Rapport n° 397 (2004-2005) de M. André ROUVIÈRE , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 15 juin 2005

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N° 397

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 15 juin 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant l'approbation du protocole établi conformément à l'article 34 du traité sur l'Union européenne modifiant, en ce qui concerne la création d'un fichier d' identification des dossiers d' enquêtes douanières , la convention sur l' emploi de l' informatique dans le domaine des douanes ,

Par M. André ROUVIÈRE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Francis Giraud, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Daniel Percheron, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1860 , 2017 et T.A. 384

Sénat : 184 (2004-2005)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mes chers collègues,

Le projet de loi qui est l'objet du présent rapport vise à autoriser l'approbation du protocole établi conformément à l'article 34 du traité sur l'Union européenne modifiant, en ce qui concerne la création d'un fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières, la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes, signé le 8 mai 2003 par les quinze Etats qui étaient alors membres de l'Union européenne.

Ce projet tend à compléter la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes, signée le 26 juillet 1995, par la mise en place d'un fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières qui constituera une base de données spéciale au sein du système d'information des douanes créé par cette convention.

Je souhaite, après avoir rappelé l'intérêt mais aussi les limites de la convention initiale vous indiquer combien ce protocole apporte un complément très utile à la convention précitée sur l'emploi de l'informatique dans le secteur douanier, tout en assurant la protection des données liées à la vie privée des individus.

I. LA CONVENTION INITIALE ET SES NÉCESSAIRES COMPLÉMENTS

A. LA CONVENTION DE 1995 SUR L'EMPLOI DE L'INFORMATIQUE DANS LE SECTEUR DOUANIER


Son contenu

Elle a été signée à Bruxelles le 26 juillet 1995 et établie sur la base de l'article K3 (devenu l'art. 34) du traité sur l'Union européenne. Elle a été signée par les quinze membres de l'Union européenne.

Cette convention a institué un système d'information automatisé commun, dénommé « système d'information des douanes » (SID), qui comprend les données à caractère personnel nécessaires à l'accomplissement de son objectif, à savoir « aider à prévenir, rechercher et poursuivre les infractions graves aux lois nationales en renforçant, par une diffusion plus rapide des informations, l'efficacité des procédures de coopération et de contrôle des administrations douanières des Etats membres ». Ces données sont insérées dans le système d'information des douanes seulement aux fins d'observations et de compte rendu, de surveillance discrète ou de contrôles spécifiques.

Ce système repose donc sur une base de données centrale auxquelles ont accès en temps réel les administrations douanières de tous les Etats membres de l'Union. Cette diffusion rapide des informations renforce l'efficacité de la coopération entre les administrations douanières.


Ses modalités actuelles d'application

La convention s'applique actuellement à titre provisoire. Elle est entrée en application de manière anticipée pour les Etats ayant notifié auprès du Conseil de l'Union européenne la ratification de l'accord relatif à son application provisoire. Elle est ainsi appliquée à compter du 1 er novembre 2000 pour l'Autriche, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la France, la Grande-Bretagne, la Grèce et la Suède et depuis cette date pour les Pays-Bas, l'Italie, l'Irlande, le Luxembourg, le Portugal et l'Allemagne, ainsi qu'à cinq nouveaux Etats membres : Chypre, la Hongrie, la Lituanie, la Lettonie et la Slovénie. Aujourd'hui, la Belgique n'a pas encore, pour des motifs de longueur des processus, adopté la convention « SID ». Celle-ci entrera définitivement en vigueur dès que ce pays aura achevé cette procédure de ratification.


Les modifications déjà apportées à la convention SID

Trois protocoles ont déjà été adoptés. Ils ont pour objet d'étendre le champ d'application de la convention au blanchiment de revenus, d'inclure le numéro d'immatriculation des moyens de transport dans la base de données et de déterminer les modalités d'interprétation du texte initial par la Cour de Justice des communautés européennes.

B. LES INSUFFISANCES DE LA CONVENTION

? Les bases de données du SID fonctionnent depuis plusieurs années, mais un rapport d'étude a souligné la trop faible utilisation du système, liée notamment au manque de formation des utilisateurs, à une interface trop complexe entre les divers systèmes informatiques et à une vitesse de fonctionnement et de connexion insatisfaisante.

