MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L'ETAT » M. Henri de Raincourt, rapporteur spécial

La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » est l'une des innovations résultant de la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) . Dans la loi n° 2004-1484 de finances pour 2005 du 30 décembre 2004, adoptée sous l'empire de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959, les crédits de cette mission relevaient, dans le budget général, du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Cette mission est désormais composée de trois programmes : le programme 108 « Administration territoriale », le programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative » et le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ».

La loi de finances initiale pour 2005 dotait les chapitres relevant de l'actuelle mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » de 2.289,54 millions d'euros.

Au sein de cette mission, le programme 108 « Administration territoriale » occupe une place prépondérante , absorbant 72 % des crédits de paiement. Les programmes 232 « Vie politique, cultuelle et associative » et 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » représentent, respectivement, 7 % et 21 % des crédits de paiement de la mission.

Année de transition entre l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959 et la LOLF, 2006 est aussi une année charnière pour l'examen de l'exécution des crédits de cette mission, qui n'apparaissent pas en tant que tels dans le projet de loi de règlement soumis à votre adoption et présenté selon les règles édictées par l'ordonnance organique de 1959.

La difficulté de votre rapporteur spécial a, ainsi, résidé dans un effort pour parvenir à identifier et à isoler ces crédits. Ce travail de retraitement des données s'est, notamment, appuyé sur la définition de clefs de passage entre les chapitres et les programmes, élaborées en 2004 pour les pré-projets annuels de performance (pré-PAP) et « retravaillées » en 2005 lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2006 pour les crédits hors titre 2 (dépenses de personnel).

A cet égard, votre rapporteur spécial tient à remercier le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, ainsi que ses services, pour l'aide méthodologique précieuse qui lui a été apportée.

Votre rapporteur spécial examinera, tout d'abord, les principales caractéristiques de l'exécution budgétaire en 2005 des crédits se rapportant à l'actuelle mission « Administration générale et territoriale de l'Etat ». Il présentera, ensuite, l'état de la mise en oeuvre de la réforme budgétaire et comptable, amorcée dès 2000 par la globalisation des moyens des préfectures.

I. LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DE L'EXÉCUTION BUDGÉTAIRE EN 2005

Afin de faciliter l'étude de l'exécution budgétaire en 2005, votre rapporteur spécial a jugé utile de porter à votre connaissance les principaux éléments budgétaires relatifs à l'exercice 2005 selon deux modes de présentation.

Le premier (tableau A) s'inscrit dans la logique de l'ordonnance organique de 1959, tandis que le second (tableau B) préfigure la « logique lolfienne ».

Source : ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire

Source : ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire

Source : ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire

A. LE PÉRIMÈTRE DE LA MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L'ÉTAT » EN MODE LOLF

La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » recouvre les trois programmes suivants :

- le programme « Administration territoriale » (108) renvoie aux moyens alloués à l'ensemble des préfectures et des sous-préfectures ;

- le programme « Vie politique, cultuelle et associative » (232) comporte les crédits liés au financement de la vie politique (organisation des élections, prise en charge des dépenses de campagnes électorales, aide publique aux partis et groupements politiques). Il correspond, également, à la mise en oeuvre de la loi sur la séparation des Eglises et de l'Etat . Enfin, il concerne l'application des textes sur la liberté d'association ;

- le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » (216) a pour objet les moyens logistiques de plusieurs missions pilotées ou copilotées par le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Le secrétaire général du ministère est le responsable de ces programmes.

B. UN TAUX DE CONSOMATION DES CRÉDITS DE 101,4 % REFLÉTANT LE POIDS DES FRAIS DE CONTENTIEUX

1. 2.289,54 millions d'euros de crédits de paiement

Les crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale (LFI) pour 2005 s'élevaient à 2.289,54 millions d'euros .

Après rattachement des reports de crédits de l'année 2004, soit 106,9 millions d'euros , des fonds de concours, soit 14,34 millions d'euros, des transferts de crédits , soit - 541,56 millions d'euros , des répartitions de crédits, soit 7,27 millions d'euros, des gels, soit - 29,65 millions d'euros, des dégels, soit 27,8 millions d'euros, des annulations, soit - 43,93 millions d'euros, des décrets de virement, soit 2,51 millions d'euros, et d'une augmentation de crédits adoptée en loi de finances rectificatives pour 2005, soit 1,84 millions d'euros, le total net des crédits disponibles se montait à 1.920,94 millions d'euros .

