ARTICLE 42 bis (NOUVEAU)
Relèvement du plafond des annulations de dettes

Commentaire : le présent article a pour objet de porter de 11,1 milliards d'euros à 14,6 milliards d'euros le plafond autorisé pour la remise de dettes des pays les plus pauvres, dans la perspective des importants allègements devant intervenir en 2006 et 2007.

I. LES PLAFONDS SUCCESSIFS DE REMISES DE DETTE ACCORDÉES DANS LE CADRE DU CLUB DE PARIS

La France met en oeuvre des traitements de dette en faveur des pays les moins avancés et des pays à revenu intermédiaire dans le cadre multilatéral du Club de Paris , groupe informel de 19 pays créanciers créé en 1956, dont l'activité consiste à trouver des solutions coordonnées et durables aux difficultés de paiement de nations endettées, en particulier des pays en développement. Ces traitements peuvent, le cas échéant, comprendre des rééchelonnements et annulations de dette 89 ( * ) .

Ces traitements contribuent à rendre soutenable la dette extérieure de ces pays ou à leur permettre de faire face à des crises de liquidité extérieure temporaire. Ils participent également à la réduction de la pauvreté en permettant de dégager de nouvelles ressources pour le développement des pays concernés.

L'article 40 de la loi de finances rectificative pour 1988 n° 88-1193 du 29 décembre 1988 a traduit les conséquences du premier dispositif dit « termes de Toronto » 90 ( * ) en autorisant le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie à prendre les mesures nécessaires en vue de la remise de dettes au profit de certains pays en développement, dans la limite d'un plafond de 1.250 millions de francs, soit 190,6 millions d'euros.

Ce plafond a ensuite été augmenté lors de plusieurs lois de finances rectificatives , au gré des nouveaux dispositifs d'allègements de la dette. On mentionnera ainsi, pour mémoire, les « termes de Londres » décidés en décembre 1991, le traitement dit « de Naples » décidé en décembre 1994, l'initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE), approuvée lors du sommet du G7 qui s'est tenu à Lyon le 28 juin 1996, puis renforcée lors du sommet de Cologne de septembre 1999, et l'« approche d'Evian » formulée en juin 2003.

Outre ces traitements dans le cadre multilatéral du Club de Paris, qui sont conditionnés par la conclusion d'un accord entre chaque créancier et le Fonds monétaire international (FMI), la France a successivement mis en place plusieurs initiatives bilatérales et additionnelles d'allègement de la dette , tels que les dispositifs « Dakar I » et « Dakar II », décidés respectivement en mai 1989 et janvier 1994, ceux adoptés lors des sommets de La Baule en juin 1990 et de Libreville en septembre 1992, ou les « contrats de désendettement-développement » (C2D), qui constituent un volet additionnel à l'initiative PPTE, précitée. Le présent rapport apporte des précisions sur les modalités et le financement des traitements de la dette.

La chronologie des relèvements de plafonds depuis 1988 est ainsi la suivante :

Relèvements successifs du plafond de traitement concessionnel de la dette des pays pauvres

(en millions de francs puis en millions d'euros à compter de 1999)

Lois de finances

Relèvement

Plafond

LFR pour 1989

1.250

LFR pour 1990

+ 2.400

3.650

LFR pour 1991

+ 2.000

5.650

LFR pour 1993

+ 1.000

6.650

LFR pour 1994

+ 3.000

9.650

LFR pour 1995

+ 2.000

11.650

LFR pour 1996

+ 4.000

15.650

LFR pour 1999

+ 715

3.100

LFR pour 2001

+ 2.500

5.600

LFR pour 2004

+ 5.500

11.100

LFI pour 2007

+3.500

14.600

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

II. LES PERSPECTIVES JUSTIFIANT LE RELÈVEMENT DU PLAFOND

A l'initiative de notre collègue député Henri Emmanuelli, rapporteur spécial des crédits de la mission « Aide publique au développement », et avec l'avis favorable du gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté le présent article additionnel, tendant à relever de 3,5 milliards d'euros le plafond des allègements de dette autorisées par le Club de Paris, pour le porter à 14,6 milliards d'euros .

Les annulations de dette connaissent une hausse tendancielle du fait du traitement du « stock » de dette, après celui des échéances (intérêts et/ou principal). Le Club de Paris connaît ainsi aujourd'hui une activité importante , du fait de l'arrivée prochaine au « point d'achèvement » d'un certain nombre de pays pauvres très endettés, dans le cadre de l'initiative PPTE, et du traitement de la dette de l'Irak et du Nigeria.

A fin 2005, le plafond d'annulation était « consommé » à hauteur de 9,2 milliards d'euros . Il est anticipé que la mise en oeuvre des engagements de la France en matière d'annulation de dette conduira à des annulations pour des montants d'environ 2,83 milliards d'euros en 2006 et 2,05 milliards d'euros en 2007 . Les principaux pays concernés sont le Nigeria (en 2006 exclusivement), la République démocratique du Congo , le Cameroun , la Côte d'Ivoire et enfin l'Irak 91 ( * ) . Le relèvement du plafond a donc pour objet de faire face à ces engagements, réels ou potentiels.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Votre rapporteur spécial est favorable à cet important relèvement du plafond de remises de dette, considérant les engagements pris par la France et les justifications apportées sur les perspectives d'allègements en 2007. Il rappelle néanmoins que les annulations de dette peuvent constituer un préalable au développement des pays pauvres mais n'en sont pas le facteur déterminant.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 89 Depuis 1983, le montant total de dette couvert par ces accords s'élève à 509 milliards de dollars , dont près de 47  milliards de dollars en 2004 et 36 milliards de dollars en 2005. En dépit de cette forte activité, le Club de Paris est resté strictement informel . Bien que le Club de Paris n'ait pas d'existence légale ni de statuts, les accords suivent un certain nombre de principes et règles dont conviennent les pays créanciers.

* 90 Qui comportait pour la première fois une réduction d'une partie de la dette des pays pauvres, selon un niveau d'annulation défini établi à 33.33 % pour les dettes ne relevant pas de l'aide publique au développement. Vingt pays ont bénéficié des termes de Toronto entre 1988 et 1991, date à laquelle ces termes ont été remplacés par ceux de Londres.

* 91 Cf. le commentaire afférent à la mission « Prêts à des Etats étrangers » dans le présent rapport.

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