? De plus, si la convention SID crée un système d'alerte permettant aux administrations douanières des Etats membres de déterminer des cibles de contrôle (marchandise, véhicules, personnes...) et d'indiquer la conduite à observer, cette dernière ne peut consister qu'en des activités d'observation, de compte rendu et de surveillance discrète.

? Enfin, et c'est ce qui confirme l'importance du protocole instituant le Fichier européen d'enquêtes douanières (FIDE), les douaniers ne sont généralement pas au courant des enquêtes menées dans les autres pays de l'Union sur des sujets identiques ou connexes à ceux qu'ils traitent.

II. LE PROTOCOLE FIDE : SON FONCTIONNEMENT ET LE RESPECT DES DONNÉES PRIVÉES

L'ampleur des fraudes douanières constatées (qui sont de l'ordre de 200 millions d'euros par an en France) justifie que tous les moyens soient accordés aux services compétents pour que leurs recherches et leurs tâches de vigilance soient facilitées.

La naissance du FIDE :

L'idée de ce fichier est née de l'expérience tirée d'une enquête menée par les services des douanes françaises, qui enquêtaient sur un trafic d'alcool organisé par des ressortissants de pays d'Europe de l'Est, alors que, parallèlement, les services allemands menaient leur propre enquête sur le même trafic. L'absence de coordination des deux services a évidemment nui à l'efficacité de l'enquête. La France a donc pris l'initiative de présenter, avec l'Allemagne et la Belgique, une proposition d'acte du Conseil permettant la modification de la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes, afin de permettre la création d'un fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières (FIDE). En effet, le Conseil européen de Tampere, en octobre 1999, avait souligné trois points :

- la coopération entre les autorités des Etats membres, lors d'enquêtes sur des activités criminelles transfrontières dans un Etat membre, doit être la plus fructueuse possible ;

- il faut parvenir à mettre en place, de manière équilibrée à l'échelle de l'Union des mesures de lutte contre la criminalité tout en protégeant la liberté des particuliers et des opérateurs économiques et les droits que leur reconnaît la loi ;

- les formes graves de criminalité économique comportent de plus en plus d'aspects liés aux taxes et aux droits d'accises.

A. LE FONCTIONNEMENT DU FIDE

Ce dispositif a pour objet de permettre aux autorités qui effectuent une enquête douanière dans un État membre d'identifier les autorités compétentes dans les autres États membres susceptibles d'enquêter ou d'effectuer des contrôles au même moment sur les mêmes personnes, physiques ou morales.

Ce fichier devrait simplement permettre l'identification des enquêtes en cours, mais ne devrait pas renfermer d'informations précises sur les infractions commises ou susceptibles de l'être par des personnes suspectées ou recherchées.

Son but est essentiellement de permettre aux autorités douanières d'un Etat membre, qui enquêtent sur une personne physique ou morale, de déterminer si cette personne a déjà fait l'objet, ou fait actuellement l'objet, d'investigations de la part d'un service d'enquête d'un autre Etat membre.

En mai 2003, le Conseil des ministres de l'UE a donné le feu vert à la création du FIDE - fichier européen d'enquêtes douanières. Il s'agit d'une banque de données permettant aux fonctionnaires des douanes de vérifier si une personne ou une entreprise a déjà fait l'objet d'une enquête criminelle dans un quelconque Etat membre. L'Office européen anti-fraude (OLAF) est chargée d'élaborer ce fichier.

L'objectif du FIDE est d'améliorer l'efficacité des services répressifs des douanes et de la coopération entre les Etats membres de l'Union européenne dans la lutte contre la criminalité transfrontalière. Il devrait permettre aux fonctionnaires des douanes de vérifier en temps réel si une personne ou une société fait ou a fait l'objet d'une enquête dans un des États membres de l'UE et d'identifier les autorités compétentes qui doivent être contactées pour obtenir des informations supplémentaires. Ce système permettra aussi aux fonctionnaires d'un Etat membre d'être au courant d'enquêtes dans un autre État, et de modifier leurs actions en conséquence. Dans certains cas, il pourrait contribuer à identifier et appréhender des gangs criminels.