2. 1.947,42 millions d'euros de dépenses effectives et un taux de consommation des crédits de 101,4  %

Les dépenses effectives pour 2005 ont, pour leur part, atteint 1.947,42 millions d'euros .

Le taux de consommation des crédits disponibles ressort, ainsi, à 101,4 %. Au-delà de problèmes méthodologiques liés à l'utilisation de clefs de répartition pour permettre le passage en mode LOLF, ce résultat s'explique par le poids du chapitre évaluatif 37-91 (Frais de contentieux et réparations civiles), dont l'exécution a été de 136,3 millions d'euros pour des crédits disponibles de 81,8 millions d'euros, soit un taux de consommation de ces crédits de 166,6 %.

Ces crédits de contentieux , gérés par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques, sont traditionnellement sous-évalués . Ainsi, en 2004, le dépassement enregistré s'était déjà élevé à 39 millions d'euros (54,3 millions d'euros en 2005). Evaluatifs jusqu'en 2005, ces crédits acquièrent, sous l'empire de la LOLF, un caractère limitatif. De ce fait, leur sous-évaluation systématique contribue à fragiliser, pour l'avenir, le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ».

Comme l'a, certes, souligné la Cour des comptes dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l'Etat pour l'exercice 2005, le respect des prévisions budgétaires est d'autant plus difficile à assurer, en la matière, que 90 % de ces dépenses sont déconcentrées, comme par exemple l'indemnisation des bailleurs lorsque la force publique refuse son concours pour expulser des bailleurs.

Toutefois, face à la judiciarisation croissante de la société et à la dynamique du contentieux qui en résulte inévitablement, votre rapporteur spécial estime nécessaire une meilleure maîtrise de ces dépenses, notamment par une plus grande anticipation et une appréciation plus fine des besoins et des coûts d'instruction des dossiers. Il attend, à cet égard, les conclusions du rapport diligenté, dans le cadre de la deuxième vague d'audits de modernisation, par le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, sur l'indemnisation des refus de concours de la force publique.

Hors chapitre 37-91 (Frais de contentieux et réparations civiles), le taux de consommation des crédits de la mission s'établit à un niveau satisfaisant de 98,5 %.

C. DES MOUVEMENTS DE CRÉDITS MARQUÉS PAR LE TRANSFERT DES CRÉDITS RELATIFS AUX PENSIONS

1. Les transferts de crédits

L'examen des mouvements de crédits sur l'exercice 2005 fait ressortir l'importance des transferts de crédits dont le montant est estimé à 541,56 millions d'euros .

Les deux principaux mouvements, à l'origine de ce niveau élevé (23,7% des crédits ouverts en loi de finances initiale), concernent le transfert, systématique en début d'exercice, vers le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, des crédits relatifs aux pensions, soit respectivement 532,81 millions d'euros (en provenance du chapitre 32-97, régime général) et 9,15 millions d'euros (en provenance du chapitre 32-92, fonds spécial des ouvriers de l'Etat).

2. L'organisation du référendum sur le projet de Constitution européenne

La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » est, par ailleurs, tributaire, au cours de l'exercice budgétaire, des circonstances politiques et des décisions prises en matière d'organisation de scrutins et d'élections, via le programme « Vie politique, cultuelle et associative ».

Tel a été le cas, en 2005, avec l'organisation du référendum sur le projet de Constitution européenne (29 mai 2005). Pour assurer le financement de cette opération, un décret d'avance a été pris, le 29 avril 2005, à hauteur de 85,87 millions d'euros.

3. La loi de finances rectificative pour 2005 et les frais de contentieux

Le chapitre 37-91 (Frais de contentieux et réparations civiles) a fait l'objet d'un abondement à hauteur de 1,84 million d'euros, en loi de finances rectificative (loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005), du fait du déficit creusé par les frais de contentieux. Cette ouverture a été gagée, à due concurrence, sur d'autres crédits du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

4. 106,9 millions d'euros de reports de crédits

Les reports de crédits de 2004 sur 2005 se sont élevés à 106,9 millions d'euros et ont visé à honorer les charges incompressibles , constatées au terme de l'exercice 2004 et n'ayant pas pu être honorées sur l'exercice de référence compte tenu, notamment, de la régulation budgétaire intervenue en cours de gestion 2004. En particulier, le report de ces crédits était indispensable pour solder les dépenses relatives aux élections organisées en 2004.

