sont codifiées dans la partie législative du code de commerce240(*), permettant ainsi de renforcer l'intelligibilité de la législation en cette matière (article 24).

L'ordonnance modernise et simplifie également les règles de transfert de propriété en cas de cession de valeurs mobilières. En effet, elle harmonise le régime applicable antérieurement qu distinguait selon que les opérations étaient ou non réalisées sur le marché boursier. Désormais, pour toutes les cessions, le transfert de propriété est réalisé par la seule inscription au compte du cessionnaire. Le décret d'application de l'ordonnance en fixera les conditions. L'obligation du caractère nominal des titres non cotés dans les sociétés par actions est également supprimée.

Aux termes de l'article 52, les sociétés non cotées ont désormais la faculté d'émettre des titres au porteur, la décision de l'émetteur devant être prévue dans les statuts pour les titres de capital, ou dans le contrat d'émission pour les titres de créances. Dans ce cadre, la faculté, actuellement réservée aux sociétés cotées, d'obtenir des renseignements relatifs à ces porteurs et au nombre de titres qu'ils détiennent est étendue aux sociétés non cotées, afin d'identifier les détenteurs de titres. Cette mesure permet donc aux émetteurs de choisir la forme de titre la plus adaptée à leurs besoins et pourrait favoriser la venue de nouveaux émetteurs, notamment internationaux, sur le marché non réglementé des valeurs mobilières.

L'ordonnance favorise également la sécurisation de l'émission de titres au porteur et leur inscription corrélative chez un intermédiaire habilité, ces opérations devant désormais faire l'objet d'un enregistrement auprès d'un dépositaire central, soumis aux obligations légales concernant la lutte contre le blanchiment des capitaux. Le régime du contrat d'émission est par ailleurs modifié afin de préciser que ce contrat est formé par l'acceptation, grâce à la matérialisation de la souscription, des conditions d'émission mentionnées dans le prospectus agréé par l'Autorité des marchés financiers pour les sociétés cotées (article 52).

Elle facilite également l'exercice des prérogatives non pécuniaires attachées aux valeurs mobilières et à leur circulation, en autorisant l'exercice par l'un ou l'autre des titulaires d'un compte-joint des droits non pécuniaires des valeurs mobilières qui y sont inscrites et en étendant la possibilité de vente des titres dont les porteurs sont restés inactifs et inconnus pendant plus de dix ans, selon des dispositifs assez similaires à ceux déjà prévus par le code de commerce241(*) (article 27).

 Le régime de certaines catégories de titres de capital est modifié. Il en va ainsi en particulier des actions, désormais divisées en actions ordinaires et en actions de préférence, ces dernières constituant l'innovation majeure de l'ordonnance (article 31).

Les actions

Les actions de préférence visent à remplacer les actions de priorité, les actions à dividendes prioritaires sans droit de vote, ainsi que les certificats d'investissement et de droit de vote. Cette nouvelle catégorie de titres bénéficie d'une grande souplesse puisque ces actions peuvent être créées par les statuts « avec ou sans droit de vote, assorties de droits particuliers de toute nature, à tire temporaire ou permanent ».

Deux limitations sont cependant apportées à cette liberté statutaire. D'une part, les actions sans droit de vote ne peuvent représenter plus de la moitié du capital social ou, lorsqu'elles émanent d'une société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, plus du quart du capital. D'autre part, les bénéficiaires des actions de préférence dans le cadre d'une émission réservée ou de conversions d'actions ordinaires ne peuvent prendre part à la décision de création.

En principe, seule l'assemblée générale extraordinaire est compétente pour modifier à cette fin les statuts, ainsi que pour décider de l'émission, du rachat et de la conversion de ces actions, mais elle peut déléguer ce pouvoir au conseil d'administration ou au directoire. Elle doit être consultée pour organiser l'incidence des modifications et d'amortissement du capital, et décide de l'éventuelle distribution des dividendes sous forme d'actions.

En revanche, le conseil d'administration ou le directoire détient la compétence pour procéder à l'augmentation ou à la réduction de capital résultant de la conversion des actions de préférence en actions ordinaires, et pour décider des conditions de rachat des actions de préférence cotées lorsque le marché sur lequel elles sont négociées n'est pas liquide.

Les procédures ainsi mises en place permettent également de garantir la protection des autres actionnaires, tout en préservant les droits particuliers des porteurs des titres de préférence ainsi que ceux des créanciers antérieurs.

Ainsi, la procédure des avantages particuliers est rendue applicable lorsque les actions de préférence sont émises au profit de personnes physiques identifiées. Le Garde des Sceaux est venu préciser, lors d'une réponse à une question écrite, que cette procédure visait tant les actionnaires existants que les personnes devenant actionnaires, à la condition que ces différents actionnaires soient nommément désignés par l'émission.242(*)

Les porteurs d'actions de préférence se voient reconnaître la possibilité de désigner un commissaire aux comptes pour vérifier le respect de leurs droits particuliers. En cas de fusion ou de scission, ils doivent être consultés si un échange de titres équivalents n'est pas possible. En outre, les créanciers antérieurs à la réduction de capital pouvant résulter de cette conversion peuvent faire opposition à l'opération.

En conséquence de cette création, les articles 35 à 38 prévoient que les actions de priorité, les actions à dividende prioritaire sans droit de vote et les certificats d'investissement et de droit de vote devraient disparaître à terme, les titres participatifs étant, quant à eux, préservés.

Toutefois, des mesures transitoires assurent leur maintien dans un souci de protection des porteurs. Les émissions décidées antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance sont ainsi maintenues afin de protéger les émissions en cours et les porteurs de valeurs mobilières donnant droit à l'attribution de ces titres. Le droit préférentiel de souscription des porteurs de ces titres est garanti par un droit préférentiel à la souscription d'actions de préférence ayant les mêmes caractéristiques que les titres détenus. Les décisions de conversion des actions de priorité ou des actions à dividende prioritaire sans droit de vote s'imposent à leurs porteurs.

Pour l'ensemble des actions, si les statuts le prévoit, des clauses d'agrément, même entre actionnaires, pour la cession de titres nominatifs de capital ou donnant accès au capital ainsi que la faculté pour le cédant de renoncer à tout moment à la cession sont désormais prévus par l'ordonnance, qui s'inspire sur ce point des dispositions applicables à la société à responsabilité limitée, issues de l'ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004 portant simplification des formalités des entreprises (articles 33 et 34). La négociation de promesse d'actions lorsque leur admission sur un marché réglementé a été demandée devient également possible (article 29).

Dans un souci de transparence, il est enfin prévu que l'endettement de la société doit être mentionné dans le rapport annuel présenté lors de l'assemblée générale ordinaire afin d'assurer une meilleure information des actionnaires.