Les fonctionnaires des douanes pourront vérifier si une personne a fait l'objet d'une enquête criminelle dans un État membre. Ce sont les fonctionnaires des douanes dûment habilités qui seront chargés d'entrer des informations dans FIDE et de les mettre à jour.

Ne seront introduites dans le fichier que les données saisies à l'occasion d'une enquête après l'entrée en vigueur du protocole. Ainsi les données relatives aux enquêtes déjà closes ou celles obtenues dans le cadre d'une enquête encore en cours mais avant l'entrée en vigueur du protocole n'y figureront pas.

B. LA PROTECTION DES DONNÉES PERSONNELLES

Ces données seront introduites par les autorités compétentes des Etats membres, de façon séparée pour chaque personne physique ou entreprise sans lien entre elles. De plus, ne figureront dans cette base que les enquêtes relatives à une « infraction grave » aux lois nationales de chaque Etat membre, qui feront l'objet d'une liste. Cette liste ne comprendra que les infractions punies d'une peine privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'au moins 12 mois ou d'une amende maximale de 15 000 euros. L'ensemble des délits douaniers (dont les sanctions figurent aux articles 414 et 415 du code des douanes) relève de ces infractions graves.

Par ailleurs, afin de protéger les données personnelles, dans le respect des principes énoncés par la convention du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel et dans l'esprit des dispositions de la directive 95/46/CE sur la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel, seules certaines données à caractère personnel seront introduites dans le FIDE. Il s'agit de celles qui sont nécessaires à l'identification de la personne physique ou morale qui fait l'objet du dossier d'enquête, c'est-à-dire, pour les personnes physiques, les nom, nom de jeune fille, prénoms et noms d'emprunt, les date et lieu de naissance, la nationalité et le sexe, et, pour les entreprises, la raison sociale, le nom utilisé dans le cadre de leur activité, leur siège et leur identifiant TVA.

Toutes ces mesures relatives aux données personnelles ont un double avantage : elle permettent de ne pas trop encombrer le FIDE afin qu'il reste opérationnel et elles répondent largement aux préoccupations exprimées par le Parlement européen, à l'occasion de l'avis rendu le 18 décembre 2002.

C. L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU PROTOCOLE

Son délai a été évalué dans la fiche d'impact établie par le Gouvernement :

L'entrée en vigueur du protocole FIDE à la convention SID, est soumise à la notification au secrétariat général du Conseil de l'Union européenne de l'accomplissement, par au moins huit États membres, de leur procédure interne d'adoption du texte (article 2 du protocole). De plus, l'entrée en vigueur de ce Protocole est subordonnée à celle de la Convention SID (article 2.3).

Cette dernière condition n'est pas encore remplie dans la mesure où tous les États partie à la convention SID n'ont pas achevé leur procédure d'approbation : il manque encore la Belgique, qui vient d'entreprendre la procédure législative, et par ailleurs, et sans que cela ait d'incidence sur l'entrée en vigueur de ce texte, aucun des dix nouveaux États membres ne l'a encore ratifié.

Compte tenu de ces éléments, un délai d'une à deux années paraît raisonnable pour l'entrée en vigueur du protocole FIDE. Dans cet intervalle, la Direction générale des Douanes et Droits indirects, engagera devant la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la procédure de déclaration de cette nouvelle base de données.

CONCLUSION

Compte tenu du caractère essentiel de la lutte contre les fraudes douanières et de son aspect urgent lié à l'élargissement de l'Union européenne, votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa séance du 15 juin 2005.

A la suite de l'exposé du rapporteur, elle a adopté le projet de loi.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le gouvernement)

Article unique

Est autorisée l'approbation du protocole établi conformément à l'article 34 du traité sur l'Union européenne modifiant, en ce qui concerne la création d'un fichier d'identification des dossiers d'enquêtes douanières, la convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes, fait à Bruxelles le 8 mai 2003, et dont le texte est annexé à la présente loi 1 ( * ) .

* 1 Voir le texte annexé au document Assemblée Nationale n° 1860 (XIIe Législature)

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