Les reports de crédits de 2005 sur 2006 se sont élevés à 13,4 millions d'euros . Sur tous les chapitres relevant en tout ou partie de la mission «Administration générale et territoriale de l'Etat », l'objectif de report était fixé à 3 % au maximum des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2005. Il s'agissait ainsi de respecter, par anticipation, le nouveau plafond des possibilités de report en crédits de paiement définis par la LOLF . Un tel objectif, respecté à une exception près 6 ( * ) , était relativement ambitieux dans certains domaines, notamment dans le secteur des systèmes d'information, où l'activité est marquée par un rythme de dépense sur deux ans (engagement une année, paiement l'année suivante).

II. UNE MISE EN OEUVRE DE LA LOLF PRÉPARÉE GRÂCE À L'EXPÉRIENCE DE GLOBALISATION DES MOYENS DES PRÉFECTURES MENÉE DEPUIS 2000

Initiée en 2000, la globalisation des moyens des préfectures a permis au ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire d'anticiper la mise en oeuvre de la LOLF dans le cadre de la mission «Administration générale et territoriale de l'Etat ». A ce titre, le ministère fait figure de précurseur parmi les administrations.

Pour autant, son adaptation à la LOLF mérite d'être poursuivie, notamment dans le sens d'une plus grande efficacité encore du contrôle de la gestion .

Cet effort soutenu en vue de l'amélioration du contrôle de la gestion sera le meilleur gage d' une juste mesure de la performance au sein de cette mission, de nombreux chantiers conduits en 2005 restant encore ouverts.

A. L'AVANCE PRISE GRÂCE À LA GLOBALISATION DES MOYENS DES PRÉFECTURES

1. Une entrée en vigueur progressive depuis 2000

Dès 2000, le ministère a engagé une remise à plat de la gestion des préfectures . Fondée sur la globalisation des crédits, cette expérimentation s'est inscrite dans une démarche de contractualisation « objectifs-moyens-résultats », en contrepartie d'une plus grande souplesse dans l'emploi des crédits et la gestion des effectifs.

Les principes de cette réforme visaient à :

- aboutir à une plus grande responsabilisation du préfet, en lui offrant la possibilité d'assurer une meilleure adéquation entre les moyens et les missions, notamment grâce au développement du dialogue social et à la réorganisation des structures de gestion ;

- permettre un véritable dialogue de gestion entre l'administration centrale et la préfecture ;

- instaurer un contrôle de gestion, avec des résultats accessibles à l'ensemble des responsables afin de rendre possible la comparaison entre les préfectures.

L'entrée en vigueur de cette réforme en profondeur du mode de gestion des préfectures a été progressive. Alors que quatre préfectures avaient été concernées par cette expérimentation en 2000, trente trois l'étaient en 2003, et, le 1 er janvier 2004, la globalisation des crédits a été généralisée .

2. Les nouvelles règles de gestion des préfectures : une dotation unique, garantie et fongible

La globalisation des moyens a permis aux préfectures de s'acclimater aux règles imposées par la LOLF . Chaque préfecture dispose, en effet, d'une dotation unique englobant les moyens nécessaires à son activité. Cette dotation est garantie et fongible. Son emploi est encadré par des règles de plafonds.

La gestion des préfectures « sous la globalisation »

La composition de la dotation globale a été fixée par une instruction conjointe intérieur/finances du 25 septembre 2003 relative à la généralisation de la globalisation des crédits de rémunération et de fonctionnement des préfectures pour les années 2004 et 2005.

La dotation globale se compose de deux sous-ensembles :

? les crédits relatifs à la prise en charge des personnels entrant dans le périmètre de la globalisation (rémunérations d'activité et charges sociales);

? les crédits de fonctionnement qui intègrent les crédits de fonctionnement courant et les crédits de maintenance immobilière, qui figuraient auparavant dans le programme régional d'équipement (PRE).