Les obligations

Les modifications apportées au régime des obligations par les articles 39, 41, 42 et 43 sont moins profondes. Ainsi, afin de simplifier le régime existant, l'émission d'obligations ordinaires peut désormais être décidée par le conseil d'administration ou le directoire, ce dernier pouvant librement opter entre l'emprunt bancaire et l'emprunt obligataire, avec faculté pour chacun de ces organes de déléguer cette compétence. Toutefois, les statuts ou l'assemblée générale peuvent décider que cette compétence sera exercée par l'assemblée.

Les conditions de fonctionnement des assemblées générales d'obligataires sont aménagées. Ainsi, la nécessité de tenir une feuille de présence et d'établir un procès-verbal pour la tenue des assemblées est désormais expressément prévue. La possibilité d'utiliser le vote par correspondance, ainsi que la technique de la visioconférence, déjà prévue pour la tenue des assemblées générales d'actionnaires, est consacrée. Les décisions relatives à la défense des obligataires, à l'exécution du contrat d'emprunt et à la modification du contrat d'émission, lorsqu'il a déjà été conclu, ne peuvent désormais être prises qu'à la majorité des deux tiers des obligataires présents ou représentés.

Les valeurs mobilières donnant accès au capital ou donnant droit à l'attribution de titres de créances

Les articles 44 à 49 de l'ordonnance procède opportunément à une refonte du cadre législatif applicable aux valeurs mobilières donnant accès au capital ou donnant droit à l'attribution de titres de créances, en supprimant, au profit d'une catégorie unique, les catégories particulières de titres donnant accès au capital.

Comme l'avait indiqué votre commission lors de l'examen de la loi d'habilitation, ces valeurs recouvrent « les obligations avec bons de souscription d'actions, les obligations convertibles en actions et les obligations échangeables contre les actions. Cependant, des modalités différentes s'appliquent pour l'émission de chacun de ces titres tandis que les droits de leurs titulaires sont variables d'un produit à l'autre »243(*). Il était donc nécessaire de mettre fin à cette situation préjudiciable aux acteurs économiques afin de leur permettre de créer librement de nouveaux titres bénéficiant de la sécurité juridique requise.

Une catégorie unique est ainsi créée. Le régime qui lui est applicable est fixé, pour l'essentiel, par renvoi aux dispositions prévues pour les valeurs mobilières existantes, l'ordonnance procédant cependant à une harmonisation du régime des valeurs mobilières donnant accès au capital avec celui des actions ordinaires. Des règles spéciales à l'égard des valeurs mobilières composées, telles que l'exigence d'un rapport spécial du commissaire aux comptes, restent prévues.

L'ordonnance assouplit les modalités d'émission de ces valeurs mobilières et renforce la liberté contractuelle grâce à la suppression d'un certain nombre de contraintes légales, à commencer par les conditions légales de délai afin que les émetteurs puissent les prévoir eux-mêmes dans les contrats d'émission et les adapter à leurs besoins spécifiques. De même, les émetteurs peuvent déroger à certaines dispositions légales dans le contrat d'émission.

Innovation importante, l'ordonnance étend également la faculté d'émettre des valeurs mobilières donnant accès au capital au sein d'un groupe de sociétés, en conférant la faculté à une société mère d'émettre des valeurs mobilières donnant accès à des titres de capital de sa filiale.

Enfin, la nouvelle rédaction du code de commerce permet aux actionnaires de conserver le bénéfice d'un droit préférentiel de souscription, lors de l'émission de valeurs mobilières donnant accès au capital.

? L'application à l'outre-mer des dispositions de la présente ordonnance relatives aux valeurs mobilières (articles 59 à 62)

Par application du principe de spécialité législative, des dispositions expresses rendant les dispositions de la présente ordonnance applicables dans les collectivités d'outre-mer étaient nécessaires.

Les dispositions de l'ordonnance sont applicables à Saint-Pierre-et-Miquelon, une disposition de coordination étant cependant prévue.

A Mayotte, l'ensemble des dispositions de l'ordonnance modifiant le code de commerce sont applicables de plein droit, conformément à la règle posée par le II de l'article 3 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte. En revanche, il convenait de préciser expressément si les autres dispositions de l'ordonnance y étaient également applicables. L'ordonnance précise en conséquence que les dispositions modifiant le code monétaire et financier s'appliquent à Mayotte. Les dispositions générales transitoires de l'ordonnance, prévues par les articles 63 et 64 y sont applicables. Des dispositions de coordination sont également prévues.

En Nouvelle-Calédonie, l'ensemble des dispositions de la présente ordonnance modifiant le code de commerce est applicable, de même que certaines de celles modifiant le code monétaire et financier. Les dispositions générales transitoires de l'ordonnance, prévues par les articles 63 et 64, y sont également applicables.

b. L'actualisation et l'adaptation du droit économique, commercial, monétaire et financier en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, aux îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarctiques françaises et à Mayotte

Les articles 56 à 58 de la présente ordonnance permettent, conformément au d) du 4° de l'article 62 de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer, l'actualisation et l'adaptation du droit économique, commercial, monétaire et financier dans certaines collectivités d'outre-mer de la République, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.

 Les dispositions d'actualisation

- En ce qui concerne Saint-Pierre-et-Miquelon, l'ordonnance procède à la suppression d'une disposition d'adaptation relative à une disposition du code de commerce déjà abrogée par la loi n° 2001-159 du 19 février 2001 sur l'épargne salariale (article 55).

- Pour Mayotte, l'ordonnance rend applicables, pour l'essentiel, les modifications apportées au code de commerce par les dispositions de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques et de la loi précitée du 19 février 2001 sur l'épargne salariale, qui n'avaient pas été rendues applicables à cette collectivité, faute d'une disposition expresse en ce sens dans ladite loi. En effet, la collectivité de Mayotte est en principe soumise à la règle de la spécialité législative, sauf dans des matières limitativement énumérées par l'article 3 de la loi n° 2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte dans lesquelles les lois, ordonnances et décrets postérieurs à cette loi sont applicables de plein droit (article 56).

Cette actualisation était indispensable : les articles du code de commerce qui avaient été modifiés par ces textes n'étaient toujours pas applicables à Mayotte, alors que les modifications apportées à ces mêmes articles par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, la loi n° 2002-1303 du 29 octobre 2002 modifiant certaines dispositions du code de commerce relatives aux mandats sociaux, la loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce, la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière et de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme du régime des retraites, y avaient été rendus applicables, soit de plein droit, soit par une disposition expresse. La détermination de l'état du droit applicable était donc particulièrement délicate et les solutions dégagées parfois juridiquement incohérentes.

