ARTICLE 59

Aménagement du régime de décharge de responsabilité et de quitus des comptables publics

Commentaire : le présent article, résultant de préconisations de la Cour des comptes, réduit de dix à six ans à compter de la production de leurs comptes, le délai au-delà duquel la responsabilité pécuniaire des comptables publics ne peut plus être mise en cause. En outre, à l'issue de ce délai, les comptables seraient déchargés sans avoir à produire pour cela une décision juridictionnelle, ce qui simplifierait la levée des garanties constituées en sûreté de leur gestion.

I. LA SITUATION ACTUELLE

La prescription extinctive trentenaire, de droit commun, applicable à la responsabilité pécuniaire des comptables publics 113 ( * ) afférente à leur gestion, a été, en 2001, remplacée par une prescription décennale 114 ( * ) .

Selon les dispositions en vigueur, le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité d'un comptable public (par le ministère dont il relève, par le ministre chargé de l'économie et des finances ou par le juge des comptes), ne peut plus intervenir au-delà du 31 décembre de la dixième année suivant :

- soit celle au cours de laquelle il a produit ses comptes au juge des comptes ;

- soit, lorsqu'il n'est pas tenu à cette obligation (les comptables secondaires ne sont, en principe, responsables que devant les comptables principaux), celle au cours de laquelle il a produit les justifications de sa gestion.

En effet, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du recouvrement des recettes, du paiement des dépenses et de la garde et la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés à une collectivité publique et dont ils ont la charge 115 ( * ) .

Cette responsabilité pécuniaire rend obligatoire la constitution de garanties par le comptable public 116 ( * ) , effectuée le plus souvent sous la forme d'un cautionnement personnel par affiliation à l'Association française de cautionnement mutuel, constituée entre les comptables.

L'extinction de la prescription fait obstacle à une action en responsabilité du comptable mais ne fait pas disparaître toutes les obligations pesant sur lui. La procédure d'apurement juridictionnel est obligatoire et doit précéder la levée des garanties.

II. UNE RÉFLEXION DE LA COUR DES COMPTES

Dans l'esprit de la LOLF, qui confère une plus grande responsabilisation aux gestionnaires, la Cour des comptes a souhaité, parallèlement, un ajustement des conditions de mise en oeuvre de la responsabilité du comptable public, dont le principe n'est évidemment pas remis en cause.

A cet effet, la Cour des comptes a suggéré au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, d'une part de réduire la durée de la prescription des actes des comptables publics et, d'autre part, de supprimer l'impératif d'une décision juridictionnelle pour lever les garanties à l'issue de la prescription.

Il s'agirait aussi d'alléger la charge des juridictions financières de dossiers ne présentant pas un intérêt réel (pourquoi ne lèverait-on pas les garanties dès lors que la responsabilité ne peut plus être mise en cause ?), afin de permettre à celles-ci de centrer leurs activités sur des questions plus essentielles.

III. LES DISPOSITIONS PROPOSÉES

Le présent article, dont les dispositions ont reçu l'approbation de la Cour des comptes, comporte donc deux dispositions :

- le délai de prescription serait réduit de dix à six ans . Le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité du comptable public ne pourrait plus intervenir au-delà du 31 décembre de la sixième année suivant celle de la production de ses comptes au juge des comptes ou, lorsqu'il n'est pas tenu à cette obligation, celle au cours de laquelle il a produit les justifications de sa gestion.

Cette disposition paraît concilier les délais nécessaires au contrôle des comptes avec les besoins de sécurité juridique des comptables ;

- dès lors qu'aucune charge provisoire ou définitive n'aurait été notifiée durant le délai de prescription à son encontre, le comptable serait, à son issue, déchargé de sa gestion au titre de l'exercice concerné, sans avoir à solliciter une décision juridictionnelle de quitus . Cette disposition, outre qu'elle libèrerait les juridictions financières d'un contentieux dénué d'intérêt, répondrait à la situation de certains comptables admis à la retraite et attendant, à l'issue du délai de prescription, une décision juridictionnelle définitive pour pouvoir lever les garanties qu'ils avaient constituées en sûreté de leur gestion .

Selon les indications du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, un décret devrait prévoir une simple notification administrative de confirmation de l'expiration de la prescription, afin d'en donner date certaine.

S'agissant des exercices antérieurs à l'entrée en vigueur du présent article, il est prévu que le nouveau délai de prescription serait décompté à partir de la date de la production des comptes ou de la justification de la gestion. En d'autres termes, les nouvelles dispositions seraient applicables aux exercices passés . A partir du 1 er janvier 2005, les comptes remis par les comptables publics avant le 31 décembre 1998 ne pourraient plus donner lieu à une action en responsabilité personnelle et pécuniaire.

L'impact financier du présent article, bien que non mesurable précisément, devrait être positif pour les finances publiques, dans la mesure où il contribuerait au « désencombrement » des juridictions financières.

IV. LA POSITION PRISE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels de sa commission des finances, acceptés par le gouvernement, et le présent article ainsi modifié.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 113 Fonctionnaires régulièrement autorisés au maniement des deniers publics (décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique).

* 114 Article 60 (paragraphe V) de la loi de finances pour 1963 (n° 63-156 du 23 février 1963), dans sa rédaction issue de l'article 86 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 2001-1276 du 28 décembre 2001).

* 115 Cette responsabilité ne concerne pas les erreurs commises dans l'assiette et la liquidation des droits qu'ils recouvrent et ne s'applique pas aux opérations effectuées sur réquisition régulière des ordonnateurs.

* 116 Article 60-II de la loi de finances pour 1963 précitée.

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