Toutefois, la dotation globale ne prend pas en compte les crédits relatifs :

? aux rémunérations de certains agents qui restent hors du périmètre de la globalisation et des agents d'autres administrations ou collectivités mis à disposition des préfectures ;

? aux pensions civiles ;

? aux prestations sociales;

? aux dépenses d'informatique et de transmissions relatives aux applications nationales, dont l'emploi relève de la direction des systèmes d'information et de communication ;

? aux dépenses liées à l'organisation des élections ;

? aux frais de contentieux et de réparations civiles, qui couvrent la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat, la défense et assistance des fonctionnaires et le paiement des rentes d'accident de travail ;

?aux dépenses d'investissement immobilier, qui relèvent d'une programmation centrale au travers le programme national d'équipement (PNE) gérée par la direction de l'évaluation de la performance et des affaires financières et immobilières.

Le montant de la dotation a été notifié à chaque préfecture pour les deux années du « contrat » de globalisation (2004 et 2005). En outre, l'instruction conjointe du 25 septembre 2003, a fixé une norme de progression de la dotation globale d'une année sur l'autre (+0,2 %). Ce taux de progression a été appliqué dès 2004.

95 % de la dotation sont délégués en début d'année, les 5 % restant le sont au plus tard le 15 septembre.

L'instruction conjointe intérieur/finances du 25 septembre 2003 autorise une fongibilité asymétrique des crédits au niveau du chapitre 37-30 (dotation globalisée des préfectures) : les crédits inscrits sur l'article 10 (crédits de rémunération) en LFI ne peuvent être abondés en cours d'année. Par contre, les crédits inscrits sur l'article 20 peuvent l'être en gestion.

Par ailleurs, les crédits de chaque préfecture sont totalement fongibles : chacune d'entre elles peut procéder à des transferts de crédits de rémunération vers les crédits de fonctionnement, mais également des transferts de crédits de fonctionnement vers les crédits de rémunération. La préfecture a donc la possibilité d'ajuster sans délai l'allocation des moyens aux priorités définies localement.

L'administration centrale est chargée d'assurer un pilotage permettant de concilier la fongibilité symétrique au niveau de chaque préfecture, avec une fongibilité asymétrique au niveau du chapitre 37-30 : les préfectures doivent l'informer des mouvements de crédits entre les deux articles. Pour exécuter les transferts de crédits de fonctionnement vers les crédits de rémunération, les préfectures doivent attendre un délai de 15 jours après l'information de l'administration centrale, le silence de celle-ci valant autorisation.

Le dispositif permet donc de concilier la souplesse de gestion laissée à l'échelon déconcentré et le principe de la fongibilité asymétrique prévu dans le cadre de l'application de la LOLF au niveau de chaque programme.

Le caractère asymétrique de la fongibilité est, par ailleurs, garanti par l'existence de plafonds encadrant l'utilisation des crédits.

La notification à chaque préfecture de sa dotation globale est accompagnée d'une notification d'un double plafond :

- un plafond d'emplois (en équivalent temps rémunéré) ;

- un plafond de masse indiciaire.

Les contrôleurs financiers déconcentrés veillent à ce que ces plafonds ne soient jamais dépassés. Pour formuler une demande de recrutement d'un agent (par mutation, détachement ou concours), la préfecture doit vérifier que la disponibilité en emplois et en masse indiciaire est suffisante compte tenu de ses plafonds.

B. LA NÉCESSAIRE POURSUITE DE L'ADAPTATION À LA LOLF, NOTAMMENT EN VUE D'UN CONTRÔLE DE GESTION PLUS EFFICACE

1. Une mission hétérogène à la recherche de sa cohérence

La mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » présente une double hétérogénéité : financière et en termes de contenu.

L'hétérogénéité financière se traduit par un déséquilibre manifeste du poids respectif des programmes au sein de la mission. Le programme « Administration territoriale » occupe une place prédominante avec 72 % des crédits de la mission. En comparaison, le programme « Vie politique, cultuelle et associative » ne représente que 7 % des crédits de cette même mission, le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » tenant, pour sa part, une position intermédiaire avec 21 % des crédits.