De même, l'ordonnance rend applicable les dispositions de la loi n° 84-148 du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises concernant l'information financière et le contrôle des comptes dans certaines entreprises publiques, ainsi que celles de la loi n° 85-11 du 3 janvier 1985 relative aux comptes consolidés de certaines sociétés commerciales et entreprises publiques, dans leur rédaction résultant de la loi précitée du 1er août 2003 de sécurité financière.

Ainsi, le droit économique, commercial, monétaire et financier applicable à Mayotte est désormais clarifié.

- En Nouvelle-Calédonie, les modifications apportées à certaines dispositions du code civil concernant le contrat de société et la clause compromissoire, apportées par la loi précitée du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, ainsi que celles relatives à la division du capital social, apportées par la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.

De même, sont rendues applicables à la Nouvelle-Calédonie les modifications apportées au code de commerce par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, la loi précitée du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, la loi précitée du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, la loi précitée du 29 octobre 2002 modifiant certaines dispositions du code de commerce relatives aux mandats sociaux, la loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce, la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique, loi n° 2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière ainsi que de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme du régime des retraites (article 57).

- A Wallis et Futuna, sont également rendues applicables les modifications apportées à certaines dispositions du code civil concernant le contrat de société et la clause compromissoire, apportées par la loi précitée du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, ainsi que celles relatives à la division du capital social, apportées par la loi précitée du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier (article 58).

 Les dispositions d'adaptation (article 65 et 66)

Des dispositions d'adaptation spécifiques sont prévues pour certaines collectivités d'outre-mer de la République.

- A Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et à Wallis et Futuna, des dispositions prévoient des délais particuliers afin de permettre aux sociétés anonymes, à leurs organes et actionnaires, de se mettre en conformité avec les dispositions de la loi précitée du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques concernant notamment la dissociation des fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général, le cumul des mandats sociaux, et les informations relatives à la rémunération des dirigeants.

- En Nouvelle-Calédonie et à Wallis et Futuna, certaines dispositions relatives aux comptes des sociétés ou du groupe de sociétés auxquelles elles appartiennent, ainsi qu'aux commissaires aux comptes sont également rendues applicables.

- En ce qui concerne la Polynésie française, l'ordonnance prévoit que les dispositions applicables à cette collectivité sont uniquement celles en vigueur à la date de la publication de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 1994 portant statut d'autonomie de la Polynésie française. En effet, depuis cette loi, le droit commercial ressortit à la seule compétence de la Polynésie française. L'ordonnance précise également que ces lois ne peuvent être modifiées que dans les conditions prévues par cette loi organique.

La présente ordonnance respecte les termes de l'habilitation donnée au Gouvernement. Toutefois, votre commission estime que certaines modifications ponctuelles doivent lui être apportées en vue de sa ratification, sans que soient remis en cause les grands équilibres auxquels ce texte est parvenu.

Il convient en effet de corriger certaines erreurs matérielles ou certains oublis dans les dispositions relatives à l'organisation de la masse des porteurs de valeurs mobilières composées. D'une part, si la catégorie des valeurs mobilières donnant droit à une quotité de capital a été supprimée par l'ordonnance et remplacée, à l'instar d'autres valeurs mobilières composées, par la catégorie unique des valeurs mobilières donnant accès au capital, la disposition transitoire destinée à assurer le maintien des droits des porteurs de ces titres ne mentionne pas, par erreur, cette catégorie. Cette lacune doit donc être comblée. D'autre part, il y a lieu de corriger une erreur de référence dans les dispositions de l'ordonnance relative aux règles de majorité dans le fonctionnement de la masse des porteurs de valeurs mobilières composées.

En second lieu, il semble nécessaire d'autoriser l'assemblée générale extraordinaire à déléguer sa compétence pour décider de l'augmentation de capital dans l'hypothèse d'une augmentation réservée aux salariés, en application de l'article L. 443-5 du code du travail, ce que ne prévoit pas actuellement l'ordonnance.

En troisième lieu, il paraît regrettable que l'ordonnance, tout en modifiant les règles de franchissement de seuil afin de prendre en compte la possibilité nouvelle d'avoir des titres au porteur dans les sociétés non cotées, ait supprimé l'obligation de franchissement de seuils pour les porteurs de titres nominatifs, même au sein des sociétés cotées. Il convient en conséquence de restaurer cette obligation.

Enfin, certaines erreurs matérielles, qui peuvent être sources de difficultés d'interprétation, doivent être corrigées, en particulier dans les dispositions ouvrant à une société-mère la possibilité d'émettre des valeurs mobilières donnant accès à des titres de capital de sa filiale.

Ces modifications sont rendues applicables à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, ainsi qu'à Wallis et Futuna.

Sous réserve de ces modifications votre commission des Lois vous propose de ratifier cette ordonnance.

5. L'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires

Cette ordonnance a été prise, dans les délais impartis, sur le fondement de l'article 12 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit qui a autorisé le Gouvernement à intervenir par ordonnance dans le domaine de la loi afin de « prendre par ordonnance toutes dispositions concourant à l'actualisation, à la clarification et à la simplification des modalités de création, de fonctionnement et de dissolution ainsi que des règles budgétaires, comptables et financières applicables aux associations syndicales de propriétaires régies en tout ou partie par la loi du 21 juin 1865 sur les associations syndicales et à leurs unions ainsi qu'à l'association départementale régie par la loi du 27 juillet 1930 sur l'aménagement du système d'endiguement et d'assainissement des plaines de l'Isère, du Drac et de la Romanche ». Conformément aux exigences constitutionnelles et à l'article 35 de la loi d'habilitation, elle a fait l'objet d'un dépôt de projet de loi de ratification au Sénat le 22 septembre 2004.

Votre commission avait estimé, dans le cadre de l'examen du projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit, que la réforme du régime applicable aux associations syndicales de propriétaires était « pleinement justifiée », l'état du droit présentant un caractère archaïque et devant nécessairement évoluer244(*). Elle constate que le Gouvernement a profondément rénové ce régime, en rassemblant dans un même texte la majeure partie des dispositions applicables à l'ensemble des associations syndicales de propriétaires et en garantissant un équilibre satisfaisant entre l'exercice du droit de propriété et les responsabilités collectives.

Tout en conservant les différentes catégories existantes d'associations syndicales de propriétaires -en particulier, les associations syndicales libres, les associations syndicales autorisées et les associations syndicales constituées d'office- l'ordonnance simplifie et clarifie les modalités de création et de fonctionnement des associations syndicales ainsi que le rôle, les règles de fonctionnement et les moyens d'action de leurs organes.

