B. UN OBJECTIF PRIORITAIRE : FAVORISER LA DIFFUSION DES PRINCIPES DE LA MAÎTRISE MÉDICALISÉE A L'HÔPITAL

L'instauration de la tarification à l'activité s'inscrit dans le cadre plus large du plan hôpital 2007, notamment avec la mise en oeuvre d'une nouvelle gouvernance hospitalière. Ce mouvement s'accompagne d'une série de réformes ou d'évolutions moins spectaculaires mais tout aussi importantes pour l'institution hospitalière, parmi lesquelles la diffusion des principes de la maîtrise médicalisée trouve sa place.

Il serait injuste de ne pas reconnaître les progrès réalisés par la communauté hospitalière dans ce domaine, notamment au travers des procédures d'accréditation déjà en vigueur, mais il convient aussi de souligner que la maîtrise médicalisée et les bonnes pratiques telles qu'on les diffuse dans le secteur ambulatoire n'ont pas encore trouvé leur place à l'hôpital.

La diffusion des principes de la maîtrise médicalisée à l'hôpital doit prendre deux formes.

La première est celle du contrôle médicalisé de l'activité des établissements de santé. Ce contrôle est légitime de la part de l'Etat et des organismes de sécurité sociale qui doivent pouvoir constater le bon usage des fonds publics.

La seconde concerne les modalités d'optimisation du système de soins retenues par la loi du 13 août 2004 (ALD, arrêts de travail) et les éléments de maîtrise médicalisée insérés dans la convention régissant les relations entre les médecins libéraux (prescription d'antibiotiques, de statines). Or, sous réserve d'ajustements nécessaires pour tenir compte des spécificités de la médecine hospitalière, rien ne justifie leur non-application à l'ensemble des consultations externes et des prescriptions effectuées à l'hôpital.

1. L'encadrement de l'activité et le contrôle de la réforme

Assurer le contrôle de la facturation des établissements de santé publics et privés est l'unique façon d'encadrer les pratiques des établissements en matière de facturation et d'éviter d'éventuelles dérives, abus ou gaspillages.

Cette mission pourra être assurée dans le cadre des textes législatifs et réglementaires existants. Toutefois, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 pourrait être mis à profit pour réviser ou compléter les textes actuels et confier à l'assurance maladie une responsabilité plus grande en matière de contrôle des prestations T2A.

a) Les procédures de contrôle des activités de médecine, chirurgie, obstétrique

La loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie (article 46) dispose qu'un programme de contrôle régional est établi par la commission exécutive de l'agence régionale d'hospitalisation (ARH). Cette commission, composée à parité de représentants de l'Etat et de représentants de l'assurance maladie, détermine la liste des établissements au sein desquels les médecins inspecteurs de santé publique ou les praticiens conseils des organismes d'assurance maladie réaliseront des contrôles sur pièces et sur place. En cas de non-respect de la réglementation, des sanctions financières peuvent être prononcées à l'encontre des établissements visés.

Ce programme de contrôle concerne l'ensemble des établissements de santé publics et privés de la région exerçant des activités de médecine, chirurgie, obstétrique, qu'il s'agisse d'hospitalisation complète ou d'alternatives à l'hospitalisation. Ces contrôles peuvent prendre la forme d'actions ciblées motivées par la découverte d'anomalies lors de la transmission de la facturation, de contrôles thématiques portant sur certains séjours, activités ou prestations (par exemple : passages aux urgences, soins palliatifs, médicaments remboursés en sus des groupes homogènes de séjour) ou d'un contrôle triennal systématique de tous les établissements.

Afin de mettre en oeuvre ce programme de contrôle, les pouvoirs publics se proposent d'instituer dans chaque ARH, une unité de coordination régionale (UCR).

Cette équipe technique serait composée de représentants des organismes d'assurance maladie et de représentants de l'Etat. Ces derniers constitueront au moins un tiers des membres de l'UCR.

Les UCR seront chargées de proposer le programme de contrôle régional, d'en suivre la réalisation et d'en établir le bilan. Les sanctions éventuelles seront prononcées par la commission exécutive de l'ARH.

Aujourd'hui, ce dispositif demeure incomplet en raison de la non-publication du texte réglementaire fixant le barème des sanctions prévues à l'article L. 162-22-18 du code de la sécurité sociale en cas de manquements aux règles de facturation, aux erreurs de codage ou à l'absence de réalisation d'une prestation.