L'hétérogénéité de contenu (préfectures, financement de la vie politique, mise en oeuvre de la loi sur la séparation des Églises et de l'État, application des textes sur la liberté d'association, moyens logistiques...) traduit la volonté de calquer l'architecture de la mission sur l'organisation ministérielle existante, au risque de faire en pratique de cette mission une mission « fourre-tout ».

En particulier, comme le soulignait votre rapporteur dans son rapport spécial sur les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat », pour la loi de finances pour 2006, le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » ne comprend qu'une minorité de crédits se rapportant directement aux deux autres programmes de la mission. Ainsi, plus qu'un programme « Soutien » de la mission, il renvoie à la conduite et au pilotage de l'ensemble du ministère.

Votre rapporteur spécial juge qu'il conviendrait donc, pour les prochains exercices, que le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » « colle » mieux à la mission à laquelle il appartient , plutôt que d'être conçu en fonction d'un ministère, dont le périmètre évolue d'ailleurs régulièrement (agrégation de l'aménagement du territoire en juin 2005, par exemple).

L'architecture de cette mission peut, également, amener à conduire une reconfiguration de la structure et de l'organisation ministérielle , afin d'en garantir la cohérence. Ainsi, la création d'un secrétariat général, en janvier 2004, a-t-elle rendu possible une plus grande unité d'approche, en 2005, de cette mission, dès lors que le secrétaire général assume la responsabilité unique de ces trois programmes. Une telle rationalisation de l'organisation du ministère, propice à une plus grande cohérence de la mission, mérite d'être poursuivie.

2. Le nombre élevé de budgets opérationnels dans le programme « Administration territoriale » rend essentiel le dialogue de gestion

Les crédits du programme « Administration territoriale » sont répartis entre un budget opérationnel de programme (BOP) national et 102 BOP départementaux , soit un par préfecture.

Dans cette perspective, l'apport de la préfecture de région est particulièrement limité, alors que le niveau régional correspond à un niveau stratégique dans la mise en oeuvre des politiques publiques.

Ce constat est d'autant plus regrettable que les BOP départementaux ne disposent pas, dans de nombreux départements, des marges de manoeuvre suffisantes pour véritablement pouvoir faire jouer la fongibilité des crédits.

Dans ce contexte, comme l'a également relevé la Cour des comptes dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l'Etat pour l'exercice 2005, votre rapporteur spécial estime qu'une meilleure prise en compte de l'échelon régional, dans le dialogue de gestion, peut être le moyen de gagner un degré de souplesse supplémentaire dans la gestion des crédits dédiés aux préfectures .

D'une manière plus générale, le grand nombre de BOP départementaux peut être à l'origine de difficultés dans leur suivi. Un projet de charte de gestion , définissant les éléments de pilotage et de dialogue de gestion entre l'administration centrale, et notamment la direction de la modernisation de l'administration territoriale (DMAT), et les préfectures, a été étudié, en 2005, par les services du ministère.

Votre rapporteur spécial considère cette charte de gestion utile et suivra avec attention les développements qui seront donnés à ce projet .

3. La nécessité de mettre en place des outils de contrôle de gestion efficaces

Comme le rappelait votre rapporteur spécial dans son rapport à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, « l'objet principal (de la LOLF) consiste à remplacer une culture de moyens (« un bon budget est un budget qui augmente ») par une culture du résultat ( « un bon budget est celui qui permet d'atteindre des objectifs préalablement définis » ) ». Cette culture du résultat ne peut être atteinte que par la mise en place d'outils efficaces de contrôle de gestion.

A titre d'exemple, l'exercice 2005 a été marqué par la poursuite de l'effort porté sur une meilleure organisation de la fonction achat , la rationalisation et la mutualisation de certaines prestations, dont les effets se sont, notamment, fait sentir au niveau du programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ».

Quelques exemples de gestion plus efficace

? L'organisation des déplacements des fonctionnaires en mission a été confiée, après appel d'offres, à un voyagiste. Cette initiative a permis au ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire de réaliser des économies substantielles, d'une part, en obtenant la restitution des commissions versées au voyagiste par les prestataires (compagnies aériennes, hôtels...) à hauteur de 1 million d'euros en 2004 et de 0,7 million d'euros en 2005, et, d'autre part, en réduisant le coût de la billetterie aérienne de 19 millions d'euros en 2004 et de 14 millions d'euros en 2005.