Dans un souci de clarté et de simplification, l'ordonnance qui compte soixante-sept articles modifie la définition légale des associations syndicales de propriétaires dont l'objet est désormais circonscrit à la réalisation de travaux destinés à prévenir les risques naturels ou sanitaires, les pollutions ou les nuisances, à assurer la préservation, la restauration et l'exploitation de ressources naturelles, à aménager et entretenir des réseaux, canaux ou voies de circulation, ainsi qu'à mettre en valeur des propriétés. Si les trois types d'associations syndicales sont conservés, l'ordonnance précise le caractère de personne morale de droit privé des associations syndicales libres et, à l'inverse, le caractère d'établissement public à caractère administratif des associations syndicales autorisées ou constituées d'office, consacrant ainsi les solutions jurisprudentielles préexistantes.

 La présente ordonnance tend surtout à actualiser un régime juridique qui pouvait, à maints égards, être jugé archaïque et inadapté. Toutefois, elle apporte également des novations importantes dans le cadre des dispositions communes aux différents types d'associations syndicales (articles 1 à 6).

Ainsi, en va-t-il notamment des moyens permettant aux associations d'obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues par les propriétaires. D'une part, l'ordonnance permet désormais aux associations syndicales de faire opposition à une cession de propriété de tout immeuble situé dans leur périmètre afin d'obtenir le paiement des sommes qui lui seraient dues par le précédent propriétaire. D'autre part, elle reconnaît à toute association syndicale la faculté de recouvrer ses créances sur un associé par l'inscription d'une hypothèque légale, alors qu'auparavant, la dette de l'un des associés faisait l'objet d'une répartition entre les propriétaires associés solvables.

Dans un souci de protection des acquéreurs, l'ordonnance impose au vendeur d'informer celui-ci de l'inclusion de son bien dans le périmètre d'une association syndicale et de l'existence d'éventuelles servitudes. Faute de sanction particulière prévue par l'ordonnance, le défaut d'information de l'acquéreur conduira à l'application du droit commun de la vente immobilière, à savoir la nullité ou la résolution de la vente si l'absence d'emprise dans le périmètre d'une association syndicale de propriétaire était une condition déterminante de son consentement, ou l'octroi de dommages et intérêts.

 Les dispositions spécifiques aux associations syndicales libres (articles 7 à 10) sont peu modifiées. Seul est précisé le contenu des statuts qui doivent désormais obligatoirement comporter la liste des immeubles compris dans le périmètre de l'association ainsi que ses modalités de financement et le mode de recouvrement des cotisations qui lui sont versées.

 Les dispositions de l'ordonnance relatives aux associations syndicales autorisées (articles 11 à 42) renforcent les mesures de publicité entourant la création de telles associations et simplifient les règles de majorité exigées pour les créer lorsque l'ensemble des propriétaires n'approuve pas cette création. La nature des travaux n'influe plus sur la majorité à recueillir pour permettre la création d'une telle association. Deux majorités alternatives doivent être recueillies : soit la majorité des propriétaires représentant au moins les deux tiers de la superficie des propriétés ; soit les deux tiers des propriétaires représentant plus de la moitié de la superficie des propriétés.

Une disposition nouvelle permet également de pallier les conséquences d'une annulation de l'acte autorisant la création d'une association syndicale autorisée. Lorsque l'annulation n'empêche pas la reconstitution de l'association, un administrateur provisoire peut être nommé dans l'attente d'une régularisation. Au contraire, lorsque la reconstitution n'est pas envisageable, un liquidateur est désigné.

Certaines novations ou précisions sont apportées aux modalités de fonctionnement de ces associations. En particulier, la situation statutaire de leurs agents est clarifiée : ils sont des agents de droit public mais leur recrutement ne leur donne aucun droit à être titularisés dans la fonction publique. Il est également reconnu aux associations syndicales autorisées la faculté de conclure des contrats à durée déterminée ou indéterminée avec des agents de droit privé. En outre, confirmant les solutions dégagées par la jurisprudence administrative, l'ordonnance précise l'application aux associations autorisées de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée. Le texte ne consacre pas de manière expresse le soin de définir le caractère de marché public des marchés passés et exécutés par ces associations. En revanche, il renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de définir les conditions dans lesquelles les marchés des associations sont passés. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ce décret devrait prévoir l'application du code des marchés publics, la question ressortissant effectivement à la matière réglementaire.

Les procédures de modification de l'acte d'association et de dissolution sont également amendées par l'ordonnance.

Ainsi, une procédure simplifiée en cas de modification de l'acte d'association est instituée, lorsque cette modification porte sur une extension limitée de l'emprise de l'association ou en cas d'agrégation volontaire à l'association. De même, l'ordonnance renforce les possibilités pour certains associés de voir leurs propriétés distraites de l'emprise de l'association. Toutefois, ces derniers demeurent redevables de la quote-part des emprunts contractés par l'association pendant la durée de leur adhésion, jusqu'à leur remboursement complet, tandis que les servitudes grevant ces propriétés et nécessaires à l'accomplissement des missions de l'association restent en place. Enfin, les pouvoirs de l'autorité administrative pour prononcer la dissolution des associations autorisées sont élargis, notamment afin de pouvoir mettre fin aux associations qui seraient dépourvues d'objet ou sans activité réelle.

 Les articles 43 à 46 de l'ordonnance apportent également certaines modifications au régime applicable aux associations syndicales constituées d'office, pour lequel il est renvoyé, pour l'essentiel, aux dispositions relatives aux associations autorisées. Ce type d'association ne peut être créé que si des obligations légales imposent certains travaux qui ne sont pas conduits dans un simple intérêt collectif des propriétaires, mais dans un intérêt général -par exemple, des opérations de débroussaillement ou de lutte contre l'incendie- et qu'une association autorisée n'a pu être constituée.

L'ordonnance confirme la possibilité de constituer des unions d'associations syndicales autorisées ou constituées d'office (article 47). Elle crée, par ailleurs, une procédure de fusion entre associations autorisées ou constituées d'office (article 48) et procède à une modification des dispositions législatives régissant des associations syndicales particulières, telles que les syndicats d'assainissement des voies privées,245(*) les associations foncières urbaines246(*) les associations syndicales rurales,247(*) ainsi que l'association départementale d'aménagement de l'Isère, du Drac et de la Romanche (articles 49 à 57).

Les dispositions de l'ordonnance sont rendues applicables, sous réserve de certaines adaptations, à Mayotte ainsi qu'à Wallis-et-Futuna (articles 63 à 66).

L'application effective de cette ordonnance ne pourra intervenir qu'à la suite de l'entrée en vigueur d'un décret d'application, pris après avis du Conseil d'Etat. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ce décret, actuellement en cours d'élaboration, devrait intervenir avant la fin de l'année civile.

