III. L'« AGENCISATION DE L'ETAT » : FACILITÉ OU NOUVEAU MODE DE GESTION ?

Les interrogations actuelles sur un recours, considéré par certains observateurs comme abusif, et de pure opportunité budgétaire, conduit votre rapporteur général à mettre en perspective l'évolution en cours, celle d'une externalisation des compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales, les organismes de sécurité sociale, et de nouvelles « agences » . Cette évolution apparaît positive, dès lors que toutes les conséquences en matière de finances publiques en sont tirées.

A. LES RISQUES ACTUELS : CONTOURNER LA NORME DE DÉPENSE PAR L'AFFECTATION DE RECETTES ET LA DÉPENSE FISCALE

De manière conjoncturelle, le volume des changements de périmètre proposés en matière de recettes dans le présent projet de loi de finances pour 2007 a conduit certains observateurs, en retour, à douter de la portée et de l'effectivité de la norme de dépense.

Les changements de périmètre en recettes, liées pour l'essentiel à des transferts à des agences, à la sécurité sociale ou aux collectivités territoriales, sont parfaitement présentées dans l'annexe « voies et moyens » du projet de loi de finances. Ces mesures de périmètre (- 2.407 millions d'euros) concernent pour plus des deux tiers les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale.

Mesures de périmètre en recettes et transferts de recettes

(en millions d'euros)

Non fiscal

Fiscal

Transfert aux collectivités territoriales

Transfert de TIPP aux régions

-477,5

Transfert de taxe sur les conventions d'assurance

-649,7

Transfert supplémentaire du produit des droits tabac à la sécurité sociale

-480,0

Affectation du reliquat de la taxe de francisation des navires au conservatoire du littoral

-7,0

Transfert d'une partie de la CSB à l'ANR

-825,0

Transfert d'une partie de la CSB à OSEO

-130,0

Transfert de la taxe sur les installations nucléaires de base à l'institut de recherche de la sécurité nucléaire

-6,0

Affectation pour partie des droits de timbre sur les passeports sécurisés à l'Agence Nationale des titres sécurisés (ANTS)

-45,0

Supplément de taxe sur les salaires provenant des programmes « Vie de l'élève » (mission « Enseignement scolaire » et « Patrimoine » (personnel de la BNF de la mission  « Culture »

+10,1

Régime de TVA des EPIC de recherche

-12,8

Généralisation des loyers budgétaires

278,4

Majoration des recettes affectées au centre national de développement du sport

-20,0

Affectation d'une partie du prélèvement de solidarité sur l'eau au conseil supérieure de la pêche

-23,0

Modification de la répartition de la taxe sur l'aviation civile entre le budget général et le budget général et le budget annexe « Contrôle et exploitations aériens »

-19,7

Total

215,8

-2.622,9

Source : annexe « voies et moyens » du projet de loi de finances pour 2007

Certains transferts de recettes sont réalisés en-dehors du projet de loi de finances : le projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2006-1048 du 25 août 2006 relative aux sociétés anonymes coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété (SACI) a ainsi prévu un prélèvement de 500 millions d'euros (premier versement de 350 millions d'euros en octobre 2006, second versement de 150 millions d'euros en 2007) sur les SACI affectés directement pour 100 millions d'euros à l'ANRU, 250 millions d'euros à la Caisse des dépôts et consignations et 150 millions d'euros à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale pour le financement des aides au logement (l'affectataire final sera le Fonds national d'aide au logement).

1. La substitution des dépenses fiscales à la dépense budgétaire

a) La dépense fiscale, alternative commode à la dépense budgétaire

Si la préférence du gouvernement actuel (exemple du prêt à taux zéro) pour la dépense fiscale plutôt que pour la dépense budgétaire peut s'expliquer pour des raisons d'efficacité, il est clair que l'affichage d'une norme de dépense contraignante peut conduire à faire passer certaines dépenses particulièrement dynamiques en prélèvements sur recettes ou en dépenses fiscales .

La création de nouveaux dispositifs sous la forme de débudgétisations, par la voie de l'affectation de recettes, ou de dépenses fiscales, permet d'éluder la norme de dépense à structure constante. Elle met également leurs bénéficiaires à l'« abri » de toute régulation budgétaire en cours d'exercice.

Même lorsque ces mesures sont prises en compte dans la charte de budgétisation annexée à l'exposé général du projet de loi de finances de l'année « n », elles ne sont approuvées par le Parlement qu'une seule fois : leur évolution ultérieure lui échappe.

b) Faire une « balance » entre les allègements de recettes et l'effort en matière de dépense

Dans ces conditions, il paraît utile à votre rapporteur général de mettre en rapport l'effort effectif qui pèse sur la dépense « budgétaire », défini comme celui qui permet d'atteindre le « - 1 % volume » par rapport à l'acquis du « 0 volume » 26 ( * ) avec le montant des allègements d'impôts prévus dans le présent projet de loi de finances, afin de mesurer l'action structurelle que mène le gouvernement en 2007 sur le budget de l'Etat.

Dans cette perspective, il apparaît que l'action structurelle que mènerait le gouvernement en 2007 est négative, de l'ordre de - 4 milliards d'euros.

En d'autres termes, malgré ses qualités, le présent projet de loi de finances ne parvient pas à gager ses allègements d'impôt (- 6,5 milliards d'euros) qu'à hauteur de 40 % par des réductions de dépenses.

Comparaison entre allègements d'impôt 2007 et effort sur la dépense

(en milliards d'euros)

Source : projet de loi de finances pour 2007

* 26 Le « 0 volume » laissait une marge de manoeuvre de 4,7 milliards d'euros. Le « - 1 % volume » ne donne une marge de manoeuvre que de 2,2 milliards d'euros à périmètre constant, soit un effort de réduction de al dépense par rapport à l'acquis du « 0 volume » de 2,5 milliards d'euros).

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