? La rationalisation des achats, engagée en 2005, s'est traduite par la création de quatre pôles se répartissant l'essentiel des achats de services :

- la direction des systèmes d'information et de communication (DSIC) pour la téléphonie et l'informatique;

- la direction de la défense et de la sécurité civiles (DDSC) pour les moyens aériens (en liaison avec le ministère de la défense);

- la direction de l'administration de la police nationale (DAPN) pour l'ensemble des équipements spécifiques à la police (habillement, arme, munition...), les véhicules et le carburant;

- la direction de l'évaluation de la performance et des affaires financières et immobilières (DEPAFI) pour le mobilier, le matériel de bureau, la reprographie et la fonction voyagiste.

Seul le marché des transports, au sein de cette nouvelle politique d'achat, concernait, en 2005, les préfectures. Aussi votre rapporteur spécial estime-t-il nécessaire la poursuite de l'intégration du réseau des préfectures dans ce dispositif.

4. Le souci de mesurer de l'impact financier et organisationnel des projets conduits par la direction des systèmes d'information et de communication (DSIC)

L'enracinement d'une véritable culture de gestion au sein du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire passe, également, par l'évaluation systématique de l'impact financier et organisationnel des projets en cours, en particulier ceux conduits par la direction des systèmes d'information et de communication (DSIC).

Dans les préfectures, en plus des gains de productivité consécutifs à la globalisation des crédits, la mise en oeuvre de la directive nationale d'orientation (DNO) pourrait se traduire par des économies substantielles et des besoins de réorganisation de certains services, du fait des retombées des projets portant sur l'identité nationale électronique sécurisée (INES) et sur le système d'immatriculation des véhicules (SIV) .

Certes, dans un premier temps, le développement de ces projets génère des coûts, et les impacts positifs attendus ne devraient pas être perceptibles avant la montée en charge, prévue à partir de 2008-2009. Toutefois, ces projets d'envergure feront sentir leurs effets non seulement en termes d'économies directes, mais aussi en matière d'emplois. Ils auront aussi une incidence sur le plan immobilier, à travers la réduction des surfaces occupées par les missions concernées. Ils contribueront, enfin, à réduire les coûts liés à la fraude et estimés, pour ce qui concerne l'identité, à 2 milliards d'euros par an (transports, escroqueries diverses, sécurité sociale...).

C. LA MESURE DE LA PERFORMANCE RESTE EN CHANTIER

Pendant du contrôle de la gestion, la mesure de la performance est le second volet de l'innovation apportée par la LOLF à la gestion publique. Au sein de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat », comme dans le cadre des autres missions de l'Etat, elle constitue un enjeu essentiel pour la réussite de cette réforme.

L'importance accordée, au cours de l'exercice 2005, à la mise en application des nouvelles règles de procédure budgétaire imposées par la LOLF était, assurément, légitime. Néanmoins, elle a pu parfois avoir pour conséquence de faire passer au second plan l'aspect « performance ».

1. Les inconvénients d'une multiplicité d'indicateurs

Dans le cadre de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat », le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire bénéficie de l'antériorité, des objectifs et des indicateurs relatifs à l'activité des préfectures existant déjà de longue date. Toutefois, cette antériorité, par la pesanteur des habitudes qu'elle induit, peut également se révéler un handicap dans la perspective de l'adaptation à la mesure de la performance, telle que recherchée par la LOLF .

Le foisonnement d'indicateurs existants et se rapportant à l'activité des préfectures a parfois freiné la réflexion propre aux indicateurs de performance introduits par la LOLF.

En particulier, au sein du programme « Administration territoriale », votre rapporteur spécial regrette l'absence d'objectif pour l'action « Pilotage territorial des politiques gouvernementales » . Un tel objectif pourrait pourtant permettre de mesurer la performance des préfectures dans leurs nouvelles attributions budgétaires. En effet, conformément au décret n° 2004-374 du 29 avril 2004, le préfet intervient dans l'élaboration des BOP des services déconcentrés de son territoire par un avis sur le projet de budget, la délégation de signature et le suivi de la performance. L'article 22 du décret précité fait même de lui le « le garant de la mesure des résultats ».