La présente ordonnance respecte les termes de l'habilitation donnée au Gouvernement par l'article 12 de la loi précitée du 2 juillet 2003. Toutefois, votre commission estime que certaines formulations contenues dans l'ordonnance pourraient être interprétées de manière restrictive, ce qui limiterait les possibilités d'action des associations syndicales de propriétaires dans l'intérêt collectif de ses membres. Elle vous propose, en conséquence, d'y apporter certaines modifications.

Ainsi, convient-il de prévoir qu'une association syndicale de propriétaires peut avoir pour objet non seulement la construction et l'entretien d'ouvrages, mais également leur gestion. De même, le pouvoir reconnu à l'autorité administrative d'exercer certains travaux d'office en cas de carence du syndicat doit être étendu à tous les types d'opérations -qui ne sont pas seulement des travaux stricto sensu- qui rentrent dans l'objet des associations. Enfin, il est nécessaire de corriger une erreur de plume dans les dispositions relatives au financement des associations syndicales autorisées. Ces modifications sont rendues applicables à Mayotte et dans les îles Wallis et Futuna.

Sous réserve de ces modifications votre commission des Lois vous propose de ratifier cette ordonnance.

6. L'ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004 relative à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce

Cette ordonnance a été prise, dans les délais impartis, sur le fondement du 1° de l'article 27 de la loi précitée du 2 juillet 2003 habilitant le Gouvernement à simplifier le droit qui a autorisé le Gouvernement à intervenir par ordonnance dans le domaine de la loi afin de « simplifier la législation applicable à l'entremise et à la gestion des immeubles et fonds de commerce ». Elle a fait l'objet du dépôt d'un projet de loi de ratification au Sénat le 23 septembre 2004.

Entrée en vigueur le 3 juillet 2004, l'ordonnance qui comporte treize articles modifie la majeure partie des dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce (dite « loi Hoguet »). Les modifications apportées à ce dernier texte ont un double objet : simplifier les conditions d'exercice des activités d'entremise et de gestion immobilières tout en assurant la protection des clients des professionnels concernés.

Le titre I de l'ordonnance rend les dispositions de la loi précitée du 2 janvier 1970 expressément applicables aux personnes physiques ou morales proposant des locations ou sous-locations saisonnières, cette application ayant suscité certaines difficultés sous l'empire des dispositions antérieures. A cette fin, la location saisonnière est désormais définie comme une location d'immeuble pour une durée « maximale et non renouvelable de quatre-vingt-dix jours consécutifs ».

L'ordonnance modifie les conditions d'exercice de l'activité d'entremise et de gestion d'immeubles en précisant les modalités d'octroi de la garantie financière dont doivent justifier les professionnels de la gestion immobilière. Elle simplifie le droit antérieur en soumettant dorénavant la personne assurant la direction d'un établissement, d'une succursale, d'une agence ou d'un bureau à une simple déclaration préalable, alors que la détention d'une carte professionnelle était auparavant exigée. De même, elle institue une dispense de carte professionnelle pour les personnes exerçant une activité de location saisonnière de meublés hors forfait touristique qui sont déjà titulaires d'une autorisation administrative délivrée en application de la loi n° 92-645 du 13 juillet 1992 fixant les conditions d'exercice des activités relatives à l'organisation et à la vente de voyages ou de séjours. L'ordonnance supprime également l'exigence du versement d'un droit de constitution et de tenue des dossiers lors de l'obtention ou du renouvellement de la carte professionnelle.

L'ordonnance procède ensuite, dans son titre II, à l'adaptation du régime des incapacités professionnelles applicable aux activités d'entremise et de gestion des immeubles et fonds de commerce. Elle supprime notamment les incapacités liées aux condamnations prononcées en vertu de la loi n° 47-1635 du 30 août 1947 relative à l'assainissement des professions commerciales et industrielles, qui ne sont plus adaptées aux exigences de la jurisprudence constitutionnelle et de la Convention européenne des droits de l'homme qui devraient d'ailleurs être modifiées par ordonnance prise en vertu de l'article 21 du présent projet de loi. L'ordonnance dispose ainsi que la majeure partie des incapacités ne pourra trouver à s'appliquer que si la condamnation définitive est intervenue depuis moins de dix ans.

En contrepartie, de nouvelles incapacités sont instituées telles que celles résultant de la condamnation à des peines d'au moins trois mois d'emprisonnement sans sursis pour l'une des infractions relatives aux jeux de loterie, aux jeux dans les cercles et casinos ou aux jeux de hasard, ainsi que pour fraude fiscale ou atteinte à des systèmes de traitement informatisés. Désormais, les personnes encourant une incapacité d'exercice doivent cesser leur activité dans le délai d'un mois suivant le jour où la décision entraînant l'incapacité est devenue définitive et leur a été notifiée. Des dispositions transitoires sont prévues par l'ordonnance pour les personnes qui seraient concernées par une des causes d'incapacité prévues par les anciennes dispositions de la loi.

Les sanctions pénales sont quant à elles alourdies par le titre III de l'ordonnance. Les peines d'emprisonnement encourues en cas de violation des dispositions de la loi sont allongées, tandis que les peines d'amende sont parfois considérablement augmentées. La possibilité d'une mise en jeu de la responsabilité pénale des personnes morales entrant dans le champ d'application de la loi est désormais également affirmée.

La bonne mise en oeuvre de cette réforme reste cependant tributaire de l'édiction d'un nouveau décret d'application destiné à se substituer au décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 fixant les conditions d'application de la loi précitée du 2 janvier 1970. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ce décret, en cours d'élaboration, devrait être pris dans les tous prochains mois.

Votre commission des Lois vous propose de ratifier cette ordonnance sans modification.

7. L'ordonnance n° 2004-637 du 1er juillet 2004 relative à la simplification de la composition et du fonctionnement des commissions administratives et à la réduction de leur nombre

Cette ordonnance a été prise sur le fondement de l'article 2, 3°, de la loi du 2 juillet 2003 qui habilitait le Gouvernement à simplifier la composition et le fonctionnement des commissions administratives et réduire le nombre des commissions à caractère consultatif. Le Sénat avait précisé le champ de cette habilitation en adoptant un amendement présenté par votre commission des Lois, qui prévoyait le maintien d'une consultation « lorsque l'exercice d'une liberté publique ou le principe de la libre administration des collectivités territoriales » étaient en cause. Un projet de loi de ratification de cette ordonnance a été déposé à l'Assemblée nationale le 29 septembre 2004248(*), qui satisfait aux exigences constitutionnelles concernant la pérennité des ordonnances.

La concertation préalable aux décisions publiques permet d'assurer à la fois la pertinence de ces décisions et l'adhésion des citoyens ou de leurs mandataires. Toutefois le formalisme et la multiplication de petites instances pouvaient contrarier l'efficience de la concertation.