Par ailleurs, le bon déroulement des opérations de contrôle nécessite que soit établie une frontière claire entre les activités de consultation externe et d'hospitalisation de jour afin d'éviter que les premières ne soient facturées sur la base d'un GHS.

Des aménagements aux modalités de contrôle existantes seront proposés par votre commission par voie d'amendement afin de faciliter les contrôles exercés par l'organisme payeur - à savoir l'assurance maladie. Il s'agira d'aménagements techniques, susceptibles de fluidifier les opérations de contrôle, de lever certaines imprécisions et dont l'objet n'est en aucun cas de remettre en cause l'équilibre des pouvoirs au sein de la communauté hospitalière.

b) La nécessité de développer d'autres formes de contrôle

Outre le non-respect de la réglementation spécifique à la tarification à l'activité, les pouvoirs publics et l'assurance maladie doivent être extrêmement vigilants sur d'autres risques qui peuvent survenir, comme des répercussions en termes d'organisation des soins, un rationnement des prestations fournies, une insuffisance de la régulation du système et notamment un risque de dépassement de l'Ondam.

L'analyse des expériences étrangères montre qu'un certain nombre de dérives sont possibles. La première d'entre elles réside dans l'éventualité que certains établissements pratiquent une sélection des risques pour ne prendre en charge que les pathologies ou les actes les plus rentables. Une telle orientation pourrait conduire à terme à une situation dans laquelle certains actes ou pathologies ne seront plus pris en charge dans certaines parties du territoire.

Il conviendra également d'apporter une attention particulière à l'éventualité d'une multiplication artificielle des actes ainsi qu'à d'éventuelles manipulations des codages destinés à obtenir une meilleure rémunération.

Enfin, il semble souhaitable de développer une plus grande régulation économique du système. Dans ce cadre, le suivi des dotations servies au titre des missions d'intérêt général et d'aides à la contractualisation (Migac), à la mise en oeuvre des orientations des schémas régionaux d'organisation des soins, à l'amélioration de la qualité des soins et à la mise en oeuvre de l'innovation médicale, doit être organisé.

Les dispositions de l'article 30 du présent projet de loi de financement, qui visent à encadrer le développement de l'activité des établissements, sont une première réponse à ces attentes.

Votre commission vous proposera des amendements qui permettent de renforcer les contrôles menés par l'assurance maladie

2. Les bonnes pratiques : un outil pour une meilleure articulation ville-hôpital

Entre 1998 et 2002, les prescriptions des professionnels de santé ont crû de 8,8 % par an en moyenne. Ces prescriptions peuvent être faites soit dans un cadre libéral (c'est le cas le plus fréquent et les professionnels à l'origine de ces prescriptions sont alors le plus souvent des médecins libéraux), soit par des professionnels de santé salariés (et il s'agit alors le plus souvent de médecins hospitaliers exerçant dans des hôpitaux placés sous dotation globale).

Le taux de croissance de la masse des prescriptions respectivement faites par les uns et les autres n'a pas été le même durant cette période : les prescriptions des médecins libéraux ont crû de 8,3 % par an ; celles des médecins exerçant leur activité au sein des établissements hospitaliers sous dotation globale, de 13,1 %.

Ces deux catégories de prescripteurs produisent à elles seules l'essentiel des prescriptions remboursées par le régime général : 93 % en 2002. Le reste est le fait, soit d'autres prescripteurs libéraux (chirurgiens-dentistes ou sages-femmes), soit de professionnels de santé salariés exerçant dans des établissements médico-sociaux ou dans des centres de santé, et beaucoup plus rarement en clinique privée.

Les prescriptions libérales et les prescriptions hospitalières diffèrent à la fois par leur structure et par leur rythme de croissance. Les pouvoirs publics et les partenaires conventionnels ont engagé des efforts pour optimiser ces prescriptions en fonction, d'une part, des nouvelles dispositions législatives prises dans le cadre de la réforme de l'assurance maladie, d'autre part, des recommandations de bonne pratique émises par la Haute Autorité de santé.

Les premiers résultats sont visibles dans le domaine des soins, notamment sur les prescriptions d'arrêts de travail ou d'antibiotiques. Il convient maintenant de faire entrer les médecins hospitaliers dans cette réforme.

a) Les prescriptions établies à l'hôpital

Sur pratiquement tous les postes concernés, le taux de croissance des prescriptions faites par des médecins salariés exerçant en établissement de santé sous dotation globale a été plus fort que celui de leurs confrères libéraux. Le seul poste qui fait exception à la règle est celui des indemnités journalières pour arrêt de travail : la croissance des prescriptions faites à l'hôpital y apparaît beaucoup plus modérée que celle des prescriptions faites en ville.