La multiplicité d'indicateurs à renseigner peut, par ailleurs et paradoxalement, constituer un frein à la mesure de la performance elle-même . Pour se limiter aux indicateurs mentionnés par le projet annuel de performances (PAP) 2006, nombre d'indicateurs ne se sont pas renseignés sur l'exercice 2005 : 7 sur 12 pour le programme « Administration territoriale », 2 sur 5 pour le programme « Vie politique, cultuelle et associative », et 5 sur 13 pour le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur ».

Cette absence de renseignements s'expliquent par des raisons diverses : dispositif de remontée des informations mis en place n'ayant pas permis d'aboutir à des résultats significatifs pour 2005 (par exemple, délai moyen de traitement des données en matière de défense de l'Etat, dans le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur »), changement de périmètre de l'indicateur entre 2004 et 2005 (par exemple, taux de prévention des risques naturels, dans le programme « Administration territoriale »), absence de valeur chiffrée dans le PAP 2006 (par exemple, pourcentage de comptes rejetés, dans le programme « Vie politique, cultuelle et associative »)... L'indicateur relatif au délai séparant la remise des comptes des partis et groupements politiques et la date de transmission au journal officiel (programme « Vie politique cultuelle et associative ») ne fait, pour sa part, l'objet d'aucun commentaire explicatif de l'absence de renseignement.

La multiplicité des indicateurs à nourrir peut, en outre, faire craindre l'émergence d'une « bureaucratie lolfienne », dont l'unique mission serait de remplir des tableaux de bord toujours plus denses.

Même si 2005 peut être considéré comme une année de transition et que, par ailleurs, aucune obligation légale ne pesait sur les services du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire pour cette exercice (les prescriptions de la LOLF en matière de performance ne valant qu'à compter de l'exercice 2006), votre rapporteur spécial forme le voeu que ces indicateurs de performance soient effectivement renseignés pour le projet de loi de règlement pour 2006 .

2. La fongibilité asymétrique des crédits au service de la récompense de la performance

Nouveauté introduite par la LOLF, la fongibilité asymétrique des crédits est un instrument de souplesse, à la disposition du gestionnaire pour optimiser l'emploi des crédits. A ce titre, elle représente un levier en faveur de la récompense de la performance des équipes, les marges dégagées en fin d'année permettant, par exemple, des abondements indemnitaires tenant compte des indicateurs de performance.

En matière de fongibilité, la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » présente une spécificité : dans les BOP départementaux il est possible, à titre exceptionnel, de transférer des crédits de fonctionnement vers des crédits de personnel . Le respect de l'asymétrie est alors contrôlé, au niveau du programme « Administration territoriale », par les services centraux de la direction de la modernisation de l'administration territoriale (DAMT) qui délivrent une autorisation préalable.

Les montants transférés au niveau local, par les préfectures, au titre de la fongibilité se sont élevées à 0,35 million d'euros des crédits de fonctionnement vers les crédits de personnels (fongibilité inversée, à laquelle il était possible de recourir avant la LOLF) et à 12,26 millions d'euros des crédits de personnel vers le fonctionnement , le solde positif des mouvements de crédits de personnel vers le fonctionnement garantissant le caractère asymétrique de la fongibilité à l'échelle du chapitre 37-30.

Sous l'influence de la fongibilité et à l'aune de la globalisation des crédits, une approche plus stratégique s'est mise en place dans les préfectures, impliquant la refonte des organigrammes avec la création d'une direction unique des « moyens et de la logistique » , regroupant les fonctions budgétaires et celles des ressources humaines.

Votre rapporteur spécial considère que la récompense de la performance constitue l'une des conditions de la réussite de la mise en oeuvre de la LOLF au sein de la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat » . Aussi souhaite-t-il que l'outil de la fongibilité soit, dans le prolongement de l'exercice 2005, utilisé, autant que possible, pour encourager l'adhésion des personnels à la réforme budgétaire et comptable, sans quoi cette dernière pourrait abusivement être assimilée à une politique de restriction budgétaire pure et simple.

* 6 Seul le chapitre 67-50 (Subvention d'équipement aux collectivités pour les constructions publiques) a été déplafonné en reports, mais ce déplafonnement n'a pas bénéficié à la mission « Administration générale et territoriale de l'Etat », le seul article du chapitre concernant la mission étant de faible montant.

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