L'ordonnance composée de quarante-deux articles vise par conséquent à simplifier le fonctionnement des commissions placées auprès des administrations centrales, en supprimant, le cas échéant, certaines d'entre elles et, à rationaliser et déconcentrer auprès des représentants de l'Etat les modalités d'organisation de la concertation à l'échelon local.

A cet effet, ont été identifiées des commissions « pivot » par matière. Une commission sectorielle sera créée par décret en Conseil d'Etat pour chacune des politiques publiques relevant de la compétence étatique. Elle rassemblera au niveau national les services, les représentants des organismes publics, des collectivités locales, des entreprises ou des associations intéressées. Le préfet déclinera au niveau local les principes organisationnels de ces commissions. Une circulaire du Premier ministre devrait parallèlement définir le bon usage de ces organismes.

Afin d'alléger la charge des magistrats judiciaires ou administratifs participant à ces commissions, a fortiori lorsque cette participation est sans rapport avec l'activité juridictionnelle ou pourrait susciter des confusions, l'ordonnance procède au retrait de ces magistrats249(*).

Les articles 1er à 9 de l'ordonnance (titre Ier) retirent par conséquent les magistrats de la composition des commissions suivantes :

- la commission pour fixer le barème et les modalités de versement de la rémunération due aux artistes-interprètes et producteurs (modification de l'article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle) ;

- le comité de la protection des obtentions végétales (article L. 412-1 du même code) ;

- la commission de sécurité des consommateurs (modification de l'article L. 224-1 du code de la consommation) ;

- la commission de conciliation et d'expertise douanière (modification de l'article 443 du code des douanes) ;

- la commission consultative compétente en matière d'association foncière urbaine (modification de l'article L. 322-6 du code de l'urbanisme) ;

- la commission des sanctions administratives créée au sein du comité régional de transports (modification de l'article 17 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982) ;

- la commission communale, intercommunale et départementale d'aménagement foncier, la commission communale d'aménagement foncier spécifique compétente en matière de procédure des échanges et cessions d'immeubles forestiers, la commission intercommunale d'aménagement foncier spécifique compétente en matière de procédure des échanges et cessions d'immeubles forestiers (modification correspondante des articles du code rural) ;

- la commission départementale d'aide aux rapatriés réinstallés (modification de l'article 10 de la loi n° 87-549 du 16 juillet 1987) ;

- la commission consultative concernant les annonces judiciaires et légales (modification de l'article 2 de la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955).

S'agissant de la commission centrale des impôts directs, compétente pour les bénéfices agricoles forfaitaires par la modification de l'article 1652 du code général des impôts, siègera un magistrat de l'ordre judiciaire, en remplacement d'un conseiller à la cour de Cassation.

Le titre II de l'ordonnance (articles 10 à 35) réduit le nombre de commissions administratives à caractère consultatif, et simplifie leur fonctionnement.

S'agissant des commissions présidées par le représentant de l'Etat dans le département et la région, l'ordonnance vise à :

- supprimer des commissions devenues inutiles ;

- procéder au déclassement de dispositions législatives régissant certaines commissions : elles seront recréées par la voie réglementaire, dans des conditions renouvelées ;

- simplifier les conditions de fonctionnement ou les règles de composition de certaines instances ;

Concernant les commissions placées auprès des autorités centrales, l'article 10 procède à l'abrogation des textes instituant :

- le conseil supérieur de l'élevage (article L. 653-14 du code rural) ;

- la commission de la sécurité sociale des fonctionnaires (article L. 712-12 du code de la sécurité sociale) ;

- le conseil du crédit à l'artisanat (article 50 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973) ;

- le conseil national des postes et télécommunications (article 37 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990) ;

- la commission de recours en matière d'exercice de la médecine par des ressortissants étrangers, qui a cessé toute activité depuis le 31 décembre 2003 (article 60 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999) ;

- la commission des comptes économiques et sociaux des départements d'outre-mer et de suivi de la loi d'orientation pour l'outre-mer (article 74 de la loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer) ;

- la commission d'étude de la revalorisation des rentes, des retraites et des pensions des anciens combattants de l'outre-mer (article 110 de la loi n° 2000-1352 du 30 décembre 2000 portant loi de finances pour 2001) ;

- le conseil scientifique du dépôt légal (article 8 de l'ordonnance du 20 février 2004 relative à la partie législative du code du patrimoine).

L'article 11 supprime le comité consultatif des commissionnaires en douanes (article 87 du code des douanes).

L'article 12 supprime la commission spéciale constituée au sein du conseil national de l'information statistique.

Les articles 13 à 34 concernent les commissions placées auprès des administrations déconcentrées.

L'article 13 modifie la partie législative du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre pour prévoir que les titres et cartes seront délivrés après avis du conseil départemental pour la mémoire de la Nation, les anciens combattants et les victimes de guerre dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.

L'article 14 modifie l'article 8 du décret du 27 décembre 1954 portant statut du patriote résistant à l'occupant des départements du Rhin et de la Moselle incarcéré en camps spéciaux afin de supprimer la commission interdépartementale chargée de donner un avis sur l'attribution de ce titre. Cette attribution sera également dévolue au futur conseil départemental pour la mémoire de la Nation, les anciens combattants et les victimes de guerre dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat.

L'article 15 abroge les dispositions du code rural relatives à la commission départementale d'orientation de l'agriculture qui a vocation à devenir une commission pivot.

L'article 16 abroge les dispositions relatives à la commission régionale pour l'amélioration des conditions de débarquement des produits de la pêche, créée par la loi du 18 novembre 1997. Ses compétences ont vocation à être transférées à la commission régionale des pêches maritimes et de l'aquaculture, future commission pivot.

L'article 17 supprime la commission locale de dispense du diplôme de professeur de danse, prévue à l'article L. 362-4 du code de l'éducation, et modifie la procédure selon laquelle les personnes enseignant la danse depuis plus de trois ans au 11 juillet 1989 peuvent être dispensées de l'obtention du diplôme de professeur de danse.

Les articles 18 et 19 abrogent les dispositions relatives respectivement au conseil départemental de l'insertion par l'activité économique et au comité départemental de l'emploi, dont les attributions seront transférées à une commission pivot compétente en matière d'emploi et d'insertion créée par décret en Conseil d'Etat.

L'article 20 abroge les dispositions relatives aux comités d'orientation et de surveillance des zones franches urbaines, créé par l'article 3 de la loi du 14 novembre 1996. La définition des modalités de la concertation et du suivi autour des zones franches sera déterminée localement, par le représentant de l'Etat dans le département.

L'article 21 abroge la disposition selon laquelle un usager concerné par une mesure de suspension du permis de conduire peut demander à être entendu par la commission de suspension du permis de conduire. Cette disposition peut relever du domaine réglementaire, dans la mesure où l'avis donné par cette commission ne lie pas l'autorité administrative.