En sens inverse, la croissance des prescriptions de médicaments à l'hôpital (16,2 % par an en moyenne entre 1998 et 2002) est deux fois plus forte que celle des prescriptions de ville (7,4 %). Les prescriptions hospitalières de médicaments donnent souvent lieu à une délivrance de ces médicaments en pharmacie hospitalière, alors que c'est beaucoup plus rarement le cas pour les prescriptions de médicaments faites en cabinet de ville. Or, on sait que, au cours des trois dernières années, ce type de délivrance, appelée rétrocession hospitalière, a crû au rythme d'environ 25 % par an.

Le montant remboursé pour les seules prescriptions des établissements hospitaliers sous dotation globale s'est élevé à près de 5,3 milliards d'euros en 2002 et a augmenté de 13,5 % par rapport à 2001.

Face à une telle situation, les pouvoirs publics ont souhaité disposer d'outils favorisant le développement des bonnes pratiques à l'hôpital .

Pour ce faire, l'article 13 de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie dispose que des accords-cadres peuvent être conclus entre les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, l'Uncam et les fédérations nationales représentatives des établissements de santé en vue d'améliorer les pratiques hospitalières. Cette disposition d'ordre général vient compléter une première mesure concernant les médicaments facturés en sus d'un GHS et pour lesquels un dispositif spécifique de bonne conduite a également été établi.

b) Le cas particulier des médicaments

Le secteur du médicament est le domaine dans lequel l'application de la contractualisation voulue par les pouvoirs publics va trouver sa première application.

Tout d'abord avec la conclusion de contrats de bon usage pour les médicaments visés à l'article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale. A la suite de la publication du décret n° 2005-1023 au Journal officiel du 26 août 2005 ces contrats doivent être négociés entre les établissements de santé et les ARH avant le 1 er janvier 2006.

La conclusion de ces conventions, pour lesquelles une annexe du décret prévoit un contrat type, concerne la prescription des médicaments et des produits de santé facturés en sus d'un GHS. Ces médicaments figurant sur une liste arrêtée par le ministre chargé de la santé sont des médicaments coûteux . La signature d'un tel contrat est indispensable pour que les établissements puissent bénéficier d'une prise en charge à 100 % du prix des médicaments concernés.

Ces médicaments font l'objet d'une seconde mesure de régulation financière dans le projet de loi de finances pour 2006 qui prévoit que le comité économique des produits de santé pourra décider de baisser le prix public de ces médicaments en cas d'une trop forte progression de leur chiffre d'affaires.

Ensuite avec le déploiement des accords-cadres prévus par l'article L. 6113-13 du code de la santé publique.

Un premier accord est effectivement intervenu récemment afin de promouvoir le bon usage des antibiotiques dans les établissements de santé en vue d'améliorer la prescription et de préserver leur efficacité.

Cet accord se fonde sur le référentiel d'accréditation établi par la Haute Autorité de santé et se fixe un objectif de réduction de 10 % de la consommation des antibiotiques dans les établissements de santé au cours des trois ans à venir.

Les partenaires de ce premier accord envisagent de conclure prochainement d'autres conventions portant sur le bon usage des statines ou sur les transports sanitaires.

Ces accords-cadres permettent d'associer les établissements de santé au développement de la maîtrise médicalisée des dépenses. Les accords-cadres conclus ou envisagés reprennent des problématiques communes à la médecine de ville et aux soins hospitaliers. Il est devenu indispensable que les établissements, pour la part de leur activité qui est concernée, s'engagent dans de telles dispositions déjà en vigueur pour les soins de ville.

Cette situation est source d'interrogations puisque la loi du 13 août 2004 prévoit que les professionnels de santé peuvent être associés à la négociation. Le texte réglementaire nécessaire à l'application de cette mesure n'a toutefois pas été publié.

A ce stade, votre commission rappelle son attachement à une mesure simple, et susceptible de favoriser la diffusion de la maîtrise médicalisée des dépenses qu'elle a proposée dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 : l'identification individuelle des médecins hospitaliers afin de connaître précisément les prescripteurs lors de la délivrance des soins. Elle a bien noté que l'annexe 3 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 indique qu'un répertoire sera opérationnel dans le courant du premier semestre 2006. Elle sera attentive à la mise en oeuvre de cette disposition.

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