L'article 22 supprime le comité départemental des transports. Instance lourde, inadaptée, ce comité ne fonctionnant plus dans la quasi totalité des départements.

L'article 23 vise à remplacer la référence au conseil départemental d'hygiène par celle à la commission compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques qui sera constituée par décret en Conseil d'Etat en commission pivot.

L'article 24 supprime la commission d'organisation de la transfusion sanguine pour tenir compte des évolutions institutionnelles dans ce domaine.

L'article 25 abroge les dispositions relatives au comité départemental de l'aide médicale urgente, de la permanence des soins et des transports sanitaires, qui a vocation à être recréée sous forme de commission pivot par la voie réglementaire.

L'article 26 supprime trois commissions régionales sur les études médicales, pharmaceutiques et biologiques ainsi que les commissions nationales correspondantes. Le décret du 19 juin 2003 a en effet créé l'Observatoire national de la démographie des professions de santé auquel sont rattachés des comités régionaux. Dans un souci de simplification administrative, les attributions des trois commissions nationales ont été transférées à l'Observatoire qui réunit ainsi toutes les compétences nécessaires pour émettre un avis sur les besoins de santé de la population et notamment le nombre souhaitable de spécialistes à former (médecins, pharmaciens et biologistes) dans chaque discipline et dans chaque subdivision, aux ministres chargés de l'enseignement supérieur et de la santé.

L'article 27 abroge les dispositions relatives au conseil départemental de l'environnement et au comité régional de l'environnement.

L'article 28 abroge un certain nombre de dispositions législatives concernant la commission départementale des sites, perspectives et paysages qui sera transformée en commission pivot par décret en Conseil d'Etat. S'agissant des attributions de cette commission constitutives d'une garantie de nature législative, les principes de sa composition sont déterminés également dans l'ordonnance.

L'article 29 modifie la dénomination du conseil départemental de la chasse et de la faune sauvage en faisant référence à la commission départementale compétente, qui sera créée par décret en Conseil d'Etat sous forme de commission pivot, et à laquelle l'article 30 confère les attributions de la commission d'indemnisation du gibier.

L'article 31 modifie la dénomination de la commission consultative de l'environnement, qui devient commission consultative des nuisances sonores aéroportuaires.

L'article 32 supprime la composition départementale des risques naturels majeurs, qui a vocation à être recréée par décret. Les compétences relatives à l'information préventive des populations seront assurées par une commission départementale, également créée par décret, compétente en matière de sécurité civile.

L'article 33 supprime la conférence départementale d'harmonisation des investissements.

L'article 34 modifie les dispositions du code de l'action sociale et de la famille relatives à une commission dont les attributions relèveront à la commission pivot compétente en matière de jeunesse et de sport, créée par décret en Conseil d'Etat.

Le titre III de l'ordonnance institue diverses mesures de simplifications concernant :

- la désignation d'un membre du Conseil d'Etat ou de la Cour des comptes placé ou ayant été placé en service extraordinaire, pour siéger dans les organismes consultatifs (articles 36 et 37) ;

- l'homologation des formulaires administratifs (article 38). En effet, l'article 2 de la loi du 2 juillet 2003 habilite le Gouvernement à simplifier le droit, autorise le Gouvernement à prendre par ordonnance « toutes dispositions modifiant les règles des procédures administratives non contentieuses, aux fins de simplifier les démarches des usages auprès des administrations (...) b) En modifiant les conditions d'élaboration, de révision et d'évaluation des formulaires administratifs ».

Ces formulaires, qui prennent de plus en plus fréquemment la forme électronique, sont souvent le point de contact entre l'usager et l'administration. Cet article prévoit que les formulaires administratifs, quels qu'en soient la présentation et le support, y compris électronique, font l'objet d'une homologation par l'autorité administrative dans des conditions fixées par décret. Le décret déterminera l'autorité administrative compétente, qui pourra notamment être le ministre chargé de la réforme de l'Etat. L'homologation sera refusée lorsque les renseignements requis ne sont pas nécessaires au traitement de la demande ou en cas de défaut d'intelligibilité du formulaire.

L'article 39 détermine le champ d'application des dispositions de l'article 38 : les administrations de l'Etat et ses établissements publics, mais aussi les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif, ainsi que les collectivités territoriales pour les formulaires administratifs relatifs à l'attribution d'une allocation ou à l'octroi d'une autorisation administrative instituée par la loi ou les règlements.

Le titre IV de l'ordonnance rassemble les dispositions finales. Ainsi, l'article 40 énonce les dispositions qui procèdent à l'extension des dispositions des articles 38 et 39 aux collectivités d'outre-mer régies par le principe de spécialité, dans le respect de la distinction entre les compétences de l'Etat et celles de ces collectivités.

L'article 41 prévoit que les dispositions relatives aux commissions déconcentrées sont, pour un certain nombre d'entre elles, applicables à compter de la publication d'un décret en Conseil d'Etat, devant intervenir au plus tard le 1er juillet 2005. Les dispositions du 5° de l'article 12, qui visent la commission de recours en matière d'exercice de la médecine par des ressortissants étrangers, sont entrées en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant la publication de la présente ordonnance, soit le 2 septembre 2004.

Il est précisé que les consultations auxquelles il a été procédé avant l'entrée en vigueur des dispositions de la présente ordonnance demeurent valides en tant qu'elles ont été effectuées conformément aux dispositions antérieures.

Votre commission des Lois vous invite à adopter un amendement tendant à compléter le titre II de l'ordonnance par cinq articles dont l'objet est de :

- supprimer définitivement deux commissions administratives devenues obsolètes : la commission régionale consultative des baux ruraux, qui intervient dans la procédure de fixation des fermages pour laquelle le maintien d'une consultation départementale et d'une consultation nationale paraît suffisante, et la commission de suspension du permis de conduire, compétente pour examiner les appels de conducteurs sanctionnés, qui se réunit rarement ;

- supprimer des commissions de niveau législatif afin de pouvoir transférer leurs compétences à une commission pivot dont les modalités de fonctionnement et les attributions relèvent du règlement. Tel est le cas, d'une part, pour le comité départemental d'agrément des groupements agricoles d'exploitation en commun, dont les attributions seront transférées par décret en Conseil d'État à la commission départementale d'orientation de l'agriculture et, d'autre part, pour la commission départementale des carrières, dont les attributions seront transférées à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. Ces suppressions n'entreraient en vigueur qu'à compter de la publication du décret d'application mentionné à l'article 35 de l'ordonnance et, au plus tard, le 1er juillet 2005 ;

- procéder à des coordinations au sein du code de l'environnement et de la loi n° 64-1246 du 16 décembre 1964 relative à la lutte contre les moustiques, afin de tenir compte du remplacement, prévu à l'article 23 de l'ordonnance, du conseil départemental d'hygiène par la commission compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques ;

- supprimer la commission nationale d'évaluation de la parité sociale globale instituée par l'article 13 de la loi de programme n° 86-1383 du 31 décembre 1986 relative au développement des départements d'outre-mer, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte, qui n'a jamais été réunie ;

- supprimer la référence, à l'article L. 652-1 du code rural, au conseil supérieur de l'élevage, dont l'article 10 (1°) de l'ordonnance prévoit la suppression ;

- supprimer le comité permanent du financement de l'agriculture institué par l'article 13 de la loi n° 88-50 du 18 janvier 1988 relative à la mutualisation de la caisse nationale de crédit agricole. Le décret relatif aux attributions, à la composition et aux modalités de fonctionnement de ce comité n'a jamais été pris. Il ne s'est par conséquent jamais réuni.

Votre commission des Lois vous propose de ratifier l'ordonnance ainsi modifiée.

8. L'ordonnance n° 2004-825 du 19 août 2004 relative au statut des immeubles à usage de bureaux et des immeubles dans lesquels est effectué le contrôle technique des véhicules et modifiant le code domaine de l'Etat

Cette ordonnance, forte de trois articles, a été prise sur le fondement du 2° de l'article 34 de la loi précitée du 2 juillet 2003 qui prévoit la possibilité pour le Gouvernement d'intervenir dans le domaine de la loi afin de « modifier et compléter les dispositions relatives à la définition, à l'administration, à la protection et au contentieux du domaine public et du domaine privé, mobilier comme immobilier, de l'Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics, à l'authentification des actes passés par ces personnes publiques, au régime des redevances et des produits domaniaux, tant en ce qui concerne leur institution que leur recouvrement, ainsi que celles relatives à la réalisation et au contrôle des opérations immobilières poursuivies par ces collectivités, afin de les simplifier, de les préciser, de les harmoniser, d'améliorer la gestion domaniale et de les codifier ». Le délai prévu pour cette habilitation atteindra son terme le 3 janvier 2005.

Cette ordonnance, forte de trois articles, n'a pas encore donné lieu au dépôt d'un projet de loi de ratification. Celui-ci devra, à peine de caducité de ce texte, impérativement intervenir avant le 21 novembre 2004.

Comme l'avait souligné votre commission dans son rapport sur la loi précitée du 2 juillet 2003, cette habilitation a un champ d'application large qui permet au Gouvernement d'édicter un véritable « code des propriétés publiques ». Toutefois, force est de constater que la présente ordonnance n'a qu'un objet très limité, dans la mesure où elle se borne à modifier le statut des immeubles de bureaux appartenant à l'Etat ainsi que les immeubles de l'Etat dans lesquels est effectué le contrôle technique.

 L'article 1er de l'ordonnance modifie les articles L. 2 et L. 54 du code du domaine de l'Etat afin de préciser que les immeubles à usage de bureaux de l'Etat ou de l'un de ses établissement publics font partie de son domaine privé. Le but recherché est ainsi de lever les obstacles juridiques permettant d'aliéner ces immeubles.

Rappelons en effet que les biens des personnes publiques sont répartis entre leur domaine public et leur domaine privé. La domanialité publique impose le respect de règles de protection particulièrement contraignantes puisque les biens s'y rattachant sont « inaliénables et imprescriptibles » 250(*). Les biens du domaine privé peuvent, en revanche, faire l'objet de cessions, dans des conditions particulières et dérogatoires au droit commun.

L'appartenance de tel ou tel bien de l'Etat à l'un ou l'autre de ces domaines est soit exceptionnellement défini par la loi, soit plus couramment déterminée au cas par cas par le juge administratif. Pour ce faire, le juge utilise les critères de l'affectation au public ou à un service public ainsi que de l'aménagement spécial en vue de cette affectation. L'application de ces critères aurait conduit à considérer que les immeubles à usage de bureaux, propriétés de l'Etat ou de ses établissements publics, constituent des dépendances du domaine public dans la mesure où ils sont affectés à un service public et spécialement aménagés à cet effet.

Or, une telle solution n'aurait pas été de nature à faciliter la mise en oeuvre de la politique d'aliénation du patrimoine immobilier de l'Etat décidée par le Gouvernement. En effet, la loi n° 2004-1311 du 30 décembre 2003 portant loi de finances pour 2004 a inscrit en recettes les sommes résultant de la cession de 10 % des immeubles de bureaux de l'Etat en 2004, sur un total de 10,3 millions de m2 de bureaux. Pour permettre cette cession, il convenait donc d'abord procéder au déclassement des locaux dont la vente est envisagée.

Or, si ce déclassement doit résulter d'une décision administrative expresse, il est également nécessaire que le bien en cause ne soit plus affecté à l'utilité publique et ne fasse plus l'objet d'un aménagement spécial. A défaut, la décision de déclassement serait illégale251(*). Ces exigences ne permettaient pas de réaliser l'objectif fixé par le Gouvernement qui est de céder la propriété de biens immobiliers tout en maintenant, le cas échéant, leur affectation au service public.

C'est la raison pour laquelle, conformément à l'habilitation, la présente ordonnance précise la définition du domaine privé, en prévoyant que les biens immobiliers à usage de bureaux font partie du domaine privé de l'Etat ou de ses établissements publics, à l'exception toutefois « de ceux formant un ensemble indivisible avec des biens immobiliers appartenant au domaine public ».

La procédure d'aliénation de ces biens est également précisée par l'ordonnance. Le service des domaines, dépendant du ministère des Finances, reste compétent pour procéder à la cession et en recouvrer le prix pour le compte de l'Etat ou de l'établissement public concerné. Un dispositif particulier est cependant prévu pour permettre l'aliénation d'immeubles qui continueraient à être utilisés par les services de l'Etat. L'Etat pourrait ainsi céder la propriété des murs de ces biens, tout en en conservant l'usage, selon des modalités convenues avec le nouveau propriétaire.

Néanmoins, afin que cette pratique ne cause aucun préjudice au maintien de la continuité du service public, principe de nature constitutionnelle, l'ordonnance précise que « l'acte d'aliénation comporte des clauses permettant de préserver » cette continuité. De même, il est prévu que lorsqu'un établissement public, autre qu'un établissement à caractère industriel et commercial, souhaite céder la propriété d'un bien immobilier à usage de bureaux qui continue à être utilisé par l'un de ses services, il doit préalablement recueillir l'accord du ministre du budget et de son ministre de tutelle.

En vertu de l'article 2, et selon des modalités similaires, les immeubles dans lesquels est effectué le contrôle technique des véhicules sont rattachés également au domaine privé de l'Etat ou de l'un de ses établissements publics. Cette précisi